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THE INCOMK FROM
(Class of 1791.)
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A
/ Y' Y 3
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
DIX-SEPTIÈME ANNÉE
II
(Nouvelle Série. — Tome XVI)
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE
MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la Rédaction : M. A. Chuquet
DIX-SEPTIÈME ANNÉE
DEUXIÈME SEMESTRE
Nouvelle Série. — Tome XVI
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
de l'école des langues orientales vivantes, etc.
28 , RUE BONAPARTE, 28
1883
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ANNÉE 1883
TABLE DU DEUXIÈME SEMESTRE
ARTICLES
TABLE ALPHABÉTIQUE
art. pages
Adler, Le duc Guelfe VI et son fils. (A. Leroux.). 1 58 io 5
Albert, Les villas de Tibur sous Auguste. — Le culte de
Castor et de Pollux en Italie. (Emm. Fernique.). 247 465
Andresen, L’étymologie populaire en allemand. (H. Gai-
doz.)... 166 1 3 1
Anjou (comtes d’). 171 i 58
Annonces savantes de Francfort (les), de 1772, p. p.
W. Scherer. (A. C.). 193 232
Antoine, Etude sur le Simplicissimus de Grimmelshausen.
(C. J.). i 5 o 68
Arbois de Jubainville (d’), Essai d’un catalogue de la littéra¬
ture celtique. (J. Loth.). 204 309
Armand, Les médailleurs italiens des xv® et xvi 6 siècles.
(E. Mtintz.). 168 143
Asclépeion ( 1 ') d’Athènes, par P. Girard. 1 56 101
Aube (P), ses personnages remarquables et ceux de Troyes. 21 5 349
Aubertin, Choix de textes de l’ancien français du x e au
xvi* siècle. (A. Deiboulle). 210 333
Aubigné (Agrippa d’), étude par Réaume . 142 25
Baechtold, Edition de quatre poèmes critiques de Bodmer.
(A. C.). 193 232
Balleroy (la marquise de) et ses correspondants. (T. de L.). 218 36 1
Barthélémy (Ed. de), Les correspondants de la marquise de
Balleroy. (T. de L.). 218 36 1
Basville, sa correspondance inédite avec le duc de Maine,
p. p. Joret. (T. de L.). 1 65 129
Beaumarchais, Bibliographie de ses oeuvres par Cordier.
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VI
TABLE DES MATIÈRES
art. pages
(Em. Picot.). 246 448
Beck, De la synonymique chez les anciens. (Max Bonnet). . 241 441
Bernardin, Morceaux choisis des classiques français du
xvn e siècle. (A. Delboulle.). 23 i 403
Bernhardi (de), Frédéric le Grand, général. (C.). 195 245
Bijvanck, Spécimen d'un essai critique sur les œuvres de
Villon. (A. T.).. 216 357
Bodmer, quatre poèmes critiques, p. p. Baechtold. (A. C.) 193 232
Boguslawski (de), Vie du général Dumouriez. (A. C ). 187 210
Bordier, Peintures et autres ornements contenus dans les
manuscrits grecs de la Bibliothèque nationale. (C. Bayet.) 222 388
Bouché-Leclercq, Traduction de l’histoire de l'hellénisme
de Droysen. (R. Lallier.). 220 38 1
— Traduction de l’histoire grecque de E. Curtius, IV et V.
(R. Lallier.). 228 399
Boucher, Tableau de la littérature anglaise. (J. J. Jusse-
rand.). 141 21
Bougeault, Etude sur l'état mental et la mort de J. J. Rous¬
seau. (T.). 139 9
Bournànd, Histoire de l’art. (E. Mtintz.). 144 3 o
Bournet, Rome, études de littérature et d'art. (G. Lacour-
Gayet.)... 233 412
Brentano, Gustave Wasa, p. p. Minor. (A. C.). 193 232
Bulletin de la Société historique et ethnographique de la
Grèce. (Em. Legrand.). 2o5 3 10
Cabot (Jean et Sébastien) par Harrisse. (E. Beauvois.). ... 1 53 87
Carsalade du Pont, Documents sur la Fronde en Gasco¬
gne. 1 . 209 321
Castor et Pollux , leur culte en Italie. 267 465
Cato Major, de Cicéron, p. p. Rinn. (O. R.). 1 63 123
Cérisy, le registre de son officialité. 184 201
César j Commentaires p. p. Hôlder. (M. Bonnet.) . 197 263
Ceuleneer (de), Notice sur un diplôme militaire de Trajan.
(G. Lacour-Gayet.). 180 186
Charteris, La canonicité des livres du Nouveau Testament.
(M. N.). 174 172
Chastel, Histoire du christianisme. III. (M. N.). 162 121
Chéruel, Histoire de France sous le ministère de Mazarin.
III. (T. de L.). 172 159
Cicéron , Cato Major, p. p. Rinn. (O. R.). 1 63 123
Cock, Description de Madrid, p. p. Morel-Fatio et Villa. 212 337
Condorcet et Turgot , correspondance inédite p. p. Ch.
Henry. (A. Gazier.). 256 5 11
Cordier, Bibliographie des œuvres de Beaumarchais. (Em.
Picot.). 246 448
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TABLE DES MATIÈRES
Vil
-- r Jgt»
Corréàrd, Choix de textes pour servir à l’étude des institu¬
tions de la France. (J. Flammermont.). 160 no
Croiset (M.), Essai sur la vie et les œuvres de Lucien. (J. Ni¬
cole.). 196 261
Cukranîtisâna (le), p. p. G. Oppert. (A. Barth.).. . 190 221
Cürtiüs(E.), Histoire grecque, IV et V, traduction. 228 399
Daneau (Lambert), par de Félice. (O. Douen.). 147 49
Darmesteter (J.), Etudes iraniennes. (St. Guyard.). 169 i 53
Delavillb Le Roulx, Les archives de l’ordre de Saint-Jean
de Jérusalem. — Documents concernant les Templiers.
(A. de Barthélemy.). 217 358
Des Roberts, Campagnes de Charles IV, duc de Lorraine.
(T. de L.). 159 107
Dhammapada (Le), sa version septentrionale, p. p. Rockhill.
(L. Feer.). 173 169
Dillmann, Manuel exégélique de l’Ancien Testament. (J. Ha-
lévy.)
i w art. 198 267
2® art. 199 285
Dragatzi, Les théâtres du Pirée. (P. Girard.). 157 104
Droysen, Histoire de l’hellénisme. I. Traduction. 220 38 1
Dumourie\ (Vie de), par Boguslawski. (A.C) . 187 210
Dupont (G.), Le registre de l'officialité de Cérisy. (Elie Ber¬
ger.). 184 201
Dürr, Les voyages de l’empereur Hadrien. (G. Lacour-
Gayet.). 170 1 56
Elisabeth (la reine), ses projets de mariage. 207 3 18
Espinay (d’), les légendes des comtes d’Anjou. (P. Vioilet ). . 171 1 58
Fage, Lettres inédites de Baluze à Melon du Verdier.
(T. de L.). 255 5 06
Félick (de), Lambert Daneau. (O. Douen.). . . . . . 147 49
Firdusi, par H. Zimmern. (J. Darmesteter.). 248 470
Fischer (W.), Xiphilin, patriarche de Constantinople. (Ch.
Diehl.). 238 426
Fontaine, L’armée romaine. (G. Lacour-Gayet.). 254 5 o 5
Frédéric le Grand, général, par de Bernhardi. (C.). 195 245
Freymond, La rime riche dans la poésie française jusqu’au
commencement du xiv° siècle. (A. T.). 224 390
Fronde (la) en Gascogne, I, p. p. Carsaladedu Pont. . . . 209 321
Geiger (L.), Annuaire de Goethe. (A. C.). 2o3 3 oo
Gibb, Gudrun, Beowulf et Rolant. (J. Darmesteter.). . . . 248 470
Gilles le Muisit, poésies, p. p. Kervyn de Lettenhove.
(A. Delboulle.). 176 174
Girard (P.), L’Asclépéion d’Athènes. 1 56 101
Goethe (Annuaire de), p. p. L. Geiger. (A. C.). 2o3 3oo
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VIII TABLE DES MATIÈRES
trt. pages
Gœthe, Ephémérides et chants populaires p. p. E. Martin.
(A. C.). 19 3 232
Goloubinsky, Histoire de l'église russe. (L. Leger.). 182 189
Grammont (de), Un académicien captif à Alger. (C.). 253 497
Grefflinger de Ratisbonne. 1 38 9
Grimmelshausen et son Simplicissimus . i5o 68
Grucker, Histoire des doctrines littéraires et catholiques en
Allemagne. I. (C. J.). 167 137
Guide à l'exposition bibliographique de Budapest. (Em.
Picot.). 252 492
Hadrien (l'empereur) et ses voyages. 170 1 56
Haller, Journal p. p. Hirzel. (C.). 143 29
Haller, Recueil de proverbes espagnols antérieurs à Cer¬
vantes. (A. Morel-Fatio.). i 36 3
Harrisse, Jean et Sébastien Cabot. (E. Beauvois.). 1 53 87
Heiss, Les médailleurs de la Renaissance. (E. Müntz.). ... 168 143
HELviG(de), Von der Tann. (C.). 188 212
Henry, Correspondance inédite de Condorcet et de Turgot.
(A. Gazier.). 256 5 11
Herbert (Georges), Le Temple, p. p. Shorthouse. (J. Dar-
mesteter.). 245 446
Hirzel, Edition du Journal de Haller. (C.). 143 29
Hôlder, Edition des Commentaires de César. (Max Bon¬
net.) . 197 263
HtiBNER(de), Sixte-Quint. (R.). 181 188
Humbert, Jugement de l'Allemagne sur Molière. (C. J.) . • 161 111
Imprimerie (P) et la librairie dans la Haute-Marne et l'an¬
cien diocèse de Langres, par deux bibliophiles langrois.
(Em. Picot.). 232 405
Itinéraires à Jérusalem et descriptions de la Terre-Sainte,
p. p. Michelant et G. Raynaud. (A. M.). 25 1 488
Jackson, Liste provisoire de bibliographies géographiques
spéciales. (H. G.). 1 55 92
Jadart, La population de Reims et de son arrondissement;
— Table des travaux de l’Académie de Reims. (C.). . . . 206 3 16
Janin, Les imprimeurs et les libraires dans la Côte-d'Or.
(Em. Picot.). 219 371
Jansénistes (les) et Port-Royal. 140 10
Joachim du Bellay, Lettres, p. p. de Nolhac. (T. de L.). .137 6
Joret, Correspondance inédite du duc de Maine avec Bas-
ville. (T. de L.). 1 65 129
Joüon des Longrais, Edition du Discours de la prise du
château de Saint-Malo. (T. de L.). 192 229
Journal historique de littérature italienne , p. p. Graf, No-
vati, Renier, I. (C. J.). 202 298
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TABLE DES MATIERES
IX
Jung, La romanisation des provinces occidentales de l’em¬
pire romain. (C. Jullian.). 149 64
Jurien db la Graviêre, Les campagnes d’Alexandre, le drame
macédonien. (R. Lallier.). 236 423
Kervyn de Lettenhove, Poésies de Gilles le Muisit.(A. Del-
boulle.). 176 174
Kock, Etude sur la phonétique du vieux suédois. (F. de S.) 201 295
Koerting, Deux paraphrases religieuses de Pierre Cor¬
neille. 208 320
Kuntze, Prolégomènes de l’histoire romaine. (C. Jullian.) i35 1
La Ferrière (de), Les projets de mariage de la reine Elisa¬
beth. (T. de L.). 207 318
La Fontaine , I, p. p. Regnier. (T. de L.). 2 i 3 337
Lagarde (P. de), Le Sêpher Takhemôni. 227 397
La Rochefoucauld , Maximes, p. p. Pauly. (G. Raynaud.) 225 391
Lenormant, Traduction de la Genèse. (J. Halévy.). 199 290
Lescure (de), Rivarol et la société française pendant la Ré¬
volution et l’émigration. (M. Tourneux.). 177 176
Lipsius, Les légendes apocryphes des apôtres. (M. N.).... 179 186
Lossius, Les documents des Lagardie à T Université de Dor-
pat. (R.). 240 433
Lucien , Essai sur sa vie et ses œuvres. 196 261
Lyon, Les Minnesinger; — Rapports de Gœthe et de
Klopstock. (C.). 211 335
Mahrenholtz, Etudes sur Voltaire. (C. J.). 186 207
Maine (duc de), sa correspondance inédite avec Basville,
p. p. Joret. (T. de L.).. 1 65 129
Malte, l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, ses archives. . . 217 358
Martha (J.j, Les sacerdoces athéniens. (P. Decharme.). . . 146 45
Martin (E.), Edition des Ephémérides et chants populaires
de Gœthe. (A. C.). 193 232
Maxe-Werly, Collection des monuments épigraphiques du
Barrois. (C. Jullian.). 1 5 1 8c
Minor, Edition du Gustave Wasa de Brentano. (A. C.). . . 193 232
Molière et le jugement de l'Allemagne sur lui. (G. J.). . . . 161 111
Morel-Fatio et Villa, Description de Madrid par Cock. . . 212 337
Morfill, Histoire de la littérature slave. (L. Leger.). 226 3<)3
Nièse, Le développement de la poésie homérique. (P. Gi¬
rard.). 235 423
Nitiprakâçikâ (le), p. p. G. Oppert. (A. Barth.). 190 221
Nolhac (de), Lettres de Joachim du Bellay. (T. de L.). ... 137 6
Odyssée ( 1 ') et ses scholiastes, par Polak. (A. Jacob.). 191 227
CEttingen (d'), Grefflinger de Ratisbonne. (C.). 1 38 9 '
Oppert (G.), la Nîtiprakâçitâ et le Çûkranîtisâra. (A. Barth.) 190 221
Pauly, Edition des Maximes de La Rochefoucauld. (G. Ray-
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X
TABLE DES MATIÈRES
art. pages
naud.). 22b 391
Person (Léonce), Les papiers de Pierre Rotrou de Saudre-
ville. (T. de L.). 239 429
Pfitzner, Histoire des légions romaines depuis Auguste
jusqu’à Hadrien. (G. Lacour-Gayet.). 175 172
Phipson (Miss Emma), La faune du temps de Shakspeare.
(J. Darmesteter.). 23 o 401
Pierling, Rome et Moscou. 1547-1579. (L. Léger.). 1 85 206
Pigeonneau et de Foville, L’administration de l’agriculture
au contrôle général des finances. (Louis Bougier.). 194 241
Pirée (Les théâtres du). 157 104
Polak, L’Odyssée et ses scholiastes. (A. Jacob.). 191 227
Puységur , Mémoires, p, p. Tamizey de Larroque (A. C.) 154 90
Quintilien (Les déclamations de), par Ritter. (Le Coultre.) 221 384
Rayet (O.), Monuments de l’art antique. III et IV. (P. De-
charme.). 148 61
Réaume, Etude historique et littéraire sur Agrippa d’Aubi-
gné (T. de L.). 142 25
Reimann, La déclinaison des substantifs et des adjectifs dans
la langue d’oc jusqu'en i 3 oo. (Ant. Thomas.). 223 389
Reims, sa population ; — son Académie. 206 3 16
Ricard, Les premiers jansénistes et Port-Royal. (A. Gazier.) 140 10
Richthofen (de), Recherches sur l'histoire du droit frison.
I et II. (P. Viollet.). 243 444
Rinn, Edition du Cato Major de Cicéron. (O. R.). 1 63 123
Ritter, Les déclamations de Quintilien. (Le Coultre.). ... 221 384
Rivarol et la société française, par de Lescure. (M. Tour-
neux.). 177 176
Rockhill, La version septentrionale du Dhammapada.
(Léon Feer.). 173 169
Rockox (Nicolas), un ami de Rubens. 249 473
Roehl, Choix d’inscriptions grecques. (P. Girard.). 1 52 82
Roehricht, Petits textes historiques sur la cinquième croi¬
sade. (A. M.). 25 1 488
Rotrou (Pierre) de Saudreville, ses papiers, par L. Person.
(T. de L.). 239 429
Rousseau (J.-J.), son état mental et sa mort. 139 9
Ruelens, Nicolas Rockox. (T. de L.). 249 473
Saint-Malo (le château de) et sa prise. 192 229
Salem (l’abbaye de). 164 128
Salluste , Etudes par Uber. (I. U.). 200 294
Sanders, La construction en allemand. (A. B.). 234 414
Scherer (W.), Edition des Annonces savantes de Francfort
de 1772. (A. C.). 193 232
Schmidt (E.), Edition de l’Infanticide de H. L. Wagner.
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TABLE DES MATIÈRES Xl
art. pâgc»
(A. C.).. 193 * 3 *
Schrader, Les inscriptions cunéiformes de l'Ancien Testa¬
ment. (J. Halévy.). 145 41
Seeley, Le baron de Stein et son temps. I. (A. C.). 214 345
Sellar, La poésie romaine au siècle d’Auguste. (R. Lallier.) 229 400
Sépher Takhemôni (le), recueil de Juda Harizi, p p. P. de
Lagarde. (J. Halévy.). 227 397
Shorthouse, Edition du Temple de George Herbert. 245 446
Simplicissimus (le) de Grimmelshausen. (C. J.). 1 5 o 68
Sixte-Quint, par de Hübner. {R,). 181 188
Socard, Biographie des personnages remarquables de Troyes
et du département de l'Aube. I. (T. de L.). 2i5 349
Spohr, Le siège de Mézières. 189 21 5
Stein (Le baron de) et son temps, I, par Seeley. (A. C.). . . 214 345
Suphan, Gœthe et Spinoza, Règlement du club de Philadel¬
phie. (C. J.). 178 180
Tamizey de Larroqub, Edition des Mémoires de Puységur.
(A. C.). 154 90
Temple (le) de George Herbert, p. p. Shorthouse. (J. Dar-
mesteter.).. . 245 446
Templiers (documents concernant les). 217 338
Tibur (les villas de). 267 465
Tite Live, livres XXVI-XXX, p. p. Madvig et Ussing.
(O. R.). 25 o 485
Toblbr(L.), Chants populaires de la Suisse. (C J.). 1 83 191
U ber, Etudes sur Salluste. (I. U.) .. 200 294
Van Eys, Grammaire basque. (J. Vinson.). 237 425
Villon (Œuvres de), essai critique par Bijvanck. (A. T....) 216 357
Voltaire (Etudes sur), par Màhrenholtz. (C. J.). 186 207
Wagner (H. L.), l’Infanticide, p. p. E. Schmidt. (A. C.). . 193 232
Weech, Documents de l’abbaye de Salem. (R.). .. 164 128
Weidner, Le roman en prose de Joseph d’Arimathie.
(A. Thomas.). 242 442
Zimmermann, Les luttes de l’Eglise au xv e siècle. (R.). 244 445
Zimmern (H.), Firdusi. (J. Darmesteter.). 248 470
TABLE PAR ORDRE DE MATIÈRES
Langues et littératures orientales.
Çukramtisâra (le), p. p. G. Oppert. (A. Barth.). 190 221
Darmesteter (J.) t Etudes iraniennes. (St. Guyard.). 169 1 53
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XIX TABLE DES MATIERES
art. pages
DftLMANH; Manuel exégétique de l’Ancien Testament. (J. Ha-
lévy.)
i er art.. .. 198 267
2* art. 199 28$
Lbnormant, Traduction de la Genèse. (J. Halévy.). 199 290
Nitiprakâqikâ (le), p. p. G. Oppert. (A. Barth.). 190 221
Rockhill, La version septentrionale du Dhammapada.
(L. Feer.). 173 169
Schrader, Les inscriptions cunéiformes et l’Ancien Testa¬
ment. (J. Halévy.). 145 41
Sépher Takhemôni (le), recueil de Juda Harizi, p. p. P. de
Lagarde. (J. Halévy.). 227 397
Zimmern (H.), Firdusi. (J. Darmesteter.). 248 470 f
Langue et littérature grecques .
Bulletin de la Société historique et ethnographique de la
Grèce . (Em. Legrand ). 205 3 iô
Croiset(M.), Essai sur la vie et les œuvres de Lucien. (J. Ni¬
cole.). 196 261
Nièsb, Le développement de la poésie homérique. (P. pi-
rard.). 235 423
Polak, L’Odyssée et ses scholiastes. (A. Jacob.). 191 227
Roehl, Choix d’inscriptions grecques. (P. Girard.). i 52 82
Langue et littérature latines .
Beck, De la synonymique chez les anciens. (Max Bonnet.) 241 441
César y Commentaires p. p. Hôlder. (Max Bonnet.) .... 197 263
Cicéron, Cato Major, p. p. Rinn. (O. R.).. 1 63 123
Ritter, Les déclamations de Quintilien. (Le Coultre.). ... 221 384
Seller, La poésie romaine au siècle d’Auguste. (R. Lallier.) 229 400
Tiie*Live ; livres XXVI-XXX, p. p. Madvig et Ussing.
(O. R.). 25 o 485
U ber, Etudes sur Salluste. (I. LJ.). 200 294
Théologie et histoire de VEglise .
Charterts, La canonicité des livres du Nouveau Testament.
(M. N.). 174 172
Chastel, Histoire du christianisme. IIL (M. N.). 162 i2f *
Lipsius, Les légendes apocryphes des apôtres. (M. N.). . . . 179 186 1
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TABLE DBS MATIÈRES XIII
art pages
Histoire ancienne .
Albert, Les villas de Tibur sous Auguste. — Le culte de
Castor et de Pollux en Italie. (Emm. Fernique.). 267 465
Bouché-Leclercq, Traduction de l’Histoire de l'hellénisme
de Droysen. I. (R. Lallier.)... 220 38 1
— Traduction de l’Histoire grecque de E. Curtius, IV et V.
(R. Lallier.). 228 399
Ceuleneer (de), Notice sur un diplôme militaire de Trajan.
(G. Lacour-Gayet.). 180 186
Dragatzi, Les théâtres du Pirée. (P. Girard ). 157 104
Dûrr, Les voyages de l’empereur Hadrien. (G. Lacour-
Gayet.).... 170 1S6
Fontaine, L’armée romaine. (G. Lacour-Gayet.). 254 5 o 5
Girard (P.), L’Asclépéion d'Alhènes. 1 56 ioj
Jung, La romanisation des provinces occidentales de l’em¬
pire romain. (C. Jullian.). 149 64
Jurien de la Graviere, Les campagnes d’Alexandre, le drame
macédonien. (R. Lallier.). 236 423
Kuntze, Prolégomènes de l’histoire romaine. (C. Jullian.) 1 35 1
Martha (J.), Les sacerdoces athéniens. (P. Decharme.).... 146 45
Pfitzner, Histoire des légions romaines depuis Auguste jus¬
qu’à Hadrien. (G. Lacour-Gayet.). 175 173
Histoire du moyen âge.
Adler, Le duc Guelfe VI et son fils. (A. Leroux.). 1 58 io 5
Delaville Le Roulx, Les archives de l’ordre de Saint-Jean
de Jérusalem. — Documents concernant les Templiers.
(A. de Barthélemy.). 217 358
Dupont (G.), Le registre de l’officialité de Cérisy. (Elie Ber¬
ger.). 184 201
Espinay (d*), La légende des comtes d’Anjou. (P. Viollet.). . 171 1 58
Fischer (W.), Xiphilin, patriarche de Constantinople. (Ch.
Diehl.). 238 426
Itinéraires à Jérusalem et descriptions de la Terre-Sainte,
p. p. Michelant et G. Raynaud. (A. M.). 25 1 488
Roehricht, Petits textes historiques sur la cinquième croi¬
sade. (A. M.). 25 1 488
Werch, Documents sur l’abbaye de Salem. (R.). . .. 164 128
Zimmermann, Les luttes de l’Eglise au xv° siècle. (R.). 244 445
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XIV
TABLE DES MATIÈRES
«rt. pages
Histoire moderne .
Bbrnhardi (de), Frédéric le Grand, général. (C.). ig 5 245
Boguslawski (de), Vie de Dumouriez. (A. C.). 187 210
Chéruel, Histoire de France sous le ministère de Mazarin.
III. (T. de L.). 172 09
Corréard, Choix de textes pour servir à l’étude des institu¬
tions de la France. (J. Flammermont.). 160 no
Des Roberts, Campagnes de Charles IV, duc de Lorraine.
(T. de L.). 159 107
FéucE(de), Lambert Daneau. (O. Douen.). 147 49
Fronde (la) en Gascogne, I, p. p. Carsalade du Pont. 209 32 1
Goloubinsky, Histoire de l'église russe. (L. Leger.). 182 189
Gràmmont (de), Un académicien captif à Alger. (C.). 253 497
Harrisse, Jean et Sébastien Cabot. (E. Beauvois.). 1 53 87
HELViG(de), Von derTann. (C.). 188 212
Hübner (de), Sixte-Quint. (R.). 181 188
Jadart, La population de Reims et son arrondissement;
— Table des travaux de l’Académie de Reims. (C.). 206 3 16
Joüon des Longrais, Edition du Discours de la prise du châ¬
teau de Saint-Malo. (T. de L.). 192 229
La Ferrière (de), Les projets de mariage de la reine Elisa¬
beth. (T. de L.). 207 3 18
Lescure (de), Rivarol et la société française pendant la Ré¬
volution et l’émigration. (M. Tourneux.). 177 176
Lossius, Les documents des Lagardie à l'Université de Dor-
pat. (R.). 240 433
Maine (duc de), sa correspondance inédite avec Basville, p. p.
Joret. (T. de L.). 1 65 129
Morel-Fatio et Villa, Description de Madrid par Cock . . 212 337
Person (L.), Les papiers de Pierre Rotrou de Saudreville.
(T. de L.). 239 429
Pierling, Romeet Moscou. 1547-1579. (L. Leger.). 185 206
Pigeonneau et de Foville, L'administration de l'agriculture
au contrôle général des finances. (Louis Bougier.). 194 241
Puységur, Mémoires, p. p. Tamizey de Larroque. (A. C.). .154 90
Ruelens, Nicolas Rockox. (T. de L.). 249 473
Sceley, Le baron de Stein et son temps. I. (A. C.). 214 345
Socard, Biographie des personnages remarquables deTroyes
et du département de l’Aube. I. (T. de L.). 21 5 349
Spohr, Le siège de Mézières. 189 2i5
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TABLE DES MATIERES
XV
art. pagei
Littérature française du moyen âge .
Aubertin, Choix de textes de l’ancien français du x a au
xvi e siècle. (A. Delboulle.). 210 333
Bijvanck, Spécimen d'un essai critique sur les œuvres de
Villon. (A. T.). 216 35 7
Freymond, La rime riche dans la poésie française jusqu'au
commencement du xvi e siècle. (A. T.). 224 390
Gilles le Muisit, poésies p. p. Kervyn de Lbttenhove.
(A. Delboulle.). 176 174
Reimann, La déclinaison des substantifs et des adjectifs dans
la langue d’oc jusqu’en i 3 oo. (Ant. Thomas.). 223 389
Weidmer, Le roman en prose de Joseph d’Arimathie.
(A. Thomas.). 242 442
Liitérature française moderne .
Barthélemy (Ed. de), Les correspondants de la marquise de
Balleroy. (T. de L.). 218 361
Bernardin, Morceaux choisis des classiques français du
xvn e siècle. (A. Delboulle.). 23 1 403
Bougeaült, Etude sur l’état mental et la mort de J.-J. Rous¬
seau. (T.). 1 3 q 9
Condorcet et Turgot, Correspondance inédite p. p. Ch.
Henry. (A. Gazier.). 256 5 11
Fage, Lettres inédites de Baluze à Melon du Verdier.
(T. deL.). 255 5 o 6
Humbert, Jugement de l’Allemagne sur Molière. (C. J.). . . 161 111
Joachim du Bellay , Lettres p. p. de Nolhac. (T. de L.). . . 137 6
Koerting, Deux paraphrases religieuses de Pierre Cor¬
neille. 208 320
La Fontaine, p. p. Regnier. I. (T. de L.). 2 i 3 337
La Rochefoucauld, Maximes, p. p. Pauly. (G. Raynaud.) 225 391
Mahrenholtz, Etudes sur Voltaire. (C. J.). 186 207
Réaume, Etude historique et littéraire sur Agrippa d’Aubi-
gné. (T. de L.). 142 25
Ricard, Les premiers jansénistes et Port-Royal. (A. Ga¬
zier.). 140 10
Langues et littératures celtiques .
Arbois de Jubainville (d’), Essai d'un catalogue de la litté¬
rature celtique. (J. Loth.). 204 3 oq
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XVI
TABLE DES MATIERES
art
pages
Langue et littérature allemandes .
Andresen, L'étymologie populaire en allemand. (H. Gai-
doz.). 166 1 3 1
Annonces savantes de Francfort (les), de 1772, p. p.
W. SCHERER. (A. C.). ig 3 232
Antoine, Etude sur le Simplicissimus de Grimmelshausen.
(C. J.). i 5 o 68
Bodmer , Quatre poèmes critiques p. p. Baechtold. (A. C.) 193 232
Brentano, Gustave Wasa, p. p. Minor. (A. C.). 193 232
Gibb, Gudrun, Beowulf et Roland. (J. Darmesteter.).... 248 470
Goethe (Annuaire de), p. p. L. Geiger. (A. C.). 203 3 oo
Gœthe, Ephémérides et chants populaires, p. p. E. Martin.
(A. C.).. 193 232
Grucker, Histoire des doctrines littéraires et esthétiques en
Allemagne. (C. J.). 167 137
Haller, Journal, p. p. Hirzel. (C.). 143 29
Lyon, Les Minnesinger ; — Rapports de Gœthe et de
Klopstock. (C.). 211 335
Œttingen (d’), Grefflinger de Ratisbonne. (C.). 1 38 9
Sanders, La construction en allemand. (A. B.). 234 414
Suphan, Gœthe et Spinoza, Règlement du club de Philadel¬
phie. (C. J.). 178 180
Tobler (L.), Chants populaires de la Suisse. (C. J.). 1 83 191
Wagner (H. L.), L’Infanticide, p. p. E. Schmidt. (A. C.) 193 232
Langue et littérature anglaises .
Boucher, Tableau de la littérature anglaise. (J. J. Jusse-
rand.). 141 21
Herbert (Georges), Le Temple, p. p. Shorthouse. (J. Dar¬
mesteter.). 245 446
Phipson (Miss Emma), La faune du temps de Shakspeare.
(J. Darmesteter.). 23 o 401
e
Langue et littérature espagnoles .
Haller, Recueil de proverbes espagnols antérieurs à Cer¬
vantes. (A. Morel-Fatio.) . i 36 3
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TABLE DES MATIÈRES
XVII
art. page*
Langue et littérature italiennes.
Journal historique de littérature italienne , p. p. Graf, No-
vati, Renier. I. (C. J.) . 202 298
Langue et littérature slaves.
Morfill, Histoire de la littérature slave. (L. Leger.). 226 393
Langue basque.
Van Eys, Grammaire basque. (J. Vinson.).. 237 425
Linguistique.
Kock, Etudes sur la phonétique du vieux suédois. (F. de S.) 201 295
Art et archéologie .
Armand, Les médailleurs italiens des xiv e et xvi e siècles.
(E. Müntz.). 168 143
Bournand, Histoire de l’art. (E. Müntz.). 144 3o
Bournet, Rome, études de littérature et d'art. (G. Lacour-
Gayet.). 233 412
Bordier, Peintures et autres ornements contenus dans les
manuscrits grecs de la Bibliothèque nationale. (C. Bayet.) 222 388
Heiss, Les médailleurs de la Renaissance. (E. Müntz.) . . . 168 143
Maxe-Werly, Collection des monuments épigraphiques du
Barrois. (C. Jullian). i 5 i 81
Rayet (O.), Monuments de l'art antique. (P. Decharme.). . 148 61
Droit .
Richthofen (de), Recherches sur l’histoire du droit frison.
I et IL (P. Viollet.)... 243 444
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xvm
table des matières
art
page*
Bibliographie.
Cordier, Bibliographie des œuvres de Beaumarchais. (Em.
Picot.). 246 448
Guide à l'exposition universelle de Budapest. (Em. Picot.) 252 492
Imprimerie ( 1 ’) et la librairie dans la Haute-Marne et l’an¬
cien diocèse de Langres, par deux bibliophiles langrois.
(Em. Picot.). 2Z2 405
Jackson, Liste provisoire de bibliographies géographiques
spéciales. (H. G.). 1 55 92
Jànin, Les imprimeurs et les libraires dans la Côte-d'Or.
(Em. Picot.). 219 371
Chronique.
Adams, Trad. de la grammaire pâle de Minayeff. 400
Archiv für lateinische Lexicographie und Grammatik . . . 99
Arènes (les) de la rue Monge. 114, 134
Barbier de Meynard, Supplément aux dictionnaires turcs. 517
Bonet-Maury, Lempereur Akbar, I. Trad. de l’ouvrage du
comte de Noer. 415
Bouteiller (Ed. de). 16
Bulletin de correspondance africaine. 476
Canello (not. nécrol.). 119
Cayx de Saint-Aymoür, Les pays sud-slaves de l’Autiiche-
Hongrie. 5 o2
Chuquet (A.), Le général Chanzy. 478
— Edition de la campagne de France, de Gœthe. 5 18
Clermont-Ganneau, Epigraphies hébraïques et grecques sur
des ossuaires juifs inédits. 114
— Les manuscrits du British Muséum.. . 196
Commission historique de Bade . 18
Condamin, Croquis artistiques et littéraires. 114
Congrès des américanistes à Copenhague. 378
Congrès des orientalistes, à Leyde. 199, 2 58
Congrès des sociétés savantes à la Sorbonne en 1884. 280
Cordier, Le consulat de France à Hué sous la Restaura¬
tion. 478
— Le conflit entre la France et la Chine. 519
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table des MATIÈRES XIX
pages
Defrémery( not. nécrol.). 257
Deusle, Choix des documents géographiques conservés à la
Bibliothèque nationale. 166
Fage, Le château de Puy-de-Val. 41 5
Favier, Coup d'œil sur les bibliothèques des couvents du
district de Nancy pendant la Révolution. 327
Fouillée, Critique des systèmes de morale contemporaine. 436
Franke, Die praktische Spracherlernung. 322
Fredericq, L’enseignement supérieur de l’histoire à Paris. 168
Gasté, Les noëls et vaudevires du manuscrit de Jehan Poré. 353
Gilles de la Tourette, Théophraste Renaudot. 477
Guyard (St.), Géographie d’Aboulfeda. 219
H ar risse, Christophe Colomb et la Corse. 77
Hémon, Horace et le Menteur de Corneille . 77
Henry, Les connaissances mathématiques de Jacques Casa¬
nova de Seingalt. 477
Hirschfeld, Gallische Studien. 98
Hornung, Les races de la Suisse au point de vue historique
et juridique. 329
Inscriptions latines d’Algérie et de Tunisie. 1 3
Kohler (J.), Contributions à l’histoire du droit privé ger¬
manique. 1. 184
LaCroix (P. de), Lettre à M. Marius Vachon. 479
Laprade (de), not. nécrol. 52 1
Lenormant not. nécrol. 52 1
Mangold, Articles sur Molière. 18
Martin (H.), not. nécrol. 52 1
Meyer (G.), Quatorze contes albanais. 17
Michel (Em.), Le musée de Cologne. 520
Mills, travail sur les Gâthas. 438
Mohammed Elthafi Hussein Ali, Texte persan du Sefer Na-
meh. .. 5 oi
Müllkr (W.), Histoire politique du présent. 1882. 328
Müntz (E.), Les fabriques de tapisseries de Nancy. 307
Notice historique sur l’Ecole spéciale des langues orientales
vivantes. 3 o 6
Omont, Inventaire des manuscrits grecs. 307
Person, Le culte des grands hommes. 1 83
— Les papiers de Pierre Rotrou de Saudreville. 394
Reynald not. nécrol.. . 117
Ristelhuber, Biographies alsaciennes. 436
Ritter (Eug.), Les recherches généalogiques à Genève. ... 79
Robert (Ch.), La prétendue restauration du pouvoir de
Maurice Tibère dans la Province. 517
Roy (J.), Etudes sur l’Autriche, le Kahlenberg, notes de
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XX
TABLE DES MATIÈRES
page»
voyage et d’histoire. 327
Schaefer (Arnold). 482
Schefer, Chrestomathie persane. I. 41 5
Société historique de la Hanse . 17
Tamizey de Larroque, La marquise de Flamarens. i 5
— Armand de Pontac, évêque de Bazas. 435
— Jules Pacius de Beriga. 5 18
Thorsen (not. nécrol.). 19
Vernes, Trad. de Kuenen : Religion nationale et religion
universelle. 5 oi
Zotenberg, Catalogue des manuscrits arabes de la Biblio¬
thèque nationale. 4*5
Correspondance.
Lettre de M. Chassang. 56
Lettre de M. Maurice Croiset et réponse de M. Nicole. . . . 499
Thèses de doctorat.
Albert (M.), Les villas de Tibur au siècle d'Auguste. — Le
culte de Castor et de Pollux. 255
Duméril, L’œuvre législative de Marc-Aurèle. — Lord
Erskine. 33
Duruy (G.), La trêve de Vaucelles. — Le cardinal Carlo
Caraffa... 147
Etienne, Les suffixes diminutifs en français. — La vie de
saint Thomas le martyr par Garnier de Pont-Saint-Saint-
Maxence. 162
Henry, Varron et l'analogie. — Etude sur l’analogie en gé¬
néral . g 3
Variétés.
Chuquet, Thorencetnon Thorane. 21 5
— Le suicide d'un soldat français après la capitulation de
Verdun. 322
Clermont-Ganneau, Notes d’archéologie orientale. IV. Ste-
phaton, l’homme à l’éponge de la crucifixion, et les deux
larrons Gestas et Dysmas. 145
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TABLE DES MATIERES
XXI
.>ages
— V. Découvertes à Emmaüs-Nicopolis; — VI, patène
du mont des Oliviers; — VII, les deux larrons. 192
Dklboulle, Quelques notes sur l’édition de La Fontaine. .. 5 1 5
Destrem, Document sur le mouvement populaire du 14 juil¬
let 1789 et sur le meurtre de Foulon et de Berthier. . . . 273
Halévy, Les inscriptions du Safa. 12
Havbt (L.), Un manuscrit de Pline le Jeune. 25 1
Joret (Ch.), Le jasmin d’Espagne. 5 12
Jullian, A propos des lettres de Bossuet à Leibniz. 352
Lacour-Gayet, L’auberge de l’Ours à Rome. 459
Léger (L.), Les manuscrits slaves de la Bibliothèque de
l’Université de Leyde... 375
Tamizey de Larroque, L’Estoile et Jodelle. 457
Sociétés savantes.
Académie des Inscriptions et Belles-Lettres . (Julien Havet.)
Séances des 22 et 29 juin, 6, 1 3 , 20 et 27 juillet, 3 , 10, 17, 24 et
3 i août, 7, 14, 21 et 28 septembre, 5 , 12, 19 et 26 octobre, 2, 9, 16,
23 et 3 o novembre, 7 et 14 décembre 1 883 .
Pages 20, 39, 6o, 80, 99, 119, 1 36 , 219, 239, 259, 283, 307, 33 1, 355 ,
38 o, 396, 420, 460, 483, 504, 524.
Société nationale des antiquaires de France • (Eug. Müntz.)
Séances des 20 et 27 juin, 4, 11 et 18 juillet, séance des vacances, 7, 14,
21 et 28 novembre, 5 décembre 1 883 .
Pages 40, 6o, 80, 100, 120, 240, 440, 484, 504, 524.
Société asiatique .
Séance du 12 octobre i 883 .
Page 332 .
PÉRIODIQUES
ANALYSÉS SUR LA COUVERTURE
Allemands.
Archiv für stavische Philologie, VII, 1, 2. N 0i 28, 42.
Deutsche Literatur\eitung , n° 24, 16 juin; n° 48, i w décembre i883 :
N” 27, 28. 3 o, 3i, 3 a, 33, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 4 5,
46, 47, 48, 49, 5o, 5 i.
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XXII TABLE des matières
Gôttingische gelehrte An\eigen, n° 25 , 20 juin; n° 5o, 12 décem¬
bre i 883 :
N'* 27, 29, 32 , 34, 36 , 3 7, 38 , 39, 41, 42, 46, 48, 5 o, 52 .
Literarisches Centralblatt, n° 25 , 16 juin; n r 49, 1"décembre 188 3 :
N°* 27, 28, 3 o, 3 1, 32 , 33 , 34, 35 , 36 , 37, 38 , 39, 40, 41, 42, 43, 44,
45,46, 47, 48, 49, 5 o, 5 i.
Theologische Literatur\eitung, n® 12, 16 juin; n® 23 , 17 novem¬
bre i 883 :
N»® 27, 33 , 37, 39, 41, 45, 47, 48.
Anglais.
The Academy, n® 58 o, 16 juin ; n® 6 o 5 , 8 décembre i 883 :
N®* 27, 28, 29, 3 o, 3 1, 32 , 33 , 34, 35 , 36 , 37, 38 , 39, 40, 41, 42, 43,
44, 45,46,47, 48,49» 5 o, 5 1, 52 .
The Athenaeum, n® 2,903, 16 juin; n® 2,928, 8 décembre i 883 :
N°* 27, 28, 29, 3 o, 3 1, 32 , 33 , 34, 35 , 36 , 37, 38 , 39,40,41,42,
43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 5 o, 5 i, 52 .
Belges.
Athenaeum belge, n® 6, i 5 juin ; n® 1 f, i 5 novembre 188 3
N°* 3 i, 37, 39, 49.
Revue de l’instruction publique en Belgique, XXVI, 3 :
N°* 28, 41.
LE PUY, IMPRIMERIE MARCHESSOU FILS, BOULEVARD SAINT-LAURENT, 23.
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261883
N s 27 Dix-septième année 2 Juillet 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
de MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqukt
Prix d’abonnement :
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 2S fr.
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
db l'école des langues orientales vivantes, etc
28, RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqukt
(A u bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
CURTIUS-DROYSEN
HISTOIRE GRECQUE
TRADUCTION BOUCHÉ-LECLERCQ
I. HISTOIRE GRECQUE DE CURTIUS. 5 vol. in- 8 . 37 5 o
II. HISTOIRE D’ALEXANDRE ET DE SES SUCCES¬
SEURS. Tome 1. 10 »
HJ Les tomes II et III en cours de publication
par fascicules. i 25
III. ATLAS POUR L’HISTOIRE GRECQUE. In-8. 12 »
L'Atlas paraîtra vers le i 5 juillet .
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PÉRIODIQUES
The Academv, n° 58 o, 16 juin i 883 : Besant, Thelife and achievements
of Edward Henry Palmer. (Middleton : courte biographie qui offre une
peinture vivante de l’existence et des œuvres de Palmer, style agréable
et vigoureux, livre qu’on lira avec autant de plaisir que d’intérêt.) —
Charles Roach Smith, Retrospections, social and archaeological,
vol. I. (Peacock.) — Marvin, The Russians at Merv and Herat, and
their power of invading India (Keane). — Journey to Parnassus, com-
posed by Miguel de Cervantes Saavedra, translatée! by Gibson (W. Web¬
ster : texte espagnol avec une excellente traduction anglaise en regard).
— W. Stephens, A memoir of the right hon. William Page Howe,
baron Hatherley. (Leach.) — Phil. Robinson, Saints and sinners, a
tour across the States and round them, with three months among the
Mormons, — Shropshire Folk-Lore, part. I, edited by Charlotte S.
Burne. — A siamese bestiary (Frankfurter). — The universality of
consciousness. (Owen.) — The new édition of « Liddell and Scott »
(Keene). — Hüll, Contributions to the physical history of the british
isles, with a dissertation on the origin of Western Europe a. of the
Atlantic. Océan. (Rudler.) — The arabic element in modem persian.
(Houtum-Schindler.) — Watkin, Roman Lancashire or a description of
roman remains in the County Palatine of Lancaster.
The Athenaeum, n° 2903, 16 juin 1 883 : Hare, Cities of Southern Italy
and Sicily. — Sidgwick, The principles of political economy. — The
chronicle of James I, King of Aragon, translated by the late John For-
ster, with an historical introd., notes, etc., by Pascual de Gayangos
(M. de Gayangos a rendu un réel service aux lettres en terminant et
publiant la traduction de la chronique commencée par feu John For-
ster). — Wills, In the land of the lion and sun, or modem Persia. —
Emily Bronte (Alg. Ch. Swinburne). — A reply. (Pinches.) — The
« Dictionary of national biography » (Liste des noms de Baruch à
Beechey).
Literarisches Centralblatt, n° 25 , 16 juin 1 883 : Zittel, Dr. Martin Lu¬
ther von 1483-1517, ein Beitrag zu einem wirklichen Volksbuche liber
Luther’s Leben u. Schriften (Ce n’est pas un livre, mais une brochure
sur la façon dont il faudrait faire une biographie de Luther, et rendre
les écrits du réformateur accessibles au grand public). — Eyssenhardt,
Hadrian und Florus (Petit livre amusant, où il y a quelques détails
nouveaux). — Bachmann, Die Wiedervereinigung der Lausitz mit Bôh-
men. 1462.— Gindely, Geschichte des dreissijâhrigen Krieges. III. Der
schwedische Krieg seit Gustav Adolfs Tode u. der schwedisch-franzô-
sisete Krieg bis zum westfàlischea Frieden. 1632-1648 (Voici les points
nouveaux : « i° Le plan de Gustave, de fonder sa domination dans l’in¬
térieur de l’Allemagne, date de peu de temps après la bataille de Brei-
tenfeld, lorsqu'il se fit prêter hommage « dans son duché de Franco-
nie », commença à devenir orgueilleux et à mépriser les ponts à l’aide
desquels il avait atteint sa hauteur vertigineuse, ne voulut pas entendre
parler de paix et prit une attitude hostile envers les électeurs protestants^
si bien que le Saxon ne savait plus de quoi il devait se garder davan¬
tage : de l’ambition du roi ou de la tyrannie de l'Edit de restitution ;
2 0 après Breitenfeld un inconnu fit, par l’intermédiaire du capucin Qui-
roga, l’offre au roi d’Espagne d’assassiner Gustave; 3 ° Magdebourg, dit
Gindely avec Wittich, n’a pas été brûlé par les soldats de Tilly, mais
{ >ar les habitants de Magdebourg, qui voulurent dépasser l’exemple de
a Rochelle, et il est vraisemblable que Falckenberg prépara la catastro¬
phe; 4 0 Gindely se décide, d’après des documents qu’il ne publie pas en-
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
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- 2 Juillet -
1883
Sommaires 1 35 . Kuntzb, Prolégomènes de l’histoire romaine. — i 36 . Haller,
Recueil de proverbes espagnols antérieurs à Cervantes.— 137. Lettres de Joachim
du Bellay, p. p. P. de Nolhac. — i 38 . d’ŒrriNGEN, Grefflinger de Ratisbonne.
139. Bougeault, Etude sur l’état mental et la mort de J. J. Rousseau. — 140. Ri¬
card, Les premiers jansénistes et Port Royal. — Variétés : Halévy, Les inscrip¬
tions du Safa. — Chronique. — Académie des Inscriptions.
1 35 . — D r J.-E. Kuntze, Prolegomena sur Geaclilctite Romi. 1 vol.
Leipzig, Hinrichs, 1882, in-8 de iv-224 p., 4 planches.
M. Kuntze n’est pas le premier venu. Professeur ordinaire à l’Uni¬
versité de Leipzig, doyen de la faculté de droit, il a publié deux livres
sur le droit romain, où il y a de fort bonnes choses, et qui sont très
utiles aux commençants C’est un maître très consciencieux, très actif;
il consacre quatorze heures par semaine à son enseignement; il connaît
à fond l’antiquité, la littérature scientifique moderne, au moins la litté¬
rature allemande. Mais M. K. était déjà trop porté à abstraire, à géné¬
raliser : il aimait à diviser l’histoire en périodes bien tranchées, à donner
par un seul mot « la caractéristique » de chaque période dans les diffé¬
rents ordres de fait 2 . Plus réservé autrefois, il ne sait plus opposer de
résistance à cette tentation, il s'y livre avec la dernière complaisance.
De là est né un livre à la confection duquel l’imagination a eu la plus
belle part. Non pas que M. K. fasse revivre le passé d'un peuple : ce
n’est pas un peintre, mais un géomètre, un architecte; j’entends un ar¬
chitecte qui restituerait un monument sans en dessiner, sans en mesurer
les ruines. Nous devons donc nous borner à analyser ce livre. Toute
critique est inutile.
Prenant les Italiens à leur point de départ, en orient, l'auteur les suit,
étape par étape — « quel admirable spectacle qu’un peuple en voyage » !
1. Cursus des rœmischen Rechts , 2° éd., Leipzig, in-8, 1879; Excurse über rœ -
misches Recht, 2 e éd., Leipzig, 1880.
2. Voici une des plus curieuses ( Excurse , p. 5 g) : L’empire romain (640 av. J.-C,
— 365 ap.) se divise en tr<
Temps national romain :
640-250.
Rome et Italie.
Culte national.
Monnaie de cuivre.
Colonies.
Patriciens et plébéiens.
Etc., etc.
Nouvelle série, X
» grandes périodes :
Temps moderne romain :
25 o- 25 o.
Italie et Méditerranée.
Eclectisme hellénistique.
Monnayage d’argent.
Provinces.
Romains et pérégrins.
Temps post-classique: 2 5 o-
565 .
Occident et orient.
Christianisme.
Or courant.
Diocèse.
Milites et privati .
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2
REVUE CRITIQUE
— jusqu'au moment où les Latins s'établissent « dans cette partie de la
Campagna où ils durent reconnaître la table d’harmonie du monde in¬
térieur qu'ils portaient dans leur poitrine et qu'ils avaient conservé dans
leur migration, et auquel ils allaient ici donner son développement
classique ». Cette civilisation qui allait se construire devait avoir pour
caractère l’unité, la simplicité, la symétrie,la continuité. — A Rome le
culte, comme l'organisation religieuse, est double. D'un côté, la divina¬
tion, les oracles, l’homme en rapport avec les dieux, recevant leurs inspi¬
rations ; de l’autre, les auspices, l’homme contemplant la nature, l’inter¬
prétant. D’un côté, les collèges des prêtres, ayant à leur tête le souverain
pontife, formant une église séparée de l'état, « une monarchie au milieu
ou plutôt à côté d'une république » ; de l’autre, les augures, hommes
privés, experts à la disposition des magistrats. — Sur le sol dont ils ont
pris possession, les Romains tracent des limites (nullement arbitraires
d’ailleurs) en-deçà desquelles ils doivent prendre les auspices, la surface
ainsi délimitée est le templum (templum in terra) : « Le templum, c'est
une portion de l’infini séparée de l’infini ». La maison est un temple
(Das Haus-Templum), comme le camp (Das Lager-Templum). Le camp
est l'intermédiaire entre la maison et la ville (Das Stadt-Templum).
Rome est construite comme un camp, étant une colonie : elle a son
cardo, qui est la Voie sacrée, elle a son decumanus maximus, qui va du
Vélabre à la porte Esquiline. Le territoire romain est limité, orienté,
comme un espace augurai: c’est un temple (Das Bau-Templum). — Dans
cette ville, dans ce territoire, s'est organisée la royauté. Le roi est un ma¬
gistrat, la royauté est une magistrature à vie \ Nous sommes en réalité
dans une république : Romulus créa les comices, organe fondamental
du peuple ; sous Numa, le premier chef élu, furent fixés les rapports du
pouvoir exécutif avec les comices; Tullus fit du sénat un conseil, le
pouvoir pondérant par excellence. Avec son successeur commence la
série des tyrans, qqi répond merveilleusement à la première série des
usurpateurs : Ancus, c'est Sylla; Tarquin, César; Servius, Auguste; le
Superbe, Tibère. La république tend à devenir une monarchie. Mais
Rome et monarchie sont deux concepts contradictoires. Avec l’expulsion
des Tarquins, l'idée républicaine est sauvée.
Dans ce voyage à travers l’inconnu des civilisations primitives, M. K.
est préoccupé d'une idée fixe : retrouver le rôle qu’y ont joué les premiers
x. Nous sommes heureux de signaler, au milieu d’un nombre infini de fantaisies
philologiques et historiques, une idée, sinon indiscutable, du moins qui mérite
d’être discutée. Potestas et imperium désignent deux choses différentes. Si la distinc¬
tion qu’il faut faire entre les deux termes nous échappe, il est impossible, comme
on le répète, que dès l’origine ils fussent parfaitement synonymes. Mais, pourquoi
M. K., après avoir cité de bonnes preuves dans ses Excurse , pp. 71-75, revient-il
sur ce sujet pour le traiter avec infiniment plus de précision que de raison? Il place
d’un côté : potestas , creaiio, auspicium , oga prœtexta, pvaecones; de l’autre :
imperium , lex curiata , consilium, fasces , lictores.
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d’hISTOIRB ET DR LITTÉRATURE
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nombres. Son livre est un modèle de pythagoréisme appliqué à l’his¬
toire romaine. M. K. ne le dissimule pas : « Il y des nombres fonda¬
mentaux dans la civilisation; de certains nombres dominent tout le
monde antique ». Le nombre important, semble-t-il, dans l’histoire ro¬
maine, est le nombre quatre, surtout pris dans sa représentation géomé¬
trique, le carré : « Le carré est la figure favorite des Romains ». Le
temple, la maison et ses parties, le camp et ses divisions formaient des
carrés; on connaît la Roma quadrata. Rome, Albe, Lavinium, Ostie
sont les coins d’un carré qui est le territoire romain, le Latium, le Bau -
Tentplum. Si on tire une ligne du Nil à la Maurétanie et de l’Euphrate
à la Tamise, on a un rectangle, formé de deux carrés. « Le carré est
l’expression géographique de l'être romain », c’est « la figure bénie » des
Latins. Elle est le symbole de leur histoire : c’est la figure de la force,
de l’énergie : « Le carré, c’est la décision et la détermination de la vo¬
lonté au milieu de l'indécision et de l'infini du monde ». La tour de
Babel reposait sur des fondements carrés ; carrées sont les substructions
des pyramides; Napoléon disait : Je suis un homme carré.
M. Kuntze dit dans sa préface : « Une introduction n'a pas de preuves
à fournir. Beaucoup la jugeront inutile, en tant que complètement hy¬
pothétique ». C’est aussi notre avis. Ceci n’est ni un livre d’histoire ni
un livre de philosophie de l’histoire. C'est, d’un bout jusqu’à l’autre,
un livre d’imagination, ou, plutôt, de haute fantaisie.
Camille Julljan.
1 36. — AlUpanltche Rprlchwœrter and •prlchrvœrtllehe Redeniar-
len nu» cl en Zelten vor Cervantc», in’s Deutsche übersetzt, în spanischer
und deutscher Sprache erœrtert, und verglichen mit den entsprechenden der
alten Griechen und Rœmer, der Lateiner der spæteren Zeiten, der sæmmtlichen
germanischen und romanischen Voelker und einer Anzahl der Basken, endlich
mit sachlichen, sprachlichen, geschichtlichen, literarhistorischen, biographischen,
geographischen und topographischen Erlœuterungen versehen, nebst Vorwort,
Einleitung, Index und einem kleinen Anhang, von D r Joseph Haller. Erster
Theil. Regensburg. G. J. Manz. i883.xxxii et 652 p. gr. in-8 à deux col.
La richesse en proverbes et locutions proverbiales de l’espagnol est
bien connue et a été souvent signalée. « Orientales proverbia habent
mira et Arabes etiam, in quibus supplenda sunt aliqua. Hispani habent
prœstantissima, » a dit notre grand Joseph Scaliger; aussi la publica¬
tion d’un recueil général de proverbes espagnols mérite-t-elle d’attirer
l'attention des érudits et des lettrés et ne peut-elle manquer d'être favo¬
rablement accueillie, si toutefois elle se présente dans les conditions
qu’on a aujourd'hui le droit â’exiger de celui qui l'entreprend. L’ou¬
vrage de M. Joseph Haller, dont on vient de lire le très ample titre et
dont le premier volume seul a paru, répond-il entièrement à l’idée qu’il
est permis de se former d’une telle entreprise? Nous ne voudrions pas
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REVUE CRITIQUE
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l’affirmer. Le livre pèche par le plan et par l’exécution. Pourquoi, en
premier lieu, cette restriction « aux temps antérieurs à Cervantes »? De
ce que le Don Quichote renferme beaucoup de proverbes, il ne s’en suit
pourtant pas que l’importance de ce roman en matière parémiologique
soit telle que de sa publication date une phase nouvelle de l’histoire des
proverbes espagnols; presque tous les proverbes employés par Cervan¬
tes avaient été avant lui consignés dans diverses collections; il n’a guère
eu d’autre mérite que d’avoir su les y prendre et de leur avoir donné
par de fort heureuses applications une popularité dont ils n’avaient pas
joui jusqu’alors. Cette restriction, annoncée sur le titre, n’avait donc
pas de raison d etre. M. H. d'ailleurs, lorsqu’il en a été au fait et au
prendre, s est écarté de la norme qu’il avait en principe adoptée ; il a
souvent emprunté à Cervantes lui-même et à des recueils postérieurs à
Cervantes des variantes d’un bon nombre de proverbes. A s’en tenir en¬
suite au titre de l’ouvrage, on croirait volontiers que l’auteur s’est efforcé
de réunir dans les textes de la littérature espagnole, antérieurs au grand
écrivain du xvn® siècle, tout ce qui pouvait servir à ses fins, et de dé¬
pouiller la plume à la main les livres espagnols du xiii® au xvi° siècle,
où il était à présumer qu’il rencontrerait des proverbes. Il n'a point fait
cela. Prenant pour base de son recueil le Libro de refranes de Mossen
Pedro Vallès, imprimé à Saragosse en 1549, il a transcrit sur une co¬
lonne 1 es refranes tels qu’il les trouvait dans ce précieux volume, en
les faisant suivre de variantes espagnoles empruntées pour la plupart au
dictionnaire de l’Académie espagnole et à la collection de Hieronimo
Martin Caro y Cejudo, imprimée pour la première fois en 1675, puis de
proverbes correspondants pour la forme et le sens des langues grecque,
latine, basque, Scandinaves, germaniques et romanes; dans la seconde
colonne, en regard, M. H. traduit en allemand tout ce qu'il donne dans
la première, textes et commentaires. Pourquoi avoir pris pour unique
point de départ le Libro de refranes de Vallès? Nous ne nous l’expli¬
quons pas. A coup sûr, cette compilation-là est fort précieuse ; c’est l’une
des plus anciennes et des plus riches qu'on possède en Espagne; mais
cela ne suffit point, et, dans un travail de la nature de celui qui nous
occupe, l’important, semble-t-il, était de mettre au premier rang, en
vedette, la version qu’on peut estimer la plus ancienne, ou, tout au
moins, celle qui semble la plus simple, la plus intelligible, et de donner
à la suite toutes les variantes qu’on réussit à se procurer. Pedro Vallès
n’a pas eu plus qu’un autre le monopole de la correction et de l’exacti¬
tude; bien des proverbes, plus ou moins défigurés dans son livre, se re¬
trouvent ailleurs correctement transcrits. Il faut encore reprocher à
M. H. de n’avoir pas indiqué les sources des variantes en langues mo¬
dernes, il ne donne de renvois bibliographiques que pour le grec et le
latin. Voilà pour le plan, l’économie du livre.
En ce qui concerne maintenant la traduction et le commentaire des
proverbes, nous trouverions bien des réserves à faire, bien des critiques
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DHISIOIRK KT I)E LITTÉRATURE
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â présenter. M. H. s'est parfois assez gravement mépris sur le sens de
certains mots. Voici deux exemple. Dans Aca lo ha marta con sus polios
(n° 16), le traducteur prend marta pour le nom commun « la martre »,
alors qu’il est bien évident qu’il s’agit ici du nom propre Marthe,
quoiqu’en puisse dire l’Académie Espagnole. — Le proverbe Ay dedo,
dedo, en la cama estoy\y en la calle hiedo (n° 365 ) est traduit : « Ach
woher, woher (kommtes doch) : ich bin im Bette (d. h. Krank) und bin
auf die Strasse geset\t ; or, dedo c’est « doigt » et pas autre chose, et
hiedo, que M. H. prend pour une « forme ancienne » de quiedo = quedo
(quiedo d’ailleurs ne se trouve pas) ne peut être que le présent du verbe
heder « sentir mauvais ».
Ce sont naturellement les proverbes historiques ou locaux, c’est-à-
dire ceux qui font allusion à quelque événement historique ou à quelque
particularité locale qui offrent le plus de difficultés au commentateur.
M. H. laisse voir de temps à autre que son information n’est pas en
cette matière ce quelle devrait être. Souvent il se tait lorsqu'il faudrait
parler ou bien il lui arrive de remplir une page de renseignements sta¬
tistiques qui n'éclairent en rien la difficulté. Ainsi, pour me donner la
clef du dicton Adelantarse como los de Cuellar (rf° 41), il m’importe
assez peu de savoir que ce gros bourg de la province de Ségovie a l’avan¬
tage de posséder un bureau de poste, deux casinos, et d’être mis au cou¬
rant de l'état de son commerce d’après l’almanach de M. Bailly-Bail¬
lière. — Dans le célèbre refran Al buen callar llaman sancho (n° 126 a),
on ne voit pas clairement si M. H. prend sancho pour un nom propre,
comme ont fait tous les Espagnols depuis Hernan Nunez, ou s’il y a
reconnu un doublet de santo (cf. Romania, t. XI, p. 114) *.
Mais il y aurait mauvaise grâce à insister sur les côtés faibles de ce
livre qui a coûté à son auteur beaucoup de temps (1223 jours ou plutôt
nuits, il nous le dit lui-même) et qui, s’il est mené à bonne fin (le pre¬
mier volume ne contient que les proverbes commençant par la lettre a ;
il en faudra encore quatre au moins), rendra incontestablement de
grands servicesaux amateurs de littérature comparée, plutôt qu’aux his¬
panisants, le commentaire des proverbes historiques et locaux laissant,
comme nous l’avons dit, beaucoup à désirer. Souhaitons donc que cet
ouvrage soit bientôt terminé et montrons-nous à cet égard plus confiant
que M. Haller, qui, vu son grand âge (73 ans), n’ose prendre l’engage¬
ment formel de livrer au public la fin de son long labeur.
Alfred Morel-Fàtio.
1. En passant je me permettrai de trouver quelque peu bizarre le castillan qu’é¬
crit M. Haller : « le dicen algunos nato(!J en el ano » de 1448 (p. 217) — « Exis-
ten de sus mas que 40 comedias, » etc. (p. 489).
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6 * REVUE CHITIQUR
137. — Lettre» de Jfoaeblm du Bellay» publiées pour la première fois
d’après les originaux, par Pierre de Nolhac, membre de l’école française de
Rome, avec un portrait inédit et un autographe. Paris, Charavay frères, i 883 .
1 vol. in-16 de 102 p. sur papier de Hollande, tiré à trois cents exemplaires nu¬
mérotés. Prix : 6 fr.
On l’a souvent répété : ce sont les bons chercheurs qui trouvent les
bous morceaux. Comme M. P. de Nolhac est un patient et habile cher¬
cheur, il ne faut pas s’étonner de ses heureuses trouvailles. Une des plus
heureuses de toutes celles que nous devrons au jeune érudit qui, après
avoir si bien fouillé les manuscrits de Paris, fouille si bien les manus¬
crits de Rome, est celle qu’il signale ainsi dans cette première phrase de
son Introduction , phrase qui ressemble à un joyeux cri de victoire (p. 7) :
« On ne connaissait jusqu’à ce jour aucun autographe de Joachim du
Bellay. J'ai eu la bonne fortune de mettre la main sur huit de ses lettres
originales, qui, grâce au silence des catalogues, gisaient ignorées à la Bi¬
bliothèque nationale ». La première est tirée d’un manuscrit du fonds
latin, n° 8589, qui contient la correspondance de Jean de Morel, gen¬
tilhomme d’Embrun, en Dauphiné, maréchal des logis de Marguerite de
France, duchesse de* Berry, et, plus tard, gouverneur du bâtard d'An-
goulème, lequel Jean de Morel fut le meilleur ami de J. du Bellay, « son
Pylade », comme l’appelle le poète en tête de l’élégie latine bien connue
qu'il lui adresse. Toutes les autres lettres, moins deux, proviennent du
fonds français n° 10485, recueil formé d'un assez grand nombre de let¬
tres reçues à Rome par le cardinal Jean du Bellay \ Une lettre (la sep¬
tième de l’édition dont je rends compte) se cachait dans le manuscrit 8584
du fonds latin. Enfin, aux lettres publiées d’après les originaux retrou¬
vés, M. de N. a joint, d’après une copie contemporaine, une lettre à
Morel sur le départ de la duchesse de Savoie, insérée dans un Tombeau
de Henri II publié en 1 55 g, la copie offrant quelques différences avec le
texte imprimé.
M. de N. a rapidement analysé ces diverses lettres, les unes, celles qui
sont adressées à Morel, relatives aux travaux littéraires de J. du Bellay,
les autres, celles qui sont adressées au cardinal, relatives à des affaires et
qui nous montrent le poète chargé de concourir à l’administration du
diocèse de Paris et exerçant les pouvoirs de vicaire-général de son oncle,
délicates fonctions qui, suivant la remarque de M. de N. (p. 12), « lui
valurent plus de déboires qu’elles ne lui promettaient d’honneurs ». Le
savant éditeur ajoute (p. 14) que la correspondance avec l’évêque de
1. J’ai eu ce mahuscrit entre les mains, il y a une douzaine d’années, quand je pré¬
parais mon recueil de lettres inédites du cardinal d’Armagnac (voir Collection
méridionale, t. V, Introduction , p. 18, note 1). Je m’accuse de n’y avoir pas alors
remarqué les précieuses lettres originales de Joachim du Bellay, mais je me console
de mon inadvertance en me disant que si j’avais été plus attentif, en 1872, je n’au¬
rais probablement pas eu le plaisir de parler ici, treize ans plus tard, du charmant
et excellent petit volume de M. de Nolhac.
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o'HISTOIRB BT DE LITTÉRATURE
7
Paris, Jean du Bellay, nous révèle « les embarras d'affaires et les discor¬
des de famille » qui attristèrent les derniers jours et qui contribuèrent à
hâter la fin du poète mort quand il « avait à peine trente-cinq ans »,
quand < il se trouvait dans tout l'éclat de sa gloire », quand « il parta*
geait avec Ronsard le titre, si retentissant alors, de rénovateur de la
poésie française » *.
Cette correspondance, sauf la première lettre à Morel, était déjà con¬
nue, comme nous le rappelle M. de N. (p. 1 5 ), par la copie qu'en a faite
le président Bouhier et qui est conservée parmi les manuscrits de l'Ecole
de médecine de Montpellier. M. Revillout, professeur à la faculté des
lettres de cette ville, continue M. de N., « a découvert cette copie, l’a
publiée et a eu le mérite, dans une substantielle étude, de mettre en œu¬
vre à peu près tous les renseignements biographiques qu'elle contient
(Les derniers mois de la vie du poète Joachim du Bellay , aux Mémoi¬
res lus à la Sorbonne en i 86 y) \ M. Marty-Laveaux l'a donnée aussi
dans sa remarquable édition des œuvres françaises de Joachim du Bel¬
lay. Mais la copie du président Bouhier est très fautive, surtout dans la
transcription des noms propres, et l'orthographe du poète n’y est point
du tout respectée. On comprendra facilement l’importance de ces lettres
pour fixer l’orthographe tant discutée de l’auteur de Y Illustration de la
langue françoise ». M. de N. a reproduit cette orthographe avec la plus
minutieuse exactitude, « en respectant ses contradictions d’une lettre et
même d'une ligne à l'autre ». Il s'est contenté d’ajouter les accents et les
cédilles, « toujours absents du manuscrit, mais nécessaires pour faciliter
la lecture ». Le scrupuleux éditeur observe (p. 16) que la publication
des lettres de Joachim, d’après une copie postérieure de près de deux
siècles, pouvait donner lieu aux plus regrettables erreurs. C’est ainsi
qu’un amateur plus zélé que judicieux, M. Becq de Fouquières (Œuvres
choisies de J . du Bellay , 1876), a pris « pour une habitude ortho¬
graphique de notre poète ce qui n’est qu’une habitude du président
Bouhier ».
L'Appendice du petit volume — si riche en ses quelques pages — ren¬
ferme divers documents presque tous autpgraphes et presque tous iné¬
dits : une lettre du chancelier Olivier à Jean de Morel, une lettre de
1. M. de N., donnant raison (p. 19) à ceux qui prétendent que plus le poète a souf¬
fert, plus il est inspiré, dit, après avoir indiqué les souffrances morales et physiques,
et aussi les embarras matériels et vulgaires de fauteur des Regrets : a Ne doit-il
point aux inquiétudes de sa vie cette émotion personnelle et pénétrante, cet accent
de sincère mélancolie, qui lui fait sa place à part au milieu de no*s anciens poè¬
tes? »
2. Le manuscrit de Montpellier, suivant une note de la page 9, « a induit en erreur
M. Revillout et, après lui, MM. Burgaud des Marets et Rathery (Œuvres de Rabelais ,
2« édition, t. I, p. 48), en leur faisant ajouter à la liste des frères du cardinal un
certain Joachim, qui aurait été, comme Jean et comme René, évêque du Mans. L’o¬
riginal de la Bibliothèque nationale ne permet plus de croire à l’existence de ce per¬
sonnage, dont mention ne se trouve nulle part ».
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8
rkvük critique
Jacques du Bellay, frère de l’évêque de Paris, à Joachim du Bellay, trois
lettres d’Eustache du Bellay, évêque de Paris, au cardinal du Bellay,
une lettre du même à Joachim, enfin une lettre de Charles Fontaine à
Jean de Morel, laquelle est très importante pour l’histoire littéraire du
xvi« siècle et tout particulièrement pour l’histoire de la polémique qu'a¬
mena la publication de la Deffense et illustration de la langue fran -
çoise : Charles Fontaine, à qui l'on a toujours attribué et, je crois, sans
discussion, remarque M. de N. (p. 18), la réponse faite au manifeste de
la Pléiade et connue sous le nom de Quint il Horatian , consacre trois
grandes pages, écrites de Lyon, à désavouer ce livre et prie Morel de
soutenir fort et ferme contre tous qu'il n’en est pas l'auteur, déclarant
que le coupable est Barthélemy Aneau, principal du collège de la Tri¬
nité à Lyon. C'est là un fait nouveau pour les historiens de notre litté¬
rature et dont il faudra désormais tenir grand compte dans tout travail
sur le poète B. Aneau, sur Joachim du Bellay et sur Charles Fon¬
taine.
Les notes de M. de Nolhac sont nombreuses, savantes et intéressantes.
Je mentionnerai principalement les notes sur Jean de Morel (pp. 7 et 8),
sur la question si débattue : Joachim était-il dans les ordres (p. 12)? sur
un hommage naïf et enthousiaste rendu à Ronsard et à du Bellay, « les
deux lumières de France », par le gouverneur de Narbonne, Forque-
vaulx (p. 14), sur l’écriture de du Bellay (p. 16), sur la femme de Jean
de Morel, Antoinette de Loynes (p. 24), et sur sa fille aînée, la célèbre
Camille ( ibid .), sur l’ambassadeur en Orient, Jean de la Vigne (p. 26),
sur le cardinal de la Rovère (p. 28), sur le seigneur de Saint-Ay (p. 74),
sur Charles Fontaine (p. 86), sur le Quintil Horatian (p. 88), sur Bar¬
thélemy Aneau (p. 89) \
Quand j'aurai ajouté que le volume est orné d'un portrait de du Bel¬
lay tiré du cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale, croquis
fait d’après nature, d'un fac-similé de la lettre à Jean de Morel repro¬
duite à la page 33 , et qu'il est terminé par deux Tables, une Table des
lettres et une Table des noms cités en ces lettres, j'aurai par cela même
constaté que rien ne manque au recueil des Lettres de Joachim du Bel¬
lay, recueil qui fera si vivement désirer la plus prochaine publication
2. M. de N. n’a pas cité sur B. Aneau une notice signalée comme a fort curieuse »
par le Manuel du libraire , où les productions de cet écrivain occupent tant de place
(t. I, col. 284-285 et passim) : cette notice de M. Cochard. accompagnée des notes
de M. Breghot du Lut, a été insérée dans les Nouveaux mélanges de ce dernier éru¬
dit (pp. 189-21 3 ). On peut en rapprocher l’article de la nouvelle édition de la France
protestante (t. I, 1874, col. 254-256). M. H. Bordier a eu soin de rappeler, en cet
article, que B. Aneau fut professeur au collège de la Trinité à Lyon, de 1529 à
i 53 g. qu’il devint ensuite administrateur de ce collège jusqu’en i 55 o et, de nouveau,
de i 558 jusqu’au jour de sa mort tragique (juin i 5 ôi). C’est par suite de deux fautes
d’impression que, dans la note 1 de la page 89 du recueil de M. de N., B. Aneau
nous est présenté comme principal du collège de la Trinité de 1542 (pour iô 3 g) à
i 5 65 — (quatre ans après sa mort) — pour i 56 i.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
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possible par l'habile éditeur, des lettres inédites du grand humaniste
Marc-Antoine Muret.
T. db L.
* 38 . — Ueber Georg Greftinger, von Be^eubarg. al» Didier» HUto-
rlker and Uebertetzer, elne Uterarbl«torl»che Unlertuchmig»
von Wolfgang von Oettingen. (Quellen und Forschungen zur Sprach-und
Culturgeschichte der germanischen Vœîker, xlix Heft). Strasbourg, Trûbner,
18Sa. fn-8, g 5 p. % mark.
Cette monographie très soignée et très consciencieuse, est consacrée
à, un poète allemand du xvn* siècle, jusqu’ici fort peu connu, Georges
Greflinger de Ratisbonne (né vers 1620 et mort vers 1677). M. W.
d'Oettingen expose d’abord tout ce qu’il sait de la vie de Grcfiingei;
il donne une liste aussi complète que possible de ses œuvres (pp. i 6 - 36 );
il étudie ses poésies lyriques, pour la plupart imitées d’Opitz, ses épi-
grammes, son essai de tragédie « Fer rondo ». Greflinger a composé six
ouvrages historiques qui ne sont que des compilations sans valeur ; la
plus intéressante et la plus curieuse est certainement son histoire de la
guerre de Trente Ans ( Der Deutschen Dreys\ig-Jâhriger Krieg),
écrite en vers et qu’il fit paraître en 1657; d’après M. d’O., Grefliu-
ger y suit, dans la première partie, le récit de Chemnitz. Ce poème,
qui comprend près de 4400 alexandrins, est d’ailleurs peu remarquable,
sans élan et sans inspiration ; il « fait honneur à la patience de Greflin¬
ger et à son zèle de compilateur » (p. 75). Les deux derniers chapitres
de cette étude traitent de la traduction du Cide t de la langue de Gre¬
flinger. Sa traduction du Cid, publiée en i 65 o (Die Sirmreiche Tragi -
Comœdia genannt Cid 9 ist ein Streit der Ehre und LiebeJ est la pre¬
mière qui ait paru en allemand ;elle n’a guère d’autre mérite ; M. d'Oet¬
tingen loi reproche avec raison d'étre plutôt une « paraphrase du texte
qu'une traduction fidèle ». On voudrait qu’il eût cité, à ce propos, la
Bibliographie cornélienne de M. Emile Picot, et comparé la traduc¬
tion de Greflinger aux traductions de tragédies françaises entreprises à
la même époque par d’autres lettrés, comme Fleischer et Clauss.
C.
139. — Etude mr l'état mental de J. J. Rousseau et sa mort à Ermenonville,
par A. Bougeault. Paris, PTon, 1 883 . In-12.
La question de la folie de Rousseau ne fart plus de doute aujourd'hui
même parmi ses plus zélés partisans, mais il n'en est pas de même des
causes de sa lin. M. Bougeault a repris cette dicus&ion sans y apporter
rien de bien nouveau. II s’est surtout appuyé sur l’autorité du D r F.
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10
REVUE CRITIQUE
Dubois, d'Amiens, qui, dans des Recherches lues à l’académie de méde¬
cine le I er mai 1866, sur le genre de mort de J.-J. Rousseau (Bul¬
letin de VAcadémie , tome XXXI), a conclu au suicide par le poison.
On sait quelle vive polémique s’éleva jadis entre Stanislas deGirardin et
Musset-Pathay sur le même sujet, mais avec cette différence que Musset-
Pathay croyait que Rousseau s'était servi d’un pistolet. Son grand ar¬
gument était ce fameux trou au front qui apparaissait sur le moulage
pris par Houdon quelques heures après la mort. M. Dubois croit plutôt
à l’absorption de la ciguë, mais il ne nie pas qu'une balle de pistolet
n’ait pu causer une lésion extérieure relativement légère. L’examen de
ce fait exigerait des connaissances tout à fait spéciales et sortirait du ca¬
dre de la Revue critique . Je me contenterai de signaler à ceux qui vou¬
dront reprendre le débat une brochure très remarquable par sa lucidité
et sa concision et que M. Bougeault ne me semble pas avoir connue :
du prétendu suicide de J . J . Rousseau, par St-A. Berville (Meulan,
impr. A. Masson, 1860, in-8°, 40 p.) Berville qui, à son tour, ne paraît
pas avoir eu connaissance des recherches du D r Dubois, croit à une apo¬
plexie séreuse. Le masque de Jean-Jacques, moulé par Houdon, ap¬
partenait il y a quelques années à F. V. Raspail; il en a été moulé un
dessin dans le Monde illustré du 22 décembre 1860, d’après la lithogra¬
phie de Marin Lavigne, exécutée en 1828, lors de la dispersion de l'ate¬
lier de Houdon.
T.
140. — Lot premiers «Janséniste* et Pori-Royol, par M fr Ricard, prélat
de la maison du pape, professeur de théologie dogmatique aux facultés d’Aix et
de Marseille. Un vol. in-8 de xt- 5 oo pages. Paris, Plon, i 883 .
Une bonne étude sur le jansémsme serait assurément bien accueillie
de nos jours, même après le Port-Royal de Sainte-Beuve; maison ne
saurait donner ce nom aux élucubrations malsaines que nous voyons
paraître depuis quelques années, et dont les ecclésiastiques semblent
se réserver le privilège exclusif. Après le livre deM. l'abbé Fuzet sur les
Jansénistes du xvn° siècle , leur histoire et leur dernier historien
M. Sainte-Beuve , est venu le livre M. le chanoine Jaufifret sur la Lutte
doctrinale de M* x Belsunce contre le jansénisme *, et voici maintenant
un livre de Monsignor Ricard, prélat de la maison du pape, professeur
aux facultés de théologie d’Aix et de Marseille. Cest un long tissu d’er-
1. La publication de cet ouvrage a donné lieu à deux protestations du P. Ingold,
un savant oratorien qui croit que l’on peut écrire l’histoire religieuse sans jeter de
la boue à la face de ses adversaires, même jansénistes. Le P. Ingold a le beau rôle
dans cette affaire; quant à Belsunce, il sort de là singulièrement amoindri, lui qui,
en pleine peste de Marseille, a osé faire imprimer que si le supérieur des Oratoriens
de cette ville avait été enlevé par le fléau* c’était bien fait!
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d'histoire et de littérature
It
reurs cent fois relevées, de calomnies cent fois détruites, et vraiment si
nos facultés de Théologie ne produisaient que des œuvres semblables, on
serait bien embarrassé pour démontrer l'utilité d’un pareil enseignement
donné au nom de l’Etat.
Je ne m’arrêterai pas à réfuter longuement cet ouvrage qui est, je le
répète, un tissus d’erreurs et de calomnies depuis le premier mot de la
préface, composée d'après les articles d'un journaliste très mal informé ,
jusqu'à la table des matières. C'est à propos d'ouvrages analogues à ce¬
lui-là que Sainte-Beuve, poussé hors des gonds, a parlé dans son Port-
Royal (II, 540) de haines infâmes de fanatisme qui suinte par tous les
pores, et de baves impures. Le livre de M. R. a la prétention d’être un
livre amusant, agréable, joli, mais on est confondu et attristé de voir
qu’il se trouve encore, en l’an de grâce 1 883 , des prêtres, des docteurs en
théologie pour écrire de semblables romans. On chercherait vainement
dans ce volume de 5 oo pages un fait nouveau, une appréciation nou¬
velle des hommes et des choses : le Père Rapin. l'abbé Fuzet et M. Gail-
lardin font tous les frais de cette compilation. Ce qui est bien à M. R.,
par exemple, ce sont les citations infidèles (notamment au sujet de la
phrase de 5 o lignes imputée à Saint-Cyran, p. 27); ce sont les fautes
d’orthographe comme Saumai\e> auteur du Dictionnaire des Précieuses
(p. 3 o 3 ), îe Père de Coudren , supérieur de l’Oratoire (p. 3 o 3 J, dom
Clément (lisez Clémencet, p. 5 yj; comme Maugellin (lisez Mangue-
lein), Jackin (lisez Jeankins), Litolphe de Su\arre (lisez Litolphi
Maroni), de Gué de Bagnols (lisez du Gué), le chevalier de Saint-Méré
(lisez de Méré, p. 262 et suiv.), etc. C’est à se demander si M. R., faisant
un livre sur Port-Royal, a jamais regardé le Nécrologe de Port-Royal,
ou même l'index du Port-Royal de Sainte-Beuve. Ce qui est bien à
M. R., ce sont les fautes d'accent qu'il commet quand il veut faire l’éru¬
dit et citer le Nouveau-Testament en grec ; ce sont les énormités comme
celle-ci : « Mais que faisaient donc alors Bossuet, Vincent de Paul...?
p. 89 (Il s'agit de l’année 1643; Bossuet, né en 1627, n'avait pas encore
16 ans ; \\ faisait sa philosophie au collège de Navarre); ou celles qui
consistent à représenter Pascal se promenant dans les allées de Port-
Royal des champs pour respirer le même air que M lla de Roannez
(p. 356 ); ou Bossuet prêchant un panégyrique de Saint Vincent de Paul
(p. 91); ou Massillon remplaçant Bossuet à l’Académie française en
1711 (p. 3 18), — Bossuet fut remplacé en 1704 par l’abbé de Polignac,
Massillon remplaça l'abbé de Louvois en 1719); ou encore M. d’An-
diily servant de modèle à Molière pour son Tartufe, et cela d'après
« des travaux de haute critique littéraire; (p. 36 ) ; ou les jansénistes de
nos jours allant par milliers , tous les ans, en pèlerinage à Port-Royal
(p. 442); ou Belsunce dont <c l'héroïque vie fut abrégée » en 1755,
alors qu'il avait 84 ans, par les « lâches insultes » que les Oratoriens
lui auraient fait subir 35 ans auparavant (p. 24), etc., etc.
Quant aux calomnies rééditées ici, comme la conspiration de Bourg-
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12
RKVOE CRITIQUE
Fontaine entre Arnauldâgé de neufans et Jansénius qui en avait près de
quarante, ou les Monita sécréta du Jansénisme, découverts en 1667,
puis en 1740, alors que les Jésuites les avaient fabriqués et imprimés dès
1654, je ne chercherai même pas à les réfuter ici; je me permettrai de
renvoyer le lecteur à l'article de la Revue historique (tome VI, p. 180)
oh l'ouvrage de M. l'abbé Fuzet a été apprécié en même temps. Le
livre de M. Ricard est une réédition ou si Ton veut une adaptation de
quelques parties de Tautre, et les deux réunis ne méritent pas d’attirer
un seul instant Tattention des lecteurs qui se respectent.
A. Gazibr.
VARIÉTÉS
Le* inscription» do Sofa.
M. Fr. Praetorius se plaint dans la Z . d. d. m. G. ( 36 , 661 suiv.) de
fimperfection de Fessai de déchiffrement que j'ai consacré aux inscrip¬
tions du Safa. D'autres trouveront peut-être tout naturel qu’une tenta¬
tive de ce genre, faite sur une écriture inconnue et sur des copies inexac¬
tes, n’arrive pas du premier coup à la perfection et qu'il faille se féliciter
de la vérité partielle obtenue dans un sujet aussi obscur. Mais laissons
ces gémissements exagérés et occupons-nous des conjectures au moyen
desquelles M. P. croit pouvoir réaliser un progrès notable à la solution
du problème. Les corrections qu’il propose se rapportent aux deux
dernières formes de YAleph safaïtique et à certaines interprétations de
détail.
M. P. donne à ce que je prends pour la seconde forme de l’aleph la
valeur de ç, et obtient ainsi les noms Khâliç, Çâbih , Çarf[o\i Çharf ),
Çarfan (ou Çharf an) et Racaêl pour Khald, ’Abih, *Arf ’Arfan, Râ'aêl.
Les verbes Kharâ et dad seraient kharaça et dathd. Il faut reconnaître
que quelques-unes de ces formes deviendraient plus intelligibles, mal¬
heureusement, la lecture Râ'aêl est garantie par le diminutif RuwaVêl
(Vogüé 93 b ), où le premier aleph a la forme ordinaire. On trouve aussi
le nom Ash*an (V. 128) écrit avec l’aleph n° 2, tandis qu'une forme
Çash'an est impossible. Cela suffit pour nous engager à persévérer dans
notre première opinion.
Une raison analogue nous défend d'adopter la valeur th que M. P.
attribue à l'aleph n® 3 . La preuve réside encore dans le nom Râ T aêt qui
est deux fois orthographié avec l’aleph en question (V. 166 et 401). Ici
la lecture Rathaêl ne donne rien de satisfaisant.
Les nouvelles interprétations de M. Praetorius sont encore moinscon-
vaincames. La traduction de Zasharaï Ruhbat (v. 4), par Dki*Shar&
de Ruhbat, est contraire à la grammaire. Les prétendus dieux Ba f al
Samaïn (v. 3 1 5 ) et Ba‘al Sqf « Seigneur du Safa » n’existent absolument
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DH1STOIRK KT DK LITTÉRATURK
13
pas. Le reste peut, sans inconvénient aucun, être passé sous silence.
Je tiens à remarquer finalement, que je n’ai pas eu de collaborateur
pour le déchiffrement des inscriptions du Safa ; ce déchiffrement appar¬
tient à moi seul et c’est moi seul qui dois en assumer toute la responsa¬
bilité.
P.-S. — Après avoir envoyé cette note à la Rédaction, j’ai reçu de
M. P. le n° 23 du Literarisches Centralblatt (2 juin i 883 ) qui contient
son compte-rendu de mon livre. L’auteur revient encore sur les déux
aleph en question, mais cette fois l’aleph n° 2 n’est plus un ç mais un /,
et, de la sorte, les noms lus naguère Raqaêl et Khaliq deviennent
Rafael (?) et Khalaf. M. P. ajoute lui-même un point d’interrogation
au premier nom et ne nous dit pas ce qu’on doit faire du nom assez
singulier Fâbïh , qui remplace maintenant le ci-devant ÇâbPh. Les
verbes lus, il y a peu, datha tt kharaça , devenus maintenant datha et
Khara/a, rappelleraient l'union de datha et kharifd ans les inscriptions
sabéennes, bien que dans celles-ci les expressions dont il s’agit ne sont
nullement des verbes, mais des substantifs. Il va sans dire que ces
conjectures ne tiennent pas devant la triple orthographe du nom Raaêl,
garantie par le diminutif Ruaïêl cité plus haut, et que, jusqu’à ce
qu’on produise de meilleures preuves pour le contraire, l’identification
des trois formes de l’aleph demeurera une nécessité épigraphique.
Les autres modifications que M. P. propose pour quelques lettres
safaïtiques seraient importantes s'il était possible de les admettre. La for¬
mule si fréquente faafar lau (ou lahi) « qu’il lui soit pardonné » confir¬
mée par des formules arabes identiques trouvées sur les mêmes lieux
par M. de Vogüé ( 1 3 , 16, 17, 18), cette formule, dis-je, met hors de
doute les valeurs des trois lettres/, A, w. L’élément wahb que M. P.
place dans ce que je lis four, figure comme un nom propre dans deux
endroits. (V. 5 et 219.) La lecture Odhaïnat pour Ahlat est déjà par cela
seul impossible que leyod du diminutif est toujours écrit en safaïtique
comme en arabe. Les noms tels que wâl(y. 221, 294, 320) etWdlallat
(V. 189) ne sauraient être échangés contre Hal et Hal-allat. Pareille¬
ment, une forme dhashairat pour hishyarat (v. 5 ) n'a rien de vraisem¬
blable. J’aurais pu produire d'autres exemples si le défaut d'espace ne
m’obligeait pas à m’arrêter. Je remarquerai seulement que M. Praeto-
rius abandonne lui-même les conjectures critiquées dans la note qui
précède. Le parallèle de ce qu’il lit La'tham et le nom ’OTep.toç est égale¬
ment à rayer, ce dernier étant le diminutif du safaïtique atam (V. 324,
pas sim }. J. Halévy.
CHRONIQUE
FRANCE. — Le Temps du 9 juin a publié, sous le titre « A propos des inscrip¬
tions latines d*Algérie et de Tunisie » les lignes suivantes que nous nous faisons
un plaisir de reproduire; elles sont signées C. J. et viennent, dit le Temps , d’un an¬
cien membre de l’Ecole française de Rome, actuellement en Allemagne : « M. le
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RBVUR CRITIQUE
*4
docteur Schmidt, de l’Université de Halle, avait été chargé par l’Académie des scien¬
ces de Berlin d’une mission épigraphique dans l’Afrique septentrionale. La mois¬
son qu’il en rapporte est tort riche : près de 4,000 inscriptions latines qui vont être
imprimées comme supplément au huitième volume du fcorpus inscriptionum latina -
rum. Beaucoup de ces inscriptions avaient déjà été publiées par les revues françaises :
un certain nombre est inédit. En tout cas, c’est un magnifique résultat, si l’on songe
que ce huitième volume, paru il y a deux ans à peine, renfermait plus de 10,000 nu¬
méros. Toutefois, notre joie n'est pas sans mélange. Le huitième volume du Corpus
a réndu inutile le Recueil des inscriptions latines de VAlgérie , de M. Léon Renier;
le supplément rendra inutiles les derniers tomes des différentes revues algériennes.
Et, quand YEphemeris epigraphica (publiée à Berlin par la commission du Corpus)
se mettra à réimprimer toutes les inscriptions que nos explorateurs scientifiques dé¬
couvrent en Algérie et en Tunisie, les revues où ils les éditent n’auront plus leur
raison d’être pour les épigraphistes. Non pas qu’elles ne soient toutes fort nourries,
fort bien composées ; on ne saurait accorder trop d’éloges à leurs directeurs. Mais,
qu’on y songe un peu, les inscriptions algériennes paraissent dans toutes sortes de
recueils : on pourrait en compter plus d’une demi-douzaine où elles se trouvent
dispersées. 11 est difficile de se les procurer, il est ruineux de s’y abonner, d’autant
plus qu’on y rencontre une foule d’articles, d’ailleurs excellents, mais qui n’ont rien
à voir avec l’histoire romaine en général et l’épigraphie latine en particulier. Le plus
simple est évidemment de patienter quelques mois et d’attendre YEphemeris epigra¬
phica ou les suppléments du Corpus . Mais il y a quelque chose de plus pratique et
de plus patriotique. Il faudrait, par exemple, qu’une de ces revues prît sur elle de
rééditer toutes les inscriptions africaines parues dans tous les autres recueils. M. Flo¬
rian Vallentin commençait à faire ce travail pour la France dans son Bulletin épi¬
graphique de la Gaule , qui paraît depuis trois ans, et qui a si bien réussi, même en
Allemagne. Malheureusement M. Vallentin, qui était très actif, très intelligent, vient
de mourir. 11 faut souhaiter que son Bulletin subsiste et qu’un autre continue une
œuvre bien commencée. Peut-être oserait-on souhaiter davantage. Pourquoi un de
nos épigraphistes de profession, j’entends un de ceux qui ont déjà su découvrir et
interpréter leurs découvertes, ne se chargerait-il pas d’éditer, au fur et à mesure de
leur apparition ou de leur publication, les nouvelles inscriptions de la Gaule et de
l’Afrique? Bien entendu, il importerait qu’une pareille entreprise fût secondée, sinon
par les fonds du ministère, du moins par les conseils de l'Institut. Elle ne rendrait
pas inutiles les recueils d’Algérie ou de France: elle centraliserait leurs résultats
épigraphiques, elle les compléterait l’un par l’autre, puisque aussi bien ils conserve¬
raient leur caractère local et la liberté, la variété de leurs travaux, Ce serait notre
Ephemeris epigraphica . L’Italie va commencer une œuvre de ce genre pour ses ins¬
criptions à elle; l’Académie desLincei de Rome en a pris la direction. Bientôt vont
paraître toutes les inscriptions découvertes dans la Gaule cisalpine depuis la publica¬
tion du cinquième volume du Corpus (Ligurie, Piémont, Vénétie, Lombardie). On a
même vu ce fait bizarre : le cinquième volume du Corpus comprend Nice et son ter¬
ritoire; certaines inscriptions des Alpes Maritimes ont été vérifiées et étudiées par
un Italien, à la fois pour le compte d’une académie italienne et d’une académie alle¬
mande. Loin de nous la pensée de nous plaindre des uns et des autres! Ils ont fait
leur devoir scientifique, et on doit les en remercier sans arrière-pensée. A nous de
faire le nôtre ! Jusqu’ici nos recueils ont surtout servi à préparer le Corpus , qui les
a rendus inutiles. Le Corpus est achevé maintenant, ou peu s’en faut. Prenons au
moins l’initiative de le continuer pour ce qui fut la Gaule et l’Afrique romaines, pour
ce qui est maintenant la France. Travaillons donc chez nous, si nous ne voulons pas
que nos voisins viennent y travailler. »
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d’HISTOIRR KT DR LITTÉRATURE
l5
— A la suite de cet article du Temps , a paru, dans la République française du
19 juin, une lettre signée M. S. Cette lettre constitue une diffamation injurieuse au¬
tant qu'injuste à l’adresse des missionnaires de l’Académie des Inscriptions en Tu¬
nisie, et notre Revue attache trop de prix à la dignité de la science et des savants
français pour laisser, sans la traiter comme elle le mérite, une pareille incartade.
Nous avons donc inséré volontiers la note suivante que nous envoyait un de nos
collaborateurs : « La République française du 19 juin i 883 publie, sou6 la signature
M. S,, une correspondance de Bône, relative aux inscriptions latines de l’Afrique.
Déjà, au mois de mars dernier, le même journal avait donné, sous les mêmes initia¬
les, un article très aigre sur le Corpus inscriptionum latinarum Africae ; les criti¬
ques fondées que contenait cet article étaient noyées dans un déluge d’assertions sans
preuves et d’excès de langage qu’un savant devrait s’interdire. Aujourd’hui, ce n’est
plus seulement à MM. Mommsen et Wilmanns, les éditeurs du Corpus d’Afrique,
que l’irascible épigraphiste de Bône cherche querelle; il s’exprime d’une manière
tout à fait insultante sur le compte des jeunes archéologues français auxquels le
Ministère a confié des missions épigraphiques en Tunisie. « 11 faut que l’on sache
« une bonne fois, dit-il, que plusieurs de nos chargés de mission, en Tunisie et
« ailleurs, sont les courtiers de VAllemagne. C’est une bonne recommandation, dans
t une partie de ce monde savant, qu’un éloge, même dédaigneux, de M. Mommsen,
« et, sans être fier, on peut s’en servir pour obtenir, au retour, une prébende archéo-
« logique ... Certes, on n'exigera pas que je cite des noms. » Si M. S. se permet de
pareils propos, c’est simplement parce que les jeunes missionnaires de Tunisie font
ce que l’intérêt de la science exige qu’ils fassent; après avoir communiqué leurs
découvertes à l’Académie des Inscriptions, qui les publie, ils ne refusent pas de les
faire connaître au maître de l’épigraphie latine en Europe, à M. Mommsen, qui doit
les publier à son tour dans le recueil général des inscriptions latines. En blâmant
cetts manière loyale de procéder, M. S. essaie de faire croire à ses lecteurs qu’il n’est
inspiré, lui, que de sentiments patriotiques; mais il ne réussira à donner le change
qu’à des naïfs et l’on reconnaîtra, sans grands efforts de perspicacité, qu’il obéit à
de tout autres sentiments. Assurément, le patriotisme ne consiste pas à diffamer
dans un journal des collègues dont on est jaloux, à les qualifier de u petit groupe
international en fait de communications et de réclames, mais très national à l’heure
de l’émargement. » Cette correspondance de mauvais ton se termine par un boni¬
ment en l’honneur du Bulletin de correspondance africaine qui « a donné quatre
ou cinq bonnes leçons aux éditeurs du Corpus, et ce ne sont pas les dernières. »
Grâce à ce Bulletin, dit M. S., « le jour est proche » où nous n’aurons plus besoin
d’agences internationales (?) et nous nous débarrasserons d’un petit coup sec (?) de
M. Schmidt, de ses pareils et de ses amis. Le Bulletin possède toutes nos sympa¬
thies ; nous suivons ses publications avec le plus vif intérêt et nous regrettons d’au¬
tant plus qu'on lui rende le mauvais service d’annoncer ses mérites urbi et orbi avec
si peu de tact, de courtoisie et de loyauté. »
— Le numéro du i 5 juin de la Nouvelle Revue contient un article de notre colla¬
borateur, M. James Darkestbter, sur Y Histoire de Jeanne <TArc dans l'opinion
anglaise : « son histoire peut se diviser en trois périodes : sorcière, héroïne, sainte;
deux siècles d’exécration et de haine ; un siècle de justice humaine; enfin, en 1793
(avec Southey), s’ouvre une ère d’adoration et d’apothéose ».
— M. Ph. Tamizey de Larroque vient de publier deux nouvelles études, l’une
sur La marquise de Flamarens (Auch, Foix. In-8°, 2b p. Extrait, à 100 exemplaires,
de la « Revue de Gascogne »), et l’autre sur Balthasar de Vias , correspondant de
Peiresc. (Bordeaux, Chollet; Marseille, Lebon. In-8°, xxv et 46 p.). La marquise de
Flamarens (Marie Françoise Le Hardy de la Trousse) passa presque toute sa vie en
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i6
REVUE CRITIQUE
province, à Montastruc ou à Buzet, sur les terres de son mari. M m * de Sévigné, qui
était la nièce de l’un de ses frères, François Le Hardy, marquis de La Trousse,
maréchal des camps et armées du roi, se contente de la nommer en courant. M. T.
de L. a voulu a amener un rayon de lumière sur ce front voilé », d’abord « parce
que la marquise de Flamarens est une gasconne d’adoption, ensuite parce qu’elle fut
la meilleure amie de Chapelain et qu’à ce titre elle devient encore plus chère à
l’éditeur des Lettres du célèbre académicien ». Ce sont ces lettres qui font connaître
les mérites de la marquise et sa physionomie sympathique; M. T. de L. en a tiré
des citations décisives, grâce auxquelles on saura désormais tout ce que fut « cette
femme d’une destinée si malheureuse et d’une vertu si éclatante ». — La brochure
consacrée à Baitbazar de Vias est la sixième de l’infatigable érudit sur les Corres¬
pondants de Peiresc. Ce Balthazar de Vias (14 sep*. 1587-1667) fut député de
Marseille aux états généraux de 1614, et ami de Malherbe et de Barclay, l’auteur de
YArgenis. Il a composé un grand nombre de poèmes latins, dont les plus connus sont
l’éloge funèbre de Peiresc (1642) et les trois livres des Grâces (1660). M. Tamizey de
Larroque publie à la suite de sa notice sur Vias, les lettres de ce personnage, l’un des
« plus gentils esprits » de la France méridionale, à Peiresc. « Ces lettres confirment
tout le bien qui a été dit du caractère de Vias et feront estimer sa mémoire. Elles ont
d’autres titres encore à l’attention des lecteurs : sans parler du grand nom de
Peiresc, divers noms plus ou moins célèbres, provençaux et autres, y figurent et
leur prêtent certain intérêt. On n’ose en louer la forme autant que le fond, car
décidément Vias est bien meilleur écrivain en vers qu’en prose. Pourtant on voit
luire çà et là quelques étincelles de ce talent qui brille d’un si vif éclat dans les
idylles ».
— U Annuaire de la Société des études juives pour l’année 1 883 (Durlacher. ln-12 0 ,
224 p.) renferme trois mémoires : i° Un mémoire oublié sur les Juifs , par Th. Rei-
nach ; 2® Liquidation des dettes de V ancienne communauté juive de Met%, par M. Aron ;
3 ° Les Juifs à Strasbourg depuis J 34 g jusqu’à la Révolution , par Isid. Loêb.
— Le congrès archéologique de France tiendra, cette année, sa cinquantième
session à Caen (lundi 16-samedi 21 juillet). Le 20 du même mois, la Société fran¬
çaise d’archéologie, sous la direction de laquelle a lieu le Congrès, tiendra une séance
supplémentaire à Saint-Hélier, dans l’île de Jersey.
— Le Polybiblion publie une notice sur M. Ernest de Bouteiller, ancien député
de Metz, mort à Paris le 26 mai. M. de Bouteiller avait publié : Histoire de Fran%
de Sickingen , chevalier allemand du xvi* siècle ( 1860) ; Dictionnaire topographique
de Vancien département de la Moselle , comprenant les noms de lieux anciens et
modernes, rédigé sous les auspices de la Société d’archéologie et d’histoire de la
Moselle, et faisant partie du Dictionnaire topographique de la France (1875); Le
maréchal Fabert d'aprcs ses mémoires et sa correspondance ; La guerre de Met\ en
1324 , poème du xiv* siècle (1876); Y Eloge de Met% } par Sigebert de Gembloux. Il
avait publié, avec M. Ch. Abel, le Journal de Jean Bauchef, greffier de Plappeville
(1878), et avec M. G. Braux, La famille de Jeanne d'Arc » documents inédits , lettres
de J . Hordat et de CL du Lys à Ch. du Lys (1878) ; Nouvelles recherches sur la fa¬
mille de Jeanne d’Arc, enquêtes inédites, généalogie (1879); Notes iconographiques
sur Jeanne J Arc (1879). Il avait donné de nombreux articles aux Mémoires de l’Aca¬
démie de Metz, aux recueils publiés par la Société archéologique de la Moselle. Tout
récemment (1882) il avait publié, avec M. Eugène Hepp, la Correspondance diplo¬
matique adressée au magistrat de Strasbourg par ses agents , à Metf, de 1594 à i 683 ,
avec notes, explications et tables.
— On annonce également la mort de M. Aug. Théodore de Girardot, connu par
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D’HISTOIRE ET DK LITTERATURE
*7
ses travaux sur l’histoire de la ville de Bourges, et par sa publication de la Corres¬
pondance de Louis XIV avec M . Amelot , son ambassadeur en Espagne (1864) ; — du
P. Chauveau, connu par ses Ses souvenirs de l’École Sainte-Geneviève, notices sur
les élèves tués à Vennemi (3 vols. 1873).
— L’Académie française a décerné le premier prix Gobert à M. Chéruel pour son
Histoire de France pendant la minorité de Louis XIV et sous le ministère de Ma -
%arin, et le second prix à M. Sciout, pour son Histoire de la constitution civile du
clergé ; le prix Thérouanne à MM. le comte Delaborde pour son étude sur Gaspard
de Coligny , amiral de France , et Alb. du Boys, auteur du volume Catherine d’Ara¬
gon et les origines du schisme anglais ; le prix Thiers à M. Rothan pour ses deux
livres sur les Origines de la guerre de 18 7 o et VAffaire du Luxembourg .
— La collection d’aquarelles représentant les costumes de l'armée française aux
diverses époques, léguée à l’Etat par le conseiller Dubois de l’Estang, va être pla¬
cée à l’Ecole des Beaux-Arts, dans une salle qui portera le nom du donateur.
ALLEMAGNE- — Nous appelons l’attention de nos lecteurs sur un recueil de
quatorze contes albanais, traduits en allemand par M. Gustave Meyer, professeur à
l’Université de Gratz, et insérés dans le i cT fascic. t. XII de YArchiv für Litteratur -
geschichte (pp. 92-148). Neuf de ces contes sont empruntés à Y Abeille chkipe, recueil
dont M. Dozon avait déjà tiré trois de ceux qu’il a récemment donnés au public
français (voy. Rev. crit 1882, t. II, art, 200, p. 233); trois proviennent des papiers
de feu Reinhold, auteur des Noctes pelasgicae; deux enfin ont été imprimés en
albanais avec une traduction juxtalinéaire par M. Jarnik dans son étude sur la
langue albanaise (voy. Rev. crit ., 1881, t. Il, p. 211, art. 283). L’intérêt de la pu¬
blication de M. Meyer est augmenté par les notes comparatives que M. R. Kœhler
a jointes aux contes, et qui, comme toujours, donnent sur chacun d’eux le dernier
mot de la science.
— Les i5 et 16 mai a eu lieu à Kiel la i3® assemblée générale du Hansischer Ge-
schichtsverein ou Société historique de la Hanse. Le premier jour, M. Weyland, de
Gœttingue, a lu une notice sur feu Reinhold Pauli, et M. Hasse, de Kiel, un mé¬
moire sur le droit danois et étranger au temps de Waldemar II ; le second jour,
M. Wetzel, de Kiel, a parlé des « commencements de la ville de Kiel », et M. Schæ-
fer, d’Iéna, des établissements hanséatiques en Scanie. MM. Weyland et Koppmann
ont été nommés présidents de la Société. Parmi les publications que fera paraître
prochainement le Verein , figurent : un nouveau tome de la seconde série des Recès
de la Hanse (Hanserecesse), p. p. von den Ropp ; le III e vol. des « Livres de docu¬
ments de la Hanse » (Hansische CJrkundenbücher), p. p. Hœhlbaum, etc. Une carte
historique du territoire de la Hanse est préparée par une commission nommée à cet
effet et présidée par M. Bippen, de Brême. — En même temps que la Société histo¬
rique de la Hanse, siégeait la Société pour l’étude du bas-allemand (Verein für nie-
derdeutsche SprachforschungJ ; M. Jellinghaus, de Segeberg, y a parlé de la divi¬
sion des dialectes bas-allemands et M. Gædertz, de Berlin, du théâtre bas-allemand
depuis Eckhof jusqu’au temps des Français. M. Seelmann, de Berlin, a été élu pré¬
sident de la Société. On a résolu, sur la proposition de M. Hasse, d’envoyer au
printemps prochain, à Copenhague, pour cinq à six semaines, un érudit, chargé
de dresser une liste de tous les anciens manuscrits et livres imprimés en bas-alle¬
mand qui se trouvent dans cette bibliothèque, travail semblable à celui que M. Lüb-
ben a, il y a trois ans, entrepris à la Bibliothèque de Wolfenbüttel. — Une Fest~
schrift ou écrit publié à l’occasion de la réunion des deux Sociétés, a été publiée
par M. Wetzel et a pour titre : « Die Lübecker Briefe des Kieler Stadtarchivs ,
1422-1534. »
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REVUE CRITIQUE
18
— Une commission pour l’histoire du pays de Bade (Badische historische Com¬
mission) s’est réunie tout récemment à Carlsruhe; les membres de cette commis¬
sion, nommée par le grand-duc, sont MM. Knies, Winkelmann, Erdmahnsdœrffer,
de Heidelberg, von Holst, Lexis, Simson et Kraus, de Fribourg en Brisgau, MM. Roth
de Schreckenstein, de Weech, Dietz, Wagner et Bauhann ; le président est M. Win-
kelmann et le secrétaire, M. de Weech. La Commission a résolu, dans sa première
séance plénière des 20 et 21 avril, d’entreprendre la publication : i° delà Corres¬
pondance politique du grand-duc Charles-Frédéric pendant les années 1783-1806,
p. p. Erdmannsdœrffer ; 2" d’une Badenia sacra, p. p. Kraus et de Weech (i w vo¬
lume : les Ré gestes des évêques de Constance jusqtêà la fin du xv« siècle ); 3 ° des Ré¬
gestes des comtes palatins du Rhin de 1214 au roi Robert, p. p. Winkblmann; 4 0 His¬
toire du peuplement et des établissements dans la Forêt-Noire, travail que se déclarent
prêts à entreprendre MM. Lexis et Bauhann.
— La Société Jablonowski ( Die fürstlich JablonowskP sche Gesellschaft) a arrêté,
comme il suit, le programme des concours pour les années i 883 -i 886 : i* pour
l’année î 883 : réunir le plus complètement possible tous les faits qui se rapportent
à l’excès de population dans les grandes villes de l'antiquité; 2* pour l’année 1884 :
exposer le développement historique et l’état actuel de la frontière entre le haut-
allemand et le bas-allemand à l’est de l'Elbe; 3 # pour l’année i 885 : Régestes des
rois de Pologne depuis le couronnement de Przemyslaw II (1295) jusqu’à la mort du
rôi Alexandre (i 3 o 6 ); pour l’année 1886 : faire scientifiquement la phonétique et la
morphologie de la langue a niedersorbisch » ou langue des Wendes de la Basse-
Lusace.
— Le conseil d'administration de la « Fondation Wedekind pour l'histoire d’Al¬
lemagne » ( Wedekindsche Preisstiftung für deutsche Geschichte ) donnera un pre¬
mier prix à la meilleure édition des « Mémoires du Mayençais Eberhard Windeck
sur la vie et l'époque de l’empereur Sigismond »; le second prix à un travail sur
a l’histoire de la maison cadette des Guelfes de io 55 à 1233 » (depuis le premier
avènement de Welf IV en Allemagne jusqu’à la fondation du duché de Brunswick-
Lunebourg); le troisième prix à une bonne œuvre historique de quelque étendue.
Les travaux doivent être remis au comité avant le 14 mars i 885 .
— Nous signalons à tous les amis et admirateurs de Molière les articles qu'a ré¬
cemment publiés M. Wilhelm Mangold sur les renseignements épars dans les cor¬
respondances des ambassadeurs ou agents du Brandebourg à Paris (Blumenthal,
Beck, Pœlnitz) et relatifs à la représentation de certaines pièces de Molière (voir la
Zeitschrift de Kœrting et Koschwitz, IV, pp. 233-240, et le Moliere-Muséum, V).
On ne connaissait pas jusqu’ici une troisième représentation du Ballet des Muses le
16 décembre 1666, une représentation de Pourceaugnac du 7 novembre 1669 (soup¬
çonnée par Mesnard), une autre du Bourgeois gentilhomme à Saint-Germain en no¬
vembre 1670, et certains détails sur la représentation de Bérénice sur la scène de
Molière, le 14 décembre 1670, Dans le même fascicule du Moliere-Muséum,
M. W. Mangold a publié une étude sur la « Vie de Molière de Grimarest, son degré
de croyance et sa valeur ». La conclusion de ce travail îemarquable (pp. io5-i3i),
c’est que, comme le disait Grimarest, « plus les temps s'éloignent, plus l’on travail¬
lera, plus aussi on reconnaîtra que l’auteur de la Vie de Molière a atteint la vérité
et qu’il ne lui a manqué que l'habileté pour la rendre ». Grimarest, dit M. W. Man¬
gold. n’a pas cité un seul fait, « der nicht ein wahrer Kern zu Grunde liegt ».
— Au mois d’octobre paraîtra le premier numéro d’une revue consacrée entière¬
ment aux comptes-rendus des œuvres de philologie orientale; titre probable : Litte-
raturblatt für orientalische Philologie.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
19
— Le duc de Cobourg vient de terminer un ouvrage sur les années 1848-1849,
ouvrage qui paraîtra à Vienne, par les soins du professeur O. Lorenz.
— Nous apprenons avec un vif regret la mort d’un des plus laborieux philologues
de l’Allemagne; M. Alois Vanicek, devenu récemment professeur de grammaire
comparée à Prague, est décédé dans cette ville le 9 mai.
BELGIQUE. — La Société des bibliophiles liégeois fait paraître, depuis l’an der¬
nier, outre ses Publications qui forment présentement vingt-six volumes, un Bul¬
letin renfermant les procès-verbaux de ses séances et les notes et communications
faites par ses membres. Elle a décidé de faire imprimer à ses frais VHistoire du
Conseil ordinaire de Liège, de S. J. Abry (avec préface de M. H. Bormans, éditeur
M. Poswick), 2 0 deux rares brochures du xvh* siècle sur les Chiroux et les Gri-
gnoux (éditeur, M. Hklbig); 3 ° la Chronique de Harigène (éditeurs MM. Dbmartsau
et God. Kurth); 4 0 une traduction française de l’ouvrage de M. Adolphe Wohlwill,
de Hambourg, sur les commencements de la constitution des états du pays de Liège
(Die Anfœnge der landstœndischen Verfassung im Bisthum Lüttich) ; les Admissions
à la bourgeoisie de la cité de Liège; les Comptes de la ville; la Briefve adnotation
des armoiries de Liège , etc.
— Du 10 au 14 avril s’est réunie à Bruxelles, sous la présidence du ministre de
l’intérieur, une conférence internationale, chargée de discuter et d’arrêter un projet
de convention sur l’échange des documents officiels et des publications littéraires et
scientifiques. Notre gouvernement avait en 1877 provoqué une réunion prépara¬
toire qui formula un avant-projet, discuté en août 1880 à Bruxelles et soumis depuis
à l’examen des divers états. Ce projet, élaboré en 1880, a servi de base aux récentes
délibérations ; il a été modifié sur quelques points et sera prochainement converti
en convention internationale.
— La classe des lettres de l’Académie royale a élu membre titulaire M. Alphonse
Vandenpeereboom et membre correspondant, M. C. de Harlez (9 mai). Elle a, dans
la même séance, reporté au programme du concours de 1884, la question qu’elle
avait proposée « Tableau des institutions politiques et civiles de la Belgique sous la
dynastie mérovingienne ». Elle n'a pas décerné le prix de Stassart (Biogràphie de
Simon Stévin ). M. Thonissen a fait une lecture sur La poésie française dans la
révolution brabançonne .
— MM. Adh. Motte et P. Thomas ont fait tirer à part le travail sur l 'Ecole Nor¬
male suph'ieure de Paris, qu’ils ont tout récemment publié dans la a 6 livraison du
tome XXVI de la a Revue de l’Instruction publique (supérieure et moyenne) en Bel¬
gique ».
DANEMARK. — Le 16 mai est mort à Copenhague Peder Goth Thorsir, qui fut
premier bibliothécaire de l'Université de Copenhague, de 1837 à 1880, et qui avait
publié les Lois de Valdemar ( 1 85 a). d’Erik (i 83 a), d’Eskil (i 853 ) et deux volumes
sur les monuments runiques du Danemark dans le Sleswig et dans le Jutland et les
îles (De danske Runemindesmarker forklarede , 1864 et 1879-1880). On cite encore
de Thorsen une étude sur Ogier le Danois ( Olger Danske , i 865 ) et une édition du
Codex runicus , manuscrit n° 28 de la collection arnamagnéenne (1877), accompa¬
gnée de recherches sur l’usage des runes.
GRANDE-BRETAGNE. — M. Saycb va publier chez Macmillan une édition dei
trois premiers livres d’Hérodote; ce volume renfermera un certain nombre d’études
critiques sur l’histoire primitive de l’Egypte et de l’Orient. Les autres livres d’Hé¬
rodote, qui traitent principalement de l’histoire grecque, ont été confiés à M. Regi-
nald Mac an, professeur à Oxford.
— M. Peter Baynb travaille à une Vie de Luther qui aura deux volumes.
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REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
— L’édition du Piers Plowman , entreprise par M. Skeat pour 1 ’ « Early English
Text Society », sera terminée l’année prochaine.
— Le chanoine Liddon doit publier prochainement chez les éditeurs Rivington
une Vie du docteur Pusey.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 22 juin i883.
M. Alexandre Bertrand annonce une découverte nouvelle qui vient d'être faite à
Grand (Vosges, arrondissement et canton de Neufchâteau), ville déjà connue par le
grand nombre d’antiquités romaines qui y ont été trouvées, telles qu’un théâtre, des
colonnes, des statues, un grand nombre de monnaies romaines de Vespasien et des
autres princes du haut empire, etc. M. Félix Voulot vient d’y mettre au jour les restes
d’une basilique romaine, avec un pavé de mosaïque. La moitié septentrionale de
cette basilique est encore cachée sous une maison d’habitation ; la partie découverte
présente une forme rectangulaire, avec une abside semi-circulaire a l’extrémité. Au
centre de la mosaïque est un sujet, entouré d’un encadrement carré : on y voit un
berger, avec un masque de loup ou de chien, qui consulte un personnage placé sous
une arcade; le reste de la scène est malheureusement détruit. L’encadrement, qui
forme la plus grande partie de la superficie de la basilique, offre une riche ornemen¬
tation formée de dessins géométriques, avec quelques figures d’animaux. L’épaisseur
des murs rectilignes de la basilique est de i“g5, celle des murs de l’abside de i".
On n’a trouvé ni monnaies ni objets antiques d’aucune espèce.
M. Bertrand communique ensuite une inscription trouvée à Ghardimâou (Tunisie)
par M. le D r Guégan, qui a envoyé l’estampage au musée de Saint-Germain. M. Hé¬
ron de Villefosse a lu le texte, d’après cet estampage, ainsi qu’il suit :
PSEXTILIOP-F
ARN'FELICI
FLAMAVGPP
SACERDOTIPRO
VINCIAE-AFRICAE
P-AVSINCLEIVSTV
BEROSEXTILIAN VS
AVOOPTIMO
OBMERITUM
a P. Sextilio, P. filio, Arnensi (tribu), Felici, flamini Augusti perpetuo, sacerdoti
provinciae Africae, P. Ausincleiu3 (corriger Auruncleius ?) Tubero Sextilianus avo
optimo ob meritum. »
M. Revillout commence la lecture d’un mémoire intitulé : l'Etalon d'argent en
Egypte.
M. Renan annonce un don que viennent de faire à l’Académie M me de Schmidt et
M mc Helmholz, nièces de feu M. Mohl. M“° Mohl, récemment décédée, avait plusieurs
fois exprimé l’intention que les papiers de M. Fauriel, dont elle était dépositaire,
fussent donnés à l’Institut. M®** de Schmidt et Helmholz ont exécuté cette volonté de
la manière la plus généreuse. « La correspondance de M. Fauriel, ajoute M. Renan,
est pleine de lumière pour l’histoire littéraire et scientifique de la première moitié
de notre siècle. L’amitié qui unissait notre éminent confrère à M“' de Condorcet, la
veuve du savant illustre de la fin du dernier siècle, fait qu’on y trouve beaucoup de
pièces intéressant cette grande mémoire. Le portrait au fusain, plein de vie et d’ex¬
pression affectueuse, que M** de Condorcet a tracé de M. Fauriel, est joint au don que
viennent de nous faire M m «* de Schmidt et Helmholz, et n’en est pas la partie la
moins précieuse. Enfin ces dames ont voulu que vos bibliothécaires pussent choisir
parmi les livres restant de M. Fauriel ceux qui peuvent servir à compléter vos col¬
lections. »
M. Riant communique un programme arrêté, de concert avec la commission dea
travaux littéraires, pour la suite de la publication des Historiens des croisades.
Ouvrages présentés : — par M. Gaston Paris : Bladé (L-F.), Quatorze Superstitions
populaires de la Gascogne; — par M. Alexandre Bertrand : Gross (Victor), ^/es Pro-
tohelvètes ou les premiers colons aux bords des lacs de Bienne et de Neufchatel.
Julien Ha vbt.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2 3 .
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core, pour la faute ou le crime de Waldstein (c’est ainsi qu'il écrit Wal-
lenstein), et ses motifs sont : l’alliance de Waldstein avec Gustave par
l’intermédiaire de Thurn, les négociations de Kinsky avec Feuquières,
celles de Waldstein avec Arnim, les mensonges qu’il faisait à l’empe¬
reur pour couvrir ses intrigues, et ses efforts pour ruiner l'armée de la
Ligue »). — Mejer, Die Période der Hexenprocesse (Veut prouver ar¬
bitrairement que les coupables ont été atteints et qu’ils étaient coupables
d’employer des breuvages enivrants, surtout la datura stramoine qui
causait des hallucinations et leur faisait croire qu’ils volaient dans les
airs, etc.). — Blau, Die deutschen Landsknechte, ein Culturbild (Tra¬
vail fait en son ensemble avec beaucoup d’habileté et de succès ; utile
manuel pour la jeunesse des gymnases). — Creighton, A history of the
papacy during the period of the reformation. 2 vols. (Livre qui repose
sur une bonne étude des sources et des ouvrages des Allemands ; pas de
points de vue nouveaux ; mais tableau exact dans toutes ses parties ;
f rande impartialité; « eine Süchtige Leittung ». —Reichensperger,
Irlebnisse eines Parlamentariers im Révolutions jahre 1848 (Modéré).
— Rütimeyer, Die Bretagne, Schilderungen aus Natur und Volk (Livre
très intéressant et très instructif, écrit avec goût et clarté). — Chwolson,
Corpus inscriptionum hebraicarum (H. Str. Réponse à Chwolson; l'au¬
teur de l'article garde son avis d’autrefois, « jusqu'à ce qu’un savant
versé dans la paléographie hébraïque et qui a donné des preuves d’un
coup d’œil critique, vienne plaider l’authenticité « auf Grund eigener
Untersuchung » ; l’œuvre renferme d’ailleurs — abstraction faite de
Firkowitz — un grand nombre de matériaux précieux et intéressants). —
Camni, Etudes étymologiques (Encore un livre sans valeur sur l’étymo¬
logie, entrepris sans l’éducation linguistique suffisante et sans que l’au¬
teur possède le sens du développement historique de la langue). — Titi
Livii ab urbe condita liber II, p. p. Frigell. — Lindenschmit, Tracht
u. Bewafifnung des rômischen Heeres wàhrend der Kaiserzeit (Ce nou¬
veau travail du Nestor des études sur les monuments de l’antiquité alle¬
mande est un excellent manuel).
Deutsche Litteratnrzeitung, n° 24, 16 juin i 883 : H. Müller, Ueber
Plotins Schriftxspi Bcioptaç, et Plotins Forschung nach der Materie. —
Hugo von Kleist, Plotinische Studien. I, Studien zur vierten Enneade.
— Die sogenannte Théologie des Aristoteles aus dem arabischen über-
setzt u. mit Anmerk. versehen von Dieterici. (Rose : « on a trouvé dé¬
sormais pour l’histoire de la philosophie arabe le nom qui nous man¬
quait encore : Plotin est la source des scolastiques arabes; Plotin et
Aristote, voilà toute la philosophie arabe; on doit cette vue à la nou¬
velle traduction. ») — Babrius, edited with introd. dissertations, criti-
cal notes, commentary a. lexicon by Rutherford. (Kaibel : renferme
quatre dissertations : i° sur l’époque et la personne de Babrius, qui se¬
rait un des « homines literati » de la cour de Sévère; 2 0 une courte
histoire de la fable grecque; 3 ° sur le t mixo-barbarism » et la « lette-
red affectation » de Babrius; æ° sur le manuscrit; le texte n’est en son
ensemble que peu amélioré.) — Ch. Nisard, Notes sur les lettres de
Cicéron. (Ëberhard ; livre élégant en élégant français, non sans toute
sorte de remarques psychologiques piquantes, très agréable à lire pour
l’amateur, mais à condition que cet amateur n’exige pas la satisfaction
d’intéréts scientifiques; évite toutes les difficultés sérieuses; la plus
haute autorité est Victor Leclerc.) — Der Mantel, Bruchstlicke eines
Lanzeletromans des Heinrich von demTürlîn,nebst einer Abhandlung
liber die Sage von Trinkhorn u. Mantel u. die Quelle der Krone hrsg.
v. Warnatsch. (E. Martin : matériaux rassemblés avec soin, comparai¬
sons intéressantes.) — Grucker, Histoire des doctrines littéraires et
esthétiques en Allemagne. (Seuffert ; soin très estimable, mais utilise
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les livres d'un Scherr et d’un Kônig : rien d’important n’a échappé à l'au¬
teur, mais il y a plus d’extraits que de travail ; utile, mais pourrait
êtreplusapprofondi ; en tout cas « ernste Sachlichkeit »)—MAYR,Dieôst-
lichen Alpenlànder im Investiturstreit. (Bresslau : pas de nouveaux ré¬
sultats, mais soigné.) — Legrelle, Louis XIV et Strasbourg, essai sur la
réunion de Strasbourg à la France. (Wiegand : «c complètement insuffi¬
sant;... travail de tendance dans le pire sens du mot. ») — Vlach, Die
Cecho-Slaven, uebersichtliche Darstellung; von Helfbrt, Volkslied
und Tanz, das Wiederaufleben der bôhmisthen Sprache u. Literatur,
die âltesten Denkmale bôhmischen Schrifttums und der Streit liber
deren Aechtheit; drei Studien. (Brückner.) — Benndorf, Vorlàufiger
Bericht liber zwei ôsterreichische archiiologische Expeditionen nach
Kleinasien. (Kekulé.)
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n 0B 25 et 26, 20 et 27 juin 1 883 : Karl
Lamprecht, Initial-Ornamentik des XIII. bis XIII. Jahrhunderts.
(Ant. Springer : sujet de très grand intérêt habilement traité). — Rü-
melin, Die Theilung der Rechte. — Bünyiü Nanjio, A catalogue of the
chinese translation of the Buddhist Tripifaka. (G. v. d. Gabelentz).
Theologische Literaturzeitung, n° 12, 16 juin 1 883 : Orklli, Die altesta-
mentliche Weissagung von der Vollendung des Gottesreiches in ihrer
geschichtlichen Entwicklung dargestellt (W. Baudissin). — Bestmann,
Geschichte der christlichen Sitte. II, 1. (Harnack). — Wille, Philipp
der Grossmtithige von Hessen und die Restitution Ulrichsvon Wur¬
temberg 1526-1535. (Brieger : monographie qui repose sur des études
très étendues et sur de longues recherches dans les archives.)
BAEDEKER, ÉDITEUR A LEIPZIG
GUIDES BAEDEKER
GR1ECIII£IVL<AlIVI>. Avec un panorama d’Athènes, 6 cartes^
7 plans. 9 5 o
(Vient de paraître).
SGHWEDEN UIVO IV ORIVEGEIV. Avec 10 plans et
25 cartes. . «. 11 25
RUSSIE. A1VO. Avec 7 cartes et i 3 plans... 12 5 o
PARKER AND CO. OXFORD
THE ARCHAEOLOGY OF ROME
By John Henry PARKER
Part VI. The Via Sacra. Second édition.
(Vient de paraître).
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils . boulevard Saint-Laurent. 23 .
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ft'r
N* 28 i* { ' ' Pix-geptièm e année 9 Juillet 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
os MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuquet
Prix d’abonnement :
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 25 fr.
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DE 1. A SOCIETE ASIATIQUE
d>. l'école des langues orientales vivantes, etc
28 , RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuquet
(Au bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
CURT1US-DROYSEN
HISTOIRE GRECQUE
TRADUCTION BOUCHÉ-LECLERCQ
I. HISTOIRE GRECQUE DE CURTIUS. 5 vol. in-8. 5 o
II. HISTOIRE D’ALEXANDRE ET DE SES SUCCES¬
SEURS. Tome 1 . 10 »
WT Les tomes II et III en cours de publication
par fascicules. i 25
III. ATLAS POUR L’HISTOIRE GRECQUE. In-8.\... 12 »
L'Atlas paraîtra vers le i 5 juillet.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n* 581, 33 juin 1883 : Hennessy, Sir Walter Raleigh
in Ireland. (Fàgan.) — Wjlls. In the Land of the Lion and Sun, or
modem Persia. (Wilson). — English Charlemagne romances; Duke
Huon of Bordeux, part I, edited by Lee; Rauf Coilyear, with frag¬
ments of Roland and Vern Agu and Otuel, edited by Herrtage.
(Saintsbury : publication de textes qui ont un intérêt plus linguistique
aue littéraire; néanmoins cet intérêt littéraire est déjà considérable;
I introduction de M. Lee est pleine de soin et de savoir; la publication
attachante de M. Herrtage renferme des notes et un glossaire oui méri¬
tent de grands éloges). — The book of Koleheth, commonly called
Ecclesiastes, considered in relation to modem criticism and to the doc¬
trines of modem pessimism, with a critical and grammatical commen-
tary and a revised translation. The Donnellan Lectures for 1880-81, by
Ch. H. Hamilton Wright. (Tyler : malgré quelques défauts, ce livre
sera très utile, et tiendra un rang élevé dans la littérature exégétique de
l'Ecclésiaste).— The latin speeches at Cambridge. —The late E. H.
Palmer (Japp). — The national song of the Basques. (W. Webster :
communique une lettre de M. d’Abbadie sur le chant d’Altabiscar;
« Les jeunes Basques, et notamment les étudiants faisant leurs cours
à Paris, aiment à chanter en chœur un air accommodé sur les
noms de nombre basques, jusqu'à vingt, rebroussant ensuite de vingt à
un. Garay de Montglave fréquentait des compatriotes. Il était Bayon-
nais. Cet air, ce souvenir attrayant du pays loin du pays, lui inspira
l’idée du Chant d’Altabiscar. Il le composa en français. Un de mes cou¬
sins, Louis Duhalde, traduisit en basque l’œuvre de M. de Montglave.
II ne s’était jamais occupé de sa langue maternelle, il n’en savait que
ce qu'il en avait appris dans l’enfance; aussi sa version trahit-elle une
main inexperte. Il a traduit simplement en prose sans mesure et sans
rime; le morceau ne peut être que récité; on chante seulement la no¬
menclature un, deux, trois, etc., sur un air qui n’a certes rien de guer¬
rier. Ai-je besoin d’ajouter que les prétendues copies à variantes con¬
servées dans la montagne n’ont jamais existé? Une simple réflexion au¬
rait dû faire comprendre à la foule que, si un chant peut se conserver
par tradition orale, un récitatif inchantable n’aurait pas eu de lende¬
main. Duhalde a bien ri avec moi de la méprise de tant d’écrivains »).—
The « typike diatheke » of Neophytus and the Stowe Missal. (Warren.)
— The new édition of « Liddell and Scott » (Haverfield). — Plkyte,
chapitres supplémentaires du livre des morts, traduction et commentaire
(Amelia B. Edwards.) — The arabic element in modem. (Wilson.J —
Wedmore, Four masters of etching, with original etchings by Haaens
Jacquemart, Whistler a. Legros. — Paintings of China. — Leonardo
da Vinci and the duke of Mantua (J. P. Richter). — A painter’s com-
mentary on Dante (Cheyne),
The Athenaeum, n° 2904, 23 juin 188 3 : Mrs. Scott-Stevenson, On
summer seas. — Murphy, Cromwell in Ireland, a history of Cromwell’s
irish campaign. (Récit détaillé, mais très clair et très impartial.) —
Gilder, lce-Pack and Tundra, an account of the search for the
Jeannetteund a giedge journey through Siberia.—The Gospel accordings
to St Mark, p. p. Maclear; The Epistle of Paul the apostle to the
Hebrews, p. p. Farrar. Mr. Edward Fitzgerald. — Notes from Du¬
blin. — The bishop of Natal. — Voltaire's Charles XII. (Knight :
l’auteur de la note possède une des deux éditions faites à la fois par
Jore; M. Bengesco n’en connaît qu'une seule.) — Cope, Bramshill, its
history and architecture.
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N’ 28
— 9 Juillet —
1888
Sommaire s 141. Boucher, Tableau de la littérature anglaise. 142. Réaume,
Etude historique et littéraire sur Agrippa d’Aubigné. — 143. Journal de Haller,
1723-1727, p. p. Hirzbl. — 144. Bournand, Histoire de l’art. — Thèses de
M. Duméril. — Chronique. — Académie des Inscriptions. — Société des Anti- •
quaires de France.
14t. — Tableau de la littérature anglaise, par Léon Boucher. Paris, Cerf,
1882. 1 vol. in-8 de 160 pp. Prix : 1 fr.
L’auteur d’un manuel de littérature anglaise mettait récemment en tête
de son livre cette parole attribuée à l'alchimiste Basile Valentin : « La
brièveté de la vie rend impossible pour un homme d’apprendre à connaî¬
tre à fond l'antimoine, car on y découvre chaque jour quelque chose de
nouveau ». Que sera-ce donc s'il s'agit d’étudier ce que les hommes les
plus grands, dans une nation et dans tous les temps, ont pensé de meil¬
leur et de plus haut? Comment, pour une pareille tâche, un court ma¬
nuel pourrait-il suffire? Et, cependant, malgré la difficulté qu’il y a de
produire de tels ouvrages, leur nombre se multiplie; la mode est certai¬
nement aux primers, aux petits livres de cent cinquante pages qui per¬
mettent, si on a de la mémoire, de devenir savant en deux heures.
M. Freeman, l’écrivain bien connu, vient de publier une histoire géné¬
rale d’Europe oü toutes les époques sont comprises, depuis la création
du monde juéqu’à la présidence du maréchal Mac-Mahon. Le livre est
d’un format minuscule et il a i5o pages. Encore un pas et nous attein¬
drons l’idéal de la « méthode d'Aubusson », célébrée par Topffer, mé¬
thode « par laquelle on enseigne l’histoire universelle en quatre leçons ».
Nous ne pensons plus comme l'alchimiste Basile Valentin.
Quoi qu’il en soit, les primers d’aujourd’hui peuvent avoir deux sortes
d’utilité. Lorsque, comme celui de M. Stopford Brooke, pour la littéra¬
ture anglaise (manuel qui est en son genre très remarquable), ils sont
bourrés de faits, de dates et de noms propres, ils peuvent servir de memo-
randa aux lettrés qui savent déjà. Comme livres d’enseignement, en re¬
vanche, ils ne seront véritablement précieux qu’à la condition de passer
sous silence tous les faits et tous les auteurs du troisième ordre, de gar¬
der une place relativement importante pour la critique littéraire et pour
des rappels des genres de beauté le plus goûtés aux diverses époques.
M. Brooke a voulu réunir tous ces mérites ; certainement, c’est la première
des deux manières qui l’emporte dans son ouvrage d'ailleurs excellent;
il est trop complet, trop d'auteurs figurent dans son écrit, et les quelques
Nouvelle série, XVI. 28
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REVUE CRITIQUE
lignes, souvent irréprochables, qu’il a consacrées çà et là à la critique
littéraire n’empêchent pas son primer de ressembler beaucoup, par mo¬
ments, à un simple catalogue.
M. Boucher se rapproche un peu plus de la deuxième méthode, et
c'est un avantage. Quand on a lu les cent trente-six pages de son texte,
on garde une idée assez claire des grandes divisions de la littérature, et
du mouvement général de la pensée anglaise depuis les origines jusqu’à
l’avénement de la reine Victoria. Les proportions sont suffisamment
gardées et la part des vues littéraires est un peu plus grande que chez
M. Stopford Brooke.
Malheureusement, au point de vue de l’exactitude dans les faits et
dans les dates, l'ouvrage laisse à désirer. Il semble avoir été écrit rapide¬
ment; or, rien ne demande plus de soin et de lenteur que ces petits li¬
vres destinés à mettre dans de jeunes esprits des notions qui, souvent,
y demeurent la vie durant. 11 faudra donc, si M. B. veut rendre son
ouvrage vraiment utile, qu’il le soumette à une révision sévère. Voici
quelques exemples d’erreurs notées au cours de la lecture :
P. 12. « Aucune école n'était plus fameuse que celle de Jarrow (York). »
L’élève ou l’homme du monde qui lira cette ligne comprendra, ou bien
que Jarrow était une école à York, ou que York s'appelait ainsi autre¬
fois, ou peut-être que cette école était dans la province appelée aujour¬
d’hui le Yorkshire. Il se trompera dans tous les cas. Le monastère de
Jarrow était sur les bords de la Tyne, fort loin par conséquent d’York,
et n'était pas compris dans les limites du Yorkshire actuel.
P. i 3 . M. B. voit une expression « didactique » « de la pensée anglaise
dans les colloques d’Alfred, et religieuse dans ses homélies ». 11 est
difficile de savoir ce que M. B. peut entendre par les homélies d'Alfred,
ou quelle œuvre de ce roi il veut désigner sous le titre de Colloques . Il
y a, sans doute, là une confusion avec Ælfric qui composa, en effet,
outre ses homélies, un colloque, augmenté et publié de nouveau après
lui par Ælfric Bata. Les premières sont en anglais, le colloque est en
latin avec un texte dans la langue nationale, intercalé entre les lignes.
P. i 5 . La lacune qui se produisit au moment de la conquête dans la
littérature anglaise ne dura pas « trois cents ans ». Nous avons, dans
des mss. du xn e siècle le texte d’homélies assez remarquables qui avaient
été composées au xi e . L^ chronique anglo-saxonne couvre tout le xi® et
une partie du xn® siècles. Les œuvres de Layamon et d'Ormin sont du
commencement du xm® siècle.
P. 17. Dans une énumération d'ouvrages, l’ordre chronologique de¬
vrait être gardé; YOrmulum ne devrait pas venir après Handlyng Sinnc,
YAyenbite of Inwyt et le Pricke of Conscience qui sont du xiv® siècle.
P. 19. On ne peut pas dire que Wyclif « fit de la Bible cette version
fameuse », etc. Il y travailla, et elle fut faite en partie sous sa direction ;
mais elle ne peut pas être considérée comme proprement son œuvre.
P. 22. « Ici (dans Canterbury Taies de Chaucer), le cadre excepté, tout
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d'hISTOIRK HT DK LITTÉRATURE
23
est nouveau, tout est anglais. » C’est le contraire qui est la vérité : le
cadre, c'est-à-dire la donnée générale, les prologues des différents contes,
est ce qu'il y a de plus anglais dans toute l'œuvre de Chaucer ; les contes
eux-mêmes le sont moins. — Il est question encore, à propos de Chaucer
(p. 139), d'une traduction en vers qu’il aurait faite de Boèce, indépen¬
damment de sa version en prose. Chaucer n'a jamais mis Boèce en
vers.
P. 25 . « Cette prose [anglaise] qu’au siècle précédent, 1 356 , un voya¬
geur, Sir John Mandeville, avait employée le premier à raconter ses
voyages... » Les versions anglaises que nous avons du voyage de Man¬
deville ne sont pas de i 356 ; il est à peu près certain qu’aucune d’elles
n'est son œuvre, et qu’il écrivit seulement en français.
P. 27. « Le vrai représentant de cette époque (le xv e s.), c’est un prê¬
tre... John Skelton. ■ — P. 28 « avec ses qualités si diverses, [Skelton]
tourne le dos au xv° siècle et annonce de loin lere poétique moderne. »
On ne comprend pas bien qu’un poète' avec ses qualités diverses, tourne
le dos à un siècle dont il serait le véritable représentant. Dans la réalité,
Skelton, mort en 029, écrivit surtout pendant le xvi e siècle, et il est
bien de son époque.
P. 29. « Trente ans de massacres civiques » (à propos de la guerre des
Deux Roses). Les périodes de guerre intestine de ce moment, mises bout
à bout, n’équivalent à guère plus de trois années en tout. On a, d’ail¬
leurs, beaucoup exagéré l’influence de la guerre des deux Roses. M.Tho-
rold Rogers a démontré d’une manière irréfutable que, pendant sa durée,
la nation anglaise fut exceptionnellement prospère \
P. 3 i. « Gascoigne est l’auteur de la première satire régulière. » C'est
oublier Wyatt.
P. 41. « Les mss. qui nous ont conservé [les mystères anglais] sont au
nombre de trois. » On en connaît cinq ; M. B. omet le ms. Ashburnham
(mystères d’Yorü) et le ms. Digby. La Revue critique a annoncé, il y
a quelque temps, que le ms. Ashburnham, qui comprend cinquante- sept
pièces, allait être publié pour la première fois par miss Lucy Toulmin
Smith. — Les mystères de Chester ne furent pas seulement joués « en
1327, 1^28 » (date du reste fort douteuse); leur représentation ne fut
définitivement interdite que deux siècles et demi plus tard.
P. 59. « Jusqu'au commencement du xvn e siècle, la prose ne compte
qu’un monument vraiment durable, la traduction de la Bible faite par
Tyndaleet Coverdale : » d’oü il faudrait conclure que les écrits de Sir
Thomas More, de l’évêque Latimer, de Hooker, que les Essais de Bacon
lui-même ne présentent rien de vraiment durable.
P. 60. Le livre célèbre de Sir Thomas More « The history of king
Richard the thirde » 1 5 57, nous est donné comme une Vie d'E¬
douard, III. La même erreur est répétée p. 145.
1. History of agriculture and prices in England, tome IV. Oxford, 1882, 8 a .
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REVUE CRITIQUE
P. 6o. « Latimer, dans ses Sermons, avait communiqué [à la prose]
une vigueur et une causticité familières, en s’inspirant surtout de l’Ecri¬
ture. » Cette inspiration, tirée de l'Ecriture, serait assez naturelle puis¬
qu’il s'agit de Sermons. Mais le côté remarquable des discours de Lati¬
mer est précisément la profusion de ses allusions et anecdotes mondaines,
souvent très amusantes.
Une révision au point de vue typographique, notamment en ce qui
concerne les noms propres, sera aussi nécessaire. P. 41, Morton pour
Norton; p. 1 56 , Mard pour Ward. Si le savant éditeur de la Vision
concerning Piers Plowman lit l’ouvrage de M. B., il sera bien surpris
de se voir appelé Walter Skeat Clarendon (p. 1 56 ).
J’aurais enfin un mot à dire des gravures. On conçoit fort bien qu’une
littérature soit publiée avec des illustrations, mais c'est là un grand luxe
et une nouvelle tâche assez lourde qu’assume l’auteur. Un manuel de
vulgarisation, si modeste qu’il puisse être, sera gâté par des croquis
médiocres, et rien serait préférable. Je crois que beaucoup de vignettes
de ce livre auraient pu être supprimées avec avantage, notamment le
portrait de Shakespeare qui est en tête. Quelques autres dessins doivent
absolument disparaître, parce qu’ils nous sont donnés pour autre chose
que ce qu'ils sont. Pourquoi causer au lecteur l’émotion de croire que
le croquis p. 28 représente « l’atelier de Caxton » ? Plût au ciel qu’une
aussi précieuse vignette nous fût parvenue! Ce que nous donne M. B.
n’est, en réalité, qu'une marque d’imprimeur, celle d’Ascensianus, telle
qu'on la voit dans son Hégésippe de i5i 1 : « Ægesippi historiographi...
de bello Iudaico.in ædibus nostris quæ sunt Parrhisiis in via regia,
etc. », fol. Ascensianus n’avait rien de commun avec Caxton.
Pourquoi encore nous donner les tours gigantesques figurées à la p. 32
(deux fois plus hautes que des maisons de trois étages), comme repré¬
sentant « la Porte du vieux Pont de Londres avec les têtes des suppli¬
ce ciés »? Il serait très intéressant de savoir sur quels documents cette
gravure a été composée. Elle nous est présentée comme se rapportant
au règne d'Elisabeth : or, à ce moment, jusqu’en 1576, les têtes des
suppliciés n'étaient pas à l’entrée du pont, mais sur la tour du douzième
pilier à partir de la Cité (celui qui précédait l’arche mobile); après 1 576,
on les plaça sur la tour du dix-septième pilier, et la célèbre construction
appelée Nonesuch House s'éleva sur le douzième.
En somme, un peu à tous les points de vue, le manuel de M. Bou¬
cher demande une révision sévère; c'est un ouvrage à remettre sur le
métier et qui, corrigé sérieusement, deviendra un livre utile.
J.-J. Jusserand.
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d’HISTOIRK RT DR LITTÉRATURE
25
142. — Étude historique et littéraire sur Agrippa d’Aublgné» par
Eugène Réaume. Paris, veuve Eugène Belin et fils, 1 883 . 1 vol. in-8 de v-? 10 p.
M. Réaume rappelle, en sa préface datée de septembre 1882, qu'un
séjour de deux mois à la bibliothèque de Bessinges, près Genève, lui
permit, en 1870, avec la collaboration de M. Fr. de Caussade, de col¬
lationner sur les manuscrits de Tronchin, les œuvres publiées de
Th. Agrippa d’Aubigné et de copier celles qui n'avaient pas encore vu
le jour, et qu’il lui fut ainsi donné de publier, de 1873 à 1877, quatre
volumes, dont environ quinze cents pages inédites, entre autres une
correspondance de quatre cents lettres. Il rappelle encore que, dans une
note de la page ix de Y Introduction, il exprimait l’espérance de pouvoir
éditer, en une seconde série, YHistoire universelle du même auteur,
devenue fort rare depuis longtemps, publication qui eût justifié le titre
d’Œuvres complètes de Th. Agrippa d'Aubigné . « Cet espoir, malgré
un commencement d’exécution », ajoute-t-il (p. 11) « ne s'est pas réalisé.
Le récit de nos efforts déçus ne saurait intéresser qu’un bien petit nom¬
bre de lecteurs ; qu'il nous suffise de dire, à l'adresse de ceux qui ont pu
s'étonner devoir inachevé le monument que nous élevions à la gloire de
d’Aubigné, que, pour renoncer à l’emploi de matériaux amassés par un
patient labeur, pour abandonner un projet caressé pendant douze an¬
nées, il a fallu qu’un obstacle invincible et le soin de notre dignité nous
imposassent un si douloureux sacrifice. »
Je ne puis m’empêcher de dire combien je m'associe aux plaintes et
aux regrets de M. Réaume. Autant j'avais été heureux d'annoncer ici la
nouvelle de la publication, de tous si désirée, d’un texte bien revu et bien
annoté de YHistoire universelle *, autant je déplore qu’un tel projet
n’ait pu être réalisé par des travailleurs qui, comme ils l'avaient
prouvé auraient été à la hauteur d’une tâche aussi difficile.
Parmi les matériaux demeurés sans emploi, se trouvaient un glossaire
complet de la langue de d’Aubigné et une étude historique et littéraire
sur cet écrivain. M. R. espère (note de la page 11) achever et publier, un
jour, ce glossaire, et nous prenons acte avec grand plaisir de sa bonne
promesse \ Quant à l’étude historique et littéraire, elle a obtenu, en
1. N° du 20 juillet 1878, p. 37. Cf. le n° du 22 septembre 1877, pp. 171-172.
2. Voir les éloges qui leur ont été successivement donnés ici : n°du 10 janvier 1874,
pp. 23-28, pour le tome I; n° du 20 juillet 1878, pp. 33-37, pour le tome II; n° du
6 mars 187b, pp. i 53 -i 56 , pour le tome III; enfin n° du 22 septembre 1877, pp. 169-
172, pour le tome IV. En ce dernier article, je corrige bien tard la faute d’impres¬
sion qui (p. 169, paragraphe 2) a introduit devant les mots à Casteljaloux l’inexpli¬
cable mot né.
3 . Le glossaire de la langue si riche et si pittoresque de d’Aubigné pourra être
utilement rapproché du Lexique de Brantôme par M. Ludovic Lalanne (tome X des
Œuvres complètes , 1881), travail si justement récompensé par l’Académie française,
de YIndex des mots , locutions et proverbes des Serées de Guillaume Bouchet par
MM. Courbet, et Royer que je mentionnais ici tout récemment (n°du 21 mai 1882),
etc.
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RKVUR CRITIQUE
1880, de la Société de l’histoire^du protestantisme français un prix que
rend particulièrement précieux « la compétence spéciale des arbitres du
concours ». C'est cette étude, « remaniée en certaines parties, augmen¬
tée de plusieurs pages qui ne rentraient pafc dans le cadre d’un pro¬
gramme déterminé », qui forme le volume dont je viens rendre
compte.
Ce volume se divise en quatre parties : I. Biographie . II. Apprécia -
tion de çl’Aubigné , homme privé, homme public . III. Jugement cri¬
tique sur d'Aubigné, historien et poète. Opinions de d'Aubigné sur
quelques écrivains du xvi* siècle, opinions des contemporains et des
âges suivants sur d'Aubigné. IV. Documents et pièces justificatives.
Pour retracer la biographie du gentilhomme de Saintonge (pp. 3-73),
M. R. a recueilli dans la Vie à ses enfants , dans l'Histoire univer¬
selle, dans la correspondance, « les faits et les paroles capables de met¬
tre le mieux en relief » ce personnage. C’est donc surtout à l’aide de ci¬
tations empruntées aux récits de son héros lui-même qu’il a reconstitué
l’histoire de l’enfant, du soldat, de l’enseigne, du lieutenant, de l’écuyer
du roi de Navarre, du maréchal de camp, du négociateur, du gouver¬
neur de Maillezais, du réfugié à Genève, qui jusqu'à son dernier jour y
garda son humeur irascible et batailleuse, et qui, tout en disant :
Laissez dormir en paix la nuict de mon hyver,
mourut comme il avait vécu, attirant, trois semaines avant de quitter
ce monde, une bourrasque , pour employer le mot de sa femme (Renée
Barlamachi), sur
Ce chef blanchi dessous les neiges entassées.
On peut comparer le travail de M. R. à un travail de marqueterie fait
avec le soin le plus minutieux.
Après avoir si bien exposé les faits d'après les propres témoignages du
narrateur, le consciencieux biographe juge tour à tour en d’Aubigné
l'homme privé, l’historien, l’homme public (pp. 77-203). Il rend un
chaleureux hommage aux grandes qualités morales de d'Aubigné, et il
signale nettement les graves défauts de son caractère. Il ne se montre
pas moins juste pour l’homme public et pour l’historien. Ce qu'il loue
le plus en ce dernier, c'est son impartialité, et il n'hésite pas à déclarer
(p. 84) que nul historien du xvi e siècle, pas même le sage de Thou, ne
le dépasse à cet égard. Il étudie en des chapitres spéciaux d’Aubigné
père de famille (chapitre vin), d’Aubigné théologien (chapitre xi), d’Au¬
bigné homme de guerre, vice-amiral, ingénieur et — qui l'aurait cru ?
— inventeur d’un télégraphe (chapitre xn).
La troisième partie (pp. 207-283) est un excellent morceau de critique
littéraire. De même que M. R. n’a rien négligé dans l'œuvre entière de
d'Aubigné de ce qui pouvait faire connaître l’homme, il h’a rien né¬
gligé dans cette œuvre de ce qui pouvait faire connaître l’auteur. Il s’oc-
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d’histoirb kt db mttératürk
27
cupe surtout de ses deux plus importantes productions, Y Histoire uni¬
verselle et les Tragiques l . Partout il est un judicieux appréciateur,
soit qu’il compare l’historien avec les historiens contemporains, de
Thou, Régnier de La Planche, La Popelinière ; soit qu’il analyse les
œuvres du poète; soit qu’il examine en d’Aubigné le critique qui a jugé
de Thou, Montaigne, Pibrac, les auteurs de la Ménippée, La Boétie,
Ronsard et les autres poètes de la Pléiade* Malherbe, etc. ; soit enfin
qu’il passe en revue les opinions exprimées sur son auteur, par Bran¬
tôme, Davila, L’Estoile, Du Plessis Mornay, Sully, M me de Mainte-
non, Bayle, le marquis d’Argenson, Sainte-Beuve, Villemain, Miche¬
let, etc. *.
La quatrième partie (pp. 287-306) renferme les documents justificatifs
que voici : douze pièces inédites relatives à Th. A. d’Aubigné, tirées
des archives du château de Chamarande (Seine-et-Oise) ; une lettre
inédite écrite, de Paris, le 4 novembre 1625, par Constant d’Aubigné à
son père, tirée de la bibliothèque de Bessinges; l’inscription du tombeau
d’Aubigné, déjà publiée par M. Lud. Lalanne, et, après lui, par
M. Th. Heyer; une lettre de la reine Catherine de Navarre, sœur du
roi Henri IV, à d'Aubigné, donnée par M. Ch. Read, en 1874, dans
le Bulletin de la Société de VHistoire du protestantisme français ,
mais accompagnée ici d'un fragment inédit qui provient, comme la lettre
même, des manuscrits de Bessinges; enfin, une lettre,empruntée aussi à
la collection Tronchin et imprimée pour la première fois, datée de Car-
vinde, en Prusse, le 26 février 1626, et dans laquelle cc Cristofle B. de
Dona » exprime de la façon la plus emphatique son admiration pour
d’Aubigné et pour l’ Histoire universelle .
Je n’ai qu’un petit nombre d’observations à présenter. M. R., en ra¬
contant la vie de d’Aubigné, n’a-t-il pas parfois accordé trop de confiance
aux récits d'un écrivain qui eut, comme il l’a lui-même avoué, bon nom¬
bre de menteries à se reprocher? Par exemple, quand le biographe
(p. 8) répète, d’après les Mémoires , qu’à six ans l’enfant-prodige lisait
les quatre langues latine, grecque, hébraïque et française, n’est-il pas
dupe d’une hardie vantardise, d’une pure gasconnade, et, devant une
aussi merveilleuse précocité philologique, n’était-ce pas l’occasion de
se souvenir du prudent avertissement d’un des érudits de notre temps
qui ont le mieux connu d’Aubigné, M. Ludovic Lalanne, rappelant
1. Constatons que M. R. n’a aucune des vulgaires faiblesses d’un éditeur et qu'il
est assez sévère (p. 240) pour les poésies exhumées de la bibliothèque de Bessinges,
qui n’augmenteront guère « la gloire de l'auteur des Tragiques . » Il est même sans
pitié (p. 262) pour le poème didactique, intitulé la Création , qui lui paraît « une er¬
reur de d'Aubigné. n II n'avait pas plus rigoureusement traité (n° du 6 mars 1875,
pp. j54-1 55 ) cette médiocre copie de la Semaine d^ Du Bartas.
2. M. R. ne mentionne pas quelques autres opinions qui méritaient de n'être pas
oubliées, notamment l'opinion de M. Paulin Paris parue dans la Revue contempo¬
raine de septembre i 855 , article intitulé : Un auteur satirique au xvi* siècle. D’Au-
oigné.
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rkvuk critique
qu’il ne faut pas toujours s'en rapporter aux récits de Fauteur des Mé¬
moires , comme aux récits de VHistoire universelle? M. R. (p. 24,
note 3 ) reproduit, d après ce dernier ouvrage, la belle réponse du vi¬
comte d’Orte (5/c pour d’Orthe) et se contente d’ajouter : « On sait que
l'authenticité de cette réponse a été fortement contestée. » Contestée!
Ce n’est pas assez dire : il a été prouvé jusqu'à l’évidence que d’Aubi-
gné a complètement imaginé le fameux document *. Nous trouvons un
peu plus loin (p. 47) une inacceptable allusion à l’empoisonnement de
Gabrielle d’Estrées, laquelle, comme M. Jules Loiseleur l’a démontré
dans une irréfutable dissertation que je mentionnais ici, l’autre jour 2 ,
mourut d’une maladie qui frappe parfois les femmes enceintes, l’éclam-
psie* Enfin j’objecterai à M. R. qu’il immole un peu trop, en tout son
livre, Henri IV à d’Aubigné. A ces questions qu’il s’adresse à lui-même
(p. iv) : « Avons-nous toujours réussi à nous prémunir contre le senti¬
ment qui fait involontairement sacrifier l’heureux et habile vainqueur
au vaincu peu adroit et malheureux? Avons-nous assez résisté au secret
plaisir d'offrir, après coup, à ce dernier une sorte de revanche des trahi¬
son de la fortune? » Je n’hésite pas à répondre : Non. Je m’empresse
d’ajouter que si M. R. n’a pas été assez favorable à Henri le Grand, il
ne faut voir dans son attitude rien qui ressemble à un désir de justice
prémédité. Il a seulement cédé à un trop généreux entraînement et nul
n’a le droit de douter du noble effort qu’il a fait pour rester toujours
impartial.
L’Académie française a mis au concours, pour le prix d’éloquence
de 1884, une étude sur Agrippa d’Aubigné. Le travail de M. Réaume
facilitera singulièrement la tâche des concurrents, et, quel que soit le
mérite du vainqueur, ce vainqueur devra partager l’honneur de la vic¬
toire avec l’habile écrivain qui a si bien mis en lumière les divers méri¬
tes de son héros, mérites ainsi résumés dans cette phrase que l’on pour¬
rait donner pour épigraphe aux discours académiques de l’an prochain
(p. 20 3 ) : « Lorsque l’on pense que ce théologien polémiste, ce poète
inspiré, cet historien éloquent, a été soldat pendant plus d’un demi-siè¬
cle, on ne craint pas de déclarer que d’Aubigné, dans ce siècle fécond
en grands hommes, a été l’un des hommes les plus extraordinaires de son
temps. »
T. de L.
1. Voir Lettres inédites d'Adrien d'Aspretnont y vicomte d’Orthe , gouverneur de
Bayonne (1882, in-8°).
2. N° du 16 avril, p. 3i2.
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a’msiOlKK KT DK LriT^RATlTKF
2 9
14$. — Albreeht Haller* TagebAclier selnerllelten naeli Deutaclilond»
Holland und England. 1723-1727, mit Anmerkungcn herausg. von Ludwig
Hibzel. Anhang : ein bishcr unbekanntes Gedichl Halleis aus dem Jahre 1721.
Leipzig, Hirzel. i 883 . In-8, 146 pp. 2 mark 40. (Separat-Abdruck aus dem
Sonntagsblatt des Berner « Bund t>).
M. Hirzel a tenu parole ; il n'a pas tardé à publier le Journal de Hal¬
ler qu'il nous avait promis dans sa belle édition des poésies du grand
Bernois. Ce Journal renferme le récit des voyages entrepris par Haller
dans sa jeunesse, des années 1723 à 1728. En allant de Berne à Tu-
bingue, puis à Leyde où il prit ses grades, en parcourant le nord de
l'Allemagne pendant les vacances de TUniversité, en visitant plus tard
l’Angleterre et la France pour achever ses études de médecine, Haller
tenait un journal où il écrivait brièvement ses impressions; en 1732
l’année même où parurent ses poésies, il revit une partie de ce journal
t pour son propre plaisir », le retoucha et en fit un tout. Ce Journal
passé avec d’autres manuscrits de Haller à la Bibliothèque de la
Bréra , de Milan, est publié aujourd’hui par M. Hirzel. On n'y trouve
pas d’aperçus très remarquables sur le caractère et les mœurs des popu¬
lations, sur leur état politique, etc.; comme la plupart des voyageurs
de son temps, le jeune étudiant se borne à énumérer les « curiosités » des
villes et les visites qu’il a faites aux savants, surtout aux professeurs des
facultés de médecine. On n’y saisit pas encore les traits principaux de
son talent poétique ; et le futur auteur des Alpes , le vigoureux peintre de
TOberland qui doit éveiller chez beaucoup de ses contemporains le sen¬
timent de la nature, dit de Heidelberg (p. 23 ) que « sa situation est désa¬
gréable, dans une vallée, sur les bords du Nccker, entre de hautes col¬
lines ». Il y a néanmoins, dans cette suite d’impressions de voyage, de
curieux détails, par exemple, sur les Hollandais (pp. 28-29), sur l'en¬
trevue de Haller et de ses compagnons à Clèves avec le roi de Prusse et
et son fils, le futur Frédéric II, alors âgé de quatorze ans (pp. 64-65), sur
Halle, son université et ses professeurs (entre autres Thomasius), sur
Hambourg et son théâtre, où jouait alors la « bande > de Haack, et où
notre voyageur remarqua, une lois de plus, « le goût gothique des Alle¬
mands qui ne sentent pas un fin agrément et ne sont touchés que
parles costumes (« Garderobe ») et les mots équivoques » (p. 86), sur
Amsterdam, sur Leyde, Boerhaave, Albinus, sur Londres, ses cafés, ses
journaux; mais, ici encore, n’est-il pas curieux que Haller ne cite ni
Shakspeare ni Milton ni Pope, et ne connaisse qu’Addison et son Ca¬
ton , Rochester, Butler et Swift (p. 1 33) ? — En appendice de cette in¬
téressante publication, dont il faut remercier vivement M. Hirzel, on
trouve le texte complet d'une pièce de vers composée par Haller (1721)
en l’honneur du Bernois Frisching.
C.
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3o
RBVUK CRITIQUE
144. — Précis «le IMiUtoIre de l*art, rédigé conformément aux programmes
officiels, par M. François Bournand. Paris, Delalain frères (i 883 ). Pet. in- 8 ;
vin-143 p.
L'histoire de l’art, que la France, seule en Europe, continue à exclure
de l’enseignement de ses Universités, a fini par conquérir une place, toute
petite, dans l’enseignement secondaire des jeunes filles (Programme du
28 juillet 1882 ! ). Aussitôt on a vu les hommes les plus étrangers à ces
études se découvrir une vocation, une compétence particulière; du jour
au lendemain, les élèves de la dernière heure se parent du titre de pro¬
fesseurs. Nous ne possédons pas encore une seule histoire générale de
l’art digne de ce nom ; mais l’année, tout permet de le prédire, ne se pas¬
sera pas sans que notre littérature scolaire compte une demi-douzaine
de manuels plus ou moins propres à exciter les railleries des étrangers.
11 ne pouvait en être autrement; on a commencé par la fin au lieu de
commencer par le commencement. Les ouvrages de vulgarisation, hâ¬
tifs, erronés, informes, auront discrédité la science nouvelle avant que
les savants spéciaux — et nul pays n’en compte autant que le nôtre —
aient eu l’occasion de déterminer les grandes lignes du sujet et de fixer
la doctrine.
L’ouvrage que la librairie classique de MM. Delalain vient de publier
n’autorise que trop de pareilles appréhensions. Il nous révèle chez son
auteur un singulier manque de préparation, pour ne pas dire davantage.
Aussi bien ne s’improvise-t on pas historien d’art comme on s’improvise
critique d’art. L’histoire de l’art est aujourd'hui une science dotée de
méthodes d’investigation précises, rigoureuses; c’est bien le moins qu’a¬
vant de monter en chaire on prenne la peine d’acquérir quelques notions
positives, de graver dans sa mémoire un certain nombre de noms et de
dates, avec les divisions essentielles de la matière.
Etant donnée la nécessité de résumer dans une centaine de pages le
vaste ensemble de l’histoire des arts depuis l’antiquité jusqu’à nos jours,
nous sommes décidé d'avance à ne pas quereller l’auteur sur les omis¬
sions, les lacunes. Tout au plus nous bornerons-nous à regretter que le
principal soit si souvent sacrifié à l’accessoire, des maîtres illustres à des
artistes de sixième ordre, des chefs-d’œuvre à des productions inférieu¬
res, que M. Bournand a aperçues par hasard dans ses excursions à tra¬
vers nos musées, car c’est là, dans les étiquettes placées sur les tableaux
ou les statues, qu’il semble avoir puisé les principaux éléments de son
Précis . Les sources imprimées ne l’ont attiré que faiblement. En dehors
de Viollet le Duc, de Vitet, de Charles Blanc et de M. Chateau, c’est à
peine s’il a cité, de loin en loin, un nom d’auteur choisi d’une façon
plus ou moins bizarre. Toute notion de bibliographie est absente de son
travail.
1. Troisième année : dessin et histoire de l’art, trois heures par semaine ip. 33
du programme publié par MM. Delalain).
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d'histoire et de littérature
31
Nous n'insisterons pas non plus sur les défauts de la classification et
nous ne demanderons pas à l'auteur pourquoi il n'a pas compris Part en
Grèce, l'art étrusque et l'art des Romains dans la section consacrée à
T « art dans l'antiquité » ; pourquoi, quand un sujet paraît épuisé, il le
reprend quelques pages plus loin, dé manière à troubler chez ses lec¬
teurs toute notion de chronologie. Exemples : p. n 3 , M. B. étudie la
peinture et la sculpture en France au xvn e siècle, p. 118 l'histoire des
mêmes arts au xvin 0 siècle; puis viennent, p. 122, l'art français du moyen
âge et de la Renaissance au musée de Cluny, p. 124 la sculpture fran¬
çaise de la Renaissance au musée du Louvre, p. 126 la sculpture fran¬
çaise à l'Ecole des Beaux-Arts, p. 1*26 la peinture française au musée du
Louvre. Peut-on imaginer un manque plus absolu d'ordre et de mé¬
thode ?
Nous sommes disposé à la même indulgence pour le style du Précis,
bien que l’auteur s'y soit permis de singulières négligences, et nous nous
bornerons à recommander aux méditations de nos lecteurs, sans com¬
mentaire, les quelques passages suivants : « Les obélisques sont à la fois
très simples et d'une apparence monumentale ; ils sont tous en pyramides,
mais leur hauteur est imposante » (p. 12). — € Dans l'antiquité, c'est la
religion païenne qui existe; les pensées de liberté (!), de justice (!) sont
inconnues; l’esclavage règne en maître; le despotisme se fait sentir sous
toutes formes ; la tyrannie est la maîtresse souveraine » (p. 39); — « Il
se dégage de l'art du moyen âge une grande tristesse. L'art reproduit des
scènes d'épouvante, des souffrances : cela se comprend; car c'est une vé¬
ritable époque de souffrance que nous retrace l'histoire de ce temps-là.
L'approche de l’an mille (sic) avait répandu une grande terreur; les tra¬
vailleurs étaient malheureux, les campagnes ravagées non-seulement par
les loups, mais encore par les aventuriers... Quand on est malheureux,
on est envahi par la tristesse; on élève les regards vers le ciel, pour cher¬
cher un soutien; on bâtit des églises, où la foule affolée, éperdue, cher¬
che un refuge : c'est ce qui arriva à cette époque » (pp. 40-41). Ou bien
encore : « Les voitures de ce temps étaient bien grossières. Les dames re¬
gardaient comme une faveur d'aller se faire promener dans des voitu¬
res t (p. 62). — « L'art n’est pas le même dans le Nord que dans le
Midi ou dans la zone tempérée; mais aussi ce sont d'autres mœurs, d'au¬
tres institutions... Les habitants des Pays-Bas, de race germanique,
ne se sont pas mélangés(î); ils sont restés germains... ce sont toutefois de
grands travailleurs, aimant l’intérieur, la famille et préférant l’utile à
l'agréable. L’amour conjugal, plus grand chez eux que chez tous les
autres peuples, a été représenté sous toutes ses faces par leurs peintres.
Ils aiment surtout la littérature romantique (!) » (pp. 85-86).
Mais, encore une fois, toutes ces imperfections ne m’auraient pas dé¬
terminé à prendre la plume, si le Précis ne renfermait une collection
extraordinaire d'erreurs matérielles qu’il importe de ne pas laisser se ré¬
pandre dans nos écoles. De plus compétents que moi relèveront celles
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RKVUK CRITIQUE
qui pullulent dans la section antique (un exemple entre vingt : M. B.
range le Torse du Vatican dans l’œuvre de Praxitèle, alors que ce
fragment porte en toutes lettres le nom de son auteur, Apollonius).
Contentons-nous ici de signaler les énormités qui déparent la partie du
Précis consacrée à l’histoire de l’art depuis les origines du christianisme.
Le chapitre sur les Catacombes, par lequel nous commencerons, con¬
tient les assertions les plus étranges. L'auteur y constate que le carac¬
tère de l’art, à cette époque, « est plutôt la gaîté », confondant évidem¬
ment le terme de gaité avec celui de sérénité, qui n'a pas absolument, ce
me semble, le même sens. Puis il nous apprend que l’on reconnaît les
tombes chrétiennes à deux embièn\es, le « bon ou beau berger » et la
vigne. Or, ce sont là précisément les représentations offrant le plus d’a¬
nalogies avec celles de l’art païen. M. B. découvre en outre que, dans les
Catacombes, les âmes des morts sont représentées par des sauterelles (!!!),
des petits oiseaux à plumage gai, des paons, des faisans »... Risum te -
neatis amici. Le reste du chapitre renferme à peu près autant d’erreurs
que de lignes.
Mais poursuivons. P. 55 , M. Bournand range parmi les architectes
gothiques Richard Taurigny,qui, dit-il, a travaillé à la construction de la
cathédrale de Milan. Or ce maître était sculpteur, non architecte, et il
vivait au xvi® siècle, non au moyen âge. — P. 64. « Les restaurateurs
de la peinture sont : à Florence, Cimabué ; à Sienne (!), Giotto ; à Pise (î),
Duccio, Simone, (sic) Memmi ». — P. 68. « La peinture à l’huile dé¬
couverte par Antonio de Messine ou (!) Jean van Eyck ». — Ibid . « La
gravure découverte par le nielleur Finiguerra (la première gravure est
de 1452) ». Comment l’auteur concilie-t-il cette assertion avec celle de la
page 96 où il dit en propres termes : « Ce fut vers le commencement du
treizième (!) siècle que se développa en Allemagne l’usage de graver en
relief (!) sur des planches de métal ou de bois ». — P. 76. « Bramante
(né en 1444) a commencé à élever l’église de Saint-Pierre en 1450 (!) ».
— P. 87. « Rembrandt, né en 1609 (au lieu de 1606) ». — Ibid. « Ru¬
bens, né à Cologne (!), est le peintre de l’art hollandais (!) pompeux et
décoratif ». — P. 97. « Parmi les principaux artistes de l’Ecole allemande
moderne, nous pouvons citer : Jean van Eyck (!), Hans Memling ou Hem-
ling (!) ». —P. 98. « Hans Holbein, mort en 1 5 54 » (au lieu de 1543).
Nous nous arrêtons. Aussi bien, pour relever toutes les erreurs con¬
tenues dans le Précis, un numéro entier de la Revue critique suffirait
à peine. Nos critiques d’ailleurs n’ont d’autre but que de démontrer aux
professeurs chargés du nouvel enseignement la nécessité de se livrer à des
études sérieuses avant de songer à publier des manuels dont les circons¬
tances indiquées au début de cette notice nous paraissent rendre la com¬
position particulièrement difficile. Déjà, il y a six ans, nous avons dû
protester ici même contre la tentative faite en Belgique par M. Molle *.
1. Revue critique du 23 juin 1877 : Précis de Vhistoire des Beaux- Arts. Ouvrage
publié sous les auspices du gouvernement belge.
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D’HISTOIRE ET DK LITTÉRATURE 33
Serons-nous plus heureux cette fois? Nous le souhaitons, sans trop oser
l'espérer.
Eugène Müntz.
THÈSES DE DOCTORAT ÈS LETTRES
Soutenance de 11. Henri Dumcrll.
1 . Thèse latine : De constitutionibus Marti Aurelii Antonini (Toulouse. Imprime¬
rie Douladourc-Privât). — II. Thèse française : Lord Erskine , étude sur le
barreau anglais à la fin du xvm* siècle. (Thorin, i vol. in-8, 375 pp.)
I.
M. Duméril a étudié dans sa thèse l'œuvre législative de Marc-Aurèle : la pre-
raière partie est consacrée au droit public, la seconde au droit civil.
L'impression de M. Bouc hé-Leclercq n'avait pas été mauvaise, lorsqu'il avait lu
la thèse en manuscrit : elle a été moins favorable, quand il l'a relue imprimée. Des
deux parties de la thèse, c’est la première, celle qui traite du jus publicum, qui est
la plus faible. M. D. n’a pas su rattacher son étude à ce qui précède : son livre n'a
ni en-tête, ni conclusion ; celle qu'il a donnée plane au-dessus. Le titre même n’est
pas expliqué : il aurait fallu en une demi-page dire en quoi consistait le pouvoir
législatif de l'empereur et ce que c'était que ces constitutions. Le jus civile est traité
avec plus de compétence. Il y a souvent dans la. première partie des imprudences
déplumé, des impropriétés de termes. Le latin est très abandonné, semé de galli¬
cismes; il y a quelques solécismes. M. D. prétend que Marc-Aurèle a tendu tous
les ressorts du gouvernement, mais il ne le montre pas. Hadrien a-t-il adrogé
Antonin ou l’a-t il adopté? Le texte de Spartien porte adoptavit ; l'adrogation est une
conjecture de M. Duméril. P. i 3 , l'héritier présomptif porte seul le nom de César,
cela devient une règle de jus quintas relationis; c'est le droit pour l'empereur ou son
représentant de faire cinq propositions de suite dans une même séance du sénat : il
aurait fallu le dire. Souvent M. D. se contente de grouper des textes de Capitolin et
de les donnér sans explication, sans commentaire. Pour le pontificat de Lucius
Verus, la preuve est faite. Puisque le pontificat a été partagé, il y a donc eu dyar-
chie, mais il n'y a pas eu division de l'empire, chaque Auguste l'est pour tout
l'empire, il n'en est pas ainsi sous Dioclétien. P. 17, il n’y a pas d’edilitii : ils sont
compris parmi les tribunitü. M. D. montre Marc-Aurèle négligeant le sénat et dé¬
truisant l'équilibre apparent qui existait entre les pouvoirs de l'Etat. Capitolin
affirme le contraire et M. D. ne le réfute pas. M. D. prétend que Capitolin ne parle
que de distinctions purement honorifiques. P. 18, M. D. ne dit pas ce que c'est
que le concilium principis : c'est un conseil d’assesseurs judiciaires. Capitolin dit
que Marc-Aurèle n'y admettait que des sénateurs, lorsqu’un procès où la vie d'un
sénateur était en danger, était jugé. Pourquoi M. D. ne le cite-t-il pas ? Il n’est pas
étonnant que le préfet du prétoire, chef militaire, n’ait pas siégé au sénat. Un texte
de Suétone, un texte de Tacite nous parlent d’hommes qui furent préfets du
prétoire, « quoique sénateurs »; ce n’est qu’à partir d’Alexandre Sévère que le
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RKVUK CRITIQUE
H
préfet du prétoire devient un magistrat d'ordre sénatorial. M. D. dit que Marc-
Aurèle n'a rien fait pour le sénat (p. 19); cependant il a donné à beaucoup de cités
des curateurs, et ces curateurs sont tirés du sénat. Les sénateurs ne sont ni préfet
du prétoire, ni préfet des vigiles, mais ce sont des charges militaires ; ils ne sont
pas procurateurs, mais ces fonctions appartenaient récemment à des affranchis.
D’après M. D., Marc-Aurèle a beaucoup accordé au sénat, mais en fait, il a, sans le
vouloir, diminué son influence en donnant plus d'importance aux magistratures
nouvelles où les sénateurs n'étaient pas admis. Ce texte rappelé par M. D., p. 19,
Mor, et Rom. leg, Coll. XIV, 3 , 2 2, se rapporte à Septime-Sévère. A propos des
comices, M. D. ne spécifie pas que ce sont des comices électoraux qu'il s'agit et non
des comices législatifs. P. 23 , qu’est-ce qui prouve qu’il y eut d'une façon fixe
cinq juridici? Il est probable que leurs circonscriptions étaient très variables. On
connaît leur compétence qui était fort limitée : ils connaissaient des questions de
décurionat, des fidéi-commis, et de certaines questions de tutelle. P. 24, une inscrip¬
tion est citée pour fixer une date et ce qui est omis, c'est la date de l'inscription.
Comment la création des juridici aurait-elle pu diminuer la liberté des cités,
puisque les fonctions qui leur étaient attribuées étaient enlevées au préteur et non
aux magistrats municipaux? On ne sait si le prœtor tuteîarius , est un nouveau pré¬
teur ou l’un des anciens : si on a retiré les questions de tutelle au consul pour les
lui donner, c'est que les consuls restaient trop peu de temps en charge pour s’occu¬
per avec suite de ces sortes d'affaires. Le chapitre sur Marc-Aurèle et les chrétiens,
est confus. La religion d'Etat ne s'est augmentée sous Marc-Aurèle d'aucun culte
nouveau. P. 56 , M. D. a suivi un texte inexact qui donne cunabulis au lieu de
funambulis . P. 89, le principe que le jus tombait en désuétude est faux. Une loi
n’était abrogée que par un acte formel.
M. Gebhart fait remarquer l'importance de la distinction entre les honestiores
et les humitiores. II renvoie M. D. à un mémoire de M. Duruy. Pourquoi Marc-Au¬
rèle soumet-il à la peine des verges l’homme de la plèbe, tandis qu'il en exempte
Yhonestior ? Différant beaucoup dans leurs opinions philosophiques, les empereurs
Antonins sont si semblables dans leur politique, parce que ce qui compte, c'est l'in¬
térêt de l'Etat. Plus que jamais au temps de Marc-Aurèle, il était nécessaire de con¬
server cette distinction, en face des barbares qui s’approchaient. L'égalité absolue
est absurde : une société où domine le désir de la réaliser est perdue. Toujours il se
fait une sélection, et l’empire l’a compris. Les Antonins ont élargi la classe des ho¬
nestiores. Dig. 27*1.-6.-8. On fait entrer dans cette classe des médecins, les profes¬
seurs, les vétérans qui ont obtenu Vhonesta missio.
M. Pigeonneau trouve aussi que les deux parties de la thèse ont une valeur fort
inégale. La seconde est travaillée et fort claire : la première a été un peu sacrifiée.
Sur tout ce qui touche aux cités, il y avait lieu à une étude topique et intéressante :
il y a cinquante ou soixante constitutions de Marc-Aurèle à propos des décurions
dans un titre du Digeste. Le chapitre de coilegiis ne contient presque rien. Il y avait
cependant des corporations qui offraient un intérêt tout particulier, celles des navi-
culaires par exemple. Les inscriptions et les constitutions fournissaient des docu¬
ments nombreux. Le chapitre sur la religion est légèrement fait. 11 y a eu à Rome
des persécutions contre les chrétiens sous les yeux de Marc-Aurèle : leur authenticité
du moins est à peu près certaine : des dates l'établissent. Marc-Aurèle a joué le rôle
de Trajan. Quand M. D. a parlé de la liberté, il n'a pas su se placer dans le milieu où
vivait Marc-Aurèle : il juge du point de vue actuel. Le christianisme^ ce moment-là,
n'a pas eu d'influence. La question du colonat est complexe et peu nette : il aurait
fallu n’en point parler ou l'étudier plus à fond. A propos de Yusucapio , M. D. est
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d’histoirb kt db littératurk 35
obscur ; pour le bien comprendre, il faut recourir aux Institutes. P. 98, il parle du
senalus-consulte de Sabinien : il aurait fallu dire ce que c’est.
Il
La thèse française de M. D. a trois parties : dans la première, il expose la biogra¬
phie d’Erskine; la seconde est consacrée à l’analyse de ses principaux plaidoyers ; la
troisième à l’étude de son style, à l’examen de ses rapports avec le jury, les juges,
les témoins, ses confrères. Dans un dernier chapitre, M. D. étudie l'éloquence parle¬
mentaire d’Erskine.
M. Himly trouve le sujet bien choisi et le livre intéressant, parce qu’il est cons¬
ciencieux et complet : il ne renferme pas d’erreurs ou n'en renferme que très peu.
Mais il est très froid : on n’est pas maîtrisé, dominé : le portrait n’est pas net et cela
tient à la composition du livre. M. D. dit qu’il a voulu surtout représenter le type
de l’avocat anglais. Ce sont les qualités de l’avocat qui dominent chez Erskine, et
ce sont elles qui ont nui à sa carrière de politique et de magistrat. L’éducation des
juristes anglais, surtout à la fin du siècle dernier, avant que la réforme du droit n'eut
eu lieu, était mauvaise : ils ne s’occupaient guère que de détails de procédure. C’est
dans ce milieu que s’est développé Erskine : il a réussi à être le premier avocat an¬
glais; ce sont surtout ses services comme avocat politique, ses services rendus à la
cause de la liberté à un moment où elle était en péril, qui l’ont placé au premier
rang. Pendant la terreur que Pitt faisait régner en Angleterre, il était à peu près
seul tn face du gouvernement tory. Tous csux qui semblaient partager les idées
françaises étaient en butte à des poursuites, et fort impopulaires. Erskine a établi
des principes libéraux, malgré les cours de justice et a réussi jusqu’à un certain point
à rallier à ses idées l’opinion publique. Il a eu plus d’originalité que les autres juris¬
tes : c’est qu’il a mené une vie aventureuse, il a été marin, soldat ; il s’est occupé
d’études assez diverses, surtout littéraires. 11 a abordé tard les études juridiques et
avec un esprit plus large que ses confrères, qui s’en tenaient à l’examen des cas par¬
ticuliers, sans se demander s’ils étaient dominés par des principes généraux. Comme
orateur parlementaire, il n’a brillé qu’au second rang, mais le temps où il a vécu était
la grande époque de l’éloquence anglaise. Il ne pouvait discuter dans l’abstrait : il
fallait qu’il mit sans cesse en avant un être vivant, réel : lorsqu’il était avocat, c’é¬
tait de son client qu’il se servait pour incarner ses idées, mais au Parlement il n’avait
d’autre ressource que de parler de lui-même et d’en parler constamment, ce qui las¬
sait à la longue. Le genre d’éloquence de la chambre des communes ne convenait
pas au talent d’Erskine : les discours y ressemblaient souvent à des conversations
d'affaires. Erskine était très nerveux, très impressionnable, mais il s’était rendu maî¬
tre du public restreint des cours de justice. A la chambre, le bruit, la désapproba¬
tion le troublaient : il perdait facilement le fil de son discours. Il avait une instruc¬
tion juridique étendue, mais il ne plaidait que devant les tribunaux de droit commun ;
jamais il ne plaidait devant les tribunaux d’équité. Aussi, lorsqu’il fut appelé à pré¬
sider la cour de la chancellerie, donna-t-il pendant le temps qu’il resta en charge
une idée médiocre de ses talents comme magistrat. Ses idées politiques étaient justes
en général, mais au parlement il ne sut pas les faire valoir. Pour M. Himly, Erskine
a été avant tout le jurisconsulte du parti whig : il a été un bon whig et le désir de
voir un ministère whig remplacer un ministère tory a dirigé sa vie politique plus
encore certainement que l’amour des libertés anglaises. L’extérieur d’Erskine a pres¬
que disparu dans la thèse de M. D. : à la fin de sa vie, Erskine s’est mésallié.
M. D. l’indique à peine.
M. Beljame trouve qu’il y avait matière dans le sujet qu’a choisi M. D. à un travail
sérieux et original. On aurait rendu service à Erskine en l’abandonnant comme
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REVUE CRITIQUE
homme politique, en insistant sur les grands services qu’il a rendus à la cause
libérale en Angleterre et pendant une partie de sa vie avec désintéressement. La
thèse est clairement composée : elle est écrite en français, ce qui est une trop rare
qualité. L’anglais est moins satisfaisant. Souvent, à la fin des lignes, les mots sont
mal coupés, ex, : Lord Chath-am. M. D. traduit toujours le mot anglais par le mot
français analogue qui ne le lui correspond pas quelquefois comme sens. Les textes
manquent souvent. Il y a des inexactitudes de traduction et parfois M. D. enlève au
texte de la couleur et de la vie. En titre, il aurait fallu mettre : Thomas, lord
Erskine. P. 146. M. D. dit que l’ouvrage d’Erskine, Armata , rappelle plus le Citoyen
du monde que Gulliver; il n’aurait pas fallu supposer le Citoyen du monde connu de
tous les lecteurs. P. 335 . 11 aurait fallu citer le juron d’Erskine qui n’est que rappelé.
C’est By God y Lord Clive l’a prononcé au Parlement, mais il est, paraît-il, unique
dans les débats judiciaires anglais. P. 17. M. O. dit qu’à l’Université, Erskine n’aspira
pas aux honneurs : c’est qu’ils n’existaient pas de son temps. P. 1 3 . Le nom est
Moor et non Marlow : Marlow est le nom de la ville dont M. Moor était représen¬
tant. P. 328. L’harmonie de la langue d’Erskine nous échappe; d’après M. D., cela
doit être, dit-il, jugé par les Anglais. C’est être trop modeste. Si M. D. n’en peut
juger, c’est qu’il n’a point été en Angleterre. Comme documents, M. D. ne cite guère
que des documents français ou documents anglais traduits. Parmi les travaux cités
p. 98, il n’y a que deux travaux anglais : l’un est cité d’après la traduction alle¬
mande, l’autre sur la traduction française. U y a une réserve perpétuelle et exagérée
sur la vie privée. M. D. n’a pas assez parlé des orateurs politiques qui parlaient à
côté d’Erskine; il passe trop vite sur Burke. Pourquoi n’a-t-il pas cité le mot de
Sheridan : c Erskine, vous avez trop peur de Paddy, c’est le côté fiasque de votre
caractère. » Au barreau, Erskine n’était pas seul ; les comparaisons avec ses confrères
manquent un peu. M. D. s’est trompé lorsqu’il a fait des plaisanteries que faisait
Erskine un trait de son caractère particulier et il s’est trompé parce qu’il n’a vu
qu’Erskine : ces plaisanteries autorisées par les juges sont une tradition dans les
tribunaux anglais.
M. Gebhart adresse à M. D. quelques questions sur l’interrogatoire des témoins
par les avocats en Angleterre.
Pour M. Bouché-Leclercq, la thèse ne donne pas tout ce que promet le titre : le
barreau anglais à la fin du xvm® siècle. La figure d’Erskine ne s’enlève pas, parce
que le fond manque. L’homme est peu vivant, et on apprend peu sur la société où
il a vécu. La partie historique est négligée. M. D. s’est trop complu dans les ana¬
lyses.
Le défaut principal du livre, d’après M. Lichtenberger, est dans son plan même.
Cette étude est divisée en deux grandes parties : la vie d’Erskine, ses plaidoyers.
Le détail des affaires est dans la première ; quand on arrive à la seconde, on l’a un
peu oublié. Il aurait mieux fallu suivre l’ordre chronologique et fondre les deux
parties. M. D. croit qu’en adoptant ce plan, il n’aurait pas pu montrer l’influence
d’Erskine sur la législation anglaise; mais, ce qu’on voit mal avec celui qu’il a
choisi, c’est le développement du talent de l’orateur. Il aurait fallu un chapitre sur
ce qu’il y a de particulièrement anglais dans l’éloquence d’Erskine. Un trait à citer,
ce sont les comparaisons empruntées aux animaux. Pourquoi le portrait physique
d’Erskine manque-t-il?
M. Rambaud ne voudrait pas que la thèse de M. D. devint un type de celle qu’on
soutient en Sorbonne. Elle ne contient pas de documents nouveaux, elle ne prête
pas à la discussion. P. 67. M. D. trouve futiles a les prétextes » de la déclaration
de guerre adressée au gouvernement anglais par la Convention. Ces motifs cepen-
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D’HISTOIRE gT DK LITTlteATURR
3 7
dant étaient nombreux et graves : elle ne fait que constater un état de choses. M. D.
se trompe sur les intentions de Pitt en 1790. On parle de la sagesse des wighs t
mais ils ne pouvaient arriver au pouvoir. Les feuilles dont Bonaparte demandait le
silence étaient celles qui étaient rédigées par des émigrés français. P. 11 5 . On ne
peut dire que Grenville et Fox aient commis une faute en ne cherchant pas de
nouveau à obtenir l’émancipation des catholiques; ils auraient rendu le roi fou.
M. Lange fait remarquer que M. D. s’étend, et avec justice, sur les sentiments re¬
ligieux d’Erskine, mais qu’il y a quelque vague sur la confession religieuse à la¬
quelle il appartient. Il était presbytérien d’origine ; son frère, sa mère ont été ar¬
dents presbytériens, mais, comme chancelier, il a dû devenir anglican. M. O. n'a pas
dit non plus en quoi consistaient ses sentiments de tolérance religieuse. M. D. répond
qu’Erskine était partisan d’une religion d’Etat : d’après lui, elles contribuent à
maintenir dans sa pureté la religion officielle. M. D. appelle l'Ecosse la terre classi¬
que de l’intolérance, est-ce bien juste?
M. Lallier regrette que la promesse qu’avait faite M. Duméril, de comparaisons
avec le barreau français et le barreau latin, ne soit pas tenue.
CHRONIQUE
FRANCE. — La Bibliothèque des Ecoles françaises d'Athènes et de Rome (Tho-
rin) s’enrichira prochainement de nouveaux fascicules : le 29 e , Les origines du sénat
romain , recherches sur la formation et la dissolution du sénat patricien , par
M. G. Bloch ; le 3 o e , Etude sur les lécythes blancs attiques à représentations funé¬
raires, par M. E. Pottier; le 3 i e , le Culte de Castor et de Pollux en Italie , par
M. M. Albert; le 33 e , Etude sur le culte des divinités d f Alexandrie (Sérapis, Isis ,
Harpocrate, Anubis), hors de VEgypte, par M. Lafaye; le 34 e , Terracine , par
M. de la Blanchkre; le 35 e , Francesco da Barberino et la littérature provençale en
Italie au moyen âge , par M. Antoine Thomas; le 36 e , Etude du dialecte chypriote
moderne et médiéval , par M. Mondry Beaudouin; le 37 e , Les transformations poli¬
tiques de l'Italie sous les empereurs romains (43 ans avant J.-C. — 35 o après J .-C .),
par M. Camille Jullian.
— Parmi les ouvrages en préparation, nous signalons, d’après la chronique de la
Société historique : de M. G. Lafenestre, une Histoire de la peinture italienne (Bi¬
bliothèque de l’enseignement des beaux-arts, Quantin); de M. André Michel, la pu¬
blication de la Correspondance inédite de Mallet du Pan avec l’empereur d’Allemagne ;
de MM. Molinier et Cavallucci, un volume sur les délia Robbia ; de M. O. Rayet,
un travail sur la topographeie d’Athènes ; de M. J. Roy, une Histoire de Turenne
d’après des documents des archives du ministère de la guerre; de M. H. Derbnbourg,
un Catalogue des manuscrits arabes de la Bibliothèque de l’Escurial; de M. G.
d’EicHTHAL, un Exposé et une Histoire de la doctrine saint-simonienne ; de M. J.
Facniez, une Histoire du commerce et de l'industrie sous Henri IV; de M. J. Flach,
un travail sur la propriété foncière dans les premiers siècles du moyen âge; de
M. Marc Fournier, un Essai sur les affranchissements au moyen âge; de
M. J.-J. Jussbrand, une Histoire abrégée de la littérature anglaise ; M. G. Hano-
taux, un volume sur Y Origine des intendants, avec pièces justiticatives, etc.
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P.KVUR critique
38
— Deux volumes nouveaux dans la collection Cerf : Histoire abrégée des Etats
généraux , par M. Jaliffier, et Histoire abrégée de la Révolution française , par
M. G. Dhombres.
— Deux nouvelles soutenances de doctorat à la Faculté des lettres : de M. Geor¬
ges Duruy, Le cardinal Caraffa, i 5 ig-i 56 1, étude sur le pontificat de Paul IV, et
De paciis a$no 1456 apud Valcellas indutiis; de M. Maurice Albert, Le culte de
Castor et de Pollux en Italie et De villis Tiburtinis principe Auguste.
— Le n° 5 du Bulletin de la Société historique (Cercle Saint-Simon) renferme :
i* la dernière partie de la conférence faite à la réunion du 28 février par M. Fran¬
cis de Pressensé sur M. Gladstone ; 2 0 un compte-rendu de la réunion du 19 mars
(audition de fragments des œuvres de Wagner); a le succès de cette soirée engagera
le Cercle à donner d’autres auditions du même genre destinées soit à faire connaître
une œuvre nouvelle, soit à montrer sous ses différentes faces le génie d’un musicien,
soit à faire ressortir le caractère original d’une musique nationale »; 3 ° la confé¬
rence du R. P. C. de La Croix sur les fouilles de Sanxay ( 3 i mars); 4 0 la conférence
de M. Flammermont sur les archives des ministères et les papiers d’état.
ALLEMAGNE. — La librairie Teubner annonce, comme devant prochainement
paraître : i° Archiv fur lateinische Lexicographie und Grammatik, mit Einschluss des
ælteren Mittellateins , travail préparatoire à un « Thésaurus linguae latinae », pu¬
blié sous les auspices de l’Académie royale des sciences de Munich, par M. Ed.
Wœlfflin; 2° un Index H orner i eu s, die homerischen Wortformen mit Ausschluss
der Verbalformen {usammengestellt , p. p. A. Gehring ; 3 * Adiumenta latinitatis,
Grundfüge des lateinischen Stils, avec morceaux de traduction pour les classes su¬
périeures des gymnases, p. p. Ern. Schulze; tfWœrterbuch %u Xenophons Helle -
nica, mit besonderer Rücksicht auf Phraséologie und Sprachgebrauch , p. p. C.
Thiemann, ; 5 ° et 6° une édition de la Germania de Tacite, p. p. George Kaufmann.
et du Pro L. Flacco de Cicéron; p. p. Adolf Du Mesnil.
— Paraîtront prochainement à la librairie Brockhaus : Die Poesie , de M. M. Car¬
rière, deuxième édition de son ouvrage : Das Wesen und die Formen der Poesie ;
— le 3 e volume des Memoiren %ur Zeitgeschichte d’Oskar Meoing (Gregor Samarow),
qui termine, sous le titre Im Exil , cette intéressante publication; — un ouvrage de
M. Ed. Sachau, Reise in Syrien und Mesopotamien (avec deux cartes de Kiepert et
vingt-deux gravures); — une traduction allemande du livre de l’Américain W. H.
Gilder, In Eis und Schnee , Die Aufsuchung der Jeannette-Expédition und eine
Schlittenfahrt durch Sibirien ; — une traduction allemande due Que faire? » de
Tschernyschewsky; — un volume nouveau de YAllgemeine Encyclopédie d’Ersch
et de Gruber ( 33 * partie de la deuxième section et 157 e de cette vaste publication);
— un livre, en deux volumes, de M. Oscar Lenz, Timbuktu , Reise durch Marokko,
die Sahara und den Sudan.
BOHÊME. — Nous avons sous les yeux le programme de la nouvelle université
tchèque de Prague. La philologie romane y est représentée par M. Jarnik, ancien
élève de l’Ecole des hautes études, qui traite de Molière , de la Langue du xvi* siècle
et du provençal. II y a, en outre, un lecteur de langue française, M. l’abbé Fauvin.
ETATS UNIS. — Le général Beauregard doit publier prochainement un livre sur
la guerre de la sécession.
POLOGNE.— M. Nehring, l’un des éditeurs de Y Archiv fur Slawische Philologie ,
a fait paraître à Posen (librairie Zupanski) une édition critique du célèbre Psautier
de Saint Florian. Elle est accompagnée d’un commentaire en latin.
RUSSIE. — M. Vserolod Miller, professeur à l'Université de Moscou, entreprend
une série d'études sur les Ossètes (peuple iranien du Caucase.) Le premier volume
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d’HISTOIRB KT DK LITTKRATURB
39
renferme une série de textes, une phonétique et une morphologie de la langue ossète ;
le second, des études sur la religion et les coutumes. Ces deux volumes (en russe)
se recommandent aux iranisants.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 2 g juin 1 883.
M. d’Hervey de Saint-Denys, au nom de la commission du prix Allier de Hautero-
che (numismatique ancienne), annonce que la commission a partagé ce prix entre
M. Barclay V. Head, pour ses deux ouvrages intitulés Coinage of Bæotia et Synop¬
sis of the contents ofthe British Muséum, departement of coins and medals t etc., et
M. Percy Gardner, pour son étude sur la numismatique deSamos, Samos and Sa -
mian Coins.
L’Académie se forme en comité secret pour s’occuper de l’attribution du prix
biennal de 20,000 fr., qui doit être décerné cette année par l’Institut, sur la propo¬
sition de l’Académie des inscriptions et belles-lettres.
L’examen des titres des candidats à la place de membre ordinaire, laissée vacante
par la mort de M. Laboulaye { est hxée au troisième vendredi de novembre.
M. Hauréau lit un mémoire intitulé tes Propos de maître Robert de Sorbon,
dans lequel il cite un grand nombre de traits piquants ou de boutades plaisantes,
tiréesdes écrits inédits et imprimés du fondateur de la Sorbonne, Robert de Sorbon,
qui avait, selon son contemporain Joinville, « grant renommée d'estre preudhomme »,
se montre, dans ses sermons et ses autres ouvrages, rigide observateur des règles
de la morale chrétienne et très sévère pour ceux qui les enfreignent ; il fait preuve
en même temps d’un esprit caustique, enjoué, prompt à la répartie; il est presque
toujours familier et souvent bourru.
M. Desjardins communique deux fragments d’une curieuse inscription romaine
de l’époque des Antonins, trouvés à Coptos (haute Égypte) par M. Maspero et dépo¬
sés aujourd’hui au musée de Boulaq. Cette inscription est destinée à conserver le
souvenir des travaux entrepris par deux légions romaines pour assurer la libre et
facile circulation sur la route de Bérénice a Coptos, et notamment pour fournir de
l'eau aux voyageurs. Un soldat dans chaque centurie avait été désigné comme con¬
ducteur de travaux pour diriger ses camarades. L’inscription complète donnait la
liste de ces conducteurs, au nombre de 120; l’un des fragments trouvés par M. Mas¬
pero fait partie de cette liste. Chaque centurie est désignée par le nom du centurion,
puis viennent le prénom et le nom du conducteur, le prénom de son père, sa tribu
et l’ethnique de la cité où il est né, le tout dans la forme suivante :
« Cohors quinta.
« Centuria Publili.
« C. Didius, C. filius, Pollia (tribu), Ancyranus.
« Centuria Gavisidi.
« C. Helvius, C. filius, Pollia (tribu), Gangrenus.
u Centuria Justiana.
« T. Antonius, T. filius, Sergia(tribu), Tauionensis. »
Et ainsi de suite. Le second fragment contient la fin de l’inscription. On y voit une
récapitulation du nombre des hommes employés aux travaux, 788 légionnaires,
424 cavaliers d’un corps et 61 d’un autre, puis l’indication des jours où le travail
a été achevé aux divers points de la route :
« Alarum III decuriae Vl. Duplarius I. Sesquiplicarii 1111 . Equités CCCXXllIl.
« Cohors I Thebaeorum, cui praeest Sextus Pompeius Merula. Centurio S. Teren-
tius Maximus. Centurio C. Julius Montanus. Centurio L. Domitius Aper. Summa
ceniuriones très. Fiunt supra scriptae cohortes Vil, centuriae X, équités LX 1 , mili¬
tes DCCLXXXUX.
c Per eosdem, qui supra scripti sunt, lacci (des citernes, Xdxxot) aedificati, dedi-
cati sunt :
* Apollonos Hydreum a. VII k. januarias.
«Compasi k. aueustis.
« Benericide XVill k. januarias.
« Myos Hormi idus januarias.
«Castra m. (milites;) aedificaverunt U refecerunt. »
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40 REVUE CRITIQUE D HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
Ouvrages présentés : par M. Le Blanc : une brochure de M. Blancard, archiviste
des Boucnes-du-Rhône. sur une question de numismatique marseillaise; —par M. De-
renbourg : Lévy (Raphaël), Un Tanah , étude sur la vie et l’enseignement d’un doc¬
teur juif [R abbi Mêirj du n® siècle; — par M.Oppert: Schwarz (Bernhard), recherches
astronomiques sur une éclipse solaire mentionnée par Archiloque et sur une autre
citée dans une inscription assyrienne (en allemand).
Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séances du 20 juin et du 27 juin i883.
M. le D r Plicque est nommé correspondant à Lezoux (Puy-de-Dôme).
M. l'abbé Thédenat communique une inscription gravée sur un sarcophage con¬
servé au Luc (Var). Cette inscription, assez mutilée, peut être restituée en partie,
elle contient un vœu en vers de Virgile :
( Vixi et J quern dederat cursum fort(una peregitj.
M. Bertrand présente à la Société sept têtes en bronze trouvées en 1873 sur le
territoire de la commune de la Croix Saint-Oucn. à 6 kilomètres de Compiègne, et
récemment acquises parle musée de Saint-Germain. Il incline à croire qu'elles sont
de travail gaulois et qu’elles remontent à une époque peu éloignée de la conquête.
M. Bertrand présente, en outre, une série de haches et de boucles provenant du
département de l’Aisne et qu’il vient également d’acquérir pour le musée de Saint-
Germain.
M. Mowat donne lecture d'un travail de M. Sacaze sur deux fragments d’inscrip¬
tions trouvés dans la vallée d'Aran, ancienne dépendance de la « civitas Couvena-
rum »; l’un d'eux contient le nom d’ilurberrixo, qui est probablement celui d’une
divinité.
M. Saglio présente un fragment de bijou en or émaillé, représentant saint Joseph
portant reniant Jésus. Il semble que dans cet ouvrage qui appartient à la dernière
partie du xv® siècle, on ait sous les yeux le travail d’un sculpteur s’essayant dans un
genre avec lequel il est peu familiarisé et réussissant tout d’abord dans les mor¬
ceaux exécutés le plus hardiment.
M. Héron de Villefosse communique une inscription découverte à l’Heuchie-
Belait (Tunisie), par M. Poinsot; c’est un fragment d'une dédicace à Maximus, fils de
Maximinus dont le texte a été effacé en l’annee 238 au moment ou le vieux procon¬
sul Gordien se fit proclamer empereur.
M. Héron de Villefosse communique ensuite l’épitaphe d’un cavalier d’une
cohorte auxiliaire trouvée récemment à Arlaines (Aisne) et conservée au musée de
Soissons.
Eug. Müntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2 S.
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Literarisches Centralblatt, n* 26, 23 juin 1 883 : Weiss, Das Lebcn Jesu.
II. (« Viel Lehrreiches und Treffendes »). — Supplementum codicis
apocryphi. I. Acta Thomae graece partim çum novis codicibus contulit
partim primus edidit latine, recensuit, praefatus est, indices adjecit Max
Bonnet. (Renferme la i r# édition complète du texte grec des « acta
Thomae » et de nouveaux textes sûrs des « miracula Thomae » et de la
« Passio Thomae » ; publication fort remarquable et qui fait grand
honneur à Max Bonnet). — Fisch, Die sociale Frage im alten Rom bis
zum Untergang der Republik. (Conférence sans prétention.) — Morosi,
L’invito di Eudossia a Genserico, studio critico. (A le mérite de démon¬
trer la complète invraisemblance du récit de Procope ; contribution très
importante.)— De Bbaucourt, Histoire de Charles VII, II. Le roi de
Bourges, 1422-1435. (Suite de cet ouvrage de grande valeur; recher¬
ches faites avec grand soin; jugement calme et réfléchi.)— Làdewig,
Poppo von Stablo u. die Klosterreformen unter den ersten Saliern. (Très
bonr travail.) — O. Seemann, Die Aebtissinnen von Essen, nach dem
Brüsseler Catalog mit Varianten u. Anmerkungen hrsg. — Delarc, Les
Normands en Italie depuis les premières invasions jusqu'à l’avènement
de Grégoire VIL (La science allemande ne tirera pas grand profit de cet
ouvrage; l’auteur connaît les sources, et il a de la critique, quoique cette
critique ne soit pas toujours profonde et n’obtienne qu’à peine de nou¬
veaux résultats.) — Forst, liber Buchanan’s Darstellung der Ge-
schichte Maria Stuart’s. (Recherches menées avec une saine critique.) —
Diesenhamer, Meine Reise um die Welt. — Feldmann, Lateinische Syn-
tax in den Hauptregeln mit Rlicksicht auf die Ergebnisse der verglei-
chenden Sprachwissenschaft zusammengestellt. (Peut servir.) — Stobz,
Zur lateinischen Verbalflexion. (La valeur de cet ouvrage réside plus
dans la critique des vues opposées que dans ses propres assertions posi¬
tives, qui, néanmoins, sont habilement exposées et méritent l’attention.)
— G. Raynaud, Inventaire des manuscrits italiens de la Bibliothèque
nationale qui ne figurent pas dans le catalogue de Mansard. — Appel,
Das Leben u. die Lieder des Trobadors Peyre Rogier. (Edition satis¬
faisante, remarques intéressantes.) — Bibliothek der angelsâchsischen
Poesie, begründet von Grein, neu bearbeitet, vermehrt und nach eige-
nen Lesungen der Handschriften hrsg. v. R. P. Wülcker. 1 , 2. —
Karten von Attika, aufgenommen durch Officiere u. Beamte des grossen
Generalstabes, hrsg. v. E. Curtius u. Kaupert. Heft II von Milchho-
fer. — Kelchner, Die Marienthaler Drucke der Stadtbibliothek zu
Frankfurt am Main, bibliographisch beschrieben.
Deutsche Litteraturzeitung, n* 25 , 23 juin 1 883 : Handbuch der theo-
logischen Wissenschaften in encyclopâdischer Darstellung hrsg. von
Zôckler. III. — Das Ungarische Unterrichtswesen am Schlusse des
Schuljahres 1879-80. — Kaufmann-Hartenstein, Ueber die wichtigsten
Resultate der Sprachwissenschaft. (Jülg : bon ouvrage, excellent ré¬
sumé sans inexactitudes.) — Strassmaier, Alphabetisches Verzeichnis
der assvrischen u. akkadischen Wôrter im zweiten Bande der « Cunei-
form Inscriptions of Western Asia » sowie mehrerer anderer meist
unverôffentlichten Inschriften. (Schrader : ouvrage auquel il faut
souhaiter une suite, et qui sera utile.) — Discours de Cicéron pour le
poète Archias, p. p. Emile Thomas. (H. J. Millier : très soigne, notes
critiques fort instructives, texte constitué d’après de sains principes cri¬
tiques.) — Gerber u. Greef, Lexicon Taciteum; fasc. V. (Prammer :
de t fortuna » à « impero. ») — Sittl, Die localen Verschiedenheiten
der lateinischen Sprache mit besonderer Berücksichtigung des afrika-
nischen Lateins. (Thurneysen : beaucoup de points nouveaux, mais
assertions trop incertaines et conclusions trop hardies.) — Briefe von
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Ernestine Voss an Rudolf Abeken, hrsg. von Polle. — Bijwanck,
Spécimen d’un essai critique sur les œuvres de François Villon (Ad.
Tobler : Fauteur est fait pour accomplir la tâche difficile qu’il se pro¬
pose, bon jugement, grand soin dans les recherches). — Jung, Die ro-
manischen Landschaften des rômischen Reiches, Studien über die
inneren Entwickelungen in der Kaiserzeit. (Seeck : livre qui n’est qu’un
répertoire peu maniable, « recht unhandlich » de la littérature du su¬
jet; si l’on veut prendre la peine de le feuilleter, on y trouvera maint
renseignement utile, mais il ne faut pas se fier à ses citations et il vaut
mieux recourir aux sources originales.) — A secret négociation with
Charles the first 1643-1644 edited from the Tanner mss. in theBodleian
library, by Bertha Meriton Gardiner. (A. Stern : recueil d’actes impor¬
tants inconnus jusqu’ici.) — Jahrbuch der kunsthistorischen Sammlun-
gen des allerhôchsten Kaiserhauses, hrsg. unter Leitung des Oberstkàra-
merers Franz Grafen Foluot de Crenneville. I. — BâHR, Das
Tonsystem unserer Musik. — Exner, Grundriss zu Vorlesungen liber
Geschichte und lnstitutionen des rômischen Rechts. —Von Richtho-
fen, Untersuchungen über friesische Rechtsgeschichte. II. (Schrôder.)
— D’Ideville, Le maréchal Bugeaud, d’après sa correspondance intime
et des documents inédits, tome III. (Matériaux assez bien rassemblés,
mais sans critique historique et sans préparation suffisante.)
Archiv fin* Slavische Philologie. Tome VII. 1 : Einleitung in das Johann
Alexander Evangelium Scholvin (Evangile bulgare conservé en Angle¬
terre, renfermant les portraits de quelques tsars bulgares). — Beitràge
zur russischen Grammatik (Schachmatow). — Zur mittelalterlichen
Erzàhlungsliteratur aus dem Bulgarischen (Syrku : commentaires de
Kahler). — An\eigen : Netusil, l’aoriste en latin. — Katchanovski,
Monuments de la littérature populaire bulgare. — Boudilovitch , Es¬
quisse de la grammaire slavonne (insuffisant). — Eucologue slave du
Sinaï publié par Geitler. — Mots slaves et Scandinaves (J. K. Grot). —
Publications de la société des bibliophiles russes (Bonnes publications;
quelques travaux d’amateurs). — Bibliographie.
Revue de l’instruction publique (supérieure et moyenne) en Belgique,
tome XXVI, 3 ° livraison : Fredericq, De l’enseignement de l’histoire
dans les athénées. — Gillet, Du choix d’une méthode uniforme pour
l’enseignement des langues anciennes. — Thil-Lorrain, Péroraison de
l’oraison funèbre du prince de Condé. — Hubert, Les réformes de
Marie-Thérèse dans l’enseignement moyen au Pays-Bas. — Comptes-
rendus; Dahl, die lateinische Partikel ut. (Fait avec soin.) — Prammer,
Caesaris Commentarii de Bello Gallico. (P. Thomas : livre recomman¬
dai^)_
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L’EMPIRE JAPONAIS
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Le fascicule I du tome II vient de paraître.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent. 23 .
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 582, 3 o juin 1 883 : Hayden a. Selwyn, North Ame¬
rica, edited and enlarged, Stanford’s Compendium of geography and
travel, based on Hellwald’s die Erde und ihre Vôlker. (K. Brown). —
The Leofric Missal, as used in the cathédral of Exeter during the epis-
copate of its first bishop, 1050-1072, together with some account of the
Red Book of Derby, the Missal of Robert of Jumièges, and a few other
early manuscript sériés books of the english church. (J. Dowden). —
Vsevelod Miller, Osetinskie Etyudy. (Ralston : œuvre de patient la¬
beur, où l’auteur a fait un excellent usage des matériaux qu’il avait
rassemblés avec soin.) — Bishop Colenso. (Westlake.) — Mrs. James
Owen. — Notes and queries on the « Eikon Basilike » (Doble.) — The
Ashburnham collection. (Windisch a. Perceval.) — Demosthenes
against Androtion and against Timocrates, pj). Wayte. (Mahaffy : très
satisfaisant). — Persian wit andhumour(R. F. Burton : sur Nureddin-
Jami, le fameux auteur du « Yusuf et Zulaykha » et son sixième livre
du Bubaristan, que vient de publier M. Charles E. Wilson sous le titre
« Persian wit and humour. ») — The Abu Simbel inscription.
(Isaac Taylor.) — J. Paul Richter, Italian art in the National Gallery.
(Cosmo Monkhouse.)
Deutsche Litteraturzeitung, n° 26, 3 o juin 1 883 : Lotz, Quaestiones de
historia Sabbati. (Wellhausen.)— Jansen (K.), Aleander am Reichstage
zu Worms i 52 i. (Kolde : instructif.) — Meinong, Hume Studien. II.
Zur Relationstheorie. Gedanken über das Studium der modernen Spra-
chen in Bayern an Hoch-und Mittelschule (H. Varnhagen). — Der
Rigveda oder die heiligen Hymnen der Brâhmana, zum ersten Male ins
Deutsche tibersetzt, mit Commentar u. Einleitung von A. Ludwig. V.
(Hillebrandt : conclusion de cette traduction et de ce commentaire du
Rigveda.) — Sylloge inscriptionum boeticarum dialectum popularem
exhibentium, comp. Larfeld (Hinrichs : travail fort estimable et utile,
définitif à certains égards, qui témoigne d’un grand soin, de sagacité et
d’indépendance de jugement; manque d’index.) — Marquardt, Das
Privatleben der Rômer II. (R. Foerster : un des meilleurs manuels que
nous possédions.) — Gœthes Iphigenie auf Tauris, hrsg. v. J. Baech-
told. (J. Minor.) — Hiller, Gœthes musikaliches Leben. (Minor :
esquisse aimable, petit livre intéressant écrit avec chaleur.)— Moleschott,
Hermann Hettners Morgenroth 1847-1851. (Eloge enthousiaste delà
jeunesse, de « l’aurore » de Hettner.) — Norton a. Sackville, Gorboduc
or Forrex and Porrex, a tragedy edited by T. Smith. (Zupitza : très
bonne édition.) — Vulliemin, Geschichte der schweizeriscnen Eidgenos-
senschaft, deutsch von J. Keller. (W. Bernhardi.) — Collection des
voyages des souverains des Pays-Bas, p. p. Gachard et Piot. (Phi-
lippson : publication très importante.) — Inventaire sommaire des ar-
cnives communales de la ville de Strasbourg antérieure à 1790, p. p.
Brucker. — Schwicker, Die Zigeuner in Ungarn und Siebenbürgen.
(Tomaschek : livre de vulgarisation écrit avec aisance et très agréable à
lire.) — Kekulé, Zur Deutung und Zeitbestimmung des Laokoon.
(H. Blümner : très importante étude d’ensemble.) — Lenel, Das edic-
tum perpetuum.
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 27, 4 juillet i883 : Brunnhofbr, Gior-
dano Brunos Weltanschauung und Verhàngniss, aus den Quellen dar-
gestellt. (Sigwart : travail qui a le mérite de reproduire, dans toute leur
abondance, les pensées remarquables et les idées fécondes de Bruno.) —
StAun, Geschichte Württembergs, I, 1, bis 1268. (Stàlin). — Nachtrag
zur Schlacht von Muret (articles sous forme de variétés, de G. Kôhler,
sur les a servientes équités »). — Prosch, Klinger’s philosophische Ro¬
mane. (Minor : très bon travail.)
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
3» 29
— 16 Juillet —
1883
Sommaire s 145. Schrader, Les inscriptions cunéiformes et l’Ancien Testament.
— 146. J. Martha, Les sacerdoces athéniens. — 147. De Felice, Lambert
Daneau. — Lettre de M. Chassang. — Chronique.— Académie des Inscriptions.—
Société des Antiquaires de France.
145. — Die Kelllnachrlften un cl daa Alte Testament) von Eberhard
Schrader. Mit einem Beitrage von D r Paul Haupt. Zweite umgearbeitcte und
sehr vermehrte Auflage. Nebst chronologischen Beigaben, zwei Glossaren,
Registern und einer Karte. Giessen, J. Ricker’sche Buchhandlung, 1 883 .
La première édition de ce livre, parue en 1872, a provoqué en Allema-
magne un mouvement favorable aux études assyriologiques, lesquelles
étaient reçues jusqu'alors avec un superbe dédain par les doctes titulaires
des Universités. La nouvelle édition est presque augmentée de moitié,
l'auteur y ayant ajouté une foule de choses découvertes sur le domaine des
cunéiformes dans les dix dernières années. De ce nombre sont les récits
mythiques relatifs à la création et au déluge. La traduction de la tablette
du déluge a été confiée par l’auteur à M. P. Haupt, dont l’écrit est inséré
(pp. 55-79) sous I e iltrQ d* Excurs, ayant son glossaire à part (glossaire 1,
pp. 493-521). Le livre a pour objet de contrôler les données historiques
ou légendaires de la Bible au moyen de la littérature assyro-babyIo¬
nienne, à laquelle l’auteur attribue, en général, un degré supérieur de
véracité. Cette tendance à écarter les données bibliques toutes les fois
qu'elles paraissent vouloir se soustraire à la tutelle des annales assyrien¬
nes, loin de nuire à l’ouvrage de M. Schrader, en rehausse singulièrement
la valeur; car, comme, à tout prendre, les documents hébraïques sortent de
cette épreuve sans être gravement atteints, si l’auteur était plus croyant,
ses résultats auraient pu être suspectés de partialité. En dehors des faits
d’une portée historique, M. Sch. passe en revue l’ensemble des écrits
bibliques en y relevant tous les noms propres, termes populaires, expres¬
sions et locutions sur lesquels les parallèles cunéiformes jettent une lu¬
mière quelconque, soit pour en établir la forme indigène, soit pour en dé¬
montrer le caractère sémitique commun.
Je n’ai pas l’intention de résumer, même sommairement, les nombreux
articles d’un ouvrage aussi plein de faits et de matière à méditation; je
me borne à lui prédire qu’il sera partout accueilli avec empressement
comme un manuel indispensable. Je regrette seulement d’avoir à signaler
dans cette édition une innovation qui pouvait et devait manquer. Je veux
parler de cet élément confus et chimérique qu'on nomme langue sumé-
Nouvclle série, XVI. 29
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REVUS CRITIQUE
4 2
rienne ou accadienne. Dans maint endroit l’hésitation de l’auteur entre
le sémitisme et l'accadisme des mots assyriens déroute le lecteur, tandis
que, dans d’autres endroits, celui-ci ne manque pas de trouver peu
fondée l’assurance avec laquelle des termes sémitiques communs sont
enregistrés dans le lexique accadien. Appuyer ses affirmations de
quelques preuves bien choisies, surtout quand il s’agit d’une matière
aussi controversée, est un devoir inéluctable pour tout philologue
sérieux. On ne supprime pas les opinions contraires, en feignant de les
ignorer. Mais, n’insistons pas et terminons par quelques observations de
détail.
P. 12. Pour la traduction des lignes 3 - 6 , voyez Mélanges de critique
et d’histoire, p. 386 . — Un dieu Shar n’existe pas; c’est Asshur qu’il
faut lire. — P. io. Je crois maintenant, avec M. Lenormant, quel’Oan-
nes(= Oès) de Bérose n’est pas Anu, mais lau(-Au), dieu de la mer
qui porte le titre de « sage des dieux ». — P. i 3 . La forme arménienne
Marghaja atteste que r O|i.6pü)xa est corrompu de 'OpipwXa; cette forme
reproduit l’assyrien ûm-Uruli « mère de l’Hadès, ou des morts ». —
P. 16. Musha iktipa signifie « il surveilla la nuit »; comparez kipdni
« gardiens, surveillants ». — P. 18-19. On ne trouve nulle trace de la
semaine dans les textes assyro-babyloniens connus. L’auteur a oublié
que dans l’hémérologie (R. VI, 32 , 34) qu’ii.cite les jours distingués
ne sont pas seulement le 7% le 14 e , le 21 e et le 28% mais aussi le 19 e ,
ce qui exclut absolument l'idée delà semaine et du Sabbat. Cette hémé-
rologie appartient d'ailleurs à un mois adventice, savoir le 2 d Eloul
des années bissextiles, et il n’est pas prouvé que les jours y mentionnés
comme fastes ou néfastes avaient ce caractère dans les autres mois.
L’expression umu magru (ud she) f se répétant dans les autres 25 jours
de ce mois, ne saurait signifier « jour de consécration (Tag der
Weihe » mais « jour faste ou heureux », dans lesquels on peut
manger toute nourriture et faire tout ce qu'on veut, tandis que les
cinq jours précités sont à la fois fastes et néfastes, au point qu’on y
défend à certains personnages de manger certains aliments ainsi qué
d’entreprendre certains travaux. A la ligne 3 o, je lis shîru (am-be)s
sha inapênti bashlu nin tumri ul ikal « (que le chef des grands pays) ne
mange pas de viande cuite sur des braises (péntu = pêmtu pour pa'hamtu,
héb. pé'hâm ), ni aucune sorte de dattes ». Comme on voit, ce sont des
jours de morgue et nullement des jours de fête et de repos récréatif
comme les sabbats des Hébreux. En assyrien même, le mot shahattu,
formellement expliqué par ûm nû'h libbi « jour du repos de coeur », dé¬
signe un jour de réjouissances publiques, et l’idée de l’appliquer à des
jours de mi-caréme nous paraît assez singulière. —P. 23 . Il est profon¬
dément regrettable que l’auteur ait accueilli une étymologie aussi creuse
que celle qui tire l’hébréo-assyrien sar, sarru « roi » avec ses nombreux
dérivés et analogues (sôrér « dominant », histârêr « se poser en roi,
dominer t,sdra-sharrat « reine », sdrâ « rivaliser, lutter », misrâ et do*
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d’histoire ET DE LITTÉRATURE 43
Himation ») de l’accadien shirra « guide, conducteur », lequel est en
réalité composé de ski « en avant » et de ir « aller », calquant ainsi
le titre royal assyrien alik mahri « celui qui va en avant ». — P. 3 o.
Sur la prétendue équation Meluhha^ Accad, voyez M. C. H., pp. i 5 i,
i5a. — P* 44. La transcription habal pour abal (ablu) t fils » a été
inventée exprès pour donner une nouvelle étymologie au nom d’Abel
(Hebel), quia un h initial ; elle est simplement à rejeter. Le mot assyrien
vient de la racine yabal « produire », d’où le pseudo-accadien ibila. —
P. 55 . La traduction de la tablette du déluge par M. Haupt réalise un
progrès notable, mais l’assimilation du ’A assyrien au kh arabe est
incompatible avec la phonétique des langues sémitiques du nord. La
prétention de corriger l’orthographe assyrienne d’après les résultats de la
philologie comparée est décidément blâmable et aboutit à de nombreuses
erreurs. La transcription littérale du texte, avec ses hésitations et incon¬
séquences, peut seule donner une idée exacte de l’idiome antique. —
P. 60. Le nom hiératique du Noë babylonien HIS (VD) ZI, se lit
Hasis-adra, non pas Shamasch-Napishtim. — P. 61. Le métier de porter
les trônes des autres dieux doit être bien gênant pour Adar, dieu des
batailles, armé de pied en cap; gu\alu signifie « agent » et non pas
« porteur du trône ». L'hiératique gu\a-lal constitue du reste un rébus
dont le premier élément vient du démotique Kussu (r. Krs) « siège,
trône ». La racine de Kishkishu « fervent adorateur (?) » vient plutôt de
Kshsh que de Kâsh ; cf. Kaskushu = urshanu « puissant ». — P. 62.
Malgré tout, le mot adannu (1. 3o, 33 ), semble signifier « sentence,
proclamation », et non pas« terme fixe » *. La proclamation annonçant
la fin prochaine du genre humain a été répétée, pour la seconde fois,
avec plus de force ( iqrida , non iqriba). — Le verset 35 n’a pas été
compris; il faut transcrire arba umi attathal tunashu « pendant quatre
jours je regardais sa face », c’est-à-dire lé face du soleil couroucé
dans l’espoir que pour l’amour de moi, il rapporterait sa terrible
sentence. Hasis-Adra n’entra dans le navire que le jour où, saisi
de peur, il n’osa plus regarder le soleil en face ( 1 . 36 ). — P. 65 . L’expli¬
cation du nom de Adrahasis par l’aocadien ad-ra~ha-sis = « père-
inondation-poisson-frère » est du plus haut comique. Elle donne une
juste idée des' services que l’accadisme rend à la philologie sémitique.
— P. 77, note. Le prétendu dilbat = ôsXé®aT doit se lire rubat ; la forme
grecque répond à l’araméen d-lhêbat « étoile flamboyante, Vénus ». —
P. 96. Quoi qu’en dise l’auteur, 4 ssAnr est bien un personnage dans la
Genèse, x,n, comme dans la Genèse, x, 22, et Michée, v, 5 a . L’expression
rêshît mamlaktô (Genèse, 10), quand même elle signifierait « le commen¬
cement de sa domination », indiquerait seulement que le reste de la Ba-
bjrlonie (erec Shin‘dr) a été conquis par Nimrod quelque temps après
les quatre villes énumérées. Assur personnifie en même temps l’Assyrie
1. Voyez M.C.H. p. 3 o 3 , 29 e .
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44
et la Babylonie ; autrement cette dernière n’aurait aucun représentant
dans la liste des patriarches, puisque Nimrod ne fonde rien dans ce pays.
Du reste, si la fondation de Ninive appartenait à Nimrod, le nom d’As¬
syrie serait tout à fait déplacé. — J’ai montré, depuis longtemps, que le
biblique Kalné est le Kidlanu des textes cunéiformes. L’orthographe
Kul-unu repose sur un rébus. — P. 102. Le nom hiératique de Ninive,
ab-ha « maison ou demeure du poisson », joue sur les formes analogues
ninua (héb. nâwê\ « demeure », et nurtu « poisson ». — P. 116. Le Aram
naharaïm de la Bible ne désigne aucune partie de Mésopotamie, mais
la haute Syrie, située entre l’Euphrate et l’Oronte. — P. 118. On ne
peut pas assez répéter qu’une forme pseudo-accadienne shûngêr, qui
serait le Shin'âr hébreu, nom de la Babylonie, n’a jamais existé. M. Sch.
avait, dans la première édition, trouvé la vraie étymologie du nom, c’est
shené 'âr(im) « deux villes », savoir Sumir et Accad. Je suis arrivé à
cette étymologie d’une façon indépendante, et je regrette de la voir rem¬
placée ici par une fantaisie empruntée aux accadistes. — P. 119, note.
J’espère que M. Schrader reconnaît déjà lui-même que son mémoire de
1875 ne suffit plus pour prouver l’existence de la langue accadienne. —
P. 1 35 . Le nom Amraphel se restitue facilement (ilu)-imur-pal « (Dieu)
a vu le fils. » — P. ip 3 . En dépit de ma meilleure volonté, je persiste à
croire que Achab d’Israël n’est pas mentionné dans les annales assy¬
riennes, lesquelles ne connaissent qu’un A’habu de Su ali ou Sam'ali,
ville de la Syrie moyenne. Cette hypothèse écarte une des grosses diffi¬
cultés chronologiques que l'auteur discute à la page 465 suiv. — P. 280.
Sur Sepharwaïm, voyez M. C. H., p. 262. — P. 280. L’explication de
Sukkôt-benôt est donnée dans M. C. H., p. 406. — P. 283. Tartak ,
lisez Tartaq . Il n’existe pas de dieu Itak, c’est Ishum (Feu) qu’il faut
lire. — P. 309-320. La voyelle ê de l’hébreu Rabshaqê est la désinence
du pluriel, en assyrien rab-shaqê a le (plus) grand des chefs ». La forme
hiératique shu-par-shaq représente l’inversion du démotique shaqû (au
pl. shaqé) shipri « chef des affaires ». — P. 329. Sur Nisroch, voyez
M. C. H., p. 117, note 1. — P. 366 . Pourquoi le nom d’homme hébreu
Shemîrâmôt, 1 (sic!), chr. xv, 18, serait-il emprunté à l’assyrien Sam-
mur amat, qui est un nom de femme, et dont le premier élément n’a
rien de commun avec shêm « nom »? — P. 38 o. Du-u^u ou Du~u-$u
est simplement à lire Tumu\u , Tum'u\u ; c’est l’hébreu Tammû \. —
P. 424. Le mot assyrien transcrit en hébreu thipsar est tupsharu; il vient
de la racine pasharu « expliquer, interpréter, etc. >. La forme dup-sar
« tablette*écrivant » est un rébus analogue à' dam-gar « maître de la¬
beur » du démotique tamkaru ou tamgaru (r. mkr, mgr) « travailleur,
laboureur ». — P. 611. Sur la lecture Arba-nuni pour Arba'ha, voyez
M. C. H., p. 413, note. — P. 617. Pour Adra\dâ, voyez ibid., p. 435.
Je le répète, si l’on fait abstraction des étymologies accadiennes
qui doivent être impitoyablement retranchées, cette nouvelle édition
offre un surcroît d’intérêt et d’utiles renseignements, non-seulement sur
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D’HISTpIRK RT OR LITTÉRATURE 4 5
le domaine biblique, mais pour l'archéologie sémitique en général, et je
lui prédis un légitime succès.
J. Halévy.
146. — Le» flacerdocea athénien», par Jules Martha. (Fascicule vingt-sixième
de la Bibliothèque des Ecoles françaises d'Athènes et de Rome). Paris, E. Thorin,
1882. In-8 de yiii-i 84 p.
Les sacerdoces helléniques n’avaient été étudiés jusqu’ici que dans
leurs caractères les plus généraux, sans distinctions suffisantes d’épo¬
ques ni de pays. Si l’on songe à la variété des cultes grecs, à leurs
accroissements successifs, aux conditions diverses où les prêtres se trou¬
vaient placés suivant les régions et suivant les sanctuaires, on compren¬
dra qu’une telle méthode entraînait bien des erreurs. Le prêtre, aux
temps homériques, n’est pas ce qu’il sera au siècle de Périclcs ; ce qui
est exact pour Delphes ne l’est pas pour Athènes ; ce qui est vrai du culte
de Héra ne l’est plus de celui de Déméter. Sera-t-on donc réduit sur ces
questions à des études de pur détail? Devra-t-on se contenter d’écrire les
monographies isolées de tel ou tel sanctuaire célèbre? M. Jules Martha
ne la pas pensé. Décidé à ne pas se perdre dans d’imprudentes généra¬
lisations, il a cru cependant possible d’établir un lien entre les faits par¬
ticuliers dont la réunion compose un chapitre important de l’histoire
des sacerdoces grecs. Comme il le fait observer justement, les prêtres,
en Grèce, « sont tous les magistrats d’un même état et s’acquittent de
leurs fonctions suivant une loi commune qui varie avec la constitution
de chaque cité ». On peut donc considérer les institutions sacerdotales,
non dans tel sanctuaire, mais dans telle ville déterminée. M. M. a entre¬
pris ce travail pour Athènes. Mais il a voulu borner son étude « aux
temps où la constitution athénienne développait scs principes en toute
liberté, c’est-à-dire entre le cinquième et le troisième siècles avant notre
ère ». On ne se plaindra pas que l’auteur ait ainsi limité le terrain de
ses recherches pour le fouiller plus profondément.
Les divisions du livre sont très nettes. Après avoir classé les sacerdoces
athéniens *, en distinguant surtout ceux qui étaient annuels de ceux qui
étaient patrimoniaux, M. M. étudie successivement : le choix des prê¬
tres; leurs fonctions diaconales (service dans l’intérieur du temple auprès
de la statue de la divinité); leurs fonctions liturgiques; leurs fonctions
administratives, leurs droits et privilèges, leur responsabilité. Ces divi¬
sions correspondent bien aux parties essentielles du sujet. Il est à regretter
seulement que M. M. ait cru devoir exclure de son plan l’étude des
1. Remarquons que M. M. s’en tient aux sacerdoces publics, a k ceux qui célébraient
des sacrifices au nom du peuple athénien tout entier et dans les temples des divi¬
nités nationales >.
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fonctions mystiques des prêtres d'Eleusis. Sans doute, ces fonctions sont
intimement liées à la constitution mal connue des Mystères. Mais, Tin-
suffisance de nos renseignements sur l’organisation de la religion éleusi-
nienne est-elle une raison suffisante pour ne pas toucher aux questions
qui s’y rapportent? Personne n'eût exigé que M. M. fît la lumière sur
des points qui resteront peut-être toujours obscurs ; chacun lui eût su
gré de marquer où commencent et où s'arrêtent, en pareille matière, nos
connaissances l .
Dans l'étude de chacune de ces questions, l’auteur apporte une mé¬
thode exacte, une critique généralement sûre, qui n’accorde aux hypo¬
thèses que la place qu'on ne saurait leur refuser. Quand les témoignages
positifs font défaut, il est bien quelquefois entraîné à déduire, de ce qui
se passait ailleurs, ce qui devait se passer à Athènes, mais il n’abuse pas
de l’analogie, et surtout il se garde de transformer ses conjectures en
certitudes. Bien que les faits qu’il cite soient très nombreux, son livre
n'est pas une collection de faits. Les documents, en effet, textes d’auteurs,
textes épigraphiques surtout, sont très habilement groupés et coordon¬
nés, et Ton emporte des idées nettes, des notions claires de la lecture de
chaque chapitre. De ces mille détails, M. M. a su d'ailleurs tirer des
conclusions générales qui ont leur importance. Ces conclusions sont
exprimées sous une forme d’une si rigoureuse précision qu'elles ont pu
paraître trop absolues. M. M. reste cependant dans les strictes limites
du vrai, quand il affirme, entre autres choses, qu'à Athènes, les prêtres,
gardiens des rites traditionnels, maîtres des cérémonies du culte officiel*
n'avaient et ne pouvaient avoir aucune action sur les croyances. Les
Ypaçal àasjteCaç ne prouvent rien contre cette assertion; elles la confirment
plutôt. En fait, les prêtres ont été complètement étrangers aux poursuites
dirigées contre Socrate et quelques autres. Comment, d'ailleurs, un prê¬
tre élu pour une année seulement, et attaché à un seul culte déterminé,
eût-il été plus intéressé que tel ou tel de ses concitoyens à surveiller et
à dénoncer l'impiété? Le titulaire même d'un sacerdoce patrimonial
n’aurait eu motif d’intervenir que si les cérémonies du dieu ou du héros
particulier dont il desservait le sanctuaire eussent été violées. Dans un
pays où il n’y avait pas de clergé, pas de corps sacerdotal, comment des
coalitions sacerdotales, formées dans un intérêt dogmatique, eussent-elles
été possibles? Les accusations générales d’impiété doivent s’expliquer
autrement que par l’action des prêtres. Sur ce point comme sur les au¬
tres, la doctrine de M. M. nous semble inattaquable, et nous partageons
toutes les vues de son chapitre de conclusion, chapitre écrit d’une plume
si ferme.
Le travail de M. M. ne nous parait avoir d'autre défaut que de ne
1. Ce qui montre que la question appartenait au sujet, c’est que, dans le catalogue
qni est en appendice à la fin du volume, M. M. s'est vu forcé d'énumérer, avec quel**
ques brèves indications, les ministres du culte d'Eleusis.
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D'HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
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pus satisfaire, sur tous les points, notre curiosité. Qu’était-ce, à Athènes,
qu'un Upî'uç rcupfépoç, un Ups'uç XtOoçépoç, un Upsv; (îcuÇuyiqç? Qu’était-ce
encore que le 6uv)xéoç? L’auteur n’en dit rien. Il est vrai qu’il s’est trompé,
comme nous le verrons tout à l’heure, sur la valeur de quelques unes de
ces expressions. Les renseignements qu’il nous donne touchant les ser¬
viteurs inférieurs du culte sont trop brefs. On s'étonne aussi, en lisant
le chapitre des fonctions liturgiques, de n'y trouver aucune indication
sur la part que prenaient les prêtres aux cérémonies purificatoires. Pour
citer un exemple, les TCeptariapxot, qui purifiaient l’Assemblée du peuple 1
avec le sang des jeunes porcs qu’ils venaient de sacrifier, devaient être
des tspetç a . Sans nous arrêter à d’autres détails peu importants 3 , arrivons
à la partie de l’ouvrage de M. M., qui est la moins complète, c’est-à-
dire à son catalogue des cultes athéniens. Ce catalogue était, il faut le
le reconnaître, difficile à établir, l’auteur n’ayant voulu y faire entrer
que les divinités « qui étaient l’objet d'un culte public chez les Athéniens
avant l’époque romaine ». Comment déterminer que tel ou tel culte est
antérieur à cette date? La chose est souvent bien délicate. Ecartera-t-on
tous les noms dont la mention ne se trouve que chez Pausanias ou dans
les inscriptions d’époque impériale? Une telle exclusion serait, dans cer¬
tains cas, d’une rigueur tout à fait inexacte. En réalité, M. M. a été
obligé d’admettre plusieurs noms d’après ces seules sources. Mais l’in¬
certitude de la méthode à suivre explique comment il en est d’autres qui
lui ont échappé. Voici quelques divinités qu’il ne cite pas et dont le
culte nous paraît remonter à une époque assez ancienne.
Àfysûç. Dinarque, chez Harpocr. kl^eXov. Pausan., I, 22, 5 . Bekker,
Anecd., p. 354 , 8. Des offrandes funèbres étaient faites au héros Egée,
le 7 de Pyanepsion, à la fête de Thésée (Mommsen, Heortol., p. 280).
— Àlîtî). Pausan., ap. Eust., Iliad., XXII, 451. Pausan., I, 17, 1.
Hesych. AtSoîiç ( 3 ü>néç. Bekker, Anecd., I, p. 355 , 14. C. J, A., III,
367. — ’ÀrcéXXttv T7ro*xp<xToç (C. I. A., III, 91), ou ùx’ axpatç ( Mittheil.
d. deutsches arçh. Inst., III, p. 144). Cet Apollon est identique à l’A¬
pollon àv S'jnjXahü, cité par Pausanias, I, 28, 4. — Tri Sipuç. C. /. A.,
3 18; 35 o. L’assimilation de Gè à Thémis est très ancienne. Cf. Æsch.,
1. Aristoph., Ecoles ., 128, et Schol. — Æsch., contr. Tim ., p. 48, et Schol. — Har-
pocr. v«. Kaôipacov.
%. Schœmann, De Comit. Athen., p. 91 (feuille g): « Lustrationis sacrum perage-
batur a sacerdote quodam qui dicebatur Peristiarchus. *
3 . Pag. 27, à propos du célibat imposé à certaines prêtresses, ajouter qu’à Sicyone
la prêtrise annuelle d’Aphrodite était exercée par une vierge (Pausan., II. 10, 4). —
Pag. 86, fin. Le mot xaXXtepetxat et l’expression Ta (spà ytpi'zai [xaXaJ ne signi¬
fient pas que le sacrifice est mené à bien, grâce à l’exacte observance de tous les
rites. Ils signifient que les auspices tirés des entrailles des victimes sont favorables.
Xenoph., Anab., II, 2, 3 ; VI, 6, 36 ; Cyrop ., Il, 4, 18. etc. — Pag. 88. Aux deux
exemples cités de temples oti les prêtres pénétraient seuls, ajouter : le sanctuaire de
Poséidon à Mantinée (Pausan., VIII, 5 , 5 ), celui de Zeus Lycien à Mégalopolis (Pau-
*an., VIII, 3 o, 2; le témenos de Zeus sur le mont Lycée (Paus., VIII, 38 , 6),
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Prom., 209*210. — Tij Kap^o^épo;. C. I. A., III, 166. — Av;p.Y)TY;p ©scpo-
<p6po;. Pausan., I, 3 r, 1. C. J. A., III, 352 . Cf. les Thesmophories d'A¬
thènes. — 'Epp.?,; IIpo7:6Xa'.o; (Pausan., I, 22, 8; cf. Hesych., c Epp.Yj;
’Ap.uiQTo;) devait être admis au même titre qu’Hermès Agoræos. — Eu$a-
vep.oç. Ce héros avait un autel à Athènes et un autre à Eleusis (Arrien,
Anab.y III, 16, 8). La famille des Eyoavspisi eût dû être mentionnée, au
n° 71 du catalogue, parmi les familles sacerdotales attachées au culte
d'Eleusis. Denys d’Halicarnasse (De Dinarcho, t. V, p. 658 , Reiske)
attribue à l’orateur Dinarque un plaidoyer pour les EjoavspÆi qui étaient
en contestation avec les KYjpuxsç au sujet des corbeilles sacrées. 11 est
vrai que cette attribution n'est pas certaine. Cf. Meier u. Schômann,
Attische Process, 369, n. 24. — Zsü; Hévto;., C. /. A., III, 199 : tô
Ç stvtov loôpiù (Ji*)|xbv IOsvto Au'. — MoTpau C. /. A III, 357. Ce culte doit
être ancien. Plat., Le g., VII, p. 799, b : Mol pat; xat 'rot; aXXotç xas*
0 £Ot$ OucavTaç.
Voici maintenant les remarques que nous suggère la lecture de plu¬
sieurs articles du catalogue.
N° 37. Le culte d’Apollon Kûvvtoç n'est pas connu seulement par Hé-
sychius, mais aussi par Suidas, v M Kuvïjeto; ’AtoSXXwv. —N° 58 . v Apx£p.t;
«ïnoGocp0;. Ajouter que, sur une tessère de plomb de la collection numis¬
matique d’Athènes, tessère publiée par M. Benndorf *, on voit un autel
avec la légende ’Apxepitot aoçopw. L’épithète fmoâpoç étant fréquemment
appliquée à Hécate % n’est-il pas probable qu’Artémis Phosphoros est
identique à Artémis Hécatè ou Hécatè Epipyrgidia? Remarquons qu’au
revers de la tessère citée plus haut, on lit : ’AOvjvà Ni'xyj. Or, d’après Pau-
sanias, II, 3 o, 2, la statue d’Hécatè Epipyrgidia était auprès du sanc¬
tuaire de Nikè. — N° 102. Les textes épigraphiques ne donnent pas
Zsüçerct naXXa&uo, mais bien hA Iïa/vXaSlou (C, I. G., 491 ; C. /. A., III,
71), ou èv üaXXaBup (C. I.A ., III, 273). Ce Jupiter avait sans doute
son autel auprès du tribunal to iz\ üaXXaSu»), dont il est question dans
le discours de Démosthène contre Aristocrate (71, p. 643, 20). Quant à
l’expression ( 3 ouÇ 6 *prî; tspeu;, le mot indique moins la descen¬
dance du prêtre qu’une fonction déterminée; ce qui ressort d'ailleurs du
texte de l’inscription n° 71 : Uprjç.., y.ai (ïguÇuyy;;. La nature de cette
fonction est très clairement indiquée par Hésychius 3 . Le était
le prêtre qui accomplissait les cérémonies des labourages sacrés. —
N° x 3 o. OjYj/b;. Ajouter : ou Our^bo;. Le dieu ou héros attique de ce
nom est purement imaginaire. Ce mot désigne un ministre du culte, qui
officiait sur un autel spécial, dans l’Erechthéion. Voir C. I . G., I, n° 160,
çol. 1, 79 et col. 2, 95; Boeckh, I, p. 281. Dans l’inscription du C. I.
A., III, 244, voulût-on lire avec Keil [t£p£o>ç] Gur^cou, la valeur de ce
1. Beiircege %ur Kenntniss des attischen Tiicatcrs , taf. 4G, dans Zeitschv. f. die
cesterr. Gymnasien , XXVI, 618.
2. Aristoph,, Thesmoph., 858 . Eurip. Hel. t 5 y 5 , etc.
3 . Y° I
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o’HiSIOIKh Kl DK UlTÊKAlUKE
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dernier mot n'en serait pas changée. Cf. les expressions Upéo); rcup^épou
(Ib.y 264)» iepèw; XtOo^épou (296), Upsùç (îoütuxcç ( 52 ), etc. Quant au rôle
du OuYjxéoç, on ne sait pas au juste en quoi il consistait. L'indication la
plus développée, celle du Lexique de Photius, ôur^éot • cî îspstç et Cntèp twv
«aàwv ôuovtôç toi; Oeotç, est bien vague. Le Outjxéo; devait être un person¬
nage important, puisqu’au théâtre de Bacchus il était assis au premier
rang, à côté du prêtre de Zeus Polieus. Mais c'est tout ce qu'on en peut
dire. Notons en passant que la véritable orthographe du mot est celle que
donnent les textes épigraphiques. Il faut donc, chez Hésychius (Otrrçxéor •
Ispeïç), remplacer le x par un y, et Boeckh a eu tort de vouloir corriger
en sens contraire le texte de l'inscription n° 160 du Corpus . — N° 142.
Mcûcat. Mentionner l’autel des Muses sur les bords de l'ilissus (Pausan.,
I, 19, 5 ) et celui de l’Académie (Ibid., 3 o, 2). — N° 166. *Qpat. Citer le
texte de Porphyre, De Abstin., Il, 7, qui donne des détails précis sur la
xspxïj *HX(ou ts xat 'ûpwv. La mention des Thargélies, fêtes d’Apollon,
dans le texte des scholies du Plutus (1054), semble confirmer la conjec¬
ture de Mommsen ( Heortol ., 440, n. 4) qui, chez Harpocration, v° 2 x£-
pcv, veut identifier Hélios avec Apollon.
Ces observations de détail 11e sauraient avoir pour effet d’atténuer la
bonne opinion que l'on doit avoir du livre de M. Martha. Il est impos¬
sible de présenter les résultats de solides recherches sous une forme plus
claire, plus intéressante, et avec une aussi remarquable précision.
P. Decharme.
147. — Lambert Doneau, «le Beaugency-aur-LoIrc, paateur et pro-
feeear en théologie ( 1 K 30 * 1 U 0 K). Sa vie, ses ouvrages, ses lettres
inédites, par Paul de Félick, pasteur. Paris, Fischbacher, 1882, grand in -8 de
vi et 384 pages.
« Tout Paris s'estonna delà constance de cet homme, » dit un témoin
oculaire du martyre d'Anne Dubourg. « Son presche en la potence et
sur le bûcher, poursuit ce témoin, c’est-à-dire Florimond de Raemond,
fit plus de mal que cent ministres n’eussent sceu faire. » La nouvelle de
ce supplice émut si profondément un ancien élève de Dubourg, qu’il
quitta bientôt après (avril i 65 o) Orléans, où il s'était fait inscrire comme
avocat, et se rendit à Genève, pour y voir et y étudier de plus près la
Réforme, qu’il n’avait « goûtée que légèrement jusqu'alors. » L’année
ne s’était pas écoulée, que Calvin consacrait et renvoyait en France
l’avocat qui venait de professer le droit à Genève. Ce ministre néo¬
phyte, né vers i 53 o à Beaugency, d'une famille noble et riche, s’appe¬
lait Lambert Daneau.
Arrivé à Gien, en qualité de second pasteur, avant la fin de i 56 o,
Daneau y subit les cruelles vicissitudes de la guerre civile : « Plus de
*ept fois chassé, rappelé, condamné, absous, errant, » et dépouillé de sa
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REVUE CRITIQUE
fortune, il retournait toujours à son poste lorsque les circonstances le
permettaient, et ne s’en éloigna définitivement qu’à la Saint-Barthé¬
lemy. Il trouva un refuge à Genève, près de Théodore de Bèze, où, du¬
rant neuf années, il enseigna la théologie, tout en exerçant les fonctions
pastorales. L’université de Leyde, récemment fondée et déjà célèbre,
grâce au mérite de ses professeurs: Hugues Doneau, Drusius et Juste
Lipse, ayant offert à Daneau la chaire occupée d'abord par Louis Cappei
de Moriambert et Guillaume Feugueray, il l'accepta (i 58 i)et se mit en
route avec sa famille. A Strasbourg, qu’il traversa, les ministres luthé¬
riens, dont il avait vivement combattu les doctrines ubiquitaires, se
vengèrent en lui faisant fermer les auberges. De plus, comme il sortait
de chez Jean Sturm, un soldat le conduisit, par ordre, chez le bourg¬
mestre. Celui-ci le fit attendre trois heures, et le soumit, en sortant de
table, à un long interrogatoire, dans lequel les mêmes questions se
reproduisirent plus de soixante fois. Enfin il lui permit de continuer sa
route.
Daneau s’empressa d'organiser la discipline génevoise dans l’Eglise
française qu’il établit à Leyde, et qu’il prétendait gouverner sans l’in¬
tervention des magistrats. La tolérance relative qui régnait en Hollande,
et la soumission du gouvernement ecclésiastique à l’autorité civile, lui
parurent deux hérésies insupportables, contre lesquelles il fulmina sans
ménagement.Les magistrats, blessés, répondirent qu’ils sauraient résister
à l’inquisition génevoise, comme ils avaient résisté à l’inquisition d'Es¬
pagne; ils proférèrent même le mot : séditieux, et interdirent aux na¬
tifs du pays la communion dans l’Eglise française. Pour ces motifs,
Daneau quitta Leyde au bout de quatorze mois(i 582 ). Il était parti
avec l’intention de rentrer en France; mais à la sollicitation des pas¬
teurs de Gand, il s’arrêta un an dans cette ville, et y lut son cours de¬
vant un nombreux auditoire. L’université d’Orthez le garda ensuite
neuf années, au bout desquelles il fut appelé par l’Eglise de Castres,
troublée parles prédications d’Olaxe. 11 consentit à y rétablir l’ordre, à
condition qu’on n’y souffrirait point la présence de ce ministre d’or¬
thodoxie suspecte, et de conduite analogue à celle que tint plus tard
Morus à Charenton et ailleurs. Daneau fonda une école de théologie à
Castres et y mourut en 1595.
La double charge de pasteur et de professeur ne suffit point à l'infa¬
tigable activité du jurisconsulte et philologue 1 devenu théologien; bien
que sa santé fût délicate, et malgré la perte, deux fois répétée, de sa bi¬
bliothèque, il a fait imprimer au moins soixante-sept ouvrages, la plu¬
part en latin. A côté de quelques dissertations sur des points de droit,
et d’un grand nombre d’écrits de controverse anti-catholique et anti¬
luthérienne, on a de lui une vie de saint Paul et une Ethique qui ne
1. Il avait composé, entre autres, des annotations sur les Satires de Juvénal, son
auteur de prédilection.
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OHISIOIKK BT DB LITTÉRATURE 5l
méritaient point l'oubli dans le lequel elles sont tombées ; un Cotnpen -
dium sacras theologiœ, son ouvrage capital; des traités sur Je luxe des
femmes, traduits de Tertullien et de saint Cyprien ; des opuscules con¬
tre les jeux de cartes et de dés, contre la danse, contre les bacchanales
ou mardi-gras, sur l't accoustrement derhommechrestien»; un zPhysica
christiana , destinée à corriger par des données bibliques les erreurs
des philosophes; enfin un livre sur les sorciers, qui eut un grand succès
et fut traduit en latin, en anglais et en allemand, parce qu'il favorisait
la superstition la plus meurtrière de l'époque.
Voici le jugement que M. de Félice porte sur Daneau : « S’il ne doit
pas être placé à côté d'un Calvin et d'un Th. de Bèze, dont il s'honore
d’avoir été l’élève, il vient immédiatement après eux. Il est des premiers
du second rang... Il a eu les qualités et les défauts des théologiens émi¬
nents du xvi« siècle. Comme eux,... il eut une capacité de travail ex¬
traordinaire et une incroyable érudition ; comme eux, une foi, une
piété vivantes, et, s'il est permis de s'exprimer ainsi, énergiques. Mais,
comme eux aussi, il eut un zèle parfois amer, l’amour de la discussion,
l’absence de support pour toutes les opinions dissidentes, et une érudi¬
tion trop imprégnée encore de scolastique. Ces défauts se comprennent
aisément. Les théologiens réformés avaient reçu une éducation scolas¬
tique; ils étaient aussi, à bien des égards, restés catholiques. Daneau ne
sut s'affranchir ni de l'une ni de l’autre de ces influences;... il fut auto¬
ritaire, absolu, intolérant... Vis-à-vis des hérétiques et en général vis à
vis de tous les dissidents, il n’hésite pas à reconnaître aux magistrats le
droit de sévir (p. 134)...; mais partout, toujours et par-dessus tout, il
fut un homme de conscience » (p. 1 38 ).
Tel était le savant « universel dans un temps où l'on pouvait encore
l'étre », dont M. de F. a, le premier, retracé la vie, après s’être livré à des
recherches considérables, qui font de cette biographie un véritable mo¬
nument. A la fin se trouvent plus de cinquante lettres de Daneau, re¬
cueillies dans les principales bibliothèques de l’Europe *. Quelques-unes
sont du plus haut intérêt, et jettent une lumière inattendue sur des per¬
sonnages de ce grand et original xvi° siècle, encore si peu connu dans
le détail. Nous ne pouvons que louer et remercier l’heureux chercheur
auquel on doit ce remarquable travail.
Le livre, plein d’intérêt pour les savants, qui y trouveront des choses
nouvelles, entre autres, un récit très bien fait des commencements de
la Réforme à Gien, et un excellent résumé des disputes relatives à la cène,
eût certainement offert une lecture plus agréable, sans la défectuosité
de la méthode adoptée par l’auteur 2 . La triple division : biographie, bi-
1. Celle du 3 i janvier 1 565 , qui est adressée à Pierre Daniel et a figuré dans
une vente récente, a échappé aux investigations de M. de F. ( Invent . des autogra¬
phes de B . Fillon . Paris, Charavay, 1882, gr. in-8°, p. 34).
2. Voir aux pages 2 5 , 27, 56 , 65 , (34, etc.
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52
RKVUK CRITIQUK
bliographic, correspondance, maintenue avec une rigueur excessive, nuit
à l’unité de l’ouvrage, dont les parties restent juxtaposées sans autre trait
d’union, pour ainsi dire, qu'un renvoi perpétuel de l'une à l’autre.
Un bon index des noms propres aurait pu racheter en quelque mesure
ce défaut; mais Yindex manque. La généalogie des Daneau, mise en
tête du livre et d'ailleurs susceptible de plusieurs additions *, eût été,
croyons-nous, mieux placée en appendice à la fin, où ceux qu’elle inté¬
resse particulièrement auraient su la trouver. Ces réserves faites au
point de vue de la composition, et sans nous arrêter à certaines incor¬
rections grammaticales a , ni à de légères erreurs déjà relevées par deux
critiques 3 , nous soumettrons à l’auteur quelques remarques d'un au¬
tre genre.
Dans la seconde partie, M. de F. analyse avec beaucoup de soin les
ouvrages les plus importants de Daneau 4 , et entremêle ces analyses
d’appréciations personnelles, qui donnent au livre sa couleur particu¬
lière. On regrette d'y rencontrer quelques assertions surprenantes, telles
que celle-ci (p. 106) : « Rien n’est autoritaire comme la conscience. »
Pourquoi confondre ainsi la passion et l'étroitesse, naturellement auto¬
ritaires, avec la conscience, qui, protestant toujours lorsqu’on lui fait
violence, ne peut vouloir violenter à son tour? La tolérance, cette vertu
moderne, qui compta, même au xvi® siècle, une élite d’adeptes plus
nombreuse qu’on ne le croit généralement, n’est que le respect de la
conscience d’autrui érigé en loi par notre propre conscience.
« N’oublions pas, écrit M. de F. (p. 1 35 ), que c'est aux Pères de la
Réforme que nous devons d’avoir aujourd’hui des idées plus larges,
de mieux comprendre et de respecter davantage les droits et les exi-
1. Le chef de la famille, Jean Dagneau, dit le capitaine Goujon, anobli pour avoir
fait Talbot prisonnier à la bataille de Patay, n’était pas seulement originaire de la
Thiérache; il était né à Marie. La branche de la famille restée fidèle au catholicisme
et au sol natal, a produit des personnages marquants dont M. de F. ne parle pas,
tels que Antoine, seigneur de Richecourt, conseiller au siège présidial de Laon en
1694; son fils Marc-Antoine, chanoine de la même ville; Jean Dagneau, abbé de
Saint-Jean-des-Vignes de Soissons au xvn* siècle, et Adrien Dagneau, doyen de la
cathédrale de Laon en 1712 (Melleville, Dictionn. hist . du dép.de rAisne, II, i 5 ,
etc.). Dans la branche protestante, M. de F. ne mentionne pas non plus Anne Da¬
neau, femme de Jean Le Sueur, sieur de Cormelles, dont le fils, Philippe, sieur de
Petiteville, conseiller au Parlement de Rouen, épousa en 1604, à Charenton, Marie
Addée, fille d’£mmanuel, conseiller secrétaire du roi ; ni Jean Dagneaux, sieur de
Desertines, fils de Jean-Philippe et de Marie-Anne Dubusc, qui épousa, en 1786,
Anne-Sophie Massieu, à la chapelle de Hollande à Paris (Reg. de Char.)
2. Voir j*age 11, ligne 2; p. 22,1. 19; p. 3 1, note 2, 1. 8; p. 77, 1 . 22 ; p. 88, 1 . 7 ;
p. 90,1. p. 102, 1. 10; p. io 3 , 1 . 6; p. io 5 , 1 . 27; p. 118, 1 . 2 et 3 ; p. 127,
1. 16 et 17; p. 129, I. 21, etc.
3 . M. J. Bonnet, dans le Bullet. de Vhist . du prot ., XXXI, 379, et M. Dardier,
dans/a Renaissance du e 3 juin 1882.
4. Notons, en passant, que M. de F. n’a pu ajouter que onze pièces à la liste bi¬
bliographique de la France prot.
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d’histoire et de littérature
53
gences de la conscience. » Cette largeur et ce support chrétien, nous les
devons bien moins aux réformateurs qu’aux hérétiques persécutés par
eux. Attribuer les progrès de la critique biblique à Bossuet, qui obtint
la suppression du grand ouvrage de Richard Simon, ce serait déjà une
forte méprise; mais combien dépassée par celle-ci : Calvin et Bèze, pères
de la tolérance !
Ailleurs, M. de F. dit encore(p. 209): « Il ne serait pas inutile...,
dans un temps... où la dogmatique est mise si au-dessous de sa sœur
cadette, la morale, de montrer qu’on est arrivé à l’austère morale par
une dogmatique aussi strictement orthodoxe que celle du xvi c siècle. »
Non-seulement aucune dogmatique n'a le monopole de la morale aus¬
tère : témoin la morale de Kant, qui ne découle point d’un système
dogmatique; mais il est bon de se souvenir qu’une dogmatique pour le
moins aussi orthodoxe qile celle de Calvin, a donné naissance à la mo¬
rale jésuitique.
Les annotations jointes aux lettres inédites de Daneau constituent
l’un des mérites de l’œuvre ; toutefois, vu l’excessive difficulté de la tâ¬
che, nul ne s’étonnera qu’elles soient restées çà et là incomplètes ou in¬
suffisantes. Nous ne discuterons que celle où figure l’une des personna¬
lités les plus bruyantes de la seconde moitié du xvi d siècle. On lit dans
le sommaire d’une lettre latine adressée par Daneau, le 25 juillet 1572,
à son ami et coreligionnaire Pierre Daniel, avocat au Parlement de Pa¬
ris : « Saluez Thérond, s’il se souvient encore de moi. Saluez Ron¬
sard (?) et de Pimpont, ces deux lumières des lettres. Saluez également
le sénateur Scaurus. > Après le mot Ronsard et le point d’interrogation,
M. de F. a placé un renvoi auquel correspondent les lignes que voici
(p. 3o3, n. 1) : « Ce nom, dans la lettre autographe, est assez difficile à
lire. Toutefois ce ne peut être que Ronsard, à cause de ce qui suit. >
Par « ce qui suit, » M. de F. entend uniquement l’expression a lu¬
mière des lettres, » et il lui donne une portée qu’elle ne saurait avoir
en cet endroit. L’épithète ne désigne point nécessairement un chef d e-
cole, tel que Ronsard ou Marot, puisqu’elle s’applique aussi à de Pim¬
pont, lequel n’avait pas même la notoriété d’un écrivain de second or¬
dre. Rien, croyons-nous, n’autorise à voir le chef de la Pléiade dans la
personne ici mentionnée. Ne serait-il pas bien étrange, en effet, qu’au
sortir des guerres civiles, à la veille de la Saint-Barthélemy, un prédica¬
teur huguenot eût fait saluer le curé-baron d’Evaillé ’, poète attitré de
1. Le voyant en possession des abbayes de Croixval, Bellozane, et des prieurés de
Saint-Cosme, d’Evaillé, etc., Bèze et ses contemporains ont cru et dit que Ronsard
était prêtre, « J’atteste l’Eternel que je le voudrois estre, » répondait-il. N’étant pas
prêtre, comment put-il être curé d’Evaillé? Nous ne savons au juste; mais il le fut.
Après avoir essayé d’infirmer sur ce point le témoignage de Bèze et celui deDeTliou,
M. Achille Rochambeau (La famille de Ronsard. Rech . génêaL ethist. % Paris, 1868,
in- 32 ) a été amené (p. 3 a 1) à les confirmer pleinement : Pierre Ronsard succédait,
le 28 mars i 557, à son frère Charles, en qualité de curé-baron d’Evaillé, prèsSaint-
Calais, et il était aumônier du roi en 1573 (p. 141'.
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RBVUK CRITIQUE
54
Catherine de Médicis? Cette salutation paraîtra plus étrange encore, si
l’on se rappelle que, d'abord entraîné vers la Réforme, avec la plupart
des esprits éclairés du temps, le poète, embrassant ensuite le parti des
Guise, et se déclarant hautement l’adversaire des hérétiques, avait pu?
blié contre eux des pièces de la plus grande violence 1 , auxquelles le
pasteur Chandieu et Florent Chrestien s’étaient empressés de répondre.
Après le sommaire, examinons la lettre elle-même : « Quant à Thé-
rond, bien que je le salue par ces lignes le plus affectueusement possible,
je crains bien que ses hautes fonctions et notre long silence ne lui aient
fait oublier que nous sommes d’anciens condisciples. S'il s’en souvenait,
je n’ai garde de dire qu’il ne ferait rien en faveur de ma juste cause ; car
j’apprends qu’il favorise tous les gens de bien. » Daneau a donc à Paris
nne affaire pendante devant un tribunal. « Saluez Ronsard et de Pim-
pont, ces deux lumières des lettres, pour lesquels j’adresse à Dieu mes
plus ferventes prières. » Il ne s'agit donc point d'une salutation banale
ou de simple politesse, mais d’un sentiment cordial et mêlé de piété. A
coup sûr, Daneau n’éprouvait rien de pareil pour le poète anti-huguenot
qu’avait félicité le pape \ Poursuivons : «c Certes, ces hommes qui tien¬
nent le premier rang dans l’illustre assemblée sont dignes de tout res*
pect, et je demande au ciel qu’ils favorisent la piété et toutes les person¬
nes qui les aiment sans les connaître personnellement. » Evidemment,
ces vœux formés pour des membres du Parlement favorables à la Ré-~
forme, concernent de moins en moins le poète Ronsard. Enfin, ajoute
Daneau : « Je salue aussi affectueusement notre Scaurus, que je vénère
comme présidant à la justice même. »
Des quatre personnages ici mentionnés, un seul est suffisamment
connu, Pimpont. Nous ne savons qui est Thérond, dont le nom ne
figure pas dans le catalogue des conseillers au Parlement, non plus que
celui de Scaurus, sobriquet 3 désignant quelque président de cour, peut-
être même l’intègre huguenot Pierre de la Place. Germain Vaillant de
Guélis, abbé de Pimpont, né à Orléans, élevé dans la maison des Coli-
gny et disciple de Melchior Volmar, ami des lettres et poète à ses heures,
fut d’abord conseiller au Parlement de Paris, puis premier président en
la chambre des enquêtes, et devint évêque de sa ville natale en i 586 . Il
entretenait avec Pierre Daniel, son compatriote et sans doute son pa¬
rent 4 , une correspondance familière ; il le consultait sur ses vers, pour
1. Discours des misères de ce temps . Remonstrance au peuple de France . Response
aux injures et calomnies de je ne sais quels prédicantereaux et ministreaux de Ge¬
nève. Prière à Dieu pour la victoire .
2. A l’occasion de la Remonstrance .
3 . De owÇstv, boiter.
4. François-Daniel, le père, avait pour cousin germain Jean Vaillant de Guélis
(Calvini opéra , édit, de Brunswick, X b 22), qu’il recommandait à l’étudiant Calvin,
en i 33 a, et qui fut reçu conseiller au Parlement le 6 juillet 1 558 , un peu plus d’un
an après Germain Vaillant (François Blanchard, Les présidents au mortier du Par -
lem . de Paris , ensemble un catalogue de tous les conseillers. Paris, 1647, H
est probable que Jean est le conseiller Vaillant « homme de grande sagesse et sexa-
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les « faire imprimer ou les supprimer », et le remerciait d’avoir donné
meilleur ordre à son petit labeur poétique \ L’abbé de Pimpont inclinait
vers la Réforme; c’est pourquoi Daneau l’invitait, par l’entremise de
Daniel, leur ami commun, à soutenir au Parlement la cause de l'Eglise
de Gien et de son pasteur. L’invitation s’adressant aussi au prétendu
Ronsard, il faut nécessairement chercher celui-ci parmi les magistrats
protestants ou à peu près, qui pouvaient mériter, au môme titre que
Pimpont, la qualification un peu excessive de « lumière des lettres. »
Notre première idée fut qu’au lieu de Ronsardum il fallait lire Rou-
sardum; mais nous dûmes finalement abandonner cette hypothèse \
Heureusement, pendant le cours de nos recherches, un autre nom, celui
de Roillard ou Rouillard, qu’on écrivait aussi avec un t, attira notre
attention. Jacques Roillard, issu d’une famille qui avait déjà fourni
trois membres au Parlement de Paris, fut reçu conseiller-clerc entre le
18 janvier 1 55 g et le 3 janvier 1 563 . Il était encore en fonction à la
date du 16 avril 1572 3 , et le 12 décembre suivant, son frère Louis, avo¬
cat, obtenait du Parlement une partie de sa succession *. N’ayant pas la
preuve que Jacques partageait les goûts littéraires de Pimpont et d’un
grand nombre de leurs collègues, nous avons essayé d’y suppléer en re¬
courant à l’obligeance du directeur de la bibliothèque de Berne, où se
trouve l’autographe de Daneau. Non-seulement l'écriture en est des plus
difficiles, nous écrit M. le docteur E. Bloesch ; mais le nom dont il s'agit
a été corrigé par une autre main à peu près contemporaine et très mala¬
droite, de sorte qu’il est impossible de distinguer les divers traits d’une
manière sûre. On peut lire ce qu’on veut; toutefois le manuscrit ne
génaire », qui périt dans la Saint-Barthélemy d’Orléans ( Bullet . de Vhist. du prot .,
2«s.,VII, 349).
1. Hagen, Etude littér. et historiq. sur Pierre Daniel ..., trad. de rallem. par P. de
Félice. Orléans, 1876, in-8 # , p. 54.
2. Calvin eut, en effet, pour condisciple et ami, à l’école de droit de Bourges, un
nommé Roussard ou Roussart ( Calvini opéra , X b 6, n. 11), que La Thaumassière
[Hist. du Berry , 1699, in-f°, p. 6a) appelle Ludovicus Russardus carnotensis. De¬
venu professeur dans la même école, ce Chartrain ht paraître à Lyon, en i 56 i, une
magnifique édition in-P des Pandectes, imprimée aux frais de Marguerite, duchesse
de Berry et de Savoie, et dédiée au chancelier de l’Hospital, comme elle à demi ré¬
formé {France prot., a* édit., III, 6 a 3 , n. 1). Il épousait, le 3 o avril i 56 i, Maria
Desperelles, hile d’un riche marchand de Bourges, et ne figure point parmi les reli-
gionnaires qui participèrent en septembre à une contribution forcée de 20,000 livres
(Catherinot, Es eu d’alliance, p. iq). Au mois de mai x 565 , François Daniel envoyait
d’Orléans à son frère Pierre une variante de YAndria , trouvée dans le vieil exem¬
plaire en lettres lombardes de M. Roussard (Hagen, Op . cit., p. 59). Appliqué à ce
bibliophile éditeur, le titre de literaturœ lumen ne serait certainement point déplacé.
Mais Louis Roussart, absent du catalogue de Blanchard, vivait-il encore en 1572 et
exerçait-il alors quelque magistrature à Paris? Nous l’ignorons, et par conséquent
l’hypothèse manque de base.
3 . Arch. nation ., Actes du Pari., Reg. du Conseil, X‘*, 1637, P a|6, v, etc.
4. Ibid., i 638 , fi» 73, v.
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REVUK CRITIQUE
porte assurément ni Ronsardum, ni Rousardum, ni Roillardum, mais
peut-être Rouliardum .
Dans cette conjoncture, et vu les étranges variations des noms propres
à cette époque, la différence entre Roulliardum et Rouillardum (forme
que nous n'avions pas indiquée à M. Ëlœsch) semble tout à fait insigni¬
fiante. Le correcteur eût-il certainement écrit Roulliard, il n’importe¬
rait ; car Roillard, Rouillard et Roulliard sont des aspects divers d’un
nom unique. De même que Rossartest devenu Ronsart, puis Ronsard 1 ,
la forme Roulliard a fini par prévaloir sur les deux autres, témoin Sé¬
bastien Roulliard, écrivain connu du commencement du xvii® siècle.
Nous n'hésitons donc pas à croire que la personne saluée par Daneau
s’appelait Jacques Roillard. Nous ferons même un pas de plus : il y a
des probabilités 2 pour que ce conseiller ait été Orléanais comme Daniel
et Pimpont, et partant leur ami d’enfance et leur condisciple; car son
ancêtre Louis Rouillard (s/c), admis au Parlement en 1 5 17, avait d’abord
exercé les fonctions de prévôt d’Orléans, et, de plus, en i 56 i 3 et en
1567 nous trouvons établi à Saint-Léonard ou Corbigny-en-Niver¬
nais, le pasteur Michel Rouillard, d Orléans. Outre le lien de parenté,
il a dû exister entre le ministre et le conseiller une confraternité reli¬
gieuse, qui pourrait peut-être expliquer la mort de Jacques, puisque,
d'après Crespin des « présidents » et « conseillers > périrent à Paris
lors de la Saint-Barthélemy.
Si, malgré quelques obscurités, la question paraît résolue, nous som¬
mes heureux d'en attribuer l'honneur à la bienveillance des conserva¬
teurs des Archives, de la bibliothèque Mazarine et de la bibliothèque de
Berne
O. Douen.
LETTRE DE M. CHASSANG
Nous insérons avec plaisir, et sans trouver utile d’y rien ajouter, la
lettre suivante que nous adresse M. Chassang :
« Mâcon, 29 juin i 883 .
« Messieurs les Directeurs,
« Jetais absent de Paris (et l’auteur l’ignorait sans doute), quand a
paru, dans la Revue critique , l’article anonyme du 11 juin sur le premier
1. A. Rochambeau, Op. cit. t p. 11.
2. Probabilités transformées en certitude depuis l’achèvement de cet article. L’ar¬
chiviste du Loiret, M. Jules Doinel, a eu la bonté de répondre à nos questions que
la famille Roillard, qui possédait la maison de la Coquille, chef-d’œuvre de la Re¬
naissance, a joué un rôle considérable dans la cité d’Orléans au xvi® siècle, et qu’on
la trouve mentionnée, dès le xtv° siècle, dans les documents municipaux.
3 . Bèze, Hist. eccL, I, 750.
4. Bullet. de Vhist. du prot.,ix, 296.
5 . Hist. des martyrs, 1582, in-8°, f° 713, v.
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d’histoire et de littérature
57
volume de mon édition de La Rochefoucauld. Je viens seulement d’en
avoir connaissance, et je m’empresse de vous présenter de simples ob¬
servations, que votre impartialité vous fera sans doute une loi d’insérer
dans un prochain numéro.
« L'auteur anonyme veut bien reconnaître que, même après l'édition
de MM. Gourdault et Gilbert, il était encore permis de faire une édi¬
tion de La Rochefoucault ; mais il n’admet pas une édition « en grand
format ». Permettez-moi de penser que cette distinction, empruntée à
des questions de librairie, n’a rien à voir avec l’érudition ni avec la lit¬
térature.
« Qu'avez-vous voulu faire? » me demande-t-il. J’ai voulu, après
une édition savante, faire une édition simplement littéraire. Cette édi¬
tion se rattache pour moi à une série d’études sur la langue française,
dont une partie est déjà publiée. J’ai commencé par dire qu* « il n’y
avait plus de travail critique à faire sur les œuvres de La Rochefou¬
cauld après les recherches de MM. Gilbert et Gourdault, » et de quel¬
ques autres, que j’ai également cités. Après cet hommage rendu à mes
prédécesseurs, j'ai cru et je crois encore que le droit de tout éditeur est
de se servir des travaux antérieurs, en leur donnant une autre forme et
une autre disposition.
« D'après l’auteur de l'article, c’est uniquement sur l’édition de
M. Gourdault que j’ai fait mon édition des Mémoires. Or, il se trouve
que, dans les notes des pages 470 et 471 de cet article, il cite lui-même
quelques notes qui, de son aveu, ont une autre origine. Il est vrai qu’il
en juge une « insignifiante, » sans la citer. Il veut bien trouver piquant
un rapprochement que j’établis en un endroit, « et qui n’est pas, autant
« qu'il lui semble , indiqué dans l’édition Hachette. » S’il avait regardé
de plus près et d’un œil moins prévenu, il aurait pu en dire autant de
plus d’une autre indication, par exemple de la note qui est à la fin d’un
livre des Mémoires , et qui en rapproche un passage du Lutrin , lequel
est une allusion évidente à la scène racontée par La Rochefoucauld. Je
cite de mémoire, n’ayant pas l’ouvrage sous la main.
« Quant aux ressemblances que signale l’article, peut-être estimera-
t-on qu’il est difficile que deux éditions qui traitent du même sujet et qui
puisent aux mêmes sources, ne se rencontrent pas quelquefois, que
même il n'y ait pas chez le second, dans le détail, quelque réminiscence
du premier. De plus, mais je n’oserais l’affirmer, il me semble que l’al¬
lusion au sobriquet de La Franchise , se trouve déjà dans un des livres de
V. Cousin (M me de Longueville pendant la Fronde).
« Loin de prendre le bien de MM. Gourdault et Gilbert, comme on
men accuse, je me suis toujours attaché à le leur laisser. Mais il y a,
chez l'auteur de l'article, un tel parti pris de « réprobation », que, lors¬
que je fais autrement que mes prédécesseurs, il me le reproche comme
lorsque je me rencontre avec eux. C’est ce qui arrive pour la répartition
des matières, laquelle a pour raison l’ordre chronologique. De même
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58
REVUE CRITIQUE
pour le choix des variantes, qu'il déclare « arbitraire » 9 tandis que ce
choix a pour cause l'intention toute littéraire de l’éditeur, intention qui
apparaîtra plus clairement dans le second volume.
* Ici l’auteur anonyme me fait une objection : si c'est une édition pu¬
rement littéraire, pourquoi des variantes et des notes? Je réponds :
Parce que cela est utile à titre de pièce justificative et comme éclair¬
cissement; d'ailleurs, comme je l'ai annoncé, je ne donne que « les
€ éclaircissements nécessaires ».
« Toute la question se réduit à ceci : quand une édition savante a été
faite, est-il interdit d’en faire une nouvelle, ayant une certaine éten¬
due? Oui, dit la Revue critique , à moins qu'on n’apporte des docu¬
ments entièrement nouveaux. Tout le monde ne sera peut-être pas de
son avis; et je doute que personne trouve convenables le ton général de
son article et les attaques personnelles par lesquelles il se termine.
« Recevez, Messieurs les Directeurs, l'assurance de ma considération
distinguée.
« A. Chassang. »
CHRONIQUE
FRANCE. — M. Ernest Renan a publié un Index général à son « Histoire des
origines du christianisme » (Calmann-Lévy). Cet Index est accompagné : i® d’un
Tableau chronologique, qui est une classification des plus anciens monuments de la
littérature chrétienne, disposés et datés selon Tordre de l’ouvrage, et la suite des
temps dont M. Renan a écrit Thistoire; a* d’un Errata; 3 ° d’une carte de l'Exten¬
sion du christianisme vers l'an 180. M. Renan vient, on le sait, d’être nommé ad¬
ministrateur du Collège de France et représentant du même établissement au con¬
seil supérieur de l’instruction publique.
— Nous recommandons aux élèves des Facultés des lettres et aux professeurs de
notre enseignement secondaire la traduction de l’ouvrage de MM. Moritz Seyffert
et Albert von Bamberg, Règles fondamentales de la syntaxe gi ecque . Cette traduc¬
tion, qui a paru à la librairie Klincksieck, est l’œuvre d’un élève de l’Ecole Normale
Supérieure, M. Ch. Cucukl; elle a été revue et annotée par M. O. Riemann, maî¬
tre de conférences à la même Ecole.
— Deux nouveaux volumes, le V e et le VI* de l’ouvrage considérable où M. le
comte de Paris retrace VHistoire de la guerre civile en Amérique, ont paru a la li¬
brairie Calmann-Lévy; ils traitent des événements de t 863 .
— Le second volume de l’étude de MM. Lucien Perey et Gaston Maugra*, sur
M"* d’Epinay, vient de paraître; il est consacré aux dernières années ; nous comp¬
tons en parler prochainement.
— Notre collaborateur T. de L. fait remarquer, dans le n° de juin de la Revue de
Gascogne , que M. Pellissier, auteur d’un récent travail sur a la vie et les œuvres de
Du Bartas », a trouvé de frappants rapprochements entre Charron, le « singe de
Montaigne » et Du Bartas. Mais T. de L. reproche à M. Pellissier d’avoir laissé
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d’histoirb et db littérature
59
dans son travail de « nombreuses lacunes qui auraient pu être facilement comblées
par la lecture de tant d’articles et de notes consacrés dans la Revue de Gascogne à
Guillaume de Salustc et à sa famille ».
— La librairie Hachette a terminé la publication de son Atlas manuel de géogra¬
phie moderne composé de cinquante-quatre cartes.
— On vient d'apporter une utile amélioration dans le matériel de la Bibliothèque
Nationale. On a placé, de chaque côté de la salle de travail, six larges pupitres fixes;
il y en a, en outre, deux à droite et deux à gauche de la porte d’entrée. Ces pupi¬
tres permettent aux travailleurs de consulter rapidement et commodément les dic¬
tionnaires, lexiques et catalogues qu'il fallait auparavant emporter à sa place.
ALLEMAGNE. — La souscription à l’édition critique des Œuvres complètes de
Luther que doit publier chez l’éditeur Bdehlau, de Weimar, M. le pasteur Knaakb,
a eu un grand succès. Le grand duc de Saxe-Weimar, se souvenant des traditions
de la maison Ernestine, dont les princes ont été les protecteurs de la Réforme, a
prié tous les souverains évangéliques d’Allemagne de donner leur appui à l’entre¬
prise. Divers gouvernements ont souscrit à la publication pour un certain nombre
d'exemplaires; les consistoires des royaumes de Saxe et de Bavière l’ont recommandée
à toutes les bibliothèques. Beaucoup de villes ont souscrit, et Aschersleben a déclaré
qu’elle regardait comme son devoir de vieille ville évangélique, de posséder les
œuvres de Luther dans leur forme véritable et primitive.
— Le cinquantième fascicule des « Quellen und Forschungen zur Sprach-und
Culturgeschichte der germanischen Vœlker » a paru à la librairie Teubner, de
Stmbourg ; il renferme un poème allemand du xnr siècle* Eraclius, publié par
d. Harald Graef.
— M. Sixvers, professeur de philologie allemande à l’Université d’iéna, passe, en
la même qualité, à celle de Tubingue.
ANGLETERRE. — M. Ingleby va publier, chez les éditeurs Trübner, un essai
intitulé Shakespeare*s bones , où il demande qu’on fouille le tombeau de Shakspeare,
afin de résoudre certaines questions relatives aux portraits du poète; h cet essai est
jointe une bibliographie du sujet jusqu’au mois de mai dernier.
— UEnglish Dialect Society publiera l’année prochaine un glossaire du dialecte
d’Almondbury et Huddersfield, commencé par M. Alfred Eastrer (mort en 1876)
et achevé par M. Thomas Lees.
— Le prince Ibrahim Hilmy, frère du khedive, a mis sous presse (Londres, chez
MM. Clowes) une bibliographie d’ouvrages imprimés, manuscrits, périodiques rela¬
tifs aux antiquités, à l'histoire, à la vie politique et sociale de l’Egypte, depuis
l’antiquité jusqu’à nos jours.
HOLLANDE. — Un concours est ouvert entre les sculpteurs hollandais et étran¬
gers pour l’érection d’une statue à Hugo Grotius, sur la place du Marché, à Délit.
RUSSIE. — Le compte-rendu de la Bibliothèque impériale publique pour l’an¬
née t88i énumère les dons faits à la Bibliothèque par Alexandre U : c’est ainsi
qu’on a acheté, avec les sommes accordées par cet empereur, la collection de
palimpsestes et de manuscrits grecs et orientaux du professeur Tischendorff, la
collection de manuscrits orientaux du prince Dolgorouky, deux collections de
manuscrits hébraïques de M. Firkovitch, les incunables en langue slavonne de
M. Ktrataiev, etc.
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60 REVUE CRITIQUE DHISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 6 juillet i883,
M. Revillout continue sa lecture sur l’étalon d’argent en Egypte. Les contrats dé-
motiques lui ont permis de suivre de règne en règne la question des étalons moné¬
taires sous les Lagides. Jusqu’à Philopator, on avait en Egypte, comme en Grèce,
l'étalon d’argent; et le cuivre ne servait que pour les monnaies divisionnaires. Phi-
îopator permit de payer en cuivre même les fortes sommes, en calculant, d’après la
proportion légale de i à 120, (également spécifiée par les documents démotiques), la
différence de valeur entre le cuivre et l’argent. Epiphane, son fils, partant toujours
de la même proportion, substitua l’étalon de cuivre à l’étalon d’argent et fit faire des
monnaies isonomes, c’est-à-dire des monnaies de cuivre de même poids que les mon
naies d’argent précédemment en usage. On eut de la sorte des drachmes et des ta¬
lents de cuivre, comme on avait eu des drachmes et des talents d’argent, les monnaies
nouvelles valant 120 fois moins que .les anciennes. Ce nouveau système dura jus¬
qu’à la fin de la dynastie des Lagides. Les Romains, à leur tour, abandonnèrent
l’étalon de cuivre pour en revenir à l’étalon d’argent et firent fondre en Egypte, à
partir de Tibère, des drachmes d’argent analogues aux anciennes drachmes ptolémaï-
ques, mais de plus bas métal, d’après lesquelles tous les comptes durent e*re faits.
Ce que M. Revillout avait trouve dans les papyrus démotiques, il vient de le cons¬
tater egalement dans les papyrus grecs des mêmes époques. Pendant la première pé¬
riode lagide, tous les comptes sont en argent et, pendant la deuxième, en cuivre. Le
papyrus grec Sakkinis, contemporain de la première, contient de très nombreuses
additions, qui ont permis à M. Revillout de déterminer avec certitude les indications
de numéraire jusqu’ici inexpliquées. Il a ainsi déchiffré toute une série de sigles re¬
latifs aux divisions de ces drachmes d’argent et qu’il communique à l’Académie : ce
sont ceux de l’obole, du duobole, du triobole, des 4 oboles, des 3 oboles, de l’hémio-
bole,du téteutë moriou et du chalque (48* de la drachme). Comme la drachme ptolé-
maïque est bien connue, on peut calculer ce que les différentes denrées nécessaires à
la vie représentaient en argent. Les évaluations des papyrus démotiques concordent
parfaitement avec les évaluations des papyrus grecs de la première période. La même
concordance se remarque pour la deuxième période lagide. Les estimations, tout à
fait parallèles, sont alors en œuvre, tant en demotique qu’en grec. M. Revillout ajoute
que M. Naville vient de découvrir une stèle hiéroglyphique, de l’an 21 de Philadel-
phe, qui confirme dans une troisième langue ces conclusions tirées des documents
grecs et démotiques.
Ouvrages présentés : — par M. Bertrand : Kerviler (René), la Grande Ligne de
mardelles gauloises de la Loire-Inférieure (extrait des Mémoires de l’Association
bretonne); — parM. Jourdain : Gozzadini, Di due statuette etrusche e di una iscri -
fione etrusca dissotterate nelV Apennino bolognese; — par M. Perrot : Imhoof-Blu-
mer (F.), Monnaies grecques (publication de l’Académie des sciences des Pays-Bas);
— par M. Le Blant : le Talmud de Jérusalem , traduit par M. Moïse Schwab, t. VI;
— par M. Siméon Luce : Correspondance inédite de Louis-Auguste de Bourbon , duc
du Maine , avec Lamoignon de Basville , publiée par Ch. Joret (extrait du Cabinet
historique),
Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 2 7 juin,
M. Chabouillet transmet, de la part de M. Boucher de Molandon, associé corres¬
pondant, un exemplaire en bronze de la médaille gravée sous sa direction et à ses
trais, en mémoire de la conservation de la salle des thèses de l’ancienne Université
d’Orléans.
M. l’abbé Thédenat communique, au nom de M. de Laigue, consul de France à
Livourne, la photographie de deux chapiteaux historiés, encastrés dans un mur, à
Paris. Le premier montre Jupiter entre deux Victoires, dont l’une tient une cou¬
ronne, l’autre un trophée ; sur le second, on voit l’image d’Harpocrate, également pla¬
cée entre deux Victoires.
M. Ramé présente l’empreinte de deux bagues en cuivre de l’époque mérovin¬
gienne trouvées à Melle (Poitou) et ornées de monogrammes.
Eugène Müntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2 3 ,
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DE GÉOGRAPHIE MODERNE
Contenant cinquante-quatre cartes
IMPRIMÉES EN COULEURS
LISTE DES CARTES COMPOSANT L’ATLAS MANCEL
(Les cartes doubles sont précédées du signe *.)
1. Système planétaire. — Lune.
*2. Terre en deux hémisphères.
3. Volcans et coraux.
4. Pôle antarctique. — Archipels de
Polynésie.
*5. Pôle arctique.
6. Océan Atlantique.
7. Grand Océan.
*8. Europe politique.
9. Europe physique hypsométrique.
— Massif du Mont-Blanc.
KL Côtes méditerranéennes de la
France. — Bassin de Paris.
Ml. France physique hypsométrique.
12. France. (Partie Nord-Ouest.)
13. France. (Partie Nord-Est.)
*14. France politique.
15. France. (Partie Sud-Ouest.)
16. France. (Partie Sud-Est.)
*17. Grande-Bretagne et Irlande.
18. Pays-Bas.
19. Belgique et Luxembourg.
*20. Allemagne politique.
21. Danemark.
22. Suède et Norvège.
*23. Suisse.
24. Italie du Nord.
25. Italie du Sud.
*26. Espagne et Portugal.
27. Méditerranée occidentale.
28. Méditerranée orientale.
*29. Presqu’île des Balkans.
30. Grèce.
31. Hongrie.
*32. Monarchie Austro-Hongroise.
33. Alpes Franco-Italiennes.
34. Caucasie.
*35. Russie d’Europe.
36. Pologne.
37. Asie Mineure et Perse.
*38. Asie physique et politique.
39. Chine et Japon.
40. Indo-Chine et Malaisie.
*41. Asie centrale et Inde.
42. Palestine.
43. Région du Nil.
*44. Afrique physique et politique.
45. Algérie.
46. Sénégambie. — Côte de Guinée.—
Afrique du Sud.
*47. Amérique du Nord.
48. Amérique du Sud. (Feuille septen¬
trionale.)
49. Amérique du Sud. (Feuille méri¬
dionale.)
50. Etats-Unis d’Amérique.
*51. Etats-Unis. (Partie occidentale.)
52. Etats-Unis. (Partie orientale.)
*53. Australie et Nouvelle-Zélande.
54. Amérique centrale et Antilles. —
Isthme de Panama.
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Histoire du moyen âge, depuis la avec la littérature française, par le
chute de l’empire d’Occident jusqu’au même. 2 vol.8 fr.
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11* édition. 1 vol.4 fr. par M. L. Etienne. 1 vol. . . 4 fr.
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puis 1453 jusqu’en 1789, par le môme-. Histoire de la littérature anglaise,
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Histoire de France, par le même. Histoire de la physique et de la
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celle de l’Ecosse, de l’Irlande et des môme. 1 vol.4 fr.
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recteur honoraire d’Académie; 4 e édi- môme; 2« édition. 1 vol. . . 4 fr.
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Ail.',-!*i893
N" 30 Dix-septième année 23 Juillet 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
. RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIE SOUS LA DIRECTION
dk MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PAlUS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqükt
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O* l'ÉCOLK DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES, ETC
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PÉRIODIQUES
The Àcademy, n° 583 , 7 juillet 1 883 : W. Powell, Wanderings in a
wild country or three years among the cannibals of New Britain. —
Edward A Freeman, English town and districts. (Bass Mullinger : livre
très intéressant qui rappelle, au moment où lettrés et étudiants vont partir
en vacances, leur attention sur les trésors d’art et d'histoire que renfer¬
ment les villes et les villages de leur propre pays.) — Two books on the
Von Artevelds : Hutton, James and Philip van Arteveid, two épisodes in
thehistoryof the fourteenth century ; Ashley, James and Philip van
Artevelde. (Bent : le i er livre pèche par le style et le soin littéraire, mais
les faits y sont exposés avec méthode ; le 2 e pèche par le fond, mais est
très élégant de forme; tous deux sont importants.) — Harting, Sketchs
of bird life. — Fornaciani. Studi su Dante. (Moore : études attachantes
qui prouvent une profonde connaissance des œuvres de Dante et des
commentaires dont elles ont été l'objet.) — Grindon, The Shakspere
Flora (Friend : livre fait avec grand goût et qui doit prendre sa place
sur la table de quiconque étudie Shakspeare, la botanique et la nature.)
— Recent theology. — Some books ot frencli literature (P. Bourget :
Saintsbury, Specimens of french literature from Villon to Hugo.) —
Notes from Melbourne — Readings and music from Browning. — The
late bishop Colenso. — The mss. Justinianus of Holkham. (uregory.)
— A siamese bestiary. (Casartelli.) — An erotikon from Pompei (Ellis).
— William Spottiswoode. — Old masters and scottish national por¬
traits at Edinburgh. (Gray.) — The Egypt exploration found. — Egyp-
tian antiquities found at Rom (Barnabei.) — Pictures belonging to the
late Vital de’ Tivoli (Middelton) — Hyde Park Corner and its sur-
roundings (Winn).
The Athenaeum, n° 2905, 3o juin i883 : Phil. Robinson, The poets’
birds. (Livre rempli d’exemples tirés des poètes anglais et concernant
les oiseaux; mais, en somme, et malgré de jolies remarques, livre mal¬
heureux ; l’auteur voudrait que les poètes, soient des ornithologistes et des
c poulterer ».) — Stanley Lane Poole, Studies in a mosque. (Sur huit
chapitres, sept sont des réimpressions d’articles de revue; le seul qui soit
publié pour la première fois, a pour titre « The brotherhoods of pu-
rity »; en somme, contribution utile à la littérature musulmane).—
Ch. Roach Smith, Retrospections, social and archaeological. —
M. Tullii Ciceronis pro C. Rabirio perduellionis reo, oratioad quirites,
& , p. Heitland (Bonnes notes). — Hood, Scottish characteristics. —
rindon, The Shakspere Flora, a guide to ail the principal passages in
which mention is made of trees, plants, flowers and vegetable produc¬
tions, with comments a. botanical particulars. — « The Glass Eye ».
(Barham.) — Cambridge University, some results of the commission.
— « Hearts », anovel. — Notes from Paris (Claretie). — The disco-
very at Ammân. — Notes from Rome (Lanciani).
— n° 2906, 7 juillet 1 883 : Myers, Essays : classicals ; Essays :
modem. — Rob. Ferguson, Surnames as a science. — Kkane,
On blue water, some narratives of sport and adventure in the modem
merchant service.— Rare poems of the sixteenth and seventeenth centu¬
ries, collected and edited, with notes, by.LiNTON. (Recueil agréable). —
Villari, Niccolo Machiavelli e i suoi tempi. Vol. III; The historical,
political and diplomatical writings of Machiavelli, translated by Det-
mold. 4 vols. (Dernier volume de cette œuvre remarquable, de cette
a exhaustive study of one of the most anomalous of geniuses and of one
of the most anomalous of historical periods ».) — A memoir of Mrs.
RadclifFe. (Christina G. Rossetti.) — A letter of Leigh Hunts. (Robert
Browning.) — Shakspeare's will. (Halliwell-Philipps.) — Andrew
Marvell. (Osmund Ainy.) — Mr. H. F. Turle (A. Ainger). — Galton,
Inquiries into human faculty and its development. — Mr. W. Spottis-
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
K* 30 - 23 Juillet — 1883
Sommaire t 148 . O. Rayet, Monuments de I*art antique. — 149 . Jung, La roma¬
nisation des provinces occidentales de l’empire romain. — i5o. Antoine, Etude
sur le Simplicissimus deGrimmelshausen. — Chronique. — Académie des Inscrip¬
tions. — Société des Antiquaires de France.
148 . — Monuments de l'art antique» publiés sous la direction de M. Olivier
Rayet. Livraisons III et IV. In-folio. Paris, A. Quantin, 1882 .
On sait que dans cette publication artistique, grâce aux procédés per¬
fectionnés de Théliogravure et à l'habileté de M. Dujardin, les monu¬
ments ont été reproduits avec une exactitude et une beauté d’exécution
que l’on n'avait pu atteindre jusqu’alors. On sait aussi que les notices
qui accompagnent ces monuments ne laissent rien à désirer. La Revue
critique a rendu compte autrefois 1 des deux premières livraisons. Il
nous faut aujourd'hui donner une idée de ce que renferment la troisième
et la quatrième.
On y trouvera, comme dans les précédentes, quelques monuments
égyptiens, décrits par M. Maspero. La statuette d’Aménophis IV, celle
de Pehournowri en calcaire peint, la statue de Shemka avec sa femme et
son fils, sont au Louvre où l'on fera bien d'aller les voir après avoir lu
les pages qui les concernent. Un autre personnage est au musée de Bou-
laq; mais il a figuré à l'Exposition de 1878 sous la rubrique de « chef
des cuisiniers ». Ce chef est, en réalité, le nain Khnoumotpou, contem¬
porain delà V* ou de la VI e dynastie; personnage important en son temps,
dontM. Maspero nous détaille tous les mérites, non sans une pointe
d 'humour. Rien de plus agréable à lire que ces notices ; rien qui fasse
mieux comprendre en même temps quelques-unes des variétés de l'art en
Egypte.
Les marbres grecs sont de deux sortes. D’une part, des monuments
inédits ou connus depuis peu; de l’autre, des monuments dès longtemps
célèbres, mais ici plus fidèlement reproduits et expliqués plus sûrement.
Pour commencer par ces derniers, signalons avant tout une étude ma¬
gistrale, — elle est due à la plume de M. Guillaume — sur le Doryphore
ct le canon de Polyclète, et une notice de M. Rayet sur l'hoplitodrome
vainqueur d'Agasias. L’enthousiasme qu’excitait autrefois cette dernière
*• Wotty. Série , t. XII, p. 2 (n° du 4 juilJet 1881 ). L’article, signé /, est du ré¬
cité Charles Graux.
Nouvelle série, XVI. 3o
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62
R B VU B CRIT1QUB
statue se trouve sans doute un peu refroidi; mais M. R. nous la fait si
bien connaître qu’après sa description, on ne peut voir autrement que
lui et qu’on se rend à ses raisons. Ce n’est point un héros combattant
contre un cavalier, comme le voulait Visconti; ce n’est pas non plus un
gladiateur : c’est un athlète, et, Quatremère de Quincy l'avait déjà deviné,
un vainqueur à la course ârmée. Le style de cette statue où prédomine
l’habileté technique, dénote l’école rhodienne ; en même temps, les do~
cuments épigraphiques permettent d’en fixer la date dans le voisinage
de l’an 170 avant Père chrétienne. Cette étude de M. R. sur l’oeuvre
d’Agasias est un vrai modèle de critique.— M. Collignon, un bon con¬
naisseur, lui aussi, en matière d’art antique, a composé les notices sur
l’Hercule du temple d’Athèna à Egine (qu'il a décrit à Munich même,
en sortant de la Glyptothèque), sur Y Apoxyomenos du Vatican, sur le
Torse du Belvédère. Il serait intéressant de comparer la description de
ce dernier monument avec celle qu’en a donnée jadis Winckelmann,
non seulement dans son Histoire de VArt , mais surtout dans un mor¬
ceau plus ancien 1 que M. Collignon ne cite pas. On mesurerait ainsi
les progrès qu’a faits la critique d’art depuis un siècle. J’ai cependant
un scrupule au sujet de l’interprétation proposée par M. Collignon qui
voit dans le Torse une imitation de l’Hercule àxtTpaxéÇtoç de Lysippe.
Sans doute, dans les deux œuvres, l’attitude du personnage paraît avoir
été à peu près la même. Mais M. Collignon convient lui-même que le
Torse ne rend pas le style de Lysippe, son modelé énergique et sec, et
il oublie de nous dire que l’Hercule àxupaxéÇtoç, décrit tout au long par
Martial et par Stace, était un petit bronze a . Ce chef-d’œuvre d’un pied 3
a-t-il bien pu servir de modèle à la statue grande nature d’Apolnios?
Quand les copies ne reproduisaient pas les dimensions de l’original,
ne procédaient-elles pas plutôt par réduction que par grossissement?
C’est là une question qui se pose et sur laquelle on eût voulu être
éclairé.
Parmi les monuments découverts dans ces dernières années, on re¬
marquera le Diadumène de Vaison,que l’incurie de l’ancienne adminis*
tration des Beaux-Arts a laissé passer au British Muséum. M. R. nous
raconte, longuement et amèrement, cette lamentable histoire. Ce mar¬
bre dont le Louvre n’a pas voulu, est pourtant de première importance.
M. R. y reconnaît tous les caractères de Polyclète, et il le considère
comme très supérieur, sous ce rapport, au Diadumène Farnèse. Mais
ici, ceux qui n’ont pu voir les deux marbres, et même ceux qui les ont
vus, seront fort embarrassés. Voici, en effet, M. Brunn et M. Newton
1. Beschreibung der Torso im Bclvedere Rom dans la Bibliothek der schæncn
Wissenschaften de 1729 iyHistoire de VArt est de 1764). Cet article a été reproduit,
avec quelques autres petits'écrits, à la fin de l’édition de VHistoire de. VArt, publiée
à Leipzig en 1881, par M, Julius Leasing.
2. Exiguo magnusirt ære Deus (Mart., Epigr . IX, 44.
3 . Mirabilis Ultra Stet niensura pedcm 'Stace, Silves , IV, 6 , 39.)
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D’HISTOlUft BT OR LITTÉRATURE
6»
qui affirment que le Diadumène Farnèse est d'un art plus ancien que la
stàtue de Vaison et représente plus exactement l’œuvre originale de Poly-
dète, tandis que pour M. R. « dans la pauvre et sèche statue de l'an*
tienné Collection Farnèse, il n’y a rien, absolument rien qui rappelle ni
là main de Polyclêtô, ni la facture du v e siècle ». Qui donc faUdra*t-il
croira? Noua avons foi entière dans le goût et dans la science de
M. Rayet. Mais M. Brunn et M. Newtort 1 n ont-ils pas, eux aussi,
quelque autorité ? Des contradictions d’opinion aussi absolues sont bien
fititoé pour inspirer du scepticisme, —• On partagera plus franche*
ment l'avis de M, R, sur les sculptures de Pergame, trop admirées par
lés archéologues de Berlin. La Gigantomachie de Pergame est assuré*
ment Teeuvre d'un art vigoureux, fertile en inventions, qui cherche et
qtii trouve les effets pathétiques. Mais il lui manque ce qui fait le grand
art : la sincérité, la foi. M. R. y signale, en outre, des plagiats et une
inégalité choquante d’exécution. Il était d’autant plus nécessaire défaire
ressortir ces imperfections que ces sculptures sont importantes histori*
quement : avec le temple de Magnésie du Méandre, elles marquent le
point de départ de l'art romain,
Lès bronzes sont représentés par les morceaux suivants : un piéd de
miroir du müséede Copenhague; un buste juvénile, provenant d’Hercu-
lafiuffl, très finement décrit par M. J. Martha *; un buste Viril de même
provenance où M. Gollignon reconnaît, après M. F. Lenormant, tin
Poséidon ; une tête féminine du musée de Naples, longtemps attribuée à
la reine Bérénice et restituée par M. R, à sa légitime propriétaire, Ar¬
témis Agrotérâ ; enfin le célèbre Tireur d’Epine. L’histoire des opinions
émises sur le Spinario du Capitole est instructive : elle ne peut manquer
de porter à la circonspection les archéologues qui n'y seraient pas natu¬
rellement enclins. Voilà un bronze qui errait à travers les siècles, du
cinquième au premier avant l’ère chrétienne. Il était temps que M. R.
le fixât, qn’il lui donnât un acte de naissance, en le rattachant à l’école
de Pasitélès. Atl* raisons déjà invoquées par MM. Kékulê et Robert,
M. R. ajoute cette raison nouvelle et très juste que le type du Spinario
est italien, et point grec. D’ailleurs, dans ces dernières années, des élé¬
ments nouveaux ont aidé à la solution du problème. Une statue en mar¬
bre, trouvée à Rome en 1874, a démontré que le bronze du Capitole n’est
que la traduction, en style de décadence, d’un type beaucoup plus ancien.
Un très beau bronze de Sparte, qui fait aujourd’hui partie du cabinet du
baron Edm. de Rothschild, a achevé d'éclairer la question. La compa¬
raison de ces trois monuments amène M. R. à reprendre l'hypothèse
1 . M. Murray partage l’aviade M. Newton, comme on le voit par un compte-rendu
des Monuments de l'Àrt antique publié dans le n° du 3 février de YAcademy. a On
this point the opinion of Mr. Rayet is , / think, inaccurate. He may abuse the poverty
0 / the Farnese statue... Yet, with atl itspoverty of execution, it may go back nearer
to the original , etc.
2 . M. J. Martha a aussi décrit la Vénus de Vienne du musée du Louvre.
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64 REVUE CRITIQUE
abandonnée de Visconti, qui voyait dans le Tireur d'Epine, un athlète, un
coureur. Quant à l'œuvre originale dont nous n’avons plus que des co¬
pies, il la rattache à l’école argienne, aux successeurs de Polyclète, et il
propose de la placer entre 430 et 35o.On sent bien que M. R. n’est pas
tout à fait certain de ces conclusions. Il faut lui savoir gré de ne pas
affirmer davantage, tant on est habitué à voir intervenir, en ces matiè¬
res, une divination sûre d'elle-même.
Quant aux terres cuites — les unes de Tanagra, les autres d’Athènes,
de Corinthe, d’Asie-Mineure— elles sont fort jolies, d’un très bon choix,
et surtout interprétées à souhait, pour l’instruction à la fois et l’amuse¬
ment du lecteur. Notons au passage quelques pages très piquantes sur
la liberté des mœurs grecques et sur les boutiques de coiffeurs à Athènes.
Ces pages sont de M. Rayet, qui a laissé sa marque dans les nom¬
breuses notices signées de lui. Je ne parle pas seulement d’une certaine
âpreté à relever les erreurs de ses devanciers 1 et de la décision qu’il ap¬
porte à trancher les questions, mais surtout de ce sentiment de l"art an¬
tique que très peu de critiques possèdent aussi délicat et aussi profond,
de la justesse de son coup-d'œil, et de son style. Ce style alerte et vail¬
lant lait plaisir. M. Rayet a du goût pour les expressions franches et fa¬
milières, les termes d'atelier, les néologismes pittoresques *, voire pour
les vieux mots injustement délaissés 3 . Mais il n'abuse de rien. La langue
qu'il s’est faite, très expressive, pleine de saveur, est bien à lui et ne sent
pas l’effort.
Souhaitons l’heureux achèvement de cette utile et magnifique publi¬
cation 4 , à la quelle il ne manque plus que deux livraisons, qui ne tar¬
deront pas à paraître.
P. Decharme.
*49* Julius Jung, professeur d’histoire ancienne à l’université royale de
Prague, Die romanlichen Landschaften des rœmladien Relchea»
Studlen über die Inncren Entwlcklungen In dei* Kaleerzelt*
Innsbruck, 1881 , in -8 de xxxii -554 pp.
Le livre de M. le docteur Jung est l’histoire de la « romanisation »
des provinces occidentales de l’empire romain. On se rappelle les paro-
1 . Voir, en particulier, la notice sur un fragment de stèle de Pharsale.
2 . Il est pourtant difficile d’admettre « le brio des cheveux ». (Livr. IV, notice 11 ).
3. Notice sur l’hoplitodrome d’Agasias : <c sans qu’on ait à blâmer aucune ou¬
trance. »
4 . L’impression du texte ne paraît pas avoir été aussi soignée que la reproduction
des monuments. Il y a des fautes. En voici quelques-unes. Livr. III, notice 12 , p. 3:
drame satirique. Lisez satyrique. Livr. IV, notice 1 , p. 10 , note 1 : the statue. Lisez
tre statue. Ibid, note 4 : IIoXXuxXeiTOU pour üoXuxXêCtou. Liv. IV, not. i 3 , p. 4 :
qu il était du nom, pour quel était le nom. Liv. IV, notice 4 , p. 3, note : noctinet.
Lisez continet. Ibid., p. 8, 1. 9 : il a quelque chose. Lisez il y a.
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D'HISTOIRE BT DE LITTÉRATURK
65
les par lesquelles M. Gaston Paris, dans la préface de la Romania , dé¬
limitait le champ d'études de cette revue : « La Romania, à ce point de
vue de la civilisation et du langage, comprenait autrefois, lors de sa
plus grande extension, l’empire romain jusqu'aux limites où commen¬
çait le monde hellénique et oriental, soit l’Italie actuelle, la partie de
l’Allemagne située au sud du Danube, les provinces entre ce fleuve et
la Grèce, et, sur la rive gauche, la Dacie; la Gaule jusqu’au Rhin, l’An¬
gleterre jusqu’à la muraille de Septime-Sévère ; l’Espagne entière,
moins les provinces basses et la côte septentrionale de l’Afrique ». Tel
est aussi le cadre géographique du travail de M. Jung \
MM. Marquardt et Friedlânder avaient déjà, l’un et l’autre, étudié
l'ensemble de l’empire romain : celui-là, au point de vue politique; ce¬
lui-ci, au point de vue de la littérature et des mœurs. M. J. a eu un
but différent *. Il s’est proposé de rechercher tous les éléments de civi¬
lisation apportés par la domination romaine, d’étudier la transforma¬
tion du monde barbare en provinces, sous la triple influence de la
langue, de l’administration et du droit ; ou, pour emprunter une ex¬
pression de la langue allemande qui reproduit parfaitement le dessein
de l’auteur, de suivre « le processus de l’assimilation » au peuple ro¬
main des pays soumis par ses armes.
M. J. est le premier qui ait entrepris un travail de ce genre : l’idée lui
en fait honneur. Nous avions déjà un grand nombre de monographies
sur la « romanisation » des provinces : on connaît la Gaule Narbonaise
de Herzog, Y Histoire de la Gaule romaine de M. Desjardins, et la bro¬
chure très intéressante de M. Hirschfeld intitulée « Lyon à l’époque
romaine 3 » ; sur la Suisse nous avons les travaux de M. Mommsen 4 ;
sur l’Angleterre, ceux de M. Htibner 5 ; les pays du Rhin ont fourni
matière à de nombreux articles parus dans le Rheinisches Muséum et
dans le recueil publié par la Société des antiquaires du Rhin 6 ; les tra¬
vaux de Bergk 7 résument et complètent tout ce que l’on a dit et
1. Gaston Paris, Romania , I (1872), p. 16; Jung, pp. xviii-xx.
2. Marquardt, Staatsverwaltung, I, 2 e éd. (1881); Friedlænder, Darstellungen
aus den Sittengeschichte Roms , Jung, pp. xx-xxxii.
3 . Herzog, Gallice Navbonensis provincice romance historia, Leipzig, 1864;
Desjardins, Géographie de la Gaule romaine , Paris, 1876-1878; Hirschfeld, Lyon
in der Rœmerçeit, Vienne, 1878; Bernard, Le temple d'Auguste et la nationalité
gauloise, Lyon, i 863 ; Jung, p. 225 .
4* Die Schweif in rœmischer Zeit , Zürich, i 853 ; Schwei^er Nachstudien ( Her -
nies, 1881J; Jung, p. 355 .
5 . Eine rœmische Annexion (Deutsche Rundschau, 1878); Das rœmische Heer in
Britannien (Hermès , 1881); Jung, p. 287.
6. Surtout Hübner, Der rœmische Gren\voall in Deutschland (Jahrbûcher des
Vcreins von Alterthumsfreunden im Rheinlande, 1878); Jung, p. 249.
7. Zur Geschichte und Topographie der Rheinlande in rœmischer Zeit. Leipzig,
1882. Cf. encore la publication oSicielle Das Kœnigreich Württemberg , x r * livrai¬
son, Stuttgart, 1882.
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66
RRVUB CRITIQUE
tout ce que l’on sait sur la domination romaine en Germanie* Sur
ïlllyricum, on possède las gros ouvrages de MM. Zippel et Cons *, une
très intéressante étude de M. J t 2 , et les notes précieuses de M. Du¬
mont 3 . L'Espagne n'a encore donné lieu qu’à des monographies de dé¬
tail ♦. L'Afrique romaine, elle aussi, attend encore son histoire, dont
nous avons seulement une bonne esquisse 5 .C’e$t de tous ces livres qu’est
fait celui de M. Jung. Les résultats auxquels a abouti le travail scientifi¬
que de ces trente dernières années sur l’administration provinciale ro-?
maine se trouvent concentrés et condensés dans ces cinq cents pages. Pour
certains pays comme la Gaule ou les régions du Rhin, le livre de M, J.
est surtout utile comme résumé d'autres ouvrages et comme dépouille¬
ment de textes ; il a une utilité plus grande et plus sérieuse pour les
pays, comme l’Espggne, sur lesquels il est le premier à donner un ta¬
bleau d’ensemble de l’administration romaine. Aucun ouvrage impor¬
tant de seconde main ne semble avoir été négligé; M. J. est même ailé
chercher dans des écrits très médiocres d’importants renseignements. Le
Corpus a été dépouillé avec un soin extrême, les ouvrages de philolo-
gie et de linguistique ont été mis à profit 6 ; nous devons, en particulier,
féliciter M. J. de la connaissance parfaite qu’il a des travaux scientifi*
ques parus chez nous et souhaiter que les savants français connaissent
un livre où on a si bien résumé l’œuvre de l’érudition française.
Un autre mérite du livre de M* J. est d’embrasser une période de
temps plus vaste que celle dans laquelle on a l’habitude de 6e cantonner.
M. J. ne s'arrête ni à Dioclétien ni à Théodose : aussi bien ces deu*
règnes ne marquent rien de nouveau pour l’histoire du développement
intérieur de la plupart des provinces. M« J. raconte le triomphe du chris¬
tianisme, l’arrivée des barbares, l’établissement de leur domination. En
Gaule, il atteint la date de 486, en Bretagne, celle de 453. En Italie, il
étudie avec détail les résultats de la conquête ostrogothique. -»• M. J* fait
remarquer avec raison que, soit à cause de l’abaissement de la popula¬
tion, soit à cause des soins donnés par Théodoric à l’agriculture, l’Italie
pouvait alors se nourrir par les seuls produits de son sol, et se passer des
1. Zippel, Die rœmische Herrschaft in Ulyrien bis auf Augustus. Leipzig, 1877;
Cons, La province romaine de Dalmatie , Paris, 1882.
2. Rœmer und Romanen in den Donaulændern , Innsbruck, 1877.
3 f Archives des missions, III, 1876, Paris.
4. Sur la géographie, Detlcfsen, dans les Comment . phil. in honortm Mommseni,
1877; sur les fastes de la république, Wilsdorf, Leip^iger Studien , 1878; apr les
armées, fioissevain, De re militari provinciarum Hispaniarum net. imp., Amster¬
dam, 1879; en général, Hübner (p. ex. Hermes, 1 865 ) ; Jung, pp, 3-27.
5 . Boissière, Esquisse d’une histoire de la conquête et de Vadministration
romaines dans le nord de VAfrique, Paris, 1878 (2® éd., i 883 ); sur la question de
la langue, cf. Corpus * VIII, index XVI, p. 1108.
6. M. J. cite fréquemment la Romania , les articles de M. d’Arbois de Jubainville
dans la Revue critique, et des œuvres moins scientifiques, comme l'Histoire des origines
de la langue française, de Granier de Cassagnac* Que M. J. se rassure : le % pu¬
blic crédule » qui possède ce livre est fort restreint.
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D HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
67
autres provinces. A ce moment-là, la « romanisation » est arrivée, en
Italie comme ailleurs, au point qu elle ne dépassera pas : les pays qui
avaient composé l’empire romain s’en détachent pour vivre de leur vie
propre. Ils se suffisent à eux-mêmes : l’état provincial succède à la pro¬
vince. M. J. pense que c’est là la fin naturelle de son travail : nous ne
pouvons que l’approuver.
Malheureusement, M. J. n’a pas su classer les matériaux si nombreux
et de si bonne espèce qu’il a eu la patience de réunir. Le livre manque
d’ordre et de méthode. Il est impossible de s'y retrouver : à part les six
grands chapitres qui correspondent aux six grandes divisions géographi¬
ques de la partie occidentale de l'empire, nous ne rencontrons aucun
sous-titre, aucune indication marginale, aucune subdivision en para¬
graphes, pour distinguer les différentes questions que M. J. étudie, ad¬
ministration, situation des villes, état intellectuel. C’est qu’en réalité
chacune de ces questions n’est pas traitée séparément et pour elle-même;
le plus souvent, elles apparaissent tout à fait incidemment. Les assem¬
blées des Gaules et la disparition du druidisme, les deux points les plus
importants du développement politique et social de la Gaule sous les
Romains, sont enclavées dans la nomenclature et la description des
cités, à propos de la ville de Lyon.
Il me semble que l’histoire des faits ne tient pas dans le livre de M. J.,
la place qui lui convient. Non pas que M* J. ait négligé de raconter les
événements politiques, militaires ou religieux qui se sont passés dans la
province. On pourrait lui reprocher plutôt d’avoir trop raconté, surtout
d’avoir trop cité d’anecdotes : par exemple, les intrigues de cour à Ra-
venne et à Milan, qui nous apprennent certainement moins sur l’état
des villes italiennes qui ne le feraient les luttes des curiales et des pos -
sessores. En revanche, l’importance des grands événements historiques
n’est pas suffisamment signalée : des faits comme la création de l’empire
gaulois au troisième siècle sont de véritables révélations sur la situation
politique du pays, et ils sont simplement mentionnés. Puisque M. J.
termine son livre au moment où chaque province vit de sa vie propre,
il importait de chercher dans l’histoire de l’empire romain s’il ne s'était
point manifesté des tendances individualistes, séparatistes, avant la do¬
mination barbare. L’anarchie militaire, l’époque des trente tyrans de¬
vaient être mises en relief. « Vers le milieu du troisième siècle, a dit
M. de Broglie, au moment où l’anarchie et l’invasion rendaient à chaque
province le soin de sa propre défense, la Gaule avait usé de l’interrègne
pour porter à sa tête des soldats nés sur son territoire, et créer un
véritable empire gaulois qui pût se maintenir treize années ». C’est pour
satisfaire à ce besoin d’isolement, de vie commune, que Dioclétien divisa
l’empire en diocèses, et qu’il rendit à la Gaule son empereur. M. J. au¬
rait dû noter ces moments (comme on dit en Allemagne) de l’histoire
de l’Afrique, de la Gaule ou de l’Espagne; son tableau eût été plus vrai
et plus vivant.
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REVUE CRITIQUE
M. J. a été évidemment trop préoccupé de montrer tout ce qu’il y
avait de romain dans les provinces; il n’a pas fait assez sa place à l’élé¬
ment local, indigène. Pour avoir une idée exacte et complète de l'assi¬
milation à Rome des pays conquis, il fallait réunir tous les faits qui
révélaient la persistance des coutumes ou des habitudes nationales :
c’eût été une contre-épreuve nécessaire. Elle aurait pu, je crois, modifier
les résultats de M. Jung. Que dire de l’étonnante persistance de la langue
gauloise, dont on peut suivre la trace depuis l’époque des Antonins jus¬
qu'au règne de la dynastie théodosienne? du maintien des cultes indi¬
gènes, déguisé sous une bizarre adaptation ? de la perpétuité des ancien¬
nes divisions géographiques? A côté de la politique de « romanisation»,
il y a aussi eu chez les empereurs romains une tendance à respecter les
traditions aussi bien provinciales que municipales (tendance qui ne se
retrouve pas d’ailleurs au même degré dans les différentes régions de
l’empire). Il est certain que, non pas par l’effet des lois et des violences,
mais par la simple force de l’habitude, l’assimilation est devenue un
jour aussi complète que le montre M. Jung. Mais la question est de
savoir de quelle manière, sous quelles influences, et surtout avec quelle
lenteur elle s’est produite. N’était-elle pas achevée quand est tombé
l’empire? ou n’a-t-elle pas été, comme il est plus vraisemblable, conti¬
nuée et terminée par le christianisme? Une pareille histoire est encore
à faire; mais ce n’est pas être trop hardi que de croire qu’elle justifiera
l’idée émise par M. Bréal que « peut-être la victoire complète de l’élé¬
ment latin est postérieure à la chute de l’empire romain 1 ».
Malgré tout, si le livre de M. Jung ne peut être appelé un livre bien
fait, ce sera un ouvrage très utile, à peu près indispensable.
Camille Jullun.
i 5 o. — 4 Etude «ni* le SlmpllelMlmu» de Grlmmelshauften, thèse française
présentée à la faculté des lettres de Paris, par Ferd. Antoine, chargé de cours à
l’école supérieure des lettres d’Alger. Paris, librairie C. Klincsieck, 1882. ln-8,
3 o 8 p.
C’est un beau sujet que M. Antoine s’est proposé de traiter et cepen¬
dant il m’est impossible de le féliciter du choix qu’il a fait; grammai¬
rien avant tout et latiniste, c'est, je crois, par une méconnaissance com¬
plète du but qu’on doit se proposer en soutenant une thèse, — laquelle
ne peut servir, il me semble, qu’à s'habiliter pour l’ordre d’enseigne¬
ment auquel on se destine a , — qu’il a pris pour sujet de la sienne une
question de littérature allemande; or en quoi une thèse de littérature
1. Académie des Inscriptions , Comptes-rendus , 1881, p. 384.
2. C’est là évidemment la première réforme à demander pour le doctorat ès-lettres.
Cf. Revue internationale de renseignement y i 5 mars 1 883 .
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d’HISTOIRK BT DK LITTERATURE 69
ou d’histoire moderne peut-elle prouver qu’on est apte à enseigner les
langues anciennes 1 ? Après cette première erreur, peut-être M. A. en
a-t-il commis une autre en allant chercher dans une époque peu con¬
nue de quiconque n'est pas familier avec la littérature d'outre-Rhin,
l'œuvre qu'il voulait examiner et 1 écrivain qu'il voulait juger; ce n’est
pas que l’étude du Simpliciçsimus présente la moindre difficulté; de¬
puis quarante ans bientôt, toutes les questions qui s’y rattachent ont été
élucidées, et les travaux de Kurz et de Tittmann en particulier, qui
résument et complètent ceux de leurs devanciers, n’ont rien laissé à
découvrir, surtout pour un étranger, et offraient à quiconque voulait
aborder ce sujet après eux, une base aussi sûre qu’un plan commode. Il
est regrettable que M. A., qui leur doit tant, ne les ait pas mieux et
plus fidèlement suivis, et que, au lieu de se borner à développer l’ana¬
lyse si substantielle et si complète que Tittmann entre autres avait
donnée, il ait cru devoir abandonner le plan qui lui était offert, pour
exposer le sujet d’une manière toute différente. Quoi de plus simple, ce¬
pendant, que ce plan ! Montrer quel était l’état du roman en Alle¬
magne au milieu du xvn« siècle, raconter, en l’éclairant par les événe¬
ments dont il fut le témoin et les renseignements qu’on trouve dans ses
ouvrages, la vie de celui qui devait le transformer, faire connaître ses
œuvres diverses, enfin caractériser son talent si original à l’aide de la
plus célèbre, le Simplicissimus ; voilà ou à peu près ce qu’a fait Titt¬
mann et ce que M. A., je crois, aurait eu raison de faire à son exem¬
ple; cela eût mieux valu certainement que ces « considérations généra¬
les sur l’état de la littérature allemande » du xvn® siècle, dans lesquelles
les anachronismes, les hors-d’œuvre et les lacunes, les jugements er¬
ronés ou contradictoires sont malheureusement trop fréquents, consi¬
dérations sans grande utilité d’ailleurs et que suivent un peu à l’aven¬
ture, comme on le verra, des chapitres sans lien bien réel et qui ne
nous font connaître qu’assez imparfaitement Grimmelshausen et ses
œuvres, sur lesquelles Kurz et Tittmann, pour ne pas parler d'autres
écrivains, avaient déjà porté un jugement si clair et à bien des égards
définitif.
i. Je suis d’autant plus à l’aise pour tenir ce langage que ma critique s'adresse à
peine a M. A. qui a fait ses preuves comme latiniste et qu’elle vise beaucoup plus
loin. Autrefois qu’on ne savait souvent par quelle porte entrer dans l’enseignement
supérieur, on comprend qu’on ait fait parfois deux thèses d’ordre different; mais au¬
jourd’hui qu’il n’en est plus de même et qu’on peut être attaché à une faculté, — je
n’examine pas ici si c’est un bien ou un mal, — sans être docteur, c’est un devoir de
faire ses thèses sur les matières qu’on se propose d’enseigner. C’est d’ailleurs
ainsi le plus souvent qu’il en a été de tout temps. Voici quelques exemples pris au
hasard parmi les thèses de quelques-uns des membres les plus distingués du haut
enseignement et qui en sont la preuve : Boissier, Le poète Attius et Quomodo grce -
cos poetas Plautus transtulerit. — Bréal, Hercule et Cacus et Depersicis nomittibus
apud scriptores grœcos . — G. Paris. Histoire poétique de Charlemagne et De pseudo-
Turpino,tu.
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REVUE CRITIQUE
70
Sans doute M. A. est excusable d’avoir en partie échoué dans une
entreprise nécessairement au-dessus de ses forces ; mais, tout en dehors
de ses études habituelles qu’était son sujet, je crois qu'il l’eût mieux
traité, s’il s'était entouré de tous les moyens d’information et s’il n’a¬
vait pas négligé de consulter quelques-uns des ouvrages, — comme
ceux de Lemcke, Hettner, même Roquette, l’histoire du roman en
Allemagne de Bobertag, la dernière en date, etc. *, — dans lesquels
les questions littéraires qu’il avait à étudieront été parfois si bien expo¬
sées. Je crois que s’il les avait connus, il ne se serait pas borné à carac¬
tériser d’un mot le xvn e siècle ; il aurait su que si cette époque est
« triste », comme il le dit d’après Vilmar, elle prépare la suivante, ainsi
que l’a fort bien remarqué Lemcke, et mérite par là de fixer l’attention ;
mais surtout il aurait vu que la poésie obéit alors à une double ten¬
dance, qu’elle affecte deux formes bien différentes, une forme savante
et une forme populaire; il aurait opposé entre eux les représentants de
ces deux poésies et n'aurait pas séparé Gryphius de Fleming *, puis¬
qu’il est comme lui un des poètes de l’école silésienne, pour le ranger
à côté de Laurenberg et de Logau, leurs adversaires; il n’aurait pas
omis de dire non plus que l’Allemagne du xvu e siècle eut un drame
savant et sans originalité et une poésie religieuse simple et populaire, et
il aurait montré enfin quelles influences diverses et parfois contradic¬
toires ont contribué alors à modifier la nature et la forme de la litéra-
ture nationale. Mais je ne veux pas trop chicaner M. A. sur la faiblesse
et l’inexactitude de son tableau de la poésie allemande au xvii® siècle,
puisqu’à la rigueur il pouvait se dispenser de le faire; je ne lui repro¬
cherai pas, pour la même raison, trop vivement, après avoir promis des
« considérations sur l’état de la littérature pendant la période de qui va
de 1620 à 1748 » — ce qui était certainement inutile pour caractériser
l’œuvre d’un écrivain mort en 1676, — de n’avoir point parlé du mou¬
vement littéraire pendant les deux derniers tiers de cette période, de
1680 à 1748, et j'arrive tout de suite au chapitre 11, « la prose alle¬
mande au xvii« siècle ». M. A. s’est attaché à montrer à quel point la
langue allemande se corrompit à cçtte époque, par le mélange d’élé¬
ments étrangers; l'invasion de mots français dans l’allemand, à partir
surtout du traité de Westphalie, est un fait bien connu, M. A. aurait
pu se borner à le constater, sans vouloir l’exposer à nouveau ; c'eût été le
moyen d’arriver plus vite à ce qui était véritablement son sujet; il y est
entré à plein avec le chapitre ni, « le roman au xvn # siècle ».
S’il est une question littéraire connue, c’est l’histoire du roman et de
ses transformations dans l'Europe occidentale depuis le xvi* siècle ;
1. Lemcke, Von Opit% bis Klopstock (la i r# édition portait le titre de Geschichte
der deutschen Dichtung ). Le premier volume de Bobertag a paru en 1876-1877.
2. Au lieu de placer Gryphius à côté de Fleming, c’est-à-dire dans la première école
silésienne, on le place aussi souvent dans la seconde, à cëté de Hoffmannswaldau et de
Lohenstein, mais cela importe peu ici.
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d’histoire et de littérature
7 1
M. A. n’avait que l’embarras de choisir un guide pour la refaire à son
tour ; Hettner en particulier en a, dans quelques pages substantielles,
fait un tableau animé et saisissant; je ne sais au juste qui M. A. a suivi;
mais cette partie si importante de son étude manque singulièrement de
netteté, on ne suit pas sans peine avec lui le roman moderne dans ses
diverses transformations ; il ne parle même pas du roman pastoral et,
par un oubli peu excusable, il ne montre point dans le roman fran¬
çais 1 un intermédiaire nécessaire entre le roman espagnol et le roman
allemand contemporain; les origines de ce qu’il appelle peu heureuse¬
ment le roman d'aventures, — roman auquel la plupart des critiques
allemands donnent le nom de populaire et qui a pris chez nous celui
de roman comique,—sont indiquées d’une manière inexacte; M. A. sem¬
ble trop oublier que ce roman est sorti exclusivement du roman pica¬
resque espagnôl, pour y voir le développement des farces et des légendes
populaires allemandes du XV e et du xvi* siècle *. Il est probable que s’il
avait consulté Bobertag, M. A. aurait présenté avec plus de clarté l’his¬
toire du roman en Allemagne jusqu’à l’avénement du roman héroïque
et galant; pour celui-ci il paraît avoir suivi Cholevius 3 ; mais, si l’au¬
teur des Romans les plus importants du xvii # siècle n’est point et n’a
point voulu être complet, il donne au moins une chronologie exacte;
je ne puis comprendre que M. A. ne l’ait point adoptée; pourquoi, par
exemple, parler des romans d’Antoine Ulrich de Brunswick avant ceux
de Zesen et de Buchholtz publiés bien avant et qui ont fixé en quelque
sorte les lois du genre? Comment aussi voir dans la Banise d'Asie de
Ziegler une œuvre de c transition », quand ce roman peut être consi¬
déré comme le modèle du roman faux et ampoulé dont Zesen et Wer-
der avaient été les initiateurs? On n’est pas moins surpris d’apprendre que
le « succès » du roman de Ziegler prépare celui de Robinson Crusoé et de
voir Blanchefleur , cette douce et gracieuse figure de la poésie du moyen
âge, rapprochée de Banise ; on ne comprend pas davantage que M. A.
dise, p. 43, que « Chr. Weise commence une réaction bien plus sé¬
rieuse et plus décisive contre le boursouflage de Lohenstein », puisque
les romans de Weise sont de 1672 et que le premier volume de ÏArmi -
1. Comment, par exemple, n’avoir pas dit un mot du Roman comique de Francion
qui fut traduit en allemand en 1668, précisément un an avant la publication du
Simplicissimus?
2. 11 n'est que juste de remarquer qu'à la fin du chapitre M. A. indique la vérita¬
ble origine du Simplicissimus en disant que « c'est le dernier rejeton d'une famille
espagnole très étendue ».
3 . Je voudrais voir une faute d'impression dans ce que M. A. dit, p. 33 , à propos
de Cholevius : a Cholevius. fait de Zesen un très grand éloge, dans son essai de
réhabilitation des on%e romans héroïques, historiques et ennuyeux du xvn ( siècle. »
Si Cholevius n’a étudié en détail que onze romans dans son livre, cela n'empêche pas
quon les compte par centaines à l’époque de Grimmelshausen et que, par le man¬
que d’intérêt, ils se valent tous. M. A. ne l'ignorait pas sans doute, mais sa phrase
est bien peu explicable.
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RKVUR CRITIQUE
7 2
nius de Lohenstein parut seulement en 1689; on ne s'explique pas non
plus qu'il ait pu écrire que « le style de Chr. Weise est un achemine¬
ment vers le style si clair et si naturel de Grimmelshausen », quand le
Simplicissimus , publié en 1669, est antérieur aux premières œuvres de
Weise.
Après cette histoire générale du roman en Allemagne, on s'attendrait à
trouver dans le livre de M. A. la biographie de son réformateur, de ce¬
lui du moins qui l'engagea dans une voie nouvelle, il n’en est rien;
l’auteur aborde tout de suite l’étude du Simplicissimus. Six chapitres
(ïv-ix) sont consacrés à l’examen de ce chef-d’œuvre de Grimmelshau¬
sen; il y a peu de chose à dire du premier qui renferme l’analyse suc¬
cincte, mais exacte, à ce qu’il m’a paru *, du célèbre roman, ni du der¬
nier qui traite de sa continuation et n’a guère de raison d’étre, puisqu’il
rentrait dans le premier ; le chapitre v qui traite de la valeur littéraire
du Simplicissimus aurait dû, ce semble, terminer l’étude que M. A. a
faite de ce roman; il se compose d’ailleurs de parties très diverses qu’on
est surpris de trouver les unes à côté des autres; à quelques renseigne¬
ments sur la vie de Grimmelshausen succède une appréciation de son
œuvre ; puis M. A. en examine le style et, à cette occasion, il nous dit
quelques mots des connaissances de l’auteur; plus loin, il étudie la lan¬
gue ; dans un autre paragraphe, il s’est efforcé de prouver que a le «Sfm-
plicissimus continue la tradition nationale » ; il avait déjà traité cette
question dans le chapitre ni ; il y revient ici, mais sans arriver à montrer
ce qu’il y a à la fois de vrai et de faux dans cette manière de voir. Le
chapitre vi* aurait gagné à suivre les deux qu’il précède et n’aurait dû
être qu’un paragraphe de la caractéristique générale du roman; quant à
voir dans le héros de Grimmelshausen la personnification de ce « qui
est le trait dominant du caractère de l’Allemand au xvii® siècle ; le désir
de la nouveauté, la passion insatiable du changement, » il y a là une
erreur ou une exagération manifeste : l’esprit d’aventure n’est point
'particulier au xvn« siècle, et la passion du nouveau, M. A. l’a reconnu
lui-même, n’était ni moins grande, ni moins générale au xvi®.
Le chapitre vu, le plus considérable de l’ouvrage de M. A., et le cha¬
pitre vin doivent être examinés ensemble et rentrent, à certains ^ards,
l'un dans l’autre : comment, en effet, apprécier l’intérêt historique
d’un ouvrage, ce qui est un des objets du chapitre vu, sans connaître
les faits qui y sont exposés? D’un autre côté, la vie de Simplicissimus
dont il est question dans le chapitre vm est déjà racontée et connue par
1. Il n’aurait pas fallu dire cependant, p. 63 , à propos de la bataille de Wittstock
que les Suédois battent les Impériaux, a sous le commandement du prince électeur
de Saxe et de Banner. » P. 71. M. A. traduit en note Mummelsee par le a lac des
merveilles », parce que Mummel signifie « épouvantail »; c’est bien là, en effet, le
sens ordinaire du mot Mummel , mais Tittmann en donne un autre qui convient
mieux ici, celui d v « ondin ».
2. Caractère de Simplicissimus et moralité de son histoire.
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d’HISTOIRE RT DK LITTÉRATÜRK
73
l'analyse du roman, objet du chapitre îv ; on comprend à combien de
redites un pareil procédé a dû exposer M. A. et combien il est peu fa¬
vorable à une claire exposition du sujet; aussi, après avoir lu les six cha¬
pitres consacrés au Simplicissimus , est-il difficile de se faire de ce ro¬
man si saisissant une idée bien exacte, et il en reste une impression
moins nette dans l'esprit, moins satisfaisante surtout, que quand on a lu
les six pages que M. Bossert lui a consacrées dans son livre sur les précur¬
seurs de Goethe ; ces pages sont sans prétention cependant; l'auteur s'est
presque borné pour les écrire à consulter ou à traduire une partie des frag¬
ments du célèbre roman donnés par H. Kurz dans son histoire de la litté¬
rature allemande; mais, comme il les a choisis avec goût, de quelle main
légère il les a traduits, quelle idée charmante on se fait de l’œuvre de
Grimmelshausen, qu'on ne connaît qu’en partie, il est vrai, car l'ana¬
lyse de M. Bossert est incomplète, mais qu'on peut néanmoins juger et
apprécier en toute assurance! M. A. est plus complet sans doute, mais
je doute que le lecteur qui ne connaîtra que son livre se fasse une idée
aussi juste, je ne dis pas aussi agréable, cela est impossible, du Simpli -
cissimus qu'après la lecture de l'étude de M. Bossert.
Une erreur de M. A. qui se révèle dans le titre même du chapitre vu 1 ,
c’est d’avoir voulu, avec Gervinus, que le Simplicissimus fût surtout
une satire et de l’avoir jugé comme tel; sans doute la satire peut être
considérée comme occupant une place considérable dans le roman de
Grimmelshausen, mais elle y est subordonnée à l’intérêt historique ;
c'est ce que n'a pas assez vu M. A. qui n’hésite pas à dire que Grim¬
melshausen « continue Moscherosch » ; cela peut être vrai du Monde
à l'envers, du Pèlerin satirique , etc., où il suit son devancier, mais
ne l’est pas du Simplicissimus ; et si, Grimmelhausen s’y montre si supé¬
rieur à l'auteur des Visions de Philander de Sittewald , c’est précisé¬
ment, ou parce qu'il cache la satire sous le ton humoristique de ses des¬
criptions, ou qu'il l’oublie même parfois tout à fait comme dans l'idylle
delà forêt, pour ne pas parler des passages où il s’élève aux accents d’un
véritable lyrisme, par exemple dans le chant si plein de poésie : « Viens,
ô rossignol, consolateur de la nuit ». Du point de vue étroit où il s'était
placé, M. A. n'a pas remarqué ou a omis ces traits si caractéristiques
pourtant du talent de Grimmelshausen, et il a passé sous silence ces scènes
si charmantes cependant, pour s'attacher aux tableaux sombres que lui
offrait la description de la vie des camps; je ne le blâme pas sans doute
d’avoir parlé des spectacles cruels et lugubres dont Simplicissimus
avait été le témoin ; je lui reproche seulement d’y avoir trop insisté et
de s'être ainsi volontairement exposé à des redites; pour cette raison, le
rapprochement entre les scènes analogues tirées des Visions et du Sim -
plicissimus était déjà plus qu’inutile, puisqu’il a forcé M. A. à se répé¬
ter; mais on ne comprend point du tout le rapprochement avec le camp
1. La satire dans le Simplicissimus. Intérêt historique du livre.
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HBVUK CRITIQUB
74
dq Wallcnstein, dont la peinture n'est plus un document authentique et
contemporain et dont la description ne peut que faire perdre de vue le
sujet principal. En procédant comme il Ta fait, M. A. avait sans doute
dans la pensée, quoique peut-être d’une manière inconsciente, le désir
de peindre, d après le roman de Grimmelshausen, les diverses classes de la
société contemporaine, les soldats d'abord, puis les paysans, ensuite les
nobles, etc. ; c’eût été là une étude pleine d’intérêt, mais il fallait la faire
franchement et ne point l’aborder pour l’abandonner, avant de l’avoir
achevée; surtout il aurait fallu donner à toutes les parties de ce tableau
les mêmes proportions ou des proportions analogues et ne pas s’appe¬
santir outre mesure et presque exclusivement sur le portrait de la vie
du soldat dont les traits excessifs finissent par provoquer le dégoût et
font oublier l'intérêt général du roman. Comment, en effet, le lecteur
fatigué de ces scènes grossières peut-il goûter l’allégorie de l’arbre sym¬
bolique vu en songe et que M. A. a eu raison de raconter tout au long,
ou l’histoire humoristique du fou Jupiter qu’il a eü, au contraire, le tort
de tronquer? Ce que je lui reproche plus vivement, ce sont les digres¬
sions qu'on rencontre à la fin du chapitre, comme la réfutation de la
comparaison que Eichendorf et Gervinus ont faite du Simplicissimus et
du Don Quichotte, ainsi que celle que M. A. a établie lui-même entre
l’œuvre de Grimmelshausen et Gil Blas 1 ; il est évident que c'était dans
le chapitre consacré à examiner la valeur littéraire du Simplicissimus
et non ici que l’examen de ces questions pouvait trouver place. Si M. A.
croyait aussi, à propos du Mummelsee, devoir parler de la légende de
Pilate, il fallait le faire plus brièvement ; je ne puis m’expliquer surtout
la longue citation de L. Veuillot, qui n’est « remarquable (ni) par l’onc¬
tion du récit, (ni) par la richesse du style » et ne reproduit ni la physio¬
nomie, ni l’intérêt de la curieuse légende. Ces longueurs surprennent
d’autant plus qu'à partir de cet épisode M. A. abrège outre mesure l’é*
tude des derniers livres du roman.
J’avoue ne point comprendre la raison d'être du chapitre vin, qui n’est
qu'un résumé des événements delà guerre de Trente-Ans depuis 1622,
date supposée de la naissance de Grimmelshausen 3 , jusqu’à la bataille de
1. M. A. est revenu à plusieurs reprises sur Gil Blas , sans dire en quoi il diffère
du Simplicissimus; sortis tous deux du roman picaresque espagnol, si l’œuvre de
Lesage est supérieure au point de vue de la forme et de la conception générale à
celle de Grimmelshausen, le Simplicissimus l’emporte sur le Gil Blas par l’intérêt
national et historique; l’écrivain français a fait un pastiche heureux du roman pi¬
caresque de l’Espagne, Grimmelshausen s’en est inspiré pour peindre les mœurs de
sa patrie et a fait ainsi un roman vraiment national et allemand.
2. Le plus souvent on donne 1625 comme date de la naissance de Grimmelshtu~
sen. M. A. aurait bien dû dire pourquoi il préfère, comme Tittmann d’ailleurs, la
date de 1622. 11 est vrai qu’elle le contente à peine et qu’il voudrait bien la reculer
encore, parce qu’il lui paraît peu vraisemblable que Simplicissimus ait vécu dans les
camps dès l’âge de dix à douze ans; mais Grimmelshausen l’affirme, et puis, est-ce
que Simplicissimus ne pouvait pas être page à cet âge i
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D’HISTOIftK ET DE LÏTTÉRATURK J 5
Jankowen 1645 ; il est évident que ces événements devaient prendre
place dans la vie meme de Grimmelshausen ' ; si M. A. avait procédé
ainsi, il n’aurait point été tenté de faire à l’auteur du Simplicissimus
un reproche de ne point parler, dans ce roman, de Tilly, de Wallenstein
et de Gustave-Adolphe ; si le Simplicissimus est, à tant d'égards, une
autobiographie, comment le héros, c’est-à-dire Grimmelshausen, au¬
rait-il pu parler de personnages qu'il n'avait pas connus? D'ailleurs
M. A. oublie ici qu'il est question des événements qui ont illustré ces
grands hommes dans le Springinsfeld.
Le chapitre x traite des € Reproductions et imitations du Simplicis¬
simus », le chapitre xi des < autres écrits de Grimmelshausen » ; on se
demande, car M. A. ne traite pas seulement dans le chapitre x des re¬
productions du chef-d'œuvre de Grimmelshausen, comment il n'a pas
achevé d’étudier toutes les œuvres de cet écrivain, avant de faire con¬
naître ses imitateurs; il est assez surprenant, on en conviendra, de
parler d’ouvrages publiés en 1697 ou plus tard, avant d'avoir étudié
' ceux qui sont supposés leur avoir servi de modèle et dont le plus récent
est de 1676. Mais ce n’est pas là le seul reproche qu’on puisse faire à
M. A. à propos de ces deux chapitres; le second, tel qu’il est composé,
ressemble trop à une énumération exacte, mais fatigante à la longue,
d’œuvres qui, ainsi présentées, n’offrent qu'un bien médiocre attrait
et ne servent point, ce qu’elles auraient dû faire cependant, à faire con¬
naître Grimmelshausen et son époque; l’analyse de Springinsfeld et
du Vogelnest, ainsi que l’histoire de la Vagabonde Courage , ne sont
point sans doute dénuées de tout intérêt, mais que cet intérêt eût été
plus grand, si cette analyse avait servi à nous révéler le mystère de
la vie inconnue de Grimmelshausen et à nous faire mieux compren¬
dre l’histoire contemporaine ! En faisant marcher de front la biographie
de Grimmelshausen et l’étude sommaire de ses œuvres secondaires, ou
plutôt en faisant de celle-ci la base de la première, M. A. eût fait
du célèbre écrivain un portrait vivant et fût plus facilement arrivé à
assigner à chacune de ses œuvres leur vraie valeur; il n'eût point alors
été tenté de finir l’étude qu’il en a faite par l’analyse de trois romans
écrits dans l’ancien goût du siècle et qui méritent à peine de fixer
l’attention.
Grimmelshausen a fait école et il eut de nombreux imitateurs; M. A.
en a cité un certain nombre, mais un peu à l’aventure et en mêlant en¬
semble des œuvres d’un caractère tout différent; ainsi on est étonné de
le voir prendre comme une Simpliciade le Schelmuffsky (1697), qui est,
tout au contraire, une satire dirigée contre les fades imitations du roman
de Grimmelshausen. Une erreur non moins inexcusable est d'avoir rat¬
taché au Simplicissimus le Robinson Crusoé et les romans qui sont
1. Quelques-uns se trouvent d'ailleurs indiqués déjà dans l'analyse de Simpli -
cissimus.
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REVUE CRITIQUE
76
sortis de l'imitation du livre célèbre de Defoe *. Si Simplicissimus se re¬
tire dans une île déserte à la fin de sa vie, il est certain que son histoire
n’a point été connue de l’auteur de Robinson ; ce roman n'a donc point
été inspiré à Defoe par l’œuvre de Grimmelshausen ; on en peut dire au¬
tant de P Ile de Felsenbourg, cette œuvre remarquable que M. A. cite
presque avec indifférence et qui, écrite seulement de 1731 à 1743, relève
uniquement aussi de Robinson et ne peut, à aucun titre, être regardée
comme sortie de l’imitation du Simplicissimus , déjà presque oublié
quand elle parut.
J’arrive enfin au chapitre xn* et dernier du livre de M. A., « la biogra¬
phie de Grimmelshausen » ; il comprend quatre paragraphes destinés à
examiner quel fut le vrai nom de l'auteur du Simplicissimus , quelles
sa vie et sa religion, et enfin à peindre son caractère. Jusque vers 1840,
on a attribué le Simplicissimus à un certain Samuel Greifensohn, pseu¬
donyme sous lequel Grimmelshausen s’était caché ; ce sont les recher¬
ches d’Echtermayer (i 838 )et de Passow (1843-1847) qui ont éclairci
ce problème littéraire; M. A. s’est borné à résumer, d’après Tittmann et
H. Kurz, l’état de la question; il est inutile dès lors d’insister sur ce
point. Je trouve qu'il a traité bien longuement la question de savoir à
quelle religion appartenait Grimmelshausen, surtout quand sa longue
discussion aboutit tout simplement à ce fait bien connu et qu’il avait
lui-même signalé dans la première partie de son livre, que l’auteur du
Simplicissimus vécut probablement protestant, mais qu’il mourut
catholique. Je ne comprends guère non plus pourquoi M. A. a fait de
cette question une étude à part, quand l’examen en rentrait naturelle¬
ment dans la biographie de Grimmelshausen ; quant à celle-ci, elle ne
nous apprend rien de nouveau; ce n’est guère, d'ailleurs, qu’un résumé
de faits déjà connus en partie, et ces faits présentés ici isolés des événe¬
ments, qui seuls peuvent appuyer et justifier les hypothèses qu’on a
invoquées pour les expliquer, perdent à peu près tout intérêt; M. A.
a porté ainsi jusqu'au bout la peine du plan défectueux qu’il a adopté,
et les deux pages qui terminent son travail a , et dans lesquelles il a étudié
le caractère de l’auteur du Simplicissimus , si elles renferment quelques
vues ingénieuses, ne peuvent suffire pour effacer l’impression laissée par
les erreurs d’appréciation et de méthode qui précèdent, ni pour les ab¬
soudre. Je rends pleine justice aux efforts de M. Antoine, je me plais à
dire que son étude sur le Simplicissimus témoigne d’une profonde con¬
naissance de la langue allemande; mais on était endroit d’attendre de
1. M. A. s’est servi, pour désigner ces imitations, du mot Robinsonade ; je ne lui
en ferai pas un reproche, puisqu’on trouve ce mot dans toutes les histoires de la
littérature allemande; mais je lui reprocherai d’en avoir abusé et d’avoir voulu
voir des Robinsonades partout.
2. Après le chapitre xii, M. A. a donné en appendice (275-3o5) « pour ceux qui
ne voudraient ou ne pourraient lire l’ouvrage », un certain nombre d’extraits du
Simplicissimus
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O HISTOIRh KT DK LITTKRATUHK 77
lui quelque chose de mieux, et je ne doute pas que s’il eût pris un su¬
jet dans le cercle de ses travaux habituels, il ne fût parvenu à faire
quelque découverte, à éclaircir quelque point curieux de l'antiquité
grecque ou latine, tandis qu'il ne nous a rien appris de nouveau sur
Grimmelshausen et son époque. C. J.
CHRONIQUE
•
FRANCE. — Notre collaborateur M. Henry Harrisse a fait tirer, sou 6 la forme
d’une très belle brochure, l’article qu’il avait publié dans notre numéro du 18 juin
i 883 ; il a fait quelques additions, et sa plaquette, intitulée Christophe Colomb et la
Corse , observations sur un décret récent du gouvernement français (io p. in-8°),
aura, nous l’espérons, un vif succès; il était bon que cette vigoureuse critique vînt
réfuter l’opinion qu’ « on veut inspirer aux populations, que l’Amérique a été dé¬
couverte par un Corse né à Calvi ».
— M. Félix Hémon, professeur au lycée Charlemagne, lauréat de l’Académie fran¬
çaise, avait déjà publié dans la collection de classiques français de la librairie Dela-
grave Rodogune et Cinna de Corneille. 11 vient de faire paraître dans la même col¬
lection Horace et le Menteur avec une introduction, des éclaircissements et des
notes. Nous souhaitons que toutes les éditions destinées aux classes de nos lycées
ressemblent à celles de M. Hémon ; car, comme le dit le jeune et laborieux éditeur,
elles épargnent aux élèves — et même aux maîtres — de longues recherches ; elles
leur apportent sur chaque pièce de Corneille une somme de renseignements souvent
difficiles à recueillir; elles traitent, dans une introduction étendue, toutes les ques¬
tions qui peuvent intéresser les candidats au baccalauréat, à la licence et même à
1 agrégation. Nous félicitons, en passant, M. Hémon d’avoir donné le texte entier du
Menteur « sans s’alarmer outre mesure de certains passages qu’autorisait alors la
liberté du langage comique » ni a sans entrer dans la voie des coupures, où il est
pénible de s’engager, où il est si difficile de s’arrêter à temps ».
— M. Ch. Joret, professeur à la Faculté des lettres d’Aix, vient de faire paraître
à la librairie Champion la Correspondance inédite de Louis-Auguste de Bourbon ,
duc du Maine , avec Lamoignon de Basville intertdant du Languedoc (1709-1716).
Cette correspondance est tirée d’un manuscrit de la Bibliothèque Mejanes et offre
un très grand intérêt pour l’histoire des dernières années de l’administration de ce
célèbre intendant du xvm* siècle qu’on avait surnommé le missionnaire irrésistible.
M. Joret reproduit trente-neuf lettres ou billets du duc du Maine ; il y a joint des
notices sur ce prince, sur Basville et sur les événements auxquels cette correspon¬
dance est relative. Nous reviendrons peut-être, plus amplement, sur cette attachante
et importante publication.
— On vient de terminer les études pour la translation de l’école des Chartés 6ur
une partie des terrains détachés du Luxembourg. Cette école, on le sait, se trouve
snnexée aux archives nationales. Son installation est défectueuse et insuffisante,
surtout en ce qui concerne le service des archives qui a besoin de locaux pour un
grand nombre de pièces et de collections intéressantes actuellement réléguées dans
les greniers. La nouvelle école des Chartes doit occuper de 6 à 7,000 mètres.
— M. Quellien, chargé par le ministère de l’instruction publique de recueillir les
mélodies populaires de Basse-Bretagne en 1880-81, continue les travaux de sa mis-
soin; cette année, il s’occupera de l'hagiographie locale, des traditions populaires
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yS RBVUB CRITIQUE
qui entourent les plus anciens oratoires du pays et Us chapelles des vieux
saints.
— On a placé dans le square de l’église Saint-Germain-des-Prés* le long du bou¬
levard Saint-Germain, la statue de Bernard Palissy. Cette statue est l’œuvre du
sculpteur Barrias. Palissy est représenté près d’un fourneau allumé, tenant un plat
dans la main droite. Sur le socle, est l’inscription « à Bernard Palissy ».
ALLEMAGNE. — M. Frank Praetorius nous écrit une lettre, que nous tradui¬
sons : a Dans l’article de M. Halévy (n° 27), j’ai été surtout surpris par le premier
paragraphe, car je crois avoir entièremerit reconnu et n’avoir nullement mis en
question le mérite de M. Halévy et son déchiffrement des inscriptions du Safa.
Quant à mon propre article, je ne l’ai pas nommé un progrès notable f mais « un petit
nombre de remarques Imparfaites » (Wenige und unvollkommefie Bemerkungen).
Je regrette de ne pouvoir accorder aucune valeur démonstrative aux arguments dé
M. Halévy contre moi. Mais comme je crois ne devoir pas réclamer l’espace de 1 &
Revue critique pour une longue discussion — qui, du reste, serait à Sa disposition,
— je me réserve de revenir ailleurs sur la question engagée. »
— A la séance du 3 t mai de l’Académie des Sciences de Berlin, M. J. ScUmid, dé
Halle, a rendu compte des résultats du a voyage épigraphique » qu’il avait entrepris
au nom de l’Académie en Algérie et â Tunis. La Galette de Voss (n° 299) à la¬
quelle noüs empruntons ce renseignement, ajoute : a Par contraste avec l’aCcueil
que feu Wilmanns avait trouvé en quelques endroits chez les Français, M. Schmid
a été reçu partout avec une aimable courtoisie. Malgré le mauvais temps, les résul¬
tats de son voyage Ont été bons ; il à pu comparer des inscriptions déjà connues et
en a découvert de nouvelles. Mais il se plaint que les habitants et surtout les troupes
du génie français mutilent et détruisent les monuments et les Inscriptions; léS
ruines disparaissent les uiies après les autres; on utilise les pierres comme maté¬
riaux pour la construction des routes et des ponts ; dans certaines localités, une
inscription, transportée au musée de l’endroit, n’est même pas à l’abri de la des¬
truction. Il faudra donc déployer plus d’énergie pour sauver les antiquités africai¬
nes; l’ordonnance du bey prouve que le gouvernement français est déjà résolu à
user de sévérité ; on doit espérer que cette ordonnance ne restera pas sur le pâpiéf,
mais qu’elle sera réellement exécutée. »
— Là célèbre lettre de Luther dn die Radherrn aller stedte ÙeütSches Land s :
das sie Christliche Schulen aufrlchten und haîten sollen , qül parut à Wlttenberg efi
i$24, doit être publiée en une nouvelle édition fàc-sifflilé, par I’imprimeUr dé
Leipzig, Druguîin.
— Le « recueil mensuel de Pick » ou Picks Monatschrift a disparu, il y a quelqué
temps, pour faire place à la « Revue allemande de l’Ouest pôür Thistoire et l’art »,
Westdeutsche Zeitschrift für GesChlchte und Kunst. Les directeurs de la nouvelle
revue sont MM. F. HèîtneU et K. Lamprecht, le premier, directeur du musée pro¬
vincial de Trêves, le second bien connu par ses travaux sur l’histoire des pays
rhénans. Cette revue publie, outre des articles de fond, une Sorte de Bulletin ou
Corresponden\blàtt. Parmi les études et travaux de valeur qu’a publiés la Westdeut¬
sche Zeitschrift , on cite surtout l’étude de M. Hettner qui a pour titre : Zur Cultût
von Germanien und Galtid Betgica.
— M. W. L. Holland, professeur à l’Université de Tubingue, a été nommé
président du comité du Liiterdrlscher Vereln de Stuttgart-Tubingue (à la place de
feu Adelbert de Keller).
ESPAGNE. — Le P. Fita a fait paraître, sous forme de volume et sous le titre
de Datos epigraficos é historicoSj de Talavera de la Reina (Madrid, Fortanet) un
recueil d’articles publiés récemment par lui dans le a Boletin de la real academïâ de
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D’HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
79
la hlstoria »; ce volume renferme des corrections et des additions au Corpus ins -
criptionum , un document intéressant de 1204, etc.
M. Antonio Machaoo y Alvarez annonce la publication, à Séville, à Madrid et
à Barcelone, d’une Biblioteca de las tradiciones populares espaholas.
GRANDE-BRETAGNE. — M. Mackenzie Wallace prépare un volume intitulé
Egypt and the egyptian question , qui paraîtra chez les éditeurs Macmillan dans le
courant de l’automne.
— La Record Society vient de distribuer les VII e et VIII e volume de ses publica¬
tions; ces deux volumes, édités avec grand soin par M.W. D. Selby, renferment des
documents relatifs au Lancâshire et au Cheshire, tirés du « Public Record Office ».
— La Peace Society fait traduire le traité de Kant « sur la paix éternelle », jum
ewigen Frieden.
— Une fête commémorative en l’honneur de Cromwell a eu lieu récemment au
village de Houghton, dans le Hüntingdonshire. A cette occasion, on a exposé une
collection de peintures, de médailles, de bustes et de gravures satiriques, représen¬
tant Cromwell et appartenant à M. Kewer Williams.
HONGRIE. — M. V. Fràkroi vient de publier à la librairie Kilian, de Budapest,
un volume sur la Hongrie et la ligue de Cambrai « Ungarn und die Liga von Cam-
bray, 1 5 00-1 5 1 1 .
SUISSE. — M. Eugène Ritter, professeur à l’Université de Genève, a fait tirer à
part le travail qu’il avait lu à la séance générale de l’Institut genevois, le mardi
i er mai i883, et inséré dans le tome XXV du Bulletin de ce même institut, « Les
recherches généalogiques à Genève ». (ln-8°, tb pp.) Pourquoi, dit M. Ritter, une
famille bourgeoise n’étudierait-elle pas ses origines, ne suivrait-elle pas la ligne
modeste de ses ascendants aussi loin que possible, ne dresserait-elle pas un arbre
complet ? Si humble qu’elle Soit, elle a Un passé, et rien n’est plus intéressant que
de rechercher ce passé. On sait qu’en étudiant l’origine des familles genevoises, on
n'en trouve aucune qui soit autochtone à Genève même; on arrive toujours à utt
ancêtre venu de la campagne ou de l’étranger. La vérité des points ou vient aboutir
le tracé des lignes ascendantes, les bizarreries qui se dessinent au regard du cher¬
cheur, voilà ce qui fait pour lui un des charmes de ses tableaux. L’ascendance de
M me de Staël, par exemple, nous montre ces croisements qui amusent le généalo¬
giste. En commençant par établir quatre quartiers, on arrive dans autant de con¬
trées : la Poméranie, la ville de Genève, le pays de Vaud, le Dauphiné. M. Ritter
reprend chacun des quatre quartiers. Le grand-père paternel de M*” de Staël était
un avocat de Custrin, Charles-Frédéric Necker, lui-même fils d’avocat et petit-fils
de pasteurs, lequel obtint la faveur de Georges I er , roi d’Angleterre, qui lui fit accor¬
der par son parlement une forte pension annuelle, à la Condition qu’il irait s’établir
a Genève, et qu’il y ouvrirait un pensionnat destiné à l’éducation des jeunes Anglais
qui viendraient sur le continent. La grand’nflre paternelle de M"* de Staël fut
Jeanne-Marie Gautier, d’une vieille famille de Genève, Son grand-père maternel fut
la pasteur Curchod, et sa grand’mère maternelle, la fille d’un avocat dauphinois.
Ces recherches généalogiques, ajoute M. Ritter, ne sont-elles pas essentielles pouf
connaître à fond un personnage, et Sainte-Beuve ne disait-il pas qu’il faut considérer
avec soin les proches d’un grand homme, et ne cherchait-il pas à retrouver dans les
frères de Boileau, dans les sœurs de Chateaubriand et de Pascal, les traits caracté¬
ristiques du talent de ces illustres écrivains ' Les recherches généalogiques, remar¬
que M. Ritter, sont plus faciles à Genève que partout ailleurs, surtout depuis la pu¬
blication des trois volumes de Notices rédigées par M. Galiffe père, depuis les trois
forts volumes manuscrits qui composent le Dictionnaire des familles genevoises de
M. Louis Sordet, depuis le quatrième volume des Notices généalogiques de M. Ga-
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8o
REVUE CRITIQUE O HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
lifte fils, et tant d'autres travaux. Ces considérations fort intéressantes de M. Rit ter
sont suivies d'un appendice où l’on trouve des renseignements communiqués par
M. le baron de Coston sur la famille Albert, à laquelle appartenait la grand'mère
maternelle de M"* de Staël.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du i3 juillet i883 .
M. Wallon, secrétaire perpétuel, donne lecture de son rapport semestriel sur les
travaux de l'Académie.
M. Alexandre Bertrand, au nom de la commission chargée de juger le concours
des antiquités de la France, annonce que les récompenses de ce concours sont dé¬
cernées aux auteurs des ouvrages suivants :
ire médaille : M. Beautemps-Beaupré, les Coutumes d'Anjou et du Maine;
2* médaille : M. Pélicier, archiviste de la Marne, Essai sur le gouvernement de la
dame de Beaujeu ;
3 e médaille : MM. Auguste et Emile Molinier, Chronique normande du xiv* siècle ,
publiée pour la Société de l'histoire de France;
ire mention : M. d'Arbaumont, la Vérité sur les deux maisons de Saulx-Courti-
vron ; Cartulaire du prieuré de Saint-Etienne de Vignory ; Armorial de la Chambre
des comptes de Dijon ;
2* mention : M. Joret, Les caractères et Vextension du patois normand ;
3* mention : M. Loriquet, Tapisseries de la cathédrale de Reims ;
4 e mention : M. le D r Barthélemy, Inventaire chronologique et analytique des
chartes de la maison de Baux;
5 e mention : M. l'abbé Albanès, Histoire de Roquevaire et de ses seigneurs au
moyen âge ;
6° mention : M. du Bourg, Histoire du grand prieuré de Toulouse et de diverses
possessions de l'ordre de Saint- Jean-de- Jérusalem dans le sud-ouest de la France.
L’Académie se forme en comité secret.
A la reprise de la séance publique, l'Académie procède au choix du candidat qui
sera proposé en son nom aux suffrages de l'Institut pour le prix biennal de
20,000 fr. M. Paul Meyer, directeur de l'Ecole des Chartes, professeur au collège de
France, est désigné par i3 voix, contre 11 données à M. Gaston Maspero, professeur
au collège de France, directeur des fouilles archéologiques en Egypte.
M. Hauréau donne une seconde lecture de son mémoire sur les Propos de maître
Robert de Sorbon.
Ouvrage présenté, de la part de l'éditeur, par M. Maury : Œuvres d'A. de Longpé-
rier, publiées par G. Schlumberger, t. III.
Julien Havbt.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 4 juillet.
M. Egger présente, de la part de M. Choisy, ingénieur en chef des ponts et chaus¬
sées, un mémoire sur l'arsenal du Pirée.
M. Mowat communique une inscription grecque conservée au Musée d'Avignon
et inexactement publiée par Mérimée. Cette inscription est consacrée à la mémoire
de Tiberius Claudius Antipater, fils de Draco, de la tribu Quirina, originaire de Pa-
leopolis, par sa fille Claudia Mnasagora et par sa femme Theonis Fuscia.
M. de Villefosse fait observer que le Musée d’Avignon contient un certain nombre
de monuments provenant de la collection Nanni, de Venise; il est possible que
l'inscription communiquée par M. Mowat se rattache à cette collection. Peut-être
aussi a-t-elle été acquise à Marseille, où le Musée d'Avignon a fait plusieurs acqui¬
sitions.
M. Egger insiste sur certaines particularités tendant à faire croire que cette ins¬
cription est d'origine dorienne.
M. Saglio présente une plaque d'émail sur laquelle il croit reconnaître le portrait
du cardinal a'Amboise.
M. l’abbé Thédenat communique, d'après un manuscrit du président Bouhier,
une inscription funéraire métrique trouvée à Chanac, bourg du Gévaudan, aujour¬
d'hui dans le département de la Lozère, et qui renferme un vers de Virgile :
Dum memor ipse met, dum spiritus hos reget artus.
{Enéide, 1. IV, v. 336.)
E. Müntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2 3 .
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woode. — Birch, Catalogue of the collection of egyptian antiquilies at
Alnwick Castie belonging to his grâce the Duke of Northumberland.
— Westminster Abbey.
Literarisches Centralbl&tt, n° 27, 3 o juin i 883 : Baumgarten, Eine deut-
sche Reveille zum Lutherfest am 10 November 1 883 . — Bbrnus, No¬
tice bibliographique sur Richard Simon (Travail difficile fait avec beau¬
coup de soin et de peine). — Heinze, Der Eudâmonismus in der
Griechischen Philosophie. I. Vorsokratiker, Demokrit, Sokrates (Grande
t Accuratesse » et grande science). — Muir, Annals of the early Cali-
phate from original sources (L’auteur est le premier Anglais qui ait
puisé aux sources arabes, conçu avec une critique occidentale et repré¬
senté, très habilement du reste, l’histoire des premiers califes; œuvre
excellente). — Historische Untersuchungen, Arnold ScnàFER zum
25 jâhrigen Jubilàum seiner akad. Wirksamkeit gewidmet von früheren
Mitgliedern der histor. Seminarien zu Greifswald u. Bonn. — Mbhlis,
Studien zur àltesten Geschichte der Rheinlande. VI (Rufiana serait Ei-
senberg ; recherches sur les fouilles faites dans les provinces rhénanes,
etc.). — Leupold, Berthold von Buchegg, Bischof von Strassburg.
Strassburg, Trübner (bonne méthode). — Ulrich, Geschichte des rômi-
schen Kônigs Wilhelm von Holland, 1247-1256 (Rien de nouveau,
épuise néanmoins le sujet). — Vlach, die Cecho-Slaven ; Helfert,
Volkslied und Tanz, das Wiederaufleben der bôhmischen Sprache u.
Literatur, die àltesten Denkmale bôhmischen Schriftthums u. der Streit
über deren Aechtheit (Livre rempli de détails instructifs et nombreux!.
— Culmann, etymologische Aufsàtze und Grundsâtze. VI. Umschau
auf dem Gebiete der historischen Zeitformen u. ihrer Augmente (Inac¬
ceptable, manque absolument de méthode scientifique). — Holtermann,
Deutsch-franzôsisches phraseologisches Worterbuch (utile). — Gbitler,
Die albanesischen u. slavischen Schriften (Beaucoup d’application et de
patience, mais il est douteux que l'auteur ait atteint son but). — Bos-
wortb, An anglo-saxon dictionary, basedon themanuscript collections,
edited and enlarged by Toller. I et II. A-Hwi. — Carlyle, Sartor re-
sartus, übersetzt u. hrsg. v. Th. Fischer (Renferme une biographie de
Carlyle qui est un travail très méritoire et une excellente traduction al¬
lemande du « Sartor resartus »). — Leland, The gypsies (Livre qu'il
faudrait traduire). — Saintsbury, A history of french literature (A re¬
commander en général ; l’article relève les erreurs commises par Saints¬
bury dans les chapitres sur le moyen âge). — Haverkorn van Rusewik,
de oude rotterdamsche Schouwburg (Etudie très soigneusement une par¬
tie peu connue de l'histoire du drame hollandais). — Beschreibende
Darstellung der âlteren Bau-u. Kunstdenkmâler des Kônigreichs Sach-
sen, I. Amtshauptmannschaft Pi ma; Sommer, Beschreibende Darstel¬
lung der àlteren jBau-und Kunstdenkmâler des Kreises Weissensee. —
Hiller, Gœthe's musikalisches Leben (Etude pleine d’intérét et de vie,
qui prouve que Gœthe aima la musique, mais c qu’il sema plus qu’il
récolta, donna plus qu’il reçut » ; il lui manqua de connaître un musi¬
cien réellement remarquable, car Kayser, Reichardt et Zelter ne lui suf¬
fisaient pas). — Bussler, Geschichte der Musik, sechs Vortràge.
n° 28, 7 juillet 1 883 : Cheney , The sources of Tindale’s
New Testament. (« Digne production de la science américaine,
aidée de la science allemande. ») — Zittel, Die Paulus-Briefe
übersetzt und erklârt. I. — Leop. Schmidt, Die Ethik der alten Grie-
chen. 2 vols. (Très bon travail.) — von Destinon, Die Quellen des
Flavius Josephus in der jtidischen Archàologie, Buch XII-XVII. (Com¬
mentaires surprenants, et d’une très grande importance; démonstra¬
tion méthodique; polémique habile contre Bloch et Grimm). — Tar-
tara, Délia battaglia délia Trebbia a quella del Trasimeno. (De la
sagacité et un jugement sain). — Urkundenbuch, Liv z=, Est = und
Curl&ndisches, begründet von Bunge, im Auftrage der baltischen Rit-
terschaften u. Stàdte fortgesetzt von Herm. Hildebrand. VII, mai
1423 mai 1429. — Niblsen, Kjobenhavn i aarene i536-i66o. I et II,
I. (Chronique*soignée.) — Wbrthheimer, Die Heirath der Erzherzogin
Marie Louise mit Napoléon I, nach ungedruckten Quellen. (Metter-
nich aurait eu le premier , l’idée de ce mariage.) — Hansische Wisby-
fahrt, hrsg. auf Veranlassung des Comités der hansischen Wisbyfahrt
von 1881, Reisebericht u. histor. Beitrag von Koppmann. — Richtho-
fen, China Ergebnisse eigener Reisen und darauf gegründeter Reisen.
II. Das nôrdliche China. IV. Palàontologischer Theil. — Maurer,
Die unechte Geburt nach altnordischem Recht (Travail où l'on trouve
la profondeur et la méthode coutumières de l'auteur). — Schulze, Die
Hausgesetze der regierenden deutschen Fürstenhâuser. III. (Le dernier
tiers de ce volume est consacré au droit privé des Hohenzollern). —
Reinhardstôttner, Die plautinischen Lustspiele in spàteren Bearbei-
tungen. I. Amphitruo. (Un peu superficiel.) — Kock, Studier ôfver
fornsvensk ljudlâra. — Smiles, Georg Moore, ein Kaufmann u. Men-
schenfrfcund, autoris. Uebersetzung aus dem englischen von Daniel —
Milchhôfer, Die Befreiungdes Prometheus, ein Fund aus Pergamon.
(Très bien fait, très attachant et très instructif.)
Deutsche Litteraturzeitung;, n° 27, 7 juillet 1 883 : Hirsche, Kritisch-exe-
getische Einleitung in die Werke des Thomas von Kempen. II. —
Zimmermann, Die kirchlichen Verfassungskàmpfe im XV. Jahrhundert
(Kolde : beaucoup de soin et de travail, mais le lecteur ne trouvera pas
là ce que faisait attendre le titre). — Bergmann, Grundprobleme der
Logik. — Krause, System der Aesthetik oder der Philosophie des
Schônen, p. p. Hohlfeld u. Wünsche. — Michaelis, Ueber die Phy¬
siologie u. Orthographie der Zischlaute mit besonderer Rücksicht auf
die Heysesche Regel (J. Seerntiller : abondant recueil de matériaux). —
Bartholomae, Handbuch der altiranischen Dialecte (W. Geiger : la
première grammaire comparée des anciens dialectes iraniens au point
de vue de l’école des jeunes grammairiens, travail très méritoire qui
prouve que son auteur est sur le domaine de la science moderne du lan¬
gage comme dans son élément et qu’il sait mettre en œuvre les plus
récentes conquêtes). — Fr. S. Krauss, Sagen und Marchen der Stidslaven
in ihrem Verhàltnis zu den Sagen u. Marchen der übrigen indogerma-
nischen Vôlkergruppen. I (J. Koch : travail qu’on ne peut encore ju¬
ger : il faut attendre les volumes suivants). — Die hellenische Sprache
der Gegenwart (Lambros : 2 e édition très augmentée). — J. Macci
Plauti Mercator rec. Ritschlelius , editio altéra a Goetz recognita
(A. Spengel : donne un texte plus pur et plus rapproché de l’original).
— J. Seemüller, Studien zum Kleinen Lucidanus, « Seifried Hel-
bling » (A Schônbach : travail très louable). — Ad. Stôber, Margare-
tha Spôrlin, Verfasserin der elsàssischen Lebensbilder, eine biogra-
phisch-literarische Skizze (K. Schirmer). — C. Humbert, Deutschlands
Urtheil liber Moliere (Lotheissen : bonne contribution à l'histoire du
goût littéraire en Allemagne). — Hamilton, Rheinsberg, Friedrich der
urosse und Prinz Heinrich von Preussen, aus dem englischen tiber-
setzt von Dielitz (Wiegand : à la fois instructif et intéressant, traduit
avec goût). — A Beer, Die orientalische Politik Oesterreichs seit 1774
(Krones : livre très clair, très attachant, rempli de nombreux et nou¬
veaux documents, le premier sur la matière). — Westdeutsche Zeitschriit
ftir Geschichte und Kunst, hrsg. v. Hettner u. Lampkecht (Kekulé :
très bonne publication). — Rohlfs, Meine Mission nach Abessinien
(Erman). — Ludwig von Sybel, Kritik des àgyptischen Ornaments
(Justi : travail concis). — l. Die preussischen Kriegsvorbereitungen und
Operationsplàne von i 8 o 5 . II. Die Unternehmung des Détachements
von Boltenstern in Loir-Thale am 26 u. 27 dec. 1870 (Deux publica¬
tions de l'état-major allemand).
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 584, 14 juillet i 883 : Duc de Broglie, Frédéric the
great and Maria Theresia. (« An exhaustive, lucid, vivacious account. »)
— The poetical works of William Wordsworth, edited by W. Knight.
III. (Dowden : renferme les poésies de 1804 et de i8o5, avec de très
bonnes notes.) — Clayden, Samuel Sharpe, egyptologist and translator
of the Bible. — Greg. Smith a. Onslow, Worcester. € Diocesan histo¬
riés ». (Ch. J. Robinson.) — First Annual report of bureau of ethno-
logy, Smithsonian Institution. 1879-80, by J. W. Powell — Some
historical books (entre autres, Bisset, A short history of the english par¬
lement, vol. II : sans valeur; Johannis Burchardi Diarium, p. p.
Thuasne. I; Marczau, Ungarns Geschichtsquellen im Zeitalter der
Arpaden.) — A Caxton Fragment. (Madan.) — The names « Trisan-
ton » ana « Antona » (H. Bradley). — The dérivation of « Sweet Wil¬
liam » (St. Clair Baddeley). — Galton, Inquiries into human faculty
and its development. — Émendations of « Saltair na Rann » (Whitley
Stokes). — James Fergusson, The Parthenon (J. H. Middleton : ou¬
vrage très soigné et très attachant). — Pithom, Fayoum, Moeris (Cope
Whitehouse).
The Athenaeum, n° 2907, 14 juillet 1 883 : Duc de Broglie, Frederick
the Great and Maria Theresia ; Du Bois-Reymond, Friedrich II in en-
glischen Urtheilen. (Le duc de Broglie a traité son sujet plus en patriote
qu’en historien ; M. Du Bois-Reymond a les mêmes défauts). — W. Po¬
well, Wanderings in a wild country, or three years among the can-
nibals of New Britain. — The Leofric Missal, with introd. and notes
by Warren. — Bertha Thomas, George Sand. (Fait avec beaucoup de
talent et de bon goût, et sans aucune prétention; peut servir d’intro¬
duction au sujet.)—Philological books. (Trad. du 6 e livre du Baha-
ristan, de Jami, sous le titre € Persian wit and humour » ; Blaydes,
Aristophanis quatuor fabulae, Equités, Nubes, Vespae, Ranae.) — An-
tiquarian books. (J. Brand, A brief description of Orkney, Zetland,
Pightland-Firth and Caithness; Dawson, The history of Skipton, etc.)
—r The insurance of manuscripts against fire. — Charles Lamb’s works.
(Ch. Kent.) — Euphuism. (S. L. Lee.) — The Indian Survey. — Fine
arts (Kinross, Details from italian buildings, chiefly Renaissance.)
Literarisehes Centralblatt, n° 29, 14 juillet 1 883 : Buddhismus und
Christenthum, mit einem Anhang über das Nirvana, von einem Hindu.
(Légère causerie qui n'a d’autre intérêt que d’être écrite en allemand
Ï ar un Hindou.) — Der Midrasch Schemot rabba, zum ersten male ins
leutsche tibertragen von Wünsche. (Suite de cette méritoire entreprise.)
— Becker, Das Necrologium der vormaligen Pràmonstratenser-Abtei
Arnstein an der Lahn. — Gôtzinger, Reallexicon der deutschen Alter-
thümer. (Suffira au besoin du grand public qui veut s’instruire vite,
sinon superficiellement.) — Urkundenbuch der Deutschordens-Com-
mende Langeln u. der Klôster Himmelpforten u. Waterler in der
Grafschaft Wernigerode. — Lindner, Das Urkundenwesen Karls IV
und seiner Nachfolger. 1346-1437. — H. Brockhaus, Der Kurfürstentag
zu Ntirnbergim Jahre 1640. (CEuvre soignée et de grand mérite.) — BâR,
Die « Bamberger » bei Posen. — Kleinpaul, Rom in Wort und Bild.
Lief 31 - 36 . — Steffen, Die Landwirthschaft beiden altamerikanischen
Kulturvôlkern. — Guienness, Grammar of the Congo language, as
spoken in the cataract région below Stanley Pool. (Petit livre pratique,
destiné aux hommes pratiques, et qui enchantera le linguiste.) — Ins-
criptiones graecae antiquissimae praeter atticas in Attica repertas ed.
Roehl. (Cp. l’art de notre recueil; on reproche à Roehl d’avoir eu trop
de confiance dans son talent d’artiste et de n’avoir pas reproduit assez
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
H» 31
— 30 Juillet —
1883
Sommaire t i5i. Maie-Werly, Collection des monuments épigraphiques du
Barrais. — i 52 . Rœhl, Choix d'inscriptions grecques les plus anciennes. —
i 53 . Harrisse, Jean et Sebastien Cabot, leur origine et leurs voyages. — 154.
Mémoires de Jacques de Puységur, p. p. Tamizey de Larroque. — i55. Jackson,
Liste provisoire de bibliographies géographiques spéciales. — Thèses de doctorat :
Henry, Varron et l’analogie; Etude sur l’analogie en général. — Chronique. —
Académie des Inscriptions. — Société des Antiquaires de France.
j5i. — Màxb-Werly, Collection de» monnmenti éplgraplilquea du Barrois.
Paris, Champion, i 883 . In-8 de 96 p., 1 pl.
L'arrondissement de Bar n'abonde pas en monuments épigraphiques.
Le recueil deM. M axe-Werly comprend soixante-six numéros : mais
près de la moitié consistent en sigles figulins, qui ne sont que d'insigni¬
fiantes variétés de types déjà connus; il y a quelques inscriptions de ba¬
gues et de fibules (ce que M. M.-W. désigne par l’expression si étrange
de« bagues et fibules épigraphiques »): mais elles avaient paru dans
des recueils locaux et sont d’ailleurs sans importance. Des dix ca¬
chets d'oculiste trouvés dans le Barrois, huit ont été publiés dans le li¬
vre de Grotefend, tous léseront bientôt dans le beau travail de MM. Hé¬
ron de Villefosse et Thédenat. D’inscriptions proprement dites, la col¬
lection de M. M.-W. n'en renferme qu'une quinzaine. Une seule (p. 4)
présente un véritable intérêt: DEAE-EPONAe | ETGENIOLEVC |
TIB* IVSTIN 1 VS | TITIANVS b. f. leg. lEg • XXII- pr. |
ANTONINmn | EX*VOfo; mais on la connaissait déjà par les recueils
de H. Henzen ( 5239 ) et de M. Ch. Robert ( Epigraphie de la Moselle ,
p. 16). M. Henzen l'avait publiée d'une manière très incomplète;
M. Robert a pu retrouver le titre (beneficiarius legati) de Titianus, et
aussi la date approximative de cette inscription, à l’aide d’un autre mo¬
nument élevé à Mayence par le même personnage (Brambach, C. i. rh
999=Henzen, 6799) : M. M.-W., qui rappelle l’ingénieuse restitution
de M. Robert, aurait pu aussi nous dire comment il y est arrivé. —
Près de cet autel ont été trouvés d'autres fragments (p. 22), dont
M. M.-W. ne veut tirer aucun renseignement, mais qui toutefois sem¬
blent bien se rapporter à un monument entièrement analogue à celui de
Titianus. Il faut lire, je crois, leg. jcXII pr(imigeniae) AntoninlANae,
ce qui porterait à quatre le nombre des inscriptions qui donnent à la
v ingt-deuxième légion le surnom d’ Antoniniana (elle le reçut sans doute
d'Antonin Caracalla; à l'inscription citée plus haut, il faut ajouter
celles de Soleure, Orelli, 402 [en 2ig]et de Cannstadt, C. i. rh., 1576).
Nouvelle série, XVI. 3 1
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82
KKVUB CRITIQUK
- L’inscription (p. 7): MACCO | ATTILI | ANI | GRAECVS, est
inédite. — Il en est de même d’un graffito gravé sur un fragment de
poterie, qui intéressera surtout les paléographes : malheureusement le
sens complet de l’inscription nous échappe. Je pense qu'on peut lire,
avec M. M.-W. :. us Félix . Atténué , die ac [pacte ?] j Tatinus te
salutet. Rat [ou rax ?] u. | Vale .
M. M.-W. eût pu faire précéder son recueil de quelques notes sur la
topographie et l'histoire du pays sous Tempire romain. Je sais bien qu’il
s’en est occupé ailleurs, et avec tout le soin désirable. Mais enfin ces
inscriptions n’auraient rien perdu à être présentées sous un jour plus
favorable^ dans leur cadre géographique et politique. Ce que les éditeurs
du Corpus ont jugé indispensable, est surtout nécessaire à des recueils
peu fournis : M. M.-W. nous eût en cela rendu plus de services qu’en
s’attardant à réfuter, d’ailleurs avec beaucoup de bon sens et de science,
les ridicules interprétations des premiers épigraphiste du Barrois.
Le livre se termine par une note sur certaines inscriptions dont
M. M.-W. doute fort justement. Parmi elles, se trouve l’inscription si
souvent reproduite, qui était gravée sur un de ces colliers en bronze
qu’on attachait au cou des esclaves fugitifs : Ten(e) mfe) q(u)ia fugfi)
et revoc(a) mfe) ad Collium , in Nasiufm); Nasium, c’est la bourgade
de Naix, dans le Barrois. M. M.-W. fait remarquer que de vingt ins¬
criptions analogues, aucune n’est originaire d’une autre ville que
Rome; on n’a jamais retrouvé la plaque de Naix; on ne la connaît que
par l’intermédiaire d’un écrivain barrois, Baillot. qui se plaisait fort,
semble-t-il, aux fantaisies archéologiques. Ce sont évidemment d’excel¬
lents motifs pour douter de l’authenticité de l’inscription.
Le recueil de M. M.-W. n’enrichit pas de beaucoup, on le voit, l*é-
pigraphie gauloise : on pourrait même dire, puisque les inscriptions
fausses sont naturellement plus importantes que les inscriptions vraies,
qu’il l’appauvrit. Mais on doit souhaiter que chacune des régions de
la France possède des archéologues aussi consciencieux et aussi sages
que M. Maxe-Werly.
Camille Jullian.
i 52 . — Imagine* fntcrlptfommm grmearani antlqatMloMu*im ft*
uram acholarum, par Hermann Rckhl, Berlin, G. Reimer, 188 3 . In-4, 1-7S
pages.
Depuis quelques années, on voit se multiplier les ouvrages destinés
à familiariser les jeunes gens avec l’étude des inscriptions. Il y a cinq
ans, M. Hans Droysen donnait, dans sa Sylloge inscriptionum Attica -
rum in usum scholarum academicarum (Berlin, Weidmann, 1878), un
certain nombre de spécimens d’inscriptions attiques se rapportant aux
principaux actes de la vie publique d’Athènes et permettant, à propos
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D’HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
83
de chacun de ces actes, de se rendre compte, dans le plus minutieux
détail, du jeu des institutions athéniennes. L'année dernière, paraissait
un gros volume de M. Hicks (xxvm-372 pages), intitulé Mamial of
greek historical inscriptions { Londres, Henry Frowde, 1882), recueil
très complet d’inscriptions appartenant aux principales périodes de
l’histoire grecque, disposées suivant l’ordre chronologique (depuis le
vn® siècle jusque vers le milieu du 1®' siècle avant l’ère chrétienne) et
accompagnées de commentaires fort bien faits, qui montrent tout le
profit que peut tirer l’histoire de l’étude raisonnée des monuments
épigraphiques. Voici maintenant M. Hermann Rœhl, l’auteur des
Inscriptiones grœcœ antiquissimœ, qui publie sous ce titre : Imagines
inscriptionum grœcarum antiquissimarum in usum scholarum, un
choix des inscriptions grecques les plus anciennes, où les étudiants des
universités pourront apprendre à déchiffrer les divers alphabets employés
avant le iv® siècle dans les différentes parties du monde hellénique. On
ne saurait trop applaudir à ce mouvement. Les inscriptions ne doivent
pas rester le domaine des quelques travailleurs qui les consultent en
vue d'études spéciales : il est bon que les jeunes gens sachent qu'il y a
là une source précieuse d’informations, capables de compléter delà façon
la plus utile les renseignements fournis par les textes imprimés. Tout
livre qui leur facilitera l’intelligence de ces documents, tout guide qui
les aidera à s’orienter dans ce monde des textes lapidaires, trop long¬
temps fermé à leur curiosité, sera donc le bienvenu et rendra aux études
supérieures un véritable service.
L’ouvrage de M. R., le dernier en date de ces manuels d’épigraphie
destinés à la jeunesse studieuse, contient environ quatre cents textes, re¬
produits le plus fidèlement possible d’après des photographies, des es¬
tampages, ou d'après les meilleures copies. Presque tous ces textes ont
été publiés déjà par M. R. dans les Inscr. gr . antiq. Parmi les textes nou¬
veaux, il faut signaler un certain nombre d’inscriptions athéniennes
provenant de l’Attique, qu’on trouve en partie dans le Corpus de
M. Kirchhoff ou dans son supplément, et que, pour cette raison, M. R.
avait exclues de ses Inscr . gr. antiq . La table placée en tête du recueil
indique la méthode suivie par l’auteur dans le groupement de ses ins¬
criptions : il les a disposées suivant l’analogie des alphabets, en obser¬
vant autant que possible l’ordre chronologique, c'est-à-dire en donnant
le premier rang aux spécimens des alphabets les plus anciens. C’est ainsi
que les trente-deux sections établies par M. R. comprennent : I, ins¬
criptions de Théra; II, inscriptions crétoises; III, inscription d’Ec-
phantos, représentant le plus ancien alphabet de Mélos; IV-XV, spé¬
cimens de l’alphabet éolo-dorien; XVI, textes éoliens de Cébren et de
Thymbra ; XVII, spécimens de l’alphabet des Grecs d’Asie Mineure;
XVIII-XXIII, spécimens de l’alphabet des îles telles que Mélos (2 0 épo¬
que ssq.), Paros, Siphnos, Thasos, Naxos, Céos; XXIV-XXX, spéci¬
mens des alphabets argien et corinthien et des alphabets analogues ;
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84 KRVUK CHIT 1 QUK
XXXI, spécimens de l’alphabet attique; XXXII, trois textes d’origine
inconnue.
On ne peut contester Futilité de ce recueil, ni les services qu’il est
appelé à rendre au haut enseignement. Les jeunes gens y trouveront une
sorte de paléographie monumentale contenant, en un petit nombre de
pages, toutes les variétés de formes de l’ancienne écriture grecque. Phi¬
lologues et historiens s’y instruiront, les uns, en y étudiant l’orthogra*
phe et les particularités dialectales de chaque contrée, les autres, en y
apprenant à se familiariser avec les caractères de chaque alphabet et à
déchiffrer couramment ces vieux textes dont quelques-uns éclairent
d’une si vive lumière l’histoire des temps antiques.
Les Imagines n’échappent pourtant pas à toute critique, et le pre¬
mier reproche qu’il faille adresser à l’auteur est d’avoir négligé de don¬
ner la transcription des documents qu’il publie. Pour que l’étude d’un
texte épigraphique puisse être utile, il faut que ce texte offre un sens.
Or, si le recueil de M. R. contient quelques inscriptions d’une lecture
et d'une interprétation relativement faciles, il en renferme un grand
nombre qui sont fort difficiles à déchiffrer et à comprendre, et Pon a
peine à se figurer nos meilleurs étudiants de philologie et d’histoire li¬
sant ces textes avec assez d’aisance pour en pouvoir tirer un réel profit.
Quel sera, par exemple, le novice assez aguerri pour n’être point arrêté par
les nombreuses difficultés de lecture et d’interprétation que présente le
fragment de loi rapporté de Gortyne par M. Thenon (Imag n p. 4, n. 3 )?
Non-seulement l'état incomplet de ce monument en rend le dé¬
chiffrement très pénible, mais la forme des caractères, l’orthographe, le
dialecte, le sens même de la loi, dont quelques dispositions seulement
nous ont été conservées, font de ce document un des plus difficiles à
bien saisir et à bien interpréter. Il en est de même de l’inscription (p. 3 ,
n. 2) également trouvée à Gortyne par M. Haussoullier et de l’inscription
d’Axos (p. 4, n. 4) copiée par Spratt, qui, sans parler des difficultés
de sens, est écrite en caractères que M. R. lui-même (/. G. A. } n. 480)
qualifie de « litteræ valde detritæ lectuque difficiles ». On pourrait
multiplier les exemples et citer : p. 9, n. i5, le fragment de convention
en caractères chalcidiens provenant d'Olympie; pp. 17-18, n. 1 et 2,
les inscriptions d’Œantheia ; pp. 29-35, la plus grande partie des ins¬
criptions éléennes ; p. 36 , n. 2, l’inscription découverte à Ithaque par
MM. Schliemann et Stillmann; p. 52 , n. 1, l’inscription de Nicandré,
trouvée à Délos par M. Homolie, etc. A toutes ces inscriptions et à
beaucoup d’autres, auxquelles il serait trop long de renvoyer (il fau¬
drait citer presque toutes celles que contient le recueil), il n’eût pas été
superflu de joindre une transcription, et M. R. eût bien mérité de ses
lecteurs en leur facilitant au moins le déchiffrement de ces textes qui,
une fois lus, offrent encore tant de difficultés de toute nature.
M. R., il est vrai, semble avoir voulu faire, non un livre où les étu¬
diants pussent apprendre sans secours et par leurs seuls efforts ù se fami-
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liariser avec les alphabets archaïques du monde grec, mais un recueil de
textes pouvant servir de matière à un enseignement oral : le professeur
choisira dans ce recueil une ou plusieurs inscriptions qu’il déchiffrera et
commentera devant ses auditeurs, et ceux-ci suivront, ayant chacun
sous les yeux un exemplaire des Imagines. A merveille. Mais en admet¬
tant qu’alors même des transcriptions n’eussent point été nécessaires, il
eût fallu, tout au moins, aider le professeur dans ses recherches par des
renvois, soit aux Inscr. gr. antiq., soit aux ouvrages auxquels M. R. a
emprunté les quelques textes qu’on ne trouve pas dàns ce recueil et qui
figurent dans les Imagines . Or M. R. se contente de marquer le lieu de
provenance de chaque inscription, toutes les fois du moins que l’inscrip¬
tion n’a pas été trouvée dans le pays même dont elle reproduit l’alpha¬
bet ' ; il donne, en outre, les différences de lecture, mais sans jamais ren¬
voyer aux ouvrages où ces diverses leçons ont été publiées. Ce sont là,
il faut l’avouer, des indications tout à fait insuffisantes et le manuel
de M. R. est en cela très inférieur au manuel de M. Droysen, cité plus
haut. Si M. Droysen, en effet, a cru devoir, lui aussi, supprimer les trans¬
criptions a , il a du moins renvoyé, pour chaque texte, au recueil au¬
quel ce texte avait été emprunté. A propos de chacun des documents que
renferme la Sylloge inscr. Attic., on peut se reporter soit au Corpus de
M. KirchhofF, soit au Corpus de M. Kœhler, soit aux Mittheilungen de
l’Institut allemand d’Athènes, soit à l’’AfWjvatov, soit à l’’Apx* èçYjjjispCç,
soit aux Inschr . uni Stud. qur Gesch . v. Samos de M. C. Curtius, soit
enfin à Bœckh, Staatshaushalt. d . Athener , et trouver là de précieuses
ressources pour l’intelligence de ces documents. Accompagnées de ces
indications, les inscriptions réunies par M. Droysen sont capables de
rendre aux jeunes gens de réels services et méritent le nom d’« exempla
usui commoda » que l’auteur leur donne dans sa préface. En peut-on
dire autant des trois cents ou trois cent cinquante énigmes que M. R.
propose à la sagacité des débutants ? Encore une fois, si l’on admet (et il
semble difficile d’admettre le contraire) que pour tirer de l’étude d’une
inscription un profit quelconque, même un profit tout paléographique,
1. En tête de l'inscription naxienne de Nicandré (p. 52 , n. i), M. R. a omis la
mention : a titulus Deli repertus ».
2. L'absence de transcriptions a moins d'inconvénients dans le recueil de
M. Droysen que dans celui de M. Rœhl : les inscriptions de la Sylloge ont toutes, en
effet, le même caractère, ou à peu près : toutes sont des inscriptions attiques (la
plupart OT0tX*$év), dont le déchiffrement est facile après la lecture d'un premier
document. — Il faut d’ailleurs féliciter M. Droysen de certains rapprochements où
se montre un judicieux sentiment des nécessités scolaires. Ainsi, à côté du traité con¬
clu la 4® année de la 8g* Ol. entre les Argiens, les Mantinéens et les Eléens (p. 8,
n. vu), il a reproduit le texte de Thucydide, V, 47. Cf. les textes de Démosthène,
c. Macartatos , 57 et de [Démosth.] c.Lacritos, 37, rapprochés du n. x, p. 11; le
décret de Stratoclès (Pseudo-Plutarque, Vit. X orat., p. 384^ rapproché du n. xxii.
p. 26.
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RRVUK CR1TIQ0B
il faut avant tout savoir ce que cette inscription veut dire, on regret¬
tera que M. R. n’ait pas cru devoir rendre son livre plus abordable
par des transcriptions, ou, à défaut de transcriptions, par des renvois,
qui eussent été d’autant moins encombrants que presque tous se fussent
réduits à l'indication*: /. G. A ., tel numéro.
Un autre reproche pourrait être fait aux Imagines . L'auteur a voulu
être aussi complet que possible et ne laisser de côté aucune forme de
lettre, aucun indice capable d’ajouter quelque notion nouvelle à la
connaissance que peuvent donner de chaque alphabet les incriptions
qui le reproduisent. Il faut Ten louer. Mais était-il bien nécessaire de
faire figurer dans un recueil comme le sien certains fragments insigni¬
fiants qui prennent de la place sans rien apprendre? Que les Imagines
offrent la reproduction des lettres d’assemblage du trésor des Sicyoniens
à Olympie (p. 63 , n. 4), rien de mieux : ce sont là des spécimens au¬
thentiques de quelques-uns des caractères de l’alphabet de Sicyone. On
est moins frappé de l’intérêt du n. 3 des « tituli sicyonii », qui n'ajoute
rien à ce que font connaître de l’alphabet sicyonien les autres inscrip¬
tions de Sicyone publiées au même endroit. Même observation 2 propos
du n. 5 de la même section (p. 64), vraiment trop incomplet, et du n. 6,
qui est d'une lecture par trop incertaine. M. R. eût mieux fait de né¬
gliger ces textes peu instructifs.
Il eût pu de même supprimer sans inconvénient les « tituli locorum
incertorum » (pp. 71-72). Il est difficile, en effet, de tirer parti, pour la*
connaissance des caractères archaïques particuliers & chaque contrée,
d’inscriptions dont la provenance est connue, mais dont il est impossi*
ble de nommer l’alphabet.
Enfin, malgré le soin qu’a mis M. R. à ne reproduire que des textes
capables de donner de la forme des caractères l’idée la plus exacte, il se
trouve dans les Imagines quelques inscriptions qu’on ne peut considérer
comme des documents paléographiques parfaitement sûrs. Ainsi, les
inscriptions argiennes n. 4, 8 et 9 (p. 55), empruntées à Bœckh, qui
lui-même les publie d’après Fourmont (C. /. (?., 14, 18, 19), contien¬
nent des données tout à fait insuffisantes pour la connaissance de l'al¬
phabet argien et ne devraient point figurer à côté de textes soigneuse¬
ment revus par l'auteur sur des photographies ou sur des estampages.
Ce qui peut être bon à publier dans un Corpus, où l’on cherche à réu¬
nir tous les documents, sauf à indiquer que tel d’entre eux paraît sus¬
pect, que pour tel autre on s’est servi d'une copie imparfaite ou d’un
mauvais estampage, ne saurait trouver place dans un recueil destiné
aux étudiants, où l’on s’efforce avant tout de donner des documents d’une
authenticité incontestable et d'une irréprochable exactitude. De même,
M. R. eût agi sagement en laissant de côté quelques-unes des inscrip¬
tions trouvées à Amorgos par M. Dubois (pp. 46-47). Le n. 24, par
exemple, sur lequel M. Dubois ne fournit que des renseignements insuf¬
fisants et dont il ne donne même pas un essai de transcription [Bull.
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Je corr . hellén ., VI, p. 189, n. m), pouvait être négligé sans inconvé¬
nient *.
Il n en faut pas moins féliciter M. Rœhl de son intelligente et utile
tentative, et lui savoir gré d'avoir fait un livre qui manquait.
Paul Girard.
1 53 . — «Jean et Sébastien Cabot, leur origine et leurs voyages. Etude d’his¬
toire critique, suivie d’une cartographie, d’une bibliographie et d’une chrono¬
logie des voyages au nord-ouest de 1497 à i55o, d’après des documents inédits,
par Henry Habrisse. Paris, Ernest Leroux, 1882, 400 p. grand in-8 avec une
carte (formant le tome I du Recueil de voyages et de documents , pour servir à
l’histoire de la géographie depuis le xm 6 jusqu’à la fin du xvi* siècle, publié sous
la direction de MM. Ch. Scheffer, membre de l’Institut, et Henri Cordier).
Ce volume comprend non-seulement une notice biographique sur les
deux navigateurs, mais encore des notes cartographiques et chronolo¬
giques, des pièces justificatives, une bibliographie et même un copieux
index alphabétique. On peut juger par ce simple énoncé qu'il n y
manque rien de ce qui constitue un ouvrage de sérieuse érudition; mais
puisque l’auteur a tant fait pour ses lecteurs, il ne lui en aurait guère
coûté d’ajouter une table des matières ou tout au moins de varier le
titre courant. A quoi bon, en effet, répéter en tête de chaque page, si ce
n’est pour pour l’index et les errata, Jean et Sébastien Cabot ; il eût
été beaucoup plus utile de donner autant de titres courants qu’il y a de
divisions et même de subdivisions dans l’ouvrage. Autre critique lé¬
gère : Si M. Harrisse voulait commencer par la notice, ce qui est d’ail¬
leurs le plus logique, il aurait dû lui donner une pagination spéciale,
par exemple en chiffres romains, afin de pouvoir la faire imprimer après
les notes et pièces justificatives; ce qui lui aurait permis de renvoyer
avec précision aux pages de ces dernières au lieu de les citer simplement
par leur numéro qui comprend parfois sept, huit, même dix pages. Enfin
il aurait pu traduire et faire passer dans son texte beaucoup de traits cu¬
rieux qu’il faut aller chercher dans les notes ou les documents placés en
appendice et écrits en différentes langues : latin, anglais, français, espa¬
gnol, portugais, italien. Ceux qui ne sont pas familiarisés avec les for¬
mes obsolètes des cinq derniers idiomes, y perdront beaucoup de no¬
tions qui auraient certainement donné au récit plus d’ampleur et de
pittoresque. Mais l’auteur, dédaignant de se mettre à la portée du
grand public, qui aurait pu cependant goûter ses recherches approfon¬
dies, a surtout voulu faire œuvre de savant, et il y a parfaitement
réussi, comme on pouvait l’attendre d’un homme si compétent dans
l’histoire de la géographie et de la cartographie au xvi« siècle. Grâce à
ses correspondants et à ses propres découvertes dans les livres rares, il a
1. Ce texte ne figure pas dans les tnscr. gr. antiq .
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RKVUR critiquk
beaucoup ajouté aux matériaux amassés par ses prédécesseurs; non
pas qu’il ait exclusivement puisé à des sources inédites, quoiqu'il en ait
mis plusieurs à contribution, mais il a recueilli un grand nombre de
renseignements topiques, auparavant disséminés dans des imprimés où
l'on ne songeait guère à les aller chercher. Ces trouvailles sont la juste
récompense d'un érudit qui a commencé sa carrière littéraire par des
monographies critiques et par la plus sérieuse étude de la bibliographie.
La notice sur les Cabot (pp. i-i36), tout en donnant les principaux
traits de leur vie, s'attache surtout à en élucider les points obscurs; et
ils sont nombreux, tant nous sommes mal renseignés sur la plupart des
émules de Christophe Colomb. Nous n’avons guère moins de peine au¬
jourd'hui à découvrir les particularités de leur vie qu’ils n’en ont eu à
ouvrir de nouvelles voies à travers les mers inconnues. Jean Cabot sur¬
tout a été l’objet des assertions les plus contradictoires. M. H. démon¬
tre qu’il était génois et ne pouvait être né à Venise, puisqu’il avait eu
besoin de se faire naturaliser citoyen de cette ville et que sa découverte
du Labrador eut lieu en 1497 et non en H 94 * Quant au fils, Sébastien
Cabot, sur l’origine duquel planent des doutes analogues, notre lumi¬
neux critique prouve qu’il était né, non pas à Bristol, mais bien à Ve¬
nise, avant 1474. C'est pour cette ville, qu’étaient ses prédilections, à
tel point que deux fois il chercha à l’avantager au détriment des rois
d'Espagne et d'Angleterre, ses maîtres d'alors. Ses négociations secrètes
avec les agents du Conseil des Dix attestent ses intentions perfides ; ces
projets soigneusement dissimulés et qui d’ailleurs n'aboutirent pas, ont
été démêlés par M. H. dans des correspondances déjà publiées de la
seigneurie de Venise avec ses ambassadeurs auprès de Charles Quint et
d’Edouard VI. Voilà quelques-unes des questions discutées dans la no¬
tice; il y en a bien d’autres qu'il serait trop long d'analyser et même
d’indiquer en quelques mots; l’une des plus importantes d'entre elles
concerne la carte dressée en 1544 par S. Cabot. Les relevés nautiques
faits par ce navigateur et par son père n’y tiennent qu’une petite place;
la section qui embrasse l'Amérique du Nord a dû être composée surtout
d'après des cartes portugaises, complétées pour l'estuaire et le golfe du
Saint-Laurent par celles de J. Cartier et d’autres explorateurs français.
Pour étayer ces conclusions, M. H. donne, dans la seconde division
intitulée cartographie (pp. 137-252), des notes pour servir à une clas¬
sification des œuvres cartographiques de la première moitié du xvi° siè¬
cle concernant l’Amérique septentrionale. Il y passe en revue trente-
huit planisphères, portulans, routiers, globes, cartes, dont une partie
seulement ont été reproduits dans des publications généralement fort
rares et très coûteuses ; la description et les perspicaces remarques de
M. H. sont d'autant plus précieuses, mais combien ne seraient-elles pas
plus claires si elles étaient accompagnées de fac-similés (comme celui
d’une section de la carte de Cabot, fait par Pilinski et placé en tête du
volume), ou tout au moins de réductions comme Kohl en a donné dans
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son History of the discovery of Maine (Portland, 1869, in-8°);
B. F. De Costa dans Verra\ano the Explorer (New-York, 1881, in-4 0 );
le baron Nordenskjœld dans ses Studier och Forskningar (I. les voya¬
ges des frères Zeno et les plus anciennes cartes du Nord. Stockholm,
1 883 in-8°) ! Malheureusement la librairie française qui trouve le
moyen de faire composer, graver et tirer à des milliers d’exemplaires
tant d’images de convention, tout au plus bonnes à amuser les désœu¬
vrés, en serait pour ses frais si elle publiait, comme MM. de Santarem
et Jomard en ont donné l’exemple, de précieux monuments cartogra¬
phiques, fort exposés à périr soit de vétusté, soit par accident, et sans
lesquels il est à peu près impossible d’approfondir l’histoire de la géo¬
graphie au moyen âge et dans le siècle des grandes découvertes. Tant
que les trente-huit œuvres cartographiques en question n'auront pas été
reproduites dans un même atlas, tant que l'on ne pourra pas les mettre en
regard et qu’il faudra pour les comparer passer d’un recueil à l’autre et
même courir d’une bibliothèque de France, d’Espagne ou d’Italie à des
collections anglaises, allemandes ou portugaises, on ne se rendra pas bien
compte des progrès de la cartographie; on continuera à ignorer l’origine
de beaucoup de noms de lieux; on ne saura même pas restituer leurs
formes corrompues ou illisibles. A cet égard, il n’y a encore presque
rien de fait et, dans l’état actuel des choses, nous ne pouvons blâmer
notre auteur de n’avoir pas entrepris l’examen de chaque nom qui
figure sur le planisphère de S. Cabot. 11 ne serait pourtant pas superflu
de savoir si le copiste a mal lu les noms : iracia (Francia), Bresamalo
(Brest, Saint-Malo), de los cives (De los aves, Ile des Oiseaux), Niu-
corca (Minorca), etc., etc., ou bien si c’est le cartographe qui les a écrits
ainsi ; en quel cas ce dernier pourrait être taxé d'une grande négligence
ou d’extrême ignorance. On ne peut dire à ce propos : ceux qui vou¬
dront le savoir iront le voir. Il n’est pas permis à tout visiteur des gale¬
ries de la Bibliothèque nationale de monter sur une estrade pour regar¬
der à la loupe, ou bien de placer dans un jour favorable, l’unique
exemplaire de la carte de S. Cabot; ce travail de collation et de révision
aurait dû être fait par l’éditeur, lorsque ce monument a été, par une fa¬
veur bien justifiée, mis à sa disposition. Aujourd’hui, cette carte n’est
plus exposée au rez de chaussée et l’accès en est interdit au public pour
bien des années peut-être.
Il y a deux omissions à signaler dans la cartographie, où auraient dû
trouver place le Globe d’Ulpius (1542), publié en partie par M. De
Costa dans Verra\ano the Explorer, et le Globe d'argent du duc
Charles IV de Lorraine, qui se trouve actuellement à la bibliothèque de
Nancy et qui a été publié par le D r Schœtter, dans Congrès internatio -
tional des Américanistes . — Compte-rendu de la seconde session,
Luxembourg, 1877, t. I, p. 35 o. Il est vrai que l’on ne connaît ni
l’auteur ni la date de ce globe ; mais il a été gravé après le voyage de
Verrazano, puisqu’une partie de l’Amérique du Nord est appelée
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Terra Francesca , et avant que les découvertes de J. Cartier fussent
connues en Allemagne, puisque l'estuaire et le golfe du Saint-Laurent
n'y sont pas marqués. L’Asie y est encore confondue avec l'Amérique
septentrionale, d’où l’on peut conclure que ce globe est du milieu du
xvi e siècle.
La troisième section du présent ouvrage, contenant des Notes pour
servir à une chronologie des voyages au nord de Vile de Cap Bre¬
ton de 1497 à i 55 o (pp. 253 - 3 o 6 ), n’est ni moins neuve ni moins
instructive que les deux précédentes : on y trouve le récit inédit et au¬
thentique d’Alberto Cantino, ambassadeur du duc d’Este auprès du roi
Manoel de Portugal, écrit le 17 octobre i 5 oi, huit jours après le retour
d'une des caravelles de la troisième expédition de Gaspar Cortereal ;
cette intéressante lettre, conservée aux archives d'Etat, à Modène, a été
copiée par M. Foucard, directeur de ce dépôt; elle était accompagnée
d’une carte, que Cantino adressait à son souverain et que M. Harrisse
publiera dans les Corte-Real et leurs voyages au Nouveau-Monde .
Parmi les trente-huit documents inédits ou déjà publiés dont se com¬
pose l’appendice (pp. 3 o 7 » 366 ), quelques-unes ont été copiés sur les ori¬
ginaux par diverses personnes. Il est étonnant que deux fautes graves
se soient glissées dans la reproduction d’un texte imprimé, comme
l'était déjà la Schondia de Ziegler. Adnavigent a été rendu par aduce -
rigint , et igitur par igint (p. 341), ce qui rend les deux passages in¬
compréhensibles; en outre, le second est tronqué et s’arrête au milieu
d’une phrase. Dernière critique : l’index ne comprend que les noms
d’hommes; il n’y en a pas pour les noms de lieux, lacune regrettable
dans un ouvrage sur l’histoire des découvertes. Quatre pages d'errata
terminent le volume qui, pour être imprimé sur de beau papier, n’a pas
été soigné au point de vue typographique. Heureusement que ces dé¬
fauts sont atténués par la valeur du livre qui inaugure dignement le
Recueil de voyages entrepris par M. Leroux et qui ne sera pas sans
ajouter à la réputation de l’auteur.
E. Beauvois.
I$ 4 . — Les guerres «lu régne «le Louis XJII et «le la minorité «le
Louis xiv 9 mémoires de Jacques de Chastenet, seigneur de Puységur, publiés
et annotés par Ph. Tamizby de Lakroqlüe. Paris, librairie de la Société bibliogra¬
phique, i 883 . 2 vol. in-8, xii et 3 oo, 288 pp.
On souhaitait depuis longtemps de voir réimprimer les Mémoires de
Puységur, devenus assez rares. M. Tamizey de Larroque vient d'exau¬
cer ce souhait en publiant dans la c collection de petits mémoires sur
l’histoire de France » ces récits intéressants et si fréquemment consul¬
tés par les historiens. Il a conservé scrupuleusement le texte de la pre¬
mière édition des Mémoires , donnée à Paris, en 1690, par l’historiogra¬
phe de France et conseiller du roi, Du Chesne. Mais Du Chesne, empêché
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par une longue maladie et par ses soixante-quatorze ans, avait très mal
surveillé l’impression; lui-même s'en excuse à la fin de sa préface .
M. T. de L. a débarrassé le texte des fautes d'impression relevées à
Y errata et des autres que Du Chesne avait laissé subsister. Mais il ne
s’est pas contenté de rendre le texte des Mémoires plus correct ; il a
cherché avec non moins de soin et de diligence, à le rendre plus clair en
y ajoutant, partout où cela lui semblait utile, quelques notes courtes et
précises. Ce commentaire, qu’on ne trouve pas dans les éditions précé¬
dentes, n’est pas très abondant ; on désirerait même qu’il fût plus com¬
plet; mais l’édition de ces Mémoires fait partie d’une collection destinée
à tout le monde et non au petit nombre des érudits ; M. T. de L. a donc
mieux aimé simplifier que développer son commentaire, et c’est pour¬
quoi aussi il n’a pas reproduit les Instructions militaires qui ne s’a¬
dressent qu'à un public spécial. Il faut le louer également d’avoir faci¬
lité la lecture des Mémoires de Puységur en les divisant en plusieurs
parties distinctes et tranchées; c’est une fort bonne idée d’avoir partagé
l’ouvrage en trente-huit chapitres, qui, en général, comprennent chacun
une année. M. T. de L. n’a pas d’ailleurs négligé de placer en tête de
chaque chapitre un sommaire analytique qui rendra les recherches plus
commodes. On trouvera à la fin du second volume deux lettres inédites
tirées des archives de la famille de Puységur, l'une écrite par l’auteur
des Mémoires, le 22 mars 1679, l’autre par le maréchal, son fils, le
8 septembre 1682 ; M. T. de L. a joint à ces deux lettres un extrait de
l'étude du marquis de Blosseville sur les Puységur (Paris, 1873).
Il nous reste à parler de l'introduction où M.T. de L. a retracé la
vie et les actes de Jacques de Puységur; presque tous les renseignements
qu’il y réunit sont tirés des Mémoires . Page du duc de Guise, cadet
aux gardes, mousquetaire, puis enseigne (1624-1631), major au régi¬
ment de Piémont 1 et en 1641 lieutenant-colonel de ce régiment, sergent
de bataille (1644), gouverneur de Bergues(i646)et d’Ypres (1648), maré¬
chal de camp (t 65 i), Puységur donna sa démission à la paix (avril 1659)
et employa les loisirs de sa vieillesse à écrire ses Mémoires . M. T. de L.
relève, en passant, les erreurs des Biographies; c’est le 22 novem¬
bre 1639, et non en 1649, que Puységur devint maître-d’hôtel du roi,
et c’est le 5 septembre 1682, et non le 4, qu’il mourut en son château
de Bernoville. Mais ce qui est plus grave, c’est que le Dictionnaire de
Moréri de 1759,1a Biographie Universelle et même le premier éditeur
des Mémoires , Du Chesne, ont nommé Puységur lieutenant-général
dés armées du roi. Or Puységur ne mentionne, dans aucun passage de
son livre, son élévation à ce grade ; en outre, comme l’a remarqué Pi¬
nard, il est seulement qualifié maréchal de camp dans l’arrêt de main¬
tenue de noblesse, rendu en sa faveur huit ans après qu’il eut quitté le
1. Pourquoi écrire Hyrson, selon l’ancienne orthographe? Depuis longtemps on
n’écrit plus que Hirson (p. iv).
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9 2
service, on ne le trouve sur aucune promotion, et, ce qui est décisif,
il figurait encore, à l’époque de sa mort, sur la liste des maréchaux de
camp.
On ne peut que remercier M. TamiBey de Larroque de s’être fait le
consciencieux biographe et éditeur de Puységur et d’avoir donné au
public une réimpression des Mémoires de cet homme remarquable;
la franchise de Puységur, a dit l’abbé Legendre, l’a empêché de parve*
venir au faîte des honneurs; mais il n y a pas eu d’homme de guerre
plus employé, et il n'y en avait point qui entendît mieux le métier.
A. G.
i55. — Liste provisoire de bibliographies géographiques spéciales,
par James Jackson, archiviste-bibliothécaire de la Société de Géographie. Paris,
société de géographie, i 88 x, vi-340 p. in- 8 .
Cette bibliographie mérite d’être recommandée non-seulement aux
géographes de profession, mais aussi aux historiens, aux ethnographes,
et, en général, à ceux qui s’occupent d’une étude se rattachant aux pays
éloignés. C’est « un recueil des bibliographies éparses dans lesquelles se
trouvent réunis les titres des ouvrages qui ont paru sur telle contrée,
sur telle région déterminée. » Son diligent auteur, M. Jackson, l’ap¬
pelle modestement une liste provisoire, parce qu’il considère cette publi¬
cation comme un canevas, comme l'ébauche d’une bibliographie systé¬
matique pour laquelle il fait appel aux conseils et aux avis des biblio¬
graphes et des savants.
Sous sa forme provisoire, cette bibliographie est déjà fort respectable,
car elle ne comprend pas moins de 1177 numéros; et encore « la bi¬
bliographie concernant la plupart des pays d’Europe les mieux connus
a été laissée de côté à cause de la masse des documents connus et de
facile accès qui les concernent ». Ainsi l’Allemagne a été laissée par
M. J. en dehors de son cadre, et de la France et de l'Angleterre il n’a
pris que leurs colonies. Des tables fort détaillées permettent de trouver
aisément les bibliographies relatives à tel pays ou à telle région du
globe. Nous regrettons seulement que l'auteur n’ait pas séparé par de s
titres de chapitres les différentes sections de son livre : il n’eût eu pour
cela qu’à répéter les divisions de la première table. C’eût été plus agréa¬
ble aux yeux et matériellement plus commode pour les recherches.
Nous voudrions aussi que, lorsqu’il refondra son travail pour lui don¬
ner une forme définitive, il commençât par les généralités au lieu de
les mettre à la fin.
Un astérisque indique les ouvrages que la Société de Géographie pos¬
sède dans sa bibliothèque. Les titres des ouvrages sont donnés d’une façon
très complète, et un signe spécial indique les ouvrages que M. J. a décrits
de visu . On voit par là avec quelle conscience M. Jackson s'est acquitté
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D H1STOIRR KT 1 >K LITrÉRATÜRk ç3
de la tâche ingrate qu’il s est imposée par amour de la science géogra¬
phique.
H. G.
THÈSES DE DOCTORAT ÈS LETTRES
Soutenance de M• Victor Henry.
I. Thèse latine : De sermonis humani origine et natura M . Terentius Varro quid
senserit (Lille, imprimerie L. Danel). — II. Thèse française : Etude sut' l'analogie
en général et sur les formations analogiques de la langue grecque (Lille, impri-
rie L. Danel).
I
C’est à la même question que se rapportent les deux thèses de M. Henry : dans
sa thèse latine, il a examiné ce qu’on pensait de l'analogie dans l’antiquité; dans sa
thèse française, ce qu'on en pense de nos jours.
Varron avait au plus haut degré le sens critique, mais notre jugement sur lui ne
peut être complet, puisque ses œuvres ne nous sont parvenues que mutilées. Ses
étymologies sont toujours contestables, mais il faut se souvenir qu’il ne connaissait
que le latin, le grec et quelques dialectes italiques. L’analyse grammaticale^est pres¬
que toujours juste. Ses études sur l’analogie et l'anomalie, le départ qu'il fait entre
elles, la limite qu’il réussit à tracer entre ces deux domaines, le révèlent critique
sagace. Il a indiqué, quelquefois il a presque deviné, ce que la grammaire comparée
pouvait seule lui prouver : la présence, par ex., du thème brut au vocatif. Les ana-
logistes soutenaient qu’il n'y avait dans la langue qu'analogie, les anomalistes qu'il
n’y avait pas de règles. Varron a été le premier peut-être à dire que l'analogie
existe, mais que, cependant, il y a des anomalies. Il distingue entre l’analogie né¬
cessaire et l’analogie volontaire. Dans la formation des mots, l’analogie est volon¬
taire; dans les flexions, elle est nécessaire et règne en souveraine maîtresse. On ne
peut cependant pas redresser toutes les formes défectueuses : il faut se conformer à
l’usage, quand il n’est pas trop vicieux. L'homme aimant mieux l'ordre que le dé¬
sordre, il y a ordre même dans la formation des mots.
M. Martha juge que la thèse a été faite avec soin. Elle est bien imprimée; le style
est précis et élégant. La thèse a deux parties : Varron est fort loin des méthodes
modernes; il les pressent. M. Martha trouve qu’elles accablent un peu Varron et
que M. H. a, dans ce qu’il demande au grammairien latin, des prétentions excessi¬
ves. M. H. répond qu’il n’a rien voulu reprocher à Varron, mais que, pour éclairer
la linguistique ancienne, il lui a fallu mettre en relief les travaux de la linguistique
moderne. L’introduction n’est pas très heureuse : il semble que, lorsqu’il l’a écrite, se s
opinions sur la question qu’il traitait étaient encore flottantes. M. H. est bien sévère
pour le traité IIspl ’EppiiqveCaç. M. Egger fait remarquer que ce livre ne traite du
discours que comme instrument de logique. Il y a une erreur d’expression dans ce
que M. H. a dit dans son préambule de l’origine du langage d’après Lucrèce. Ce
n’est pas à l’imitation des cris des animaux que notre langage se forme, mais ce n’est
pas là ce qu'a voulu dire M. Henry. M. Martha demande comment les stoïciens se
sont avisés d’entreprendre cette discussion sur l'analogie. C’est, pour M. H., une
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94 RKVUB CRITIQUE
querelle beaucoup plus ancienne que les écoles stoïciennes. Chez les Pythagoriciens,
dans Platon, on trouve des opinions sur Torigine du langage, l’idée d’un nomcncla-
teur divin, d’une èvojxdTtov èpOéiYjç. Démocrite est anomaliste : le nom n’est pas
adéquat à l’idée, puisqu’il y a plusieurs noms pour un même objet. Cette querelle
peut sembler étrange, si on ne se place pas sur le terrain historique. M. H. ne s’y
est jamais mis. Les Grecs n’avaient pas de grammaire, mais un monceau de mots
non classés, c’est là ce qui explique tout. A Rome, il y a une grammaire faite à l’i¬
mitation de celle des Grecs : l’anomalie, c’est l’usage. Les Latins font descendre sur
la terre toutes ces discussions ; c’est à la pratique grammaticale qu’ils s’attachent.
La langue, la prononciation ne sont pas encore fixées; il y a là un intérêt moins
grave, moins philosophique sans doute que dans les spéculations grecques, mais
très réel cependant. M. H. n’a pas parlé de Cicéron, fort peu de César; ils ont ce¬
pendant été mêlés à la querelle : les œuvres grammaticales de César, de Varron
sont dédiées à Cicéron. M. H. répond qu’il voulait rester dans son sujet, qu’il avait
mieux aimé ne pas copier Lersch. Il a commis une erreur sur le Traité de Vanalo-
gie de César. César est un partisan décidé de l’analogie. Il était, il est vrai, plus
modéré encore dans son opinion sur l’usage qu’il en fallait faire que Varron. 11 n’a
pas été assez mis en lumière que Varron était un conciliateur : les deux parties
plaident leur cause dans son livre et il prononce, mais il ne nous reste guère du
jugement que l’arrêt, les considérants manquent. M. H. n’a pas assez mis en lu¬
mière les mérites de Varron. La thèse est trop métaphysique, les idées, ont gardé
leur forme technique; l’histoire manque.
M. Egger se demande si c’est de la logique ou de la grammaire que vient le mot
dvaXé*fl^< c ’ e *t légalité de deux rapports lexiques, comme la proportion est l’éga¬
lité de deux rapports numériques. Il aurait été bon de donner l’origine du mot, et
la série des sens qu’il a affectés jusqu’à celui que Varron a adopté. Est-ce lui qui a
introduit le mot en latin ou César? M. H. aborde Varron comme un livre usuel :
une page de bibliographie n’aurait pas été inutile; il aurait fallu marquer la place
du traité sur l’analogie dans l’œuvre de Varron. M. H. dit s’en être rapporté entiè*
rement à l’édition d’Otfried Muller et à son Introduction.
M. Benoist demande comment Varron, élève fidèle des stoïciens, a pu abandon¬
ner les doctrines grammaticales de ses maîtres, qui tenaient pour l’anomalie. Mais
voici quelle est la doctrine stoïcienne, d’après M. H. : les stoïciens admettent une
èvop.dT<»>v ôp6éTY)ç, mais les èv6p.ata 5 p 6 a sont idéaux et non réalisés. C’est l’ano¬
malie qui règne. Les mots sont conventionnels, mais il y a un langage idéal fourni
par la nature : <p6ast piv la tiv 6 Xofoç, tf) 8è XéÇiç fiéost è<rr(v. Il est prouvé que
César était partisan de l’analogie : peut-être son opinion était-elle celle des gram¬
mairiens romains. La conciliation dont parle M. H., il n’en faut pas faire honneur
à Varron seul : César aussi l’admettait.
M. Bergaigne fait remarquer que, dans son préambule, M. H. veut montrer que
la langue se crée d’elle-même, presque sans intervention de la volonté humaine.
Mais l’analogie, c’est le signe même de l’intervention de l’homme en tant qu’être
psychologique. Il y a contradiction formelle entre ce préambule et la thèse française.
M. H. avait travaillé alors dans l’esprit darwiniste; on croirait que Schleicher a été
l’inspirateur de son livre. M. Bergaigne proteste contre la doctrine de la formation
des verbes par des auxiliaires (p. 76); il proteste aussi contre l’étymologie d’Anna
Perenna (Apna Puma) que M. H. emprunte à M. Baissac.
M. Havet critique le sujet de la thèse. Ce qu’il aurait fallu rechercher, c’est jus¬
qu’où les anciens ont poussé l’intelligence des choses du langage. Varron aurait
tenu la place d’honneur dans cette étude, mais elle aurait été plus large, plus com-
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D'HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
95
préhensive que celle de M. Henry. 11 y avait, dans cette question, un grand intérêt
de psychologie historique. Les idées de Varron sont-elles personnelles? M. Havet
en doute fort. Varron a dû surtout transcrire des livres grecs; il lisait, retenait,
compilait et copiait beaucoup. 11 s'est contenté de substituer des exemples latins à
des exemples grecs. Il fait de la linguistique patriotique comme Grimm ; mais Grimm
s été un fondateur, Varron ne fait que reproduire les idées d’autrui. Pourquoi s’en
être tenu au Delingua latina? M. H. a-t-il dépouillé les fragments? M. H. répond
qu’il l’a fait, mais qu'il n'en a trouvé qu'un seul qui lui ait semblé se rapporter au
sujet. Il y a cependant une analyse de l'opinion de Varron par Diomède qui aurait
dû trouver place dans la thèse et qui aurait pu remplacer certaines pages. Il aurait
fallu faire la bibliographie du sujet. Depuis la réimpression bipontine des frag¬
ments, il n'y en a pas eu d'édition complète; mais il y a eu des éditions partielles.
Beaucoup de philologues admettent que le texte ne doit être fondé que sur le ma¬
nuscrit de Florence, les autres ne seraient que des copies. Il y a trois ans, il a été
fait, à Strasbourg, une collation de l'édition de Spengel ; c'est le texte le plus
exact. Les citations manquent de précision bibliographique dans la thèse de
M. Henry. Pourquoi (p. 18) aller chercher une langue comme le basque pour don¬
ner un exemple d'un fait qu'on rencontre en latin } Lascivire signifie simplement
folâtrer.
II
La thèse française de M. H. renferme deux parties : la première traite d'une ma¬
nière générale du rôle de l'analogie dans les langues; la seconde, de beaucoup la plus
étendue (elle a 358 p., la première n'en a que 66), de l'analogie dans la langue
grecque. Cette seconde partie présente elle-même trois divisions : de l’analogie dans
les formations thématiques; de l'analogie dans les flexions nominales; de l’analo¬
gie dans les flexions verbales.
M. Bergaigne juge la thèse très bonne, mais il lui adresse une critique d'ensem¬
ble. Ce que M. H. a donné, c’est une grammaire grecque scientifique. Est-ce bien là
une thèse? En présence d’un travail aussi considérable que celui de M. H., M. Ber¬
gaigne n'a pu lui demander de refondre son livre sur un autre plan. L’analogie a
pour rôle d'uniformiser les paradigmes et de créer des formes, que l'on considérera
comme des déformations si on les oppose aux formes organiques. Ces formes orga¬
niques elles-mêmes ne sont peut-être que des formations analogiques antérieures.
En grec, on considérera comme organique ce qui est emprunté à la langue mère
indo-européenne. Ces déformations analogiques auraient pu se classer, se répartir
en diverses catégories; c’est ce que n'a pas fait M. Henry. Il a emprunté son plan
aux formations organiques. M. H. répond que, s'il avait classé les diverses formes
d'après les catégories analogiques, il lui aurait fallu revenir plusieurs fois sur une
même forme; il a craint d’apporter ainsi beaucoup de confusion dans son travail. Il
semble à M. Bergaigne qu'ainsi comprise la thèse aurait été plus claire, qu'émiettée
comme elle est par le plan qu’a adopté M. Henry. 11 y a, dans YHistoire de la lin¬
guistique de Delbrûck, une demi-page qui appelle le livre qu’il aurait fallu faire. Les
différents cas forment une série dont les différents termes réagissent les uns sur les
autres et tendent à devenir égaux. Les cas qui se correspondent dans des déclinai¬
sons différentes tendent aussi à s’uniformiser. D'autres analogies tiennent à la signi¬
fication; la signification réagit sur la forme: en sanscrit, pour les noms de parenté.
C'était cea diverses catégories qu'il fallait étudier. Dans le verbe, un plus grand nom¬
bre de séries s'entrecroisent, et c'est surtout cet entrecroisement qui était intéres¬
sant. M. H. répond qu'il n’a pas écrit seulement pour ceux qui possèdent bien le
mécanisme morphologique, mais pour ceux aussi qui le connaissent mal ; il lui a
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REVUE CRITIQUE
96
fallu suivre l’ordre morphologique pour se mettre à la portée d’un public plus
étendu. Il y a un plan cependant dans son livre : il a voulu montrer quelles sont
les^catégories morphologiques où s’explique le mieux le rôle de l'analogie. Il exa¬
mine les trois périodes : monosyllabique, agglutinative et flexive. Il constate que le
rôle de l’analogie augmente à mesure que la flexion prédomine. A la fin de la pé¬
riode flexive, il y a régression ; la langue devient analytique, et l’analogie perd de
sa puissance à mesure que les flexions deviennent moins nombreuses. M. Bergaigne
dit que son objection porte sur l’étude que M. H. a faite de la langue grecque. Du
reste, M. H. a fait, dans le détail, ce qu’il a négligé de faire dans l’ensemble : il in¬
dique les catégories analogiques qui ont influé les unes sur les autres. M. H. a un
peu abusé des termes étranges : a métaplasme », « panaryanisme », etc. M. H. s’est
assimilé, en quelques années, toute une littérature linguistique très considérable; il
a adopté les théories de la nouvelle école. Mais il avait eu antérieurement une autre
éducation linguistique, et parfois le vieil homme reparaît : c’est alors un natura¬
lisme à outrance qu’il professe. Qu’est-cc que Vatavisme en linguistique? M. H. de¬
mande grâce pour l’atavisme des sons; il abandonne l’atavisme des formes. M. H.
semble parfois conserver la théorie du guna qu’il a rejetée (p. 63 ). Il y a, dans la
substitution de p, à v à l'accusatif pluriel, des restes d’explication par l’agglutina¬
tion. Une fois même l’on trouve des traces de symbolisme : c’est lorsque M. H.
explique les formes faibles de l’impératif par le ton bref du commandement. M. H.
a commis une erreur sur l’allongement compensatoire; il n’y en a pas à proprement
parler; c’est une lettre qui se fond dans la lettre qui précède. M. H. a fait à M. Brug-
man une critique qui ne porte pas (p. 36 g) : la forme dont parle M. Brugman est
différente du subjonctif, bien qu’elle joue le même rôle -, c’est un injonctif. M. H.
est moins solide sur le sanscrit que sur le reste ; il aurait dû apprendre le sanscrit
dans les textes et non dans les grammaires seulement. La théorie du guna n’est pas
suffisante pour l’exposition de la grammaire sanscrite; elle ne vaut pas mieux pour
un indianiste que pour un linguiste. La raison que donne M. H. pour prouver que
le locatif est un cas fort est mauvaise. M. Bergaigne présente encore quelques ob¬
jections : sur ÔupaÇe, substitut de OupaaSe (p. 3 o 3 ), sur le g de 6e6g$otoç (p. 204),
sur la forme primitive du locatif pronominal (p. 283); la forme to-sm-jam n’expli¬
que pas la forme TO -apL-tv. M. H. (p. 110) a raison de ne pas conclure sur le suflfixe
primitif du comparatif. M. Bergaigne termine en faisant à M. H. d’extrêmes éloges :
« lia, dit-il, une véritable vocation de linguiste, et sa thèse est une heureuse pro¬
messe de fécondes découvertes ».
M. Egger reproche à M. H l’abus des termes techniques; il aurait fallu mettre en
tête un petit lexique qui les aurait expliqués. M. H. a été trop sévère pour le
Dsp! ’Eppnrjvéïaç. Ka^à auv(Hj>wjv veut dire par liaison avec d’autres et non par
convention; les syllabes n’ont pas de signification particulière; elles ne prennent un
sens que par leur union les unes avec les autres. 11 faudrait tenir compte aussi,
parmi les causes de déformation des langues, des erreurs de transcription graphi¬
que, Peut-on expliquer les nominatifs pluriels, comme ’AOyjvat? Il n’y a pas d’ex¬
plication grammaticale pour M. H.; M. Egger pense que ce sont peut-être des loca¬
tifs de direction.
M. Darmesteter ne fait porter son argumentation que sur la première partie de la
thèse. Cest la première fois qu’en Sorbonne on aborde la philosophie linguistique
et la première fois qu’on y étudie une des forces créatrices du langage. La thèse de
M. H. est une œuvre de haute valeur et qui prouve une grande vigueur d’esprit.
M. H. semble regarder l’analogie comme une force tératologique : il a tort. C.’est un
point de vue morphologique étroit. Les formes analogiques ont droit à l’existence ;
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0 HISTOIRE KT DK LITTÉRATÜRK
97
plus facilement comprises que les formes pures, elles les éliminent. L'analogie n’est
autre chose qu’une des nombreuses formes de Tassociation des idées. M. H. dit
qu’elle provient de la prédominance en nombre de certaines formes. Ce n’est pas
exact. Le parfait grec en xa ne serait parti que de 8éBo)xa. Le nombre fait souvent
loi, non pas toujours. Il y a là un fait de création. Il faut distinguer entre cette
création et l’action de l’habitude, de l’usage. M. H. a réduit à la morphologie l’ac¬
tion de l’analogie, mais cette action porte aussi sur la syntaxe et sur la signification.
Le développement de la signification des mots repose sur l’analogie. Le langage est
fait pour exprimer des idées : cela seul fait sa valeur. En tant que phonétiques, les
lois linguistiques sont physiologiques; en tant qu’elles se rapportent au sens des
mots, elles sont psychologiques. A la p. 14, les exemples « rendu » et « tense »
sont tous deux mal choisis. Quand il y a des dérogations aux lois phoniques, ces
dérogations ont lieu sous l’action d’autres lois qui agissent en sens contraire; il n’y
a donc qu’une exception apparente. M. H. croit à tort que la facilité de composition
est moindre dans les langues romanes que dans les langues germaniques.
M. Croiset fait remarquer que M. H. (p. 3 12, note 2) a dit que éépaxa est une
forme qui ne s’écrit pas; elle est seule employée aujourd’hui. P. 405, contrairement
à ce que dit M. H., la forme eaav est normale chez les plus purs attiques. Com¬
ment, à l’aoriste, y a-t-il des formes qui s’appliquent à d’autres modes qu’à l’indi¬
catif, tandis qu’il n’y en a pas à l’imparfait ni au plus-que-parfait? M. H. répond
que le subjonctif de l’imparfait se serait confondu avec celui du présent; de même
pour le plus-que-parfait, dont les modes ne se seraient pas distingués de ceux du
parfait. Il y a trois systèmes de temps qui, chacun, ont une série de modes.
M. Havet loue la hardiesse du sujet. Pour montrer qu’une forme est analogique, il
faut prouver qu’elle n’est pas phonétique; il faut donc avoir la confiance que la
science est venue à bout du problème des origines phonétiques. On ne fait de pro¬
grès qu’en osant beaucoup. Il y a toute une série de faits que M. H. a laissée de
côté; il ne parle pas des doublets syntactiques; ils donnent lieu cependant à d’inté¬
ressantes productions analogiques. La hardiesse de M. ü. a été parfois de la témé¬
rité; il a cru trop bien savoir les faits de phonétique. M. Havet relève quelques er¬
reurs sur « unius » (p. 37), a commorat » (p. 48). Ce qui agit dans « manibus », c’est
une loi phonétique; ü dans une pénultième devient 1 devant une consonne. Dans
« artubus », Pu s’est maintenu pour éviter les confusions avec le datif pluriel de
* ars ». Pour I^o6et « upûpa », c’est le latin qui a assimilé, ce n’est pas le grec
qui a dissimilé. C’est une tendance du latin que de donner la même couleur à deux
syllabes qui se suivent, üépçupa a donné « purpura », èXcXôÇü) « ululare », « mo-
madi » est pour « memadi ». P. 98. Va de a fractus » est long. M. H. (p. 48) est
bien absolu lorsqu’il dit : « Ve tombe, ou il demeure s’il ne peut tomber, et il n’y a
point de terme moyen entre ces deux alternatives ». La méthode ne peut être la même
pour la philologie romane et pour la linguistique proethnique; ce qui manque à
cette dernière science, ce sont les dates. P. i 52 , M. H. donne comme absolu le prin¬
cipe de moindre action; M. Havet conteste qu'il soit si rigoureux. M. H. répond
que l’expression ne s’appliquait qu’à un cas particulier et qu’elle a dépassé sa pen¬
sée. Le principe de continuité est, lui aussi, contestable; l’altération phonétique fait
plutôt un saut brusque. C’est une altération de la transmission de la langue des adul¬
tes à l’enfant; il n’y a donc pas continuité. L’enfant essaie de tout; certaines mau¬
vaises habitudes qu’il prend, il les corrige par l’exemple de ceux qui l’entourent. Il
y a même, dans les changements phonétiques, une intervention de la psychologie de
^enfant. Les faits phoniques ne sont pas bruts; même là, il y a une part pour l'ini¬
tiative individuelle. Sans doute, là, comme partout, tout est déterminé, soumis à des
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KKVUK CKITIQUK
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lois, mais ces lois sont des lois psychologiques, du moins en partie. Ce qui agit, ce
sont des courants psychologiques qui modifient l’esprit de l’enfant encore en bas-
âge. M. H. n’admet guère que des effets de retardement, M. Havet termine en pro¬
testant de son admiration pour le livre de M. H. et de son respect pour le travail
qu’il représente.
M. Paul Girard demande à M. H. si c’est à dessein qu’il renvoie rarement aux re¬
cueils épigraphiques ou si l’occasion lui a manqué de les consulter. Leurs renseigne¬
ments sont les plus précieux de tous ; pour tous les textes, sauf les textes attiques,
ils ont fourni des corrections. M. H. répond que s’il a été si sobre dans les emprunts
qu’il a faits à l'épigraphie, c’est qu’il s’occupe de la langue commune.
M. Henry a obtenu l’unanimité.
CHRONIQUE
FRANCE. — Le second volume de la Collection de documents pour servir à
Vhistoire des hôpitaux de Paris , que publie l’archiviste de l’Administration géné¬
rale de l’assistance publique, M. L. Brièle, vient de paraître. Il a été imprimé à
l’Imprimerie nationale et se vend à la librairie Picard (In-4 0 à deux col., 3 o 8 p.,
20 fr.). 11 comprend les années 1768-1791. M. Brièle promet pour l’année prochaine
la publication des comptes des xiv®, xv® et xvi® siècles.
— Le tome premier des a Registres consulaires de la ville de Lyon , recueil des
délibérations du conseil de la commune de 1416 à 1423 », vient d’étre publié, d’a¬
près les procès-verbaux originaux, par M. C. Guigne, archiviste en chef du dépar¬
tement du Rhône et de la ville de Lyon (In-4 0 , lxxvi et 376 p.).
— L’ouvrage de M. Philibert Le Duc sur VHistoire de la Révolution dans VAin ,
s’est augmenté d’un quatrième volume (Bourg, Martin-Bottier. In-12% vni et 604 p.,
6 fr.) qui étudie la période comprise entre le 12 octobre 1793 et le 14 février 1794.
— Il vient de paraître, à 170 exemplaires, une Histoire du collège de Cambrai ,
d’après des documents inédits, et avec planches, par M. A. Durieux (ln-8% 270 p.).
— La Société d’encouragement pour la propagande des livres d’art a fait réimpri¬
mer, d’après l’édition originale de 1716, les Curiosité{ de Paris (Quantin, in-8®, xx
et 339 p. avec gravures, 25 fr.).
— M. Pallain publiera bientôt, à la librairie Plon, un volume sur la mission di¬
plomatique de Talleyrand à Londres dans l’année 1792.
— M“® Michelet doit publier un volume sur la jeunesse de son mari, d’après des
mémoires et notes autobiographiques qu’elle a trouvés dans les papiers du grand
historien.
— Dans le n° 28, p. 36 , ligne 24 (compte-rendu de la thèse de M. Duméril), on
a imprimé Paddy (sobriquet donné aux Irlandais) au lieu de « Pitt », et, p. 37, li¬
gne 2, wighs au lieu de « whigs ».
ALLEMAGNE. — Sous le titre de Gallische Studien , M. le professeur O. Hirsch -
peld, de l’Université de Vienne, a commencé une série d’études sur l’organisation
de la Gaule romaine, qui doivent servir de préparation et de préface aux recueils
des inscriptions de la Gaule Narbonaise ( Corpus inscriptionum latinarum , t. XII) et
de la Gallia comat a (1. XIII). Dans le premier cahier du volume OUI des Sitçungs-
berichte der philosophisch-historischen Classe der kaiserlichen Akademie der Wis-
senschaften , de Vienne (pp 271-319). M. Hirschfeld traite des Civitates feederatee de
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D HISTOIRB RT OR LITTERATURE 99
la Gaule Narbonaise, et, en particulier, de la constitution de Marseille. Dans cet
article, fort nourri et riche en réaultats nouveaux, M. H. ne cesse de rendre hom¬
mage et justice aux savants français, dont les recherches ont singulièrement facilité
et préparé ses travaux.
— VArchiv fur lateinische Lexicographie und Grammatik , que doit publier
M. Edouard Wcblfflin, et que nous avons récemment annoncé, est assuré d’une
existence d’au moins trois ans, grâce à une subvention de l’Académie des sciences
de Bavière et à la libéralité de la maison Teubner, de Leipzig. VArchiv s’occupera
aussi de l’ancien bas-latin (dos celtere Mittellatein) ; c’e6t, comme l’indique son pro¬
gramme, un travail préliminaire et préparatoire (Vorarbeitf à un nouveau a Thé¬
saurus » de la langue latine, et comme une « grande station d’essai, destinée à cher¬
cher les moyens et les buts de la lexicographie latine, et à montrer, par des exemples
et des modèles choisis, comment il faudrait organiser ce gigantesque travail ». On
voudrait partager toute la littérature latine en 25 o parties, confier chacune de ces
parties à un collaborateur spécial, publier tous les six mois environ quarante articles
intéressants qui serviraient de types ou de modèles à suivre. Le premier fascicule
de VArchiv , qui est sous presse, ne renfermera encore aucun article du futur Lexi¬
que ; il ne contiendra que des études et des notices qui traiteront de questions gé¬
nérales, donneront des points de vue et des indications sur l’entreprise à tenter,
examineront les récents travaux de lexicographie, etc. On y trouvera un article de
M. Grœber, de Strasbourg, sur la formation des langues romanes et sur la littéra¬
ture des temps qui ont précédé et suivi le règne de Charlemagne; M. Grœber re¬
cherche quelle est la littérature qu’il faudrait étudier et mettre en œuvre dans le
prochain c Thésaurus ».
— M. Em. Seblmamm fera paraître, dans quelques jours, un travail sur la pronon¬
ciation du latin : a Die Aussprache des Latein f nach physîoîogisch-historischen
Principien . »
— Le premier volume de l'édition critique des œuvres complètes de Chrestien de
Troyes, préparée depuis longtemps par M. Wendelin Fqerster, paraîtra très pro¬
chainement à la librairie Max Niemeyer, de Halle. Ajoutons que M. W. Foerster
doit publier à la librairie Henninger, de Heilbronn, une grammaire française histo¬
rique et un compendium d’une grammaire comparée des langues romanes.
— M. G. Kcertirg prépare une Encyclopédie de philologie romane (a Encydo-
pædie der romanischen Philologie »), divisée en trois parties : I. Erœrterung der
Vorbe griffe; IL Die romanische Philologie im Allgemeinen ; 111 . Die romanischen
Ein^elphilologien .
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 20 juillet i 883 .
M. de Laigue, consul de France à Livourne, écrit qu’il a appris que l’inscription
latine communiquée par lui à l’Académie en octobre dernier et reconnue fausse par
M. Dexiardins (Revue critique, 1882, 2 e semestre, p. 38 o) avait été fabriquée, il y
a une dizaine d’années, à Orbitello; on chercha, à cette époque, à la vendre a M. Gra-
murrim, qui en découvrit immédiatement la fausseté.
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100
RKVUB CRITIQUE D'HISTOIRE ET DE LITTERATURE
M. Le Blant communique des renseignements oui lui ont été transmis par MM. de
Nolhac et Diehl, membres de l’Ecole française ae Rome, sur des fouilles récentes.
Vers la fin de juin, un particulier, faisant quelques fouilles dans un petit jardin si¬
tué derrière l’église de la Minerve, trouva, presqu’à fleur de terre, un sphinx de gra¬
nit rose, parfaitement conservé, d’environ i m 20 de longueur. MM. de Nolhac et
Diehl ont examiné ce monument : ils le croient de travail romain : c’est du faux
égyptien, comme on en a tant fait sous les Antonins. L'attention de la commission
archéologique ayant été attirée sur ce point par cette trouvaille, des fouilles ont été
entreprises dans l’impasse de Sant’ Ignazio, qui confine à l’abside de la Minerve.
Elles ont amené la découverte de plusieurs monuments intéressants :
i° Un sphinx de granit noir, de travail égyptien, qui porte le cartouche royal
d’Amasis II, martelé, probablement par ordre de Cambyse; ce sphinx, long d’envi¬
ron i“ 5 o et parfaitement conservé, a été transporté au musée du Capitole;
2 0 Deux cynocéphales de granit noir, dont l’un porte le cartouche du roi Nech-
torheb I»;
3 ° Un piédestal de candélabre, triangulaire, de très grande dimension, qui paraît
être de travail grec et qui porte, aux trois angles de sa base inférieure, des figures
accroupies, et, plus bas, des ornements fort délicats;
4 0 Un obélisque de granit rose, haut d’environ 6 m , sur lequel est gravé le cartou¬
che de Ramsès IL C*est le pendant de celui qu’on voit sur la jrtace de la Mi¬
nerve;
5 ® La base d’une belle colonne de granit oriental, décorée de sculptures égyptien¬
nes très fines exécutées en relief et représentant des personnages.
Déjà des fouilles plus anciennes avaient révélé l’existence, dans cette partie de la
ville, d’un édifice considérable, consacré à une divinité égyptienne. Selon M. Lan-
ciani, c’était l’Isæum de la neuvième région.
M. Bréal commence la seconde lecture de son mémoire sur la Force du méca¬
nisme grammatical.
M. Revillout termine la lecture de son mémoire sur Y Etalon d'argent en Egypte .
M. Schlumberger communique la description de cinq sceaux byzantins de sa col¬
lection, qui tous ont appartenu à des princes vassaux de l’empire de Byzance. Ce
sont ceux de Gabriel exousiocrator d’Alanie (Caucase); de Michel, duc du Yaspou-
raçan; de Théophano Muzalon, archontissa de Russie; de Pierre, archonte de Dio-
clee (Monténégro), et de Trasemund, roi des Vandales. Tous ces sceaux portent des
légendes en grec et prouvent que ces princes qui régnaient sur des régions si éloi¬
gnées les unes des autres et y exerçaient en fait l’autorité souveraine, reconnais¬
saient néanmoins la suzeraineté nominale de l’empire de Constantinople.
Ouvrages présentés : — par M. L. Renier : i° Bulletin trimestriel des antiquités
africaines , 2 e année, 5 e fascicule; 2* Mowat, Deux Diplômes militaires d’Antonin ;
— par M. Georges Perrot : Rhône (Arthur), Découverte des momies royales de Thè-
bes] — par M. Bréal : Barth (Auguste), VInscription sanscrite de Han Chey (extrait
du Journal asiatique) ; — par M. Miller : Gasté, les Collections de Verrès.
Julien Havbt.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du iz juillet.
M. G. Schlumberger lit un mémoire sur les diverses représentations delà Vierge
et des saints figurés sur les sceaux byzantins du vu® au xm« siècle. Il énumère les
principales épithètes qui servent à designer la Vierge dans les invocations pieuses
si fréquentes de l’épigraphie sigillaire byzantine. 11 insiste particulièrement sur
ceux des noms donnés a la Vierge qui constituent non plus des épithètes de forme
mystique ou simplement poétiques, mais bien de véritables noms propres désignant
cette image célèbre vénérée dans quelques églises ou monastères qui lui doivent
leur réputation.
M. Schlumberger donne éjgalement la liste des saints dont il a relevé les effigies
sur les milliers de sceaux byzantins qu’il a eu l’occasion d’étudier. Il décrit les
types traditionnels, les détails de costumes, les attributs qui caractérisent ceux de
ces saints les plus fréquemment représentés sur ces petits monuments encore
beaucoup trop peu étudiés.
E. Mûntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils y boulevard Saint-Laurent , 2 S.
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exactement les originaux; on fera bien, si Ton doute de quelques carac¬
tères, de ne pas se fier entièrement aux dessins et reproductions de
Roehl.) — Lucianus Samotasensis, rec. Fritzsch. Vol. III, 2® partie.
(Même après ce travail du Nestor des philologues allemands, il reste
encore beaucoup à faire pour la recension du texte.) — Hartman, Stu-
dia Antiphontea. (Quelques points dignes d’attention.) — Lotheisen,
Geschichte der franzôsischen Literatur im XVII. Jahrhundert. III.
(Traite de Boileau, Lafontaine, M me de Sévigné et des orateurs de la
chaire; ouvrage de grande valeur.) — Arbok hins istenzka fornleifafé-
lags, 1882. — Roscher, Nektar und Ambrosia, mit einem Anhang
tiber die Grundbedeutung der Aphrodite und Athene. (L'auteur de Part,
n’approuve pas toutes les conclusions de Roscher et déclare extrême¬
ment invraisemblable l'explication du mot « nectar ».)
Deutsche Literaturzeitung, n° 28, 14 juillet 1883 : Analecta Lutherana,
Briefe u. Actenstücke zur Geschichte Luthers, zugleich ein Supplément
zu den fusherigen Sammlungen seines Briefwechsels hrsg. v. Kolde. —
Küenen, Volksreligion u. Weltreligion, frint Hibbert-Vorlesungen.
(Pfleiderer : livre plein de choses et écrit « im Stile edler Popularitât. >)
— Aus den Papieren des Ministers u. Markgrafen von Marienburg
Theodor von Schôn, III. Ergànzungsblàtter. V. Kirchen-und Schulpo-
litisches. (v. Sallwürk.) — Brugsch, Astronomische u. astrologische
Inschriften der altàgyptischen Denkmàler gesammelt wàhrend seines
zwanzigjàhrigen Aufenthaltes in Aegypten, verglichen, übertragen,
ihrer Bedeutung nach erklàrt u. autographiert. (Krall : textes déjà pu¬
bliés en grande partie, et qui donnent une idée frappante des connais¬
sances astronomiques des anciens Egyptiens.) — Kurschat, Wôrter-
buch der littauischen Sprache. II. Lilauisch-deutsches Wôrterbuch.
(Bezzenberger : « ne renferme malheureusement que le lithuanien pu¬
rement prussien, avec une foule d’autres mots que l’auteur avoue ne
pas connaître tout à fait et dont il ne veut pas garantir la justesse » ;
travail très utile néanmoins et qui fait honneur au vieil érudit; per¬
sonne n’a plus que lui contribué à faire connaître et comprendre le li¬
thuanien.) — Renner, Kritische u. grammatische Bemerkungen zu
Homer. (G. Hinrichs : plusieurs passages de l’Iliade, surtout des der¬
niers livres, expliqués d’une manière pénétrante et lumineuse.) — Isaei
orationes cum fragments a Dionysio Halicarnasensi servatis ed. Buer-
mann. (Blass : grand progrès sur les autres éditions; les manuscrits ont
été consultés à fond et justement appréciés.) — Die Sage von Hrafnkell
Freysgodhi, eine islàndische Geschichte aus dem X. Jahrhundert, übers,
v. Lenk. (K. Lehmann : fautes et incorrections.) — Testimonia minora
de quinto bello sacro e chronicis occidentalibus excerpsit Rôhricht.
S Vinkelmann.) — Itinéraires à Jérusalem et descriptions de la Terre-
inte rédigés en français aux xn e , xm e et xiv® siècles, p. p. H. Michelant
et G. Raynaud. (Furrer : intéresse à la fois les linguistes, les historiens
et les « Palàstinaforscher » ; renferme bien des choses neuves et donne
sous une forme très améliorée ce qui était déjà connu.) — Tohaschek,
Zur historischen Topographie von Persien. I. Die Strassenzlige!der Ta¬
bula Peutingerana. (Partsch : recherches savantes et pénétrantes.) —
Bode, Italienische Portraitsculpturen des XV. Jahrhunderts in den Kô-
nigl. Museen zu Berlin, (v. Seidlitz.)
Athenaeum belge, n® 6, i5 juin 1 883 : Ribot, Les maladies de la vo¬
lonté (Delbœuf). — Le maréchal Bazaine à Metz(Henrard). — Serrure,
Etudes gauloises. Le gaulois explique au moyen de l’archéologie, de Ja
numismatique, de l'histoire et de la philologie comparée (La théorie de
la permanence des idiomes gaulois ne sera pas facilement acceptée dans
le monde scientifique officiel, mais ce travail n'en mérite pas moins
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l’attention sérieuse de tous ceux qui veulent approfondir l'intéressant
problème de nos origines wallonnes).
N° 7 , i 5 juillet i883 : Willems, Le sénat de la république romaine.
II. Les attributions du sénat (Troisfontaines : deuxième article sur cet
ouvrage, le plus précis, le plus correct qu’on ait pubjié jusqu'ici sur les
attributions du sénat romain ; l’ensemble a tant de mérite, il accuse tant
et de si patientes recherches, il se distingue par une érudition de si bon
aloi, il est le fruit de labeurs si consciencieux qu’on ne peut pas ne pas
louer sincèrement celui qui en a conçu l’idée et qui a eu le noble cou¬
rage de la poursuivre jusqu’au bout). — Ptolemaei geàgrâphica, p. p.
C. Müller. I, i (De Ceuleneer : œuvre savante, commentaire de la
f )lus grande valeur, édition aussi parfaite que possible). — L'anthropo-
ogie moderne. II.
Goettingische gelehrte Anzeigen, n° 28, 11 juillet i 883 : Lipsius, Die apo-
kryphen Apostelgeschichte und Apostellegenden, ein Beitrag zur alt-
chnstlichen Litteraturgeschichte. I. (Overbeck : ouvrage qui,n'a pu
être entrepris sans héroïsme, « ohne den standhaftesten Gelehrtenne-
roismus » ; beaucoup de matériaux précieux et inédits mis à la disposi¬
tion de l’auteur par M. Max Bonnet.) — Deussen, Das System des
Vedanta (excellent). — Jahrbuch des historischen Vereins des Kantons
Glarus. XI-XIX. (Meyer von Knonau.)
Theologische Literatorzeitnng, n° i3, 3o juin 1 883 : Milloué, Le boud¬
dhisme, son histoire, ses dogmes, son extension et son influence sur les
peuples chez lesquels il s’est répandu. (W. Baudissin : conférence pu¬
blique qui n’est pas entièrement réussie.) — Zschokke, Die biblischen
Frauen des Alten Testamentes. (Budde : beaucoup de peine, peu de
succès.) — Jacobsen, Untersuchungen liber die synoptischen Evange-
lien. (Holtzmann.) — Schanz, Commentar liber das Evangelium des
heiligen Lucas. (Holtzmann.) — Lossen, Der Kôlnische Krieg. Vorge-
schichte. i 565 -i 58 i. (Modèle de recherches exactes et consciencieuses et
de noble impartialité.) — Uhden, Die Lage der lutherischen Kirchein
Deutschland.
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Le fascicule I du tome II vient de paraître .
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent. 23 .
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o r p O ^ 3
N* 32 Dix-septième année 6 Août 1883
REVUE CRITIQUE /(
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE^
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DR MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt
Prix d'abonnement :
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, a 5 fr.
^ PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DB LA SOCI^T* ASIATIQUE
UK LBCOLK DBS LANOUBS ORIENTALES VIVANTES, BTC
28 , HUE BONAPARTE, 28
A dresser les communications concernant la rédaction à M . A. Chuqubt
(A u bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
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P. Régnaud. Stances sanskrites inédites.
E. Belot. Pasitèle et Colotès.
P. Soupé. Corneille Agrippa.
L. Clédat. Etudes de philologie française.
G. A. Heinrich. Herder, orateur.
Mélanges.
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PÉRIODIQUES
The Àcademy, n° 585 , 21 juin i 883 : Lancashire and Cheshire records
preserved in the Public Record Office, d. p. Selby. VU et VIII. — In¬
gram, Oliver Modox Brown, a biographical sketch. (Blaikie.) — Lord
Ronald Gower, Réminiscences. (Noël : mémoires agréables à lire,
écrits par un homme qui a de la lecture, de la culture et du goût; l’au¬
teur raconte, entre autres choses, ses visites à Garibaldi, à Victor Hugo,
à Disraeli.) — Records of the english province of the society of Jésus.
VII, 2, p. p. Foley. — G. B. de Lagrèze, La Navarre française.
(Webster : recherches soignées et minutieuses, faites dans les archives;
ouvrage de valeur; corrige quelques fautes commises par feu Ray¬
mond.) — The Oxford historical society. (Fita.) — The etymology of
cc Rollock » or « Rullock (Skeat.) — The date of Polycarp’s martyr
dom. (G. Salmon.) — The dérivation of < Sweet William ». (Friend.)
— A Yorkshire proverb. (Peacock.)— Cari Abel, Ilchester Lectures on
comparative lexicography, delivered at the Taylor Institution, Oxford.
(Morfill : mainte remarque ingénieuse, Opinions hardies, livre très sug¬
gestif.) — Criticism of early chinese literature. iEdkins.) — Prince L.
L. Bonaparte. — Linton, The history of wood-engravine in America.
(Radford.) — Egyptoloçical notes. (Am. B. Edwards.) — Gainsbo-
rough's visit to Kew (King). — Guiseppe Nasini (Mercer). — Pilhom-
Succoth. (Reginald Stuart Poole).
The Athenaeum, n° 2908, 21 juillet 1 883 : Ingram, Oliver Madox
Brown, a biographical essay. — LandonScIiooI management, [the Edu¬
cation Library, edited by Phil. Magnus]. — Udânavarga, a collection of
verses from the traddhist canon, translated from the Tibetan by Ro-
ckhill. — O'Conor, History of the irish people. 2 vols. (Il serait inu¬
tile de critiquer les opinions extraordinaires, ethnologiques et histori¬
ques, répandues dans ces deux volumes ; la publication de cet ouvrage
par deux respectables librairies de Manchester et de Londres prouve
sûrement l’ignorance générale du public anglais en ce qui concerne
Thistoire de l'Irlande.) — A. B. Ellis, History of fetish. (Livre inté¬
ressant) — Pindar, the Nemean and Isthmian Odes, edited by Fennell
(Second volume, venant après celui qui contenait les Olympiques et les
Pythiques; forme par conséquent la première édition de Pindare pu¬
bliée par un Anglais depuis celle de Donaldson en 1841 ; comme édition
maniable et instructive d’un classique difficile, aucun livre des récentes
années ne dépasse le Pindare de M. Fennell.) — Mrs. Murray Ainsly,
Our tour in Southern India. — Larroumet, Marivaux, sa vie et ses œu¬
vres. (Livre plein de soin, d’exactitude et très utile; c’est une encyclo¬
pédie de Marivaux.) — Theological books. — Patrick Branwell Brontë
ÎLeyland). — The importance of assyriology to hebrew lexicography,
V. (Delitzsch.) — A primitive law of succession. (Gomme.) — A pla-
giarism of Goldsmith s. — Mr. E. B. Eastwick. Ancient inscriptions in
Ceylon, collected and published for the governement by Edward Mül-
ler. (Les résultats historiques nous désappointent, mais l’intérêt philo¬
logique attaché à ces inscriptions compense tout.)
Literarische Centralblatt, n® 3 o, 21 juillet i 883 : Putt, Martin Lu-
ther’s Leben und Wirken. (Ouvrage de valeur, quoiqu'il n’y ait ni do¬
cuments ni points de vue nouveaux — Jansen, Aleander am Rei-
chstage zu Worms i 52 i (Jette une vive lumière sur l’époque, ses partis
et ses débats). — Witte, Ueber Freiheit des Willens et Grundzüge der
Sittenlehre. — Rich. Schrôder, Die Franken und ihr Recht (Malgré de
critiques, l’auteur a le mérite d’avoir soulevé un certain nombre de
questions très instructives sur le domaine de l’histoire de Tancienne
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N" 32
— 6 août —
1883
Sommaire t i56. P. Girard, L’Asclépieion d’Athènes. — 157. Dragatzi, Les
théâtres du Pirée. — i58. Adler, Le duc Guelfe VI et son fils. — 169. F. Des
Robert, Campagnes de Charles IV, duc de Lorraine et de Bar en Allemagne, en
Lorraine et en Franche-Comté. — 160. Corréard, Choix de textes pour servir
à l’étude des institutions de la France. — 161. Humbert, Jugement de l’Allemagne
sur Molière. — Chronique. — Académie des Inscriptions. — Société des Antiquai¬
res de France.
i56. — X.*A«cléplelon d’Athènes» d’après de récentes découvertes, par Paul
Girard. Paris, E. Thorin, 1882. In-8, 134 p. 4 planches. (Fascicule 23 m# de la
Bibliothèque des Ecoles françaises d’Athènes et de Rome).
Les fouilles que la Société archéologique d’Athènes, dans le cours des
années 1876 et 1877, a fait pratiquer sur le versant méridional de l’A¬
cropole ont mis au jour, comme l’on sait, un assez grand nombre d’ins¬
criptions relatives à Asclépios et de bas-reliefs consacrés au dieu. M. Paul
Girard, après avoir été des premiers à nous faire connaître ces monu¬
ments ', a songé à mettre en œuvre les documents qu’ils fournissent. Il
a voulu écrire une monographie, aussi complète que possible, de l’As-
clépieion d’Athènes. Son livre se divise en deux parties. La première,
intitulée le Culte public, comprend ce qui a rapport au temple, aux mi¬
nistres du culte, aux cérémonies publiques, à l’administration du sanc¬
tuaire. La seconde qui a pour titre le Culte privé , traite des rites
accomplis par les particuliers (incubation, etc.), des différentes caté¬
gories de suppliants, des vœux, des ex-voto. Dans chacune de ces ques¬
tions, M. G. procède avec ordre et méthode, tirant bon parti, en
général, des documents qu’il interprète et exposant avec clarté les
résultats de ses recherches.
Ce n’est pas sa faute si ces résultats ne sont, en somme, ni très nom¬
breux ni très décisifs. Une dissertation d’une trentaine de pages eût suffi
amplement, je crois, à en rendre compte. Pour élever cette dissertation
aux dimensions d'un volume, M. G. s’est vu forcé, non-seulement d’en¬
fler les conjectures et d’amplifier les discussions de détail, mais d'écrire
1. Dans le Bulletin de correspondance hellénique où il a publié (t. I et II, 1877-
1878) un Catalogue descriptif des ex-voto à Esculape , et, en collaboration avec
M. Jules Martha, les Inventaires de VAsclépieion (t. II, pp. 419, sqq.). — Un cata¬
logue plus complet des bas-reliefs trouvés dans les fouilles a été publié par Von
Duhn (Arch. Zeitung, XXXV, 1877). Cf. Koehler, Mittheil. d . deutsches arch. Inst,
in Athen, t. II..
Nouvelle série, XVI. 3 a
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102
REVUE CRITIQUE
bien des pages qui n’étaient pas nécessaires. En voici un exemple. Le
prêtre d’Asclépios, l’auteur en fait lui-même la remarque, ne diffère pas
sensiblement, quant à ses attributions, des prêtres des autres dieux; les
sacrifices publics ne se font pas autrement dans l’Asclépieion qu’ailleurs;
ce sanctuaire est administré exactement d’après les mêmes règles que les
autres sanctuaires d’Athènes. Dès lors, pourquoi consacrer un chapitre
spécial au prêtre d’Asclépios, un autre aux sacrifices publics de l'Asclé*
pieion, un autre encore à son administration? Pour tout ce que le culte
du dieu guérisseur a de commun avec les autres cultes, n’eût-il pas été
plus simple de renvoyer le lecteur aux Sacerdoces athéniens de M. Ju¬
les Martha? De même, à propos de l’épithète de Swnrjp que plusieurs ins¬
criptions appliquent au dieu, M. G- se laisse aller à nous parler de la
dévotion singulière du rhéteur Aristide ’. Ce développement 1 2 appartient
plutôt, ce me semble, à une histoire générale de la religion d’Asclépios,
histoire que l’auteur s’est défendu d’écrire, qu’au sujet particulier qu’il
a voulu traiter.
S’il y a du superflu dans le livre de M. G., il y a, d’autre part, des
lacunes. Ces lacunes, sans doute, ne sont pas considérables, et l’on aurait
scrupule à les relever, si l’auteur embrassait un plus vaste ensemble de
faits. Mais, dans une étude aussi étroitement limitée que celle ci, toutes
les omissions ont leur importance. On regrettera donc qu’au chapitre
des ex-voto, M. G. n’ait pas énuméré plus complètement ni défini plus
exactement les objets divers cités dans les inventaires de l’Asclépieion.
« Dans ces longues listes d’offrandes, nous dit-il (p. 118), il y a des mots
nouveaux dont le sens nous échappe ». Des mots nouveaux, quelle
bonne fortune pour les lexicographes! Mais M. G. n’a point pensé aux
lexicographes ; il n’a pas voulu leur épargner de la peine en donnant, ne
fût-ce que dans les notes, la liste des mots qu’il ne pouvait expliquer.
Quant aux mots qui ne sont point nouveaux, il ne paraît pas s’être tou¬
jours soucié d’en approfondir le sens. Qu’était-ce qu’un TuroçxaTap.axTé;?
Diffère-t-il, et en quoi, du tutucç simple ou du ?6roç ? M .G. ne pose
pas la question. Je doute aussi que, dans les inventaires, le mot y.aQmfip
désigne une sonde de médecin. Remarquons qu’à la ligne 9 du second
fragment 3 4 le xaOsrrjp est qualifié de uaXivéç. Notons surtout que, dans les
inventaires de Délos publiés par M. Homolle \ ce même mot désigne,
sans aucun doute possible, un « collier », ce qui s’accorde parfaitement
avec un texte de YOnomasticon de Pollux 5 . Sur ce point et sur quelques
1. Pages 92-95.
2. Il était d'autant moins nécessaire d’y entrer que M. Bouché-Leclercq a écrit,
sur ce même sujet, plusieurs pages très piquantes dans son Histoire de la divination
dans Vantiquité, t. III, pp. 299 et suiv.
3 . Bullet. de corr. hell., 1878, p. 421.
4. Comptes des hiéropes du temple d’Apollon Délien (extrait du t. VI du Bullet .
de corr. hell.), p. 12 3 .
5 . V. 98, ya\ wç ’AvTiçavv;? xâOsp.a* è/jXcuv c'a^Ts y.ai y.aO £ Tvjp «x .
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O’HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE
io3
autres, M. G. ne paraît pas avoir fait de recherches suffisantes. Peut-
être aussi a-t-il dépouillé un peu rapidement les inscriptions de l'Asclé-
pieion. Autrement, il n aurait pas manqué de citer, parmi les ministres
secondaires du culte, le ùxoÇdxopoç que mentionne une inscription gravée
sur la base d'une statue élevée à Marcia Athénaïs, fille d’Hérode Atti-
cus \ Il eût noté qu'un zacore d'Asclépios, à l'époque romaine, était, en
même temps, Twpçépoç èÇ dxpo~< 5 Xeù>{ a . Il eût précisé la date des premiers
textes épigraphiques qui signalent des prêtres à vie d’Asclépios — ces
textes sont de l'époque de Claude 1 2 3 — et surtout il n'eût pas écrit qu'un
cleidouque pouvait être en même temps archonte. Si l'on se reporte à
l'inscription visée 4 , on constate que l’archonte s’appelle Stratolaos et le
cleidouque Sozon.
Signalons encore une erreur dans la traduction du passage suivant
dun hymne à Asclépios :
[Tpiqi.]ixap, & Ilaiàv ’Acy.Xvjïrtè, urcb Téxvrj;
[taOjetç Aio?av?oç àvlaTOv xaxcv EXxo;, etc.
Les premiers mots ne doivent pas se traduire par « O bienheureux As¬
clépios, dieu guérisseur » ; Tptcp.ay.ap ne peut se rapporter au dieu, car
les participes qui suivent seraient inexplicables; il se rapporte nécessai¬
rement au personnage qui a consacré le monument. « Diophante (est)
trois fois heureux..., lui quia été guéri », etc. — Je crois enfin que M. G.
se fait illusion en voyant, dans les quatre ou cinq mots qui nous restent
d’une inscription métrique, le début du pæan de Sophocle en l’honneur
d'Asclépios. L’en-tête de l’inscription 171 g , ne désigne pas
avec plus de nécessité le nom d'un poète que l’en-tête Atc^ivTôu de l'ins¬
cription 171a 5 . Dans les deux cas, il faut y voir le nom du citoyen par
qui le monument a été consacré. Il est à noter, en effet, que, dans l’ins¬
cription 171 6 , la copie du pæan d’Ariphron de Sicyone n'est nullement
précédée de la mention du nom de ce poète.
Ne poussons pas plus loin ces observations de détail. Dans le travail
de M. G., il y a, çà et là, des traces de précipitation 7 ; mais il faut re¬
connaître que certaines parties ont été étudiées avec soin et se lisent avec
fruit. Nous citerons particulièrement celle qui traite des bas-reliefs vo¬
tifs. Il y a là une discussion intéressante et bien conduite 8 . Des bas-re-
1. C. /. A . 9 III, 1, Addenda et corrigenda, 894 a.
2. Ibid. y 774 a.
3 . Cf. C. I. A. t lit, 1, Addenda , 68 a t 68 b .
4. ’À&qvaiov, V, p. 323 , n° 2. C. I. A. III, 1, Addenda, 780 a : h tco èiut STpa*
TôXaou apxP VT °S èviotuTÔ, xXsiSouxoüvtoç SwÇovtoç Souvtétoç.
5 . C.I. A., III, 1. Addenda.
6. C. /. A. y III, 1, P. 66.
7. Cst-cc à cette cause qu’il faut attribuer l’inadvertance qui suit; Page 22 : « le
sacerdoce d’Asclépios est électif ». Deux lignes plus loin : « le prêtre d’Asclépios
était désigné par le sort ».
8. U est vrai qu’elle n’est pas tout à fait nouvelle. M. G. avait déjà développé les
mêmes arguments dans le Bulletin de corr. hellén. de 1S7b.
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REVUS CRITIQUE
IO 4
liefs où l'on voit la scène dite du banquet funèbre ayant été trouvés
parmi les ruines de l'Asclépieion, M. Girard, contrairement à l’opinion
de M. Koehler et des Allemands en général, soutient qu’une telle prove¬
nance est un argument décisif, et qu’il faut reconnaître, dans ces monu¬
ments et dans tous ceux qui leur ressemblent, <c des monuments votifs se
rattachant au culte du dieu guérisseur ». En attendant des preuves nou¬
velles et plus complètes, on doit convenir que c’est là au moins une as¬
sez forte présomption en faveur de la thèse soutenue jadis par Weltker,
reprise depuis, avec de nouveaux développements, par M. Albert Du¬
mont dans son mémoire, encore inédit, sur les Banquets funèbres *.
On trouvera, à la fin du volume, un plan de l’état du versant méridio¬
nal de l’Acropole — plan dressé en 1877 par M. Marcel Lambert, ar¬
chitecte, pensionnaire de l’Académie de France à Rome, — et trois plan¬
ches d’héliogravures représentant des bas-reliefs votifs. L’une de ces
planches a déjà été publiée dans, le Bulletin de correspondance helléni¬
que \
157. — Tà ôéotTpa tou üeipauSç xai ôxtoçoç Xtp.Y)V, par J. Dragatzi; extrait du
tome VI du üapvaocéç, Athènes, impr. du Ilapvacrcoç, 1882. In-8, i 5 pages.
L’étude de M. Dragatzi comprend deux parties. Dans la première
(pp. 4 sqq.), l’auteur cherche à démontrer que, dès les temps les plus
anciens, le Pirée possédait deux théâtres. L’un de ces théâtres, le théâ¬
tre de Munychie (Thuc., VIII, 93, 1 ; cf. Lys., c. Agoratos , 32 et 55 ),
était situé sur le versant nord-ouest de la colline du même nom. L’au¬
tre, connu sous le nom de théâtre du Pirée, dominait, à l’ouest, le port
de Zéa. La comparaison des ruines de ces deux théâtres conduit M. D.
à affirmer que le second appartient, comme le premier, dont l’antiquité
n’est pas douteuse, à la bonne époque de l’architecture athénienne. Il en
conclut (c’est la seconde partie de son mémoire, pp. 10 sqq.) que c’est
bien ce théâtre qui, dans le passage de Xénophon, Helléniques, 11 , 4 ,
3 o sqq., est désigné par les mots to FLipaioi ôèaTpov (et non Tb èv Ileipatsî
OéaTpov, comme écrit M. D.), et que c’est près de là, par conséquent,
qu’il faut chercher le xwçbç Xipz/jv, mentionné par Xénophon dans le
même passage. Le xwçbç Xtp^v, d’après M. D., serait la petite anse qui
porte aujourd’hui le nom de ZxdX a tou Mavfva.
Ce court travail ne manque pas de mérite 1 2 3 . Il est un exemple de l'ar¬
deur toujours nouvelle qu’apportent les Grecs d’aujourd’hui à l’étude
1. M. G. nous avertit qu’il a eu communication de ce mémoire.
2. T. II, 1878, pl. VII.
3 . Il gagnerait à être plus simplement écrit. Ainsi, p. 4, les deux théâtres sont
comparés à a deux bouches » par lesquelles le a commerçant et belliqueux Pirée
souriait aux Muses ».
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o'HISTOIRB BT DE LITTÉRATURE
Ï05
de deux ordres de questions qui ont, semble-t-il, le don de les passion¬
ner : les questions philologiques et les questions topographiques. Mais
M. D. ne paraît pas se douter de l’importance du problème qu'il cher¬
che à résoudre. 11 ne sait pas qu’avant lui la topographie du Pirée a été
l’objet de nombreuses et savantes recherches. Sans parler de Leake ni
d’Ulrichs, les travaux plus récents de MM. E. Curtius et J. A. Kaupert,
la magnifique publication des Karten von Attika, dont le premier fasci¬
cule a paru en 1881, eussent été utiles à consulter avant de se risquer à
déterminer l’emplacement du xioçoç Xt[xrjv. La carte de l’ancien Pirée qui
se trouve dans les Karten (Bl. n*) ne fait pas mention de ce port : c’est
le Kavôapoç qu’elle place à l’endroit où M. D. croit retrouver le xioçoç
Xtp.vjv x . N’y avait-il pas lieu d’examiner cette opinion? Si M. D. eût été
au courant de la science, il se fût de même aperçu que M. E. Curtius,
dans sa dissertation sur les ports d'Athènes ( De portubus Athenarum
commentatio, pp. 34 sqq.), place le xoxpbç tout au fond du Grand
Port. C’était là encore une hypothèse dont il fallait tenir compte, d’au¬
tant plus que le passage de Xénophon semble donner raison à M. Cur¬
tius. En effet, il y est question d’un mouvement de retraite auquel
M. D. ne paraît pas avoir fait suffisamment attention : èrat Se oktévTOç
auxou TCpoaéôeêv tivsç... (Hell., 11 , 4 , 32 ). Après s’être avancé jusque près
du xo>çoç Xtjjtfqv, Pausanias se retire vers r'AXtesbov où se trouve son
camp : c’est alors seulement que, attaqué, il fait volte-face et poursuit
les fuyards dans la direction du théâtre fiu Pirée. On comprend mieux
cette poursuite, si l’on suppose Pausanias déjà à quelque distance du
%c*>çbç Xq/.T|V au moment de l’attaque et si l’on admet que le xcoçbç Xtp/rjv
lui-même était assez éloigné du théâtre pour que la cavalerie Spartiate
trouvât, entre ce port et le théâtre, un champ suffisant. Entre le théâtre
et la ZxaXa tou Mavlva, l’espace est bien restreint. Ce n’est là d’ailleurs
qu’une hypothèse : encore fallait-il s’y arrêter. En résumé, le travail de
M. Dragatzi manque des qualités critiques qu’on doit exiger d’une œu¬
vre vraiment scientifique.
Paul Girard.
i 58 . — D r S. Adlbr. Herzog Welf VI and aeln Solin. Hanovre, Helwing,
1881. In-8, iv-160 pp. Prix ; 4 marks.
M.Giesebrecht signalait, il y a quelques années, l’utilité qu’il y au¬
rait à reprendre après Behrens la biographie du duc Guelfe VI, en
profitant des sources nouvelles que l’activité des érudits a mises au jour
depuis 1829. C’est cette œuvre qu’a tentée M. Adler avec le soin cons¬
ciencieux d’un homme qui veut être en progrès sur ses devanciers.
1. M. D., dans le plan qu’il joint à son travail, place le KavOapoç à l’entrée du
Grand Port du Pirée, en dehors de la passe, sans donner d’ailleurs la raison de ce
choix.
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RBVUR CRITIQUE
106
Le progrès était facile d’ailleurs à une double condition : d’abord, de
recueillir tous les textes qui peuvent ajouter quelque trait nouveau à la
biographie de Guelfe VI, quelque fait ignoré à l’histoire générale de son du*
ché. Sur ce point, on ne peutque féliciter M. A., puisque les regestes placés
à la fin de la brochure, comptent 160 numéros, alorsqueceux deStàlen,
publiés en 1847, n en comptent guère qu’une centaine. Nous n’affirmons
point pour cela que le catalogue soit complet et que rien n’ait échappé
au chercheur. Malgré les moyens d’information multiples dont dispose
l’Allemagne savante, il est peut-être plus difficile encore que chez nous
d’être au courant de tout ce qui se publie, parce que ni Leipzig, ni Ber¬
lin, ni aucune autre ville ne recueille avec le même soin que Paris les
productions de la province. Nous ferions plutôt un grief à l’auteur de
n’avoir point augmenté par ses propres recherches dans les archives de
la Bavière ou du Wurtemberg ses sources d’informations. Il semble
s’être contenté de ce que lui offrait le Codex Hirsaugiensis de Stuttgart.
La seconde condition, c’était de reprendre l’examen de tous les textes
relatifs au sujet pour combler les lacunes, redresser les erreurs, tirer de
nouveaux aperçus, en un mot, faire plus de lumière sur les hommes et
sur les événements. M. A. semble avoir compris quelques-unes de ces
exigences, si j’en juge par les 34 pages de remarques qui complètent sa
brochure. Ces remarques portent en effet, aussi bien sur les documents
que ses devanciers avaient déjà mis en œuvre que sur ceux qu’ils avaient
ignorés. Quant aux aperçus nouveaux, nous n’oserions affirmer que
l'auteur s’en est tout autant préoccupé. Mais, comme nous sommeshor 9
d’état de comparer sur ce point le présent travail avec celui de Behrens,
nous n’insisterons pas.
L’étude de M. A. n’est pas, comme on pourrait le craindre, une sèche
monographie enregistrant dans leur ordre chronologique les incidents,
petits ou grands, de la vie de Guelfe VI. L’activité politique et militaire
de ce noble souabe du xii # siècle est toujours soigneusement rattachée à
l’histoire générale du pays, qui emprunte alors aux luttes des Guelfes
contre la maison de Hohenstaufen un si puissant intérêt. Si l’esquisse
est sobre, exempte de recherche et de prétention, elle est suffisamment
large cependant pour que les événements particuliers apparaissent sous
leur véritable jour, du moins aux yeux des lecteurs qui ont quelque
connaissance de l’histoire d'Allemagne à cette époque. M. Adler sup¬
pose toujours cette connaissance et ne procède guère que par allusions
aux événements généraux. C’était d’ailleurs son droit.
Nous regrettons un peu que cette biographie d’un seigneur féodal qui
fut un doux parmi ses contemporains (Welf der Milde) ne soit pas
résumée en quelques pages où l'homme même aurait été plus particu¬
lièrement étudié. C’est là qu’est le véritable intérêt de l’histoire, il ne
faut pas l’oublier K Alfred Leroux.
1. On constate, depuis quelques années, chez les éditeurs allemands, une propen¬
sion toujours plus grande à simplifier leur besogne au détriment du public. 11 y a
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d’hISTOIRB BT DB LITTERATURE
107
i$g. — Cumpagnet de Charles IV» duo de Lorraine et «le Bar» en
Allemagne» en Lorraine et en Franche-Comté ( 1034 * 109 §)« D’après
les documents inédits tirés des archives du ministère des affaires étrangères, par
F. des Robert. Paris, Champion; Nancy, Sidot frères, i 883 . 1 vol. grand in-8
de xn-548 p.
Nous possédions déjà bon nombre d'ouvrages sur la vie du plus célè-
bre de tous les ducs de Lorraine et de Bar. Parmi ces ouvrages, on cite
en première ligne les Mémoires d’un contemporain de Charles IV, le
marquis de Beauveau, et YHistoire de la réunion de la Lorraine à la
France par M. le comte d’Haussontille. M. Des Robert a pensé que
tout n avait pas encore été dit, surtout au point de vue militaire, sur le
fils de François de Lorraine-Vaudemont et de Christine de Salm, et il
a voulu étudier de très près la période de la vie de Charles IV qui s’é¬
tend depuis le i 9r janvier i 63 q jusqu'à la fin de l’année 1637, et qui
forme un des épisodes les plus intéressants de la guerre de Trente-Ans.
«Jamais prince, » dit l'auteur (Introduction, p. ix), « ne prêta plus à
l'étude de l'historien que l’infortuné Charles IV. Soldat intrépide, génie
militaire presque égal à Gustave-Adolphe et supérieur à Gallas et à
Lamboy dont il eut à se plaindre, émule du cardinal-infant, de Picco-
iomini et du prince Thomas de Savoie, moins heureux que Baner, gai
et railleur avec les chefs, familier avec les soldats, indifférent à l’éti¬
quette, homme d’esprit, léger, fourbe, mauvais diplomate, le duc de
Lorraine était grand, adroit à tous les exercices du corps, dur à lui-
même, infatigable. 1
M. D. R. s'est beaucoup servi, pour écrire l’histoire des campagnes
de Charles IV en Allemagne, en Lorraine et en Franche-Comté, des ma¬
nuscrits de la bibliothèque de Nancy laissés par le médecin de son hé¬
ros, Forget, par le confesseur du même héros, le P. Donat, dont l'em¬
ploi n'était certes pas une sinécure, si, comme on doit charitablement le
croire, Yami, le futur mari de Béatrix de Cusance ’, n’oubliait de s’ac-
longtemps déjà que beaucoup d’entre eux dédaignent de faire coudre les livres bro¬
chés. C’est évidemment une dépense inutile. Dans la brochure dont nous venons
d’eatretentr le lecteur, la simplification du travail matériel est poussée encore plus
loin. Les notes sont massées tout à la fin, en quatre parties correspondant aux qua¬
tre chapitres de l’ouvrage, avec sa numérotation propre, ce qui rend les recherches
fort longues. La table des matières fait défaut, d’où résulte quelque peine pour re¬
trouver les chapitres. Enfin, l’emploi des lettres italiques est supprimé, en sorte qu’il
faut une tension d’esprit perpétuelle pour comprendre le texte des remarques où
les titres d’ouvrages abondent en caractères ordinaires. Où s’arrêteront donc ces
honorables commerçants !
1. M. R., comme s’il voulait plaider les circonstances atténuantes, insiste (p. 3 )
sur la merveilleuse beauté de Béatrix; il la proclame « la plus belle personne de son
temps sans contredit. » 11 reproduit le portrait enthousiaste qu’en a donné Guille-
min, portrait où rien n’est omis, ni le majestueux embonpoint , ni le teint vif et
uni, ni les cheveux d*un clair cendré , ni les yeux bleus , bien fendus , ni la bouche
petite et vermeille , ni les dents blanches et bien rangées , ni la gorge , la main et le
bras qui répondaient à la beauté du visage . Guillemin complète un signalement
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REVUE CRITIQUE
108
cuser d’aucun péché, par Guillemin, par le P. Hugo, etc. Tous ces
narrateurs sont lorrains, et, par conséquent, leurs témoignages doivent
être quelque peu suspects, mais l'auteur a pu constater que le fond de
leurs récits est vrai, car il a eu soin de les confronter avec « ceux de la
Galette de France, du Mercure françios, de la Guerre de dix ans
par Girardot de Noseroy, conseiller au parlement de Dôle, et intendant
de l’armée comtale, ainsi qu’avec ceux de Boyvin, son collègue, qui
nous a laissé une relation très exacte du siège de Dôle, dont il fut le
contemporain K » Toutefois, se méfiant de l’impartialité des auteurs
lorrains et comtois, il a fait une étude approfondie, comme il le déclare
(p. x), des Mémoires de Richelieu a et de ses lettres, publiées par Au-
bery et par M. Avenel. Il ajoute ( ibid .) : « Rectifiant les indications
géographiques, erronées, de Dom Calmet, essayant de rétablir exacte¬
ment les dates des faits dont nous nous faisions l'historien, nous avons
voulu remonter aux sources indiscutables eu compulsant les archives
des affaires étrangères. Là, nous avons trouvé des veines inépuisables
d’informations et avons pu redresser les erreurs de Le Vassor, du
P. Griffet et de Dupleix, si souvent inexacts 3 . Nous avons vécu plu¬
sieurs mois dans l’intimité des généraux français, nous avons constaté
leur découragement, nous avons surpris leurs confidences, de même
que leurs joies et leurs espérances. Nous avons dépouillé la correspon¬
dance du maréchal de la Force, du cardinal de la Valette, du duc d’An-
gouléme, de Rohan, du prince de Condé, de Longueville, de la Meille-
raye et de Weimar, et nous avons assisté aux débuts militaires de
Turenne et du grand Condé, qui firent leurs premières armes pendant
les campagnes de 1634 à 1641. »
si séduisant par ce coup de pinceau si expressif : a Ce beau tout renfermait un
cœur tendre, capable de toutes les délicatesses de l'amour. » On comprend, après
cela, que contre tant de charmes, comme s'exprime le naïf chroniqueur, « les
cœurs les moins sensibles avaient peine à se tenir », et que le pape Alexandre VU
lui-même ait dit, comme le rapporte le P. Donat, que la beauté de Béatrix était di¬
gne d’un empire, faciès vero digna imperio.
1. J'ai cette relation sous les yeux. Comme elle est très rare, qu’elle n’est pas in¬
diquée dans le Manuel du libraire et que M. D. R. lui-même la cite trop vaguement,
j’en donne ici le titre complet : Le siège de la ville de Dole, capitale de la Fran¬
che-Comté et son heureuse délivrance par M, Jean Boyvin, conseiller de Sa Majesté
en son souverain parlement de Dôle. Anvers, i 638 , in-8 a .
2. Ce qui ne l’a pas empêché de consulter aussi ceux de Montrésor, de Brienne,
de Rohan, de Bassompierre, de Turenne, de Montglat, de Fontenay-Mareuil, de La
Force, de Goulas, de Campion, etc. On est fâché de trouver dans cette liste (p. xt)
les Mémoires de Pontis , qui n’ont aucune valeur historique, comme, après bien
d’autres critiques, je me suis efforcé de le démontrer jadis. On aime mieux voir
M. D. R. citer a les Mémoires autographes de Fabert, les Campagnes de Fabert et
le Journal des campagnes du cardinal de la Valette, ainsi que Y Histoire d* Alsace ,
par le P. Laguille, Y Histoire de Suède; par Pufendorf, les Lettres de Grotius, les
Lettres et négociations du comte de Feuquières. »
3 . On regrette que M. D. R. confonde dans la même condamnation trois histo¬
riens dont un, le P. Griffet, est si supérieur aux deux autres.
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d’histoire et de littérature
109
M. Des Robert a eu d'autres documents encore à sa disposition : il
a tiré des manuscrits du fonds Lorrain, à la Bibliothèque nationale,
des lettres écrites par Charles IV à la duchesse Nicole, durant la capti¬
vité de cette princesse et l’exil du duc, lettres qui lui ont permis « d'ex¬
poser sous un jour nouveau les rapports existant entre les époux*. »
Les papiers de famille de M. le comte de Ligniville et les archives mu¬
nicipales de Luxeuil a l’ont aidé à éclaircir divers événements restés
obscurs. Grâces à tant de ressources non moins habilement que cons¬
ciencieusement utilisées, il a pu raconter, dans neuf chapitres des plus
nourris, la campagne d’Allemagne de 1634, la campagne de Franche-
Comté de i 635 , la campagne d’Alsace de 1 636 , la défense de la Fran¬
che-Comté par Charles IV en 1 636 et en 1637. On n'analyse pas un
livre aussi plein de choses. Les historiens futurs pourront y puiser à
pleines mains et en toute confiance, soit qu’il s’agisse de l'histoire géné¬
rale delà France de 1634 à 1638, soit qu'il s'agisse de l’histoire particu¬
lière de deux de nos provinces 1 2 3 , soit enfin qu’on ait à s'occuper de la
biographie des généraux mêlés au récit des campagnes de Charles IV,
tels que le duc de Rohan, le maréchal de La Force, le duc de Saxe-
Weimar, le cardinal de La Valette, le maréchal de Gassion, etc. 4 5 . Sur
les hommes, comme sur les événements, les informations recueillies par
M. Des Robert sont d'une exactitude et d’une richesse qui ne laissent
presque rien à désirer 6 . Aussi apprendra-t-on avec une vive joie que l’ex¬
cellent travailleur espère pouvoir continuer plus tard la relation des
campagnes de Charles IV jusqu’à la mort de Louis XIII.
T. de L.
1. Ces rapports avaient bien mal commencé et M. D. R. fournit, d’après les récits
du F. Donat, de singuliers détails sur la première nuit de noces des deux époux
(p. 19, noie 1).
2. « Nous avons fait une longue étude », dit M. D. R. (p. 94, note 2) « des ar¬
chives municipales de Luxeuil, qui contiennent de précieux documents pour l’his¬
toire de la guerre de Trente-Ans. »
3 . L’ouvrage complète aussi bien Y Histoire de la réunion de la Franche-Comté à
la France par M. de Piépape, que Y Histoire de la Lorraine à la France par
M. d’Haussonville.
4. Parmi les quatre-vingt-six pièces justificatives qui occupent les cent dernières
pages du volume (pp. 433-335), on trouve des lettres de la plupart de ces person¬
nages et divers autres documents inédits fort dignes d’attention.
5 . Je n’insisterai ni sur de microscopiques inexactitudes, dont la plus grave est
celle qui(p. i 5 , note 1) fait mourir * à la Bastille » Puylaurens, mort au château de
Vincennes, ni sur des fautes d’impression, comme celles qui ont transformé l'auteur
des Annales des Provinces-Unies, Basnage, en Busnaye (p. 32 3 ), l’auteur delà Vie
du vénérable Vincent de Paul , Abelly, en Aurelly (pp. 367-369), etc. On pourrait
encore relever quelques phrases qui ne sont pas assez dignes du style historique, par
exemple, la première méme(p. 1) : c Charles IV, n’étant plus qu’un fantôme et qu’un
squelette de prince, etc. » et cette autre (p. 47) : « Charles IV tâta le pouls aux
bourgeois de Strasbourg. »
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IIO
RBVÜE CRITIQUB
160. — Choix de textes pour servir à l’étude des Institutions de Is
France» conformément au programme Je la classe de rhétorique, par M. F.
Corréard. Paris, Delalain frères, vn-362 p., in-12.
L’idée de M. Corréard est excellente; il est certain qu’un recueil
bien fait de documents utiles à l’étude des institutions de la France
rendrait de grands services aux élèves et aux professeurs des lycées
et collèges. Par malheur, il suffit de parcourir la liste des ouvrages à
consulter, placée en tête de ce petit volume, pour reconnaître que M. C.
était bien mal préparé pour mener à bien une semblable entreprise. On
se demande vainement à quoi peuvent servir pour l'étude de nos insti¬
tutions au xvii* et au xviii® siècle des ouvrages comme YHistoire diplo¬
matique, de M. de Barrai, la Correspondance secrète de Louis XV, la
Société française au xvn« siècle, de M. Cousin, les huit volumes de
M. Desnoiresterres sur Voltaire, les Journaux de Barbier, Buvat, Ma¬
rais, les Mémoires de M m ® de Motteville, de Lenet, de Dangeau, de Luy-
nes, VEssai sur l'organisation judiciaire, de M. Pardessus, qui s’arrête
au xvi® siècle, les Causeries du lundi et le Port-Royal de Sainte-Beuve,
etc. On pourrait supprimer sans inconvénient la bonne moitié des li¬
vres portés sur la liste dressée par M. C.; car, dans beaucoup d'entre
eux, on ne trouve presque rien qui puisse servir plus spécialement à l'é¬
tude des institutions. Par contre, on peut reprocher à M. C. des omis¬
sions et même des erreurs graves qui font croire qu'il ne connaît pas très
bien les livres qu’il faudrait consulter sur le sujet qu’il traite. Par exem¬
ple, M. C. attribue à M. Rodolphe Dareste l’histoire de l’administra¬
tion en France qui appartient à son frère Cléophas, mort récemment,
et il omet l'excellente étude sur la justice administrative en France pu¬
bliée en 1862 par M. R. Dareste. M. C. cite les Institutions chrétiennes
de Fleury, que je ne connais pas, du moins sous ce titre, pas plus que
ne les connaissent Darragon, Dupin et les autres bibliographes, et qui
d'ailleurs ne doivent pas être très utiles pour les institutions de la
France, tandis que M. C. omet l’ouvrage capital pour son sujet, le
Droit public de la France, édité en 1769 en 2 vol. in-12 par Darra¬
gon; bien mieux, M. C. indique les Lettres persanes et il oublie VEs-
prit des lois. On cherche vainement dans cette liste si longue les ouvra¬
ges les plus importants pour l'étude des institutions de la France
comme le Répertoire de jurisprudence de Guy ot (17 vol. in-4 0 Paris,
1783 et s.) Les maximes du droit public français, de Mey, Maultrot et
Aubry. (Amsterdam, 2 e édit. 1775, 2 vol. in-4 0 .), I e Traité des offices
de Guyotet Merlin, (Paris, 1786, 4 vol. in-4 0 ), l es Mémoires sur les
impositions de Moreau de Beaumont (Paris, 1764, 4 vol. in-4 0 ), etc -
En outre, M. C. donne des indications bibliographiques tout à fait in¬
suffisantes et le plus souvent il omet la date de publication. Mais ce
qui est encore plus grave; M. C. se borne à donner le titre du volume
sans dire en quelques mots son contenu et sa valeur. Des bibliographies
ainsi composées ne peuvent rendre que de faibles services et elles prou-
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o’tlISTOIRK RT DB LITTERATURE
III
vent parfois l'inexpérience de leurs auteurs, qui, semble-t-il, se conten¬
tent de relever les titres des ouvrages sur des catalogues ou sur les dos
des volumes sans prendre la peine de les ouvrir et de les parcourir.
Ce que Ton vient de lire suffirait, à mon sens, pour permettre au lec¬
teur de conjecturer ce qu’il faut penser de l’ouvrage de M. C. Des
recueils de textes ne valent guère que par le soin apporté à la recherche
et au choix des documents. Or, M. C. paraît avoir manqué des connais-
sanceset des instruments nécessaires pour bien faire cette recherche. Il
en résulte que M. C. n’a pas mis beaucoup de rigueur dans le choix des
textes cités et qu’il a pris surtout ceux qui se trouvaient sous sa main.
Si l’on examine un peu en détail les documents relatifs aux règnes de
Louis XV et de Louis XVI, on se demande pourquoi M. C. a mis sur
le titre de son ouvrage « textes pour servir à l’étude des institutions de
la France » ; ils peuvent servir beaucoup mieux à l'histoire générale du
royaume. Sur quatre extraits concernant la régence, trois sont tirés des
Mémoires de Saint-Simon et le quatrième du Siècle de Louis XV , de
Voltaire; certes, le récit de la fameuse séance du Parlement pour l’orga¬
nisation de la régence est plus agréable à lire dans Saint-Simon que
dans le procès-verbal tiré des registres du conseil secret ; mais le docu¬
ment officiel devait se trouver en note, car il rectifie et complète le ré¬
cit brillant du fougueux historien ; il en est de même pour la polysynodie
et pour le système de Law. Si M. C. eût voulu justifier son titre et ne
pas faire un livre analogue et fort inférieur aux Lectures historiques de
M. Raffy, il aurait dû donner plus de textes véritables, plus de pièces
officielles; en outre, quand il en citait, il aurait dû mieux les choisir et
supprimer, par exemple, l’ordonnance de fermeture du cimetière Saint-
Médard et les arrêts contre les jésuites et les remplacer par le fameux
édit de 1764 sur la libération des dettes de l’Etat et par les règlements
sur l’organisation municipale. M. C. a trop sacrifié l'utile à l’agréable,
les choses sérieuses à l’anecdote; il amuse plus qu’il n'instruit.
C’est un ouvrage à refaire et il faut souhaiter que, soit que M. Cor-
réard donne bientôt une seconde édition, soit qu’un de ses collègues
suive son exemple d'une manière plus heureuse, les élèves et les pro¬
fesseurs de l'enseignement secondaire, voire de l’enseignement supérieur,
puissent avoir bientôt entre les mains les recueils des textes qui leur
manquent encore aujourd'hui pour l’étude sérieuse des institutions de
la France.
Jules Flammermont.
161. — C. Humbert, Deutschlanda Urtell übor Molière. Oppeln, Maske,
1881. In-8, xxu, 206 p.
Tandis que nos tragiques du xvn® siècle ont été en Allemagne, depuis
Lessing surtout, l’objet des attaques les plus vives et parfois les plus
injustes, — la critique allemande contemporaine l'a elle-même reconnu;
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11 2
RKVUR CRITIQUE
— jusqu’à A. G. Schlegel, Molière, au contraire, n’a presque point ren¬
contré de contradicteurs de l’autre côté du Rhin. Sans doute les choses
ont changé depuis le commencement du siècle, mais les admirateurs ou
les défenseurs n’ont pas alors non plus manqué à notre grand comique
et parmi, ces derniers, il faut placer au premier rang M. C. Humbert.
Déjà en 1869, dans une étude à bon droit remarquée, Shakespeare, Mo¬
lière et la critique allemande , rendant à Molière une justice qu’il n’é¬
tait plus guère accoutumé à rencontrer en Allemagne, M. C. H. n’a¬
vait pas hésité — l’ombre de A. G. Schlegel nedut-elle pas en frémir ? —
non-seulement à le mettre comme poète sur le même rang que Shakes¬
peare, mais à le placer, comme comique, au-dessus du dramaturge
anglais. Il y a cinq ans, faisant un pas de plus, dans son livre intitulé
Jugement(s) des Anglais sur Molière, il montra de quelle estime et de
quelle admiration ininterrompue notre grand poète avait joui dans la
patrie de Shakespeare; c’était montrer en même temps avec combien
peu de raison, pour expliquer la sévérité des jugements portés en Alle¬
magne sur Molière, on avait invoqué une prétendue opposition entre le
goût des peuples germaniques et celui des nations romanes. Le(s) juge¬
ment (s) des Allemands sur Molière que M. C. H. publie aujourd'hui
complètent la démonstration, et le concert d’éloges accordés à Molière
pendant tant d’années de l’autre côté du Rhin prouve que si, après
l’avoir admiré sans réserve, on l’a attaqué en Allemagne, cela ne tient
pas à une différence originelle et nécessaire entre le goût allemand et le
goût français, mais à un changement de la mode, à un point de vue
particulier ou nouveau de la critique. M. C. H. se propose de faire
l’histoire ou plutôt le relevé des jugements portés sur Molière en Alle¬
magne — car c’est presque exclusivement à les enregistrer qu’il se borne,
excepté « quand, le cœur lui débordant, » il ne peut résister au iésir de
prendre pour un instant la parole, — depuis le moment où Molière fut
connu de l’autre côté du Rhin, c’est-à-dire depuis 1670, date de la pre¬
mière traduction en allemand de trois de ses pièces, jusqu’à nos jours.
Cette histoire comprendra deux parties ; la première, celle de l’an¬
cien régime, comme l’auteur l’appelle, qui va de 1670, à « l’avénement
de A. G. Schlegel » en 1808, est la seule qu’il nous donne aujour¬
d’hui ; il l’a divisée d’ailleurs elle-même en deux périodes ; la première,
qui comprend un siècle, de 1670 à 1770, est l’époque d'admiration; la
seconde, qui renferme les trente-huit années suivantes (1770-1808), est,
d’après lui, l'époque d’imitation, imitation qui n’exclut pas d’ailleurs
l’admiration désintéressée.
C’est par un nom de princesse, celui de Charlotte Elisabeth, que
s’ouvre la longue liste des admirateurs allemands de Molière pendant
cet espace de cent trente-huit années ; c'est par un nom de roi, celui de
frrédéric-Guillaume II de Prusse, que M. C. H. la termine, montrant
par là quel rôle les préoccupations politiques jouent aujourd’hui en
Allemagne, même dans le domaine de la critique la plus indépendante.
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D’HISTOIRE BT DR LITTERATURE
I l 3
Frédéric-Guillaume II avait-il donc le droit de figurer au nombre des
admirateurs de notre grand comique, par cela que, sur son lit de mort,
témoin des discussions des médecins sur la nature de sa maladie, il aurait
dit, en les entendant ainsi se quereller, qu’il « voyait bien maintenant
avec quel art Molière avait suies peindre »? Heureusement Molière a eu
des admirateurs plus incontestables de son talent en Allemagne et il faut
ranger parmi eux presque tous les grands écrivains du siècle dernier.
M. C. H. n’a compté, au contraire, que trois adversaires de Molière à
cette époque ; le landgrave de Hesse-Cassel, qui n’a guère plus de droit à
être regardé comme un adversaire, que Frédéric-Guillaume II à passer
pour un admirateur de Molière; Gœze, qui ne l’attaqua que comme
auteur dramatique, mais tout en rendant justice à son talent de poète;
enfin Lenz qui, dans son admiration enthousiaste pour Shakespeare,
crut devoir rabaisser Molière qu’il ne connaissait pas. C’est peu, on le
voit, et cela paraît moins encore, quand on passe en revue les noms des
admirateurs du poète français, depuis Morhof et Thomasius, Hagedorn
et Gottsched, Gellert, Rabener et Elie Schlegel, Mendelssohn et Mœser,
Lessing et Frédéric II, jusqu’à Wieland, Engel, Mylius, Eschenburg,
Weckherlin, Hamann, Herder, Schiller, etc. Goethe n’est que réservé
sans doute pour figurer dans la seconde partie. Ce n’est pas que tous ces
écrivains aient été des admirateurs également incontestés ou enthousias¬
tes de Molière; ainsi la prédilection de Hamann et de Herder pour la
farce n’en fait pas nécessairement des partisans de notre grand comique;
les éloges que Schiller et Zschokke aussi lui ont donnés n’ont point été
sans réserve ; mais même en les exceptant, la liste des noms qui restent
est bien encore assez longue et, quand on l’a parcourue, on est tenté de
répéter, en le modifiant légèrement, ce mot d’une lettre écrite en 1746
par M Ua Poisson dans le Mercure (mai); « Je ne croyais pas que
Molière eût été aussi connu et aussi chéri en Allemagne. »
Tous les juguments rapportés par M. C. H., sans doute, sont loin
d’offrir un bien vif intérêt ; quelques-uns, cela est trop évident et c’est le
défaut de son livre, ne sont là que pour faire nombre, mais combien
d’autres aussi méritent d’être remarqués! Parmi ceux-ci je signalerai
en particulier l'appréciation de Bouterweck, si juste, si pleine d’aperçus
ingénieux et nouveaux, et surtout l’étude, le mot n’est pas trop fort, de
Jacobs; après un siècle bientôt elle n’a rien perdu de son originalité de
vues et peut prendre place à côté de ce qu'on a écrit même en France de
plus profond et de plus juste sur le grand poète delà cour de Louis XIV.
De pareils extraits suffisent déjà pour donner un grand prix au nouvel
ouvrage de M. C. Humbert; la conscience avec laquelle il l’a composé
en assurera encore le succès et fait souhaiter qu’il nous en donne bientôt
la suite.
C. J.
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”4
REVÜE CRITIQDR
CHRONIQUE
FRANCE. — M. James Condamin vient de réunir en un beau volume, sous ce
titre Croquis artistiques et littéraires (Leroux), une dizaine d’articles publiés pour
la plupart dans les Lettres chrétiennes. Le soin avec lequel tous ces articles sont
écrits, et une réelle unité d’inspiration toujours sensible à travers la diversité des
sujets, rendaient entièrement légitime chez M. Condamin l'ambition si naturelle à
un critique de lier sa gerbe et de recueillir ses travaux dispersés. Dans le champ
des littératures étrangères, l’auteur se promène dS l’Américain Longfellow au Russe
Joukovsky; Goethe l’attire et l’arrête deux fois; mais sa compétence professionnelle
en matière de littérature classique allemande ne l’empêche pas de faire dans ses
goûts et dans ses études une part également belle à la France, à la Roumanie, etc.,
et ce qui charme le lecteur de ces pages, c’est qu’on y sent un esprit, un cœur ou¬
verts libéralement à tout ce qui est beau, en même temps qu’aucun pédantisme n’y
rappelle le professeur et l’homme de métier. Les belles-lettres d’ailleurs ne prennent
pas toute la place; un bon tiers du volume est consacré à d’autres sujets, à la
musique des Tsiganes, aux grottes d’Adelsberg, au pavillon croate de l’exposition
austro-hongroise de Trieste, aux courses de taureaux de Saint-Sébastien. Dans ces
études extra-littéraires, comme dans les autres, le même amour du beau sous toutes
ses formes échauffe l’âme de l’écrivain et continue de communiquer à son style
certaines qualités de délicatesse et de noblesse. En somme, si la publication de
M. James Condamin n’est pas un livre à proprement parler, c’est un recueil bien
fait, élégant, vraiment distingué, où chaque chose a la mesure convenable, et
où le luxe même de la forme, loin de choquer comme une faute de proportion,
semble en juste et parfaite harmonie avec le choix exquis des matières. — P. S.
— M. Clermont-Ganneau vient de publiera la librairie J. Baer, un mémoire extrait
de la Revue archéologique , et intitulé Epigraphes hébraïques et grecques sur des
ossuaires juifs inédits . Ce travail, accompagné d’une grande planche et de gravures
dans le texte, comprend un groupe de cinquante-deux monuments reproduits en
fac-similé, transcrits et traduits. 11 fait suite à trois mémoires sur le même sujet
publiés antérieurement par l’auteur dans la Revue archéologique r , et contient de
précieux documents pour l’épigraphie hébraïque si pauvre jusqu’ici. Cette nouvelle
série, impatiemment attendue par les hébralsants, provient des recherches entre¬
prises en Palestine par l’auteur, en 1874. Un autre groupe de monuments analogues,
recueillis par M. Clermont-Ganneau au cours de sa dernière mission en Syrie (18S1),
paraîtra dans le volume des Archives des missions scientifiques et littéraires actuel¬
lement sous presse.
—■ Le tome troisième des Œuvres complètes de M. de Longpérier, publié par
M. G. Schi.umberger, vient de paraître à la librairie Leroux. Ce troisième volume
comprend la seconde partie des Antiquités grecques , romaines et gauloises, environ
quatre-vingt-dix mémoires ou articles écrits entre 1862 et 1883.
— M. Victor Hugo vient d’adresser au président du conseil municipal la lettre
suivante : <c Monsieur le président, il n’est pas possible que Paris, la ville de l’avenir,
renonce à la preuve vivante qu’elle a été la ville du passé. Le passé amène l’avenir.
Les Arènes sont l’antique marque de la grande ville. Elles sont un monument uni-
1. I. Nouveaux ossuaires juifs avec inscriptions grecques et hébraïques. — II. Ossuaire juif
provenant d'Alexandrie. — III. Ossuaire juif de Joseph, fils de Jean.
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d’histoire et de littérature I 1 5
que. Le conseil municipal qui les détruirait se détruirait en quelque sorte lui-même.
Conservez les Arènes de Lutèce. Conservez-les à tout prix. Vous ferez une action
utile, et, ce qui vaut mieux, vous donnerez un grand exemple. « — M. Henri Martin,
sénateur, membre de l’Institut, président du comité formé pour la conservation des
Arènes, a, de son côté, adressé au président du conseil municipal la lettre qui suit :
a Monsieur le président, au moment où le sort des Arènes va se décider devant le
conseil municipal, le comité formé en vue de travailler au salut du plus ancien mo¬
nument de Paris vous prie de vouloir bien faire entendre son dernier appel à ceux
qui peuvent assurer à la postérité la conservation de ces grands débris. Aux décou¬
vertes espérées, d’autres sont venues se joindre : une nouvelle entrée de ce qui fut à
la fois un amphithéâtre et un théâtre, et un aqueduc bien conservé ont achevé d’at¬
tester que les Arènes ont appartenu au temps du plus bel appareil architectural, à
une époque très antérieure aux Thermes de Julien. La continuation des fouilles ajou¬
terait certainement à ces précieux restes et leur disparition causerait aujourd’hui des
regrets plus profonds encore qu’à l’époque où l’on perdit l’occasion d’acquérir l’au¬
tre partie de l’amphithéâtre, aujourd’hui recouverte mais non détruite. Ce serait un
triste souvenir que notre temps léguerait à l’histoire. Le conseil municipal ne vou¬
dra pas que i 883 renouvelle 1870, » — Enfin, M. Victor Duruy a adressé à M. Aris¬
tide Reÿ, conseiller municipal, une lettre qui plaide également pour la conservation
des Arènes : « Monsieur, vous voulez bien me demander mon sentiment au sujet
de la rue Monge. Je pense que ni l’Etat ni la ville ne peuvent les abandonner et
la science les réclame. Je n’insisterai pas sur l’intérêt archéologique que ces ruines
présentent. Mes confrères de l’Académie des inscriptions ne m'ont laissé rien à dire
sur cette question. J’ajouterai seulement qu’il ne faut pas sourire de l’amour des sa¬
vants pour les vieilles pierres. La contemplation des ruines inspirait autrefois de
mélancoliques pensées et de poétiques développements sur la fragilité des grandeurs
de ce monde; aujourd’hui leur étude éveille des souvenirs, et c’est de souvenirs qu’est
faite la plus grande, la plus noble des forces, le patriotisme. J'avoue qu'en songeant
aux ruines magnifiques de Nîmes, d’Arles, ou d’Orange, celles de la rue Monge font
pauvre figure. Mais au milieu de ces pierres qui ressemblent à tant d’autres, je vois
le lieu où le cœur du vieux Paris a battu pour la première fois ; c*est-là qu’étaient
célébrées ses fêtes et ses solennités ; là que ses magistrats venaient s’asseoir sur des
degrés où on lit encore les premières lettres du nom d’entre eux, là, enfin que son
peuple a du souvent délibérer. Lutèce avait, comme toutes les cités des premiers
siècles de l’empire romain, de grandes libertés municipales; sa vie était active, son
commerce florissant. l.e Paris moderne ne garde-t-il pas dans ses armes, le navire
delà puissante corporation des Na ut ce pari s ienses? souvenir qu’on prodigue sur les
murailles et qu’il faudrait avoir dans le cœur. Aux premières pages de notre histoire
nationale, nous lisons que quelques-uns des plus vaillants parmi les Césars romains
qui ont fait reculer l’invasion germanique avaient résidé à Lutèce. Nous avons même
gardé un débris de leur palais impérial, auquel la reconnaissance populaire a donné
le nom du vainqueur des Alamans à la grande bataille de Strasbourg. C’était justice,
mais ce serait justice aussi de ne pas détruire ce seul débris qui subsiste de la ville
que Julien nommait « sa chère Lutèce ». Les Thermes de Julien rappellent, après
tout, une domination étrangère; les Arènes de la rue Monge rappellent l’enfance
municipale de notre grande cité. Il n'est pas une ville de France qui ne tienne à hon¬
neur de sauver les monuments même les plus informes de sa vieille histoire. C’est
le sentiment pieux de la mère qui, ayant perdu son enfant, en garde le berceau. Je
demande que le Paris magnifique d’aujourd’hui n’oublie pas, comme un mauvais ri¬
che, la pauvre Lutèce d’autrefois. » — Ajoutons que dans une récente séance du
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REVUE CRITIQUE
I 16
comité des Arènes, tenue à PHôtel-de-Ville, on a entendu le rapport de la commis¬
sion chargée de délimiter, d’accord avec la compagnie propriétaire, les deux portions
du terrain dans lequel sont compris les restes des Arènes. L’une de ces portions se¬
rait acquise par le conseil, l’autre par le comité. La commission d’organisation delà
loterie a soumis son projet au comité. C’est un de nos grands établissements de cré¬
dit qui sera chargé de détenir et d’offrir les billets au public et aux marchands. Sur
1,200,000 francs de capital, le comité pourra donner environ 5 oo,ooo francs de lots,
proportion énorme qui n’a jamais été atteinte. Le comité attend, pour mettre à exé¬
cution son projet, que le conseil municipal ait traité avec la compagnie propriétaire
pour la portion de territoire qui lui est attribuée l .
— Le Journal officiel a publié un décret rendu après avis du conseil supérieur de
l’instruction publique et autorisant l’ouverture, dans les facultés, de cours libres
par des professeurs n’appartenant pas au personnel de ces facultés. Aux termes de
ce décret : Tout docteur ès-lettres ou ès-sciences peut être autorisé à faire, dans les
facultés de l’Etat, des cours libres correspondant à l’ordre d’études pour lequel il a
été reçu docteur. Cette autorisation est donnée par le ministre, sur la proposition
ou après avis de la faculté près de laquelle les cours seront ouverts*et sur un rap¬
port spécial du recteur. Sont assimilés aux docteurs les professeurs des divers éta¬
blissements d’enseignement supérieur de l’Etat, les membres et les correspondants
de l’Institut. La même autorisation peut être accordée, après avis conforme de la
faculté, à des personnes non pourvues du titre de docteur, qui justifient d’études
spéciales sur les matières devant faire l’objet de leur enseignement. Dans l’un et
l’autre cas, l’autorisation ne peut être accordée pour plus d’une année. Elle peut être
renouvelée. Elle peut toujours être retirée par le ministre, après avis ou sur la proposi¬
tion de la faculté. Les affiches annonçant les cours libres ne peuvent être publiées que
parles soins de la faculté. Les cours libres sont assimilés, au point de vue de la surveil¬
lance et de la discipline, aux cours de la faculté. Les cours libres sont publics ou privés.
L’admission aux cours libres publics est subordonnée aux mêmes conditions que l'ad¬
mission aux cours de la faculté. Ne sont admis aux cours privés que les auditeurs agréés
par le professeur. Toutefois l’entrée des cours libres, même privés, appartient à tout
membre de la faculté et de l’administration académique. Les dépenses auxquelles
donnent lieu les cours libres sont à la charge du professeur, sous l’approbation du
recteur. L’autorisation de faire un cours libre ne crée aucun droit à l’emploi des
instruments, appareils, etc., ni à l’emploi du personnel de la faculté. Les cours pri¬
vés peuvent donner lieu, au profit du professeur, à la perception d’une rétribution
payée par les auditeurs. Les cours libres peuvent être annuels, semestriels ou tri¬
mestriels. Ils doivent comprendre au moins dix leçons par trimestre. Les cours li¬
bres, à la faculté de médecine de Paris, restent soumis aux prescriptions de l’arrêté
du 9 février 1881. Ce décret pourra être rendu applicable aux facultés de droit sur
leur demande, par arrêté ministériel. Un arrêté ministériel, annexé au décret que
nous venons d’analyser, règle, ainsi qu’il suit, les formalités à remplir pour obtenir
l’autorisation d’ouvrir des cours libres dans les facultés de l’Etat : La demande à
l’effet d'ouvrir des cours libres dans les facultés de l’Etat est adressée au doyen.
Cette demande fait connaître : i° Les grades, les titres du candidat et les ouvrages
qu’il a publiés; 2° les fonctions qu’il a exercées; 3 ° le programme détaillé du cours
qu’il veut professer. Toute demande doit être déposée avant le i ef juillet de chaque
année pour les cours qui seront faits dans le premier semestre, et avant le i" février
i. Le conseil municipal vient de décider que la ville de Paris ferait l’acquisition de 7000 mètres
de terrain.
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d’histoire et de littérature
117
pour les cours qui seront faits dans le deuxième semestre. Procès-verbal de la dé¬
libération de la faculté ou de l’école est envoyé au recteur, qui en fait rapport au
ministre.
— M. Edouard Fleury, frère du conservateur du Musée de Sèvres, M. Champ-
fleury, a légué au Cabinet des Estampes de la Bibliothèque nationale 17,000 dessins,
gravures, lithographies, portraits, crayons, exclusivement relatifs aux monuments
du département de l’Aisne et aux hommes remarquables de cette contrée. Ce sont
les documents dont M. Edouard Fleury s’est servi pour ses diverses publications ar¬
chéologiques et plus particulièrement pour son important ouvrage des Antiquités et
monuments du département de VAisne, paru en quatre volumes in-8*.
— M. le baron Ch. Davillier a légué : au Musée du Louvre, tous ses objets d'art,
orfèvrerie, ivoire, tableaux, tapisseries, meubles; au Musée de Sèvres, sa collection
de faïences et de porcelaines qui comprend des pièces de la plus grande valeur; à la
Bibliothèque nationale, ses livres et manuscrits.
— On annonce la mort de M. Hermile Reynald, doyen de la Faculté des lettres
d’Aix, emporté, à l’âge de 55 ans, par une maladie qui le tenait, depuis près de trois
mois, éloigné de sa chaire. Entré à l’Ecole normale en 1849, P^ us tard élève de l’E¬
cole d’Athènes, après avoir professé dans plusieurs lycées, M. Reynald fut successi¬
vement suppléant de littérature étrangère à la Faculté des lettres de Poitiers et à celle
de Caen. En 1866, il fut nommé professeur de littérature française à la Faculté des
lettres d’Aix, chaire qu’il échangea, dix ans plus tard, pour celle d’histoire. M. Rey¬
nald avait fait, pour le doctorat ès-lettres, une thèse sur Johnson. En 1862, il inau¬
gura ses travaux historiques par une Histoire de la Restauration que devaient
suivre en 1874 une Histoire contemporaine de VAngleterre et une Histoire con¬
temporaine de VEspagne. Presque en même temps il avait fait paraître un volume
d’études sur Mirabeau , couronné par l’Académie française. Il y a à peine deux mois,
il avait publié deux volumes intitulés Louis XIV et Guillaume III, et renfermant
de nombreux documents inédits relatifs à la succession d’Espagne. 11 avait collaboré
au Temps, à la Revue historique et à la Revue politique et littéraire.
ALSACE. — 83 o étudiants se sont fait inscrire pendant le semestre d'été à l’Uni¬
versité de Strasbourg : théologie, 65 ; droit et économie politique, 200; médecine,
216; lettres, 171 ; sciences, 178. 277 sont originaires de l’Alsace-Lorraine; 724, de
l’Allemagne; 84, d’autres Etais européens; 24, de pays en dehors de l’Europe.
— Les dernières statues qui doivent décorer la façade du bâtiment principal de
l’Université de Strasbourg viennent d’être mises en place. On a installé, dans les
niches qui se trouvent sur les deux côtés de la porte d’entrée, les statues représen¬
tant, l’une Strasbourg (Argentina) et l’autre l’Allemagne ( Germania ). On a égale¬
ment placé dans les niches rondes pratiquées entre les colonnes qui supportent le
frontispice les bustes en bronze de Solon, d’Aristote, d’Hippocrate, d’Archimède et
de l’apôtre saint Paul. Deux plaques en bronze, longues de 1 mètre 5 o, sur 1 mè¬
tre de haut, sont encastrées dans la façade; l’une, à gauche des bustes, représente,
par des figures en relief, les progrès de la science et des arts dans l’antiquité ; l’au¬
tre, sur la gauche, les progrès des sciences et des arts dans les temps modernes.
Statues et bustes ont été exécutés d’après les modèles fournis par M. Moest, sculp¬
teur à Carlsruhe. Dans le courant du mois prochain, le bâtiment principal de l’U¬
niversité sera débarrassé du reste des échafaudages qui les cachent encore à la
vue.
ALLEMAGNE. — Parmi de nouveaux ouvrages qui doivent prochainement paraî¬
tre en Allemagne, nous signalons les suivants : chez Ackermann, à Munich : Die
Kriegsschule \u München in den ersten 25 Jahren ihres Bestehens , par M. E. von
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REVUE CRITIQUE
Il8
Schellhorn ; chez Bruns, à Minden : une traduction allemande du récent ouvrage
de M. le duc de Broglie, Friedrich II und Maria Theresia nach neuen archivali-
schen Quellen , 1740-/742 ; chez Ehvert, à Marbourg; der Gebrauch von ojtoç
in der Ilias , par M. Ph. Braun; Die Correspondent Cicei'o's in den Jahren 44 uni
43 , par M. Ruete; Friedrich I und das Wormser Concordat , par M. Wolfram;
chez Kœbner, à Breslau : une édition d’un ancien poème italien, Y Intelligen^a, par
M. P. Gellrich ; chez Mayer, à Cologne : Die Santa Fe — und Südpacificbahn in
Nordamerika , par M. Rob. von Schlagintweit ; chez Veit, à Leipzig ; un discours
de M. Ferd. von Richthofen : Au/gabenund Methoden der heutigen Géographie .
— On annonce la mort, à l’âge de trente ans, de M. Théodore Wissmann, bien
connu par ses travaux de philologie anglaise et surtout par son édition du King
Horn et son étude sur ce poème.
— L’empereur Guillaume a donné une somme de 10,000 mark (12^00 francs)
pour la continuation des fouilles opérées près de Trève6, où l’on découvre de nom¬
breuses antiquités romaines.
— On vient d’apprendre que Leipzig a publié, l’année dernière, 2,628 volumes, et
Berlin, seulement 2,246. Leipzig a pris sa revanche, car, en 1881, cette ville avait
publié 34 volumes de moins que Berlin {Berlin/ 2432, et Leipzig, 2464). Il paraît à
Berlin plus d’ouvrage de droit et de politique qu’à Leipzig.
BELGIQUE. — Le cabinet numismatique de feu M. L. de Coster est en vente;
il se compose de plus de 1,200 jetons historiques en or et argent. Le libraire
Olivier, de Bruxelles, chargé de la vente, offre d’entrer en négociations, soit avec
un musée, soit avec un amateur, pour la cession de la collection complète, et ce, à
des conditions, paraît-il, fort acceptables. Le même libraire a publié la Description
de la collection importante de M. de Coster (Description du cabinet de jetons histo¬
riques d'or et d'argent frappés dans les Pays-Bas à partir du milieu du xv 9 siècle
jusqu'à nos jours . 4 fr.)
DANEMARK. — Le cinquième congrès des américanistes se réunira cette an¬
née à Copenhague, du 21 au 24 août; le comité d'organisation est présidé par
M. Worsaae.
— ÉTATS-UNIS. — M. John Russell Young, ministre des Etats-Unis à Peking,
rassemble, dit-on, des matériaux pour une Histoire de la Chine .
GRANDE-BRETAGNE. — La traduction de Manou, par M. G. Bùhler (collection
des « Sacred books of the East ») est sous presse.
— M. Daniel Silvan Evans, l’auteur du grand English and welsh Dictionary (2 vols.
i 852 -i 858 ) doit faire paraître chez Hugues et fils, à Wrexham, un Dictionary’ of
the welsh language .
— M. W. de Gray Birch, du British Muséum, va publier, en trente-deux parties
qui paraîtront par intervalles de deux mois, un Cartularium saxonicum ou « col¬
lection de documents relatifs à l’histoire des Anglo-Saxons ». Depuis longtemps on
désirait une édition nouvelle et complète du Codex diplomaticus aevi saxonici de
John Kemble, publié de i 83 q à 1848 par la Société historique anglaise, et après ce
Codex , avaient paru le Diplomatarium angl'icum aevi saxonici , de Thorpe (i 865 );
les Facsimiles of anglo-saxon manuscripts , de J. Cameron (1878); les quatre volu¬
mes de Facsimiles of ancicnl charters in the British Muséum , de M. E. A. Bound
(1873-78); les « Councils and ccclesiastical documents relating to Grcat Britain and
Ireland », de MM. A. W. Iladdan et Stubbes (1869-1873), et beaucoup d’autres
publications, comme les Transactions de diverses sociétés. M. Birch se propose de
classer tous ces documents dans l’ordre chronologique, en faisant précéder chaque
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d'histoire et or littérature 119
texte d’une courte notice et après collation avec les plus anciens et meilleurs manus-
crits; les variantes seront placées au bas des pages.
— La librairie Murray annonce la prochaine publication de : i* Cinq essais sur
a The origins of language and religion », par le chanoine Cook; 2 0 des Mémoires
et Correspondances de J . W . Croker 9 par M. L. Jenning; 3 ° d’un ouvrage de M. F.
L. James qui a passé trois hivers dans le Soudan « The Soudan or sport among
mlie tribes ofthe Basé country »; 4 0 d’un Manuel, en deux volumes, de l’histoire
de l’Eglise jusqu’à la Réforme, par M. Philip Smith.
— Au mois de septembre paraîtra une Histoire de Southampton par M. J. Silves-
ter Davies (Southampton, Gilbert).
HOLLANDE. — Sous le titre Bibliographische Mededeelingen (Leide, Brill. in-8°
xiv et 217 pp.), M. Christian Sepp a publié des mélanges historiques, parmi lesquels
on remarquera l’étude consacrée à Y Institution de Calvin et le travail sur Marie de
Hongrie, sœur de Charles-Quint; dans ce dernier mémoire, M. Sepp retrace surtout
les relations de Marie de Hongrie avec les protestants et complète ce qu’ont dit sur le
sujet MM. Henne et Juste, le premier dans son Histoire de Charles-Quint, le second
dans son Histoire de la reine Marie de Hongrie.
ITALIE. — Le t2 juin est mort, d’une chute de voiture, M. Angelo CaneLLo, pro¬
fesseur de langue et de littérature latines du moyen-âge à l'Université de Padoue. Il
avait 35 ans. C’était un élève de Diez et d’Ascoli; sa mort est regrettée de tous les
romanistes. Il avait publié : a II prof Dieq e la filologie romança uel nostro se-
co/o»; a Tre studi neo-latini »; a Del metodo nello studio délie lingue romande »;
« Sulla storia délia lingua italiana »; h II vocalismo tonico italiano »; a Gli allo-
tropi italiani »; « Saggi di critica letteraria »; a Fiorita di ly riche provenu ali »
(traduction en vers italiens); « Lctteratura e Darvinismo », « La vita e le opéré del
trovatore Arnoldo Daniello »; et son plus important ouvrage « Storia letteraria ita¬
liana del cinque cento ».
SUISSE. — L’Université de Zurich célébrera, cette année, le cinquantième anniver¬
saire de sa fondation.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 27 juillet i 883 .
M. Bréal donne une seconde lecture de son mémoire sur les termes qui expriment
la loi et le droit en latin.
M. Pavct de Courteille lit une note de M. le baron de Witte intitulée : Sur mt
groupe de bronze représentant Hermès et Dionysos . Le groupe dont il s’agit a été
trouvé en 1866, aux environs de Roye (Somme); il appartient aujourd’hui à M. de
Witte. C’est un petit bronze, de travail grec, remarquable à la fois par le sujet et par
l’art avec lequel il a été traité. L’artiste semble s’étre inspiré du beau groupe de
marbre d’Olympie, découvert en 1877 dans les fouilles dirigées par M. Hirscnfeld,
et attribué, par les uns, à Praxitèle, par les autres, a Céphisodote.
M. Ravaisson signale l’existence, au musée du Louvre, d’un petit bronze analogue
à celui que décrit M. de Witte.
M. Saladin. lit en son nom et au nom de. M. R. Cagnat, qu’il a accompagné cette
année en Tunisie comme architecte, une note sur les principales ruines que ces
missionnaires ont explorées. Il insiste surtout sur quatre points : les ruines de
Lamta (Leptis Parva ), situées sur la côte, entre Monastir et Mahedia; celles de
Héitha, à 117 kilomètres au sud-ouest de Kairouan ; celles de Kasrin. entre Héitla
et Tébessa; celles de Haldra, en face de Tébessa, près de la frontière algérienne. En
terminant, il étudie les différentes sortes de monuments qui se rencontrent constam¬
ment en Tunisie, partout où on trouve des ruines antiques : ferme, fabrique d’huile,
citernes, église petit fortin, tombeau. Il cite quelques inscriptions inédites, parmi
lesquelles on remarque les deux suivantes :
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120
REVUE CRITIQUE DHISTOIRB ET DE LITTÉRATURE
i° A Lamta, sur une jolie tombe faite entièrement de mosaïque, qui figurera au
musée du Louvre :
MfVI
MEDDEN
INPACEVl
XITANNI
SXXXV:*:
PL VS MIN
REGESSIT
DIE VIII
1 DVS : :
IANVA
RIAS
a Medden in pace vixit annis XXXV plus minus; recessit die VIH idus Januarias. »
2* A l’hencnir Zaâtli, au-dessus de la porte d’un mausolée :
D M S
POSTVMIA-MATRONILLA.INCONPA
RABILISCONIVX-MATERBONA-AVIA
PIISSIMA PVD 1 CAREL 1 GIOSA LABORIO
SA FRVGI-EFFICAXS VIGILANS-SOLLICITA
VNIVIRAVNICVBA OTIVS INDVSTRIAE ET FIDEI
MATRONA VIXIT ANNIS NLIII MENSIBVS NVDIEBVSTRIBVS
a Dis Manibus sacrum. Postumia Matronilla, inconparabilis conjux, mater bona, avia
piissima, pudica, religiosa, laboriosa, frugi, efficaxs, vigilans, sollicita, uni vira, uni-
cuba, [tjotius industriae et fidei matrona, vixit annis numéro LI 1 I, mensibus nu¬
méro V, diebus tribus. »
M. Victor Guérin communique un mémoire sur les Populations du Liban. La pre¬
mière partie de ce mémoire est consacrée aux Maronites, population catholique,
dont M. Guérin raconte l’histoire et expose l’état religieux et l'organisation ecclé¬
siastique. Il parle ensuite des Grecs catholiques et des Grecs schismatiques, puis des
Druses, qui professent une religion particulière et peu connue, et enfin des Métouali,
qui appartiennent à une secte de l’Islamisme.
Ouvrages présentés : —par M. Renan : i° Corpus inscriptionum Semiticarum ,
2 e livraison; 2° Clermont-Ganneau, Epigraphes hébraïques et grecques sur des os¬
suaires juifs inédits (extrait de la Revue archéologique)', — par M. Delisle : i* les
Guerres du règne de Louis XIII et de la minorité de Louis XIV : Mémoires de
Jacques de Chastenet, seigneur de Puységur, publiés et annotés par Ph. Tamïzey de
Larroque; 2° Schmidt (C.), Notice sur un manuscrit du x 8 siècle qui jadis a fait partie
de la bibliothèque de Strasbourg.
Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 18 juillet i 883 .
M. l’abbé Thédenat expose que s’étant transporté au collège de Juilly avec quel¬
ques-uns dé ses collègues de la Société des Antiquaires de France, M. A. de Bar¬
thélémy, J. de Laurière, G. Schlumberger, A. Héron de Villefosse, il a été procédé
à la reconnaissance du cœur de Henri II d’Albret, roi de Navarre, grand-père du
roi Henri IV, déposé dans l’abbaye de Juilly par Nicolas Dangu, ancien chancelier
de Navarre, mort en ibÔ7, abbé de Juilly. Apres avoir reconnu la présence du dé¬
pôt, ils l’ont remis en place, et on a scellé de nouveau la plaque en marbre qui ferme
la niche. M. l’abbé Thédenat communique ensuite le texte d’une longue inscription
rédigée par les soins de Nicolas Dangu et gravée sur cette plaque. Elle énumère tous
les titres de Henri II d’Albret.
M. de Barthélemy fait connaître à la Société que M. de Cessac, associé correspon¬
dant à Gucret, lui a signalé des briques présentant des sujets et des inscriptions
empruntés à l'antiquité classique qui ont une grande analogie avec des briques mon¬
trées, il y a quelques années, à la Compagnie et provenant de Neuvy-sur-Baranion.
Ces briques, trouvées dans la commune de Saint-Alpinien, paraissent avoir été fa¬
briquées, au xvi* ou au xvn e siècle, dans le pays, pour l’ornementation des habita¬
tions particulières. M. de Cessac, parmi les inscriptions, signale IVL 1 VS CA ES A R,
SPARTACVS PANEM ET CIRCENSES: il promet de communiquer des exemplaires
de ces briques en original et de fournir des indications précises sur les fabriques d’où
elles sortent.
Eugène Müntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX*
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2 3 .
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constitution de l’Allemagne). — W. Bernhardi, Konrad III, I et II
(Deux forts volumes sur un sujet difficile et aride, où il y avait peu de
nouveau à trouver; travail fait avec grand soin et oui épuise la ques¬
tion). — Urkundenbuch der Stadt Quedlinburg, bearb. von Janicke II.
— Nitzsch, Geschichte des deutschen Volkes bis zum Ausgang der Ot-
tonen, brsg. von Matthoi (Œuvre délicate et réussie; c’est bien l'œuvre
de Nitzsch, quoiqu'elle nh soit composée que de notes et d’extraits lais¬
sés par le maître et réunis par l’élève; elle semble fondue d’un jet; beau¬
coup de vues originales, de parallèles ingénieux; il y aura encore deux
volumes). — Falke (von), Geschichte des fürstlichen Hauses Liechten¬
stein. III. — K. O. Müller, Geschichte der griechischen Literatur bis
auf das Zeitalter Alexanders, nach der Handschrift des Herausgebers
brsg. v. Ed. Müller. 4® Auflaçe mit Anmerk. u. Zusàtzen bearb. von
Em. Heitz. I u. II, 1 (Quatrième édition qui prouve que l’ouvrage
d’Otfried Müller, loin de vieillir avec le temps, est toujours considéré et
recherché comme un ouvrage réellement classique). — Plattner, Fran-
zôsische Schulgrammatik (Livre pratique et auquel on peut prédire un
avenir). — Jonckbloet, Geschiedenis der nederlandscne Letterkunde
( 5 e partie de la 3 e édition de cet excellent ouvrage ; elle est consacrée au
xvm® siècle et au commencement du xix®). — Westphal, Aristoxenus
von Tarent Melik und Rhythmik des classischen Hellenenthums über-
setzt und erlâutert; et die Musik des griechischen Alterthums nach
alten Quellen neu bearbeitet (Très long art. signé.t).
Deutsche Litteraturzeitung, n° 29, 21 juillet 1 883 : Creighton, A history
ôf the papacy during the period of the reformation, I, The Great
Schism, The Council of Constance. 1378-1418. II. Council of Basel,
The papal restoration, 1418-1464(Kolde : peu de nouveau et il ne faut
pas chercher là les grands points de vue d’un Ranke ; mais l’auteur a le
mérite d’avoir fort bien rassemblé les résultats de la science historique,
après avoir lui-méme étudié profondément le sujet, et son ouvrage peut
être regardé comme une « hervorragende Leistung »). — Th. von Varn-
bühler, Die Lehre vom Sein. —Imagines inscriptionum graecarum
antiquissimarum in usum scholarum comp. Roehl. (Hinrichs : très
précieux, et à recommander très vivement aux maîtres et aux élèves.)
— Gleditsch, Die Cantica der sophokleischen Tragôdiennach ihrem
rhythmischen Bau besprochen. (Hiller : assez bon; quelques change¬
ment dans le texte, souvent sagaces, mais la plupart du temps peu vrai¬
semblables.) — Waniek, Immanuel Pyra und sein Einfluss auf die
deutsche Literatur des XVIII, Jahrhunderts (A. S. : monographie faite
avec grand soin.) — Beowulf, autotypes of the unique Cotton Ms. Vit-
tellius A XV in the British Muséum, with a translitération and notes by
Zupitza. (Roediger : Publication de la Société des anciens textes an¬
glais; il faut attendre l'édition critique que promet Zupitza, et qui sera
accompagnée d’une traduction anglaise de Napier et d'une étude sur
les éléments historiques et mythologiques de 4'épopée, par Müllenhoff.)
— Rubio y Lluch, El sentimiento del honor en el teatro de Calderon,
recedida de un prologo de Menendez Pelayo. (Baist : travail important.)
— Historische Untersuchungen Arnold Schaefer zum 25 en Jubiliâum
seiner akademischen Wirksamkeit gewidmet von früeheren Mitglie-
dern der historischen Seminarien zu Greifswald und Bonn. (Seeck). —
Hassè, Die Quellen des Ripener Stadtrechts (Gierke.)
Gcettingiache gelehrte Ânzeigen, n° 3 o, 25 juillet 1 883 : Epistolae saec.
XIII. regestis pontificum romanorum selectae per Pertz, ed. C. Roden-
bbrg, Tome I [Monumenta Germaniae historica]. — Schreibpr, Die
Athéna Parthenos des Phidias und ihre Abbildungen (K. Lange : auel-
ques points contestables; juste sur la plupart des questions; l’allure
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méthodique et calme de la démonstration et le ton objectif de la polémi¬
que font de ce travail l'un des plus importants et des plus dignes de lec¬
ture, qui, depuis Overbeck, Michaelis, Conze et Petersen, se soient oc¬
cupés de l’Athéné de Phidias).
N° 3 i, i er août 1 883 : Canollo, La vita e le opéré del trovatore Ar-
naldo Dianello (Stengel). — Krause, System der Aesthetik (Seydel). —
W. v. Oettingen, Ueber Georg Greflinger von Regensburg als Dichter,
Historiker und Uebersetzer (Minor : travail fait avec grand soin).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
REVUE ÉGYPTOLOGIQUE
FONDÉE SOUS LA DIRECTION
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Association de Ptolémée Epiphane à la couronne. — Le tribunal
égyptien de Thèbes. — Récit de Dioscore sur le concile de Chalcé-
doine. — Les prix de blé. — La vie du bienheureux Aphou, évêque
de Pçmdje. — Le martyre de saint Ignace. — Le papyrus Anastasi,
n° 6, transcrit et traduit par Chabas. — Index du vocabulaire mytho¬
logique, par Chabas. — Nouvelles acquisitions du Musée Egyptien du
Louvre. — Nouvelles et mélanges.
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«• 33
Dix-septième année 13 Août 1883.
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RKCIJBIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
i>k MM S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqukt
Prix d’abonnement :
Un an, Paris, 20 tr. — Départements, 22 IV. — Etranger, 2b i r.
PARIS
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LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
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Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqukt
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 586 , 28 juin 1 883 : W. Smith and H. Wace, Adic-
tionary of Christian biography, vol. III. (Littledale : rempli d’articles
très soignés; de MM. Taylor (Hexapla), Fremantle (saint Jerôme), Ca-
zenove (les deux Hilaire, de Poitiers et d’Arles), Salmon (Hippolyte),
Plummer (Historiens ecclésiastiques). Barmby (le pape Honorius),
Stokes (Iconoclastes), Travers Smith (Ignace), Lepsius (Irénée), Leathes
(Isidore de Séville). Lupton (Jean de Damas), Dyde Acland (Jordanis),
Edersheim (Josèphe), Humphry Ward (Julien de Tolède, Leovigideet
Martin deBraga), J. Wordsworth (Julien l’Apostat), Bryce (Justinien),
Holland (Justin Martyr), Ffoulkes (Lactance), Gore (Léon le Grand),
etc., etc. — Bertha Thomas, George Sand, coll. des «eminent women 1.
(Purceli). — Th. Sellar, The Sutherland Evictions of 1814, former
and recent statements respecting them examined. (Macdonnell.) — The
Sonnets of John Milton, edit. by Mark Pattison. « Parchment Li-
brary. » — Mark Twain, Life on the Mississipi — W. Cope, Bramshill,
ils history and architecture (Round).— Paul Sébillot, Traditions de la
Haute Bretagne (A. Lang : très intéressant et important pour le mytho¬
logue). — Notes from Melbourne. — The fall oï the duke of Albany.
(Ramsay.) — Some gatherings for the « Bibliotheca piscatoria. » (Os-
mund Lambert.) — Swift's giddy fits (T. Tyler.) — The river Trisanton
(Nevill).— Catholicon Anglicum, an english-latin wordbook, dated
1483, edited by Herrtage. Early English Text Society and Camden
Society (Hessels) — Dr. A^ePs « Ilchester Lectures » (C. Abel). —
Early chinese literature (Terrien de La Couperie). — Kekulé, Laokoon.
Stuttgart, Spemann. (A. S. Murray : exposition claire et brillante,
prouve que la date du Laocoon doit être placée un peu avant l'an 100.)
— The Nfobé of Sipylos. (Sayce.) — The national Society for preser-
ving the memorials of the dead. (W. Vincent.)
The Afhenaenm, n° 2909, 28 juillet 1 883 : Niemojowski , Siberian
pictures, edited from the polish by Major Szulezewski. — The Berkeley
manuscripts, the lives of the Berkeleys, lords of the honour, castle and
maiior of Berkeley, in the country of Gloucester, from 1066 to 1618,
by John Smith of Nibley. Vol. I, edited by Sir John Maclean, for the
Bristol and Gloucester archaeological history. — Isaac Taylor, The
Alphabet. 2 vols. (Œuvre très remarquable, pleine de vues ingénieuses
et d’aperçus nouveaux.) — The secrets of angling, by John Dennys Es-
quire, 161 3 ; a reprint with introduction by Th. Westwood. — The re-
gisters of the parish Leigh, Lancashire, from february 1 558 to march
1625. — Hbnnessy, Sir Walter Raleigh in Ireland. — Swifts marnage
(Craik). — The Harsnett library (Round). — The importance of assy-
riology to hebrew lexicographv, II. (Fr. Delitzsch). — Dan te’s German
expositors.— M. Smithies.— Wallace-Dunlop, Glass in theold world.
— Illustrated books. — Notes from Rome (Lanciani). — Wolfgang
Amadeus Mozart’s Werke, kritisch durchgesehene Gesammtausgabe.
(A Leipzig, chez Breitkopf et Hârtel.)
Literarisches Centralblatt, n° 3 i, 28 juillet i 883 : Julien Havet, Maître
Fernand de Cordoue et l’université de Paris au xv® siècle. (Rassemble
avec grand soin tout ce qu’il était possible de savoir sur la vie, la per¬
sonne et les écrits, conservés en partie, de cet humaniste du xv° siècle.)
— Corpusculum inscriptionum Vitebergensium, die lateinischen In-
schriften Wittenbergs, darunter fünf und neunzig Sâtze, lat. u.
deutsch mit einem Anhang deutscher Inschriften hrsg. v. Stier, 2 e Ge-
dâchtniss-Ausgabe, durch die Melanchton*Inschriften vermehrt. —
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 33
— 13 août —
1888
Sommaire s 162. Chastel, Histoire du christianisme. III. — 1 63 . Cicéron, Cato
Major, p. p. Rinn. — 164. Documents de l’abbaye de Salem, p. p. de Wbbch. —
1 65 . Correspondance inédite du duc du Maine avec Basville, p. Joret. — 166.
Andresen, L’étymologie populaire en allemand^* édit. —Chronique. — Académie
des Inscriptions.
162. — Histoire du chrlatlanterne députa aon origine Juaqu*à noa
Joura, par Etienne Chastel, professeur de théologie historique à l’université
de Genève. Tome III, moyen âge, de l’hégire de Mahomet à la réformation de
Luther. Paris, G. Fischbacher, 1882. In-8 de 638 pp.
Ce troisième volume de l’histoire du christianisme par M. Chastel se
distingue par les mêmes qualités que les deux précédents. C'est tou¬
jours la même richesse de saine érudition et d’information prises aux
sources; la même indépendance d’esprit ; la même impartialité d'appré¬
ciation ; la même clarté d'exposition, en des matières où se produisent à
la fois tant de systèmes obscurs et confus et tant d’explications subtiles,
et touchant des faits et des croyances, sur lesquels l’apaisement ne s’est
pas encore fait, et qui ont le fâcheux privilège de soulever toujours des
passions religieuses et de froisser des intérêts politiques.
Dans les neuf siècles dont ce volume retrace l’histoire, l’église grec¬
que, dont les destinées étaient naguère si brillantes, baissa continuelle¬
ment. Elle disparut presque complètement de l’Asie et de l'Afrique.
Dans les provinces qui lui restent encore, elle est comme paralysée par
la terreur des armes musulmanes; et l’oppression du régime impérial la
retient dans l’inertie et ne lui permet de se livrer qu’à des agitations
stériles. Elle se répand, il est vrai, chez les nations slaves ; mais elle n’y
joue qu’un rôle effacé.
Tout l'intérêt est désormais dans l'Eglise d'Occident; non-seulement
c’est dans son sein que se produiront la vie et le mouvement; mais en¬
core la société nouvelle qui va se fonder sous ses auspices, n’aura, pen¬
dant des siècles, ni d’autre guide, ni d'autre maître.
Dans l'Europe occidentale, où l’Empire romain avait succombé, l’E¬
glise, restée seule debout sur ses ruines, fut appelée par la force même
des choses à présider à la formation, tout au moins à l’organisation des
nouveaux états; il était impossible qu’elle n’acquît pas dans leur admi¬
nistration et leur gouvernement l’influence la plus étendue. Charlema¬
gne, après avoir rétabli en sa personne la dignité impériale, put préten¬
dre, à raison de l’appui qu’il prêta aux églises de ses états, y exercer des
Nouvelle série, XVI. 33
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122
RKVBB CRITIQUK
droits semblables à ceux des empereurs grecs dans celles d’Orient. Mais
cet état de choses ne pouvait qu’être qu'une exception. Ceprince put exer¬
cer surl’Eglise un ascendant auquel aucun autre souverain d’Occident,au
moyen âge, ne put aspirer comme lui. Après sa mort, l’autorité monar¬
chique, qu’il avait su s’arroger et maintenir, ne tarda pas à disparaître
pour faire place à la théocratie qui se développa sous ses successeurs, et
qui soumit de plus en plus dans tout l'Occident le pouvoir civil à l’au¬
torité ecclésiastique (p. 207).
La partie la plus considérable de ce volume est consacrée au tableau
des conséquences les plus prochaines de ce fait en lui-même fort remar¬
quable, que la société moderne fut en quelque sorte l'œuvre de l’Eglise
du moyen âge. Il en résulta naturellement que la civilisation nouvelle
se développa sous l’influence prépondérante du sacerdoce et que la cul¬
ture intellectuelle et morale y resta essentiellement ecclésiastique.
Le patriarchat romain en profita pour établir sa suprématie sur de
solides bases. Rome, prise et saccagée plusieurs fois par les Barbares,
eut l'avantage de ne jamais demeurer entre leurs mains. Capitale en¬
core à demi civilisée d'un monde tombé dans la barbarie, seul patriar¬
chat en Occident, seul anneau par lequel l’église latine était censée se
rattacher à l’Eglise apostolique, elle fut comme un fanal sur lequel les
chrétiens de cette partie du monde tenaient les yeux fixés. L’établisse¬
ment des barbares en Occident rompit les traditions d’indépendance et
les souvenirs de l’antique égalité qui, dans de nombreuses églises,
avaient jusqu’alors entravé l’exercice de la suprématie des papes. De la
part des nouvelles églises, ils n'eurent que bien rarement de semblables
résistances à surmonter. Le clergé franc qui avait remplacé le clergé
gallo romain, le clergé anglo-saxon qui remplaçait celui de l’église
bretonne, avait oublié et même ignorait cette ancienne égalité que leurs
prédécesseurs avaient fait valoir contre le siège romain. L'Eglise d’A¬
frique, dont l’esprit revêche avait été d’un exemple si funeste aux pré¬
tentions des papes, n’existait plus, et d’un jiutre côté, s'étaient élevées
les églises nouvelles de la Frise, de l'Allemagne, de la Scandinavie et
des pays slaves qui n'avaient ni précédents, ni traditions semblables à
leur opposer (pp. 174 et suiv.).
Des populations incultes, converties les unes par la force, d’autres
brusquement et presque sans instruction préalable, ne pouvaient guère
comprendre une religion spiritualiste. Si déjà dans son premier âge, les
païens du monde civilisé, mais entraîné dès ce moment dans une dé¬
cadence de plus en plus profonde, ne l'avaient embrassée qu’en l’im¬
prégnant d’une forte teinte de leurs pratiques superstitieuses, combien
plus de préjugés les conducteurs de l'Eglise ne furent-ils pas obligés de
ménager chez les nouvelles peuplades barbares ! Le peu de spiritualité
qui restait encore au christianisme, était au-dessus de l’état intellectuel
et moral d’hommes qui ne recevaient d’impressions que par les sens. Le
sacerdoce avait baissé lui-méme dans ces temps de désordre et de
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O'HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE
123
malheurs de tous genres, et était plus facile qu’autrefois à entendre et à
enseigner la religion sous des formes peu élevées. Il arriva de là que les
doctrines chrétiennes tendirent de plus en plus à se matérialiser, si Ton
peut ainsi dire. Le récit de cette triste décadence occupe de longues pa¬
ges dans cette histoire. Et cependant, comme le fait observer M. C.,
pour ces masses incultes et grossières, c'était un progrès manifeste que
de recevoir de l’Eglise, avec les premiers éléments de la vie sociale, une
première initiation aux vertus chrétiennes et d'échanger le culte de leurs
grossières divinités, ne fût-ce que pour celui de la Vierge et des saints.
A la fin du xi fl siècle le niveau se relève. Il se forme une science
théologique. Elle aspire immédiatement à vouloir se justifier aux yeux
de la raison ; elle se donne pour la fides quœrens intellectum , selon
l’expression d’Anselme. Jusqu'à la fin du xiv*, on fait des efforts inouïs
pour trouver cet accord de la théologie et de la philosophie, de la raison
et de la foi. On y renonce de guerre lasse, et on proclame qu’il y a des
propositions vraies en théologie et qui sont fausses en philosophie,
comme aussi des propositions vraies en philosophie qui sont fausses en
théologie. Décidément l’accord de la foi et de la raison est une chimère ;
il faut y renoncer. D’ailleurs l'Eglise va être appelée à porter toutes ses
forces à se défendre contre de nouveaux adversaires. M. Chastel termine
ce volume par le tableau des précurseurs de la Réforme. Le quatrième
volume qui nous donne l’histoire des premiers temps du protestantisme,
vient de paraître; nous en présenterons très prochainement l’analyse.
M. N.
1 63 . — M» Tulll ClceronU Cato major, nouvelle édition publiée avec une
introduction et un commentaire historique et grammatical, par Ch. Rinn. Paria,
Delagrave, 1882, 126 p.
Cette édition n’a aucune prétention à être une édition savante; c’est
une simple édition classique, destinée aux élèves de troisième, ainsi
qu’aux candidats au baccalauréat, et n’ayant d'autre but que de leur
éclaircir les difficultés que peut présenter pour eux la lecture du De se-
nectute. Elle possède, du reste, la plupart des qualités qu’on peut deman¬
der à une édition classique. Tout d’abord, il faut savoir gré à M. Rinn
d’avoir compris que, si la plupart des professeurs sont malheureuse¬
ment fort indifférents à la question de savoir ce que vaut le texte de
l'édition dont ils se servent pour leurs explications, ce n’en était pas
moins son devoir d’éditeur de donner un texte établi avec autant de soin
que possible. Pour base de son texte, il a pris l’édition de C. F. W.
Müller (dans la collection Teubner), mais il s’en est écarté dans un
certain nombre de passages, où il a adopté le texte d’autres éditeurs
récents, et les notes critiques où il rend compte des raisons qui ont dé¬
cidé son choix me semblent souvent très judicieuses. L’on trouve même
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R R VU B CRITIQUE
I2 4
dans son édition quelques corrections nouvelles, qui méritent qu'on en
tienne compte: § 18 « et quomodo, Carthagini <qui> male, etc.»;
§ 38 fin, supprimer les mots sine sensu, qui seraient une glose mala¬
droite de sensim (cette correction me semble très vraisemblable) ;§ 59
« ornatumque Persicum multo auro, etc. » (correction de
M. Provotelle, que j'adopterais aussi très volontiers); § 68 « eo meliore
condicione..., cum id... consecutus sit » (au lieu de est; les autres édi¬
teurs avaient gardé est, en remplaçant cum par quod ou quoniam). En¬
fin je féliciterai M. R. d’être revenu, dans une mesure convenable, à la
vraie orthographe latine et d’avoir renonce à certaines formes barbares,
que la tradition avait perpétuées chez nous : non que j'attache à cette
question de l’orthographe latine une importance quelle est loin d'avoir;
mais pourquoi s’obstinerait on à enseigner aux élèves des orthographes
reconnues aujourd'hui comme incorrectes ( concio, quum , cœlum, qua¬
tuor , etc.), alors qu'il n’en coûte pas plus de leur enseigner l’orthographe
véritable?
J'en viens au commentaire, qui est, dans une édition classique, la
partie la plus importante. M. R. a profité de ce que le texte à annoter
était court pour donner aux notes un très grand développement, en
quoi il a très bien fait. Son commentaire me semble d'ailleurs bien
conçu : il est abondant, varié et instructif. Ce qui paraît prédominer,
ce sont les explications historiques; mais on rencontre aussi, en quan¬
tité suffisante, des notes sur le sens des môts, sur les particularités de
syntaxe, sur les difficultés d’ordre divers que le texte présente, sur les
rapprochements littéraires auxquels il peut donner lieu, etc. Enfin, ce
commentaire est complété par des notices intéressantes, placées en tête
du volume, sur les personnages du dialogue, ainsi que par d’utiles
Appendices sur les passages grecs imités par Cicéron ', sur la généalo¬
gie des Scipions, sur les elogia , sur le système des noms propres chez
les Romains. En somme, les élèves pourront apprendre beaucoup dans
l’édition de M. R., et il serait à désirer que tous les livres de classe
qu’ils ont entre les mains fussent faits avec autant de soin et de cons¬
cience.
Je ferai toutefois à M. R. plusieurs critiques, les unes générales, les
autres portant sur des points de détail. Je me contenterai de signaler ra¬
pidement quelques passages où je ne serais pas de son avis pour la le¬
çon à adopter *; j'insisterai davantage sur ce point, que les notes criti-
1. Malheureusement ces textes grecs sont défigurés par de grosses fautes d'impres¬
sion : âvôauTa, Çuvéovtsç, çavai, etc. De plus oiaaa>(b) et àxoOv^axu) doivent s’é¬
crire avec un c souscrit.
2. Au g 44, le subj. capiantur n’indique pas nécessairement que c’est Platon qui
parle ; il indique simplement que c’est la pensée de Platon qu’on rapporte; le sens
est donc : « sans doute parce qu’il pense que le plaisir est une amorce pour les
hommes. » — g 5 i. nec cuiquam se rapprocherait bien plus que nec unquam , adopté
par M. Rinn, de la leçon de L ( necuiquam); M. Rinn a tort de ne pas indiquer quelle
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D'HISTOIRE ET DR LITTERATURE
125
ques qu'il a mises au bas des pages ne me paraissent pas avoir toujours
la précision désirable. Ces notes, quoi qu’en dise M. R. [Introduction ,
pp. i-u), ne me semblent guère faites pour les élèves 1 ; elles ne peuvent
s’adresser qu’aux rares professeurs qui auront la conscience de vouloir se
rendre compte comment le texte qu’ils expliquent est établi. M. R. aurait
donc pu, dans une édition classique, se dispenser sans inconvénient de
mettre des notes de ce genre; mais, du moment qu’il en mettait, il était
tenu de les rédiger avec une rigueur et une précision toutes scientifiques.
Or, c’est ce qu’il n’a pas fait partout: § 18, on lit : « Et quo modo : Car -
thagini male , etc. C’est le texte communément adopté. D’autres mss.
portent : et quo modo Carthagini, cui male . » Mais quelle est la valeur
des mss. qui donnent l’un ou l’autre texte? C’est là ce qu’il m'importe¬
rait de savoir. Même manque de précision § 37 : « J’ai suivi le texte
communément adopté... La divergence des mss. en ce passage a donné
lieu à plusieurs conjectures. » Cette divergence des mss., en quoi con-
siste-t-elle? — § 3 « Deux mss. donnent Chius , les autres Cens; » § 38 ,
« Deux mss. ont quœ, les autres quas; » § 84 « in : variante : ad ». A
quoi me servent ces indications, si l’on ne me dit pas quelle est l’auto¬
rité des mss. qui donnent chaque leçon citée? — § 83 , je lis une note
que je ne comprends pas bien : * Cujus. Variante des mss. cui. » Est-ce
tous les mss. qui donnent cui? est-ce seulement quelques-uns? De pa-
relles notes manqueraient que les élèves n’y perdraient rien ; et, rédi¬
gées d’une façon aussi vague, on ne voit pas bien de quelle utilité elles
peuvent être pour le professeur.
De même, ce que M. R. (. Introduction , p. n) dit des mss. du De se -
nectute ne me suffit pas. J'y apprends que les mss. les plus importants
sont L et P; mais je voudrais savoir si P et L donnent à peu près le
même texte ou s’il y a entre eux des différences notables; si, en cas de
désaccord, c’est la leçon de P ou la leçon de L qu’il convient de pré¬
férer; si les autres mss., moins importants , dérivent de P ou de L ou
s’ils ont une origine distincte, en d’autres termes s’ils ont, oui ou non,
une importance quelconque pour aider à retrouver la leçon primitive.
est la leçon de P. — Ibid. Je préférerais diffindit , car je doute que diffundit puisse
avoir le sens que dit M. Rinn ; ce mot semblerait indiquer que la semence se répand
de divers côtés dans le sol. — g 56 , ne pourrait-on pas garder qua dixi? Le sens
serait : qua dixi {eam beatam esse). La correction adoptée par M. Rinn est d'ailleurs
très admissible. — g 82, pourquoi M. Rinn abandonne-t-il sine ullo aut laborc
aut contentione, texte très satisfaisant, donné par L, qui est, pour cette partie, le
principal ms. ? M. Rinn dit qu’il a suivi le texte de la plupart des mss.; mais le
nombre des mss. ne fait rien à l’affaire. — De même g 85 , j’aurais adopté la leçon
defetigationem , dont defectigationem, que donne L, n’est qu’une variante ortho¬
graphique.
1. Dans la petite édition classique des livres XXI-XXX de T.-Live que je publie
en collaboration avec M. Benoist, j’ai cru, comme M. Rinn, devoir mettre un Ap¬
pendice critique, mais je n'ai jamais pensé qu’il fût destiné à être consulté parles
élèves ; il est fait pour les professeurs, qui, pour la plupart, n'auront pas sous la
main une édition critique de T.-Live.
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126
RBVUR CRITIQUE
Tout cela aurait pu être rapidement indiqué en cinq ou six lignes; ce sont
là des questions qui n’intéressent aucunement l’élève, mais un éditeur
du De senectute doit les avoir résolues, pour son propre compte, s’il
prétend établir son texte d’une manière scientifique, et d’autre part
M. R. devait en instruire le lecteur, s’il voulait que la partie du public
à laquelle s’adressent les notes critiques pût consulter ces notes avec
fruit.
Pour ce qui est du commentaire, peut-être est-il permis de trouver
que le texte n'est pas toujours serré d’assez près. Il me semble qu'il reste
bien des difficultés de détail, qui pourront embarrasser les élèves et dont
quelques-unes, au moins, auraient pu être expliquées en note. Je sais
bien qu’il est difficile, en matière de commentaire, de satisfaire tout le
monde; je sais aussi qu’il y a des difficultés qu’il faut habituer Pélève à
résoudre par soi-même, d’autres qu’il faut réserver pour l’enseignement
oral du maître; mais cependant M. R. aurait pu donner à certaines no¬
tes une rédaction plus concise et ainsi trouver la place d’en ajouter quel¬
ques-unes de plus, qui n’auraient peut-être pas été inutiles *.
Enfin quelques notes me paraissent peu exactes ou peu précises :
P. 21, note 4 : la différence entre certo scio et certe scio paraît être
celle-ci : « certe scio, certainement je sais (il est certain que je sais) ;
certo scio, je sais d’une manière certaine. »
P. 22, n. ii : la note n’explique pas assez clairement pourquoi, dans
les deux passages de Cicéron (§§ 3 et 79), il y a l’impératif en to ; c’est
qu’il s’agit d’une recommandation qui est faite, non pour le moment
même où l’on parle, mais pour plus tard (« si. videbitur », « etiamsi
nullum videbitis »); au contraire, § 79, nolite arbitrari veut dire :
« ne croyez pas maintenant ». Cf. Ch. Thurot, Rev. dephil. IV, p. 1 13
et suiv.
P. 24, n. 10 : La règle donnée pour me ipse ou me ipsum est insuf¬
fisante. Voy. Madvig, § 487 b ( 3 e éd.); ? 429 b (4 e éd., abrégée).
P. 39, n. 6 : La note n’est pas suffisante ; il fallait montrer que an,
de même que y; en grec, conserve toujours en réalité son sens de a ou
bien est-ce que... » et ne semble prendre un sens différent qu’en vertu
d'ellipses faciles à suppléer. De même, p. 82, n. 12, et p. 96, note 8, il
eût été utile d’expliquer comment il se fait que haud scio an peut se tra-
1. Voici, par exemple, des endroits où j’aurais peut-être mis une note : g 2, sens
de eo munere; ibid., joindre : digne satis; g 4, sens de vel devant maxime ; g 5 , sens
de utinam devant Vimparfait du subjonctif (hypothèse contraire à la réalité); g 6,
sens de quidem et de certe (le texte, du reste, me semble peu sûr; j’attendrais quel¬
que chose comme : [si non]speramus , volumus certe , etc.); ibid., sens de rationibus ;
ibid., note sur la construction quam... ingrediendum sit ; ibid., sens de quale (la tra¬
duction ftotcv n'apprend pas grand chose à l’élève) ; g 7, différence entre cum... tum
et tum... tum; ibid., explication de la locution usuvenire; ibid., expliquer pourquoi
ferrent est au subj.; g 8, non porte sur sua et la place irrégulière de non demande à
être remarquée; g 38 , note sur le datif viventi; gg 5 1, 5 a, 53 , sens de vis ac natura
vim ipsam omnium, natura ipsa ; g 54, sens de segetes , de arbusta, de vineae, etc.
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D'HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE
I2 7
duirepar < peut-être » et que an semble avoir le sens de « si... ne... pas. »
P. 40, n. 2 : J’avoue que je ne peux trouver aucune différence de sens
entre accedit quod . et accedit ut....; quod ne marque d’ailleurs
nullement le motif\ mais veut dire, comme souvent ailleurs, « ce fait
que... » ; quant à accedit ut, c’est une construction que la langue a
sans doute formée d'après l’analogie de accidit ut.
P. 49, n. 4 : Je croirais plutôt que serendis... percipiendis... colendis
fructibus sont des ablatifs, et non des datifs. C’est l’ablatif du gérondif
ou du participe tendus qui s'emploie en général pour rendre cette
idée : « quand il s'agit de. » Voy. Dràger, Hist. Synt ., 2* éd., II,
§599.
P. 55 , n. 11 : La règle donnée est inexacte. On peut dire également
memini me legere et memini me legisse , mais l’un veut dire « je me
souviens qu’à tel moment ) étais occupé à lire », l’autre « je me sou¬
viens que fai lu. » Cf. Schultz, Latein. Sprachlehre, g 3 g 3 ^Anm. 1.
P. 58 , n. 6 : Il fallait ajouter que la particule affirmative ne, « cer¬
tes », ne s’emploie qu’au commencement d’une phrase et suivie d'un
pronom personnel ou démonstratif.
P. 65 , n. 1 : Il ne faut pas croire que, devant un comparatif, on
soit obligé de remplacer ut par quo : voy., par exemple, pro Archia,
11, 28 « ut id libentius faciatis. »
P. 69, n. 4 : La règle donnée manque de précision : quis est encliti¬
que, aliquis ne l'est pas ; donc, lorsque le sens demande qu’on appuie
sur le pronom et qu’on l’accentue, on est obligé d’employer aliquis,
même après si, ne, etc. Cf. Madvig, §493, Anm.i ( 3 ° éd.), § 434, Anm. 1
(4* éd.).
P. 85 , n. 16: Il est peu exact de dire que des pluriels commeproceri-
tates sont rares. Ils sont au contraire fréquents chez Cicéron, de même
qu’en grec chez Isocrate.
P. 91, n. 4 : Il ne me semble pas que tristius curantur puisse signi¬
fier t on a plus de peine à les guérir », et l’autre traduction, « on les
traite plus rudement », ne me paraît pas bien en rapport avec la suite
des idées. Le sens ne pourrait-il pas être : a ils se laissent soigner de
moins bonne grâce , en montrant une humeur plus difficile », d’où il
résulterait qu’on a plus de peine à leur imposer le traitement qui pour¬
rait les guérir ?
P. io 3 , n. 4 : L’explication de M. R. ne me satisfait point, car il ne
me semble pas que nisi cernerent puisse signifier « sans avoir un pres¬
sentiment » ; c’est ut non cernerent qui aurait ce sens.
D’autre part, esse conatos (style direct : conati sunt ou conaban -
tur) ne peut pas avoir le sens de conatur os fuisse. Je ne m'explique
donc pas la phrase de Cicéron, telle qu’elle est donnée dans les édi¬
tions; j'ai pensé à la correction suivante, qu?je soumets à M. Rinn :
« tanta esse conat<Mr>os. » 11 est vrai que, si nisi cernerent peut
très bien avoir le sens de « s’ils n'avaient eu un pressentiment » (cf.
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RI5VÜB CRITIQUE
128
Revue de philologie , IV, p. 187, note 3 , et Revue critique , 1881, II,
pp. -259 260), il semble plus difficile d’admettre que esse conaturos
puisse signifier de même « ils auraient fait des efforts »; je ne connais
du moins aucun passage où le participe futur avec esse soit ainsi em¬
ployé au lieu du participe futur avec fuisse; s’il en existe, je ne crois
pas qu’on en ait cité. Mais peut-être pourrait-on entendre que Cicéron
ne parle pas seulement du passé, mais aussi de ce qui continue à arri¬
ver dans le présent ; avec les mots 'multos prœstantes viros, la phrase
passerait des exemples particuliers à Taffirmation d’une vérité générale :
€ non, tant d’hommes distingués (qui ont vécu ou qui vivent encore) ne
se donneraient pas de tels efforts, s’ils n 'avaient pas un pressentiment,
etc. > J’avoue du reste que ceci ne me satisfait pas non plus entièrement.
M. Rinn avait déjà publié, dans la même collection, une édition du
pro Archia; espérons, dans l'intérét des élèves, qu’il ne s’en tiendra pas
là et qu’il donnera bientôt quelque autre édition classique.
O. R.
164. — Codex dlplomet Ieus SalemItanna, Urknndenbuch der Clater-
zlentera b tel Salem, herausgegeben von Friedrich von Webch, geheimen
Archivrath ara Grossh. Badischen General-Landesarchiv. Karlsruhe, Braun, 1 883 ,
Bd 1, vi, 546 p. in-8. Avec quinze planches photolithographiées.
Parmi les nombreuses abbayes sécularisées en i 8 o 3 , pour arrondir les
territoires des margraves de Bade, des ducs de Wurtemberg et de Ba¬
vière, l’une des plus importantes était celle de Salem ou de Salmanswei-
ler. Située non loin des bords du lac d'Ueberlingen, qui fait suite à celui
de Constance, elle possédait une cinquantaine de villages, dix châteaux
et comptait environ dix mille sujets. Elle avait été fondée grâce aux do¬
nations d’un chevalier du Linzgau, Gontramn d’Adelsreuthe, en 1 r 34 ,
donations faites à l’abbé de Lucelle dans la Haute-Alsace, et elle avait
été peuplée, par les soins de ce prélat, avec des moines de Citeaux. Le
premier supérieur en fut Frowin, l’interprète allemand de Saint-Bernard
de Clairvaux lui-même. Administrée avec soin pendant des siècles, l'ab¬
baye de Salem s’enrichit et s’arrondit malgré des pillages répétés l ) elle
sut conserver intacts, non-seulement ses vastes propriétés, mais encore
tous les titres qui les garantissaient aux bons pères. Les riches archives
de Salem restèrent dans leur entourage naturel jusqu’en 1840, date à la¬
quelle les margraves de Bade, devenus possesseurs de ce domaine prin¬
cier, les firent transporter aux Archives générales du grand-duché, à
Carlsruhe. Depuis lors, les pièces de ce dépôt spécial ont fourni déjà de
1. Nous avons rendu compte ici même (Revue du 8 mai 1876) d’une autre publi¬
cation de M. de Weech, la Chronique de Salem , rédigée par le moine Sébastien Bûrs-
ter, pendant la guerre de Trente Ans, et qui retrace l’histoire de l’époque la plu*
tourmentée pour cette abbaye.
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DHISTOIRB BT DB LITTÉRATURE I 2Ç
nombreuses contributions à l’histoire locale du sud-ouest de l'Allema¬
gne. Les Acta Salemitana de M. Baumann, le Ftirstenbergisches Ur-
kundenbuch de M. Riezler en ont largement profité. La Zeitschrift für
Geschichte des Oberrheins de Mone en a également publié des séries
plus ou moins considérables. Toutes ces publications antérieures ce¬
pendant n’avaient point puisé aux* documents originaux. Les savants
auxquels nous les devons avaient pris, presque tous, leurs pièces dans le
Codex Salemitanus, cartulaire en quatre volumes in-folio, établi au
xm* siècle et soigneusement continué depuis lors. M. de Weech a pensé
qu’il pourrait être utile néanmoins de reproduire les titres eux-mêmes,
et c’est ce qui lui a fait entreprendre la présente publication, dont les
quatre premières livraisons, formant le premier volume, ont paru. Elles
embrassent les pièces conservées à Salem, de 1134 à 1266. Publiées in¬
tégralement pour le premier siècle, où elles sont encore rares, elles sont
données plus loin sous forme de régestes, afin de ne pas trop grossir
l’ouvrage, à partir du moment où leur nombre devient très considéra¬
ble. M. de W. a joint aux textes des notes explicatives, un peu trop
sommaires peut-être en certains endroits; quant aux textes eux-mêmes,
ils sont scrupuleusement établis d’après toutes les exigences de la science
diplomatique moderne. Un index des noms de lieux et de personnes
termine le volume. Celui-ci est orné, en outre, d’une série de planches
photolithographiques représentant quatre-vingts sceaux pris directement
sur les originaux et reproduits d’une manière supérieure par l’artiste
chargé de cette tâche. M. de W. a ajouté à la fin du volume quelques
notes spéciales sur ces sceaux et spécialement sur la matière dont ils sont
faits. Ils ne sont pas, en effet, formés de cire pure, mais d’un mélange
de cire et de terre argileuse additionnée d’oxyde de fer. M. de Weech
désirerait savoir si l'usage de cette matière composite était propre aux
monastères de Tordre de Citeaux et si Ton peut en constater l’usage dans
toutes les abbayes de Tordre, en France comme en Allemagne. Peut-être
l’un ou l’autre des archivistes abonnés à la Revue critique voudra-t-il
lui faire parvenir là-dessus les renseignements désirés, qu'il nous est im :
possible de fournir au savant archiviste de Carlsruhe dont nous souhai¬
tons voir avancer rapidement le méritoire travail. L’historiographie de
toutes les contrées formant l’ancien duché de Souabe trouvera des ma¬
tériaux nouveaux dans son utile recueil.
R.
16S. — Correspondance Inédite de Lonlt Angnsle de Boni-bon» doc
du Maine avec Lamoignon de Baavllle (1700-1716), tirée d’un ma¬
nuscrit de la Bibliothèque Méjanes et publiée par Charles Joret, professeur à la
Faculté des lettres d’Aix. Paris, H. Champion, i 883 . Grand in-8 de 27 p.
La correspondance publiée par M. Joret est renfermée dans les ma¬
nuscrits 321 , 322 et 323 de la bibliothèque de la ville d'Aix. Le savant
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i3o
RKVUK CRITIQUB
éditeur a dit ici même 1 2 comment cette correspondance se trouve à la
Méjanes et quel intérêt elle présente pour l’histoire des dernières années
de l'administration d’un des plus célèbres intendants du xvm* siècle. Cet
intérêt est d'autant plus grand que la période comprise entre 1709 et
1716 n’est représentée que par un très petit nombre de documents dans
le recueil de pièces justificatives * dont le zélé continuateur de Dom
Vaissette, M. E. Roschach, a fait suivre Y Histoire générale du Langue¬
doc.
Avant de mettre sous nos yeux les trente-neuf lettres ou billets du duc
du Maine, M. J. a rappelé ce que fut ce prince et aussi ce que fut son
correspondant Nicolas Lamoignon de Basville, le cinquième fils du pre¬
mier président Guillaume de Lamoignon. A ces rapides, mais excellen¬
tes notices, le savant éditeur a joint un résumé fort bien fait des événe¬
ments auxquels se rapportent les lettres de Louis-Auguste de Bourbon.
Il est surtout question, dans les lettres du second fils de Louis XIV et
de M“ e de Montespan, de la révolte des Camisards, « de ces misérables
camisards », comme les appelle le jeune gouverneur de Languedoc, qui,
un peu plus loin (p. 6), leur applique le vilain mot de canaille 3 . Le
17 juillet 1709, le duc du Maine écrit à cet intendant, trop digne d’en¬
tendre un pareil langage, combien serait désirable a la destruction to-
talle de ces malheureux ». Le 25 du même mois, il félicite celui que l’on
a si justement surnommé le missionnaire irrésistible a des bonnes pré¬
cautions > prises, de concert avec le duc de Roquelaure, « pour parve¬
nir, en peu de temps, à la ruine des camisards », résultat qui fut, en
effet, pleinement obtenu, car, selon le mot de Brueys, rappelé par M. J.
(p. 9), « personne n’osa plus branler ». Dans les autres lettres, on trou¬
vera quelques détails sur le port de Cette, sur l’archevêque de Narbonne,
Le Goux de la Berchère, sur le duc de Noailles, qui aida si vite Roque¬
laure à repousser un hardi coup de main des Anglais contre les côtes du
Languedoc, sur la tenue des Etats de cette province, sur la mort de
Louis XIV, etc. Cette correspondance, qui ne fait guère honneur au duc
du Maine, achève de bien faire connaître un prince sur lequel l’histoire
n’avait pas encore tout dit.
La publication de M. J., qu’il s’agisse du texte même ou des notes qui
l’éclairent si heureusement, ne sera pas inutile à la nouvelle édition des
Mémoires de Saint-Simon, cette édition dont il me tarde tant de repar¬
ler aux lecteurs de la Revue critique . Parmi les notes de M. J., on re¬
marquera (pp. 2 et 4) celles qui sont formées de deux documents inédits
1. N # du 2 mars 1878, p. 148. Cf. Annales de la Faculté des lettres de Bordeaux,
t. I, p. 80. M. J. a publié là (1879) six lettres du maréchal de Montrevel à Bas-
ville.
2. Ce recueil ne contient que seize documents pour les années 1708 à 1718. Sur
ce nombre, il n’y a qu’une seule lettre du duc du Maine à l’archevêque de Narbonne
(29 décembre 171 5 ).
3 . U y a récidive dans l’emploi de l’injure (p. 10).
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D HISTOIMK BT DK LITT^RATURR
131
émanés du féroce Basville et tirés des Archives communales d’Uzès. Je
suis sûr d’être l’interprète du sentiment de tous les sérieux amis de l’his¬
toire en priant M. Joret de nous donner d'autres extraits du manuscrit
d'Àix et de bien finir ce qu’il a si bien commencé.
T. db L.
166. — (Jêber deotsohe VollMetynologle» von Karl Gustaf Andrksen,
viii- 324 p. in-8. Heilbronn-am-Neckar, Henninger, i 883 . Prix : 5 marks (6 fr. 2 5 ).
Voici la quatrième édition d’un livre sur l’étymologie populaire en
allemand, dont nous avons déjà deux fois entretenu les lecteurs de la
Revue *. L’ouvrage de M. Andresen s’est grandement enrichi d’une édi¬
tion à l’autre et son étendue a triplé depuis qu’il a vu le jour pour la
première fois. Ce n’est pas que l’auteur ait rien changé à son plan ;
mais un grand nombre d’exemples nouveaux dus à ses lectures et à ses
correspondants ont considérablement élargi ses cadres et accru* leurs
différentes sections. Sous sa forme actuelle, ce livre est à la fois une
étude sur un procédé de la formation du langage et un supplément aux
dictionnaires allemands. En un sens, c'est le glossaire raisonné de mots
provenant d’une même origine.
Dans notre premier compte-rendu nous avons parlé avec quelque
détail du sujet traité dans ce livre, nous n’avons pas lieu d’y revenir.
Rappelons seulement que 1 ’ t étymologie populaire » est la déformation
dun mot obscur, ou devenu tel, dans lequel l’instinct populaire cher¬
che à placer un sens par une étymologie en quelque sorte visible et tan¬
gible, ou que cet instinct cherche à rattacher à des mots plus connus.
Des mots ainsi transformés par l'étymologie populaire, les uns forcent
la consigne des grammaires et entrent dans la langue littéraire, par
exemple anormal pour anomal , prestidigitateur pour prestigiateur ,
choucroute de sauerkraut litt. « herbe aigrie », courte-pointe de culcita
puncta, « couverture piquée » par l’intermédiaire du vieux français
coulte-pointe, etc. Nous serions tenté d'appeler cette sorte de mots des
termes palimpsestes dans lesquels, sous l’étymologie apparente, le lin¬
guiste déchiffre une autre origine.
Il y a ensuite les mots déformés par l’instinct populaire, mais que la
diffusion de l’instruction scolaire empêche de s’implanter dans la lan¬
gue et surtout dans l’écriture, quoique plus d’un soit d’un usage fré¬
quent, par exemple pain enchanté pour pain à chanter (c’est-à-dire à
chanter la messe) jeu d'eaux pour jet d'eau , etc.
D’autres enfin sont des accidents individuels de personnes illettrées
que trompe la ressemblance des mots, par exemple ce terme inventé
inconsciemment par un sergent de ville et qu’un vaudevilliste eût en-
i. Revue critique , 1876, t. II, p. 117; et 1877, t. I, p. 346.
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ï 32 revue critique
vie : « Que venez-vous donc de faire là? » disait un passant aux agents
qui emmenaient un couple au poste. (Il s'agissait d’un cas d'adultère.)
« C’est un homme et une femme que nous venons de prendre en fia -
grant délire , » répondit un agent.
A ces différentes catégories il faut joindre le calembour qui n'est
qu’une étymologie populaire consciente, mais qui quelquefois a la même
influence sur la destinée des mots et des noms. M. A. en donne plu¬
sieurs exemples, et il n’oublie pas de citer le nom de Rue d’Enfer à
Paris, changé officiellement, en 1878, en Rue Denfert^Rochereau. On
voit que 1’ « étymologie populaire » n’est pas seulement le fait du
peuple
Et la garde qui veille aux barrières du Louvre
N*en défend pas nos rois!
Par ces quelques exemples (et parmi ceux-là il y en a que M. A.
pourra prendre pour sa prochaine édition), on voit que dans l’étude de
l’étymologie populaire le plaisant se mêle aisément au sévère. Mais
qu’on ne croit pas qu'il y ait là seulement un amusement. C’est en quel¬
que sorte une expérience de vivisection appliquée au langage. Les lin¬
guistes sont trop souvent tentés de raisonner sur des choses mortes. Ils
étudient le langage et ses lois comme on étudiait le corps humain et les
lois de la vie au moyen âge sans penser à disséquer, encore moins à vi-
viséquer, le corps humain. S'imaginent-ils que les lois du langage n’é¬
taient pas dans l’antiquité celles qui régissent aujourd'hui même les
transformations de nos langues contemporaines, quand on les prend en
dehors de l’influence perturbatrice de la littérature et de l’école? On
commence à donner une grande attention à la phonétique des dialectes
parlés aujourd'hui même ; c'est le côté le plus matériel de la linguisti¬
que, c'en est aussi le petit côté. Pour connaître les lois de la formation
du langage, il serait plus intéressant de voir comment des rudiments
d’idiomes nouveaux essaient de se former, comment par exemple une
pure convention donne leur sens à certains phonèmes, comment le
hasard crée certains suffixes, etc. A notre avis, l’étude philosophique du
langage devrait commencer par la langue des enfants, le parler popu¬
laire, et les argots, c’est-à-dire là oü la faculté créatrice est encore en
action.
L’étude de l’étymologie populaire est celle d’un des procédés psycholo¬
giques du langage, d’une des applications de la grande loi de l'analo¬
gie : à ce titre, elle mérite d'attirer l’attention des savants. Citer au ha¬
sard quelques cas d’étymologie populaire peut paraître un jeu d'esprit,
mais réunir ces cas, les classer, montrer l'influence de l’analogie dans la
formation du lexique, est une œuvre de science. Nous voudrions que
l’exemple de M. A. tentât un de nos jeunes romanistes, et qu’il étudiât
à ce point de vue le lexique français, celui de la langue parlée comme
de la langue écrite, — les glossaires patois sont pleins d'exemples de ce
genre, — sans omettre les noms de lieu qui doivent à ce principe de
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d'hISTOIRR ET DK LITTÉRATURH
133
nombreuses transformations. Si ce travail était fait, M. A. n’affirmerait
plus (comme il le fait pp. 20-21) que le procédé de l’étymologie popu¬
laire est plus développé en allemand que dans toute autre langue. Un
philosophe,— c’est, croyons-nous, ” u il signor Pulcinella,” w — a dit avec
justesse : tutto 7 mondo e fatto corne la nostra casa « le monde en¬
tier est fait comme.notre maison. »
Bien que nous nous abstenions de faire ici un supplément aux exem¬
ples français cités par M. Andresen, il en est un qu’il est peut-être bon
de donner parce qu’il s’est introduit dans une orthographe officielle, et
qu’on y voit bien comme certains mots ne peuvent échapper à la desti¬
née qui les transforme. Avant la guerre de 1870-71, il y avait dans le
parc de Saint-Cloud, dans un site charmant bien connu des Parisiens,
un petit monument, reproduction d’un monument d'Athènes. L'origi¬
nal était appelé à Athènes (quoique à ton) « La Lanterne de Démosthè-
nes, > et la copie reçut le même nom. Le public, qui, en fait de lanter¬
nes, ne connaissait dans l’antiquité que celle de Diogène, disait
obstinément « Lanterne de Diogène, » tandis que les gens instruits et
les livres consacrés à Saint-Cloud disaient « Lanterne de Démosthènes. »
Ce petit monument est détruit pendant le siège de Paris : on en trans¬
porte quelques débris au musée céramique de Sèvres : ils figurent avec
cette étiquette Fragments de la lanterne de Diogène! * C’est la vox
populi qui Va emporté!
Le livre de M. Andresen n’a plus besoin d’être recommandé aux phi¬
lologues et nous terminons cette courte notice par quelques indications
bibliographiques qui s'ajouteront aux siennes :
Karlowicz Sloworod Ludowy, Cracovie, 1878.
Palmer, Folk-Etymology , Londres, 1882, cf. article de M. Sayce
dans VAcademy du 20 janvier i 883 .
Nyrop, Sprogets vilde skud, Copenhague, 1882.
Ces trois ouvrages traitent de l’étymologie populaire dans les langues
slaves, en anglais et en danois.
H. Gaidoz.
CHRONIQUE
FRANCE. — L’attention du public anglais, dit le Temps du 3 août, est vivement
excitée en ce moment par l’annonce d’une découverte d’archéologie biblique, qui,
si elle était confirmée, serait delà plus haute importance. Le Palestine Exploration
Fund vient de recevoir de Palestine des morceaux de peau couverts de caractères
phéniciens. Ces morceaux auraient été trouvés, assure-t-on, entre les mains de Bé-
1. Voici le texte complet de cette inscription : 7 264. Terres-cuites des Frères
Trabucci ; fragments de la Lanterne de Diogène, du parc de Saint-Cloud, détruite
pendant la guerre de 1870-1871.
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REVUE CRITIQUB
>34
douins appartenant à une tribu des environs d’Amman, l’ancienne capitale de l’Am-
monitide, à l’est du Jourdain. L’écriture, très effacée et que l’on a fait réapparaître
par des lavages à l’alcool, ressemble tout a fait à celle de la fameuse stèle du roi
Mesa, découverte par M. Germont-Ganneau, il y a une quinzaine d’années, çt con¬
servée aujourd’hui au Louvre. Ces fragments ont été examinés par M. Bond, con¬
servateur en chef du British Muséum; par M. Aldis Wright, de Cambridge; le doc¬
teur Ginsburg, le docteur Horning et d’autres savants anglais. On a reconnu qu’ils
contenaient des parties du Deutéronome et le Décalogue. Tout en annonçant cette
merveilleuse trouvaille, nous croyons prudent de faire quelques réserves. On sait que
la stèle de Mesa a servi de modèle à de nombreuses contrefaçons de tout genre
auxquelles de respectables savants étrangers se sont laissé prendre. La plus considé¬
rable et la plus connue de ces fraudes est celle des statuettes et des vases moabites
couverts d’inscriptions apocryphes, acquis, il y a plusieurs années, par l’empereur
d’Allemagne pour le musée de Berlin, au prix de 80,000 fr. La supercherie fut alors
dévoilée par M. Germon t-Ganneau, qui réussit à mettre la main sur les faussaires
eux-mêmes. Depuis, quelques autres tentatives ont été faites dans le même sens.
Mais, comme on était mis en demeure par cette fâcheuse expérience, elles n’eurent
qu’un médiocre succès. Il ne serait pas impossible que les faussaires, un moment
découragés, se fussent remis à l’œuvre, et que le manuscrit biblique d’Amman sor¬
tît de la même fabrique. Il serait à souhaiter que ce document, d’une appréciable
valeur s’il est authentique, fût soumis^ au contrôle d’autres savants compétents et
notamment à celui des savants français qui, en matière d’épigraphie et de paléogra¬
phie sémitiques, jouissent en Europe d’une incontestable autorité.
— Voici le texte de la lettre que M. Henri Martin et plusieurs de ses collègues de
l’Institut viennent d’adresser au président et aux membres du conseil municipal de
Paris, à la suite du vote du 3 o juillet relatif à la conservation des Arènes de la rue
Monge : « Messieurs, dans sa séance d’hier, 3 o juillet, le conseil municipal a décidé
que la ville de Paris ferait l’acquisition de 7,000 mètres de terrain renfermant une
partie très importante et très intéressante des Arènes de Lutèce. Le comité des Arè¬
nes et les délégués de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres s’empressent de
vous exprimer leur profonde reconnaissance pour cette noble et patriotique résolu¬
tion. Grâces vous soient rendues, Messieurs, au nom de la science, au nom delà
grande cité, pour cet acte généreux qui assure aux générations présentes et à celles
de l’avenir la conservation du plus ancien débris de la ville gallo-romaine, qui de¬
vait être, dix-sept siècles plus tard, la capitale du monde civilisé ! Vous avez accom¬
pli, Messieurs, un grand devoir et vous l’avez noblement accompli. Agréez,
Messieurs, l’hommage de notre vive gratitude et de nos sentiments de haute consi¬
dération. » Signés : « H. Martin, président du comité des Arènes; L. Renier, A.
Bertrand, Deloche, délégués de l’Académie des Inscriptions et belles-lettres. »
— L’Association normande et la Société d’agriculture, des arts et des belles-lettres
du département de l’Eure se sont réunies dernièrement à Bernay pour inaugurer
le buste d’Auguste Le Prévost, l’archéologue. Ce buste, dû au ciseau de Bonassieux,
a été placé dans la salle de la justice de paix qui n’cst autre que le réfectoire de
l’ancienne abbaye de Bernay. M. Louis Passy, éditeur des œuvres de Le Prévost,
présidait la séance et a rappelé, dans son discours d’inauguration, les œuvres de Le
Prévost et les découvertes de celui que Nodier avait appelé le Pausanias normand.
— Le prince Orloff, ambassadeur de Russie, a adressé la lettre suivante au maire
de Langres : « Monsieur le maire, j’ai l’honneur de vous transmettre ci-après, la
somme de 2,000 fr. que S. M. l’empereur, mon auguste maître, a daigné destinera
la souscription pour l’érection d’un monument à Denis Diderot, à Langres. »
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O’HISTOIRK RT DR LITTÉRATURK
135
ALLEMAGNE. — Une exposition iconographique de Goethe a été organisée dans
la maison paternelle du poète, à Francfort sur le Main. Dans les chambres du
premier étage sont exposés deux cartons de Hermann Junker, qui représentent des
scènes de la vie de Goethe. Au troisième étage se trouvent le théâtre historique de
marionnettes appartenant au musée de la ville; des souvenirs des parents du poète;
un traité manuscrit, surchargé de corrections, sur l'art dans l’antiquité, ainsi qu’un
album, don de la ville de Florence au chapitre de Francfort, à l’occasion de la
couronne de laurier en argent que le chapitre avait envoyée pour la fête de Michel-
Ange Buonarotti.
AUTRICHE. — Nous avons déjà annoncé que Vienne célébrerait cette année
le 200 e anniversaire de la levée du siège que les Turcs avaient mis en i 683 devant
ses murs (Sobieskr. On a ouvert récemment dans la Stadthalle une exposition
historique où figurent, parmi les tableaux, un beau portrait de l’empereur Léopold,
les armes de l’électeur de Saxe, du margrave de Bade et du grand homme de guerre
qui commandait alors la garnison de Vienne, le comte Rüdiger Starhemberg, auquel
M. de THüRHEtu a tout récemment consacré une consciencieuse monographie. On y
voit aussi la tente du grand vizir Kara Mustapha, qui est la propriété du roi actuel
de Saxe, et la chaîne à laquelle étaient attachés les prisonniers chrétiens. On
trouvera encore à cette remarquable exposition des médailles commémoratives du
siège et toute une collection d’ouvrages relatifs à ce grand événement.
BELGIQUE. — M. Nève, professeur à Louvain, publiera prochainement chez
l’éditeur Ernest Leroux un nouveau volume sous le titre : Les époques littéraires
de l'Inde. Etudes sur la poésie sanscrite.
DANEMARK. — On nous apprend, de Copenhague, la mort de M. le professeur
Svent Gaundtvig, l’auteur bien connu de recueils de la poésie populaire danoise.
ÉTATS-UNIS.— Les Œuvres complètes de feu M. William H. Seward se publient
en cinq volumes ; les quatre premiers renferment des écrits déjà parus; mais le
cinquième ne comprendra que du nouveau et de l’inédit; comme l’indique le ti¬
tre, ce sera une histoire diplomatique de la guerre de la Sécession, Diplomatie his -
tory of the war .
GRANDE-BRETAGNE. — M. E. H. Palmer, dont la science déplore encore la
mort tragique, a laissé en manuscrit, mais dans un état assez imparfait, un petit
dictionnaire anglais-persan. Cet ouvrage a été remanié et complété par M. Guy Le
Strarge et paraîtra au mois d’octobre, à la librairie Trûbner.
— Parmi les prochains articles qui paraîtront dans Y Encyclopaedia Britannica ,
on signale déjà les suivants : Mosaic et Aiosque , par M. J. H. Middleton ; Mural
Décoration, par MM. Middleton et William Morris; Papacy et Reformation, par
M. J. Bass Mullinger; Plato , par M. Lewis Campbell.
— Le catalogue— préparé par la direction du British Muséum, — des livres pa¬
rus en anglais avant l’année 1641, sera bientôt terminé en entier.
— M. Richard Morris a terminé son édition du Cursor Mundi qui sera publiée
aux frais de 1 ’ « Early English Text Society. »
— L’ouvrage, que nous avons récemment annoncé de feu sir W. Stirling Maxwell
surdon Juan d'Autriche ( Life of don John of Austria) paraît en deux magnifiques vo¬
lumes in-folio, du prix de vingt-cinq guinées, et à 11 5 exemplaires seulement. Mais
prochainement paraîtra une édition destinée, non plus aux seuls amateurs, mais
au grand public, et dont le prix sera accessible à toutes les bourses.
— Sous le titre d’Euphorion (c’est le nom que donne Gœthe au fils de Faust et
d’Hélène), M. Vernon Lee, l’auteur des Studies of the eighteenth ceniury in Italy.
publiera prochainement un recueil d’études et d’articles relatifs à la littérature et à
l’histoire de la Renaissance.
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1 36 RRVUR CRÎTIQUK DHISTOIRR RT DE LITTÉRATÜRB
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 3 août i 883 .
M. Salomon Reinach lit un mémoire intitulé : Observations sur la chronologie de
quelques archontes athéniens, postérieurs à la 120 • olympiade. La fixation de U
liste des archontes athéniens, dont la mention sert à dater beaucoup de documents,
est d’une grande importance pour la chronologie et l'histoire grecques. La dernière
liste, donnée en 1875 par M Gelzer, peut être corrigée et complétée sur beaucoup
de points à l'aide des inscriptions découvertes à Délos par l’école française d’Athènes.
Le travail lu à l’Académie a pour but de faire servir a cet effet les inscriptions dé¬
couvertes à Délos, en 1881, par M. Hauvette-Besnault, en 1882. par M. S. Reinach.
En voici les conclusions : 1* L'archonte Méton, inconnu jusqu’à présent, doit être
placé vers no avant notre ère; 2 0 Les archontes Lykiskos et Dimysios, placés par
MM. Dumont et Gelzer vers l’an 5 avant notre ère, sont plus anciens de près d'un
siècle et appartiennent probablement aux années 102 et io 3 ; 3 ° L’archonte Agatho-
clès a été bien placé par M. Dumont vers l’an i 32 avant notre ère; MM. Ritschl,
Schoemann et Roehler se sont trompés en le plaçant un demi-siècle plus tard;
4 0 L’archonte Diotime, placé par M. Dumont vers ran b avant notre ère, doit se
placer au moins 90 ans plus tôt.
Sur la proposition de M. Deloche, l’Académie décide que des remerciements seront
adressés en son nom par le bureau à M. le préfet de la Seine, au sujet de la décision
qui vient d’être prise par le conseil municipal et l’administration de la ville, pour
rachat et la conservation des arènes de la rue Monge.
M. Alexandre Bertrand annonce que les papiers de François Thurot, membre de
l’Académie, mort en i 83 a, viennent d’être offerts à l’Institut par M“* Pochard, fille
de François Thurot et cousine germaine de Charles Thurot, membre de l’Académie,
mort en 1882.
M. Gaston Paris fait connaître une découverte que vient de faire M. Paul Meyer,
dans la bibliothèque de M. Goethals-Vercruyse, à Courtrai. C’est celle d’un impor¬
tant fragment manuscrit en vers français, du xui® siècle, qui contient une narra¬
tion relative à saint Thomas de Cantorbéry.
M. Benlœw continue sa lecture sur les noms de lieu terminés en andos, ando t
et en ouson, oson , ason. — Une carte publiée par M. Strecker, capitaine d’artillerie
autrichien, en 1869, a révélé l’existence de huit localités, voisines de Trébizonde,
dont les noms sont tous terminés en andos ou ando : Jerandos, Serandos, Liardando,
Massorando, SegaranJo, Marsan do, Palganando, Bobalando. Cette terminaison est
très fréquente dans les parties de l’Europe habitées par les Albanais; elle se ren¬
contre ausâi assez souvent dans la partie occidentale de l'Anatolie, mais elle n’avait
pas encore été signalée au-delà de rHalys. M. Benlœw pense que la région voisine de
Trébizonde, où ont été relevés ces noms, doit avoir été peuplée autrefois par une
colonie albanaise, et il s’attache à expliquer, par l’idiome albanais, l’étymologie et
le sens de chacun de ces huit noms Quant à la terminaison ouson , oson, ason , etc.,
on la rencontre dans le voisinage de Kaisariéh, l’ancienne Mazara, en Cappadoce,
où se trouvent des localités nommées Tablouson, Arlouson, Adderoson, Dirmoson,
Linason, etc. Selon M. Benlœw, ces noms sont sémitiques et la désinence commune
qui les termine signifie place ou tour fortifiée
M. Schwab lit le déchiffrement d’une inscription chaldéenne tracée sur une terre
cuite en forme de bol, découverte près de Hilla en Babylonie et récemment acquise
par le musée britannique. Il traduit ainsi cette inscription : « Salut du ciel, pour
(donner) la vie du seuil d’Aschir Mehadioud... au nom de l’Eternel le saint, le grand
dieu d’Israël, dont la parole, aussitôt qu’énoncée, est exécutée. » Suivent des versets
bibliques : Cantiques , m, 7; Nombres, vi, 24-26; Isaïe, xliv, a 5 . Par la forme des
caractères et surtout par leur disposition, cette inscription, qui offre des éléments
tachygraphiques nouveaux, paraît remonter au vt® siècle de notre ère.
Ouvrages présentés : — par M Gaston Paris : d’Arbois de Jubainvilub, Essai d’un
catalogue de la littérature épique de V Irlande; — par M. de Rozière : i° Bkautbmps-
Beaupré, Coutumes et Institutions de l’ Anjou et du Maine , t. IV ; 2 0 Maul.de (R. de),
Jeanne de France, duchesse d'Orléans et de Berry (1464-150D); 3 ° Finot (Jules),
Ville de Comines, inventaire somma re des archives communales antérieures à 17go ;
4° E&mein (Adhémar), Charles Giraud , notice sur sa vie et ses écrits juridiques , suivie
de la bibliographie de ses œuvres , par Eug. de Rozière.
Julien Havrt.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent y 2 5 ,
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Lotze, Grundzüge der Logik. — Jordanis Romana et Getica, rec. Th.
Mommsen. (On attendait cette édition, non pas avec impatience, mais
avec une sorte de désespoir, et le destin sembla la poursuivre jusqu’au
dernier moment; à peine le texte avait il quitté l’imprimerie que le ca¬
binet de travail de l’éditeur devint la proie des flammes, et avec lui,
quatre manuscrits de Jordanis, entreautres, le meilleur, celui de Heidel¬
berg. « Habent sua fata libelli! » Ce ms. est venu de Fulda à Mayence,
de là à Heidelberg, Tilly le donna à Rome, Napoléon l'envoya à Paris,
l'Allemagne le reprit, et le voici envolé à tous les vents; mais la nou¬
velle édition est, comme le phénix, sortie de la flamme. Si l’œuvre ache¬
vée éveille chez l’éditeur de tristes souvenirs, c’est à sa puissante force
de travail qu’on devra dé ormais de pouvoir se passer avec confiance de
tous les mss. On pourra chicaner sur des bagatelles, mais le tout, l’en¬
semble qu’il a créé, est une œuvre admirable, qui prépare et renouvelle
pour toutes les études sur l’histoire des Goths le fondement le plus dé¬
siré.) — Urkundenbuch der Stâdte Kamenz und Lobau, hrsg. v.
Knothe; Urkundenbuch der Stadt Freiberg in Sachsen, hrsg. v. Ermisch.
— W. Vogt, Die bayrische Politik im Bauernkrieg u. der Kanzler Dr.
Leonhard von Eck, das Haupt des Schwâbischen nundes. (Le jugement
est mesuré et le portrait de Léonard d’Eck, excellent.) — Chavanne,
physicalisch-statistischer Handatlas von Oesterreich-Ungarn in 24 Kar-
.ten mit erlàuterndem Text, unter Mitwirkung v. Haardt u. Andern
hrsg. — K. Schulz, Zur Literàrgeschichte des Corpus juris civilis. —
Der Periplus des Erythrâischen Meeres von einem Unbekannten,
f riechisch u. deutsch/mit Anmerk. nebst Wôrterverzeichnisse v. B.
abricius. (Très bonne édition qui ne laisse presque rien à désirer.) —
Hennen, De Hannonis in Pœnulo Plautina precationis quae fertur
recensione altéra Punica. (N’a guère d’autre mérite que d'être un re¬
cueil de matériaux, mais peu de méthode et de critique.) — Goetz, De
compositione Poenuli Plautinae commentariolum (Brillant résultat ;
les deux scènes IV, 1 et 2 formeraient le commencement du II e acte).
— D’Arbois de Jubainvtlle, Introduction à l’étude de la littérature cel¬
tique. (Beau livre de l'infatigable savant, rempli d'une foule de faits
intéressants, habilement ordonné.)
Theologi 80 he Literaturzeitung, n° i 5 , 28 juillet 1 883 : Theologischer
Jahresbericht, unter Mitwirk. v. Bassermann, Benrath, Bôhringerhrsg.
v. Pûnjkr. 2* Band, enthaltend die Literatur des Jahres 1882. — An¬
nales du Musée Guimet, tome IV (W. Baudissin). — Vilmar, Collegium
biblicum, praktische Erklàrung der heiligen Schrift Alten und Neuen
Testaments (Holtzmann). — P. Cassel, Die Hochzeit von Cana, theo-
log. u. histor. im Symbol, Kunst und Legende ausgelegt (Weiss). —
Luther’s sàmmtliche Werke, II. Reformations-historische u. pole-
mische deutsche Schriften, nach den âltesten Ausgaben kritisch aufs
neue bearb. von Enders. I Band, 2 e Auflage (Brieger). •— Calinich,
Martin Luthers kleiner Katechismus, Beitrag zur Textrevision dessel-
ben (Bertheau). — Kôrber, Luthers Leben dem deutschen Volk er-
zàhlt. — Ehses, Geschichte der Pack’schen Hàndel, ein Beitrag zur
Geschichte der deutschen Reformation (Max Lenz : gros volume qui
n'a cette étendue que parce que l'auteur a fait de très longues citations
de documents déjà connus et a répété six ou huit fois ce qu'il avait
déjà dit; ce qu’il y a de plus étonnant, c’est la méthode critique de
l’auteur; ij aurait dû, d’ailleurs, consulter les archives de Marbourg,
Weimar et Dresde). — Bender, Johann Konrad Dippel, der Freigeist
aus dem Pietismus, ein Beitrag zur Entstehungsgeschichte der Auffclà-
rung (W. Môller : l’histoire de la vie aventureuse de Dippel méritait
detre éclaircie ; l’auteur n'a pas accompli sa tâche sans succès).
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Remarques sur le rôle de l’élément franc dans la formation de la langue
française, par Martin Schwbisthal. In-8. 2 fr.
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Le Yidghah et le Yagnobi, étude sur les deux dialectes de l’Asie cen¬
trale, par J. van dbn Gheyn. ln-8. 2 fr.
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2 . Mariages, par Landes, ln-8. . . 2 fr.
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L’inscription sanscrite de Han Chey, par Aug. Barth. ln-8, avec 2 pl.. 1 56
Tout au grand jour! Appel à la conscience publique (contre la vivisec¬
tion), par Arthur Massé. In -18 . m 25
Le Puy f imprimerie de Marckessou fils . boulevard Saint-Laurent, 23.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 587, 4 août i 883 : Ireland, Ralph Waldo Emerson,
a biographical sketch; Conway, Emerson at home and abroad (Browne).
— Lieut. col. C. T. Wilson, The duke of Berwick, marshal of France,
1702-1734. (Courtney : bon livre sur le vainqueur d’Almanza ; décrit
avec ce soin qui vient de connaissances scientifiques, les campagnes du
maréchal ; « a work of honest labour and a valuable addition to the lite-
rature of the epoch »). — James Grant, Old and New Edinburgh, its his-.
tory, its people and its places. (W. Wallace.) — HoBART,the medical lan-
guage of St Luke, a proof from internai evidence that t the gospel accor-
ding to St. Luke 1 were written by the same person and that the writer was
a medical man. (Greenhill : ouvrage de haute valeur, où tous les passa¬
ges cités et comparés avec ceux des médecins grecs méritent un examen
attentif, et témoignent d'un grand soin et d'une rare érudition.) — Eas-
ther, A glossary of the dialect of Almondbury and Huddersfield, edited
by T. Lees [Enalish Dialect Society]. (Bradley.)— Opéré inédite o rare
di Alessandro Manzoni pubblicate da Ruggero Bonghi. (Balzani : le réel
intérêt de ce premier volume consiste dans les variantes trouvées dans
les manuscrits de poèmes déjà connus, par ex. de la fameuse « ode à Na¬
poléon »). — Some books on political economy. — Heinrich von Fers-
tel, not. nécrol. (Krebs). — Modem mysticism : letters from a mystic of
the présent day. — Horace Walpole's copyof the Portland Muséum ca¬
talogue. Monumental inscriptions in Norfolk. (Rye.) — Cat Folk-Lore.
(Einna Halfdon.) — Carlo Landberg, Proverbes et dictons du peuple
arabe, matériaux pour servir à la connaissance des dialectes vulgaires,
recueillis, traduits et annotés. Vol. I. Province de Syrie, section de
Saydâ. (Stanley Lane-Poole : publication très intéressante.) — The ad-
ventures of a pahlavi ms. (West.) — Chinese and siamese (Frankfurter).
— Mural paintings at Rome on the Capitol. — Mr. Wood s excavations
at Ephesus. — A contemporary notice of Gainsborough.
The Athenaeum, n° 2910, 4 août i 883 : Seebohic, The english village
community examined in its relations to the manorial and tribal Systems
and to the common or open field Systems of husbandry. — Yriarte,
Françoise de Rimini, dans la légende et dans Phistoire — O. Frank¬
furter, Handbookofpâli, being an elementary grammar, a chrestoma-
thy and a glossary. (Consciencieux et soigné, trop de fautes d'impres¬
sion.) — Phil. Robinson, Sinners and saints. (Sur les Mormons.) —
C. H. Hamilton Wright, The book of Koheleth, commonly called
Ecclesiastes, considered in relation to modem criticism. (A part quel¬
ques critiques à faire, un des meilleurs commentaires qui aient paru sur
l’Ecclésiaste.) — The real Lord Byron (Jeaffreson). — A plagiarism of
Goldsmith's. — The New Shakspeare Society (Brinsley Nicholson). —
The Leofric Missal. (F. E. Warren.) — TheKyre « Book of St. Albans. »
(Blades.)— PatrickBranwell Brontë (T. Wemyss Reid). —Stone monu¬
ments north of great slave lake. (J ohn Rae).
Literarisches Centralblatt, n° 32 , 4 août 188 3 : Wendt, Die christliche
Lehre von der menschlichen Vollkommenheit untersucht. — Analecta
Lutherana, Briefe u. Actenstticke zur Geschichte Luther's, ein Supplé¬
ment zu den bisherigen Sammlungen seines Briefwechsels, hrsg. v.
Kolde. — Die Chroniken der deutschen Stàdte. Mainz. II, 2 parties.
— Hôhlbaum, Mittheilungen aus dem Stadtarchiv von Kôln. I fasci-
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 34
— 20 août —
1888
Sommaire s 167. Grucker, Histoire des doctrines littéraires et esthétiques en
Allemagne, Opitz, Leibniz, Gottsched, les Suisses. — 168. Armand, Les médail-
leurs italiens des xv" et xvi* siècles; Heiss, Les médailleurs de la Renaissapce. —
Variétés : Clermont-Ganneau, Notes d’archéologie orientale. IV : Stephaton,
l’homme à l’éponge de la Crucifixion et les deux larrons Gestas et Dysmas. —
Thèses de M. George Duruy : la trêve de Vaucelles et le cardinal Carlo Carafa.
167. — Histoire des doctrine» littéraire» et esthétique» en Allemagne}
par Emile Grucker, professeur de littérature étrangère à la Faculté des lettres
de Nancy. (Opitz, Leibniz, Gottsched, les Suisses). Paris, Berger-Levrault et O,
i 883 . In-8, xx, 5 z 6 p.
« La littérature allemande moderne, depuis Opitz jusqu’à Gottsched,
dit M. Grucker (Préf., p. ix), prise dans son ensemble, n’est pas le pro¬
duit de la la libre expansion du génie national et populaire, mais le ré¬
sultat d’un travail lent et difficile d'imitation, aidé, provoqué par l’é¬
tude des règles, des poétiques, des modèles empruntés à l'étranger. Elle
est l'œuvre de la critique, de la réflexion et non de l'inspiration... Elle
est arrivée à l’originalité par l’imitation, au naturel par l’étude et par
la servitude à la liberté. » Cette remarque est juste, et le rôle joué par
la critique dans le développement littéraire en Allemague justifie le des¬
sein que M. G. a formé d’écrire le livre que j’annonce et fait pressentir
l'intérêt qu'il peut présenter \
C'est avec Opitz que commence véritablement l’histoire de la littéra¬
ture allemande moderne, ainsi que celle des théories esthétiques qui ont
présidé à son développement; mais, avant de les exposer, M. G. a con¬
sacré deux chapitres étendus à retracer l’état intellectuel et moral de
« l’Allemagne avant et après la guerre de Trente Ans », et à montrer
quelle fut l’œuvre des sociétés littéraires qui, à cette époque, s'efforcè¬
rent, de l'autre côté du Rhin, de conserver la pureté de l'idiome natio¬
nal et de restaurer la poésie délaissée ou déchue. Les influences étran¬
gères qui s’exercent en Allemagne dès le xvi e siècle, la Renaissance et
le caractère particulier qu'elle affecta dans ce pays, l’opposition entre la
littérature savante qui en est sortie et la littérature populaire restée fi¬
dèle aux traditions nationales, le roman et le théâtre depuis la Réforme,
1. Toutefois, je ne puis m’empêcher de remarquer qu’il m’est impossible d’ap¬
prouver entièrement le titre choisi par M. G.; le mot doctrines a un sens trop étroit,
j’aurais préféré celur d'idées, employé par M. Desmichels dans un ouvrage bien
connu et qui permet d’aborder d’autres questions que celles des théories esthétiques
du xvii® et du xvm® siècle.
Nouvelle série, XVI. 34
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138
REVUS CRITIQUE
le rôle de la satire pendant la même période, enfin, la corruption delà
langue que Luther semblait avoir fixée; voilà quelques-uns des traits
du tableau destiné à nous montrer Tétât de l'Allemagne avant la
guerre de Trente Ans. Les maux accumulés par cette guerre désastreuse,
la faiblesse et <t l'anarchie organisée s de l’empire depuis la paix de
Westphalie, la dégradation morale du peuple, la corruption des princes,
l'isolement des savants du reste de la nation, Tinfluence politique et
littéraire de la France, Tinvasion dans la langue de mots étrangers *,
conséquence fatale de cette influence subie, malgré les protestations
indignées de quelques écrivains patriotes, comme Moscherosch et Lo-
gau, nous disent ce que fut TAllemagQe depuis le milieu du xva* jus¬
qu’au commencement du xviii® siècle. Il y a là sans doute un portrait
frappant, mais dont quelques traits auraient demandé à être plus exacts
et plus précis *; tant d'objets passent d’ailleurs devant les yeux qu’on ne
les saisit pas tous avec une égale facilité; on peut aussi se demander si
M. G. a eu véritablement raison de poursuivre, dans son premier chapi¬
tre, jusqu’à la fin du xvn® siècle, l'exposé de la situation morale et intel¬
lectuelle de l’Allemagne, quand il revient, dans le chapitre m, pour en
retracer le mouvement littéraire, à la première moitié de ce siècle ; les
protestations patriotiques de Moscherosch et de Logau eussent été peut-
être aussi plus à leur place dans le chapitre qui traite d'Opitz et de
Harsdœrfer ; on est encore plus surpris d’entendre parler de l'établisse"
ment des Réfugiés en Allemagne, de la colonie française de Berlin et de
fondation de l'académie des sciences, avant de connaître l’histoire de lt
première école silésienne; il me semble au moins qu'ainsi présenté l'ex¬
posé des faits est capable de dérouter un lecteur peu au courant de l’his¬
toire générale de la littérature d'outre Rhin.
M. G. a traité longuement et peut-être même un peu trop longue¬
ment l’histoire des diverses sociétés littéraires allemandes qui parurent
1. M. G., dans le tableau du xvn® siècle, remarque, p. 73, note 1, que « le fran¬
çais s’enrichit aussi de quelques mots allemands », et il en cite, évidemment d’a¬
près Barthold, un certain nombre; mais ces mots ont été adoptés —et tous, moins
trois, pour quelque temps seulement — par notre langue, non au xvn*, mais au
xvi* siècle.
2. On ne s’explique pas, par exemple, que M. G. dise, p. 49, des romans picares¬
ques qu'ils sont «c sans valeur littéraire ». il faut ajouter que si le roman picaresque
a pris naissance en Espagne au xvi* siècle, il n'a été connu en Allemagne qu’au
xvn e ; il n’y avait donc pas lieu d’en parler dans le tableau de la littérature alle¬
mande au xvi e siècle. On comprend encore moins la note de la même page 49 —
note en contradiction, du reste, avec celle de la p. 5 r, — laquelle semble faire du
Simplicissimus un roman du xvr* siècle. Même page 49, M. G. paraît oublier que
les Mordspektakel et les Hauptstaatsactionen sont de la fin du xvn* et non du
xvi* siècle. Il me semble également que J. Ayrer et Julien de Brunswick méritaient
plus que d’être mentionnés en passant et dans une note. Je m’explique peu aussi
que M. G. cite, parmi les écrivains antérieurs à la guerre de Trente Ans ou même
du xvi e siècle, Andreæ et Weckherlin, morts seulement l’un en 1604, l'autre en
i 65 i.
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d’histoire et de littérature
i39
pendant le xvn« siècle; le sujet était peu connu chez nous et partant
nouveau à bien des égards; cette circonstance peut justifier les dévelop¬
pements qu’il a reçus dans le livre de M. G. ; évidemment il ne peut
guère ici être question véritablem ent de doctrines littéraires ou esthéti¬
ques, encore qu'il soit sorti de ces sociétés nombre de poétiques ou de
traités de versification, et c'est seulement en élargissant le sens des mots
que M. G. a pu faire une place aussi considérable à l’histoire de ces as¬
sociations , dont la plupart, malgré les efforts et le désir de leurs mem¬
bres, furent sans action sur le mouvement littéraire contemporain. Cette
histoire n’en est pas moins curieuse, mais elle est parfois un peu fati¬
gante; aussi je n’essaierai pas de la refaire après M. G. et je préfère ren¬
voyer au chapitre qu’il lui a consacré; écrit à l’aide de documents dont
quelques-uns sont peu accessibles ou rares, ce chapitre, par les rensei¬
gnements nombreux qu'on y trouve, pourra être consulté non sans
fruit \
Avec Opitz, le père de la poésie moderne allemande, M. G. entrait
à plein dans son sujet ; après avoir fait connaître l’homme, il a étu¬
dié le réformateur dans ses deux ouvrages didactiques, ÏAristar -
chus, qu'il écrivit à dix-sept ans, et le Traité de la poésie allemande ,
publié six ans plus tard. Les théories esthétiques d'Opitz sont loin d’ê¬
tre originales, ce ne sont le plus souvent que des maximes empruntées
aux philosophes ou aux critiques de l’antiquité et de la Renaissance,
entre autres à Ronsard; il y aurait eu intérêt à mettre plus en lumière
que ne l’a fait M. G. ce que le poète allemand doit à ses devanciers, en
particulier au chef de la Pléiade ; ainsi le caractère théologique qu’Opitz
attribue à la poésie n’est point de son invention ; c’est dans Ronsard,
comme l’a montré d'ailleurs M. Julius Tittmann, qu’il en a trouvé l’i¬
dée première. Quant à la réforme littéraire tentée par Opitz, M. G. l’a
très bien jugée, sans en exagérer ni en diminuer l’importance, et il y a
quelque chose d’ingénieux et de vrai dans la comparaison qu'il lait en¬
tre le Traité de la poésie allemande d’Opitz et Y Illustration de la
langueJranqaise de Joachim Dubellay, un de ces écrivains de la Pléiade
qu’Opitz eut en si haute estime jusqu’à l'époque de son voyage à Paris.
M. G. termine ce chapitre en passant en revue quelques-uns des écri¬
vains contemporains, disciples, admirateurs ou adversaires d’Opitz, et-
dont la poésie savante fut attaquée, entre autres par le satirique Lau
renberg et par Schuppius, au nom des traditions et du génie na¬
tional.
A Opitz ne revient pas seul l’honneur d'avoir essayé de restaurer la
poésie allemande; en même temps que lui, Harsdœrfer fondait à Nu¬
remberg, dans cette ville qui fut un des sanctuaires de la Renaissance
i. Page 117, au lieu d'Arthémise, lire Arténice. — Page 122, M. G. traduit Auf-
richtige Tannengesellschaft par « société du (grand) sapin droit»; quelque con¬
fiance que j'aie dans sa profonde connaissance de l'allemand, j'ai peine cependant à
prendre ici aufrichtig au sens étymologique et physique, sens d'ailleurs inusité.
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REVUS CRITIQUE
140
allemande au xvi e siècle, une école rivale de celle du poète silésien.
M. G. a raconté un peu longuement, d’après J. Tittmann, l’histoire de
cette école et de ses efforts; mais si quelques pensées ingénieuses se trou¬
vent dans les Jeux de conversation et dans Y Entonnoir poétique de
Harsdœrfer, je ne puis m’empêcher de trouver que c’est faire trop
d’honneur au critique de la société des « Bergers de la Pegnitz » d’in¬
sister, comme M. G. l'a fait, sur des théories dont la vanité est trahie par
le titre ridicule même des ouvrages où elles sont exposées ; la question
serait, du reste, de savoir si ces pensées sont bien toutes de Harsdœrfer;
car, s’il s’est un jour montré poète heureux et sensé, on peut douter
qu’il ait jamais été critique original. Il en est de même des idées deClay
sur la tragédie, idées que dément trop son absence absolue de tout ta¬
lent poétique dans ses drames, pour qu’on les lui attribue sans preuve,
et que dire des vers niaisement imitatifs de Birken? Il est trop évident
que la réforme tentée par l’école de Nuremberg devait échouer, et l’im¬
portance excessive accordée par les poètes qui la représentent à la pas¬
torale, est leur condamnation. Mais est-il vrai, comme le remarque
M. G., qu’ils se soient surtout proposé les Italiens pour modèles f ? On
peut le dire de Hoffmannswaldau et de Lohenstein, les imitateurs de
Marini, mais^cela n'est pas entièrement vrai des « Bergers de la Peg¬
nitz ». Quant aux deux chefs de la seconde école silésienne, M. G. a eu
raison de passer rapidement sur leurs œuvres; il a eu non moins raison
de ne pas confondre avec eux A. Gryphius, qui, par ses tendances mo¬
rales et la nature de son talent, s’en sépare si complètement.
On ne doit pas être surpris de trouver le nom de Leibnitz dans une
histoire des doctrines littéraires en Allemagne; on pourrait l’être seule¬
ment, puisque c’est du système de Leibnitz développé par Wolfif qu’est
sortie l’esthétique, que M. G. lui ait fait la place si petite et ne se soit
occupé que des écrits du grand philosophe qui ont trait à la langue alle¬
mande; petits par le volume, ces écrits ont d’ailleurs une importance
réelle, sinon par leur portée scientifique, mais parce qu'ils témoignent
de l’activité prodigieuse et du patriotisme de Leibnitz \ Ils montrent
comment, frappé du délaissement et de la décadence de l'idiome natio¬
nal, il s’efforça, en en rappelant les qualités puissantes et natives, de le
remettre en honneur. Il y a là des vues très originales qui ne doivent
1. Il ne l’est pas certainement de dire, comme M. G. le fait p. 25 o, qu’ « à partir
du xvii® siècle la vie littéraire se transporte dans le Nord »; c’est oublier Haller,
Bodmer, Britinger, Wieland, etc., pour ne parler que des écrivains qui parurent
avant 1750.
2. Page 3 ai, M. G. dit qu’en 1763 a Herder, sur l’invitation d’un prince allemand,
esquissa à son tour (après Leibnitz) le plan d’une académie, etc. »; il y a là une er¬
reur manifeste. De plus, M. G. renvoie, note 1, au tome X des Œuvres complètes
de Herder; aucun des tomes X des trois séries que comprennent les œuvres du
grand écrivain ne contient l'IUee %um patriotischen Institut , etc.; même page, note 2,
M. G. fait une longue citation, tirée vraisemblablement de ce même ouvrage, et
l’indique comme se trouvant dans le tome XXXIII des Œuvres de Herder.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE 141
point surprendre venant de Leibnitz, mais qui étonnent au premier
abord de la part d’un homme qui n’a guère écrit qu'en latin ou en fran¬
çais; ce sont ces aperçus ingénieux qui font l'intérêt de VAvertissement
aux Allemands et des Pensées sur l'usage et l'amélioration de la lan¬
gue allemande et il faut savoir gré à M. G. d’en avoir donné une ana¬
lyse substantielle et étendue. C'est pour avoir essayé comme Leibnitz,
mais plus ouvertement que lui, de relever la langue allemande de son
état de déchéance, que Thomasius a le droit de figurer à côté du grand
philosophe dans l’histoire des doctrines littéraires en Allemagne ; le pro¬
fesseur qui, le premier, dans une université allemande, osa afficher le
programme d’un cours en langue allemande, le savant qui, en face des
Acta eruditorum, ne craignit pas de publier une revue allemande,
avait le droit de prendre en main la cause du relèvement intellectuel de
sa patrie; c’est ce qu’il a fait dans son livre de VImitation des Français ,
imitation, comme le montre M. G., qu’il ne combattait pas, mais qu’il
voulait faire servir à l’émancipation de l'Allemagne.
L’examen des écrits de Leibnitz sur la langue allemande et du livre
de Thomasius sur VImitation des Français fait l’objet des chapitres vi
et vu; dans le chapitre vm, M. G. retrace l'histoire des tentatives de
réaction contre l’école de Hoffmannswaldau et de Lohenstein. Ici nous
retrouvons la critique littéraire proprement dite; Chr. Weise, en effet,
que nous rencontrons tout d’abord parmi leurs adversaires, ne fut pas
seulement poète, il fut aussi un critique et, dans trois écrits diSérents,
il a exposé ses idées sur l’art de composer et sur le but et le rôle de la
poésie; esprit juste, le bon sens fut sa loi suprême; on le reconnaît à la
sagesse de ses préceptes, dont quelques-uns, encore aujourd’hui, mérite¬
raient d’être médités ; mais la raison ne suffit pas pour faire un grand
poète et Weise ne sut guère s’élever au-dessus du médiocre ; Kœnig,
l’auteur d'une Dissertation sur le goût % n’y atteignit même pas, et je
m’étonne un peu que M. G. ait paru accorder la moindre importance,
même comme critique, à un écrivain aussi complètement dénué de ta¬
lent. Il n’en est pas de même, il s’en faut, de Wernike ; ses épigrammes
plaisent encore aujourd’hui, en même temps qu'elles sont un monu¬
ment curieux de la lutte engagée contre la seconde école silésienne.Tous
ses efforts pour la renverser, bientôt les essais faibles, mais corrects des
disciples de l'école classique, tels que Canitz, préparent la voie à l'écri¬
vain, plus tard si décrié, mais à qui revient l’honneur d’avoir voulu
fonder dans sa patrie une littérature nouvelle à l’imitation et sur le mo¬
dèle de la littérature française, à Gottsched *.
Le chapitre (ix) que M. G. a consacré au célèbre écrivain et à son
1. M. G., en terminant ce chapitre, parle avec raison du rôle joué par Morhof et
Prasch dans l’histoire de la critique en Allemagne; page 401, dans la liste des au¬
teurs suivis par Morhof dans son Histoire de la vieille poésie française, \\ faut lire
Claude Fauchet et non Franchet , ce qui est évidemment une faute d’impression ;
quant à Verdières , ce nom a dû être mis pour Duverdier.
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REVUE CRITIQUE
I42
école est le plus considérable de son livre et il en forme, avec le chapi¬
tre x, qui traite des Suisses et de leur rivalité avec l'école saxonne, k
partie la plus intéressante. Le sujet, il est vrai, y prêtait; si la querelle
des Suisses et des Saxons nous touche peu aujourd’hui, elle n’en a pas
moins une importance historique incontestable, parce qu'elle est le point
de départ d’un mouvement littéraire qui ne s’arrêtera plus jusqu’à l’avè¬
nement de Gœthe et de Schiller. M. G. a étudié Gott 9 ched sous toutes
les formes de son activité littéraire », mais ce sont surtout, comme de
juste, ses théories esthétiques qu’il s’est attaché à faire connaître, à l’aide
d’extraits de la Poétique et des Beitrâge du célèbre professeur ; c’est
également par l’examen des ouvrages critiques de Bodmer et de Brei-
tinger qu’il a cherché à montrer l’action qu’ils exercèrent sur les coû-
temporains et sur le développement général de la littérature alle¬
mande. La comparaison des écrits de Gottsched,de Bodmer et Breitinger
explique leur inévitable opposition, tout unis qu'ils furent à l’origine
dans une même lutte contre les admirateurs et les disciples de Lohens-
tein; Gottsched est un disciple de Wolff; on ne le remarque que trop ;
le rationalisme étroit du philosophe a porté malheur au poète ; l’imagi¬
nation sacrifiée comme une faculté d’ordre inférieur, les règles mises à
la place du génie créateur, la poétique transformée ainsi en un recueil
de préceptes, qui doivent servir à l’écrivain à faire, suivant le cas, une
épopée, une tragédie ou n’importe quelle œuvre poétique, voilà à quoi
aboutissent, en définitive, les doctrines littéraires de Gottsched : com¬
ment s’étonner après cela de l’opposition que finirent par lui faire Bod¬
mer et Breitinger, ces défenseurs des droits de l'invention créatrice, ses
partisans du merveilleux, qu’ils regardaient comme l’élément indispen¬
sable et la condition de toute œuvre poétique? M. G. a exposé en détail
la querelle des deux écoles, en l’expliquant par l’analyse des écrits qui
marquent leurs tendances diverses, et montrant sans parti pris ce quia
fait leur mérite ou leur faiblesse; il met ainsi le lecteur en état de se
prononcer par lui-même sur ce grand débat. On voit bien avec lui
comment de l’école des Suisses pouvait et devait sortir la Messiade, mais
on ne comprend pas moins que les essais et les publications dramatiques
de Gottsched aient préparé la voie à Lessing et rendu possible la fonda¬
tion d’un théâtre national en Allemagne.
Le nom de Lessing qui se trouve ainsi, avec celui de Klopstock * —
sans parler de ceux de Wieland, de Winckelmann et de Herder, — à la
dernière page du livre de M. G., annonce une ère nouvelle, celle de
1. Il y a une exagération évidente dans ce que dit M. G. des rapports littéraires
de Gottsched avec la France; ainsi la lettre que lui écrivait Fontenelle en 1732 est
tout simplement d’une banalité polie; d’ailleurs Fontenelle, comme il l’avoue lui-
même, ne sachant pas un mot d’allemand, ne pouvait guère applaudir aux efforts de
Gottsched a pour répandre (en Allemagne) le goût de la littérature française. »
2. C’est par une simple inadvertance que M. G. évidemment a pu dire, p. 5 a 1,
qu’en 1748 ont paru les quatre premiers chants de la Messiade ; il n’en parut que
trois.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
143
l’affranchissement de la littérature allemande; M. G. nous en promet
prochainement l’histoire et il faut espérer qu'il tiendra bientôt sa pro¬
messe; l'importance philosophique des questions littéraires qui furent
alors soulevées ou résolues est bien faite pour le séduire, et d’ailleurs, la
tâche est loin d’offrir les difficultés de celle qu’il vient de mener à bonne
fin ; faire l'historique des doctrines esthétiques en Allemagne d’Opitz à
Gottsched, c'était, il faut bien le dire, une entreprise ardue, non que le
sujet fût inconnu, mais parce qu’il offre quelque chose de monotone et
de fatigant; il faut ajouter que l'exposé de théories qui se répètent le
plus souvent et ne se recommandent par aucune originalité, que la
stérilité poétique d'une époque qui n’a produit aucune grande œuvre,
qu'enfin l’impossibilité de remonter toujours aux sources et de s’en¬
tourer de tous les moyens d'information nécessaires étaient bien faits
pour rebuter; il faut féliciter aussi M. Grucker de ne pas s’être laissé
arrêter par ces difficultés et de les avoir souvent surmontées.
C. J.
168. — Les médallleura Italiens des quinzième et seizième siècles,
par Alfred Armand. Deuxième édition, revue, corrigée et considérablement
augmentée. Paris, Plon. i883. In-8, t. I, xviii-3o 8 p.; t. II, 368 p.
— Le» médallleurs de la Renaissance, par Aloiss Heiss. Paris, Rothschild,
i88i-i883. 4 fasc. in-fol., i*r fasc. 48 p.; 11 photographies et 75 grav.;
2* 56 p., 5 phot., 60 grav.; 3 e 60 p., 8 phot. et i 3 o grav.; 4* 60 p., 8 phot.,
100 grav. Prix de chaque fascicule : 40 francs.
Voilà deux ouvrages qui honorent singulièrement la science fran¬
çaise et lui assurent une incontestable supériorité dans un des domaines
où elle a eu le plus à compter avec nos redoutables rivaux d'outre
Rhin. Dès 1880, en effet, les lecteurs de la Revue critique ne l'ont
peut-être pas oublié, commençait à paraître un travail de l'érudit con¬
servateur du cabinet des médailles de Berlin M. Julius Friedlaender,
travail qui, d'abord inséré dans le Jahrbuch der Kôniglich Preussischen
Kunstsammlungen, a fini par être publié en volume. Je ne reviendrai
pas sur les critiques que j'ai formulées naguère ici même 1 au sujet de
cette publication : les travaux de MM. Armand et Heiss n'ont pas
besoin, pour être appréciés à leur valeur, d’une comparaison qui
serait tout à leur avantage. C’est plutôt en les rapprochant l’un de l’au¬
tre, en montrant l’émulation de deux savants amis qne nous rendrons
justice à leurs efforts.
M. A. adonné à son travail la forme d’un répertoire, d'un catalo¬
gue; à une courte notice biographique sur chaque maître succèdent la
description sommaire de ses médailles, soit authentiques, soit attri¬
buées, et des observations critiques. Ce catalogue est le plus complet qui
1. Voy. la Revue critique du 8 mars 1880, et, en outre, mes Précurseurs de la
Renaissance, p. 42, 43, et la Galette des Beaux-Arts, mai et juin i 883 .
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REVUE CRITIQUE
144
ait jamais été dressé, et ce n'est pas peu dire, car, à partir du xvn« siècle,
nous le savons par les publications de du Molinet, de Bonanni, de Ve-
nuti, par le Muséum Ma\\uchellianum et l’ouvrage de Moehsen, Fran¬
çais, Italiens, Allemands, n’ont rien négligé pour réunir des séries aussi
nombreuses que possible de ces productions curieuses. Pour apprécier
l'écart entre la première et la seconde édition du travail de M. A., il
suffit de dire que celle-ci forme deux volumes, de plus de trois cents pa¬
ges chacun, tandis que l’édition publiée en 1879 ne contenait que
ï 97 pages. Cet accroissement considérable est dû autant aux nou¬
velles découvertes de l’auteur qu'à l'adjonction des pièces anonymes,
omises à dessein dans l'édition de 1879. A la richesse de ce vaste réper¬
toire, si précieux pour l'histoire de l'art du xv° et du xvi« siècle, et
pour l’iconographie des personnages les plus fameux de cette grande
époque, correspondent la sûreté et la distinction du goût, la netteté et
la précision des descriptions. Le travail de M. A. est, à tous égards, un
manuel absolument classique.
M.H. s’est proposé un but différent de celui de M. Armand. Ce
n’est pas un manuel qu’il a entrepris de nous donner; c’est une série
de monographies. Le premier fascicule, nous devrions dire le premier
volume, car le travail a assez d’étendue et d’importance pour justifier
cette appellation, est consacré à un seul artiste ; il est vrai que c’est le
premier en date et le premier par le talent, le Pisan. La biographie du
maître, celle des personnages qu’il a immortalisés par ses médailles,
la description minutieuse de ces dernières, des planches nombreuses et,
chemin faisant, tout un monde de renseignements artistiques et icono¬
graphiques des plus précieux, telles sont les matières composant l’étude
par laquelle M. H. a inauguré sa série. Une découverte capitale, celle
des dessins ayant servi à la préparation des médailles du Pisanello,
dessins que l’auteur a découverts au Louvre, oü ils ont longtemps
passé pour l’œuvre de Léonard de Vinci, a marqué la publication de cette
monographie consacrée à un maître sur lequel tout semblait avoir été
dit. Nous ne saurions faire un plus bel éloge de l’œuvre longue et dis¬
pendieuse entreprise par M. H. qu'en disant que chaque nouveau
fascicule est en progrès sur celui qui l’a précédé 1 : l’exploration des
manuscrits à miniatures et la recherche des portraits peints ou sculp¬
tés n’ont pas tardé à venir compléter l’étude des médailles ; bientôt
nous devrons à M. H. une galerie iconographique aussi riche que
variée de la période la plus intéressante de la Renaissance.
On ne saurait trop applaudir aux principes de bonne et sévère érudi¬
tion qui se font jour dans les ouvrages de MM. Armand et Heiss et sur¬
tout aux efforts de leurs auteurs pour se tenir au courant des moindres
1. Je dois toutefois signaler les nombreuses fautes d’impression que l’on s’étonne
à bon droit de rencontrer dans un ouvrage aussi luxueux. Ces fautes, surtout
fâcheuses, lorsqu’elles portent sur des dates, rendront nécessaire la publication
d’un errata général que M. Heiss, nous l’espérons, joindra à son prochain fascicule.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
145
travaux publiés à l’étranger. Ce sont là des exemples qu’il importe de
placer sans cesse sous les yeux de ceux de nos compatriotes qui se sont
voués à l’histoire des arts.
Eugène Müntz.
VARIÉTÉS
Notes d'archéologie orientale*
IV 1 2
STEPHATON, l'homme a L EPONGE DE LA CRUCIFIXION ET LES DEUX LARRONS
Gestas et Dysmas.
Une plaque de bois sculpté du commencement du xn e siècle, acquise
par le Louvre et publiée par M. R. de Lasteyrie % représente une scène
de la crucifixion où Ton remarque un détail curieux.
A droite du Christ, faisant pendant au soldat Longin, armé de la lance,
est figuré un personnage qui tend au patient, au bout d’un roseau, 1 e-
ponge trempée dans le vinaigre. Cet acteur de la Passion, qui apparaît
fréquemment dans les images de la crucifixion, porte ici son nom ins¬
crit au-dessus de sa tête : STEFATON.
Cette indication graphique est extrêmement rare. M. de Lasteyrie n’en
connaît que deux exemples et encore ne concordent-ils pas entre eux :
dans une peinture du xu e siècle de la chapelle du prieuré de Saint- Remy-
la-Varenne 3 , le porte-éponge est nommé STEPITON ou STEPHA-
TON 4 , et, dans une peinture du xi # siècle de Sant* Urbano alla Cafifa-
rella (campagne romaine), il est nommé CALPVRN.
Aces deux exemples, M. de Lasteyrie aurait pu joindre un troisième
tout à fait décisif : une miniature de l’Evangéliaire de l’évêque Egbert
de Trêves du x e siècle, où le porte-éponge Stephaton est également
représenté dans la scène de la crucifixion 5 .
1. Cf. pour les notes I, II, III, Rev . crit ., 21 mai i 883 , pp. 41 3 et sq.
2 . Galette archéologique , p. 101, pl. XVII, i 883 .
3 . Près de Saumur.
4. Le nom est très effacé.
5 . M. le Prof. F. X. Kraus, de Fribourg en Brisgau, avec une obligeance dont je
suis heureux de le remercier publiquement, a bien voulu me communiquer, sur ma
demande, une excellente reproduction photographique de la scène qui m’occupait.
U prépare en ce moment une publication intégrale du précieux codex Egberti qui
sera du plus haut intérêt pour tous ceux qui étudient l’histoire de l’art chrétien.
Le nom, écrit STEPH[A] TON, est coupé en deux par le personnage auquel il
s’applique.
J’ajouterai, en passant, que cette particularité essentielle, jointe à la coïncidence
d’autres dédails, semble apporter un argument important à l’opinion qui veut
reconnaître dans la plaque de la collection Timbal, une influence de l’école rhénane.
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REVU B CRITIQUE
146
M. de Lasteyrie a vainement recherché à quelle source l'imagier de
la plaque de la collection Timbal et celui de la chapelle de Saint-Remy
avaient pu puiser ce nom singulier de STEFATON, STEPHATON.
Je me demande si ce nom, dont le Codex Egberti permet de faire
remonter plus haut encore l'apparition, n'aurait pas tout simplement la
même origine que celui de Longinus, Ao^tvoç, que l'on a supposé pro¬
venir de AOrXH, lance; s’il ne sterait pas, en un mot, le résultat d’une
méprise matérielle ayant fait passer la désignation de l’objet traditionnel
au personnage qui s’en sert.
Zto 5 yyov, éponge (à l'accusatif), contient les éléments graphiques de
.crréçaTov, comme il est facile de le voir en superposant les deux mots
transcrits en lettres onciales :
G norroN ■
CTE^ATON
Je crois que, si l’on avait affaire à une question de manuscrits, les pa¬
léographes admettraient, sans trop de peine, que la seconde leçon est is¬
sue de la première. L'attraction du mot ou du nom propre CTE<ï>ANOC a
pu faciliter l’altération. L'on pourrait être aussi tenté de supposer que
c’est le mot même CTE<I>ANOC, désignant la couronne d'épines, qui a été
le point de départ de l’erreur à laquelle le porte-éponge doit son nom.
Cette conjecture me semble cependant moins satisfaisante que la précé¬
dente, car il serait bizarre que la tradition, procédant en sens inverse
de ses tendances habituelles, eût altéré un vocable de forme compréhen¬
sible et satisfaisante CTE<ï>ANOC, en un vocable insolite CTE<ï>ATON.
En tout cas, il est intéressant de constater que, dans cette hypothèse,
le nom de notre personnage s’expliquerait par des substantifs à l 'accusa¬
tif: (nréffov ou <rcéçavov. Cela concorde bien avec la formation du nom
de saint Longin, AoffTvoç, dérivé, à ce qu'il semble, non de XéfXY), raa î s
de
C’est dans les mêmes conditions grammaticales que se présente le nom
du bon larron Dysmas, devenu un saint Dysmas dans l’Eglise orien¬
tale, que j’ai proposé autrefois * d’expliquer par accusatif de
8 uqjwc(, occident .
Je suppose que ce nom de Dysmas provient d'une fausse attribution
du mot 8u<yp.dç inscrit au-dessous du soleil et de la lune qui apparais¬
sent constamment au-dessus des deux larrons, des deux côtés de la croix,
dans les plus anciennes images de la crucifixion, symboles dont les lar¬
rons symétriques sont de véritables doublets iconologiques : Buajwd est
identique au vocable AÏCIC qui, associé à ANATOAH, accompagne l’i¬
mage du soleil et de la lune sur des médailles antiques de Syrie et des
1. L’on pourrait prendre aussi en considération la forme diminutive dlOITION.
2. Revue critique , 1879, p. 92. — Variantes : Avjp.a;, Aufxoç, Aoapaç, Desmas.
Cf. Dumachus de l’Evangile de la Sainte-Enfance.
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D’HISTOIRK KT DR LITTÉRATURE
T 47
tessèrcsde Palmyre Zeitschr. /. Numism., Berlin, 1877, P* lo 9 **
pj. II, 8. cf. ûf. 1878, v, 35 o.
J’avoue que le nom du mauvais larron, Gestas, est plus embarras¬
sant.
Il offre les variantes rECTAC,rEïCTÀC,riCTÀC, ETErAC l . Serait-ce une
série de lectures fautives oscillant autour de EICTAC, dç xàç, et les noms
des deux larrons proviendraient-ils d’une l’épigraphe EICTACATCMAC,
il; 'zàq SüaiAiç etç Sucp-aç), arbitrairement coupée en deux mots 2 :
EICTAC+ AÏCMAG *? v
L’on sait que le côté vers lequel était orientée la face de Jésus-Christ a
été l’objet d v une longue et ancienne controverse.
Il existe des images de la crucifixion où non-seulement le soleil et la
lune sont accompagnés des mots SOL et LVNA, mais où les larrons
eux-mêmes ont leurs noms écrits au-dessus de leurs têtes 4 ,
J’insiste sur ce point; c’est que ces transferts de mots, auxquels
quelques-uns des acteurs ou comparses de la Passion semblent devoir
leurs noms, peut-être même leur personnalité , s’expliquent beaucoup
mieux si on les suppose s’opérant non pas simplement dans des textes
ou des traditions orales, mais dans des représentations figurées accom¬
pagnées de légendes, c’est-à-dire dans ce milieu iconologique dont j’ai
essayé de montrer l’importance pour rendre compte de la formation de
la mythologie païenne et qui n'a pas été moins favorable aux développe¬
ments de la mythologie chrétienne.
Clermont-Gannbau .
THÈSES DE DOCTORAT ÈS LETTRES
Soutenance de M. George Dnray.
I. Thèse latine ; De pactis anno s 556 apud Valcellas indutiis (Hachette). II.
Thèse française : Le cardinal Carlo Carafa (i 5 jg-i 56 i), étude sur le pontifi¬
cat de Paul IV. (Hachette, in-8°; xxx-422 pp.)
I
La thèse latine de M. Duruy n’est pas un chapitre détaché de sa thèse française :
x. Cesmas paraît être une différenciation analogique de Desmas . Cf. Titus de l’E¬
vangile de la Sainte-Enfance.
2. Par l’interposition de la croix elle-même. Cf., par exemple, pour ces coupes
procédant des exigences matérielles de la figuration : TOR-TORES, STEPHA-TON,
LATRO-NES, dans les crucifixions de l’évangéliaire d’Egbert.
3 . L’idée même des larrons serait-elle, alors, née d’une confusion consécutive
entre THCTAC (pour HCTAC) =: AHCTAC et Xflsxiç? Cf. Marc, xv, 27 s
wè XiQrzdç (AYC... AHCTAC). Je ne me dissimule pas la gravité de la question,
que je me borne à poser, et qui serait de nature à jeter un jour étrange sur la
génération d’un épisode faisant partie intégrante de la plus ancienne rédaction des
Evangiles parvenue jusqu’à nous.
4. Par exemple, dans l’Evangéliaire de l’évêque Egbert de Trêves, déjà cité :
Dysmas et Sesmas.
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RRVÜB CRITIQUE
I48
c’cst une étude sur la trêve de Vaucelles, considérée au point de vue de la politique
générale.
M. Himly adresse à M. D. quelques reproches sur son latin, sur le singulier mé¬
lange qu’il fait du latin et du français. Pourquoi cette locution « topud vicum in
agro caletensi qui gallice nominatur Marcq » revient-elle sans cesse : il serait plus
simple de dire Marcq tout court. Pourquoi a septem viri » pour electores. Pour¬
quoi a Pannonia » pour a Hungaria » ? Allemanni est-il donc un mot de bonne lati¬
nité? P. 28. Roquendolfus, ne serait-ce pas Roquendorf, un des capitaines qui ser¬
virent tour à tour Charles-Quint et François I* r ? Qu’est-ce que le « Ducatus
Albiorënsis »? M. D. n’a-t-il pas confondu Wittemberg et le duché de Wurtemberg?
M. D. répond que l’erreur doit être imputée à de Thou, que c’est dans son livre
qu’il a cherché toutes les traductions latines de noms propres dont il s’est servi. Il
regrette d’avoir été si consciencieux, il aurait été plus clair, s’il avait fait lui-même
les traductions ou s’il avait donné les noms propres sous leurs formes modernes.
Quant au mélange de latin et de français qu’on lui a reproché, il l’a évité autan
qu’il a pu; il n’a cité en français que les phrases capitales (p. 62) ou intraduisibles
(p. 18). Il aurait fallu, d’après M. Himly, mettre ces citations en note et les résu¬
mer en latin dans le texte. La thèse française est très au-dessus de la thèse latine,
qui, malgré l’intention de M. D., d’en faire une étude sur la politique générale de
l’Europe, reste un peu, sinon un chapitre détaché de son étude sur le cardinal Ca-
rafa, tout au moins une sorte d’appendice de ce livre. Malgré tout, le sujet est un
peu maigre. M. D. répond qu’il a supprimé le demi-chapitre de sa thèse française,
où il parlait de la trêve de Vaucelles : elle méritait mieux que cela. Il y a dans
cette trêve deux choses : ce qui concerne le cardinal Carafa, la rupture; ce qui ne
le concerne pas, les préliminaires et la conclusion. M. D. défend Henri II d’avoir
été de mauvaise foi, en disant que le pape n’a pas été plus loyal que lui; c’est un
mauvais moyen de défense. Ce qu’il aurait fallu dire, c’est que le roi était déterminé
dans sa conduite bien plutôt par des influences que par une volonté raisonnée : il
est tour à tour l’instrument des Guise et des Montmorency. Pour M. D., Henri II
est un plus digne fils de François I w . Il est indécis, cela est certain, mais l’empereur
l’est aussi, il commence à avoir peur. Jusque-là intraitable sur la question des
Trois-Evêchés, il ordonne de changer les négociations pour l’échange des prison¬
niers en négociations pour une trêve ou même pour la paix. C’est qu’en novembre,
il avait reçu une lettre de son frère Ferdinand, qui lui disait qu’il était perdu si la
paix n’était faite, parce que le roi de France disposait de Soliman. La solution du
problème de la politique européenne d’alors est à Constantinople.
M. D., dit M. Lavisse, se propose de démontrer que le roi, sans trop grande per¬
fidie, traite avec Charles-Quint peu de temps après avoir traité avec le pape. Pour
M. D., la situation de Henri II était excellente, mais l’état de ses finances l’obligeait
à la paix. Il n’a pas assez insisté sur la différence entre la situation du roi et celle
de son père. Il cite, p. 28, un fragment d’une lettre du cardinal du Bellay ; il aurait
fallu citer plus que ce fragment : la situation est marquée en termes plus précis
que cela n’est ordinaire au xvi* siècle. M. Lavisse ne trouve pas que les finances
aient été en si mauvais état. Le roi trouvait difficilement de l’argent, mais parce
qu’il s'y prenait mal ; quand il le fallait, il savait s’en procurer : l’impôt sur les clo¬
chers. P. 18, M. D. dit qu’Henri voulait toujours la guerre, p. 35 , qu’il fait les plus
grands préparatifs pour la guerre. Il n’était donc pas contraint à la paix. M. Lavisse
craint que M. D. n’ait cédé à un besoin de symétrie. M. D. répond qu’il a voulu
dire simplement que l’embarras des finances françaises devait disposer Henri II à ac¬
cepter favorablement des ouvertures pour la paix. M. D. a bien marqué les disposi-
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d’HISTOIRB BT DR LITTÉRATURE
149
tions de Charles-Quint : le désir du repos, la maladie, l’échec à Metz, l'aventure
d’Innsprûck, Philippe qui n’avait pu être élu roi des Romains, les échecs en Alle¬
magne, tout devait le disposer à la paix, malgré son vain succès en Angleterre. A
propos de l’élection du roi des Romains, il y a des erreurs : certains documents man¬
quent. Le compte-rendu des conférences de Marcq est un peu rapide. Les négocia¬
tions relatives au double mariage sont un peu passées sous silence. Les faits géné¬
raux sont bien groupés, mais M. D. se trompe p. 46, lorsqu’il dit que Ferdinand
dépassa les intentions de l’empereur par sa bienveillance envers les protestants.
Charles-Quint savait ce qu’allait faire son frère; c’est ce qu’établit une lettre qu’il lui
écrivit lors de la diète d’Augsbourg. Il voyait que la paix était nécessaire et ne
pouvait prendre sur lui de la signer. Il abdique avant l’abdication : c’est comme roi
des Romains que doit agir Ferdinand et non comme mandataire de l’empereur. Si
F erdinand s’excuse dans sa réponse d'avoir agi comme il a fait, c’est pour ménager
la conscience de l’empereur. Ferdinand a plusieurs fois consulté Charles-Quint, qui
n’a jamais répondu : il voulait laisser tout le poids de la décision prise sur la con¬
science de son frère, mais il ne voulait pas faire reculer la diète ; il n’a eu ni étonne¬
ment, ni indignation. N’aurait-il pas fallu donner, du moins par extraits, ce texte du
traité de Vaucelles ? C’est à dessein que M. D. a négligé les commentaires de Rabutin.
11 y avait peu à prendre dans le Discours au roi de Joachim du Bellay : peut être
aurait-on pu trouver davantage dans le Discours sur la rupture de la trêve de Maril-
lac. Au chapitre iv, M. D. a visiblement tiré à la page, et en convient lui-même.
M. D. conclut en moraliste et c’est son tort. En politique, au xvi* siècle, et même
maintenant, il n’y a pas place pour la morale. M. D. répond qu’Henri II, ayant été at¬
taqué de ce côté par les historiens italiens, il a voulu le défendre par des arguments
nouveaux, qu’au reste cela ne tient que deux pages de sa thèse.
Cest à la latinité que s’attache M. Crouslé, dans la thèse de M. Duruy. Elle est
nette et souvent élégante, mais il y a de regrettables fautes de grammaire. Pour la
traduction des noms propres, M. D. a eu tort de suivre de Thou.
M. Pigeonneau reproche à M. D. de n’avoir pas été assez curieux.
11 y a quatre manuscrits de la Bibliothèque nationale : n°* 2846, 283 1, 2956, 3 n 3 ,
qu’il aurait dû consulter. Peut-être y aurait-il trouvé des choses intéressantes. 11 y a
une phrase à la p. 18 où il n’y a pas un mot qui ne soit faux. Les deux chiffres
donnés a quatuordecies centena millia » a octoginta millia » sont faux. M. û. a
mal lu le passage auquel il renvoie. Capello indique 5 millions d’écus d’or avec les
revenus extraordinaires en temps de paix, ces chiffres viennent du reste à l’appui de
sa thèse. D’après la relation de Michiels, les revenus montaient à 6 millions et dem
d’écus d’or, d’après Fromenteau à 100 millions de livres. Octoginta doit être une
faute, il y a 800,000 dans Capello. Il se trompe aussi sur la misère de la France :
les témoignages qu'il cite ne sont pas convaincants. Il aurait dû recourir aux mé¬
moires de Claude Hatton : le pays de France, dit-il, ne se sentait de ces dites guer¬
res, non plus que s’il n’en eût point été. » Simon Renard s’est trompé sur le taillon
qu’il confond avec les « accreues de la taille»; ce taillon, créé vers 1647, remplace
les fournitures en nature à la gendarmerie. Il y a eu à Vaucelles des négociations
longues et compliquées : le livre de M. D. n’est pas complet, M. D. a glissé très vite :
il s’est trop exclusivement placé au point de vue de la politique générale : il fallait
parler des conventions pour l’échange des prisonniers, du douaire de la reine Eléo¬
nore, des conventions au sujet des places occupées en Italie, du commerce des In¬
des; tout cela est indiqué dans Granvelle, pp. 523 - 543 , t. IV.
M. Berthold Zeller demande à M. D. pourquoi il ne s’est pas servi des relations
des ambassadeurs vénitiens. 11 aurait fallu consulter aussi la relation de l’envoyé an¬
glais, John Masson.
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i5o
REVUE CRITIQUE
II
La thèse française de M. D. est une étude 6ur la politique extérieure de Paul IV
jointe à une biographie du cardinal Carlo Carafe, neveu de ce pape. Elle est précé¬
dée d’une notice de xxx pages sur les sources qui ont servi à ce travail, sources ma¬
nuscrites pour la plupart et conservées à Rome. Le livre est suivi de documents
inédits en appendice.
M. Himly juge que le livre a un grand mérite, c’est de se faire lire; la narration
est vive et délicate, véritablement dramatique. L’histoire du cardinal Carafe rappelle
celle de Béatrice Cenci. Mais il y a quelques réserves à faire malgré l’intérêt du li¬
vre. La plume de M. D. court trop facilement. Il ajoute souvent des développements
et des descriptions inutiles; parfois il est amené à fausser les faits,M. D. dit que l’on
ne saura la vérité sur le procès du cardinal que lorsque les archives secrètes du Va¬
tican auront été ouvertes, et il ajoute que toutes les pièces du procès ont été brûlées.
M. D. a été trop sobre dans ce qu’il a dit de Paul IV. Paul IV est un théologien,
un prêtre; pour la première fois depuis un siècle, c’est un prêtre qui est pape.
Paul III est un jurisconsulte, les autres moins encore. Paul IV arrive au moment où
la réaction catholique va commencer. De tout cela, M. D. se préoccupe peu; il n’a
pas l’esprit théologique, et son sujet exigeait qu’il l’eût. Paul IV n’est pas le barbon
vindicatif qu’en a fait M. Duruy. M. D. n’a pas assez lu le I er volume de Ranke. La
thèse est spirituelle, mais fausse. Ce qui fait l’importance de Carafe, c’est d’être le
neveu du chef suprême de la catholicité. Si le pape avait des passions temporelles,
il avait aussi le sentiment de ses devoirs envers l’Eglise. M. D. se retranche der¬
rière son titre. Il a dit quelques mots des grands projets de Paul IV pour la réforme
du catholicisme. Carafe ne s’étant occupé que de la politique et de la guerre, M. D.
n’avait pas à parler de théologie. Quant au caractère vindicatif et colère du pape, il
lui paraît assez évident. M. Himly répond qu’il est de son avis sur le caractère du
pape, mais qu’il ne fallait pas le montrer si occupé de questions de ménage et si peu
des grands intérêts du catholicisme. M.D. aurait dû indiquer que si le pape désirait
la paix générale, c’est qu’elle était la condition de la réunion du concile et de la ré¬
forme catholique. Il a essayé de le faire à la page 126, mais cette page est isolée.
M. D. répond que ce qu’il a voulu étudier, c’est un neveu de pape; il a voulu, par
un exemple, montrer l’influence funeste du népotisme sur l’Italie. La question reli¬
gieuse ne trouvait pas là sa place. M. Himly reproche à M. D. de n’avoir pas assez
insisté sur les mœurs du cardinal; qji pourrait, d’après ce livre, le croire seulement
ambitieux et oublier qu’il a été surtout un débauché. M. D. semble avoir changé
d’opinion sur son héros au cours de son livre. A la page io 3 , il dit que l’ambition
du cardinal s’épure; à partir de la page 25 o, il ne tarit plus sur son impudence.
M. Gebhart loue M. D. d’avoir su avec un bon goût parfait résister, dans les cha¬
pitres de la fin, à la tentation de faire un roman. Son livre est un livre d’histoire et
qni restera. Il a mis une grande conscience dans la recherche des sources, et elles
sont bien classées dans sa notice. M. D. n’a pas su voir que la politique temporelle
des papes n’est pas séparée de leur politique ecclésiastique : la première est le moyen,
la seconde le but. Le cardinal Carafe et son frère ont été victimes de cette politique
funeste; ils n’ont pas payé pour leurs crimes et leurs débauches; Pierre-Louis Far-
nèse et César Borgia valaient moins qu’eux. Sous Paul IV, c’est le pontificat et sa
politique qui furent frappés; cette politique arrivait longtemps après son heure; elle
représentait les traditions du principat italien. Depuis le milieu du xv c siècle, les
papes sont des princes italiens. M. D. dit que le malheur de l'Italie, au xvi* siècle,a
été l’ambition sans frein des papes; mais il faut se demander quelle a été la situa¬
tion des papes de Sixte IV à Clément VII : le pape est un vieillard qui se trouve
élevé à un trône italien, entouré de princes dont il a à se méfier dans une Italie
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d'histoire et de littérature
1 5 i
pleine d’attentats. Dans ses domaines, les barons romains le menacent ; il ne peut
s’appuyer sur le sacré collège ni sur l’aristocratie romaine : prince électif, il ne s’ap¬
puie ni sur le passé ni sur l’avenir. Le népotisme seul a pu lui donner un semblant
de dynastie. C’est l’époque, non la papauté qu'il faut rendre responsable. M. D. ré¬
pond que M. Gebhart montre le népotisme dans ses origines, qu’il n’a voulu, lui, le
montrer que dans ses effets. Le népotisme, reprend M. Gebhart, n’avait plus sa rai¬
son d’être après Clément VII; l’Italie ayant appelé l’étranger était perdue; elle aurait
pu, jusque-là, arriver à conquérir sinon l’unité, du moins la nationalité; mais,
n’ayant pas d’armée nationale, elle a dû appeler « les Barbares ». Il n’y avait désor¬
mais plus de politique temporelle possible pour la papauté; les princes italiens n’a¬
vaient plus d’indépendance. Sous Paul IV, le népotisme devait être funeste, parce
qu’il n’était plus de saison. M. D. aurait dû marquer cette différence entre le temps
de Paul IV et la grande époque d’Alexandre VI. Si Paul IV avait réussi, à quoi
pouvait-il aboutir ? A substituer la France à l’Espagne. Si Paul IV n’aimait pas les
Espagnols, c’est un peu pour une raison religieuse. Paul III, Jules III, Paul fV n’ai¬
ment pas le christianisme espagnol, jeune et vivant encore grâce à sa lutte récente
avec l'islamisme. Le Saint-Siège voulait s’appuyer sur Venise, depuis longtemps le
point d’appui de la politique des papes. Mais Venise était devenue indifférente aux
affaires de lTtalie. A côté de cette politique temporelle surannée, Paul IV eut une
politique spirituelle qui ne l’était pas moins. Il y a là deux erreurs qui s’aggravent
l’une l’autre. Ce fut la politique spirituelle de Paul IV qui irrita le peuple de Rome
contre ses neveux. Dans sa jeunesse, Paul IV avait fait partie de ce groupe dont les
doctrines inclinaient vers saint Augustin et saint François ; mais il changea d’opi¬
nion et, au concile de Trente, devint le chef de Pextrême droite catholique; il fut
l’agent principal de la rupture du colloque de Ratisbonne. Il s’est allié avec le6 Jé¬
suites dont il ne soupçonnait pas l’avenir et a été de leur avis sur la justification par
les œuvres. Les modérés durent se retirer. Plus tard, il fut inquisiteur et fit régner
sur lTtalie une terreur plus vive qu’au xut* siècle. Il trouvait l’inquisition un sûr
moyen de gouvernement, et c’est pour cela qu’il se souciait peu du concile. 11 l’a
suspendu sous son pontificat ; mais ses décrets sont, après sa mort, tombés entre les
mains des Pères qui en ont fait les constitutions du concile. C’est, en grande partie,
Paul TV qui a rendu impossible un rapprochement avec les protestants; sa conduite
envers Elisabeth, quand elle est montée sur le trône, en est une preuve. II avait,
comme les anciens papes, l’idée de la suprématie temporelle du pape sur les souve¬
rains laïques. Voir la protestation du fiscal de Rome contre Charles Quint le juil¬
let i 556 . M. D. a raison de se passionner pour son sujet. Si les politiques italiens du
xvi 6 siècle sont des scélérats, ils sont, à leur manière, des artistes. M. D. est fait
pour ces études; qu’il donne bientôt une suite à son livre.
M. Geffroy rectifie les erreurs archéologiques commises par M. D. dans sa thèse.
II loue le plan de la thèse et la méthode, mais il aurait fallu parler plus longuement
du rôle du cardinal de Lorraine.
M. Lavisse pense le plus grand bien de la thèse. Mais il trouve que M. D. a peut-
être un peu grossi le personnage. Bien des choses qui lui paraissent spéciales dans
son livre, il les retrouvera dans tous les Italiens du temps quand il aura étudié plus
complètement cette époque. P. 56 , le développement sur l’impatience de l’ambitieux
cardinal porte à faux. L’ambassadeur de France ne pouvait porter lui-même au roi
le mémorial du pape. M. D. a trop d’admiration pour l’instruction confiée à Ru-
ceilai. Il admire beaucoup le cardinal Carafa pour avoir, en trois mois, appris toute
la politique européenne; mais il y avait à Rome nombre de gens qui ont pu le ren¬
seigner. M. D. vante la sagacité du cardinal, et cependant c’est tout d’un coup qu’il
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i 52 . REVUE CRITIQUE D*HISTOIRE ET DE LITTERATURE
s’aperçoit qu y a du danger (chap. xi). — Pages 104-105, M. D. a composé un di¬
thyrambe qu’il ferait mieux d’abandonner dans une réédition de sa thèse. M. D.
aurait dû lire Mézeray qui a écrit d’excellents chapitres sur le xvi« siècle; il rapporte
que personne en France n’a cru à la trêve de Vaucelles : Henri 11 gagnait à la rom¬
pre; tous ses actes ont été inspirés par la haine de Charles Quint et l’amour de la
vieille Diane. Montmorency était partisan de la rupture; il voulait ménagerie pape,
parce qu’il avait besoin de lui pour rompre les fiançailles d’un de ses fils qu’il vou¬
lait marier à une fille de Diane ; il voulait aussi éloigner les Guise. 11 ne faut point
tant admirer le cardinal Carafa, car il s’est trompé dans toutes les affaires qu'il a
entreprises. M. D. a fait usage de beaucoup de documents nouveaux, mais, sur
quelques points, l’information n’a pas été tout à fait suffisante. N’aurait-on pas pu
tirer quelque chose des papiers du duc de Guise ? M. D. s’est-il servi des Mémoires
du maréchal de Vieilleville? C’est dans les papiers du duc de Guise qu’est indiquée
la convention dont M. D. parle p. 22g, note 2. M. Lavisse trouve forcé le rappro¬
chement entre Charles Quint et Frédéric II. La décadence de la papauté ne com-
mence-t-elle pas avant le népotisme? M. D. a le goût de l’étude des personnages, ce
qui est heureux et se perd. Mais il aurait fallu mettre ceux qu’il a étudiés dans la
lumière de leur temps.
M. Pigeonneau relève quelques erreurs de détail et insiste sur les persécutions de
Paul IV contre les Juifs.
M. Rambaud trouve que M. D. soulève, p. 92, une grosse question ; il fait de Ve¬
nise un tableau très optimiste, et les faits qu’il cite pour prouver les avantages
qu’elle trouvait dans la neutralité sont peu concluants. Il ne comprend pas qui est
la Maria, fille du comte de Montorio, nommée p. 95. M. D. l’a oublié et ne peut l’é¬
clairer à ce sujet. M. Rambaud trouve que M. D., p. 104, abuse des épithètes, ce qui
est d’ailleurs son défaut ordinaire. — P. 109, la cour a bien tenu le pape au courant
des négociations pour la trêve, mais il n’en a jamais rien cru ; voilà pourquoi la
nouvelle a été foudroyante. — P. 154, M. D. a oublié que Simon Renard, qu’il ap¬
pelle l’Espagnol, était Comtois. — P. 189, M. D. s’indigne contre la colère du pape;
il avait pourtant de bonnes raisons d’être indigné contre Lansac. M. D. est beaucoup
trop dur pour le cardinal, quand il trouve qu’il n’était pas digne d’être étranglé;il
a cependant été fort mal étranglé. M. D. traite le cardinal de coquin, mais c’est
parce qu’il n’a pas réussi. S’il eût triomphé, il en ferait un grand homme.
M. Zeller, comme à la thèse latine, reproche à M. D. de n’avoir pas fait usage des
relations des ambassadeurs vénitiens. 11 montre, par de nombreuses citations, tout
le profit qu’on en pourrait tirer.
M. Duruy a obtenu l’unanimité.
•
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimei'ie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , a 3 .
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cule. — Hoogeweg, Die Cbronik des sogenannten Martinus Fulden-
sis. — Caro, Ueber eine Reformationschrift des XV. Jahrhunderts.
(L’auteur traite, avec clarté et d’une façon très instructive, de l’œuvre
de Jan Ostrorog < Monumentum pro comitiis generalibus regni sub
rege Casimiro pro reipublicae ordinatione congestum » ; l'œuvre avait
été traduite en polonais en 1818, par Kownacki, publiée en latin par
Bandkie et Wegener, puis, cette lois très utilement, par Bobrzynski ;
M. Caro en reproduit le texte). — Smith, Leonora Christina Grevinde
Ulfeldts Historié, med bidrag til hendes aegtefâlles og hendes nârmeste
stàgts historié. I et II (Le meilleur ouvrage, et le plus étendu, sur Kor-
sitz et Léonore Christine Ulfeldt; ne nous épargne pas le moindre épi¬
sode, même le plus insignifiant, de la vie de son héroïne ; néanmoins
l’ouvrage, malgré cette conscience trop minutieuse, se lit assez facile¬
ment ; mais ce n'est pas une contribution à l’histoire politique extérieure
du Danemark). — krapf, A dictionary of the suahfli Janguage (Le li¬
vre le plus riche parmi les ouvrages qui traitent de cette famille de
langues). — Alb. Martin, Le manuscrit d’Isocrate Urbinas CXI de la
Vaticane (Etude très exacte, minutieuse et complète). — Dehner, Ha-
driani reliquiae, part. I (Donne plus que ne le promet le titre ; rétablit
et commente les allocutions tenues dans l’été de 128 ou de 129, par
Hadrien aux manœuvres de la troisième légion). — Link, Ueber die
Sprache der Chronique rimée von Philippe Mousket (N’a pas connu le
travail antérieur de Schwake « Darstellung der Mundart von Tournai
im Mittelalter » paru en 1881). — Ad. Tobler, Die altvenetianische
Uebersetzung der Sprticbe des Dion. Cato. — Kunsthistorische
Sammlungen des allernôchsten Kaiserhauses. Gemilde. Beschreibendes
Verzeichniss von Engerth. I, Italienische, spanische u. franzôsische
Schulen; Schue, Beschreibendes Verzeichniss altérer Meister in der
grossher&ogl. Gemaldegallerie zu Scbwerin. — Frick, Das Seminarium
praeceptcvum an den Franckeschen Stiftungen zu Halle, ein Beitrag
zur Losixng der Lehrerbildungsfrage.
Gcettingische gelehrte Ànxeigen, n° 32 , 8 août i 883 : Schweisthal, Essai
sur la valeur phonétique de l’alphabet latin principalement d’après les
les grammairiens de l’époque impériale. (H. Jordan : l’ignorance de tous
les travaux les plus récents, la conception tout à fait antihistorique [un-
historisch] du développement de la langue, trop de foi superstitieuse
dans le témoignage des grammairiens des temps postérieurs, tout cela
n’a pu produire des résultats satisfaisants.) — Crowe and Cavalcaselle,
Raphaël, his life and works. I. (Schmarsow : pèche surtout par l'expo¬
sition historique; Crowe ne sait pas raconter ni comprendre la « Cul-
turgeschichte ».) — Bernhôft, Staat und Recht der rômischen Kô-
nigszeit im Verhftltniss zu verwandten Rechten. (Seeck : que ne sait
pas l’auteur! Il a tout lu et tout vu; mais ses recherches personnelles
sont pas sérieuses; il écrit avec aisance et agrément; il a l’art, comme
dit Bismarck, de parler avec suite et cohérence, mais sans laisser à l’au¬
diteur l’impression de ce qu’il a entendu.) — Codex diplomaticus hrsg.
von O. v. Heinemann, V. 1380-1400. (Schum.)— Der Rigveda oder
die heiligen Hymnen der Brâhmana, zum ersten Male vollstândig ins
Deutsche libersetzt mit Commentar und Einleitung v. Alfred Ludwig.
Band V. (Pischel : ce vol. montre les connaissances étendues de Ludwig
dans la littérature védique et il est riche en enseignements ; mais il a
aussi tous les défauts de l'auteur, qui ne cite les autres érudits que pour
les attaquer [« zu schimpfen »], et qui est persuadé que seul il possède
la vraie méthode.)
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
^/wv^aaaaaaaaaa a aa / saaaaa/wwvsa/vna/» ^ /wnaaaa/vaaaaaaa/wwvnaaa/vwvn ^ aa aaa/WV n^aaa^a^>aaa/v»^^vwvna/w
REVUE ÉGYPTOLOGIQUE
Publiée aou U direction de IM. H. BRÜGSCH, F. CHABAS. B. RÉVILLOUT
Première année. 1880, in-4, avec 5 feuilles de planches autographiées. ... 2b fr.
Deuxième année. 1881, in-4, avec 12 feuilles de planches autographiées. . . 2b fr.
Troisième année. 188 3 , in-4. — N° 1, avec une feuille de planches autogra¬
phiées et 3 planches en héliogravure. L’année complète.
Paris, 3 o fr. — Départements, 3 i fr. — Etranger, 3 a fr.
SOMMAIRES : PREMIÈRE ANNEE, numéro i . — Avis de l'éditeur. — Quelques notes
chronologiques sur l’histoire des Lagides par E. Révillout. — Le mot adon par H. Brugsch. —
Notices géographiques. Le lac Maréotis par H. Brugsch.
Numéros 2 et 3. — Premier extrait de la chronique démotique de Paris : Le roi Amasis et les
Mercenaires. — La syntaxis des temples ou budget des cultes sous les Ptolémées. — La question
du divorce chez les Égyptiens. — Les droits du nls aîné comme Kyries. — L'intervention des en¬
fants dans les actes chez les Assyriens. — Le divorce assyrien. — Les régimes matrimoniaux dans
le droit égyptien : régime de séparation des biens ; régime dotal ; communauté de biens entre époux;
régime dotal mixte avec communauté partielle. — Reconnaissance d'enfant avec légitimation par
mariage subséquent. — Régime matrimonial chez les Assyriens. — Union légitimée après séduc¬
tion. — Hypothèque légale de la femme et donations entre époux. — L'omnipotence des femmes et
le décret de Philopator sur l'autorité maritale. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — En¬
tretiens philosophiques d'un petit chacal koufi et d'une chatte éthiopienne. — Revue bibliogra¬
phique.
Numéro 4. — Second extrait de la chronique démotique de Paris : Les prophéties patriotiques.—
Entretiens philosophiques d'une chatte éthiopienne et d’un petit chacal koufi. — Le reclus de Séra-
péum : sa bibliothèque et ses occupations mystiques selon de nouveaux documents démotiques. —
Les arts égyptiens.—Données géographiques et topographiques sur Thèbes, extraites par MM. Brugsch
et Révillout des contrats démotiques et des pièces corrélatives. — Le serment décisoire chez les
Egyptiens. — Notes historiques sur les Ptolémées. — Récits de Dioscore, exilé à Gangres, sur le
concile de Chalcédoine. — Notice nécrologique sur M. de Saulcy par M. Oppert. —Correspon¬
dance. — Revue bibliographique.
DEUXIÈME ANNÉE, numéro i. — Second extrait de la chronique démotique de Paris : Les
prophéties patriotiques. — Un fragment de la légende osiriaque. — Le serment décisoire chez les
Egyptiens. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — Récits de Dioscore, exilé à Gangres, sur
le concile de Chalcédoine.— Les sarcophages D 5 et 7 du Louvre. — Un contrat de mariage de
l'an 4 de Psammétique II. — Une vente de maison de l'an 12 de Darius l* r . — Acte de fondation
d'une chapelle à Hor-merti dans la ville de Pharbaetus, en l'an 52 de Psammétique l* r . — Acte de
fondation d'une chapelle à Bast dans la ville de Bubastis, l’an 32 du roi Amasis. — Correspon¬
dance ; H. Brugsch-Pacha. — Nécrologie et nouvelles. — Revue bibliographique.
Numéros 2 et 3 — Lettre à M. Révillout sur les monnaies égyptiennes, par M. Lenormant. de
l’Institut. — Second extrait de la chronique démotique. — Statue a'un ministre. — Les affres de la
mort. — Le serment décisoire, — Le groupe Pehti, par Paul Pierret. — La requête d'un Tarfcheute
d'ibis. — L’antigraphe des luminaires. — Entretiens philosophiques d’une chatte et d'un chacal. —
Un quasi-mariage. — La femme et la mère d'Amasis. — Un prophète d’Auguste et sa famille. —
Authenticité des actes. — Le papyrus grec XIII de Turin. — La loi de Bocchoris et l'intérêt à 3 o
S mr 100. — Les reclus de Sérapéum. — Le roi Anchmachis. — Les pensions alimentaires. —
onnées métrologiques des prêts ae blé. — Nouvelles mesures agraires. — La tenue des livres en
Egypte. — La valeur de l’huile. — Les mesures de capacité. — Le mot grec CUWOOÇ écrit hiéro-
glyphiquement, par Brugsch-Pacha. — Quelques poids égyptiens et assyriens. — Lettre de M. Stem.
— Note métrologique de M. Ledrain. — Lettre de M. Golenischeff. — Poids sémitico-égyptiens.—
Lettre de M, Aurès. — Lettre de M. Oppert, de l'Institut — Comparaison des mescues égyptien¬
nes et hébraïques. — Première lettre de M Révillout à M 1 Lenormant. — Note sur les plus an¬
ciennes monnaies hébraïques. — Seconde lettre à M. Lenormant. — Un bilingue monétaire. —
Note additionnelle. — Un rapport de police. — Contrat de mariage du temps de Darius. — Livre
d'incantation. — Les poésies bilingues de Moschion. — Revue bibliographique. — Note sur l'é¬
querre égyptienne. — Correspondance numismatique. — Nouvelles. — Aug. Mariette-Pacha. —
Planches contenant les traductions mot à mot des articles démotiques.
Numéro 4. — Congrès de Berlin (Eug. Révillout) : 1* La table ethnique des anciens Egyptiens '•
système égyptien, système africain, système asiatique (H. Brugsch-Pacha) ; 2* la nouvelle édition
du Livre des Morts (E. Naville); 3 * Concordances entre l'année vague et l'année solaire (Lieblein);
4* une épopée gréco-égyptienne (L. Stern) ; 5 * un ancien conte égyptien (Goléniscbeff) ; 6* sur la
cachette découverte à Deir-el-Bahari par M. Maspéro (Eug. Révillout). — Les ostracade Karaac (A.
Wiedemann). — Elép'ClÇ (Jacques Krall). — La particule copte XIN, 2IN (A. Bail 1 et). — Note
de la rédaction. — «Liber Proverbiorum • (M ,f B sciai).
TROISIÈME ANNÉE, numéro i . — Association de Ptolémée Epiphane à la couronne et quel¬
ques autre associations royales — Le tribunal égyptien de Thèbes. — Récits de Dioscore, exilé A
Gangres, sur le concile de Chalcédoine. — Les prêts de blé. — La vie du bienheureux Aphon, évê¬
que de Pemdje (Oxyrinque). — Le martyre de saint Ignace. — Le papyrus Anastasi n* o, transcrit
et traduit par M. Chabas. — Index du vocabulaire mythologique de M. Chabas. — Nouvelles ac-
3 uisitions du Musée égyptien du Louvre. — Nécrologie et nouvelles. — Nota. Sigles des divisions
e la drachme lors de l'étalon d'argent en Egypte.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent> 23 .
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N* 35
Dix-septième a^^, A J!^a7 Août 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
or MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuquet
Prix d’abonnement :
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, a 5 fr.
* PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBEAlftB DB LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
db l'école dis langues orientales vivantes, etc
28 , RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuquet
(A u bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
VIENT DE PARAITRE
LA PALESTINE
PAR
LE BARON L. DE VAUX
ouvrage illustré par M. P. CHARDIN
et M. C. MAUSS, architecte du ministère des affaires
étrangères
Un beau volume in-8 illustré de 154 dessins originaux et d'une
carte............ 20 fr.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 588 , n août i 883 : Tudor, The Orkneys and Shet¬
land, their past and présent State. (R. Brown.) — Recent translations of
Sophocles : Sophocies, the seven plays in english verse, by L. Campbell,
Sophocles, the seven plays in english verse, by Whitelaw; The Phi-
loctete of Sophocles, in english prose, by Tatham. — Spanish reformers of
two centuries, frotn i 52 o, described by Edward Boehmbr, vol. II.
(Wentworth Webster : renferme une grande quantité de documents bi¬
bliographiques qu’on ne trouverait pas ailleurs, c’est le « standard and
indispensable work * sur le sujet.) — W. G. Black, Folk-Medicine, a
chapter in the history of culture, published for the Folklore Society by
Elliot Stock. (Le meilleur ouvrage qu'ait publié la Société.) — Lyoner
Yzopet, edit. by W. Foerster ; Les tragédies de Robert Garnier, d. p.
Wendiin Foerster. I-III. (Saintsbury.) — James Crossley, not. necrol.
(William W. A. Axon.) — A new révélation on early Kufic coins.
(E. T. Rogers.) — The work « commodore » (Hooper : quand apparaît-
il en anglais ; vient il de l'espagnol « comendador » ou de l’ital. « co-
mandatore »?) — Swift’sgodcly nts. (Bucknill.) — The Quaterly Review
and Gulliver. (Ward.) — Cat-folk-lore. (Birchaii.) — Bentley’s Plautine
Emendations, by E. A. Sonnenschein. (R. Ellis : exécuté avec grand
soin.) — Mr. Shapira's ms. of Deuteronomy. — The greek names of
the sibilants. (Bradley.) — Chinese and siamese. (Terrien de la Coupe-
rie.) — Some recent researches in Asia Minor. (W. M. Ramsay.) —
The old meeting house, Norwich.
The Àthenaeum, n° 2911, 11 août i 883 : Imperatoris Justiniani Insti-
tutionum iibri quattuor, with introductions, commentary, excursus
and translation by Moyle. — Mitford, The Zulu country, its battle-
fields and its people. —O. K., Skobeleff and the slavonic cause. — The
sacred laws ot the Aryas as taught in the schools of Apastamba, Gau-
tama, Vasishta and Baudhayana, translated by Georg Bühler. — Rus-
den, The history of New Zealand. — Sala, Living London or echoes
re-echoed. — Beard, The Reformation of the sixteenth century in its
relation to modem thought and knowledge. (Sujet difficile, et dont
l’auteur n'a pas toujours vu clairement les difficultés.) — Books on po-
litical economy. — Philological books (A comprehensive phrasaeolo-
gical english-ancient and modem greek lexicon, founded upon a ma-
nuscript of Lascarides, and compiled by Myrianthbus; Geldart, a
guide to modem greek, simplified grammar of modem greek, Key to
Geldart's Guide to modem greek ; Hübschmann, Armenische Studien, I ;
Eitel, A chinese dictionary in the cantonese dialcct. III a. IV ; Van Eys,
Outlines of basque grammar : contient sous une forme brève les der¬
niers résultats des recherches sur la philologie basque; Tien, Egyptian
handbook : fourmille de fautes, oublie la plupart des mots nécessaires,
n'apprend rien de pratique; James Darmesteter, Essais orientaux ;Wel*
don, trad. de la Politique d'Aristote.) — Antiquarian literature. —
Books for the young. —The Shapira ms. of Deuteronotny (D. Gins-
bury et Shapira). — « Harris’s cabinet » (Ch. Welsh). — The Brontës
(Levland). — L. Lalanne, The book of Fortune, two hundred un-
published drawings by Jean Cousin, with introduction and notes,
translated by Dunstan. — The royal archaeological institqte. — The
date of Cleopatra's needle. (En 1 3 -12 et non en 23-22 .)
Literarisches Centralblatt, n° 33 , 11 août i 883 : Grôssler, Die Einftih*
rung des Christenthums in die nordthüring. Gaue Friesenfeld u. Has-
sengau. — Bestmann, Die katholische Sitte in ihrer geschichtl. Eut-
wickelung dargestellt. — Froschhammer, Ueber die Genesis der
Menschheit. — Briefwechsel zwischen Arthur Schopenhauer u. Johann
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N" 35
- 27 août -
1888
Sommaire t 169. James Darmesteter, Etudes iraniennes. — 170. Dürr, Les voya¬
ges de l’empereur Hadrien. — 171. D’Espinay, La légende des comtes d’Anjou. —
17a. Cher u ei, Histoire de France sous le ministère de Mazarin, II et III. —
Thèses de M. Etienne; Les suffixes diminutifs en français et La vie de saint Tho¬
mas le martyr, par Garnier de Pont-Saint-Maxence. — Chronique.
169. — Etudes Iraniennes» par James Darmesteter. Tome I : Etudes sur la
grammaire historique de la langue persane, ix -336 p. Tome II : Mélanges
iraniens, 33 o p. Paris, Vieweg, i 883 . In-8°.
Le premier volume de ces Etudes a pour sous-titre Etudes sur la
grammaire historique de la langue persane . L'auteur ne Ta pas sim¬
plement intitulé Grammaire historique , parce qu’il laisse de côté les
patois modernes et le persan parlé de nos jours. Il distingue trois mo¬
ments dans l’histoire de la langue écrite : le vieux perse, ou langue des
inscriptions cunéiformes des Achéménides, le pehlvi, ou langue des
Sassanides, enfin le persan, ou langue de la Perse musulmane.
Dans la première partie (pp. 3-43), M. J. Darmesteter esquisse l’his¬
toire de l'idiome iranien. Il expose avec une merveilleuse clarté toutes
les questions relatives aux deux anciens dialectes de l'Iran, le vieux
perse et le \end, et montre leur indépendance réciproque. Le persan
moderne dérive, comme l’on sait, du vieux perse * qui fut le dialecte
de la Perside, et non du zend qui fut le dialecte de la Bactriane selon
les uns, de la Médie selon les autres. M. J. D. n’admet pas que le zend
doive être appelé vieux bactrien ou iranien de l’Est *. Il cherche à éta¬
blir que la patrie du zend et de Zoroastre est l'Atropatène, et que c’est
de là que le zend s’est répandu en Médie, de l'Ouest à l’Est 3 . Sans
doute, M. J. D. présente un ensemble d’arguments qui ne manquent
pas de force ; mais ses adversaires ont aussi de puissantes raisons à faire
valoir pour défendre leur opinion. La question ne nous paraît donc
nullement résolue. La forme mède qpaka, citée par Hérodote, et sur la¬
quelle s'appuie M. J. D., ne suffit pas pour identifier le mède avec le #
zend. « Chien » a pu se dire çpaka en médique et en zend sans pour
cela que le médique ait été le zend.
1. Signalons le § 3 , où M. J. D. dit des choses excellentes sur quelques particu¬
larités orthographiques du vieux perse. La chute de l’aspirée dans des mots comme
wâra\mi pour huvdrazmi s’observe déjà dans l’écriture cunéiforme babylonienne
où l’on rencontre souvent u pour hu,
a. Par inadvertance, M. J. D. a imprimé deVOuest.
3 . C’est encore par inadvertance que l’auteur écrit de l’Est àVOuest.
Nouvelle série, XVI. 35
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REVUE CRITIQUE
154
L’étude sur le pehlvi est admirablement présentée. Nous en recom¬
mandons la lecture à tous ceux que laisse encore incrédules la polypho¬
nie assyrienne. Tel groupe pehlvi se dit de seize manières différentes,
sans compter les combinaisons possibles « qui seraient infinies ». Ajou¬
tez à cette difficulté qu’en pehlvi il est d’usage d’écrire certains mots
autrement qu’ils doivent être prononcés. Par exemple, la formule * Roi
des rois », qui se prononce en réalité Shahdnshdh, s'écrit à l’aide d’un
mot sémitique et non persan Malkdn-malkâ . C’est à ce mode d'écriture
que l'on donne le nom de Zevâresh, terme qui, depuis longtemps, exer¬
çait en vain la sagacité des orientalistes et dont M. J. D. vient enfin de
trouver l’explication. Zevâresh est un mot persan qui signifie « détourne¬
ment ». Il a donné naissance au verbe arabe \cwvara t altérer une écri¬
ture ». Voilà une belle découverte dont nous félicitons vivement le sa¬
vant auteur.
Après avoir montré comment le pehlvi n’est que du persan déguisé
sous une écriture compliquée, M. J. D. fait justice du prétendu dialecte
parsi dont on a jadis écrit une grammaire. Le parsi n'est que du pehlvi
plus ou moins bien transcrit en caractères arabes; exemple à méditer 1
Le pehlvi et le parsi ont tous deux été pris pour des langues distinctes,
dont la première aurait été même imprégnée d’éléments sémitiques.
Avec le progrès de la science, pehlvi et parsi se sont résolus l'un et l’au¬
tre en persan pur et simple. Un jour viendra peut-être aussi où sumé¬
rien et accadien se trouveront être une sorte de Zevâresh de l’assyrien
La seconde partie de la grammaire (pp. 44-116) est consacrée à la
phonétique comparée du zend, du vieux perse, du pehlvi et du persan.
Nous ne pouvons entrer dans de longs détails sur cette partie technique.
Qu'il nous suffise de dire que M. J. D. s’y montre d'une compétence
magistrale et que, par l’abondance et la variété des mots étudiés, ce
traité de phonétique est en même temps un véritable dictionnaire éty¬
mologique des vocables de la langue et même des noms de lieu \
La troisième partie (pp. 117-255) contient une série d’études sur la
morphologie. Ici encore nous n’avons que des éloges à adresser à l’au¬
teur. Les faits connus sont présentés au long, mais l’auteur y ajoute
nombre de vues personnelles. Nous signalerons particulièrement les pa¬
ragraphes relatifs aux pluriels en in et en hi rapprochés de certaines lo¬
cutions adverbiales et l’explication des formes modernes du passé. Pour
dire « je fis », les Persans adoptèrent la tournure passive man kard « de
moi fait » ; le sentiment de cette tournure s'oblitéra et l’on en vint à faire
de man un cas direct et de kard un temps passé actif, auquel s’ajoutèrent
ensuite les désinences personnelles. Effectivement, un grammairien per¬
san serait bien surpris aujourd’hui d’apprendre que man « je » ; to « tu »,
1. P. 6o. il ne faut pas de tashdîd sur khujaçta. Transcrivez khud et non khûd . —
P. 62, note, Istakhar s’écrit en arabe par un sdd et un ta. — P. 66, il faut lire gu-
dar et gudashtan , et non pas guddr, guddshtan .
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D 7 HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE 1 55
o et il », qui pour lui sont des nominatifs, signifient, en réalité « de moi,
de toi, de lui ».
Dans la quatrième et dernière partie (pp. 256 - 323 ), l’auteur étudie la
formation des mots, les suffixes de dérivation et les préfixes; il termine
par quelques considérations sur les mots composés et sur la syn¬
taxe.
Telle est l'économie de ce livre capital, le plus savant et le plus com¬
plet qui existe aujourd’hui sur la langue persane. Nous n'aurons que
bien peu d'observations à présenter à l’auteur :
P. 122, le h muet (makhfi plutôt que mokhtafi) est conservé au plu¬
riel en ha dans les mots khânah « maison » et nâmah « livre » ; autre¬
ment ils se confondraient avec le pluriel de khan et de nim. — P. 1 3 o,
lire qaVaj&t au lieu de qalajât. Le mot nabab n’est pas un pluriel arabe
et ne peut s’écrire sous cette forme en persan : orthographiez novvdb. La
forme nabâb est une corruption indienne. — P. 141, u Miqr kam a\
signifie « et le Caire ést moindre qu’Ispahan ». — P. 146, « trois »
se prononce çî avec un î long dans la locution çî qad « trois cents ».
« Neuf » s’écrit nuh et non nû par un wâw. — P. 147. Aujourd’hui, les
noms de nombre 17 et 18 se prononcent hifda et hishda. — P. i 53 , le
voyou ûy multiplicatif ne peut être, croyons-nous, séparé du suffixe de
dérivation ûy, ûya, dont ont traité MM. Olshausen et de Goeje. —
P. 173, l’indéfini s’exprime encore en persan à l’aide du mot Adam;
c’est précisément le on— homme du français.— P. 178. Le persan parlé
connaît la forme ka (prononcée kèj pour le relatif, et la forme ki pour
l’interrogatif. Nous avons signalé cette double forme dans notre abrégé
de grammaire. On distingue aussi un interrogatif tshi employé absolu¬
ment et un interrogatif tshè employé devant un substantif. Par exem¬
ple, on dit tshi mîgûyt « Que dis-tu ? » mais tshè kaç aqt « Quelle per¬
sonne est-ce ? »— P. 181. L’interrogatif transcrit étymologiquement
kadâm par M. J. D. se prononce, en réalité, kudâm. II y aurait là un
petit problème de phonétique à élucider. — P. i 83 , har n'a pas le même
sens que hanta. Ainsi har rû\ signifie « chaque jour, tous les jours » ;
mais hama rû\ signifie « tout le jour, toute la journée ». — P. 229. Ce
que dit M. J. D. d'un futur périphrastique mikhâham kè benevîçam
est erroné. Tout au contraire, mîkhâham beneviqam (on omet de préfé¬
rence le relatif) veut dire en persan « je désire écrire ». Le futur s'ex¬
prime à l'aide de khâham devenu auxiliaire et perdant complètement
dans l’usage son acception primitive. — P. 244. Nous ne pensons pas
que la conjonction u doive sa double prononciation va à une imitation
de l’arabe. 11 est probable que c’est par l'intermédiaire de formes comme
u-agar que u s’est changé parfois en va. Le persan ne connaît pas le son
w qui résulte du contact de m et de a dans u-agar : il est bien naturel
qu’il l’ait transformé en v. — P. 3 1 5 ^ « matin » se dit saharc t non sa¬
it har.
Le second volume dos Etudes iraniennes n'est pas moins intéressant et
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RRVOB CRITIQUE
important que le premier. M. J. D. y a réuni toute une série d’articles
critiques publiés ici même; plusieurs travaux de grammaire comparée et
de lexicographie zendo-persane parus dans les Mémoires de la Société de
linguistique, mais refondus et remaniés ; dix-sept articles, presque tous
inédits, sur des points de mythologie et de légende ; enfin nombre de
traductions indigènes du Khorda-Avesta accompagnées de versions sans¬
crites et pehlvies. Il y a là une telle richesse et une telle variété d’aperçus
nouveaux et de découvertes qu’il serait impossible de tout décrire par le
menu. Nous attirerons principalement l'attention sur les petites mono¬
graphies de mythologie et de légende. M. J. D. nous montre, le premier,
comment l'Avesta et le Shâh-Nâmeh de Ferdoousî s’éclairent mutuelle¬
ment quand on sait les interroger. Nous ne savons rien de plus atta¬
chant que l’article sur Çavanhavac et Erenavâc , les deux femmes de
Zohâk, retrouvées simultanément dans l’Avesta et dans le Livre des
Rois . Et quelle élégante restitution fournie au texte arabe de l'histoire
des Sassanides de Tabarî, grâce à l'identification de l'archer Erekhsha
« à la flèche rapide » (khshvwi ishu) avec l’Arish Shîvâtîr du Modjmel -
at-Tawârikh!
En fermant le volume de M. J. Darmesteter, nous souhaitons que ce
savant et ingénieux auteur nous donne quelque jour une étude d'en¬
semble sur l’épopée persane. Il a prouvé qu'il saurait en renouveler
complètement l'exégèse.
Stanislas Guyard.
170. — J . Dürr. Die Relsen de* Kaiser* Hadrlan. Vienne, 1881. ln-8,
i24pp.(Abhandlungen des arch.-epigraph. Seminars der Univers. Wien, Heftll).
Tertullien a écrit d’Hadrien qu'il était curiositatum omnium explo •
rator . Cette passion pour les curiosités, pour les lieux historiques, pour
les beaux paysages, pour les sites renommés, pour les pèlerinages célè¬
bres, ceux de Dodoneetde Delphes comme celui du colosse de Memnon,
n'était pas faite seulement d’une sorte d’agitation maladive, d'une mo¬
bilité infatigable, comme celle des touristes désœuvrés. Hadrien aimait
sans doute à voyager, mais il savait aussi ce qu’on gagne à le faire; le
politique n'y trouvait pas moins son compte que le touriste : il le faut
bien, puisque, sur les vingt et une années où il fut empereur, quatorze
au moins furent employées par lui à visiter en tous sens les provinces
impériales. L'empereur se rendait compte des besoins des provinces, et
l'œil du maître inspirait un zèle plus actif aux fonctionnaires négli¬
gents : empereur et sujets, tous gagnèrent à ce long voyage de quinze
ans.
Etudier les voyages d'Hadrien, c’est donc étudier son règne; en fixer
la chronologie, c’est fixer les faits les plus importants d’une longue épo¬
que de paix et de prospérité. Or, quels renseignements fournissent à ce
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D’üISTOIRB BT DB LITTÉRATORR
1 57
sujet les sources manuscrites? Spartien, dans la biographie d’Hadrien,
se contente d’indications comme celles-ci : Romani venit, Moesiam pe¬
tit, etc., sans un mot de détail et sans la moindre indication de temps.
Si Ton ne peut rien tirer de la prose confuse de l’historiographe officiel,
que dire des lignes lamentables du pauvre Xiphilin? Heureusement
Hadrien laissait derrière lui les traces de son passage. Il faisait cons¬
truire des aqueducs, élever des temples et des portiques ; on lui érigeait
des arcs de triomphe, des statues, des autels ; tous ces monuments sont
datés; on sait donc à quelle année précise l’empereur était à Athènes, à
Palmyre, en Bretagne. De plus, toutes les provinces rivalisaient de zèle
pour frapper des médailles commémoratives des visites impériales : on
compte pour vingt-cinq provinces des témoignages de ce genre. On peut
donc espérer que du rapprochement des médailles, des inscriptions, de
quelques lambeaux du texte de Spartien, beaucoup de critique aidant,
on pourra faire jaillir la lumière sur cette question si importante et si
controversée.
La longue dissertation de M. Dürr fait partie des travaux du sémi¬
naire archéologique et épigraphique de l’Université de Vienne, que pu¬
blient MM. Benndorf et Hirschfeld : elle est digne de se présenter sous
d’aussi grands noms. C’est, croyons-nous, un modèle d’érudition et de
saine critique. L’introduction (pp. i-xv) fait ressortir l’importance des
voyages d’Hadrien; M. D. rappelle ensuite tous les résultats auxquels
sont arrivés avant lui Tillemont, Eckhel, Flemmer, Greppo, etc. ; puis
il étudie avec le plus grand détail les sources de tout genre, mé¬
dailles, inscriptions, historiens. La dissertation elle-même comprend
les deux tiers du livre (pp. 15-73). L’auteur ne s’est pas astreint à l’or¬
dre chronologique, qui l’aurait contraint à faire voyager son lecteur
d’un bout à l’autre de ï or bis romanus, comme Hadrien voyageait lui-
même. Il a groupé, pays par pays, toutes les indications sur la présence
de l’empereur dans ce pays à diverses époques. L’ouvrage se termine par
trois excursus . L’un est une contribution très importante à la question
des sources de Spartien pour les chapitres v-xiv de la Vita Hadriani
(pp. 73-88) ; l’autre est une étude sur la lettre d’Hadrien que Vopiscus
a insérée dans la Vita Saturnini, vm, en disant l’emprunter au livre de
Phlégon, affranchi impérial (pp. 88-90) ; la dernière est une étude de
chronologie sur les cycles usités à Athènes pendant l’époque impériale
(pp. 90-104), Les dernières pages (104-124) sont occupées par un petit
corpus de cent quarante-trois inscriptions sur le sujet, parues déjà dans
divers recueils.
A cause de l’importance toute spéciale du sujet et de ce mémoire, nous
donnerons l’indication, année par année, des résultats auxquels M. Dürr
a été conduit :
117. Syrie, Bithynie, Danube inférieur;
118. Danube moyen, arrivée à Rome;
118-121. Séjour à Rome;
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ftBVUR CRITIQUE
158
119. Italie méridionale ;
121. Gaule, Germanie, Danube supérieur et moyen ;
122. Bretagne, Gaule, Espagne;
123 . Afrique, Asie-Mineure, Syrie;
124. Pont, Bithynie, Mysie, les îles;
125 . Thrace, Macédoine, Epire, Thessalie, Grèce centrale;
126. Athènes, Péloponèse, Sicile;
127. Rome;
128. Afrique;
129. Rome, Athènes;
1 3 0. Asie-Mineure, Syrie, Palmyre, Judée, Arabie, Egypte;
1 3 1. Alexandrie, retour par la Syrie;
1 32 . Palestine;
134-1 38 . Séjour à Rome.
Il y a bien, de ci de là, quelques points d’interrogation; mais voilà,
dans l’ensemble, une série de dates solidement établies.
G. Lacour-Gayet.
171 . — La légende de» comtes d'Anjou, par G. d’Espinay, conseiller à la
cour d’appel d’Angers, président de la Société nationale d’agriculture, sciences et
arts. (Extrait des mémoires de la Société nationale d’agriculture, sciences et arts,
ancienne Académie d’Angers). Angers, i# 83 . In-8, 64 pages.
Etude fort remarquable dont voici l’importante conclusion : la divi¬
sion de l’Anjou en deux comtés distincts, dont l'un, celui d'Outre-Maine,
aurait appartenu à Robert le Fort, tandis que Tautre, celui de deçà
Maine, était aux mains des ancêtres d’Ingelger, est une pure chimère. Il
n’a jamais existé de comté d’Outre-Maine. Mais cette portion de l’Anjou
a été aux mains des comtes de Bretagne depuis le règne de Nomenoê jus¬
qu’au x* siècle. Pendant cette époque, les princes de la maison de France
possédaient, au contraire, le comté d’Anjou proprement dit, avec le gou¬
vernement duquel ils cumulaient celui des Marches de Bretagne, c’est-
à-dire le commandement supérieur des comtés voisins; bientôt le titre
de duc de France devait s’ajouter à tous ceux dont ils jouissaient déjà.
Cette Marche de Bretagne n’était point une étroite bande de terrain
prise sur la partie occidentale du Mai ne et de l’Anjou : elle comprenait, au
contraire, l’ensemble des comtés limitrophes de la Bretagne : c’était une
grande centralisation de forces sous la direction d’un chef suprême
L’indication des sources auxquelles Bourdigné a puisé dans son his¬
toire légendaire de l’Anjou mérite aussi de fixer l’attention.
Paul Viollet.
x. Roland, préfet de la Marche de Bretagne, était donc, comme tel, un chef de
rang supérieur et non simple gouverneur d’une étroite subdivision d’un comté
(p. 55 ).
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D 1 HISTOIRE RT DR LITTÉRÀTURB
i5 9
172. — Histoire de France sous le ministère de Rflazarln( 16»I*lêSl) 9
ptr A. Chékuel, recteur honoraire et inspecteur général de l’Université, membre
du Comité des travaux historiques et des sociétés savantes. Tomes II et III. Paris,
Hachette, 1882. In-8 de 428 et 444 p.
J’ai trop souvent eu l’occasion de parler ici des travaux de M. Cbé-
ruel sur l’histoire de France pendant les premières années du règne
de Louis XIV, pour qu’il soit besoin d’ajouter un long article aux
quatre articles assez étendus où j’ai cherché à faire ressortir le grand
mérite de ces travaux. Il me suffira donc d’indiquer rapidement ce que
contiennent les deux volumes qui complètent l’histoire de la période
comprise entre i 65 i et 1661, et qui ne sont en rien inférieurs à leurs,
aînés.
Dès les premières pages du tome II, M. C. dépeint la puissance
de Mazarin après son retour en i 653 . Nous assistons ensuite aux der¬
niers incidents de la fronde provinciale (Provence, Bourgogne,
Guienne), aux premières campagnes de Louis XIV, au sacre du roi, au
siège et à la délivrance d’Arras (1654), à l'évasion du cardinal de Retz,
aux nouvelles campagnes de Louis XIV (i 655 ), à la conclusion du traité
de Westminster avec Olivier Cromwell.
Dans le tome III, M. C. s’occupe des négociations avec l’Espagne,
de l’échec de Valenciennes ( 1 656 ), de l’alliance défensive et offensive
avec l’Angleterre (traité du 23 mars 1657), du s ^ è S e et de ^ P r * se de
Mardick, de la conclusion de la ligue du Rhin ( 1 658 ), de la prépondé¬
rance de la France en Allemagne, de la bataille des Dunes, de la prise
de Dunkerque, de la maladie du roi, de la prise de Gravelines, des con¬
quêtes de Turenne en Flandre, du voyage de la cour à Lyon (i 658 ), de
la paix des Pyrénées, du voyage de la cour en Provence, du mariage
de Louis XIV, de la restauration des Stuarts, de la pacification du nord
de l’Europe sous la médiation de la France, des dernières négociations
de Mazarin, de la maladie, du testament et de la mort de l’habile suc¬
cesseur du grand Richelieu, successeur que M. C. juge si bien en ce
beau passage (t. III, p. 426) : « Vainqueur de la Fronde, il a consacré
les huit dernières années de sa vie à relever la puissance de la France et
à lui donner un roi digne de continuer son œuvre. Il pouvait dire, en
mourant, qu’il laissait deux filles immortelles, la paix de Westphalie,
et la paix des Pyrénées. La première avait donné à la France l’Alsace,
Brisach et Philipsbourg ; la seconde, l’Artois, le Roussillon et une par¬
tie des Flandres. Puisse la France retrouver des ministres qui lui lais¬
sent un pareil héritage! Elle leur pardonnera bien des fautes et bien
des faiblesses ».
La correspondance de Mazarin est la principale des sources où le
consciencieux historien a continué à puiser. Mais s’il s’est beaucoup
servi des lettres mêmes du cardinal, il n’a pas interrogé avec moins de
zèle les lettres adressées de toutes parts au ministre et qui sont presque
toutes conservées aux archives des Affaires étrangères. On peut dire que
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RRVUB CRITIQÜB
la moitié de la substance des deux volumes que j’examine provient de
cet inépuisable dépôt auquel nous devons déjà tant de livres excel¬
lents \ En dehors des lettres écrites par Mazarin ou à Mazarin, M. C.
n’a pas négligé certaines autres lettres qui tantôt lui ont fourni des
éclaircissements utiles, et tantôt de piquantes particularités, par exem¬
ple les lettres cT Arnauld d'Andilly à l'évêque Claude Auvry, un des
confidents intimes du ministre, où l'on trouve à côté de choses instruc¬
tives sur les jansénistes % de curieuses indications sur les légumes des
jardins de Port-Royal employés à séduirel'épiscopat dans la personne
de M. de Coutances 5 . Il est inutile de constater que toys les mémoires
et recueils du xvn® siècle (surtout la Mu\e historique de Loret et les
Lettres de Guy Patin) ont été rapprochés avec soin des manuscrits de
nos dépôts publics. Les plus récentes publications historiques de notre
temps n'ont pas été moins scrupuleusement étudiées. Mentionnons no¬
tamment le Maréchal de Fabert par M. Jules Bourrelly et Louis XIV
et Marie Mancini par M. Chantelauze 4 . M. C. a été si attentif à
profiter de toutes les ressources nouvelles mises à la disposition des
chercheurs, qu’il n’a même pas manqué de citer (t. II, p. 253-265) une
communication faite à la Sorbonne le i 3 avril 1882, par M. Vian, pour
achever de prouver que Louis XIV n'a jamais dit au premier président
du Parlement de Paris, Pomponne de Bellièvre, « ce mot qui a fait for¬
tune et est resté dans toutes les mémoires : U Etat c'est moi » \ Ajou-
1. Il faut citer, en première ligne, le livre deM. Valfrey sur Hugues de Lionne et
ses ambassades, auquel M: C. renvoie si souvent avec les éloges les plus flatteurs.
Je voudrais que Ton nous fit aussi bien connaître, d’après les mêmes archives, deux
autres des plus distingués collaborateurs de Mazarin, Michel le Tellier et Abel
Servien.
2. Les lettres d’Arnauld d’Andilly à l’évêque de Coutances, dit M. C. (t. I, p. 244,
note 1), « se trouvent aux Affaires étrangères dans plusieurs volumes, et en particu¬
lier dans la correspondance de Rome (t. 126). Sainte-Beuve, qui donne beaucoup
de détails sur Arnauld d’Andilly, sur son caractère et son rôle {Port-Royale t. Il,
p. 248 et suiv. de la 2 e édition in-8°), n’a pas connu cette correspondance. »
3. Arnauld d’Andilly, comme le rappelle M. C. (t. I, p. 246, note 3), c avait soin
d’envoyer aux personnages de la cour les primeurs et l'élite de ses fruits (Sainte-
Beuve, Port-Royal , p. 56o). Il n’y manque pas à l’égard de l’évêque de Coutances :
il lui annonce, dans sa lettre du 27 avril 1654, l’envoi des premières asperges des
jardins de Port-Royal ». Sainte-Beuve n’aurait pas résisté à la tentation de si¬
gnaler, dans une note spirituelle, l’influence des asperges sur les affaires traitées en¬
tre la cour et les jansénistes.
4. M. C. combat la thèse de M. Chantelauze, auquel il reproche d’être aussi
injuste pour Mazarin que M" # de Motteville. Si l’on s’étonnait des développements
de la discussion (t. III, p. 223-246), je dirais que M. C. justifie ainsi ces dévelop¬
pements : « On a donné une telle importance à cet épisode, qu’il est nécessaire de
s’y arrêter et de l’étudier à fond. »
5. Déjà M. C. avait attaqué cette légende dans son Histoire de T administration mo¬
narchique en France { t. II, p. 32-34). Avant lui, M. Henri Martin avait eu le mé¬
rite d’arracher des mains de Louis XIV l’impossible fouet que l’on fait encore
claquer aux oreilles du Parlement dans trop de prétendues histoires de France.
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D’HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE
t6l
tons avec un vif sentiment de satisfaction que ['historien de Mazarin,
suivant le conseil qui lui avait été donné dans la Revue critique , s’est
enfin beaucoup servi des Souvenirs du règne de Louis XIV, où ont été
mis en lumière tant de documents inédits dont il n'avait pas eu con¬
naissance \
Les sept volumes de M, Ghéruel seront certainement réimprimés.
Je voudrais que dans la seconde édition de son grand travail il corri¬
geât les erreurs et réparât les omissions qui, de divers côtés, ont pu lui
être signalées *. Rectifiée ou complétée sur tels ou tels points qui ont
été ou qui seront mieux éclaircis, l’histoire des dix-huit premières an¬
nées du règne de Louis XIV deviendrait un de ces livres que personne
ne tente de refaire.
T. de L.
Voir aussi de judicieuses observations sur ce sujet dans un discours prononcé par
M. de Royer à la séance de rentrée de la cour de cassation, le 4 novembre i 856 .
1. Un aussi bon travailleur a laissé échapper bien peu de fautes, et toutes vé¬
nielles. Nous lisons (t. H, p. 23 ) que Guillaume Le Boux fut nommé « évêque
(T Acqs en i 658 ». Je savais bien que, même au xviii* siècle, le nom de Dax s’écri¬
vait quelquefois Acqs, mais je ne savais pas qu’en l’an de grâce 1882 cette forme
pût encore être employée. M. C. cite (ibid., p. 3 oo) une pièce de vers de Guillaume
Bautru, cornte de Nogent, publiée dans le Cabinet satyrique (x66x). Cette pièce
figure déjà dans l’édition de 1619 du fameux recueil. A ce propos, indiquons une
lettre inédite de Bautru à Louis XIV, tirée des archives des Affaires étrangères, et
qui est reproduite en grande partie à Y Appendice (t. I, pp. 404-412). Dans le
tome II (p. 394), M. C. insiste sur le peu de confiance que méritent les Mémoires
de L.-H. de Brienne . Il aurait dû invoquer le sévère et important témoignage de
M. P. Paris (Historiettes de Tallemant des Réaux, t. I, p. 412) sur ces mémoires
qui ont été interpolés s’ils ne sont pas complètement apocryphes.
2. En ce qui regarde l’histoire militaire de la France à partir de 1643, M. C.
aurait désormais, pour son travail de révision, le plus sûr de tous les guides en
M. le duc d’Aumale, dont on vient de lire, dans la Revue des Deux-Mondes du
x", du i 5 avril et du x* r mai de si remarquables pages sur les premiers exploits
du grand Condé. — Touchant une question particulière qui a beaucoup occupé
l’historien de Mazarin, puisqu’il y revient plusieurs fois, la généalogie des Baas
(L I, pp. 36 o- 36 i. Appendice , pp. 413-4x6), il consultera avec fruit un article de
M. Paul Laplagne-Barris sur d’Artagnan et la lamille de ce capitaine {Revue de
Gascogne d’avril x 883 , pp. 1 53 -i 57). — M. C. a emprunté à Y Histoire de Priolo
un portrait de Mazarin rarement cité (. Appendice , t. II, pp. 432-436). Il aurait trouvé
quelques renseignements sur cet auteur, dont il ne paraît pas avoir connu la vé¬
nalité, dans les Lettres inédites de Benjamin Priolo (1877). Nous ne tarderons
pas, du reste, à posséder une thèse de doctorat ès-lettres qui roulera sur Priolo,
historien, et qui ne nous laissera rien ignorer du personnage. Bien d’autres deside¬
rata seraient encore à noter, mais ne me suis-je pas engagé à être court et n’est-il
pas déjà temps de finir t
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162
REVUE CRITIQUE
THÈSES DE DOCTORAT ÈS LETTRES
Soutenance de M. E. Etienne*
I. Thèse latine : De deminutivis, intentivis , collectivis et in malam partent abeun-
tibus in francogallico sermone nominibus. (Nancy, imprim. Nancéienne, in-8°,
i 52 p.) — II. Thèse française : La vie de saint Thomas le Martir, poème histori¬
que du xn # siècle , composé par Garnier de Pont-Sainte-Maxence. Etude histori¬
que, littéraire et philologique . (Nancy, imp. Nancéienne, in-8°, 269 p.)
I
M. Etienne a fait une étude sur les suffixes diminutifs, augmentatifs, collectifs et
péjoratifs en français. Il a recherché leurs origines latines et fait suivre son travail
d'un long index où sont réunis tous les mots qu'il a étudiés.
M. Himly loue M. E. d’avoir fait suivre sa thèse d’un index. M. E. reconnaît qu’il
doit cette idée à M. Darmesteter.
M. Darmesteter demande à M. E. pourquoi il s’est restreint à ce groupe de suf¬
fixes. Donne-t-il un groupe naturel? M. E. répond que les suffixes diminutifs sont
les plus populaires et acquièrent une valeur particulière par leur signification. Nom¬
breux déjà au moyen âge, on en a abusé au xvi® siècle, notamment des suffixes en
ette. Cette recrudescence a été arrêtée par Malherbe. Il y a eu, aux xvii® et xviii* siè¬
cle», un arrêt presque complet, mais l’époque actuelle a regagné le temps perdu. Ils
sont parmi les éléments les plus vivants de la langue; c’est à ce titre qu’il les s
étudiés plus particulièrement. Il ne pouvait pas se borner à ceux-là puisque d’tu-
tres idées se joignent naturellement à celle de diminution, la ténuité, la grâce ; et,
d’autre part, la collection, l’agrandissement, l’enlaidissement. Le français a peu in¬
nové. Ses divers procédés pour modifier le sens des mots devaient exister en latin.
L’introduction du travail était donc tout indiquée. M. Darmesteter fait remarquer
que les suffixes d’action sont aussi vivants, aussi riches, aussi populaires, les dérivés
en âge par exemple. M. E. répond que les diminutifs ont un caractère d’ensemble
qui ne se retrouvait pas ailleurs. M. Darmesteter montre que ce caractère d'ensem¬
ble se trouve aussi bien dans les noms d’agents. La vraie raison, que M. E. n’a pas
su voir, c’est que le radical n’est pas modifié dans sa fonction logique; le suffixe
diminutif est seulement ajouté comme adjectif. C’est là ce qui fait l’unité du travail.
Le plan de la thèse est simple en logique. P. 1, M. Darmesteter trouve la part bien
large à l’action des éléments germaniques sur le français. M. E. répond qu’il a
voulu parler de l’action des Germains sur le français, non de la langue germanique.
Chap. iv, le plan de l’étude du suffixe aceus (français as, ace, asse, ache) est défec¬
tueux. La méthode n’est pas rigoureuse; on ne voit pas bien comment se développe
la terminaison française et la signification ; on ne voit pas comment les trois classes
a, y, se rattachent à aceus . Il aurait fallu étudier d’abord ce suffixe dans plusieurs
mots latins. M. E. donne trop d’importance à des questions de simple orthographe,
mais le sens de la terminaison n’est pas assez étudié. Il fallait montrer dans la langue
primitive un certain nombre de mots qui ont une terminaison et un sens détermi¬
nés. Ils ont passé en français et l’on s’est servi de la terminaison pour former
d’autres mots analogues. M. E. dit qu’il n’aurait pu suivre pour tous les suffixes fc
plan qu’indique M. Darmesteter. M. Darmesteter remarque que le suffixe ache n’est
pas de formation française; c palatal latin donne c dans le dialecte de l’Ile-de-France.
On pourrait voir là l’influence du picard, mais elle ne se comprendrait p» 8 sur
toute une série de mots. Les mots en ache ne remontent pas plus loin que la hn
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D’HISTOIRE RT DR LITTÉRÀTURB
t63
du xv* siècle, et le picard était alors réduit à Tétât de patois. Il faut donc recourir à
une origine étrangère, italienne ou espagnole. Deux mots rondache, mordache ont
été formés par analogie. Quant au mot soutache, cité par M. E., il est d’origine
slave ou hongroise. P. 25 , suffixe iceus , icca, ocea , ucea (en français is, iche, oche,
uche '), il faut effacer logis qui vient de loger , mot d’origine germanique. P. 26,
abattidus est une faute d’impression. Le suffixe iche est d’origine espagnole ou ita¬
lienne. P. 28, M. E. mêle les étymologies latines, italiennes et françaises; tout le
développement est confus, les mots sont cités au hasard dans le désordre de Tordre
alphabétique. Il fallait montrer le développement des suffixes, puis l’action de l’ana¬
logie. Le suffixe occus existe-t-il en latin? Le problème n’est pas posé. P. 3 i, acu -
lus, acula, alia, eculus, iculus, icula , ilia, uculus, ucula (fr. ail, aille, eil , il, ieu,
ille, ou, ouille ). Ce suffixe est mieux traité que le précédent. P. 42, pourquoi wcu-
lum devient-il tantôt ou, tantôt ouil? Ce sont les mots d’usage commun au pluriel
qui ont perdu il. P. 43, le suffixe anea est étudié superficiellement, entre Allema¬
gne et campagne, assimilation inexacte. P. 45, suffixes ilus, a, élus , a, il y a une
digression inutile sur les transformations phonétiques. P. 5 i, nombreuses inexacti¬
tudes. Dans arceau , morceau, le c appartient au radical. P. 57, le suffixe etum (fr.
oi, et) désigne-t-il toujours un nom d’arbre.' P. 5 g, inus (fr. in, ine) , M. E. voit une
signification péjorative dans le suffixe, dans certains mots où le radical a déjà ce
sens (1 crétin, faquin). P. 66, ittus, itta (fr. et, at , ot), M. E. a examiné la théorie
de Diez sur l’origine de ce suffixe. Il est certain que les diminutifs féminins en
ita ont existé de très bonne heure dans la langue populaire ; cette terminaison n’est
pas latine, le seul mot latin où on la trouve ( sagitta ) est d’origine étrangère. Est-
ce un dérivé du suffixe germanique t? Les plus anciens exemples sont des noms
propres de femmes en latin. Dans les langues germaniques, ce suffixe n’est pas ex¬
clusivement féminin comme en latin. Ce caractère se retrouve dans le suffixe celti¬
que qu’on a voulu lui donner pour origine. Mais il est difficile d’admettre à un suf¬
fixe une origine purement celtique, d’autant que les mots cités à l’appui sont du
dialecte irlandais. Voici ce que propose M. Darmesteter : il y a en latin onze mots
en ita qui désignent des femmes, deux sont grecs, en grec existait le suffixe c<r<xa
(attique, tira), telle est propablement la véritable origine du suffixe latin. P. 101,
olus est bien étudié. P. 1 io, les mots féru, dissolu, ne se rapportent pas au suffixe
utus . Il y a dans cette thèse beaucoup de labeur accumulé, plus de deux mille mots
ont été étudiés. Ce travail rendra service aux gens ^ui s’occupent de ces études, mais
il laisse à désirer comme précision.
M. Crouslé a été frappé de l’intérêt du sujet; mais il juge que, bien que la gram¬
maire ne doive pas être un jeu, la matière aurait pu être présentée avec plus d’agré¬
ment. Le plan n’est ni clair ni bien suivi, mais la latinité est très bonne, précise,
exacte, presque toujours correcte. M. Crouslé loue M. E. d’avoir mis en tête de son
livre un vocabulaire des expressions techniques dont il se sert. Dans le sens « d’ori-
gine savante », il aurait fallu mettre plutôt scita que docta origo . Pourquoi madida
pour l mouillée dans le texte? 11 faudrait mollis . Quant au plan, M. Crouslé adresse
à M. E. les mêmes observations que M. Darmesteter.
M. Bergaigne reproche à M. E. le désordre de son travail. Les mots français qui
sont des transcriptions phonétiques de mots latins n’ont pas été distingués assez
nettement des mots de création française auxquels a été ajouté un des suffixes étu¬
diés par M. E. En outre, M. E. ne dit pas comment se sont formés les suffixes nou¬
veaux dans les langues romanes.il n’a pas prononcé une seule fois le mot d'analogie.
M. Havet aurait voulu qu’on s’attachât surtout à l’étude psychologique des suf¬
fixes; c’est le sens seul des suffixes qui fait l’unité de la thèse. Et cependant la psy-
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REVUE CRITIQUB
I64
chologie est complètement négligée dans ce travail. On ne voit pas comment un
suffixe passe d’un sens à un autre. Les formes ne sont pas groupées d’après le sens
du suffixe. 11 fallait mettre à part les mots qui sont péjoratifs par leur radical. M. E.
les a mêlés aux mots qui sont pejorés par leur suffixe. Souvent il aurait fallu établir
diverses catégories pour un même suffixe; dans chambrette , le suffixe ette n’a qu’une
valeur diminutive, lancette n’est comparé que par figure à une petite lance, levrette
vient de lièvre et l’histoire en est fort compliquée, bavette vient de baver , non de
bave; l’origine ici est toute différente, le suffixe n’est plus significatif, il indique sim¬
plement le passage du verbe au substantif. M. Havet a regretté de ne pas trouver
une théorie sur la substitution du dérivé au mot simple. Pour comprendre cette
substitution, il faut se souvenir que le langage n’existe pas à part de l’homme, quil
est une production de l’homme qui parle. Ce n’est pas en étudiant la forme du mot,
mais bien le développement de l’esprit chez l’homme et chez l’enfant, qu’on pourra
formuler l^s lois linguistiques. L'enfant emploie naturellement l’expression diminu-
tive à la place de l’expression simple, il ajoute à tous les mots l’adjectif petit pour
les mettre à sa portée. M. Havet remarqua le même désordre dans le classement des
suffixes lorsque M. £. étudie les suffixes latins. M. E. n’aurait pas dû employer le
mot francog allie us, il est mauvais et ne correspond à aucune réalité historique, ga\-
loromanus est également à éviter; il faudrait francicus.
II
Le titre de la thèse française en indique le plan. Elle est précédée d’une introduc¬
tion où l’auteur fait l’histoire de Thomas Becket. Dans la première partie, M. E. étu¬
die la vie du trouvère Garnier, analyse le poème, recherche ses sources et le compare
aux chroniques ou histoires rimées du temps. Dans une seconde partie, de beau¬
coup la plus développée, il fait une étude complète de la langue de Garnier. La troi¬
sième partie est une appréciation littéraire du poète.
M. Himly regrette de voir dans ce travail une partie historique; elle est singuliè-
ment sacrifiée au reste du livre. M. Himly n’en fait pas un reproche à M. E., mais
il aurait mieux aimé qu’il la supprimât. Il était superflu de raconter en détail la lutte
entre Becket et Henri II. M. E. n’a guère fait, du reste, que reproduire le récit d’Aug.
Thierry et presque dans les mêmes termes. La question intéressante était celle des
rapports de l’Eglise avec le gouvernement anglo-normand; mais elle était délicate
à traiter, et M. E. s’en est tiré par des généralités. En revanche, il néglige ce qui
tient de plus près à son sujet; il ne dit pas si Thomas Becket a été officiellement
canonisé.
M. Crouslé se demande quel a été le dessein de M. Etienne. Son travail paraissait
d’abord purement grammatical et paléographique. Peu à peu ont apparu des par¬
ties nouvelles : la biographie de Becket, l’analyse du poème de Garnier, l’étude sur
les sources. M. E. enfin a ajouté, sous prétexte d’étude littéraire, une nouvelle ana¬
lyse du poème. Il est difficile de trouver une thèse dans cette suite de chapitres.
M. E. expose alors sa méthode. A la question historique qu’il regarde comme né¬
cessaire se rattache, dit-il, l’étude des sources qui doit être à la fois littéraire et his¬
torique. Il a voulu prouver que les poètes écrivaient d’après des relations latines; il
a toujours pensé que Garnier était intéressant à étudier philologiquement, parce qu’il
a écrit dans la bonne langue du xii* siècle et que son époque est bien connue. 11
nous donne l’état du dialecte de l’Ile de France un peu mélangé de normand. Il est
supérieur à tous les poètes historiens de son temps. Les poètes du moyen fige n’in¬
ventant pas, il fallait montrer que Garnier procède comme les autres. M. Crouslé se
demande si tout cela l’obligeait à faire des parties séparées. L’inconvénient du plan
de M. E. est de faire quatre fois les mêmes citations. L’étude littéraire est loin d’ê-
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o'HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE
l 65
trela partie la plus forte : l’éloge est un peu forcé et parfois mal exprimé, la langue
est relâchée, souvent triviale et obscure. M. E. répond qu’il a cherché à être juste;
il reconnaît que Garnier est ennuyeux, sermonneur, monotone, mais certains pas¬
sages sont émouvants; il n’en est pas de même de certains poèmes du moyen âge.
M. Crouslé lui demande si, avant de rabaisser les contemporains de Garnier, il les
a lus. La haute valeur qu’il reconnaît au poème de Garnier est d’avoir une date
certaine; mais il en est de même de celui de Wace. 11 place Garnier au premier
rang, parce qu’il est plus véridique et a étudié les sources; mais on en peut dire au¬
tant de Wace. Comme Garnier, il proteste de son amour pour la vérité historique ;
comme Garnier, il est fier de la pureté de sa langue et de son exactitude. Enfin,
Aug. Thierry a puisé autant dans Wace que dans Garnier. M. E., s’il se place à un
point de vue historique, a raison de ne pas comparer Garnier aux chansons de ges¬
tes; mais pourquoi ne le compare-t-il pas pour la langue?
M. Darmesteter trouve qu’il n’y a pas d’unité dans la thèse; dans la description
des manuscrits, la plus grande exactitude serait nécessaire; or, les renseignements
sont souvent insuffisants ou inexacts. Ce qui porte le n° 248g à la Bibliothèque na¬
tionale, ce sont les comptes de la sénéchaussée de Béthune, non pas le poème de
Garnier. Ce que voulait surtout M. E., c’est de déterminer la valeur de Garnier
comme historien; il s’est soumis à cet immense labeur d’analyser le poème vers par
vers pour le comparer aux historiens latins. Le récit de la pénitence d’Henri II sou¬
lève un petit problème sur l’historique de la composition que résout M. Darmeste¬
ter. M. Darmesteter croit que l’analyse aurait pu se fondre avec l’étude des sources.
M. Darmesteter diffère d’opinion avec M. E. sur les sources qu’a consultées Gar¬
nier; il croit Garnier antérieur et non postérieur à certains chroniqueurs latins que,
d’après M. E., il aurait consultés (Roger de Hoveden, Roger de Pontigny). Cest à
tort qu’on attribue à Benoît de Peterborough la chronique qui porte son nom. La
conclusion est que la valeur de Garnier comme historien est plus grande que ne
croit M. Etienne. Pour un tiers à peu près du poème, il est original. Garnier est fort
important aussi au point de vue de la langue. Si la Chanson de Roland n’est pas d’o¬
rigine française, il est le premier qui ait écrit en français de l’ile de France. Un phi¬
lologue allemand, M. Lorenz, l’a établi en même temps que M. Etienne. Dans le
tableau des rimes, il y a des lacunes; il aurait fallu qu’il fût complet. On retrouve
peut-être cependant, dans la langue de Garnier, des traces du dialecte anglo-nor¬
mand ; ce n’est pas impunément qu’il a vécu de longues années en Angleterre. Pour
la vocalisation de 1 ’/, l’orthographe ne prouve rien. M. E. porte un jugement trop
sévère sur la facture des vers : s’il y a un poète dont le rythme soit original, c’est
certainement Garnier. C’est la strophe et non le vers qui est l’unité poétique. Les
coupes ont une grande hardiesse et une grande beauté; les strophes ressemblent,
pour leur forme, à celles de nos poètes contemporains. Au jugement de M. Darmes¬
teter, Garnier est un grand écrivain, malgré les obscurités qui viennent de la har¬
diesse et de la concision de son style. 11 sait lui-même qu’il fait œuvre d’artiste, et
c’est là son originalité. Ses traductions sont des chefs-d’œuvre d’élégance litté¬
rale.
M. Pigeonneau regrette que M. E. ne se soit pas servi, pour la partie historique,
de documents qui rendraient son étude plus complète, ou du moins plus originale
et plus exacte (Robertson, Matériaux pour la vie de Thomas Becket), M. E. a eu le
tort d’arrêter son travail de recherches à Pannée 1867; il cite sans cesse Aug.
Thierry même sans le vouloir, sans mettre entre guillemets et renvoyer au pas¬
sage. Quand il le cite volontairement, il ne le cite pas toujours exactement. M. E.
semble peu au courant de la question de droit ecclésiastique et féodal qui s’agitait
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166
REVUS CRITIQUE
entre Henri II et Becket. Malgré tout ce que dit M. E. de la valeur de Garnier comme
historien, M. Pigeonneau ne voit pas ce qu'il ajoute à ce que nous savons d'ailleurs.
U aurait fallu citer la Chanson d* Antioche pour la comparer au poème de Garnier.
M. de Julleville trouve que M. E. s'exagère la difficulté de collationner les manus¬
crits. Il est fort difficile de se retrouver dans ses citations, parce qu’il renvoie à la
fois à l'édition de M. Hippeau et à celle de Bekker. La partie historique est indécise
et vague. Pourquoi M. E. l’a-t-il détachée du reste Ml y a souvent des contradic¬
tions. Comment M. E. peut-il dire que Garnier renouvelle l'histoire de Becket et, en
même temps, qu'il n'est qu'un compilateur? Pourquoi n'a-t-il pas fait au moins un
lexique des citations? M. E. a divisé son étude littéraire en trois parties : invention,
disposition, style. Ces expressions conviennent-elles à un écrivain comme Garnier?
A-t-il proprement un style, c'est-à-dire cherche-t-il sa forme en vue de l’effet ? Les
écrivains du moyen âge ont de grandes qualités; mais on leur nuit en leur attri¬
buant celles qu'ils n'ont pas. M. E. aurait dû se souvenir qu’il y a pourtant une dif¬
férence entre les discours de Garnier et ceux du Conciones .
M. Bergaigne adresse quelques critiques à M. E. sur ce qu'il dit de la syntaxe. Il
le félicite d'avoir parlé, et parlé longuement, de l'ordre des mots, mais il n'est pas
entièrement satisfait de ce qu'il en dit. La division n’est pas très claire; on ne sait
pas bien ce qu'il veut dire par les mots considérés isolément . Le plan qu'il a adopté,
il ne l’a pas suivi exactement, par exemple pour l'adverbe. Dans l'étude des termes
de la proposition, tout n'est pas non plus bien à sa place. Il fait une opposition sans
intérêt entre le complément du comparatif et celui du superlatif. Il n'a pas traité du
génitif partitif. Il existe sur l'ordre des mots, dans la Chanson de Roland , un très
bon travail que M. Etienne aurait dû prendre pour modèle.
CHRONIQUE
FRANCE. — Le gouvernement français avait fait exécuter en 1&81, à l’occasion
de l’exposition de Venise, des photogravures des principaux documents géographi¬
ques conservés à la Bibliothèque nationale. M. Léopold Delisle en a publié une
reproduction en héliogravures, sous le titre : Choix des documents géographiques
conservés à la Bibliothèque nationale . Cette publication, de grand intérêt et de
grande valeur à la fois pour les études géographiques et pour la paléographie, ren¬
ferme un extrait de la Notice des provinces de l'empire de 385 ou 386 (man. du
vi« siècle) ; la Notice des provinces et cités de la Gaule (vi« siècle) ; la Mappemonde de
Saint-8ever appartenant au commentaire sur l'apocalypse du moine espagnol Beatus
(xi e siècle); la carte pisane, portulan qui donne la description des côtes de la Médi¬
terranée» de la mer Noire et de l'Océan depuis Gibraltar jusqu'à la Flandre; enfin,
en onze planches, le bel atlas catalan du roi Charles V, de 1375.
— M. E. La vasseur, de l'Institut, publie une quatrième édition de son Précis
d’économie politique .
ALLEMAGNE. — L'Académie impériale des sciences de Vienne donnera un prix
de 1,000 florins à l'auteur du meilleur travail sur cette question : Welcke Erwei -
terung des lateiniscken Lexikous lœsst sich durch eine planmœssige Untersuchung
und Sammlung des im Romanischen liegenden lateiniscken Sprachgutes gewin -
nen?
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d’HISTOIRB BT OB LITTÉRATURE 167
— Le Liiteraturblatt fur orientalische Philologie que nous avons récemment an¬
noncé, paraîtra au commencement d’octobre sous la direction de MM. Ernest
Kuhn et Johannes Klatt, à la librairie Otto Schulze, de Leipzig. Le Litteraturblatt
paraît une fois par mois. Prix de l’abonnement : 16 mark.
— Le huitième fascicule de l’Histoire de la littérature allemande (Geschichle der
deutschen Litteratur), par M. W. Scherer, a paru; il comprend la fin du xu* cha¬
pitre qui a pour titre Weimar et le commencement du xm* t qui est intitulé Ro -
mantik.
— La seconde partie des Frankfurter gelehrte Anqeigen , de l’année 1772, vient
de paraître, avec une introduction de M. W. Scherer, ainsi que les Vier kritische
Gedichte de J. J. Bodmer, p. p. J. Bæchtold. Ces deux volumes appartiennent,
comme on sait, à la collection des Deutsche Literaturdenkmale des XVIII. u. XIX
Jahrhunderts que dirige M. B. Seuffert et que publient, à Heilbronn, les éditeurs
Henninger. Cette collection comprendra encore : XIII. Die Kindermcerderinn, de
H. L. Wagner, p. p. E. Schmidt ; XIV. Ephemerides und Vokslieder de Goethe, p.p.
E. Martin; XV. Gustav Wasa , de C. Brentano, p. p. J. Minor; XVI. De la litté¬
rature Allemande , de Frédéric le Grand, p. L. Gejger; XVII. Vorlesungen über
schane Litteratur und Kunst , de A. W. Schlegel, p. p. J. Minor.
— La librairie W. Friedrich, de Leipzig, publie dans la collection qui porte le titre
« Geschichte der Weltliteratur in Einzeldarstellungen » une « Histoire de la littéra¬
ture allemande », Geschichte der deutschen Literatur , dont Fauteur est M. Franz
Hirsch; Fouvrage comprendra 24 livraisons.
— La quinzième édition du livre de Ludwig Büchner, Kraft und Stojf , vient de
paraître (Leipzig, Th. Thomas); la première avait paru il y a vingt-huit ans.
— L *Allemagne de Madame deStaél a paru dans la petite Bibliothèque Universelle
de Reclam; elle porte les n°* 1751-1758 et forme deux volumes, au prix de
1 mark 60.
— La traduction, en vers allemands, des Lusiades de Camoens, par M. Storck, de
Munster, paraîtra, sous peu de jours, à la librairie Schceningh, de Paderborn.
— La librairie Teubner, de Leipzig, annonce la prochaine publication des ouvra¬
ges suivants ; i° Plutarchs Themistokles fur quellenkritische Uebungen kommentiert,
p. p. Adolf Bauer; 2 0 Analecta critica ad parcemiographos grcecos , par Otto
Crusius; 3 ° M. Tulli Ciceronis ad M. Brutum Orator y recensuit F. Hkbrdegkn ;
4° le Poenulus de Plaute, en partie d’après le manuscrit de Ritschl, par MM. George
Gœtz et Gustave Lœwr.
— Paraîtront prochainement ; chez Brockhaus, à Leipzig. Albrecht Dürers T âge-
buch der Reise in die Niederlande , p. p. Fr. Lbitschuh, le XVI 0 vol. des Indischt
Studien de A. Weber ; le I er volume de l’ouvrage de A. E. v. Nordenskkeld, Die
wissenschaftlichen Ergebnisse der Vega-Expedition von Mitgliedern der Expédition
undanderen Forschem bearbeitet\ chez Schulze, à Leipzig : Die Schule der Zahiri -
riten, ihr Ursprung, ihr System und ihre Geschichte, ein Beitrag f ur muhammeda-
nischen Theologie f par J. Goldziher; chez la librairie de l’association à Calw :
Biblisches Handwœrterbuch, unter Mitwirkung von P. Braun, Fr. Delitzsch u .
Andern, redigiert von P. Zbller (avec illustrations).
— Deux nouvelles livraisons dans le Deutsches Wœrterbuch : l’une, de R. Hildb-
brand, va de Geldschragen à Gelust et comprend, entre autres, les mots : Gele-
genheit, Gelehrt , Geleite , Gelt , Gelten; l’autre, de M. Hbyne, va de Mein à Messe ,
et renferme les articles suivants : Meinen, Meister , Mens ch, Merken % etc.
— Pendant le semestre d’été de l’année 188 3 , le nombre des élèves inscrits dans
les universités allemandes a été : Berlin, 4,062; Leipzig, 3,097; Munich, 2,295;
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168 REVUS CRITIQUE D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
Breslau, i, 55 q; Halle, 1,414; Tubingue, 1,373 ; Bonn, i,i 65 ; Gœttingue, 1,104;
Wurzbourg, 1,0 85 ; Heidelberg, 1,019 ; Kœnigsberg, 929; Marbourg, 848; Stras¬
bourg, 840; Fribourg, 8a 3 ; Greifswald, 731 ; Erlangen, 641 ; Jena, 63 1 ; Kiel, 447;
Giessen, 464; Munster, 328; Rostock, 23 1.
— La collectton du château de Sans-Souci s’est enrichie d’un buste de Voltaire,
découvert parmi les vieux modèles de la manufacture royale de porcelaine; ce buste
avait été offert à Voltaire par Frédéric IL
BELG 1 QUF. — La cinquième session du Congrès des Américanistes vient de
s’ouvrir à Copenhague. On lira à ce propos, avec intérêt, le compte-rendu de la
quatrième session, tenue à Madrid, que vient de publier M. Anatole Bamps, secré¬
taire général du troisième congrès de Bruxelles et délégué du gouvernement belge
au Congrès de Madrid. (La quatrième session du Congrès international des Améri¬
canistes, Vexposition de la Flore du Nouveau-Monde et Vexposition des antiquités
américaines à Madrid, Bruxelles, typogr. Vanderauwera, 220 p.)
— M. Théod. Juste vient de faire un nouveau travail, qui ouvre une série d’ou¬
vrages populaires sur l’histoire contemporaine : la Révolution de juillet i 83 o,
Bruxelles, Muquardt); il y a fait usage des Mémoires de Metternichet des notes-
annales rédigées par Louis-Philippe.
— Le travail publié par M. Paul Fredericq sur L'enseignement supérieur deVhis -
toire à Paris , dans la Revue internationale de l’enseignement », a paru à part. Ce
ne sont que des u notes et impressions de voyage »; mais les observations de l’au¬
teur sont importantes et originales. M. Fredericq a visité le Collège de France, l’E¬
cole des Chartes qui lui semble une institution des plus complètes et des plus véri¬
tablement scientifiques, et absolument hors de pair; l’Ecole normale supérieure,
dont il juge le régime d’internat trop rigoureux, mais qu’il ne faut pas supprimer
l'Ecole pratique des Hautes-Etudes, la meilleure et la plus féconde création du mi¬
nistère Duruy; la Faculté des lettres et les conférences de la licence et de l’agréga¬
tion d’histoire — où M. Fredericq cite surtout les cours théoriques de M. La visse.
En somme, M. Fredericq juge que nulle université d’Allemagne ne possède autant
de cours d’histoire que Paris (près de cinquante cours d’histoire et de sciences auxi¬
liaires historiques). C’est peut-être trop, et M. Fredericq remarque qu’ « un mou¬
vement de concentration nettement caractérisé se produit entre les membres épars
de l’enseignement historique de Paris. * « Je ne crois pas être bien grand prophète,
conclut M. Fredericq, en prédisant à la France une brillante école d’historiens qui,
fidèles à leur génie national, harmonieux avant tout, sauront tenir la balance égale
entre le fond et la forme, entre l’érudition du détail et la synthèse philosophi¬
que. »
— M. A. Warzéb, chef de division au ministère de l’intérieur, prépare une se¬
conde édition de son Essai historique sur les journaux belges , qui a paru en 1845.
— Le gouvernement belge a reçu récemment, par une disposition du testament
de M. X. Heuschling, une somme de 25 ,000 francs destinée à la fondation d'un prix
quinquennal de statistique.
— M. Pierre Hoffmann, de Tubingue, a été nommé professeur de philosophie et
d'histoire de la philosophie à l’Université de Gand, et M. Vollgraff, directeur du
gymnase de Leyde, professeur de philologie latine et d’histoire de la littérature fla¬
mande, à l’Université de Bruxelles.
l'roprleiairc-G j: an: : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , a 3 .
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August Becker. — Stkknstrup, Danske og norske riger paa de brittiske
oeeri Daneveldens tidsalder. II. (Raconte la fin de la domination da¬
noise dans les îles britanniques et le règne de Canut le Grand et de ses
fils.) — Chronicon Islebiense, Eisleber Stadt-Chronik aus den Jahren
15 jo* 1738 hrsg. v. Gôssleb — Obsterley, H istorisch-geographisches
Wôrterbuch des deutschen Mittelalters. x* livraison (Dernière livraison,
de « Voggenhusen » à Zwolle » ; livre indispensable à l’historien et
d'une extrême utilité). — Rordam, Monumenta historiae danicae, histo-
riske Kilderskrifter og bearbejdelser af dansk historié isaer; det XVI
Jsrhundrede. I, 1, 2* série. (Renferme le journal d'un Allemand sur la
campagne d’hiver de Daniel Rantzau en Suède, i567-i568,) — Thuh,
Phiiipp von Marnix, Herr von Sanct Aldegonde. (Ouvrage, assez ha¬
bilement écrit, d’un catholique qui fait de Marnix un calviniste fanati¬
que et un égoïste incarné, un homme aux sentiments mesquins, plein de
venin et de calomnie, sans courage personnel, sans autre mobile que
son propre avantage; on a fait de Marnix des panégyriques passionnés;
ici, on a sa caricature.) — Kôhlbr, Die Schlachten von Nicopoli und
Varna. (Recherches très exactes et pénétrantes, savoir étendu, sens criti»
que très perçant.) — Fugibr, ethnologische Forschungen u. Studien.
(Toujours hardi, sommaire et méprisant.) — Matthias, Die rômische
Grundsteuer u. das Vectigarlecht. — U. Meister, Die Stadtwaldun*
gen von Züricb. ihre Geschichte, Einrichtung u. Zuwachsverh<nisse
nebst Ertragstateln. — Rich. Meister, Zur griech. Dialektologie (Etu¬
des sur les dialectes doriens, grand soin, et grand savoir.) — Breymann,
Ois Lettre vom franzôsischen Verb auf Grundlage der histor. Gramma*
tik. (Livre peu utile pour l’école). —• Mischi, Deutsche Worte im Ladi*
niscnen. —- Facsimiledi antichi manoscritti per uso delle scuole di filo-
logia neolatina, pubblic. da Ernesto Monaq, fasc. II. — Recueil de
contes populaires de la Kabylie du Djurdjura, p. p. Rivière ; Recueil de
contes populaires slaves, p. p. L. Lbobr. (Deux recueils attachants et
précieux.) —■ Tomaschbk, zur historischen Topographie von Persien. I,
Die StrassenzOge der Tabula Peutingerana. — Goeler von Raveens-
idrg, Rubens u. die Antike, seine Beziehungen zum classischen Alter*
thum u. seine Darstellungen aus der classischen Mythologie u. Ge¬
schichte, eine culturgeschichtlicheUntersuchung. (La question n’est pas
résolue; manque de profondeur et d’originalité.) — Waederseb, G. P.
da Palestrina u. die Gesammtausgabe seiner Werke, — Welckbr,
Schiller’s Schâdel und Todtenmaske nebst Mittheilungen tiber Schadel
und Todtenmaske Kant’a.
Deutsche Litteraturzeitnng, n° 3 o, 28 juillet i 883 : Fr. Lenormant, La
Genèse, trad. d’après l’hébreu avec distinction des éléments constitutifs
du texte suivie d un essai de restitution des livres primitifs dont s’est
servi le dernier rédacteur. (Wellhausen : le traducteur n’a pas fait une
seule observation nouvelle et utile; ce qui l’excuse, c’est qu’il écrit pour
le grand public.) — Sophoniae in libros Aristotelis de anima paraphrasis,
Anonymi in Aristotelis catagorias paraphrasis, ed. Hayduck. (Heitz :
édition très importante.) — Eriefwechsel zwischen Arthur Schopenhauer
u. Joh. Aug. Becker, hrsg. v. J. K. Becker (Gyzicki). — Deussbn, Das
System des verflnta nach den Brahma-Sutras des Bâdayârana und dem
Commentare des Çânkara tiber dieselben als fin Compendium der
Dogmatik des Brahmanismus vom Standpunkte des Çankara aus dar-
gestellt. (H. Jacobi : travail extrêmement profond, peut-être même
trop détaillé, d’un homme qui est à la fois sanscritiste et philosophe ;
exposé clair et qui épuise le sujet.) — Müllensiefen, De tituiorum la-
conicorum dialecto. (Hinrichs; du soin, du jugement, l’auteur est maî¬
tre de son sujet.) — Angelo de Gubbrnatis, Storia universale délia
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letteratura. III.Storia déliapoesia lirica; IV. i.Florilegio lirico, lirica
Î ’opulare, poetiorientali, greci e latini; 2. Florilegiolirico, poetimodérai.
Trois volumes nouveaux sur la poésie lyrique de tous les peuples;
quelques légères critiques à faire; mais de fines et spirituelles réflexions;
l'ouvrage témoigne de la puissance de travail de son auteur et de son
remarquable talent d’exposition.) — Calendar of State papers, domestic
sériés, 1 655 - 56 , edited by Mary Anne Everett Green (Alt. Stern : l'é¬
diteur de ce recueil est une femme, employée aux archives de Londres,
et qui montre que dans une position scientifique, où nous ne sommes
accoutumés à voir que des nommes, une femme peut faire des choses
remarquables). — Ludwig Gkïger, Renaissance und Humanismus in
Italien und Deutschland. « AUgem. Geschichte in Einzeldarstellungen,
II, 8. » (G. Voigt : livre plein d’intérêt; destiné, non aux philologues
et aux savants, mais au grand public ; quelques fautes inévitables dans
une œuvre d’ensemble.) — Karten von Attika, hrsg. v. E. Curtius u.
Kaupert, Heft II., Text von Milchhoefer. (Lolling.) — Powell, First
annual report of the bureau of ethnology to the secretary of the smithso-
nian Institution. (G. Gerland.) — Jessen, Die Darstellung des Weltge-
richts bis auf Micnelangelo. (Janitsch.) — Das Landgesetz von Irland
vom Jahre 1881 in deutscher Uebersetzung und im Original, eingel. a.
hrsg. von Wiss.
N° 32 , 11 août 1 883 : Martin Luthers reformationshistorische deut*
sche Schriften, nach den âltesten Ausgaben kritisch aufs neue bearb.
von Enders. I. 2 e Aufl. — Gyzycki, Grundzüge der Moral. —Th.
Waitz, Allgemeine Pâdagogik u. kleinere pâdagogische Schriften,
3 e édit. — Van Eys, Outlines of basque grammar; Parker, a concise
grammar of the malagasy language. (G. Gerland; ces deux ouvrages
font partie de la collection des grammaires simplifiées des principales
langues d’Asie et d’Europe publiées par la librairie Teubner; très clair
et bel abrégé de la grammaire basque, par Van Eys ; l’ouvrage de Par¬
ker est relatif à la langue des Howas.) — R. Meister, Zur griechischen
Dialectologie; I. Bemerkungen zur dorischen Accentuation. II. Die
Excerpte xepl StaXéxT<*>v, namentlich in Bezug auf die Abschnitte xsri
Awp{Soç. (Hinrichs : travail plein de choses.) — O. Brenner, Altnonfr
sches Handbuch, Litteraturübersicht, Grammatik, Texte, Gloser.
(Kolbing : à recommander à tous les germanistes qui veulent étudier le
norois aune façon réellement scientifique.) — Ruete, Hôlty, sein Le-
ben u. Dichten. (Assez inutile.) — Chronicon Islebiense, Eisleber
Stadt-Chronik aus den Jahren 1520-1738, hrsg, v. Grôssler, u. Sommer.
(G. Droyssen.) — Spanheim, Relation de la cour de France en 1600,
publiée pour la Société de Thistoire de France par Ch. Schefer. (Ko-
ser : édition qui ne mérite que des louanges; l’introduction biographi¬
que et littéraire est très détaillée et pénétrante.) — Ullrich, Die horizon¬
tale Gestalt u. Beschaffenheit Europas und Nordamerikas. — P. Ribot,
Exposé critique des doctrines sociales de M. Le Play.
Vor Dngdom, 1 883 : 4 0 Haefte : Bbntzen, Om skolehygiene og sko-
lae&er. — Koebke, Endnu nogle bemaerkninger ang. den hoejere pi«
f eskole og navnlig dens undervisning i 3 fremmede sprog. — Viggo
Iolm, Materialier til en historisk oversigt over modersmaalets stilling
i de danske skoler. — Broberg, Rabelais some paedagog.
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent, 23 . 4
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N* 36
■883
Dix-septième année 3 Septembre 1883
7
REVUE CRITIQUE t
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATUI^
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
de MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuquet
Prix d'abonnement :
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 2b (r.
3 PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DK LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
ob l'école des langues orientales vivantes, etc
28 , RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqukt
(Au bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
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PAR
LE BARON L. DE VAUX
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carte.*. 20 fr.
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- X
PÉRIODIQUES
The Aoademy, n° 589, 18 août 1 883 : Holtman, Eight years in Japan.
— W. Williams, History of the negro race in America. 2 vols. (Payne :
l’ouvrage a ses imperfections, mais il est intéressant; c’est l'histoire de
la race nègre en Amérique par un nègre.) — Blades, Numimasta typo-
graphica. — Krauss, Sagen und Mârchen der Süd-Slaven. (Karl Blmd :
recueil attachant et important). —Current Theology. — Recent criti-
cism of Gulliver’s travels. » (Whitley Stokes.) — A national epk.
(Ch. J. Robinson : « Anglorum praelia » de Christophe Ocklande,
i 583 ). — Cat-Lore (W. Axon). — The Shapira mss. of Deuteronomy
(A. Neubauer et Sayce). — The colours of flowers. (H. Friend). — Les
aquarellistes français. I-IV. (H. Wallis). —The discovery of eeyptian
antiquities in Rome (F. Barnabei). — The early history ot the Levant.
I. (Sayce).
The Athenaeum. n 0 2912, 18 août i 883 : Records of theenglish province
of the society of Jésus; vol. VII,part II : collectaneacompleted, with ap¬
pendices, catalogues of assumed and real names, annual letters, biogra¬
phies and miscellanea, by Henry Foley. —Sophocles, the seven playsin
english verses, by L. Campbell ; The suppliant Maidens of Aeschylus,
translated into english verse by Morshead. — Corn. Walford, Fairs,
past and présent, a chapter in the history of commerce. (Livre fait avec
soin et rempli de détails.) — Oldenberg, Buddha, his life, his doctrine,
his order translated from the german by William Hoey. — Ellacombk,
Shakspeare as an ângler. (Petit livre charmant, bien imprimé, qui plaira
à tous ceux qui aiment la pèche et Shakspeare, quoique l’auteur n’ait
prouvé que par des arguments très vagues que Shakspeare était pêcheur;
« ce n’est qu’une conjecture, dit l’auteur, et il est vrai qu’on ne peut le
prouver, mais je me suis proposé de montrer la grande probabilité que
Shakspeare était pêcheur »). — The History of Israël, by HeinrichEwALD.
Vol. VI. The life and times of Christ, translated from the german by
J. F. Smith. — The real Lord Byron, the destruction of the « Mé¬
moire » (Jeaffreson). — Euphuism. (Mary A. Ward.) — The Shapira
ms. of Deuteronomy. (D. Ginsburg]. — Byron letters. — Notes from
Naples. — Notes from Rome (Lanciani).
Literarisohes Centralblatt, n° 34, 18 août i 883 : Kônig, Der Offenba-
rungsbegriff des Alten Testaments. 2 vols. — Lasson, System der
Rechtsphilosophie. — Manns, Die Lehre des Aristoteles von der tra-
gischen Katharsis und Hamartia erklârt. (Mérite l’attention par la fi¬
nesse et la sagacité de la démonstration.) — Gyzicki (von), Grundzüge
der Moral. — Urkundenbuch der Abtei Sanct Galien, 111, 2-9. 1241-
i 36 o, p. p. Wartmann. — Inventaire sommaire des archives commu¬
nales de la ville de Strasbourg antérieures à 1790, rédigé par J. Brucker.
Série A. A. Actes constitutifs et politiques de la commune. 3 * partie
(Renferme l’indication de riches matériaux historiques, et fournit à la
science des informations précieuses). — A. von Reumont, Kleine histo-
rische Schriften. — Aus dem handschriftlichen Nachlasse Westenrie-
ders, von A. Kluckhohn. II. BriefeWestenrieders, miteinem Anhange :
Tagebücher aus den Kriegsjahren i 8 o 5 u. 1809. — Fünfzig Jahre rus-
sischer Verwaltung in den baltischen Provinzen. (Excellent livre qui
raconte avec exactitude et impartialité, en laissant presque toujours
parler les documents, l'histoire des provinces baltiques depuis cinquante
ans.) — Gothein, Der christlich-sociale Staat der Jesuiten in Paraguay.
(Peu étendu, mais très instructif; donne une analyse critique de cette
singulière tentative des Jésuites dans le Paraguay.)— Isaac Taylor, The
alphabet, an account of the origin and development of letters. 2 vols.
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REVUE CRITIQUE
D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
36
— 3 septembre —
1883
Sommaire i 173. La version septentrionale du Dhammapada, p. p. Rockhill. —
174. Charteris, La canonicitédes livres du Nouveau Testament.— 175. Pfitznbr,
Histoire des légions romaines depuis Auguste jusqu'à Hadrien. — 176. Poésies
de Gilles le Muisit, p. p. Kervyn de Lettenhove. — 177. De Lescure, Rivarol
et la société française pendant la Révolution et l'émigration. — 178. Suphan,
Goethe et Spinoza, Règlement du club de Philadelphie fait par Franklin et
transformé par Herder en un statut pour une Société d'amis de l'humanité. —
Chronique.
173. — Udâaa-Varga a collection of verses from the Buddhist canon, compiled
by Dharmatrâta, being the northern buddhist version of Dhammapada, translated
from the Tibetan of the Bkah-hgyur with notes and extracts from the Commen-
tary of Pradjnâvarman, by W. Woodville Rockhill. London, Trubner and C°,
i 883 . In-8, xvi et 223 pp.
Le Dhammapada, dont ce volume nous offre « la version septentrio¬
nale r, est un des livres les plus connus de la littérature « méridionale »
du Bouddhisme, depuis que M. Fausbôll a publié, il y a bientôt trente
ans (18 55 ), une édition du texte pâli de cet ouvrage, qui a fait sensa¬
tion, — avec une traduction latine, — et que MM. Weber en Allema¬
gne, Max Muller en Angleterre, Fernand Hû en France, Pont mis à la
portée du commun des lecteurs par les traductions qu'ils en ont faites
en langues modernes. C’est un recueil de quatre cents et quelques sen¬
tences versifiées, d'une lecture en général assez facile, et bien propres à
faire connaître la pensée morale du Bouddhisme. La publication d’un
pareil recueil ne pouvait manquer d'exciter l'intérêt.
Les érudits et ceux qui, à un titre quelconque, s’intéressent à l’his-
toire du Bouddhisme étaient naturellement curieux de connaître l'équi¬
valent du Dhammapada dans la littérature « septentrionale », ou, si
l’on veut, le Dhammapada du Nord, — le recueil publié par M. Faus¬
bôll étant le Dhammapada du Sud. Csoma de Kôros, qui ne savait
rien du Dhammapada, paru près de quinze ans après sa mort, mais qui
parcourait et analysait le canon bouddhique du Tibet avec une perspi¬
cacité et une puissance de travail peu communes, avait signalé, dans
le volume XXVT de la section M do de cette vaste collection, l'ouvrage
intitulé Uddna-varga ; il en avait déterminé le caractère et fait connaî¬
tre l'économie. De la seule notice de Csoma, il était déjà permis de
conclure à une analogie plus ou moins étroite de P Udâna-varga tibé¬
tain avec le Dhammapada pâli.
Mais le titre i'Udâna était trompeur ; ce terme désigne le plus ordi-
Nouvelle série, XVI. 36
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REVUE CRITIQUE
I7O
nairement des phrases élogieuses qui ne sont pas précisément des sen¬
tences; et il y a 9 dans le canon pâli, un recueil de ces phrases, intitulé
Udâna % qui est bien distinct du Dhammapada. Feu A. Schiefner, le
regretté tibétaniste de Saint-Pétersbourg, examina de plus près YUiana-
varga du Kandjour et reconnut que la plus grande partie des phrases
versifiées dont il est formé coïncident avec des sentences du Dhamma¬
pada. L’ Udana-varga tibétain pouvait donc être considéré comme le
Dhammapada des Bouddhistes du Nord.
Schiefner n’a pas eu le temps de faire une traduction complète de
V{Jddna-varga, et son mémoire sur la question, pçrdu dans les recueils
de l'Académie des sciences de Saint-Pétersbourg, n'est guère accessible.
M. Rockhill vient d’accomplir le travail entrepris et commencé, non
achevé par Schiefner, en donnant aux lecteurs tout ce qu'ils peuvent
désirer en cette matière ; — une traduction (anglaise) exacte et soignée;
de nombreuses notes qui éclairent les difficultés du texte ou y ajoutent
d’utiles renseignements ; — un appendice renfermant certains détails
trop développés pour trouver place dans les notes avec la traduction
d’un petit recueil de vingt-quatre sentences (qui figurait déjà, texte et
traduction, dans le mémoire de Schiefner) ; — enfin des tables de concor¬
dance qui signalent les rapports de YUdâna-varga avec le Dhammapada,
le Sutta-Nipâta, autre recueil pâli, et la compilation chinoise intitulée
Fa-khiou-pi-ou.
En effet, les Chinois ont aussi leur Dhammapada; ils ont même leur
Udâna*varga; car l’ouvrage intitulé Tchou-yao-king a été reconnu
parM. Beal comme identique à la compilation tibétaine. Mais c’est le
Fa-khiou qui est le représentant chinois du Dhammapada; le Fa-
khiou-pi-ou est le recueil des récits qui servent à l’explication du
texte. M. Beal en a donné la traduction dans le recueil intitulé : Texts
from the Buddhist canon (Trübner’s Oriental sériés). Je ne puis m’é¬
tendre sur cet ouvrage pour deux raisons : d’abord je ne l'ai ni vu ni lu,
et n’en puis parler que par ouï-dire sur de très fugitives indications ;
ensuite cela est à côté de mon sujet. On me permettra cependant de faire
une remarque qui y touche ou m’y ramène.
M. Beal a traduit (si je suis bien renseigné) le commentaire chinois
du Dhammapada, c’est-à-dire, un recueil d’historiettes, d’anecdotes,
de récits, de légendes relatives aux diverses sentences du texte, ce6 sen¬
tences étant comprises dans l’ouvrage chinois qui réunit texte et com¬
mentaire. En i 855 , dans son édition du Dhammapada, M. Fausbôll
avait donné le texte pâli complet de quelques-unes de ces historiettes
servant de commentaire; pour d’autres, il s’était contenté de donner
de brèves indications; il n'en avait traduit aucune. M. R., lui, ré¬
sume, dans ses notes, quelques-unes de ces historiettes. Mais il faut
bien noter qu’il y a Ici deux choses très distinctes malgré leur évidente
connexité : i° les recueils de sentences qui constituent le Dhammapada,
YUddna-verga, etc. ; 2 0 les recueils de récite qui constituent ou renfer-
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d’HISTOIRB BT DE LITTÉRATURE
I 7 I
ment les commentaires de ces recueils de sentences. MM. Fausbôll et
Rockbill se sont occupés principalement des premiers, accessoirement
des seconds; tandis que M. Beal semble s’être attaché spécialement aux
seconds, et aux premiers occasionnellement. Il y a là deux classes d'é¬
crits qui ont nécessairement des points de contact, mais peuvent et
même, à certains égards, doivent être étudiés séparément.
J’ajoute que plusieurs sentences du Dhammapada se retrouvent dans
d’autres recueils pâlis, quelques-unes même plusieurs fois. Tout porte
à croire que le nombre de ces identifications ira en augmentant. Il fau¬
dra alors constater les rapports existant entre les récits auxquels les
sentences sont respectivement adaptées.
Je terminerai ce compte-rendu en rappelant quelques-uns des points
traités dans la préface du volume. L ’Udâna-varga se compose de
989 vers répartis dans 33 chapitres distribués en quatre livres. Sur ces
989 vers, il y en a 3 oo qui répondent presque mot pour mot à des vers
du Dhammapada, i 5 o qui ressemblent à des vers de ce recueil (lequel
ne contient que 423 vers); 20 se retrouvent dans le Sutta-Nipâta; et il
est probable que le reste a son équivalent dans divers recueils pâlis.
M. R. ne considère pas les sentences tibétaines comme des traductions
des sentences pâlies dont elles sont les équivalents; mais, selon lui,
(et j'y souscris), les unes et les autres reproduisent un texte primitif
qui n’était pas fixé et qui présentait de nombreuses variantes plus ou
moins importantes. Quant à la langue dans laquelle étaient rédigées les
sentences traduites en tibétain, il incline pour le sanskrit Kaçmirien du
premier siècle av, J.-G. sans pouvoir rien affirmer.
Lç nom dç l’auteur, connu seulement sous sa forme tibétaine et res¬
titué en sanskrit par Csoma sous la forme Dharma-raxita, serait, selon
M, R., Dharmatrâta, correction appuyée sur de bonnes raisons, mais
qui n’est pas certaine; car on pourrait peut-être proposer, avec autant
de chances de rencontrer juste, la forme Dharmapâla. M. R. dit ce que
I on sait sur ce personnage : c'est fort peu de chose. Le plus difficile, en
ce qui le concerne, est de le distinguer d'autres personnages du même
nom, ou de l'identifier avec l’un d'eux. Le temps où Dharmatrâta a
vécu, c’est-à-dire celui où fut composé YUdâna-varga qui lui est attri¬
bué, tomberait entre les années y 5 et 200 de notre ère.
M. Rockhill donne aussi quelques détails sur Pradjnavarman, l’auteur
du commentaire de YUdâna-varga inséré dans le Tandjouret qu'il a mis
à contribution. En terminant, et avant d’exprimer ses regrets de ce que
Schiefner n’uit pas achevé son travail sur YUdâna-varga , il revendique
avec raison la part d’autorité qui est due aux écrits trop dédaignés des
Bouddhistes du Nord dans l'examen critique du Bouddhisme primitif,
et proteste contre le parti pris de ne tenir compte que de ceux du Boud-
dhismçméridional, Toute cette préface est judicieuse et instructive, et
k volume entier s§t un bon service rendu aux études bouddhiques.
L. Fr.Ku.
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R fi VU K CRITIQUE
I72
174. — The new Testament «criptare*. Their daims, history, and aotho*
rity, being the Ewall Lectures for 1882, by A. H. Ch art sais D, D., profes$.of
biblical criticism aud biblical antiquities in the university of Edinburgh, and ont
of her Majesty’s Chaplains. London, 1882. In-8 de xu et 227 pp.
Il y a deux ou trois ans que M. Charteris publia un gros volume con-
tenant un recueil des témoignages sur la canonicité des livres du Nou¬
veau-Testament. Le Quellensammlung de M. Kirchhofer a servi au
savant professeur d’Edimbourg de base et de modèle, et il a fait sui¬
vre chaque article d’observations propres à mettre le lecteur au fait de
l’état actuel de la question critique. Cet ouvrage, qui fait honneur à |
l'éducation et au jugement de l'auteur, est destiné, il est à peine néces* |
saire de le dire, à des personnes vouées à l’étude de la théologie.
L’ouvrage que nous annonçons en ce moment, s’y rattache très inti- |
mement; mais il s'adresse à un public moins restreint. Il est destiné à
servir de guide à toute homme éclairé qui éprouve le besoin de se rendre
compte des résultats de l’examen des témoignages en faveur de la cano¬
nicité des livres du Nouveau-Testament. M. Charteris en a banni, au¬
tant que possible, les termes techniques. Il y expose en six lectures :
i° ce que la Bible prétend être; 2 0 les caractères des livres du Nouveau-
Testament, quant à la vérité, l'unité et l'autorité; 3 ° comment s'est
formé le canon des Ecritures, et ce qu’étaient l’Ancien et le Nouveau-
Testament au commencement de l’ère chrétienne; 4 0 ce que furent
l’église primitive et les livres canoniques du Nouveau-Testament; 5° ce
qu’est l’évidence des apologistes, des versions et des écrits chrétiens, de
Justin Martyr à Eusèbe; 6° par suite de quels principes le christianisme
a attribué l’autorité aux livres canoniques du Nouveau-Testament.
Cette simple et rapide table du contenu de cet ouvrage suffit à en
montrer l’intérêt, et de quel secours il peut être pour quiconque veut se
faire une idée de l’importante question de la canonicité des livres de la
Nouvelle alliance.
M. N.
175. — D v W. Pfitzmer, Geaohlchte der rœmUcben Katterleglonen voc
Augustu» bis Hadrlanui. Leipzig, 1881. ln-8, 290 pp.
Nous sommes bien en retard avec le livre du docteur Pfitzner; il es
un de ceux cependant qui méritent, quels que puissent en être le
défauts, d’être signalés dès leur apparition, à cause de leur utilit
même.
Il est dit que tous les travaux sur l’histoire romaine seront sans cess
à refaire, qu’il n’en est peut-être pas un qui fixera la science pour que!
ques années; comment ne pas songer à cette malheureuse toile de Pén<
lope, sans cesse défaite, sans cesse recommencée? Ainsi, pour les légior
romaines, on possédait déjà un volumineux mémoire de Borgbesi coi
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d'hISTOIRR KT DR L1TTÉRATDRK
173
sacré à différents points de détail sur les légions du Rhin ( Œuvres , IV,
200-265); Grotefend avait inséré, dans l'Encyclopédie de Pauly, des
monographies en général très complètes, légion par légion; M. Allmer
avait placé, à la fin de son III® volume des Inscriptions de Vienne, un
tableau des légions de la fin du règne d’Auguste à celui d’Alexandre
Sévère, tableau très sommaire, mais presque toujours complet et exact;
en 1877, M, Stille avait fait paraître une histoire des légions de la mort
d'Auguste à l'époque de Vespasien; en France, il y avait Tétude de
M. C. Robert sur les légions du Rhin. Voilà, ce semble, pour ne citer
que les plus marquants, bien des ouvrages sur le même sujet. — Venu
le dernier, M. P. a un avantage sur ses devanciers; il a pu profiter d'un
plus grand nombre de découvertes épigraphiques ; il a eu à son secours
les tables du Corpus inscriptionum latinarum, véritables merveilles de
patience et de clarté, où les chapitres sont tout tracés à l'avance pour qui
veut les / écrire. Son livre aura donc le mérite d’être au courant et de
représenter l’état de la science au moment où il a paru. De plus, ce livre
se distingue des ouvrages analogues par le plan sur lequel il a été
conçu.
En effet, cette histoire des légions impériales, depuis Auguste jusqu’à
Hadrien, comprend trois parties. La première (pp. 11-99) donne l'histo¬
rique très complet de tous les événements relatifs aux légions, règne par
règne; c’est, en abrégé, l'histoire militaire de chaque règne, faite au
point de vue exclusif des légions, et divisée en autant de chapitres qu’il
y a eu d’empereurs de 27 avant J.-C. à 1 38 après. La deuxième partie
(pp. 99-214) a pour titre « les garnisons des provinces » ; c’est l’histoire
militaire de chaque province, avec toutes les mutations de légions et les
principaux faits ayant trait à l’histoire de ces corps. Enfin la troisième
partie (pp. 214-272) renferme les monographies de chacune des trente
légions impériales. En résumé, le même travail a été fait par l’auteur à
un triple point de vue : l’histoire des légions, tantôt par règne, tantôt
par province, tantôt par légion. Les dernières pages (273-290) renfer¬
ment, en appendice, un petit recueil de cent deux inscriptions tirées,
soit des volumes parus du Corpus, soit du recueil d’Orelli-Henzen, soit
du volume de Mommsen sur le royaume de Naples. Aucune d’elles
n’est donc à signaler pour sa nouveauté; mais on aime à avoir sous la
main les documents auxquels l’auteur renvoie dans son exposition.
Pareil livre ne peut être analysé par le menu; il faudrait vérifier ces
innombrables petits faits qui sont cousus les uns aux autres d’une trame
ininterrompue pendant ces 290 pages in-octavo, où pas une note, pas
une, ne vient décharger le texte, où pas un blanc ne repose les yeux et
l’esprit du lecteur. Les parties que nous avons examinées de près nous
ont du moins toujours paru exactes : l’auteur n’est pas moins conscien¬
cieux qu'érudit. Si le grand-duc de Mecklenbourg-Schwerin, à qui le li¬
vre est dédié, en a pris connaissance, il aura vu que l’ouvrage n’était
pas indigne « d'un ami et d'un protecteur des sciences ». Mais il aura
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REVUE CRITIQUE
*74
certainement couru à la fin du volume pour y chercher un index, et il
aura regretté, comme nous, qu'un livre aussi étudié, aussi plein de faits,
ne soit pas tout ce qu'il devrait être, par le manque d'une table des ma¬
tières.
G. Làcour*Gayet.
176. — Poésie* de Gilles Ll Moisis» publiées pour la première fois d’après
le manuscrit de Lord Ashburnham, par M. le baron Kervyn de Lfttenhoye,
membre de l’Académie royale de Belgique. Louvain, ap. J. Lefever, 1882.
2 vol. in-S.
Cette publication d'un poète jusqu'alors inédit est faite pour plaire
autant à l'historien qu'au romaniste. Le premier y trouvera de curieux
renseignements sur la société religieuse et séculière au xiv* siècle, sur les
moines, les nonnes, les ordres mendiants, les papes, les princes, etc. ; le
second y rencontrera des tournures qui sentent le walesc (c'est ainsi que
Gilles appelle son langage), des proverbes bien frappés et une foule de
mots intéressants pour l’historique de la vieille langue française. Les
poésies de Gillon le Muisit (telle est la forme du régime qu'il aurait fallu
adopter), abbé de Saint-Martin de Tournai, ne sont ni ternes ni plates
ou chargées de chevilles, comme celles de la plupart de ses contempo¬
rains; elles ont de la précision, de l’énergie, de la grâce même. Il faut
donc savoir gré à M. le baron Kervyn de s’être chargé de cette utile pu¬
blication, mais il est fâcheux qu’il n’ait pas apporté, dans l’accomplisse¬
ment de sa tâche, plus de soin et de compétence. Nous ne parlerons pas
du texte, qui laisse beaucoup à désirer, mais qui, pour être bien appré¬
cié, aurait besoin de la comparaison du manuscrit, ni du commentaire
qui eût été si nécessaire et qui fait presque complètement défaut; mais
le glossaire qui termine le second volume est rempli des interprétations
les plus hasardées et des erreurs les plus manifestes. Nous ne signalerons
que les principales.
Accourser (II, 216) ne signifie pas « maîtriser, réduire à l’obéissance »,
mais « faire courir, faire prendre le galop fe : Les kevaus estahieus poet
on mieus accourser = on peut plutôt faire prendre le galop à des che¬
vaux paresseux, à de vieilles rosses. Par ce mot estahieus , très commun
dans l'ancienne langue, dérivé du latin stativus = qui reste en place,
M. K. entend a étalon » et, par extension, celui qui est entier dans ses
volontés. (Ajouter) : A ce compte, le féminin estahieuwe que Gilles
emploie plusieurs fois signifierait « jument ou cavale ». —
S 'afflirer (I, 29) n’a jamais existé : Se te le ses, tu le dois dire De
coer dolant et t’y afflire . M. K. a pris cet infinitif afflire de
affligere pour une troisième personne de l’indicatif. — Adosser =
« tourner lé dos à » et non « combattre » : Et le siècle malvais dou tout
adosseroient (I, 147). M. K. semble être brouillé aussi bien avec le latin
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o'HISTOIRB BT DR LITTÉRATURE
*75
qu'avec le français lorsqu'il tire adosser de adorior . — Par vos beîes
paroles, dames , vos m'aletiés (II, 1 83 ). Ce verbe qui veut dire « attirer,
séduire » et qui n’est autre que le français alaiter est expliqué par « ex¬
cuser».— Chascoute ( 1 ,134), que l'on rencontre dans Rutebeuf. ( 1 ,19*),
Jubinal) sous la forme sacoute, signifie « poussée, secousse » et non pas
« poursuite, réprimande ». — Leur coer je tieng muaule comme coces
dou vent (I, 182) ; Car leurs (sic) cœurs volette comme coches dou vent
(I, 216). Ces deux vers ont fait commettre à M. K. la bévue la plus
étrange : « Coces , dit-il (comme s’il n'avait jamais entendu citer ce pro¬
verbe si connu ifame semble couchet à vant ) 1 signifie branches d'arbres
ou plutôt feuilles ». — Désoint (II, 12) = « déjoint, lâché > et n’a au¬
cun rapport avec dessoingnier. — Diluer (II, 82) vient non de delere ,
mais de diluere , encrassier de incrassare et non de increscere . — Pour
avec luy nous enlachier, Et pour nos âmes ennaichier (I, 12). Ici, le
sens saute aux yeux; c’est le bas-latin inescare, « amorcer, prendre à
l’appât », ce qui n’empéche pas M. K. d'y voir le mot ennosser qu’il ex¬
plique par « tuer, perdre », et d’un coüp il commet une double erreur.
— Estekans (II, 100), de estekier, <c piquer », est interprété par uni;
make{ II, 49) = « massue », qui est encore français comme terme tech¬
nique, macque ou maque, par « bouclier »; mite (II, 184) = « petite
pièce de monnaie », par « espèce de gants » ; reciner (I, 3 16) = « faire
collation », usité jusqu’au xvi* siècle, par < siéger à un banquet » ; roi-
sant = < frais », par « beau » ; saucielle (II, fc 5 o), diminutif de saule,
par « saussaie »; kunkié (II, 193) = « conchié, sali », par « perdu ». —
Trier , mot très français, est, je ne sais comment, traduit par « éprou¬
ver » dans ce vers clair comme de l'eau de roche : On est tantos des
boins et des malvais tryet (II, 1 35 ). — Wihoter , « cocufier », qui dé¬
rive de viot, « trouble », d’après M. K. est expliqué par « tourmenter » :
est-ce un euphémisme ? Ce qui dénote encore une grande négligence,
pour rie pas dire une ignorance complète de la vieille langue française,
c’est d’expliquer l’adjectif ramage par « action d’apprivoiser » : Mais
moult est fort ramages biestes faire demiestes (I, 349) = « il est difficile
de rendre apprivoisées des bêtes sauvages ». — On voit moult bien fail¬
lir par anées pesieres( I, 229). — Pesieres faient bien, aussi font leur
prières (II, 172). Il n’y a que M. K. pour trouver à pesiere, « champ
semé de pois », le sens de « souffrance, tourment ». — On ne voit par le
siecle nuit et jours fors reviaus , Se voit-on aucun pierdre par tumer
leur cheviaus (II, 210). M. Kervyn interprète tumer = « tomber », par
« se disputer ». Pour finir, signalons encore les mots Ventelette (imprimé
lentelette ), diminutif de ente, et esclenkier = gaucher, expliqués, l'un
par « petite lanterne », l'autre par le verbe « boiter ». — On ne doutera
pas que cette édition eût beaucoup gagné à se passer d’un pareil glossaire.
A. Delboulle.
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RKVUB CRITIQUE
I76
1 77. — Rlvarol et la société française pendant la Révolution et
l*émlgratlon (17&3-1601) 9 études et portraits historiques et littéraires
d’après des documents inédits, par M. de Lescure. Paris, E. Plon et C u , i 883 .
In-8 de xn- 5 i 6 p. 8 fr.
Après Sulpice de La Platière », Cubière-Palmezeaux % M œe de Ri¬
varol 3 , Hippolyte de La Porte 4 , Lefèvre-Deumier 5 , M. Léonce Cur-
nier 6 , M. Arsène Houssaye % Sainte-Beuve 8 et Poulet-Malassis
M. de Lescure a entrepris d’écrire la vie et de définir le rôle littéraire,
politique et moral de Rivarol. L’énumération de tant de prédécesseurs,
— parmi lesquels ne figurent pas ceux qui se sont incidemment occupés
du personnage, — pourrait faire craindre qu’un sujet si attrayant, sem¬
ble-t-il, soit depuis longtemps épuisé. Il n’en est rien cependant et, mal¬
gré les flots d’encre qu’elle a fait couler, la vie de Rivarol était encore à
écrire. Deux de ses biographies (celles de Cubière et de M m ® de Rivarol),
ne sont que des pamphlets plus ou moins déguisés; le livre de La Pla¬
tière est un monument de naïveté, sinon de niaiserie; M. L. Curnier.
n’a apporté aucun fait nouveau ni éclairci aucune obscurité; M. Arsène
Houssaye ne peut être cité que pour mémoire; Malassis s’était attaché
exclusivement à la partie bibliographique; seuls, MM. de La Porte et
Sainte-Beuve avaient serré la vérité d’aussi près que le permettaient les
moyens d’investigation dont ils disposaient alors.
Reprenant l’enquête pour son propre compte, M. de L. a interrogé
les descendants de Rivarol, s’est procuré plusieurs pièces inédites, telles
que sa correspondance, pendant l’émigration, avec son frère et un ban¬
quier d’origine portugaise, David Cappadoce Pereira, et n’a rien épar¬
gné pour débrouiller les difficultés qui ont arrêté tous les biographes
antérieurs. Le livre que nous avons sous les yeux est peut-être celui
que l’auteur a le plus longuement préparé. Il y a coordonné les études
qu’il avait consacrées à Rivarol, en 1862, dans la Revue germanique ,
en 1875, dans le Journal officiel , en 1880, en tête d’une édition des
Œuvres choisies (chez Jouaust, 2 vol. in-16). Ce n’est, on le voit, ni le
temps ni la patience qui lui ont manqué et nous le féliciterions d’avoir
procédé avec tant de réflexion si l’ensemble de son travail ne se ressen-
1. Vie philosophique , politique et littéraire de Rivarol . Paris, 1802, 2 vol. in-12,
portr.
2. Fontenelle , Colardeau et Dorât ou Eloge de ces trois écrivains ... suivi cCune Vie
d'Antoine Rivarol. Paris, an XI (i 8 o 3 ), in-8.
3 . Notice sur la vie et la mort de M. de Rivarol , en réponse à ce qui a été publié
dans les journaux. Paris, an X(i8o 2), in-8.
4. Notice sur Rivarol. Paris, 1829, in-8.
5 . Célébrités d'autrefois. Paris, Amyot, 1 853 , in-12.
6. Rivarol, sa vie et ses œuvres. Nîmes, imp. Balivet, i 858 , in-12.
7. Galerie du xviii® siècle (Poètes et philosophes ), diverses éditions.
8. Causeries du lundi , tome V, et, pour la traduction de l'Enfer, t. XI.
9. Ecrits et pamphlets de Rivarol, recueillis pour la première fois et annotés, Pa¬
ris, Lemerre, 1877, in*8.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
1 77
tait un peu des longs intervalles auxquels il a été composé. Ainsi Ton y
retrouve à plusieurs reprises les mêmes citations *, très excusables dans
des articles destinés à des recueils divers, mais qui font tache dans un
livre définitif. Ces légères négligences, qui pourraient aisément dispa¬
raître lors d’un nouveau tirage, sont compensées par les soins que
M. de L. a pris pour faire enfin la lumière sur la naissance et sur la
mort de son héros. En ce qui touche la première, Rivarol n’avait rien
négligé pour dépister les curieux : grâce aux recherches de M. de L., il
est bien avéré aujourd’hui qu’il naquit à Bagnols (Gard), le 26 juin
1753 *, qu’il était l’aîné de seize enfants et que, par suite de revers de
fortune, son père avait été contraint de tenir une sorte de cabaret ou
d’hôtellerie. Notre société démocratisée a fait depuis 1789 table rase des
inconvénients d’une naissance obscure et le xix* siècle est, par excellence,
celui des fils de leurs œuvres ; mais il n'en était pas de même il y a cent
ans et si Rivarol eut la faiblesse de cacher ses origines, il faut se rappeler
qu'il avait sous les yeux l’exemple récent de l’abbé J.-B. Le Blanc : ce
littérateur, assez peu estimable d’ailleurs, ne porta-t-il pas toute sa vie
la peine d’avoir vu le jour dans le taudis d’un geôlier de Dijon? La pro¬
tection de M m0 de Pompadour elle-même ne put réussir, en raison de
cette « tache », à lui ouvrir les portes de l'Académie française. Quant à la
mort de Rivarol, on ne sait trop pourquoi La Platière et à sa suite,
M. A. Houssaye, M. Le Fèvre-Deumier, M. Curnier, la Biographie
Michaud, se sont plu à le représenter expirant dans une sorte de délire
poétique, réclamant des fleurs, des figues et du nectar. Rivarol, qui
avait gardé dans l'exil les mœurs de son temps et qui fut un soupeur
déterminé, succomba prosaïquement aux suites d'une fièvre bilieuse,
compliquée d’un érysipèle, et sa courte agonie ne fut accompagnée d’au¬
cune mise en scène.
Une origine dissimulée avec soin, des tentatives littéraires sans portée
tels que quelques « extraits » au Mercure de France , un début brillant,
mais bien superficiel, par deux lettres sur les globes aérostatiques et sur
les têtes parlantes de l’abbé Mical, un mariage inconsidéré, « la seule des
folies de Rivarol, dit M. de L., qui n'ait pas été gaie », voilà les événe¬
ments les plus importants de la première phase de son existence, et elle
n’eût pas mérité l’attention de la postérité s’il n’avait tout à coup donné
la preuve de capacités fort inattendues par la traduction de VEnfer du
Dante et par son Discours sur Vuniversalité de la langue française ;
mais ces velléités sérieuses ne durèrent pas et le Petit almanach des
grands hommes , en assurant à Rivarol et à son collaborateur Champce-
1. Pp. 169 et 423, une très vive accusation de plagiat formulée par Rivarol contre
Mirabeau; pp. 176 et 3 g 5 , un long fragment d’une lettre du prince de Ligne à
M® 8 de Coigny, etc.
2. L’acte de baptême de Rivarol a été lacéré à une date et par des mains in¬
connues, mais la mention de ses nom et prénom figure, au 26 juin 1753, sur les tables
générales des registres de Tétât civil de Bagnols.
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RRVUR CRITIQUE
i 7 8
netz une nuée d'ennemis, lui créait la véritable notoriété qui devait s'at-
tacher à son nom. Sa coopération aux Actes des apôtres n'était pas
faite pour la démentir, et l’éphémère succès du Journal politique natio¬
nal ne parvint pas plus à la contrebalancer que sa courageuse Lettre à
la noblesse française et que sa réponse au manifeste du duc de Bruns¬
wick. Isolé dans son propre parti, sans influence réelle en dehors du
cercle assez étroit de ses relations, Rivarol avait si bien renoncé à tout
espoir de restauration royaliste, que lorsqu’il mourut à Berlin, le
ii avril 1801, il n’attendait plus, pour rentrer en France, que l’agré¬
ment du Premier Consul.
Telle est, résumée dans ses traits essentiels, et sans insister sur certains
points qui appelleraient une discussion dont la place n’est point ici, Il
vie que M. de L. a racontée en un volume de plus de cinq cents pages.
Il y a mêlé, à vrai dire, bien des digressions plus ou moins nécessaires,
telles qu’une liste des déclassés de divers rangs à de diverses époques
(pp. 24-30), ou qu’un vaste tableau du goût des jardins et des variétés de
la conversation au xvm e siècle, tableau qui n’occupe pas moins de
soixante-dix-sept pages, sans que sa présence soit justifiée autrement que
par le fameux Dialogue du chou et du navet et que par les charmes,
unanimement reconnus, de Rivarol dans la causerie ou plutôt, paraît-il,
dans le monologue. Au reste, le livre de M. de L. est moins une biogra*
phie qu’une libre et facile conférence sur les hommes et les choses de lâ
fin du siècle ; parfois aussi le ton se hausse et rappelle celui des éloges
académiques.
Malgré les soins incontestables que l’auteur a donnés à lâ préparation
de son travail, il est plus d’un point sur lequel il eût pu insister davan¬
tage. La bibliographie de Rivarol, qu’il a tout à fait passée sous silence,
est cependant l’une des plus compliquées que je connaisse et les rechèr-
ches de Poulet-Malassis n’ont pas réussi à en débrouiller toutes les
énigmes : le jugement hyperbolique que M m ® de Coigny portait sur le
Dialogue entre Af. de Limon et un homme de goût : « C’est plus fin
que le comique, plus gai que le bouffon, plus drôle que le burlesque »,
ce jugement a bien de quoi surexciter la curiosité quand on songe qu’il
s’applique à un pamphlet dont nul ne peut se flatter d’avoir vu un exem*
plaire. M. de L. se contente de nous dire qu’il n’a pas été le seul i le
chercher : peut-être y avait-il à s’enquérir des causes de cette dispari¬
tion vraiment extraordinaire. Le comte de Fersen, par exemple, y se¬
rait-il absolument étranger? On sait par lui-même que le manifeste, dit
du duc de Brunswick, fut rédigé sous son inspiration par M.de Limon.
N’aurait-il pas fait saisir tous les exemplaires de la réponse de Rivarol?
Ce n’est, je m’empresse de l’avouer, qu’une supposition : mais elle n’a
rien d’invraisemblable et elle se justifierait peut-être s’il était permis
d’explorer les papiers et la bibliothèque de Fersen, conservés par ses des¬
cendants. Qui sait même si l’on n’y retrouverait pas un exemplaire du
fameux Dialogue mis de côté comme pièce à conviction ?
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d’HISTOIRR RT DR LITTÉRATORB
*79
Les relations de Beaumarchais et de Rivarol méritaient d'être mieux
étudiées : l’antipathie très naturelle qui divisait ces brillants jouteurs se
montre à nu dans deux lettres qui ont échappé à Ed. Fournier, le plus
récent éditeur de Beaumarchais : l’une, empruntée à la Presse, a été re¬
produite dans la chronique du Journal de la librairie de 1 865 , p. 190;
l’autre a été insérée, comme adressée à Chamfort, dans une chronique
deM. Philibert Audebrand {L f Illustration du 17 janvier 1874). La pre¬
mière, datée du 7 février 1788, a pour destinataire la comtesse de B...
(Beauhamais) ; elle laisserait supposer que Beaumarchais a eu la plus large
part à la Confession de Griffolin, pamphlet suscité par le Petit almanach
des grands hommes et de tout temps porté à l’actif de Cubières qui n’au¬
rait été ici qu'un prête-nom; Beaumarchais se refuse à faire imprimer à
Kehl cette brochure, parce que les caractères de Baskerville trahiraient
son origine et que la lenteur des communications ferait durer l’impres¬
sion au moins six semaines. « Or, dit-il, ces petits pâtés doivent se man¬
ger tout brûlants ».
Mes deux dernières critiques s’adresseront à l'éditeur autant qu'à l'au¬
teur. M. de L. décrit avec soin (p. 81) un portrait de Rivarol peint en
1784 par Melchior Wyrsch, le peintre suisse dont les œuvres sont si
remarquables et si rares *, et M. Plon ne nous donne pas une reproduc¬
tion de ce portrait conservé par les descendants de M. Ed. de Rivarol!
Par ce temps d'héliogravure, un pareil oubli est inexcusable. Je ferai à
M. de L. et à M. Plon le même reproche en ce qui concerne l'absence
de tout fac-similé. M. de Lescure dit (p. 449) qu’on ne connaît pas vingt
lettres en tout de Rivarol et (p. 56 ) que « son écriture élégante et svelte
est gracieuse et claire comme son esprit » : c’était doublement le cas de
nous en faire juges et de suppléer ainsi à l’une des lacunes de la véné¬
rable Isographie.
Maurice Tourneux.
1. Ce portrait a figuré en 1878 à l’exposition rétrospective du Trocadéro, mais la
date et la signature, que ne mentionne pas M. Jouin dans le minutieux catalogue de
cette exposition, soulèvent une difficulté dont je demande la solution aux travail¬
leurs compétents. Selon Francis Wey, Melchior Wyrsch ne serait jamais venu à Pa¬
ris; en outre, il aurait quitté Besançon précisément en 1784, après plus de vingt
ans de séjour et neuf années d'enseignement, pour retourner dans son pays natal,
Buochs, canton d’Unterwald. Faut-il en conclure que, contrairement aux assertions
de son biographe, Wyrsch aurait résidé quelque temps à Paris .ou que Rivarol se
serait arrêté à Besançon lors d'un voyage resté inconnu? L’observation n’a pas, je le
confesse, une très grande importance, mais elle prouve, une fois de plus, à quels
obstacles on se heurte à chaque pas en matière d’iconographie historique. Le travail
de Fr. Wey, intitulé Melchior Wyrsch et les peintres bisontins (Besançon, imp. Do-
divers, 1861, in-8, 28 p.), est un tirage à part des Mémoires de la Société d’émula¬
tion du Doubs.
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REVUE CRITIQUE
180
1 78.—Bernhard Suphan . Goethe and Spinoza ( 1763-1 T§0). Aus der Festschrift
zur zweiten Sæcularfeier des Friedrichs Werderschen Gymnasiums zu Berlin.
Berlin, Weidmannsche Buchhandlung, 1881. In-8, 35 p.
— Bernhard Suphan. Benjamin Frankldln*t Raies for a club establUhed
In Philadelphia» übertrogen nnd ausgelegt ale Statut fur eln©
Geeellechaft von Freunden der Humanltœt von J» Gottfrled Her-
der. 1703. Aus dem Nachlass verœffentlicht und E. Simson zum 22 mai i 883
zugeeignet. Berlin, Weidmannsche Buchhandlung, i 883 , In-8, 3 o p.
M. B, Suphan n'est pas un inconnu pour les lecteurs de la Revue cri»
tique; j'ai, il y a longtemps déjà, eu l'occasion, à plusieurs reprises, de
parler de l'édition qu'il nous donne de Herder, et depuis la Chronique
a annoncé successivement les quinze volumes déjà publiés par lui des
œuvres du grand écrivain l . Mais M. S. ne s'est pas renfermé dans son
rôle d'éditeur; avant de s’y livrer tout entier, il s'était révélé, dans la
Zeitschrift fur deutsche Philologie , par des articles sur la jeunesse
de Herder ; depuis lors, il n'a point interrompu ses études parti¬
culières ; — elles se rattachent d’ailleurs toutes plus ou moins étroite¬
ment à l’écrivain qu'il nous rend enfin sous sa véritable forme; — c'est
ainsi que, sans parler des Récensions d’ouvrages sur Herder, il a publié
dans le XLIII* volume des Preussische Jahrbücher (janv., févr., avril
1879) un long travail sur Goethe et Herder de 1789 à 1795, travail qui
éclaire, pendant cette période obscure à tant d’égards, la vie de l'auteur
des Idées sur la philosophie de Vhistoire et que son biographe futur
ne pourra se dispenser de consulter; enfin, cette année même, outre l’An¬
nonce de l’édition nouvelle de la Correspondance de Gœthe avec M m0 de
Stein, les mêmes Jahrbücher ont donné de lui un article « Aus Weimar
und Kochberg », qui renferme de curieux renseignements sur quelques-
unes des lettres de cette précieuse correspondance. Je ne veux pas tou¬
tefois, malgré l’intérêt qu’elles présentent, m'occuper ici de ces diverses
publications, je me propose seulement aujourd’hui de faire connaître
aux lecteurs de la Revue les deux ouvrages dont j’ai inscrit le titre en
tête de cet article.
Je viens un peu tard, je l’avoue, parler de « Gœthe et Spinoza », dont
la publication remonte à 1881 ; mais cette étude heureusement n’a rien
perdu depuis lors de son intérêt. On sait quelle influence la philosophie
de Spinoza a exercée sur la pensée de Gœthe : mais quand a-t-il vérita¬
blement connu son système? Quel aide et quels encouragements a-t*il
trouvés dans l’étude qu’il en a faite? Voilà des questions qui ont été po¬
sées plus d’une fois, mais qui n’ont pas reçu une solution toujours sa¬
tisfaisante. On fait remonter, d’ordinaire, à l'époque de la rencontre de
Gœthe et de Fr. Jacobi pendant l’été de 1774, la connaissance du poète
avec le philosophe panthéiste ; que l’attention de Gœthe ait été alors at¬
tirée sur le système de Spinoza, qu’il en ait entrevu ou même admiré
x. Un nouveau volume de cette édition, dont la place est marquée dans toutes les
grandes bibliothèques, doit paraître incessamment.
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D’HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
181
l’originalité et la grandeur, rien de plus incontestable ; mais ce n’est en
réalité que dix ans plus tard, de 1783 à 1786, qu’il a fait du système du
philosophe hollandais, une étude approfondie et est devenu d’une ma¬
nière définitive son disciple plus ou moins indépendant. C’est à prouver
cette thèse qu’est consacrée l’étude de M. S. sur « Goethe et Spinoza »;
il l'a divisée en trois parties : i° Débat sur le spinozisme de Lessing;
2 0 Etudes spinozistes de Goethe; 3 ° Herder et Goethe.
Ce fut Fr. Jacobi qui, en 1774, révéla, en quelque sorte, Spinoza
à Goethe, ce fut lui encore qui, en 1783, ramena l’attention du
poète sur le philosophe qu’il paraissait avoir oublié. Le spinozisme
avait été entre Jacobi et Lessing l’objet de longs entretiens, la dernière
année de la vie de l'auteur du Laocoon ; ce fut là l’origine et le point de
départ du débat qui s’ouvrit alors sur Spinoza et dans lequel Goethe allait,
malgré lui, se trouver entraîné. La visite de Jacobi à Weimar, en 1784,
bien loin de le terminer, ne fit bien plutôt que le ranimer et la publica¬
tion, l’année suivante, du Système de Spinoza lui donna une ardeur
nouvelle. A la surprise de Jacobi, Lessing s’était déclaré pour la doctrine
du penseur hollandais, à sa surprise encore plus grande, Herder et Gœthe
se rangèrent à la manière de voir de Lessing. c Depuis que je vois clair
dans la philosophie, écrivait le dernier, je comprends tous les jours et
chaque fois à nouveau, la vérité de cette phrase de Lessing, qu’à vrai
dire la philosophie spinoziste seule est d’accord avec elle-même, » Vers
la fin «le 1784, Gœthe s’était nais à lire les œuvres de Spinoza, et, à me¬
sure qu’il avança dans cette lecture, l’admiration que lui inspirait le
philosophe juif ne fit que grandir. Mais il y a dans le culte enthousiaste
qu’il voua alors à ce c saint » une preuve même de la tardive connais¬
sance que Gœthe fit de son système. Cependant, une fois cette connais*
sance faite, la ressemblance incontestable qui existe entre la manière
dont Spinoza et Gœthe ont conçu la nature, devait, non moins que
l’éthique et la psychologie du philosophe, lui attacher à jamais le poète.
Mais Gœthe qui, avec son aversion innée pour les spéculations philo¬
sophiques, hésita presque à aborder l’étude de Spinoza, en a-t-il à lui
seul pénétré le système? Cela à priori était déjà peu vraisemblable et
M. S. a montré que ce fut Herder qui l’y initia et le lui fit connaître.
C’est ainsi qu’on voit, le 12 janvier 1785, Gœthe avpuer à Jacobi qu’en
ces matières il est d'accord avec Herder, et celui-ci, de son côté, déclare
que Gœthe a compris Spinoza comme il le comprend lui-même. « Nous
sommes aussi rapprochés dans notre manière de penser, écrit encore
Gœthe à Herder au mois de mai 1787, que cela est possible, sans être
unanimes, et le plus rapprochés sur les points principaux. » Ces témoi¬
gnages semblent bien confirmer la manière de voir de M. Suphan. Mais le
panthéisme « épuré » de Herder était-il le vrai spinozisme, n’était-ce pas
plutôt un mélange, un « syncrétisme du spinozisme et du théisme »,
comme Kant le disait, en 1787, en parlant du traité de son ancien dis¬
ciple sur « Dieu »? M. S. pose cette question et la résout affirmative-
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182
RBVUtt CRITIQUE
ment. 11 va sans dire qu’il fait la même hypothèse au sujet du spino¬
zisme de Goethe, et c’est de ce point de vue qu’il explique la singulière
comparaison du poète qui fait de Dieu, la causa adurata de toutes
choses ». C’est ainsi également qu’il explique son ûieu?nature, comme
agent pensant, qui a pensé et pense sans discontinuer, non, il est vrai,
& la manière de l’homme, mais comme nature. Gœthe, suivant M. S.,
aurait aussi adopté la notion de ces < forces substantielles qui ont fait
vraiment du spinozisme une philosophie de la nature ». On voit que
d’aperçus nouveaux se trouvent dans le mémoire que je viens d’analy¬
ser et quel jour il jette sur la transformation qui s’opéra dans la pensée
de Gœthe depuis le jour où, en 1774, il avait c comme à la dérobée »
entrevu Spinoza, jusqu’au moment où de 1783 à 1785, dans la société
de Herder, il approfondit le système du célèbre penseur hollandais.
La seconde brochure de M. S., dont j’ai maintenant à parler, est d'un
caractère tout différent que celle que je viens d’analyser et nous ramène
entièrement et exclusivement à Herder ; c’est la traduction par le grand
écrivain du règlement qu’avait fait Benjamin Franklin, pûur le club
établi à Philadelphie, traduction commentée et transformée par Herder en
« Statut pour une société d’amis de l’humanité ». On trouve dans les
sept pages de ce règlement quelques-unes de ces sentences libérales à la
fois et pratiques, si chères à Franklin, et dont le commentaire de Her¬
der relève le mérite et montre l’application possible. Mais ce qui fait
l’intérêt principal de ee petit écrit, ce sont les vingt pages d’iptroduetion
dont M* S. l’a fait précéder; les renseignements qu’elles renferment sur
la traduction de Herder, surtout sur la composition de ses Lettres peur
servir à l'avancement de l'humanité et sur la disposition d’esprit où
il se trouvait, quand il les écrivit, sont précieux et on y retrouve la sa¬
gacité bien connue du savant et patient éditeur de ses œuvres. C’est dire
qu’elles font honneur en même temps à M. Suphan et à M. Simson,
auquel est dédié, à l’occasion du cinquantième anniversaire de son
entrée dans la magistrature, ce petit opuscule.
C. J.
CHRONIQUE
FRANCE. ™ U paraît à Rennes, che? l’imprimeur Alph. Le Roy, une collection de
Pièces rares ou inédites çonceimant la Bretagne, Le premier volume de eefte folia¬
tion a été ;iré à 110 exemplaires, tous numérotés et imprimés en beaux caractères SU r
magnifique papier. C’est le Discours apologétique très véritable des causes gui ont
Contraint les habitants de Saint-Malo, de s'emparer du château de leur ville le
12 mars i5go (Vil et 107 p.J, Le volume, sur lequel nous reviendrons prochaine¬
ment, est précédé d’une notice sur l’auteur de ce Discours par M. F. Jouon des Lon-
grais. La pièce qu’il reproduit est curieuse au point de vue historique et, en outre.
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o’HISTOIRB BT OB LITTÉRATURE
I 83
extrêmement rare : la Bibliothèque nationale seule en possède un exemplaire, et un
exemplaire incomplet.
— Nous avons rarement lu un discours de distribution de prix aussi intéressant,
aussi rempli de détails instructifs que celui que M. Léonce Person a prononcé le
3 août au petit lycée Condorcet (tiré à part. Versailles, imp. Cerf). Le 6ujet traité
par Fauteur est le culte des grands hommes, le solennel hommage rendu à ceux qui
ont vécu ou qui sont morts pour 1 e bien public; c’est, dit M. Person, presque de nos
jours une religion nouvelle avec ses cérémonies et ses apôtres. A ce propos, M. Person
parle des statues, au nombre de trois cents, élevées dans notre pays depuis une ving¬
taine d'années, et a choisit, parmi ces grands personnages, ceux dont le labeur persé¬
vérant est toujours utile à offrir en leçon, même à de modestes écoliers, et ceux dont
les rapides élans du cœur et les sublimes inspirations du devoir peuvent produire à
Cous les Ages et dans tou6 les rangs, la contagion salutaire de6 grands exemples. » A
la suite de ce discours chaleureux et attachant, M. Person donne une liste des statues
et des bustes élevés ea France dans ces vingt dernières années, en y ajoutant, autant
que possible, les dates de l’exposition ou de l’inauguration et les noms des auteurs.
Cette liste comprend aa 3 ouvrages/et il faudrait y ajouter les g 3 statues de nouveau
Louvre et les 117 statues du nouvel HôteUde-Ville de Paris ; M. Person y joint en¬
core une liste des statues en voie d'exécution, des statues commandées ou simplement
projetées; il rappelle à ce propos, que le décret autorisant l’érection d’une statue de
Christophe Colomb à Calvi a été l’objet d'une discussion piquante dans la Revue
critique du 18 juin i 883 . Tout en félicitant M. Person d’avoir mis tant d’ardeur
consciencieuse, tant d’érudition, tant de verve patriotique dans ce discours de dis¬
tribution de prix, nous ne pouvons nous empêcher de remarquer qu'il y a peut être,
à l’heure actuelle, un abus de statues et de monuments, et que nous cédons trop en
France à la maladie que les Allemands ont nommée la Denkmalsucht.
— M. E. de Prbssbnsé prépare une édition refondue de sa Vie de Jésus,
— M. Charles Joret, professeur à la faculté des lettres d’Àix, qui doit publier pro¬
chainement des « Mélanges de phonétique normande », travaille en ce moment à une
« Flore populaire de la Normandie », destinée aux « Mémoires de la Société de lin¬
guistique ».
— Les articles que M. de Caix de Saimt-Aymour a publiés dans la a Revue des
Beux-Mondes » 6ur VHerzégovine et la Bosnie , paraîtront prochainement en volume
à la librairie Plon.
— Le n° 6 du Bulletin de la Société historique et cercle Saint Simon renferme, ou¬
tre 1 m actes de la Société, une chronique, les sommaires des recueils périodiques,
la liste des articles et ouvrages publiés par des membres de la Société, la conférence
Ihite à la réunion du 2 juin par M. René de Mauldb sur Le mariage des filles de
Louis XI et une note de M. le colonel Th. Iung sur La publication des documents
historiques .
— Prochainement paraîtra, à la librairie Hachette, une Bibliographie des sources
de Vhistoire de France , par MM. G. Monod et Emile Molinibr.
— M. Henri Martin fait, dit-on, en ce moment, des fouilles à Carnac.
— Le 29 mai dernier est décédé M. Gatteyrias (né le 11 janvier i 855 , à Thiers).
Ancien élève de l’Ecole des langues orientales, il avait publié un petit ouvrage sur
V Arménie et les Arméniens, dans la collection Cerf.
ALLEMAGNE. — Une deuxième édition complètement remaniée (volistœndig
umgearbeitet) de l’ouvrage de M. Frédéric Blass a sur la prononciation du grec »,
Ueber die Aussprache des Griechischen , a paru à la librairie Wejdmann, de Berlin
(vin et 109 p. 3 mark).
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184 REVUS CRITIQUE O HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
— M. Hesse de Kœnigsberg, doit publier le roman d'Ypotis pour Y <l Earty
English Text Society ».
— La librairie Graeser, de Vienne, fait paraître la deuxième édition des Bilder
aus dem sæchsischen Bauemleben in Siebenbürgen , tin Beitrag \ur deutschen Cul-
turgeschichte , de F. F. Fronius.
— Un catéchisme de l’archiviste, « Katechismus der Registratur-und Archivkunde ,
Handbuch fur dos Registratur-und Archivwesen t par G. Holtzingbr, avec des ad¬
ditions de M. Fr. Leist, paraîtra prochainement à Leipzig, chez J. J. Weber.
— M. Otto Weddingen, de Hamm, en Westphalie, travaille à une histpire de la
poésie populaire de T Allemagne ( Geschichte der deutschen Volkspoesie), depuis la
Réforme jusqu'à l’époque présente.
— Sous le titre c Die Sprachforschung der Gegenwart mit Be\ug auf die fran{Ot-
sische Litteratur im Mittelalter » (Heidelberg, Winter. In-8°, 1 mark 20). M. E.
Laur, de Heildeberg, vient de publier la traduction en allemand d’une étude de
M. Ferdinand Brunetikre, parue dans les Etudes critiques sur Vhistoire de la litté¬
rature française .
— Sous le titre ürkunden aus den « Antichi archivi j> der Bibliotheca comunalevon
Verona (Würzburg, Stahel, i 883 . In- 8 # , iv et 54 p. 2 fr. 5 o),M. J. Kohler publie le
premier fascicule d’une collection qu'il veut faire paraître à intervalles indéterminés
(in qwanglosen Heften, comme on dit en Allemagne) et qui s’intitule « Contribu¬
tions à l’histoire du droit privé germanique » ( Beitræge qur germanischen Pri-
vatrechts-Geschichte ). Les documents que publie M. Kohler doivent être, dans
chaque fascicule de la collection, accompagnés de notes et d’interprétations juridi¬
ques. M. Kohler nous donne aujourd’hui treize actes tirés des « Antichi archivi »
de la Bibliothèque communale de Vérone; six actes de vente, deux actes d’échangç,
un acte de reconnaissance, un arbitrage, un acte de donation, etc. Ces actes sont
presque tous relatifs à des terres ou des domaines des environs de Vérone, et c’est
à Vérone ou dans la banlieue de cette ville, qu’ils ont été rédigés. L’auteur a repro¬
duit ces textes avec la plus grande exactitude, en y joignant une annotation
abondante.
DANEMARK. — M. Julius Hoffory s’est a habilité » à l’Université de Copenha¬
gue par une étude sur les consonnes en norois, Oldnordiske Consonantstudier ,
étude qui paraîtra dans un des prochains fascicules de YArkiv for nordisk Jilologie.
ESPAGNE. — L’Académie d’histoire de Madrid s’est occupée, cette année, de
classer les innombrables manuscrits et documents conservés aux Archives des In¬
des, à Séville. Elle a fait envoyer à Madrid tous les actes et papiers concernant le
procès engagé entre la famille de Christophe Colomb et celle de Pinzon ; on a dé¬
couvert tous les noms, sauf deux, des compagnons du grand navigateur, et il ré¬
sulterait de cet examen que Pinzon aurait été calomnié, qu’il fut le bras droit de
l’expédition dont Colomb était la tête, qu’il demanda touj ours à pousser en avant;
M. Fernandez Duro doit lire sur ce sujet un mémoire intéressant au Congrès des
Américanistes de Copenhague.
ETATS-UNIS. — M. G.-T. Curtis prépare une Vie de Buchanan , l’ancien prési¬
dent des Etats-Unis; Buchanan avait conservé toute sa correspondance, et il avait
l’habitude de tenir un journal ; tous ces documents importants ont été mis à la dis¬
position de M. Curtis, et on trouvera certainement dans l’ouvrage bien des rensei¬
gnements intéressants et propres à jeter une vive lumière sur les causes de la guerre
civile.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2 J •
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[G. v. d. G. : on attend une dissertation, et Ton trouve une Odyssée, un
livre de lecture bien écrit, et d'une diffusion tout à fait épique; l’ordon¬
nance du livre n'est pas strictement scientifique; toutefois l’étendue du
sujet et la foule des points discutables font excuser'beaucoup de cho¬
ses.) — Troebst, Quaestiones Hyperideae et Dinarcheae. — Rob. Gar¬
nier, Tragédies. I. p. p. W. Foerster.
Deutsche Literaturzeitung, n° 3 i, 4 août 188 3 : (pour le sommaire du
n* 32, voir le n° 35 de notre recueil) Plot et Petersen, Martin
Luthers Leben und Wirken. (Knaake : commencé par Plitt, achevé
par Petersen; style clair, pensées développées t in edler Popularitât ».)
— Spota, Die Schlaf. u. Traumzustànae der mensclichen Seele. —
v. d. Gabrlentz, Anfangsgründe der Chinesischen Grammatik mit
Uebungsstücken. (W. S. : méthode commode, exemples bien choisis et
lumineux, rien à critiquer.) — Rosenberg, Die Lyrik des Horaz,
aesthetisch-culturhistorische Studien. (F. Léo : rien de nouveau,
quelques bonnes remarques, mais en somme insuffisant, style préten¬
tieux.)— Bulthaupt, Dramaturgie der Klassiker. I, Lessing, Gœthe,
Schiller, Kleist. II, Shakspeare. (E. Schmidt : beaucoup de bonnes
choses, jugement sain.) — Baret, Etude sur la langue anglaise au
xiv« siècle. (Zupitza : livre sans la moindre valeur, écrit avec négligence
et sans jugement d’après des ouvrages anciens et nouveaux, bons et
mauvais; « Urtheilslosigkeit »; « geringe Sprachkenntnisse », etc.) —
Ch. Joret, Des caractères et de l’extension du patois normand, étude
d’ethnographie et de phonétique suivie d’une carte. (A. Tobler : travail
fait avec beaucoup de soin; observations personnelles et patientes; les
faits communiqués sont de grande valeur.) — G. Weber, Allgemeine
Weltgeschichte, 2 a Auflage. ÏII : rômische Geschichte bis zu Ende der
Republik und Geschichte der alexandrinisch-hellenischen Welt. (Ad.
Bauer.) — Horace de Viel Castel, Mémoires sur le règne de Napo¬
léon III, 1851-1864, publiés d’après le manuscrit original avec une
préface par Léouzon Le Duc I. (R. Koser : Le comte de Viel Castel fut
sous la présidence de Louis Napoléon et pendant le second empire con¬
servateur et plus tard secrétaire général du Louvre : peu content de la
situation qu’il occupait, il se croyait appelé à de plus hauts emplois, à
la diplomatie, autant que le font présumer ses mordants sarcasmes con¬
tre les diplomates français. Ses mémoires sont une sorte d’écho de Paris,
spécialement de ce Paris qui avait coutume de se réunir dans le salon de
la princesse Mathilde Demidoff, fille du roi de Westphalie. Au besoin
de conversation et de médisance de cette société du n° 10 de la rue de
Courcelles, toute personnalité, grande ou petite, proche ou lointaine,
était également bienvenue, comme thème d’entretien : diplomates et par¬
lementaires, écrivains et journalistes, « Thiers et ses femmes », Alex, de
Humboldt et Fr. Guillaume IV, Isabelle d’Espagne et « le beau et jeune
général Serrano ». Avant tous, Victor Hugo est maltraité, [p. 171 ].
Ces mémoires ont un grand intérêt, comme tableau de mœurs, comme
chronique personnelle et scandaleuse; mais ils ne fournissent aucune in¬
formation sur les ressorts secrets de l’action politique du bonapartisme.
L’auteur n’appartenait pas aux intimes du président de la République,
et Napoléon ne paraît personnellement en. ce premier volume que dans
deux passages [pp. 160, 190J, où l’auteur, à l’occasion delà visite du
f jrince au Louvre, joue le rôle de cicerone. Apôtre enthousiaste de la
égende bonapartiste, V. C. porte pourtant dès 1 85 1 sur le prince Jé¬
rôme ce jugement et cette condamnation : « ce prince est une affreuse
canaille, qui joue auprès du président le rôle que Philippe-Egalité
jouait près de Louis XVI. Il est vantard et poltron, ambitieux, impor¬
tant, brouillon, libertin; enfin, il a toutes les mauvaises qualités; son
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Ê ère n’est qu'un polisson ; lui, est un drôle » [p. 175J. — G. vom Rath,
lurch Italien und Griechenland nach deim Heiligen Land. Reisebriefe.
— ’EjYjpLsptç ’ApxatoXoYtxij âxSiSopivYj utc'o èv Aôïjvatç ap/aioXo^t^; liât-
plaç, III, 1. (C. Robert : i or fascicule de la 3 e série de ce recueil publié
par MM. Eustfatiades et Koumanoudis, rédigé par M. Mylonas.) —
Mettig, Zur Geschichte der Rigaschen Gewerbe im VIII u. XIV
Jahrhundert. (Geering.)
— n° 33 , 18 août 1 883 : Pibrotti, La Bible et la Palestine
au xix« siècle (Wolff : beaucoup de détails instructifs et de remar¬
ques intéressantes.) — Froschhammer, Ueber die Genesis der Mens-
chheit u. deren geistige Entwickelung. — J. Müller, Luthers refor-
matorische Verdienste um Schule u. Unterricht. (E. Von Sallwtirk:
beaucoup de soin.) — Udânavarga, a collection of verses from the Bud-
dhist Canon, compiled by Dharmatrâta, being the Northern Buddhist
version of Dhammapada, translated from the tibetan of Bkah-hgyur,
with notes and extracts from the commentarjr of Pradjnâvarman, by
Woodville Rockhill. (Oldenberg.) — Psalterii florianensis partem po-
lonicam p. p. Nehring (Brückner : très bonne publication). — Kinch,
Quaestiones Curtianae criticae. (Vogel : travail aussi abondant qu'ori¬
ginal, plein de choses instructives et qui avance beaucoup la critique
du texte de Quinte-Curce.) — Le Metamorfosi di Ovidio p. p. Gnesotto
(Léo : édition pour les classes, sans beaucoup de mérite). — Sanders,
Satzbau u. Wortfolge in der Deutschen Sprache. (Lôhner : très recom¬
mandable.) — Wagner, Zu Lessings spanischen Studien. (E. Schmidt.)
— Osbern Bokenam’s Legenden, hrsg. v. Horstmann. (Schleich.) —
I. Schmidt, Grammatik der englischen Sprache, 3 e édit. (Zupitza : la
meilleure grammaire anglaise pratique.) — Brosch, Lord Bolingbroke
u. die Whigs und Tories seiner Zeit. (Kugler : livre attachant, plein de
faits et d’idées.) — Cotteau, De Paris au Japon à travers la Sibérie. —
H. Riègel, Geschichte der Wandmalerei in Belgien seit i 856 nebst
Briefen von Cornélius, Kaulbach, Overbeck, Schnorr, Schwind und
anderen.
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 33 , i 5 août i 883 : Hans Prutz, Kul-
turgeschichte der Kreuzzüge (B. Kugler : très instructif et clairement ex¬
posé; l'auteur a consulté un nombre surprenant de documents; l'idée
générale, le « problème principal a, d’ailleurs justement posé et juste¬
ment résolu, c'est que par la civilisation venue des croisades le moyen-
âge a atteint son apogée, mais en même temps a été préparée la rupture
avec le moyen âge, a été éveillé l’esprit de la Renaissance et des temps
modernes. Le volume comprend cinq livres, et fournit une riche mine
de renseignements non-seulement à l’historien, mais au théologien, au
jurisconsulte, à l’économiste, etc. Toutefois, on pourra reprocher à l’au¬
teur d'avoir ordonné les événements en mettant surtout en relief l'ex¬
traordinaire et en regardant l’étonnant et le merveilleux comme la
« signatura temporis » ; c’est un tableau de Rembrandt, travaillé avec
esprit et avec art, très piquant, mais n’offrant pas la vérité pure et en¬
tière).
N° 3a, 22 août 1883 : von Richthoken, Untersuchungen ueber frie-
sische Rechtsgeschichte. Theil II, Band 1 et 2 . (Von Amira.) — Gün-
therTHiELE, Die Philosophie Immanuel Kant's. I, 1. (Von Leclair.)
l.r imprimerie de Marchcssou fils, boulevard Saint-Laurent 23.
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£■ 1883
If* 37 Dix-septième année 10 Septembre 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
BBCUKIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DE MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS ^
_ / *
/ , v'
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt ■ T 1 ' ..vV - '
’ \ O- 1 "
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Prix d’abonnement : 7
Un an, Paris, ao fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 2$ fr.
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
db l’école des largues orientales vivantes, etc
28 , RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqubt
(Au bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
MÉLANGES ORIENTAUX
TEXTES ET TRADUCTIONS
PUBLIÉS PAR
LES PROFESSEURS DE L'ÉCOLE SPÉCIALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
A l’occasion du 6* Congrès international des orientalistes,
réuni à Leyde (septembre i 883 ).
Un beau volume grand in-8 de 40 feuilles avec tableaux, hélio¬
gravures, etc. 25 fr.
RECUEIL DE TREIZE MÉMOIRES
PUBLIÉS PAR
MM. H. Derenbourg, Ch. Schefer, de l'Institut, Barbier de Meynard,
de l'Institut, P. Favre, A. Carrière, E. Miller, de l’Institut,
L. de Rosny, A. des Michels. L. Leger, E. Picot, H. Cordier,
J. Vinson.
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PERIODIQUES
The Academy, n° 590, 25 août 1 883 : Mrs. Gilchrist, Mary Lamb.
(Gray : récit clair et plein d’intérêt, très soigné, reposant surtout sur la
correspondance de Charles Lamb et de sa sœur.) — Twyford, York and
York Castle. — Pbrry, Engiish literature in the eighteenth century.
(G. Saintsbury : plein de choses utiles.) — Carter, A narrative of the
Boer war, its causes and results (Wickham). — De Bbaucourt, Histoire
de Charles VII, II, le roi de Bourges, 1422-1435. (Creighton : a delà
valeur comme recueil de documents, mais pèche par cette puissance de
conception et de mise en œuvre qui est nécessaire pour animer et faire
vivre la masse des matériaux dont se compose une histoire.) — Thepro-
phecies of Isaiah, a new translation, with commentary and appendices,
by Chbyne. Second édition. (Davidson.) — Some french books (Mon-
tégut, Essais sur la littérature anglaise; Caro, Littré et le positivisme;
Aulard, Les orateurs de l'Assemblée constituante : important; d’Héri-
cault, La Révolution : plutôt un volume d'illustrations qu'une histoire;
Alb. Desjardins, Les cahiers des Etats généraux en 1789 et la législation
criminelle: monographie sur les réformes judiciaires demandées en 1789,
mais non une œuvre d’histoire; Ocjrsel, Les Essais de lord Macaulay :
bien écrit et bien ordonné; Filon, Histoire de la littérature anglaise :
des erreurs presque à chaque page; Cordier, Bibliographie des œuvres
de Beaumarchais : très consciencieux et très complet). — Three early
italian sonnets (trad. de R. Burton). — The Shapira mss. of Deutero-
nomy (Neubauer). — Cat-Lore (Buxton, Forman et Laurensen). — Ré¬
cent criticism of a Gulliver’s travels » (Tyler.) — Van Eys, Outlines ot
basque grammar. (Webster.) — Chinese and siamese (Frankfurter). —
The greek names of the sibilants (Bertin). — Ch. Robert, Etude sur les
médaillons conformâtes. (W. Wroth.) — The early history of the Le¬
vant. II. (Sayce.)
The Àthenaeum, n° 2913, 25 août 188 3 : Muir, Annals of the early ca-
liphate. (Excellent ouvrage qui fait revivre cette époque importante de
l'histoire arabe; récit très attachant ; peinture exacte et fidèle des lieux
où se passe l’action.) — W. G. Black, Folk medicine, a chapter in the
history of culture. (Intéressera, en effet, quiconque étudie l'histoire delà
civilisation.) — Mrs. Oliphant, Sheridan. (Fait partie de la collection
des a Engiish men of letters »; provoque la discussion et la négation
sur un grand nombre de points; juge mal, dans Sheridan, l’orateur et
le politique; parfois, manque de soin dans les détails.) — Hindu philo-
sophy, the Bhagavad Gîta or the sacred lay, a sanscrit philosophical
poem, translatée! by John Davies. — Theological books (The mishnah
on which the palestinian Talmud rests, p. p. Lowe; The editio prin-
ceps of the Epistle of Barnabus by archbishop Ussher, as printed at Ox-
ford 1042, with a dissertation on the literary history of that édition
by Backhoüse; V. Becker, L’auteur de l'Imitation). — The importance
of assyriology to hebrew lexicography. VII. (Delitzsch.)— Loaro and
Yeamont (Ferguson). — The quarterly Review on Swift (F. G.). — The
british and foreign Bible Society. — Notes on german educational re-
forms. (Mahaffy.) — The Shapira mss. of Deuteronomy (Ginsburg). —
Davillier, Les origines de la porcelaine en Europe, les fabriques ita¬
liennes du xv® au xvii 0 siècle. — La collection Sabouroff, monuments
de l’art grec, p. p. Furtwængler. I. — The british archaeological asso¬
ciation, Dover Clongress. — Notes from Athens (Lambros).
Literarisches Centralblatt, n° 35 , 25 août 1883 : Gkbhardt, Thüringische
Kirchengeschichte seinen Landsleuten erzàhlt. — Làsswitz, Die Lehre
Kant s von der Idealitàt des Raumes und der Zeit. — Willy, Scho-
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
H* 37 — 10 septembre — 1883
Sommaire s 179. Lipsius, Les légendes apocryphes des apôtres. — 180. De Ceu-
lenebr, Notice sur un diplôme militaire de Trajan. — 181. De Hûbner, Sixte-
Quint. — 182. Goloubinsky, Histoire de l'église russe. — i 83 . Chants populaires
de la Suisse, p. p. L. Tobler. — Variétés : Clermont-Ganneau, Notes d'archéo¬
logie orientale : V. découvertes à Emmaus-Nicopolis ; VI. patène du mont des
Oliviers; VII. les deux larrons. — Chronique.
I79. — Die apokrypben Apoatelgeaehlchten and Apoctellegendeo 9
Ein Beitrag zur altchristlichen Literaturgeschichte von Rich. Adelbert Lipsius.
Erster Band. Braunschweig, G. A. Schwetschke und Sohn, i 883 . In-8 de iv et
633 pp.
C’est un fait bien étrange qu’il ne soit resté qu’un si petit nombre de
renseignements historiques sur les apôtres. Nous connaissons leurs
noms par les Evangiles; le livre du Nouveau-Testament qui porte le ti¬
tre d’Actes des apôtres nous a conservé le récit de quelques faits relatifs
à quelques-uns d’entre eux. Les Epîtres de Paul nous en rapportent un
très petit nombre d’autres; après cela, il n’y a plus rien de certain sur
les premiers propagateurs de la religion chrétienne. Que devinrent-ils
après la mort de leur maître? Nous n’en savons rien ; où, quand et com¬
ment se termine l’existence de chacun d’eux? Aucun document authen¬
tique n’en a conservé le souvenir.
Ces étonnantes lacunes furent remplies de bonne heure par des légen¬
des. Il n'est pas un seul de ces récits qui s’appuie sur un fait positif et
certain. Plusieurs d’entre eux ne prirent naissance que pour satisfaire
la pieuse curiosité des fidèles, curiosité d’ailleurs fort légitime ; d’autres
furent provoqués par le désir de donner une origine apostolique à telles
ou telles églises ; d’autres encore furent imaginés pour soutenir ou faire
prévaloir certaines doctrines; d’autres enfin furent composés en l'hon¬
neur de quelque apôtre, pour relever son autorité, en lui attribuant
des actions extraordinaires, surtout des miracles plus ou moins extrava¬
gants.
Ces légendes, qui ne sont en elles-mêmes qu’un tissu de vaines ima¬
ginations, ont cependant cette utilité de nous faire connaître l’esprit du
temps et des lieux qui les virent naître. Elles nous apprennent avec
quelle rapidité certaines sectes furent envahies par l’ignorance, la su¬
perstition, l’ascétisme. Elles nous laissent entrevoir des dissentiments
qui les divisent entre elles, dont les causes furent, sans le moindre
doute, très diverses, mais qu’on rattachait, peut-être sans la moindre
raison, à des enseignements opposés des premiers propagateurs du chris¬
tianisme.
Nouvelle série, XVI.
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RKVOB CRITlQUh
Un grand nombre de ces légendes sont d'origine gnostique; d’autres
prirent naissance parmi des communautés hérétiques, ou qui le devin¬
rent plus tard. Mais dans la seconde moitié du iv 6 siècle, elles finirent,
après avoir subi bien des remaniements, par se propager dans ce qu’on
peut appeler l’Eglise catholique de cette époque, et par y être regardées
comme des récits de faits réellement historiques.
C’est à l’histoire critique de ces légendes sur les apôtres et des nom¬
breux écrits qui nous les ont conservées que M. Lipsius a consacré cet
ouvrage, dont nous n'avons encore que le premier volume, mais dont le
second ne tardera pas à paraître. Ce n’est pas la première fois que ces
récits apocryphes attirent l'attention du monde savant; M. L. donne
lui-même un aperçu des divers travaux entrepris avant lui sur cette cu¬
rieuse branche de l'ancienne littérature chrétienne. Dans ces derniers
temps, des recherches plus heureuses et plus exactes ont mis au jour des {
documents qui étaient restés inconnus. M. Lipsius en a tenu compte,
de sorte que son ouvrage a le mérite de ne laisser de côté aucune des
pièces de ce genre recueillies jusqu’à ce jour; et ce n'est pas seulement
un travail complet, c’est encore iine étude faite dans Un esprit réelle¬
ment scientifique et avec cette conscience littéraire que les sàVants alle¬
mands ont l’habitude de mettre dans leurs écrits.
Ce premier volume comprend, en outre d’une introduction de 43 pa¬
ges, une première partie dans laquelle sont étudiées les diverses sources 1
de ces légendes sur les apôtres (de la page 44 à la page 2*4); une se¬
conde, dans laquelle sont examinés les actes : i® de saint Thomas (225-
347); 2 0 de saint Jean (348-542) , et 3 ° de saint Ahdré (543*622). Le se¬
cond volume contiendra les actes de saint Pierre et les actes de saint
Paul.
M. N.
180.— Ad. de Ceuleneer. Notice sur un diplôme militaire de Tnjan,
trouvé aux environ» de Uèf^e. Liège, 1881. In-8, 65 pp.
Il s’agit, dans la notice de M. de Ceuleneer, d’un diplôme militaire, ;
trouvé aux environs de Liège lors de draguages entrepris dans le lit de !
la Meuse. Ce diplôme est incomplet; on n'a ramené que l’une des deux
claques de bronze, et encore en assez mauvais état. Quoique si mutilé,
ce monument n’en a pas moins son importance. D'abord, c'est le pre- 1
mier diplôme trouvé en Belgique; puis, ce qui est d’un intérêt plus
grand, il fait connaître le nom d'un nouveau légat de la Bretagne soui
le règne de Trajan. La découverte de cette plaque de bronze porte à
soixante-onze le nombre des documents de ce genre.
On sait qu’un diplôme militaire est l’expédition authentique, faite ed
présence de sept témoins, d'une loi impériale affichée à Rome in mûri
post templum divi Augusti ad Minervam et accordant aux soldats e
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DHISTOIRK BT OB LITTERATURE
.87
aux vétérans de certains corps le droit de cité, le matrimonium justum
et la légitimation des enfants qu’ils pourraient avoir eus. L’expédition
dent il s'agit ici est datée du deuxième consulat de Trajan, c’est-à-dire
de l'année 98 ou 99, puisque le troisième consulat de cet empereur tombe
en l'année 100. M. de C., à la suite d'une discussion très savante sur les
dates oti Trajan renouvelait sa patentas tribunicia, parvient à déterrai*
ner avec plus d’approximation la date de ce diplôme. Dans les titres
impériaux figure la tribun . potest. sans autre indication, tandis que le
titre de pater patriæ est omis : l’auteur en conclut que le diplôme est
des premiers mois de l’année 98. La mention des consuls aurait rendu
cette discussion inutile; mais la partie inférieure de l'acte, celle où
étaient gravés les noms des consuls, ainsi que l’indication précise du
jour où l'expédition a été faite, n’a pu être retrouvée.
L'intérêt de cette discussion chronologique est dû à la présence sur ce
diplôme du nom d'un personnage inconnu, T. Avidius, commandant
en Bretagne des deux corps de cavalerie et des six corps d’infanterie, en
faveur desquels une loi avait été rendue à Rome. Sur ces troupes auxiliai¬
res, recrutées surtout parmi les Belges et les Espagnols, le diplôme n’a
rien appris de neuf, et la restitution de la plupart des noms n’a pas été
trop difficile. La présence de la cohorsl a Tungrorum parmi ces troupes
explique la découverte de ce diplôme aux environs de Liège; le soldat
pour qui une expédition spéciale avait été faite, était sans doute de cette
cohorte, et, après son congé, il revint vivre dans sa patrie. — C'est donc
en l’année 98 que T. Avidius commandait ces corps en Bretagne; mais
ici deux difficultés se présentent, l’une épigraphique tenant à la lecture
du diplôme, l’autre chronologique sur la date même de ce commande¬
ment militaire.
Le nom de T. Avidius est parfaitement lisible sur l’une des faces (la
face externe) de la plaque de bronze; quant au surnom, il est dans la
partie détruite. Or sur la face interne figure, deux lignes au-dessous du
nom de T. Avidius, le mot Nepote qui semble pouvoir se concilier dif¬
ficilement avec l’ensemble du texte. Il faut donc supposer une inscrip¬
tion du surnom faite à cet endroit par le graveur, à la suite d’un oubli;
en réunissant ce surnom aux noms qui figurent plus haut, on a le nom
complet de ce personnage, T. Avidius Nepos. Ce gouverneur est-il le
même qu’un Avidius Quietus, consul suffect du règne de Trajan à une
année inconnue? M. de C. ne le pense pas ; M. Mommsen, au contraire,
identifie les deux personnages dans son étude sur le même sujet, publiée
dans VEpkemeris epigraphica de 1881.
Puisque T. Avidius Nepos a été gouverneur de la Bretagne en 98, il
faudra corriger les fastes des gouverneurs de cette province, qui donnent
à cette même année le nom de C. Salvius Liberalis. M. de C. démontre
avec raison, croyons-nous, contre Borghesi, que la légation de Salvius
dut prendre fin avec l’année 97 : celle-ci de T. Avidius Nepos se place
alors sans difficulté l’année suivante.
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REVUE CRITIQUE
La brochüre de M. de Ceuleneer.se compose de deux parties, qui au¬
raient peut-être gagné à être mieux détachées Tune de l'autre. L’une est
le commentaire même du texte, commentaire aussi complet qu’on peut
le souhaiter pour l'épigraphie, la chronologie, l’histoire; on remarquera
en particulier l’ingénieux complément que donne l’auteur à ces mots
dimissis honesta missione a (divo Nerva). L’autre se compose d’une
série d ’excursus, non sans intérêt, mais qui, insérés dans le texte le long
de la discussion, en arrêtent un peu parfois l’intelligence. Ainsi l’auteur
donne l’indication des antiquités romaines découvertes dans le pays de
Liège à d’autres époques; plus loin (pp. 26-41), c’est un tableau des
corps auxiliaires recrutés parmi les Belges et les peuplades limitrophes et
parmi les peuplades de la péninsule ibérique; plus loin encore (pp. 42-
45), il s’agit de la confection des diplômes en général; enfin les dernières
pages ( 56 - 65 ) sont consacrées à expliquer les différents privilèges qui fi¬
gurent d’habitude sur les pièces de ce genre. Du moment que le com¬
mentaire même du diplôme a été fait avec une connaissance parfaite du
sujet, que toutes ou à peu près toutes les difficultés du texte ont été
éclaircies ou consciencieusement exposées, ces pages supplémentaires
peuvent s'accepter : abondance de biens... Il y a tant de livres qui ne
tiennent pas les promesses de leur titre, qu’on ne peut en vouloir à
l’auteur de cette savante notice de les avoir toutes tenues, et au-delà.
G. Lacour-Gayet.
18 1. — Sixte-Quint, d’après des correspondances diplomatiques inédites tirées
des archives d’Etat du Vatican, de Simancas, de Venise, de Paris, etc., par
M. le baron de Hûbner. Nouvelle édition. Paris, Hachette, 1882, vi, 452, 436 p.
ln-18. Prix : 7 fr.
Nous avons rendu compte autrefois dans la Revue (année 1872, II,
p. 397) de la biographie de Sixte-Quint, publiée en 1870 par M. le ba¬
ron de Hübner, ancien ambassadeur d’Autriche à Paris et à Rome.
Nous avons dit alors tout ce que l’histoire de ce pontife, si remarquable
à tant d’égards, devait aux recherches consciencieuses du diplomate au¬
trichien, et combien les conclusions nouvelles qu’il présentait sur cer¬
taines particularités de sa vie, sur certains épisodes des relations politi¬
ques entre la France, l’Espagne et le Saint-Siège gagnaient par le ton
modéré, par la prudence avec laquelle les présentait l'auteur. Nous n’a¬
vons donc point à revenir ici plus longuement sur le travail de M. de
Hübner, car cette nouvelle édition n’est qu’une réimpression, à meil¬
leur marché, des trois grands volumes de l’édition primitive. Pour ré¬
duire sa vie de Sixte-Quint à deux tomes, l’auteur a non-seulement sup¬
primé le vol. III, renfermant les pièces inédites, mais encore tous les
renvois aux sources de l’édition primitive. Les autres changements se
bornent à quelques légères corrections de style, opérées çà et là dans
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o’HISTOIRB BT DR L1TTÉR ATURH
189
l'ensemble de l'ouvrage. On continuera donc à se servir de la première
édition pour l’usage scientifique. Mais nous ne doutons pas que la réim¬
pression faite par les soins de la librairie Hachette ne trouve, comme
elle le mérite, de nombreux lecteurs parmi le public, auquel la recom¬
mande une des dernières lettres écrites par M. de Montalembert, trois
jours seulement avant sa mort, et publiée maintenant pour la première
fois.
R.
182. — E. Goloubtnsky. Istorla ronukol iterkvl (Histoire de l’église russe),
2 toI. in-8 de xxm, 792 et 791 p. p. Moscou, imprimerie Lissner, 1880-1881.
Il n’est jamais trop tard pour signaler un bon livre. Celui de M. Go-
loubinsky est excellent à tous égards. L’auteur, professeur à l’Académie
théologique de Moscou, s’était déjà fait connaître par un intéressant ré¬
sumé de l'Histoire de l'Eglise orthodoxe en Bulgarie, en Serbie, en
Roumanie; l'ouvrage dont il nous donne aujourd’hui les deux premiers
volumes est un véritable monument de saine critique et de solide érudi¬
tion. S'il est une chose difficile à écrire, c’est l'histoire d’une église, quelle
qu’elle soit; elle exige de l’auteur des connaissances spéciales qui ne
s’acquièrent guère que dans les séminaires ; d’autre part, la profession
ecclésiastique impose, en général, à ceux qui l’ont embrassée une foi do¬
cile peu conciliable avec les exigences d'une méthode rigoureuse. En
Russie, la situation de l’historien est plus délicate que partout ailleurs;
l’orthodoxie s’identifie avec une sorte de patriotisme étroit. Il faut non-
seulement beaucoup de critique, mais beaucoup de courage pour aller à
l’encontre des traditions et des préjugés. M. G. réunit ces deux vertus;
il compose avec méthode, il écrit avec agrément : « Nous sommes un
peuple d’une très petite valeur historique, dit-il dans sa préface. » Je
sais bien des gens en Russie qui n’oseraient point parler du passé de
leur patrie avec si peu de respect. Nous voilà loin du temps où Karam-
zine écrivait que la Russie était, avant l’invasion des Mongols, le plus
cultivé des Etats de l’Europe.
Ces deux volumes de quinze cents pages ne comprennent que l’his¬
toire de l’Eglise russe jusqu’à l’invasion des Mongols, c’est-à-dire une
période de moins de trois siècles. M. G. déblaie soigneusement les origines
des légendes qui les obscurcissent, par exemple, du prétendu apostolat
de Saint André ’. Il essaye avec beaucoup de sens d'interpréter le récit
où Nestor (ou du moins l'annaliste anonyme généralement connu sous
ce nom) représente Wladimir envoyant des messagers à la recherche de
la meilleure des religions, et finissant, après une comparaison minutieuse,
par adopter la foi orthodoxe. C’est là, selon lui, une invention posté-
1. On sait qu’aujourd’hui encore le plus important des ordres russes est l’ordre de
Saint-André.
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REVUE CRITIQUE
I9O
rieure due au patriotisme de quelque Grec désireux de soumettre l’E¬
glise russe à la tutelle morale de l’Eglise hellénique» Toute cette disent'
sion est fort bien conduite et fort ingénieuse; elle a naturellement
provoqué en Russie de vives polémiques. M. G. a tenu bon et dans Une
post-face ajoutée à son deuxième volume il maintient son hypothèse et
la défend rigoureusement contre les arguments patriotiques et théolo¬
giques qu’on a essayé de lui opposer. La religion chrétienne une fois
établie en Russie, M. G. étudie son organisation. Sur nombre de ques¬
tions, les matériaux authentiques sont insuffisants; M. G., qui connaît
fort bien l’organisation de l'Eglise grecque, procède par induction; il
applique à son pays les textes que lui fournissent les historiens et les
canonistes byzantins (notamment le grand ouvrage de Ralli et Potli,
26vT<xYp.a tûv Sefwv xai îepûv xavévwv.) Il fait de même pour tout ce qui
concerne le matériel des églises et de la liturgie. Cette partie, qui ^oc¬
cupe pas moins de 445 pages, offrira aux archéologues une soürce iné¬
puisable de renseignements. M. G. regrette que ses ressources ne lui
aient pas permis d’y joindre les illustrations nécessaires. Nous le re¬
grettons encore plus que lui. Espérons qu’un jour le savant auteur
pourra reprendre ses deux chapitres, y ajouter une centaine de figures,
et nous donner un manuel complet d’archéologie religieuse.
Le chapitre consacré aux moines et au monachisme atteste la même
liberté d’esprit, la même solidité de critique’ que les précédents. Oü
juge volontiers les moines de cette période primitive d’après le Pateri -
con de Kiev qui raconte la vie des ascètes les plus remarquables. M. Go-
loubinsky qui vise plus à instruire son lecteur qu’à l’édifier, n’hésite
pas à signaler tous les abus otl le monachisme est tombé en Russie
comme en Occident. Il apporte la même franchise dans l’étude des
rapports entre l’église russe et l’église latine. Il n’a pas de peine à ré¬
futer les légendes qu’on a imaginées pour rattacher quand même la
Russie à l’église romaine ; peut-être glisse-t-il un peu trop légèrement
sur les mariages des princes et des princesses russes avec des hétéro¬
doxes. Le mariage de la princesse Anne avec un roi de France n’est
même pas signalé. Un chapitre d’ensemble, fort bien fait, résume l’o¬
pinion de l’auteur et les témoignages de l’histoire sur la foi, la mora¬
lité et la religiosité du peuple russe pendant la période que l’auteur
vient d’exposer. Des appendices chronologiques, biographiques, des ad¬
denda et des corrigenda accompagnent les deux volumes et attestent
l’infatigable conscience d’un écrivain avant tout soucieux de l’exactitude
et de la vérité. Continuée sur le plan et dans les proportions de cette
première partie, VHistoire de l'église russe formera certainement
une dizaine de volumes. C’est une œuvre qui laissera derrière elle tou¬
tes celles qui l’ont précédée et qui méritera d’être consultée partout
où l’on s'intéresse aux évolutions du christianisme chez les différents
peuples de l’Europe.
L. Leger.
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d’HISTOIRK ET DR LITTÉRATÜRB
Ï 9 I
i 83 . — D' Ludwig Tobler, Professor der deutschen Sprache an der Universitæt
Zürich : iohwel*erl§ch© Volkalleder, mit Einleitung und Anmerkungen
herausgegeben. (Bibliothek ælterer Schriftwerke der deutschen Schweiz, v. B,).
Fnuienfeld. Verkg von J. Huber, 188a. In-8, cli, 234 p.
Il Datait que naturel de consacrer un volume de la Bibliothèque des
plus anciens ouvrages de la Suisse allemande à un recueil de Lieds ou
chansons populaires, mais il était difficile d’en donner un qui fût plus
digne de figurer dans cette collection si consciencieusement et si habile¬
ment dirigée. Les travaux de M. L. Tobler le recommandaient pour
une entreprise pareille et ce serait trop peu de dire qu’il s’est toujours
montré à la hauteur de sa tâche ; connaissance approfondie du sujet, ri¬
chesse d’informations, établissement rigoureusement exact des textes,
tout se réunit pour faire des Chants populaires de la Suisse un livre
aussi savant que plein d’attrait. M. T. ne s'est pas d’ailleurs borné à
éditer les lieds qu’il avait recueillis, il en fait l’historique et, dans une
introduction qui est un modèle de saine érudition, il a passé en revue
toutes les questions qui se rattachent à la publication qu’il entrepre¬
nait : âge et caractère différent des chansons de son recueil, transforma¬
tions qu’elles ont subies, nature des sujets qu’elles traitent, rien n’est
oublié de ce qui peut servir à en rendre plus facile l’intelligence et à en
donner une connaissance approfondie. On pourrait être tenté sans doute
de demander au savant éditeur pourquoi il il n’a pas fait une place plus
grande à l’étude de la langue ; mais peut-être répondrait-il, en ren¬
voyant au Schwei\erisches Idioticon , en cours de publication, et dont
il est un des rédacteurs.
M. T. a réparti les lieds de son recueil en deux classes principales :
les lieds historiques et les lieds d’un caractère général, et il divise ces
derniers en spirituels et profanes, lesquels peuvent être d’ailleurs soit
épiques, —* c’est le petit nombre, — soit lyriques. Cette dernière divi¬
sion n’a pas, je crois, une grande importance, et, après l’avoir établie
théoriquement, M. T. l’a abandonnée lui-même dans la classification de
ses lieds spirituels. Ce qui importe du reste, c’est bien plutôt de suivre
et de montrer la diversité si grande des sujets abordés dans les lieds
plus particulièrement lyriques : amour, mariage, conditions sociales et
usages, fêtes, même la vie des bêtes, comme dans le lied lch armes
Hàsli , on peut ajouter celle des plantes, — un des plus beaux chants du
recueil est une glorification du sapin,— y figurent tour à tour, et le sa¬
vant éditeur nous donne sur la valeur poétique de chacun de ces motifs
d’inspiration, les renseignements les plus sûrs et parfois les plus cu¬
rieux \
11 va de soi que tous les Chants populaires de la Suisse n’offrent pas
le même intérêt, mais il en est bien peu qui ne se recommandent par
1. On en trouve aussi bien d’autres d’un genre différent, par exemple le rappro¬
chement fait p. ex xxii entre Reihen, Reigen et ran% (= rang).
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REVUE CRITIQUE
I92
quelque qualité poétique ; quoi de plus doux, de plus mystique et à la
fois souvent de plus naïf que quelques-uns des lieds spirituels, de plus
tendre que plusieurs des chansons d’amour que renferme la collection
de M. L. T., d’une inspiration plus haute, par exemple, que Anneli ou
Südelij de plus tragique que ’ S spa\iere drei Soldaten ou Der Schwa -
nemrt, bien que ce dernier lied soit d’origine bien récente ! Il faudrait
passer en revue tous ces chants si populaires d’inspiration et de forme
et qui montrent à quel point, pendant cinq siècles, le peuple suisse est
resté fidèle à la poésie ; j’aime mieux renvoyer au livre de M. L. Tobler;
le lecteur qui n’est point encore initié à ce qui fait le charme et l’attrait
de la chanson populaire ne pourrait l’apprendre avec un meilleur guide.
S’il le sait, il retrouvera dans ce recueil quelque chose d'égal à ce qu’il
a pu admirer de plus beau et de plus touchant dans les chants qu’il
connaît déjà.
C. J.
VARIÉTÉS
Note» d'archéologie orientale»
V
Découvertes archéologiques a Emmaus-Nicopous.
Mosaïque à inscription de la basilique d’Emmails.
Lors de ma dernière mission en Palestine, j’avais recueilli divers mo¬
numents fort curieux à 'Amwâs, l’antique Emmatis-Nicopolis L Les
fouilles entreprises par M ,,e de Saint-Cricq, sous la direction du capi¬
taine Guillemot, dans les ruines de la basilique d’'Amwâs, dont j’ai de¬
puis longtemps signalé l’importance % se sont poursuivies depuis mon
départ et ont amené quelques trouvailles intéressantes. Le capitaine
Guillemot, dont on ne saurait trop louer le zèle et l’activité et qui a déjà
rendu à l’archéologie de la Palestine de réels services 1 2 3 , vient de m’en¬
voyer à ce sujet quelques informations qui seront accueillies avec fa¬
veur.
1. Cf. mes Premiers rapports sur une mission en Palestine et en Phénicie entre¬
prise en 1881, pp. i 5 - 38 . — D’autres monuments de la même provenance, notam¬
ment des inscriptions romaines, seront donnés dans mon dernier rapport, actuelle¬
ment sous presse.
2. J’y avais moi-même pratiqué quelques fouilles préliminaires en 1874.
3 . Cf. mon mémoire sur La Pierre de Bethphagé (fresques et inscriptions des
Croisés), Revue arch. (déc. 1877).
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D’HISTOIRE BT OB LITTÉRATURE
193
Et d’abord j'ai eu le plaisir de constater qu’une de mes prévisions
s’est réalisée. Je disais, en discutant le problème si difficile de l’attribu¬
tion de la basilique d' f Amwâs : « Il y a là, selon moi, entre autres chan-
c ces, celle de trouver quelque pavage de mosaïques historiées, peut-être
« accompagnées d'inscriptions qui nous en apprendront plus long sur
« le passé et l'origine de l'église que toutes les suppositions auxquelles
c nous sommes réduits pour l'instant *. »
Un pavage de mosaïques a été, en effet, mis à jour, tout contre une
des absides de l'église, et ce pavage contient une inscription, malheu¬
reusement très mutilée :
+ e n i t i //////////////////////////////
K 0 n O Y E 1 llllllllllltllllillllllllll
cï> w c e 0 E r ///////////////////////////
’Exctiq .[èxKîJxéTCOü, e . [Wy^cîxjsoç.... èf.
Evidemment, la teneur générale de l’inscription devait être à peu près
celle-ci : le travail de mosaïque de l'église de . a été exécuté par .
sous l'épiscopat de l'évêque .... le jour , le mois, l'année. L’on peut
comparer, entre autres, les dédicaces des mosaïques de Tyr et de Neby
Younès % et de divers monuments chrétiens de Syrie. L'aspect des ca¬
ractères rappelle tout à fait l'inscription de la mosaïque de Tyr; les deux
mosaïques doivent être contemporaines. Il est bien regrettable que ce
soient justement les parties de la dédicace contenant le mot de cette
énigme historique qui aient disparu.
Fragments divers. — Quelques fragments épigraphiques ont été ex¬
humés dans les fouilles.
i° Sur un fragment de marbre blanc :
IIIIIIIII II A PO CK AI
Il II II II P A P X
///// n A C A
///ENn
2* Sur un autre fragment de marbre blanc .
+EN////////
k,tio/////////
A
Ici repose . et son fils .
1. Premiers rapports, p. 33 .
2. Cf. Renan, Miss, de Phénicie , pp. 5 ii, 61 3 . — Comparez notamment les for¬
mules : ovy)v (ou bfryqto à Neby Younès) ko km Ip^'ov Tvjç ^£©6 <jsü)ç. — Pour
le début èict, etc., cf. Waddington, Jnscr. gr. et lat. de Syrie, n* 2173 a : èfti Tfl
otxsvopia; 2239 a : £7:1 cuv&x'.aç, et 2088 : Ik i a tvBixTtwvcç, etc.
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REVUE CRITIQUE
1 94
3 ° Deux fragments de vase en terre cuite en forme découpé se raccor¬
dant :
A : une anse en forme de croix ;
B : un morceau de la panse avec les caractères :
KE MK////////////, K(ùpi)e,
Baptistère . — A l’est et près de l’abside septentrionale, l’on a dégagé
une cour pavée en marbre blanc et noir, avec une piscine et un baptis¬
tère cruciforme bâti en moellons et fragments de briques juives et ro¬
maines. Je rappellerai à ce propos que j’avais supposé que le singulier
chapiteau à légende bilingue et hébraïque trouvé dans la basilique
d’*Amwâs pouvait provenir d’un baptistère dépendant de l’église l .
Sépulcre juif avec ossuaires et vases funéraires. — M. Guillemot a
déblayé auprès d’Amwâs un sépulcre juif inviolé, taillé dans le roc se¬
lon le plan habituel : une chambre carrée avec neuf fours ou koukim,
disposés trois par trois sur trois des parois. Deux des fours étaient en¬
core obturés par un ciment très dur fait de cendres tamisées et gâchées
dans l’huile. Tout autour de la chambre court une banquette en relief.
Au centre étaient deux ossuaires, ou ostéothèques, en forme de caisset¬
tes 2 , entourés de grands vases en terre cuite, le tout rempli de débris
osseux non incinérés. Beaucoup de fioles dites lacrymatoires, pas de
lampes.
Divers . — M. Guillemot me signale encore un fragment de couvercle
funéraire avec ornements, une sonde de carrier en fer recueillie dans
une carrière antique près de l’église et mesurant o m 537 3 » et d’autres ob¬
jets ou débris anciens. Il a constaté, dans les environs, les traces d'un
vaste camp qu’il croit d’origine romaine, muni d’une enceinte circulaire
d’environ 1,200 mètres de développement.
VI
Patène du Mont des Oliviers, avec inscription votive
L’archimandrite de la mission russe de Jérusalem m'a communiqué
l’estampage et la copie d’un curieux petit monument chrétien trouvé sur
le versant oriental du Mont des Oliviers du côté de Béthanie et venu
récemment en sa possession.
Ce monument consiste en un disque de bronze verdâtre de trois mil¬
limètres d’épaisseur et de treize centimètres de diamètre, monté par son
centre sur une espèce de petit pied sur lequel il peut prendre une posi¬
tion inclinée.
1. Premiers rapports , p. 27.
2. Cf. sur ces petits monuments propres à l’antiquité juive mes divers mémoires :
1. Nouveaux ossuaires juifs avec inscriptions grecques et hébraïques. — II. Ossuaire
juif provenant d? Alexandrie. — III. Ossuaire juif de Joseph, fils de Jean. — IV. Epi¬
graphes hébraïques et grecques sur des ossuaires juifs inédits .
3 . Cf. dimensions de la coudée.
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o'HISTOIRB BT DE LITTÉRATURE
I 9 5
Au milieu est ciselée en léger relief une grande croix à branches éga¬
les; dans les branches sont gravés quatre caractères cantonnés que mon
savant correspondant transcrit : 0 <I>NH..., et tout autour court une lon¬
gue inscription qu'il transcrit :
+ À[riA] MAPIAç (xat) MAP0A ÜPOCAE2E THN KAPIIOÊOPIAN
QN( 0 ) K(rPIO)C riINOCKI.
Je propose de lire les quatre caractères cantonnés : CTbZH, au lieu de
03 >NH, en y ajoutant un Û qui doit exister au centre de la croit, et
de les considérer comme ainsi distribués :
<î>
Z û H
C
c'est-à-dire fwç, Çcbt), vie, lumière Il y a plusieurs exemples en Syrie de
croix * accompagnées de l’intersection de ces deux vocables sacrés dési¬
gnant deux qualités essentielles du Christ. J'en ai recueilli notamment
un spécimen tout à fait analogue à Gaza 3 .
Quant à la dédicace circulaire, j’aimerais mieux, en m'appuyant sur
une inscription identique, pour la dernière partie, du beau baptistère de
la basilique de Bethléem, lire : MapOa (ou Mapla?), TupéaBeÇe tyjv xapxoço»
p(av 4 wv è x6pioç yi[y]v(ü>)ox[£]i Ta èvép.axa, Marthe (Marie?), reçois
l'offrande de ceux dont le Seigneur connaît les noms .
Les caractères qui suivent le mot TINOCKI et qui sont transcrits :
-}- or^a Map£a, sont très frustes B , et l’on peut y retrouver à peu près les
éléments graphiques de xà èv< 5 p.axa exigés par la formule, comme on le
voit en superposant les deux leçons :
+AHA MA PI A
TAONO MAT A
Dans ce cas, le signe ç ne serait pas l’abréviation de xal, mais un signe de
séparation, marquant le commencement et la fin de l’inscription circu¬
laire.
Quelle pouvait être la destination de ce curieux objet? Liturgique, as¬
surément. Je crois que c'était une patène, le B(oxoç de l’Eglise grecque,
où l'on plaçait les particules du pain eucharistique, le charbon vivant
t. Cf. le vers bien connu de saint Damase énumérant les symboles de Jésus :
Spes, via, vit a, salus, ratio, sapientia, lumen.
2. Renan, Miss, de Phén ., p. 216, sur un amulette chrétien.
3 . En 1870, sur une dalle de marbre encastrée dans l’intérieur d’une maison
arabe.
4. Cf. le mot xapitoçopo6vxti)v de la mosaïque de Tyr (Renan, Miss . de Phén.,
p. 61 3 , pl. XLIX), qui doit être pris dans le même sens.
3 . Sur l'estampage que je possède, les traits originaux ont été malheureusement
repassés au crayon et interprétés dans le sens que je propose de rejeter.
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R BV U B CRITIQUE
I96
(comparez <pu>ç, Çcbvj), auquel les liturgies orientales assimilent ce sym¬
bole du corps de Jésus.
VII
Les deux Larrons
Ma mission à Londres pour l'examen du prétendu manuscrit moabite
Shapira, ayant occasionné un retard dans le renvoi des épreuves de
ma iv® note d’archéologie orientale (Rev.Crit. 20 août 188 3 ), plusieurs
des corrections indiquées n’ont pu y être introduites. J’en signalerai
trois des plus essentielles. P. 147, note 1, lire: Cesmas ou Sesmas;
même page 1. 5, lire : CTErAC, au lieu de ETErAC.
A la note 3 de la p. 147, à propos du rapprochement fait par moi
entre *rHCTAC (riCTAC), nom du mauvais larron, et le mot Xyîotoç de
l’Evangile (Marc, xv, 27), j'avais ajouté cette indication importante:
Inversement , serait-ce *rHCTAC qui serait issu de AHCTAC, et AYCMAC,
le nom du bon larron, viendrait-il de AYO(touç AYO... AHCTAC)?
Ch. Clermont-Ganneau.
CHRONIQUE |
FRANCE. — Nous lisons dans le Temps du 22 août i 883 , sous le titre : Le pré¬
tendu manuscrit original de la Bible les lignes suivantes : « M. Clkrmont-Gankiau,
chargé par le ministre de l'instruction publique d'examiner les fameux manuscrits
bibliques déposés au British Muséum et dont nous avons entretenu nos lecteurs à
plusieurs reprises, est arrivé au moment où l'émotion du public anglais avait at¬
teint son paroxysme. La presse anglaise était pleine de détails sur ces merveilleuses
reliques auxquelles on attribuait près de trois mille ans d'existence. Les transcrip¬
tions, les traductions, les commentaires allaient leur train ; le Times leur ouvrait
toutes grandes ses immenses colonnes. La foule se pressait chaque jour plus nom¬
breuse au British Muséum, autour de la vitrine où quelques spécimens étaient so¬
lennellement exposés à sa curiosité haletante. M. Gladstone, le premier ministre,
était venu en personne les honorer de sa visite. Le possesseur, un habitant de Jé¬
rusalem, en ce moihent à Londres, en demandait froidement la bagatelle d'un mil¬
lion de livres sterling, soit vingt-cinq millions de francs i Le résultat de l'examen
auquel s’est livré notre savant compatriote est venu malheureusement couper court
’ à ce bel enthousiasme. Après avoir obtenu, non sans peine, communication de ces
documents, non seulement il a constaté qu'ils étaient l'œuvre d’un faussaire mo¬
derne, mais encore il a réussi à établir rigoureusement, pièces en main, comment
le faussaire avait procédé à leur fabrication. Ces documents consistent en bandes de
cuir longues et étroites, d'un grand aspect de vétusté, couvertes de caractères moa-
bites. Ils contiennent de longs extraits, plus ou moins défigurés, du Deutéronome,
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D’ülSTOIRB BT DB LITTÉRATURE I97
serrés, écrits à l'encre et au kalam et disposés en colonnes. Un des premiers hébraï-
sants d'Angleterre, le docteur Ginsburg, les a déchiffrés, traduits et publiés avec une
ardeur et une patience dignes d'un meilleur sort. Le faussaire a tout simplement
pris un de ces grands rouleaux — âgé peut-être de deux ou trois siècles — rituels
de synagogue contenant le Pentateuque en caractères hébreux modernes; il y a dé¬
coupé la marge inférieure, vierge d'écriture, et s’est servi de ces bandes pour opérer
sa transcription du texte biblique dans l’alphabet moabite de la stèle du roi Mesa
(neuvième siècle avant notre ère) découverte il y a une quinzaine d'années justement
par M. Clermont-Ganneau et rapportée par lui au Louvre. Malheureusement, on
ne pense pas à tout. Le faussaire n'a pas fait attention à un détail insignifiant en
apparence qui est devenu entre les mains de M. Clermont-Ganneau une preuve
écrasante. Les bandes moabites ont conservé sous les caractères apocryphes les tra¬
ces a peine visibles, mais indélébiles, de la réglure primitive du rouleau, réglure
faite, selon l’usage, au poinçon, ainsi que les plis caractéristiques qui séparent les
colonnes du texte hébreu dans les rouleaux de synagogue. 11 suffit de superposer ces
bandes suspectes à la marge inférieure d’un de ces rouleaux pour que la fraude saute
aux yeux. La démonstration est absolue. Le faussaire a été pris littéralement la
main dans le sac. Nous sommes heureux que le mérite d'avoir démasqué cette su¬
percherie colossale revienne à l’un de nos compatriotes. Il faut féliciter les Anglais
d’avoir été avertis à temps. Ils ont été mieux partagés en cela que les Allemands,
qui, eux, avaient déjà payé dix-huit mille thalers, près de quatre-vingt mille francs,
leur collection de poteries moabites, quand M. Clermont-Ganneau parvint à en éta¬
blir le caractère absolument apocryphe. Ce qu'il y a de piquant, c'est que c'est ce
même habitant de Jérusalem, le possesseur du manuscrit biblique, qui les leur avait
vendues. Décidément, cet honnête industriel fera sagement de renoncer au cuir pour
revenir à la terre cuite. » Nous devons ajouter, pour l'édification de nos lecteurs,
que M. Clermont-Ganneau s’est vu refuser la communication de manuscrits sus¬
pects déposés au Musée britannique, communication accordée à d'autres savants,
quoiqu'en dise un entrefilet de l ’Athenœum du 18 août. Ce refus qui le visait
personnellement, lui a été opposé par le principal « librarian » à la requête for¬
melle du possesseur, M. Shapira. Il peut être interprêté comme une preuve morale
d’une grande gravité si on le rapproche du précédent des poteries moabites qui avait
déjà mis face à face M. Shapira et M. Clermont-Ganneau. Notre collaborateur a dû
se borner à l’examen des deux fragments exposés au public, et de trois ou quatre
autres sur lesquels le D f Ginsburg lui avait, lors d’une première entrevue, laissé
jeter un coup-d’œil pendant quelques instants. Le n° du Times du 21 août contient
à ce sujet une longue lettre de M. Clermont-Ganneau qui a fait sensation en An¬
gleterre et celui du a 3 un diagramme démontrant matériellement la parenté étroite
des fragments apocryphes et du rouleau de synagogue auquel ils doivent le
jour.
— La a Bibliothèqne des Ecoles françaises d’Athènes et de Rome » s'est augmen¬
tée d'un volume nouveau. Le culte de Castor et de Pollux en Italie, par M. Maurice
Albert.
— L*Annuaire diplomatique et consulaire pour l’année i 883 a paru à la librairie
Berger-Levrault ; on y trouvera des renseignements historiques de grande utiliié,
comme la liste chronologique des ministres des affaires étrangères depuis la créa¬
tion des quatre charges de secrétaires d’Etat, par Henri III en i 58 g, la liste des
ouvrages qu’a décidé de publier le Comité des travaux historiques, etc.
— La deuxième édition de l’ouvrage de M. Paul Janet sur Les causes finales
(Germer Baillière, in-8*), renferme des modifications qui se trouvaient déjà en partie
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REVUE CRITIQUE
I98
dans la traduction anglaise de 1878. des additions à l'étude delà théorie de l’évolu¬
tion, un nouveau chapitre consacré à Herbert Spencer, etc.
— L’Académie des Beaux-Arts vient de recevoir le premier volume, publié par le
ministère de l’instruction publique, de l’inventaire général des richesses d’art de U
France. Cette première partie comprend les archives de monuments français, rap¬
ports, décrets, lettres, notes et documents tirés des papiers d’Albert Lenoir, an*
nées 1790 à 1816.
ALLEMAGNE. — MM. L. Noiré, en Allemagne, et Max Mûllbr, en Angleterre,
ont proposé récemment la formation d’un comité en vue d'élever une statue i
Schopenhauer sur l’une des places de Francfort.
— Une Histoire de V Université de Vienne, composée par feu le professeur
Aschbach, doit être prochainement publiée, aux frais de l’Université, par les soins
deM. Horawitz; elle comprendra trois volumes.
ETATS-UNIS. — Une nouvelle revue mensuelle paraîtra à New-York, en novem¬
bre, sous le titre de Shakspeariana .
— L’infatigable bibliographe W. M. Griswold vient de publier un nouvel Iniex
des « articles relatifs à l'histoire, à la biographie, à la littérature, à la société et aux
voyages, et contenus dans des recueils d’essais ». Il a résumé en 46 pages les htm
des études renfermées dans 799 volumes, écrits en anglais, en allemand et en
français.
— M. W. J, Linton doit publier un recueil de poésie anglaise, en cinq volumes :
I. De Chaucer à Burns; II. Lyriques du xix« siècle; III. Ballades et romances;
IV. Choix d’œuvres dramatiques ; V. Traductions. Les morceaux seront rangés
dans chaque volume d'après l’ordre chronologique ; ils seront accompagnés d’une
courte biographie et de notes explicatives. (A New-York, chez les éditeurs Scribeer}-
— Un éditeur américain réimprime la nouvelle édition de YEneyclopaedia bri¬
tannica , en y ajoutant la biographie des personnages morts depuis l'apparition des
premiers volumes; cette édition renfermera des articles sur Bagehot, par M. Hotto*;
sur Lord Bcaconsfield , par M. Kebbel; sur Carlyle , par M. Lindsay Smith; sur
Emerson , par M. Sanborn, etc.
GRANDE-BRETAGNE. — Le volume de sir Erasmus Wilson, The Egypt of the
past, aura bientôt une troisième édition, augmentée de gravures et de cartes; le texte
sera également remanié.
— L’éditeur S. G. Fotheringham (Londres et Paris) doit faire paraître prochaine¬
ment un poème écrit en dialecte normand-français par un héraut de sir John Chan-
dos, ou Chandos Herald qui a été témoin de tous les faits qu’il raconte. Cette
chronique en vers commence à la naissance du Prince Noir et donne d’importants
détails sur le siège de Calais, sur les batailles de Crécy et de Poitiers, sur l’expédition
d’Espagne et la bataille de Najera, où Duguesclin fut fait prisonnier, sur divers au¬
tres événements moins connus et relatifs au gouvernement du Prince Noir en
Guyenne. Le texte est reproduit d’après l’unique manuscrit conservé au Worcester
College, d’Oxford. Il avait déjà été publié en 1842 pour le Roxburghe-Club, par
M. Coxe, mais le volume, tiré à petit nombre, n’était pas destiné au commerce et
fourmillait d’incorrections. C’est M. Francisque Michel qui édite aujourd’hui ce
texte; il l’accompagne d’une traduction anglaise (The life and feats 0/ arms of
Edward the Black Prince) et de nombreuses notes historiques.
— On a découvert récemment que le grand-père du président Lincoln demeurait
à Norwich, en Angleterre; sa tombe est dans le cimetière de cette ville et porte
l’inscription suivante : « In memory of Mr. Abraham Lincolne, of this parish, who
died july x 3 , 1789, âge 79 years, and Hannah his daughter, who died Septem-
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d’hISTOIRB BT DB LITTÉRATÜRB
199
ber 23 , 1769, âge 6 years ». M. John Leach, de Yarmouth, a fait photographier
cette inscription, à ses frais, pour l’offrir aux amis et admirateurs de l’ancien pré¬
sident des Etats-Unis.
— M. Stanley Lane-Poole doit publier prochainement à Londres, chez les
éditeurs Virtue, un volume sur la vie sociale en Egypte, Social life in Egypt.
— Le dernier volume de la collection « English men of letters » (Macmillan) est
consacré à Sheridan et a pour auteur Mrs. Oliphant.
— On annonce également, à la même librairie Macmillan, la prochaine publica¬
tion d’une édition des Epîtres de saint Jean , texte grec, notes et introduction, par
M, Wbstcott.
— Le second volume de la nouvelle édition de YHistory of England de M, S.-R.
Gardiner (chez Longmans) est consacré aux années 1607-1616.
— M. Seeley a été chargé de l’article qui doit paraître dans 1 ’ « Encyclopaedia
britannica » sur Napoléon ; cet article, qui est très développé, vient d’être mis sous
presse.
— Une nouvelle édition, augmentée du double (et ce, dit-on, en grande partie,
grâce à des renseignements et documents fournis par M. Gladstone) de l’ouvrage de
M. W. Robertson sur John Bright, Life and Times of John Bright , paraîtra bientôt
chez les éditeurs Cassell.
— M. E. W. Gosse va publier un volume d’« études sur le xvn e siècle anglais »
Seventeenth-Centuvy Studies , dont quelques-unes ont déjà paru dans le Cornhill.
D'après le plan adopté par M. Gosse, chaque décade du siècle sera représentée par un
écrivain, il y aura donc dix écrivains qui sont par ordre chronologique : Lodge,
Webster, Rowlands, Randolph, Herrick, Grashaw, Cowley, Mrs. Philipps (l’incom¬
parable Orinda), Etheredge et Otway.
— Une nouvelle édition des English poets de M. T. H. Ward est en préparation;
elle a été revisée entièrement et augmentée d’extraits de trois poètes morts récem¬
ment : Rossetti , étudié par M. Pater, O'Shaughnessy par M. Gosse, et James
Thompson (l’auteur de The city of dreadful night ), par M. Philip Bourke Marston.
— M. Austin Dobson prépare un recueil de morceaux choisis de Steele pour la
Clarendon Press et un recueil d’extraits des lettres de Horace Walpole pour la col¬
lection « Golden Treasury ».
— M. W. Vœtor, du collège de l’Université, de Liverpool, a mis sous presse un
volume sur la phonétique intitulé a Phonetik des deutschen , englischen und fran^œ-
sischen ». Ce volume servira d'introduction à un Orthographisch-orthoepisches
Wœrterbuch que doit publier aussi M. Vietor.
— Les manuscrits relatifs à l’Irlande et provenant de la partie de la collection
Ashburnham acquise parle gouvernement anglais, seront déposés à la bibliothèque de
l’Académie royale d’Irlande, à Dublin; parmi ces manuscrits est le vieux livre de
liturgie, connu sous le nom de Stowe Missal.
— La seconde partie de la traduction anglaise du Mahàbhdrata , par Protapa
ChandraRoy, paraîtra prochainement sous les auspices de la « Gratuitous Publica¬
tion Society » de Calcutta.
GRÈCE. — M. Spiridion P, Lambros publie à Athènes, chez l’éditeur Blastos, en
un volume de 2 5 à 3 o feuilles (au prix de 10 drachmes) une suite d’études philolo¬
giques et historiques, au nombre de trente-huit.
HOLLANDE. — Il paraît, en Hollande, depuis le commencement de cette année,
une nouvelle revue de théologie, les Theologische Studién, dirigée par MM. Dau-
banton, van Gheel Gildemeester, Th. Jonker, van Rhijn et Thuim.
— Le Congrès des orientalistes qui doit avoir lieu cette année à Leyde, du 10 au
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200
RBVUB CRITIQUE D HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
16 septembre, est présidé par M. Kuenen, qui remplace le regretté Dozy; le vice-
président est M. Kern et le trésorier M. Pleyte; les deux secrétaires sont MM. de
Goeje et Tiele. Le Congrès se divisera en cinq sections : i° langues sémitiques,
avec subdivisions pour l’arabe et pour l'assyrien ; a 0 langues aryennes ; 3 ° langues
africaines, ou, plus strictement, l’égyptien ; 4 0 langues de l'Asie centrale et de
l’Extrême-Orient; 5 ° langues malaise et polynésiennes. Les langues officielles du Con¬
grès seront le hollandais, le français et le latin; mais on pourra lire des mémoires
en anglais, en allemand et en italien. On a formé une exposition de manuscrits, de
livres et autres objets. Il y aura des excursions à La Haye et à Amsterdam; les
compagnies de chemin de fer de Belgique et de Hollande ont accordé aux membres
du Congrès une réduction de cinquante pour cent; le grand dîner traditionnel aura
lieu le vendredi, 14 septembre. On annonce que le professeur Peterson, de Bom¬
bay, et le pandit Shyamâji Krishnavarmâ, du Balliol College, d’Oxford, assisteront
au Congrès. Parmi les mémoires qui doivent être lus, on cite déjà : de M. Oort,
« le meilleur système d'éditer le texte de l'Ancien-Testament »; de M. Oppert,
« quelques inscriptions assyriennes récemment découvertes » ; de M. Halévy, a l'o¬
rigine de l'écriture perse » ; de M. Sayce, « le déchiffrement des inscriptions de Mal-
Amir et l'origine des textes prétendus mèdes » ; de M. Rhys Davids, « la littérature
pâli »; de M. Cust, € les inscriptions d’Asoka et l'origine de l’alphabet hindou »;
de M. Kern, « un dictionnaire sanscrit-kavi trouvé dans un vieux manuscrit java¬
nais»; de M. de Harlez, a l’âge de l'Avesta et la valeur de la tradition parsie»;
du Destour Jamaspji Minocheherji, « les mots qui signifient Dieu, Mazda, Ahura-
Mazda et Ahura, dans l'Avesta » ; de M. van den Gheyn, a les dialectes de l'Asie
centrale », etc., etc.
ITALIE. — On dit que le pape vient d’adresser aux cardinaux Luca, Pitra et
Hergenrœther une lettre où il insiste sur l'importance que prennent de jour en jour
les études historiques, et propose d'ouvrir librement aux travailleurs les archives du
Vatican.
SERBIE. — On vient de transporter, du cimetière Saint-Marc de Vienne, à Straz-
nilovo, près de Karwitz, les restes du poète le plus populaire de la Serbie, le Bums
serbe , Branko Redichevich, ou, comme on le nommait communément, Branko (né
à Brad en 1824). Branko a été le créateur de la littérature serbe moderne, et il est,
nous dit-on, le poète serbe par excellence. Il est mort prématurément en i 853 , sans
avoir vu exaucer son vœu le plus ardent, celui de visiter les fameuses plaines de
Kossovo et d’écrire un poème épique sur cette grande bataille.
SLAVES MÉRIDIONAUX. — Une Société d’archéologie s'organise actuellement à
Belgrade, sous la direction de M. Militchevitch.
— M. C. J1 rec z ek vient de publier à Sofia (en Bulgarie) une Instruction sur la
manière de rassembler les matériaux archéologiques et historiques (brochure in-8°,
de 24 pp.). Cette brochure, fort bien faite, a pour objet d'appeler l’attention des
Bulgares intelligents sur les richesses encore peu connues que possède leur pays,
richesses qui, naturellement, ont été fort peu étudiées sous la domination ottomane.
M. Jireczek donne à ses lecteurs des indications fort détaillées; il leur explique la
nature des monuments qui doivent être surtout étudiés, et les invite à ne pas négli¬
ger ou détruire — comme on l’a fait au début de l’émancipation — les monuments
musulmans dont quelques-uns sont fort élégants, au point de vue artistique, ou
portent des inscriptions utiles pour l'histoire.
r» Hroyrtetaire-Gcrant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marchessou Jils , boulevard Saint-Laurent , 2 3 .
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penhauer in seinem Verhâitniss zu Fichte u. Schelling. — Chronique
de Bourges, 1467-1506, p. p. J. Havet.— Codex diplomaticus Sale-
mitanus Urkundenbuch der Cisterzienserabtei Salem, hrsg. v. Weech.
I. (Cp . Revue critique, n° 33 , art. 164.)— Barboü, Victor Hugo und
seine Zeit. — Maltzan (von), Einiee guie mecklenburgische Mànner.
— Kriegsgeschichtliche Einzelschriften hrsg. vom grossen Generalstabe.
lu. II. — D'Ideville, Le maréchal Bugeaud. 111. (Pas de critique,
l’ouvrage n’est qu’un panégyrique.) — Thün, Geschichte der revolu-
tionàren Bewegung in Russland (livre très instructif où Ton trouve
rassemblés une foule de renseignements dispersés dans un nombre in¬
fini de journaux, de brochures, etc.) — Kupka, Die Verkehrsmittel in
den Vereinigten Staaten von Amerika. — Parker, A concise grammar
of the Malagasy language (Fait connaître la langue dans ses traits prin¬
cipaux; court, mais clair.) — Rœhl, Imagines inscriptionum graeca-
rum antiquissimarum (Commode pour les exercices et les conférences
des universités, n est pas également utile pour l’épigraphie). — Janna-
rakis , deutsch-neugriechisches Handwôrterbuch. (Indispensable à
quiconque s’occupe du grec moderne.) — Wershoven, Smollett et Le¬
sage (Attachant). — Müntz, Les arts à la cour des papes pendant le
xv® et le xvi® siècle, III. Sixte IV-Léon X 1471-1521. I. (Publication
qui est « mustergiltig »; belle ordonnance; commentaire abondant;
l'auteur connaît les sources les plus lointaines comme les ouvrages les
plus récents; il ne combat ses adversaires que par des faits scientifi¬
ques.)
Deutsche Literatorzeitung, n° 34, 25 août i 883 : Runze, Grundriss der
evangelischen Glaubens-und Sittenlehre. — Lasswitz, Die Lehre Kants
von acr Idealitàt des Raumes u. der Zeit. — Caird, Hegel (Laas : inté¬
ressant). — D’Arbois de Jubainville, Introduction à l'étude de la litté¬
rature celtique. (Zimmer : « Travail de compilation qui n'est ni com¬
plet ni partout correct, mais qui sera très instructif pour le grand
public »; cp. cependant Revue critique, i 883 , n° 23 , art. 120.) —
Heimreich, Das Buch der Ilias und die Liedertheorie. (Hinrichs : pro¬
fond et suggestif, observations remarquables développées avec une claire
méthode.)—Theodulfi episcopi Aurelianensis de judicibus versus ab
Hermanno Hageno recogniti. (Wattenbach.) — Reling u. Bohnhorst,
Unsere Pflanzen nach ihren deutschen Volksnamen, ihrer Stellung in
Mythologie u. Volksglauben, in Sitte u. Sage, in Geschichte u. Lite-
ratur. (E. Schrôder : choix fait dans les ouvrages de Hahn, Schleiden,
Perger, etc.). — Dikz, Kleinere Arbeiten u. Recensionen hrsg. v.
H. Bergmann, (Foerster.) — Torraca, Gli imitatori stranieri di Jacopo
Sannazaro. (Gaspary : travail important.) — A. v. Drükfel, Beitràge
zur Reichsgeschichte, i 552 . — Correspondance inédite de Condorcet et
de Turgot, 1770 bis 1779, p. p. Ch. Henry. (Koser.) — Perrot u. Chi¬
piez, Geschicnte der Kunst im Altertum. I. (Erman : trad. excellente
du i €r volume de cet excellent ouvrage.)— Lindau, Lucas Cranach.
(Ne peut être recommandé qu’aux pensionnats de demoiselles.) — Faust
Lurion, La guerre turco-russe de 1877-78, campagne de Suleyman
Pascha. (Hinze : mauvais, ne renferme guère que des dépêches déjà pu¬
bliées, et tente de justifier Suleyman qui a été le Bazaine de la Tur¬
quie.)
Gœttingische gelehrte Ànzeigen, n° 35 , 29 août 1 883 : Urkundenbuch der
Stadt Quedlinburg, II. (Frensdorff.)— Anonyme Arabische Chronik
Band XI vermuthlich das Buch der Verwandtschaft und Geschichte der
Adligen von Abulhasan, etc., autographirt u. hrsg. v. Alwardht.
(Nôldeke : il faut remercier l'éditeur qui a publié ce livre important et
intéressant.) — Klebmann, Geschichte der Festung Ingolstadt bis zum
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Jahre 1 8 1 5 (G. Kôhler). — Lindbmann, Beitrâge zur Charakteristik Bôt-
tigers und seiner Stellung zu Herder. (Minor : confirme la réputation de
hardiesse, d’eflronterie et de fausseté que s'était acquise Bôttiger.)
Theologische Literaturzeitung, n° 16, n août i 883 : Gunning, De godde-
likje vergelding hoofdza-kelijk volgens Exodus xx, 5 , 6 en Eze-
chiel xviix, 20. — Chrp. Hoffmann, Bibelforschungen. I : Erklàrung
der elf ersten Kapitel des Rômerbriefs. — Hermann, Die Zahl 666 in
dèr Offenbarung des Johannes i 3 , 18. — Roos, De Theodoreto dé¬
mentis et Eusebii compilatore, accedit epimetrum de Platonis codici-
bus. — Latendorf, Hundert Sprüche Luthers zum alten Testament in
hochdeutscher, niederdeutscher und niederlândischer Fassung. —
Evers, Dr. Martin Luther in Wort und Bild, Festschrift. — Ludw.
Keller, Ein Apostel der Wiedertàufer. (Kolde : raconte la vie de Hans
Denk; livre écrit avec feu; l'auteur est entré dans la pensée même des
anabaptistes; il a même pour eux trop d’enthousiasme.) — Fittbogen,
Jacob Andrea, der Verfasser des Concordienbuches.
— n° 17, 25 août 1 883 : Doedes, Encyclopédie der christelijke
théologie. — Fenton, early hebrew life, a study in sociology (W.
Baudissin : n’est qu'un essai, et une esquisse semblable ne peut
persuader, mais instructif). — Krementz , die Offenbarung des
n. Johannes. — Doulcet, Essai sur les rapports de l'église chré¬
tienne avec l’état romain pendant les trois premiers siècles. — Bonnet
(Max), Acta Thomae, graece partim cum novis codicibus contulit, par-
tim primus edidit, latine recensuit, praefatus est, indices adjecit. (Har¬
nack : le soin rare et la minutieuse exactitude de l’éditeur, autant que
les vastes matériaux qu'il a recueillis, assurent la valeur durable de cette
publication que personne ne sera facilement tenté de chercher à dépas¬
ser ; on a là tout ce qu’on peut désirer d'une édition ; elle suffira à
toutes les exigences même les plus sévères.) — Bure, Martin Luther
(très recommandable). — Schmeil, Lutherlieder, Jubilâumsgabe an Lu-
therfreunde. (Kawera^u.) — Jundt, Les Centuries de Magdebourg ou la
renaissance de l'historiographie ecclésiastique au xvi« siècle (Harnack:
sujet traité avec grand savoir; ce discours d'ouverture a une valeur du¬
rable). — Hammerstein, Erinnerungen eines alten Lutheraners. (Kawe-
rau.) — Beck, Vorlesungen liber christliche Ethik. (Lemme.)
Àthenaeum belge, n° 8, i 5 août 188 3 : M. Croiset, Essai sur la vie et
les œuvres de Lucien (P. Thomas : excellent livre, à la fois solide et
agréable ; l’auteur est au courant des recherches de la critique moderne;
il juge avec pénétration et indépendance; ses appréciations sont d’une
rare justesse ; il faut louer enfin les qualités toutes françaises d’exposi¬
tion, la clarté et le charme du style). — Graf, Roma nella mémorisé
nelle imaginazioni del medio evo. II (Lacour-Gayet : érudition très
vaste, trop vaste pour ne pas pécher par un peu de diffusion et par quel¬
ques omissions; publication d’un intérêt considérable, remplie de faits
de détail et riche en matériaux de toute sorte). —Correspondance de
Paris : Craven, Le prince Albert de Saxe Cobourg; Wahl, l'Algérie;
Piesse, Itinéraire de l’Algérie; Montégut, Essais sur la littérature an¬
glaise; Wallon, Eloges académiques; Marbeau, Slaves et Teutons; De
Vaujany, Le Caire et ses environs. — Chronique. — Sociétés savantes. —
Bulletin bibliographique : Wouters, Précis de l’histoire politique delà
Belgique pendant les quatre derniers siècles; P. Frbdericq, L’enseigne¬
ment supérieur de l’histoire à Paris, etc.
Le i nuprunenc de Marckr.ssou fils, boulevard Saini-L(iitre7V % 2'S.
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MÉLANGES ORIENTAUX
TEXTES ET TRADUCTIONS
PUBLIÉS PAR
LES PROFESSEURS DE L’ÉCOLE SPÉCIALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
A l’occasion du 6° Congrès international des orientalistes,
réuni à Leyde (septembre 1 883 ).
Un beau volume grand in-8 de 40 feuilles avec tableaux, hélio¬
gravures, etc. 25 Ir.
RECUEIL DE TREIZE MÉMOIRES
PUBLIÉS PAR
MM. H. Derenbourg, Ch. Schef.er, de l’Institut, Barnier de Meynard,
de l’Institut, P. Favre, A. Carrière, E. Miller, de l’Institut,
L. de Rosny, A. des Michels, L. Leger, E. Picot, H. Cordier,
J. Vinson.
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PÉRIODIQUES
The Aoademy, n° 591 , i cr septembre i883 : Comte de Paris, History
of the civil war in America. Vol. III (A. Werner : beaucoup d'infor¬
mations, vastes matériaux arrangés avec goût et coordonnés avec la pré¬
cision et la lucidité françaises ; ouvrage qui sera toujours consulté ; mais
détails trop minutieux et trop techniques; n’intéresse que les spécialistes
militaires; ce III 6 volume ne traite que des événements de l’année i863;
le public préférera les pages plus aimables, quoique moins impartiales,
d’Horace Greeley). — A woman's memories of worldknown men, by
Mrs Houstoun. — Seth a. Haldane, Essays in philosophical criticism
(Stewart). — Brsobrasof, Etudes sur l'économie nationale de la Russie,
région industrielle de Moscou, t. I. — The affinity of the ten stems of
the chinese cycle with the akkadian numerals (Terrien de la Couperie).
— Two biblical suggestions, Joseph and Helam (Sayce). — Buddna and
St. Josaphat (Yule). — A Babylonian cylinder of Antiochus (Budge).
— The âge of Homer (Walter Leaf). — Oxford contributions to the
study of roman law : the institutes of Justinian, edited as a recension
of the institutes of Gaius, by Th. Erskine Holland, second édition; se-
lected titles from the Digest of Justinian, edited by Holland a. Shad-
well; Imperatoris Justiniani Institutiones, p. p. Moyle. — Armitage,
Lectures on painting.
The Âthenaeum, n° 2914 , i er septembre i883 : The sonnets of John
Milton, edited by Mark Pattison. — Loftib, a history of London.
(Il est impossible de faire une histoire de Londres en deux volumes,
mais l’auteur a traité le sujet mieux que ses devanciers.) — Historical
records of the ç3rd. Sutherland highlanders, compiled and edited by
Roderick Hamilton Burgoyne. — Letters and papers, foreign and
domestic, of the reign of Henri VIII, preserved in the public Record
Office, the British Muséum and elsewhere in England, arranged a. ca-
talogued by James Gairdner. Vol. VII. — Perey et Maugras, Dernières
années de M me d'Epinay : Peut-être moins intéressant que le premiervo-
lume ; ce qui est le plus amusant, c’est le portrait et la vie de jeunesse de
Louis d’Epinay.) — Jane Clermont and the Shelleys. — The other side
of Mr. Froude’s « Leaf from the real life of Byron ». I. (Jeaflfreson.) —
Paul (R. W.), An account of some of the incised and sepulchral slabs
of North-West Somersetshire. — The sculptor and art student's guide
to the proportions of the human figure. — Burgess, Report on the
buddhist cave temples and their inscriptions, and report on the Elura
cave temples. — The British archaeological association, Dover congress.
Literarisches Centralblatt, n° 36, i er septembre : Lipsius, Die apokryphen
Apostelgeschichten und Apostellegenden. (Publication classique dans
son genre ; ce n’est pas seulement un résumé des recherches antérieu¬
res, mais encore, et à un haut degré, un travail qui ouvre la route, qui
pose de nouveaux fondements et qui pour longtemps tiendra sur ce do¬
maine une position dominante). — Djeterici, Die sogenannte Théologie
des Aristoteles aus dem Arabischen übersetzt und mit Anmerkungen ver-
sehen. (Traduction d’une œuvre extrêmement importante pour la con¬
naissance de la philosophie et de la littérature de la Grèce des derniers
temps). — Jordanis de origine actibusque Getarum, ed. Hôlder. (L’édi¬
teur n'a pas su comment établir son texte ; il faudra toujours consulter l’é¬
dition de Mommsen).— Dammann, Kulturkàmpfe in Altengland. (Recueil
de conférences bien faites). — Sickel, Das Privilegium Otto I ftir die
rômische Kirche vom Jahre 962 erlâutert. (Prouve que ce document est
authentique). — Die Limburger Chronik des Tilemann Ehlen von
Wolfhagen, hrsg. v. Wyss. — von Baar, Staat und katholische Kirche
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 38
— 17 septembre —
1883
Sommaire s 184. Le registre de l’officialité de Cérisy. p. p. G. Düpont. —
i8J. P. Pierling, Rome et Moscou. 1547-1579. — 186. Mahrenholtz, Etudes
sur Voltaire. — 187. De Boguslawski, Vie du général Dumouriez. — 188. De
Helvig, Von der Tann. — 189. Spohr, Le siège de Mézières.— Variétés:
Thorenc, et non Thorane. — Chronique. — Académie des Inscriptions.
184. — Le registre de Pofflelallté de l’abbaye de Cerlay, édité par
M. Gustave Dupont, sur la copie du ms. des archives départementales de la
Manche, communiquée par M. Léopold Delisle. Caen, Le Blanc Hardel. Extrait du
xxx« volume des Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie. In-4,
392 pages.
Les officiaux de Cerisy, au xiv e et au xv* siècles, n’étendaient leur
juridiction qu'à quelques localités de peu d’importance; leur rôle, lors¬
qu’ils inspectaient trois ou quatre paroisses du Bessin, était assurément
assez modeste; mais une bonne fortune nous a conservé le registre de
leurs visites pour une très longue série d’années. Nous ne les suivons
qu’à travers une circonscription peu étendue, mais nous voyons ce que
furent, dans ce territoire restreint, pendant plus d’un siècle, la justice
abbatiale, l'état des églises, les mœurs du clergé, la vie de la popula¬
tion.
Le Registrum curie officialis Cerasiensis, à part quelques courts
fragments, se poursuit, au milieu de lacunes assez nombreuses, de 1 3 14
à 1346, de i 36 qà i 38 o, de 1391 à 1414, de 1451 à 1458. M. Dupont,
dans sa préface, a exposé le mode de procédure adopté par les officiaux,
et résumé en termes fort brefs une partie des faits intéressants dont
nous devons la connaissance aux visites du juge abbatial ; cette exposi¬
tion est un peu courte : c’est le document lui-même qu’il faut lire; on y
trouve une foule de renseignements intéressants pour l’archéologie et
l’histoire des mœurs; on en retire une idée triste, mais exacte, de la dé¬
gradation dans laquelle étaient tombées certaines églises de Normandie,
de la corruption que certains membres du clergé séculier étalaient aux
yeux d’une population trop disposée à en subir l'exemple.
Etait-ce la prospérité matérielle qui avait amené les habitants de Ce-
ns y, de Littry, des Deux-Jumeaux et de Saint-Laurent-sur-Mer à ces
longues habitudes d’immoralité et à cette négligence persistante des in¬
térêts religieux ? Il est certain que leurs églises étaient dans un état dé¬
plorable, et que pendant cent cinquante ans on ne fit pas grand’chose
P°ur réparer ces misères vingt fois constatées. Les injonctions réitérées
de l’official, dans des cas trop fréquents, ne pouvaient rien contre l’apa-
Nouvelle série, XVI. 38
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202
RKVÜK CKITIQUK
thie des trésoriers qui laissaient se dégrader et se perdre le matériel
confié à leurs soins. Voici quelques faits relatifs à l'église de Littry. En
i 3 i 6 , 1321, 1 322 (n ot 42 a, 84, 95 a), les trésoriers de Littry reçoivent
l'ordre de faire adapter une serrure aux fonts baptismaux, et de les mu¬
nir d'une clef. En i 326 et 1327 (n°* 127 a et 129 c), ce sont les cloches
qui sont en mauvais état. Le 3 i mars i 32 i (n # 84), ordre de mettre une
clef et une ferrure au vase qui contient le saint chrême; le mauvais état
de ce vase est constaté en i 332 (n° 144 a), plus tard encore (n* 167 a),
et en 1340 (n° 209 a ); à cette dernière date les fonts ne sont pas bien
tenus; le 20 juin 1342 (n° 220), ils n’ont pas de serrure. Le 22 mai 1374
(n° 298 b), l’official, n'ayant trouvé dans l’église de Littry qu'un calice
en plomb, interroge à ce sujet les trésoriers; ils lui répondent qu’ils
ont à Bayeux un calice d'argent, engagé pour deux florins ; ordre leur
est donné de le retirer dans un délai d’un mois, sous peine d'une amende
fixée à quarante sous. Les livres ne sont pas reliés. Le prêtre ne peut se
tenir à l’autel à cause de la pluie et du vent; les courants d'air enlèvent
les corporaux quand on les pose sur les calices. L’official enjoint aux
trésoriers et aux bonnes gens de l'endroit de réparer l'église ; nous igno¬
rons ce que firent les bonnes gens de 1374 à 1412; ce qui est certain,
c’est qu’à cette dernière date (n° 393 /) cinq hommes de Littry, après
avoir en vain demandé la clef de l'église au gardien, en la place duquel
ils voulaient installer un homme de leur choix, enlevèrent à coups de
hache la serrure, et pénétrèrent dans le saint lieu.
Les officiaux, dans la relation de leurs visites, énumèrent le plus sou¬
vent les livres liturgiques, les vêtements sacerdotaux et les ornements
d'église; l’état de ces objets n’est pas toujours satisfaisant, mais ce sont
surtout les bâtiments qui tombent en ruines. Le 4 mars 1 3 1 5 (n° 26 b) %
on constate que le cimetière des Deux-Jumeaux n’est pas clos; les porcs
fouillent le sol pour déterrer les cadavres. La clôture de ce même cime¬
tière, le 29 mars 1 3 19, laisse encore a désirer (n° 64 a)\ le monastère a
besoin d'être réparé et recouvert; on néglige de sonner les cloches, et
il ne se fait pas d’aumônes; les livres, les vêtements, le luminaire sont
mal entretenus. En 1 33 1 (n° i 36 à), i 332 (n° 146), 1 333 (n° 161 c), il
manque assez de vitres pour que la pluie tombe dans l’église, et que le
vent éteigne les lumières. Le 4 juillet 1402 (n° 377 a) et le 29 septembre
1403 (n° 38 o a), le besoin de grandes réparations est signalé pour l’é¬
glise des Deux-Jumeaux. Signalons en passant le clocher de Saint-Lau-
rent-sur-Mer, qui demande à être recouvert (n° 378), une léproserie qui
s’est écroulée (n° 3 16 à).
On ne pouvait s’attendre à trouver en bon état des églises dont le
clergé était souvent d'une moralité douteuse. Le registre de Cerisy men¬
tionne un certain nombre de prêtres accusés ou convaincus de mauvaises
mœurs (voir entre autres, les n °• 292 et 293, 385 e et 385 /); on croirait
par moments avoir entre les mains le Registre des visites d'Eudes Ri -
gaud. Philippe le Viguerous, prêtre de Littry, est signalé en plusieurs
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d’histoirr kt os littératorb
2o3
endroits pour ses relations avec Thomassia, fille à « l’Aloier » (n°* i 53 b,
155,167 d, 209 b , 21 5 b, 222, 228 a, 228 b). Onze témoins déposent
contre Guillaume le « Deen », prêtre, accusé de relations intimes avec
sa servante (n° 298 c). Il paraît que ce même Guillaume aurait un jour,
au coin du feu, dit à une fille : « Puicra neptis, oscula me; — et oscu-
lavit eam, et tune dixit : et ego do tibi unam tunicam burelli mei
quando factum fuerit » (n° 245 a). 11 figure dans des rixes, et est
pour ce fait condamné à l'amende (n 0B 3 19, 333 a, 333 b , 333 c).
Des histoires aussi peu édifiantes n'étaient pas de nature à inspirer le
respect. En pleine messe, et devant une nombreuse assemblée, Biaise
Mériane accusait le célébrant, ce même Guillaume le Deen, d’avoir ré¬
vélé sa confession (n° 260). Henri Maresc, des Deux-Jumeaux, interrom¬
pait le saint sacrifice, si bien que le prêtre et les clercs étaient réduits au
silence par les cris des gens qu’il avait excités (n° 363 a). Robert le
Monnier, clerc, était condamné à cinq sous d’amende pour avoir in¬
sulté Yves Vitart pendant qu’il disait la messe (n° 390 rf); d’autres
se querellaient à haute voix, au sujet d’un baptême (n° 389 e)\ Nico-
lasle Reboux pariait de venir à l’église et de s’y tenir « indutus ex qui-
busdam brigandinibus, et de facto fecit » (n° 404 e). Les séances du tri¬
bunal n'étaient pas toujours respectées : rixes (n° 221), tumulte en plein
jugement (n° 383 4), injures à la cour (n 0 * 276 b, 276 c, 285 a, 285 c,
286, 365 b , 414 b), refus d’exécuter des mandats d’amener (n os 92,
93 d) ; le notaire de lofficialité est battu (n os 235 a , 267) ; on résiste au
sergent (n° 3 1), au « clericus prisiarum » (n os 1 65 a y 1 65 b). Jean de
Bapaumes est frappé d'une amende de cinq sous pour s'être, sans per¬
mission, rendu à la ville alors qu'il était en prison (n° 383 o ).
Il devait être difficile de maintenir dans l’obéissance une population
aussi peu sage que celle de Cerisy et des villages voisins. Devant l’offi¬
cial comparaissent une foule de mauvais ménages, de maris infidèles,
de filles ou de femmes mariées après les noms desquelles se lit la men¬
tion « diffamatur de communi » (« diffamatur, non obstante matrimo-
nio, de communi », n° 84 c; t de adulterio et de publico », n° 76) ; le
registre mentionne beaucoup de maisons mal famées (n os 25 e, 75 b, 76,
95 c, 96 fr, 1 36 b, 1 36 c, 167 d 9 181, 206 a, 390 d) ; les deux filles « a
la Goguerée » comparaissent à plusieurs reprises pour répondre aux
mêmes accusations (n os 84C, 95 c, 112) : « la Seeley » ne tient nul
compte des admonestations qui lui sont adressées: « non tenet injunc-
tionem quam ei fecimus » (n° 112). Geliota, fille de Th. le Conte, et
Colin de Arenche, se soumettent à l’amende que doit leur infliger l’of¬
ficial € pro eo quod dicta Geliota bina sponsalia contraxit » (n° 87 e).
On se demande ce que « Bourqueta », fille de Germain le Roux, a pu
faire de son enfant (n° 1 83 b); Jean le Franceis et sa femme ont sept
enfants non baptisés, et l'un d'eux a été vu emporté par une truie
(n° 42 d ).
Tandis que les délits relatifs aux mœurs étaient fréquents dans le res-
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REVUK CRITIQUk
204
sort de l’officialité de Cerisy, les vols paraissent y avoir été rares. Le re¬
gistre n en offre que peu de cas, et ils sont, en général, sans intérêt. On
doit citer, cependant, l’exemple d’un serviteur condamné à mort pour
vol, sans doute par une autre juridiction, et de son maître, accusé d’a¬
voir commis plusieurs larcins, fabriqué des lettres fausses, et violé son
serment (n° 1 3 1 ). Robert des Cageux, cferc, est condamné à cent sous
d’amende pour avoir transporté le sceau de l’official d’un acte sur un
autre (n° 394 0). Raoul le Peletier, dit FJouriot, clerc. convaincu de vol
et accusé de fausse monnaie, brise ses fers et cherche à fuir de la prison;
on lui inflige la détention perpétuelle et il meurt dans son cachot; son
corps est montré au peuple, puis déposé en terre sainte (n os 61, 62).
L’énumération suivante montrera que, si la population du Bessin
n’était pas portée au vol, les violences de toutes sortes ne lui étaient que
trop familières : Porte du monastère forcée (n° 120); porte du cime¬
tière de Littry forcée (n° 227); effractions (n os 188 b , 383 c); attaque
d’une maison (n os 410 c, 410 e); tentatives de viol et viols (n os 6, i 5 o,
205 , 235 b, 235 d, 3 j 3 /). Les rixes, qui souvent aboutissent à l’effu¬
sion du sang et à des blessures graves, sont trop nombreuses pour qu'on
puisse les citer. La querelle à la suite de laquelle mourut Rouland le Jou-
vencel, en i3^5, est l’objet d’une longue et curieuse enquête (n os 3 o 8 à
309 0; préface, page n). Deux hommes sont jetés à bas de leurs che¬
vaux (n os 353 a , 357 /); Guillaume le Roux blesse d’un coup de flèche
Thomas Cheron (n° 415 b). Parfois on en vient aux mains d’une façon
assez comique : Bertin Syret tord le nez à Regnaud Broquart (n° 415 c);
un mari est mis à l’amende parce que sa femme a battu et égratigné un
clerc (n° 365 /); la femme de Pierre Juppin empoigne Guillemette,
veuve de Nicolas Bénard, « ipsam capiendo per tunicam suam, et tra-
hendo ipsam a escorche cul gallice de superiori parte unius gradus us-
que ad inferiorem » (n° 397 é) \ on se bat à coups de livres (n° 3 g 3 J)\
un clerc jette un paquet de lettres à la figure d’un laïque (n° 397 c).
Il y avait des cabarets à Cerisy, et l'on s’y battait après boire
(n os 394 /r, 394 p); les pots d’étain, et autres ustensiles destinés aux bu¬
veurs, jouaient leur rôle dans ces querelles (n os 390 o, 390 p, 392 p,
393 /, 415 a, 35 g b, 367 c, 390 d) \ deux habitants de Cerisy volent deux
oies et vont les manger au cabaret (n° 393 h ). Les jeux étaient interdits
par l’official : « ne amodo ludant ad istos ludos prohibitos, utpote ad
talos, ad quartas, ad vaccas aut alios hujusmodi, ad penam centum so-
lidorum » (n° 410 /; cartes, 398 b). Les cas d’injures sont très fréquents
(voir, entre autres, les n os 91, 164 b, ij 3 b ), et parfois le procès-verbal
conserve aux quolibets leur forme française (n* 393 b). La dernière partie
du registre (1451-1458) mentionne un grand nombre de gens mis à
l’amende pour avoir juré; Jean Collet donne sa fille au diable : « Je
donne ma fille au dyable, tout ce que j’en ay engendré, non pas a ung,
mez a tous les dyables » (n° 416 à).
U11 était puni pour avoir mangé de la viande les jours maigres
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d’HISTOIRB BT DR LITTÉRATURE
205
(a 0 3yo g) et mis à l’amende pour avoir travaillé les jours fériés; citons
au nombre de ces fêtes : la dédicace du monastère de Cerisy (n os 259 a ,
25g à, 390 a), le jour des reliques de Cerisy (n° 172 b), la Saint-Nicolas
(n 08 173 d, 173 c) la Décollation de Saint Jean (n os 147, 387 b ), la Pen¬
tecôte (366 g ), les Quatre Temps (392 c), l’Annonciation (n° 375 w),
la Sainte-Anne (416 /r), la Sainte-Marie-Madeleine (n° 416 z), et le di¬
manche (365 e).
Les procès-verbaux de visites mentionnent un grand nombre d’indi¬
vidus accusés d'étre lépreux, mais sans donner de détails à leur sujet.
D’autres étaient prévenus d’usure, de sorcellerie; « uxor Johannis de
Ceraseyo diffamatur quod dat sanitatem infirmis de macula per verba et
dealba spina » (n° 1 38 b). Des amendes étaient infligées à ceux qui al¬
laient consulter le devin en Bretagne (n os 38 o a, 3 go g, 3 go k ; autres
accusations de sorcellerie n 08 73 ô, 96 b , 96 c, 235 a , 261 d, 269).
Nous avons vu plus haut que le vol était, dans certains cas, puni de
prison perpétuelle. Les gens de mauvaise vie encouraient le plus souvent
une amende ; à côté de cette peine fréquemment infligée se rencontrent
l’obligation d’aller en pèlerinage, imposée à des filles légères (n° 1 38 d),
et la pénitence publique (n° 139), parfois accompagnée de circonstances
aggravantes (n° i 3 o b). C’est encore aux cas d’inconduite que s’appli¬
quait la peine de l’échelle (n os 76, 137 c, 384 ^), dont pouvaient être
menacés les gens qui vivaient mal en ménage (n° 217, 261 b). Quant
à l’excommunication, l’emploi fréquent que l’on en faisait avait, sans
doute, eu pour effet de la discréditer; Germain le Roux reste excommu¬
nié pendant plus de trois ans (n° 177 b ), et Guillaume le Conte pen¬
dant plus de sept ans (n° 26 g) ; un homme qui, frappé d’excommunica¬
tion, a mangé de la viande après Pâques et est entré dans l’église, est
sommé de se faire absoudre dans la quinzaine (n° io 5 a). L’absolution
conférée à Roger Billon est rédigée ait cimetière de Cerisy, par un tabellion
(n° 145); Colin de la Roque, pour s’excuser d’avoir assisté à la messe
étant excommunié, dit qu’il avait son absolution « factam et pignatam
a notario », et qu’il attendait que l’official eût fini de chanter pour la
lui faire sceller (411 b). Quant aux simples admonestations, elles res¬
taient trop souvent sans effet ; nous n’en donnerons d’autre preuve que
les désordres dans lesquels s’obstinaient, malgré les avertissements de
l’official, Germain le Forestier, Thomassia Malherbe, dite la Coustu-
rière, et la veuve de Michel Riqueut (n os 88 , 95 b, 112, 11 3 , 119 b).
Le registre de Cerisy ne contient aucune allusion aux événements po¬
litiques; on y chercherait en vain ces notes relatives à des faits de
guerre, à des calamités publiques, qui parfois rehaussent l’intérêt des
documents judiciaires et leur donnent le caractère de véritables annales.
Tel qu’il est, il se présente à tous ceux qu’intéresse l’histoire des
mœurs comme un monument d’une réelle importance. Seulement on
fera bien de se rappeler en le lisant que les officiaux, dans leurs tour¬
nées, devaient se borner à signaler les crimes, les délits, les faits dignes
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REVUE CRITIQUE
de blâme; à côté des prévenus et des délinquants, ils n'avaient pas à
nommer les honnêtes gens ; les protestations auxquelles donnaient lieu
les désordres publics (n° 1 36 b : contra voluntatem gentium patrie), les
dépositions des témoins, et la régularité avec laquelle les juges abba¬
tiaux accomplissaient leurs visites, en l’absence de faits plus précis,
suffisent à prouver qu’en se bornant à peindre les vices et les excès
dont ce registre offre le spectacle, on ferait des mœurs normandes à la
fin du moyen-âge un tableau par trop sombre.
Elie Berger.
i85. — P. Pierling S. J. Rome et Hotcoa (liU7-l?»0). Un vol. in-18 de
vm-168 p. p. Paris, Leroux, i 883 .
Cet élégant petit volume se rattache à la série d'études que le savant
jésuite a entreprises sur les rapports de la Russie orthodoxe et de la Cu¬
rie romaine (Rome et Démétrius, la Sorbonne et la Russie , Antonii
Possevini Missio moscovitica, ouvrages dont j’ai rendu compte ici
même). On y trouve toutes les sérieuses qualités que j’ai eu l’occasion
de louer dans les travaux antérieurs de l’abbé Pierling : une bonne mé¬
thode, d’intéressantes découvertes faites dans les dépôts d’archives, une
exposition agréable et élégante. Les épisodes dont M. P. s’est fait le pa¬
tient historiographe étaient jusqu’ici assez peu connus; il en est un qui
est fort plaisant ; c’est la mystification inventée par deux Allemands, dont
l'un s’improvisa chancelier d’Ivan IV et réussit à duper la diplomatie
pontificale et celle de Charles-Quint. A la suite de ce bizarre épisode se
placent les négociations des papes, tantôt pour inviter Ivan au concile
de Trente, tantôt pour conclure avec lui une alliance contre les Turcs,
tantôt pour rapprocher Rome et Moscou sur la base du concile de Flo¬
rence. Ces négociations échouent successivement, mais elles préparent
le succès de celle du jésuite Possevino qui, en 1581-82, paraît en Russie
de la part du Saint-Siège et de Bathory.
Dans une rapide introduction M. P. signale les erreurs singulières où
sont tombés ses prédécesseurs (Tourgueniev, Theiner, Tolstoï). Dans
un appendice il donne un certain nombre de documents inédits ou peu
connus. Tous ceux qui ont la passion de l’histoire s'associeront aux pa¬
roles par lesquelles il termine cette préface : « Nous serions mal vena
d'en trop vouloir à nos devanciers pour n’avoir pas complètement épuisé
la matière, car ils nous ont procuré des heures délicieuses. Rien n’est
comparable à la suprême satisfaction qu'on éprouve lorsqu'on parvient
à arracher son secret au passé, à refaire une histoire oubliée. Dans les
salles magnifiques du Vatican, entouré de parchemins et de vénérables
volumes, nous avons maintes fois pu faire de ces conquêtes. Ceux qui
savent goûter les plaisirs de ce genre ne sont peut-être pas les plus mal
partagés. »
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d’HISTOIRR RT DR LITTÉRATURE
207
Je n’ai pas la prétention d en remontrer à M. Pierling sur un sujet
qu’il connaît mieux que personne. Mais, puisqu’il écrit en français et
pour des lecteurs qui ne sont pas tous familiers avec les choses slaves,
je me permets de lui signaler un éclaircissement nécessaire : il parle
quelque part d'une discussion théologique entre Ivan le Terrible et
Rokita, € ministre picard qui avait accompagné une ambassade polo¬
naise à Moscou (p. 80). » Il serait utile d’expliquer cette épithète de pi¬
card et d’ajouter que Rokita, tchèque d’origine, appartenait à la secte
des frères bohèmes, improprement appelés picards par leurs adversaires.
L. Leger.
,g5. — voltair©-®indien. Beitræge zur Kritik des Historikers und des Dichters
von Richard Mahrenholtz. Oppeln, Georg Maske 1882. In-8, vm, 196 pp.
Les Etudes que nous présentons aux lecteurs de la Revue ont un ca¬
ractère particulier ; tirées, comme l’auteur nous l’apprend, des maté¬
riaux rassemblés par lui en vue d’une biographie de Voltaire, ce ne
sont pas de longues dissertations sur le style, l’art de la composition, Je
talent du grand écrivain, mais des appréciations sommaires, des aper¬
çus succincts sur chacune de ses œuvres. Ces études sont divisées en trois
parties : la première nous fait connaître Voltaire comme essayiste et
critique d’histoire; la seconde l’étudie comme poète; dans la troisième
sont réunis les « traits principaux d’une caractéristique du célèbre po-
lygraphe. » On comprend combien il est difficile de rendre compte en
détail d’un pareil ouvrage ; aussi je me bornerai à indiquer rapidement
ce qui en fait l’intérêt et le mérite, et à en faire connaître le caractère.
Commençons par la partie consacrée à Voltaire considéré comme his¬
torien.
Avant tout M. Mahrenholtz s’est efforcé de découvrir quels principes
avaient dirigé Voltaire dans ses ouvrages de critique historique, et, dans
une énumération faite avec soin, il en compte jusqu’à quinze; on ne les
rencontre pas sans doute dans toutes ses œuvres historiques; mais il
est possible de les retrouver, cela est incontestable, dans plusieurs des
plus importantes. C’est à la lumière de ces principes que M. M. juge
les écrits historiques de Voltaire. Comme de juste, il est loin d’accor¬
der à tous la même attention ; et V Essai sur les mœurs et Y Introduc¬
tion célèbre qui le précède l’ont surtout arrêté; on ne s’en étonnera pas,
car nul ouvrage ne saurait faire mieux connaître quelles furent les
conceptions politiques et sociales de Voltaire, ainsi que ses idées sur la
marche de la civilisation. Mais, quelque courtes que soient parfois les
appréciations de quelques-unes des œuvres du célèbre écrivain, il y a
néanmoins toujours dans le jugement qu’en porte M. M. quelque
chose à retenir, quelque observation fine et pénétrante à noter. On
aura peine toutefois à souscrire entièrement à ce qu’il dit du Siècle de
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RKVUE CRITIQOB
Louis XIV\ œuvre dont les défauts lui ont fait peut-être trop oublier les
qualités.
Ce que je viens de dire au sujet de la partie de son livre où M. M.
apprécie les œuvres historiques de Voltaire, s’applique de tout point à
celle où il juge ses ouvrages poétiques. Il l’a étudié successivement
comme tragique, comme comique, comme poète épique ou lyrique, en¬
fin comme auteur de romans et de contes. Pour lui, et cette manière
de voir est très plausible, le modèle par excellence de Voltaire dans la
tragédie c’est Corneille, et c’est à l’auteur de Cinna surtout qu’il est
encore resté fidèle, quand il a imité Shakespeare! Mais quel rapport
y a-t-il au juste entre celui ci et Voltaire? M. M. montre très bien qu'il
ne put jamais y avoir une sympathie complète de la part du poète
raffiné du xvni® siècle pour le contemporain d’Elisabeth, entre la poésie
populaire du premier et la poésie savante du second \ mais que l'aver¬
sion déclarée de Voltaire pour Shakespeare éclata seulement dans les
dernières années de sa vie. M. M., et on ne peut que lui donner raison,
termine avec Zaïre la première manière tragique de Voltaire; cette pièce
en inaugure une autre qui va jusqu’à l'année de la traduction de Jules
César en 1762, enfin avec celle-ci commence une troisième et dernière
époque dans la manière du poète dramatique. Cette appréciation générale
mérite d’être retenue. Quant aux jugements particuliers que M. M. a
portés sur les différentes pièces de Voltaire, il faut remarquer entre au¬
tres ceux qui ont trait à Zaïre et à Mahomet . M. M. n'a pas hésité à
prendre la défense de Zaïre contre Lessing et il a fait un rapproche¬
ment heureux entre cette tragédie passionnée et le froid Nathan de
l’écrivain allemand. Pour Mahomet, il le compare à Tartuffe . Ces exem¬
ples peuvent donner une idée de ce qu'il y a de juste, sinon d’original,
dans les appréciations littéraires que renferment les Etudes sur Voltaire,
Bien que Voltaire n’ait jamais été placé bien haut comme poète co¬
mique, M. M., sans lui accorder une valeur qu’il n'a pas eue dans ce
genre, a insisté avec une complaisance manifeste sur les pièces qui s’y
rapportent; on ne peut, au reste, disconvenir qu’il les a caractérisées
avec une grande justesse. Mais Wycherley est-il bien le modèle que
Voltaire s’est surtout proposé en écrivant ses comédies? J’en doute un
peu ; en tout cas, il eût été bon de dire que Nanine est sortie de l'imita¬
tion de Richardson. Rien de plus juste que ce que M. M. dit des défauts
de la Henriade et de son succès ; la Pucelle n’est pas appréciée avec moins
de bon sens critique, et on peut faire la même remarque à propos de pres¬
que toutes les poésies diverses passées ici en revue ; mais il faut noter
en particulier le jugement porté sur YEpitre à Horace et surtout sur
le Temple du goût d’une si grande importance littéraire.
Parmi les innombrables écrits de Voltaire, ses romans et ses contes
1. Qu’il me soit permis de rappeler ici que j’ar, il y a déjà longtemps, dans le
chapitre consacré à Shakspeare de mon livre sur Herder et la Renaissance littéraire
en Allemagne au xvm« siècle, exposé la même manière de voir.
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o’histoirk kt or litt^raturk
209
sont, avec quelques-uns de ses ouvrages historiques, ce qu’il a produit
de plus durable ; on en connaît aussi la portée philosophique; M. M.
ne les a pas examinés à ce point de vue et a renvoyé tout simplement
à Hettner ceux de ses lecteurs qui seraient désireux de s’en faire une
idée; on ne pouvait leur donner un guide plus sûr, ni mieux informé.
Mais si M. M. a négligé à dessein les tendances philosophiques des ro¬
mans et des contes de Voltaire, il les a étudiés sous tous leurs autres
aspects, et, comme pour les œuvres poétiques, on lira avec plaisir et
non moins de profit les fines appréciations qu’il en a faites.
Mais, quelque intérêt que puisse offrir les deux premières parties du
livre de M. M., cet intérêt est surpassé par celui que présente la der¬
nière; ici nous n’avons plus seulement des remarques justes, mais
succinctes, plus semblables aux notes d'un ouvrage futur qu’aux frag¬
ments d'un ouvrage achevé, mais une vue d’ensemble, un jugement
général, résumant les appréciations particulières de l’auteur, en un mot,
sinon encore un portrait complet, du moins les éléments et les traits
principaux d’une caractéristique de Voltaire. Ce qui rendait particu¬
lièrement difficile cette partie de la tâche de M. M., c’est la contradic¬
tion qu’on rencontre entre les divers témoignages des contemporains
de Voltaire ; à l’exemple de MM. Desnoireterres, Hettner et Strauss,
qu'il est loin d’ailleurs de suivre en aveugle, il a fait entre eux un choix
judicieux et sévère et, guidé surtout par la correspondance de Voltaire
lui-même, la source la plus précieuse d’informations pour la connais¬
sance de la pensée intime et de la vie du grand écrivain, il s’est efforcé
de nous montrer ce qu’il fut comme homme et dans ses relations socia¬
les, ainsi que comme écrivain dans sa lutte contre la société du xvm e siè¬
cle. On le sait, Voltaire ne fut qu’indirectement un précurseur de la
Révolution; les mots de liberté et d’égalité, surtout le second, le lais¬
saient presque indifférent; partisan du despotisme éclairé, ce qu’il com¬
bat seulement ce sont les abus de l'ancien régime, en particulier la
vénalité de la justice et l’inégale répartition des impôts; et il réserve ses
attaques les plus vives et engage la lutte de toute sa vie contre la reli¬
gion positive du jour, catholicisme et protestantisme; il est vrai, et
M. M. le montre fort bien, c’est encore aux abus qu’il s’en prend le
plus souvent : au pouvoir absolu de la papauté, au fanatisme des dissi¬
dents qu’il poursuit à l’égal des orthodoxes. Le portrait de Voltaire ne
serait pas complet, si nous ne savions rien de ses amitiés et de ses atta¬
chements; M. Mahrenholtz passe rapidement sur ses rapports avec Fré¬
déric II, où, il faut le reconnaître, il y avait peu de choses nouvelles à
dire, mais il a insisté d’autant plus sur les passions de la jeunesse du
poète, sur sa longue liaison avec M me Du Châtelet, et c’est par là qu’il
termine son étude. S'il n’a pas ajouté dans cet examen rapide beaucoup
de traits au portrait que l'on avait de Voltaire, il a du moins reproduit
et mis en lumière ceux qu’on connaissait déjà et il a fait preuve dans ce
travail de qualités critiques remarquables; on ne peut que souhaiter
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210
RKVUR CRITIQUE
aussi qu’il continue ses recherches sur un écrivain qu’il a su si bien
comprendre et qu’il nous en donne enfin la biographie complète qu’il
voulait d'abord écrire. C. J.
187. — Dut Leben des General» Dumourlcz, von A. von Boguslawski,
Major und Bataillons-Commandeur im I. Westpreussischen Grenadier-Rcgiment
n° 6, 1880 Berlin, Luckhardt. 2 Bænde, viii et 167 p , vi et 3 12 p.
Cette Vie de Dumourieç comprend deux volumes. Le premier vo¬
lume est divisé en deux livres : i° De la guerre de Sept Ans à la Ré¬
volution (pp. i- 65 ); 2 0 Dumourieç, ministre et général de la Révo¬
lution Cpp. 69-167). Dans le premier de ces deux livres, M. de
Boguslawski raconte l’enfance de Dumouriez, son rôle durant la guerre
de Sept Ans, ses voyages en Italie et dans la péninsule hispanique, la
part qu’il prit à l’expédition de Corse et au soulèvement de la Pologne
dans les années 1770 et 177c, sa mission en Suède interrompue par son
arrestation à Hambourg et son incarcération à la Bastille, son mariage
avec M Ue de Broissy, sa nomination au commandement de Cherbourg.
Dans le second livre du premier volume nous voyons Dumouriez
profiter de la Révolution, entrer en relations avec les chefs de parti,
surtout avec les jacobins, apaiser les premières agitations de la Vendée,
et arriver, grâce à Gensonné et à Laporte, au ministère des affaires
étrangères; il contribue à faire déclarer la guerre à l’Autriche, mais
quitte le ministère lorsque le roi refuse de sanctionner les décrets con¬
tre les prêtres réfractaires et sur le camp des fédérés des départements;il
commande les troupes réunies dans le Nord, près de Maulde, refuse,après
le 10 août, de prêter le serment que Lafayettc exige de l’armée, et reçoit
en récompense le commandement en chef de toutes les forces du Nord.
Ce premier volume ne renferme rien de très nouveau; et l'on pour¬
rait chicaner l’auteur sur quelques détails. Il faut dire ihre et non
« seine » dans cette phrase : « Die Verderbniss des Hofes batte noch
nicht seine Einwirfyung aussern kônnen » (p. 12). Il faut lire Chauve-
lin ex non « Chauvelain » (p. 24), Contades et non « Cortades » (p. 26),
Doïillens et non « Doulens » (p. 57), du Muy , et non « deMoy » (p. 61);
et l’avocat Gensonné n’était pas un « célèbre savant » (p. 97), non plus
que les Vergniaud, Brissot, Barbaroux, Louvet et Buzot (p. 109); cette
appellation ne peut convenir qu’à Condorcet.Le style est parfois empha¬
tique; p. 71, l’auteur parle du a serpent de la calomnie » et, p. 41, d’une
Polonaise de trente-quatre ans qui avait conservé sa beauté et * était
par conséquent, selon Balzac, dans l'âge le plus séduisant »; on ne s’at¬
tendait guère à trouver dans un livre d’histoire, même à propos de
l’entrevue de Dumouriez et de M 1Ie de Broissy à Caen, la phrase sui¬
vante : « Chaque mot, chaque baiser, chaque signe d’amour, chaque
rose que nous avons donnée à la bien aimée, revit, pour ainsi dire,
reprend de nouveau sa vie, sa couleur et son parfum, lors même que
l'objet aimé n’a plus le même aspect qu'autrefois » (p. 57). Mais les évé-
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d'HISTOIRE KT OK LITTÉR4TURh
21 I
nements sont racontés avec exactitude, et non sans agrément ; le cha¬
pitre consacré à la Pologne est écrit évidemment par un homme qui
connaît bien ce pays et qui doit l’avoir habité; il renferme beaucoup de
détails instructifs et de particularités curieuses.
Le second volume, de beaucoup le plus remarquable, a été composé,
non-seulement d’après les documents imprimés, mais d’après les notes
prises par M. de Sybel aux archives du ministère de la guerre et que
l'éminent historien a mises courtoisement à la disposition de M. de Bo-
guslawski. Il ne s’agit guère dans ce volume que de marches militaires
et de combats, comme le prouvent les titres des deux livres qui compo¬
sent ce dernier tome : III. La campagne de VArgonne et la conquête
de la Belgique (pp. 1-42) et IV. La campagne de ijg 3 en Hollande
et en Belgique et la levée de boucliers contre la Convention (pp. 145-
282). M. de B. a traité le sujet en homme du métier; son récit de la
campagne de l’Argonne est un des plus complets et des plus clairs que
nous ayons lus, d’autant plus clair et plus complet que l’auteur a par¬
couru cette région en 1870. Nous en dirons autant des pages relatives à
la bataille de Jemmapes et à la défaite de Nerwinde.
Il y a encore quelques fautes dans ce volume, par exemple, p. 285,
« Ricarol » pour Rivarol (à propos de la sœur de l'écrivain, qu'il faut
nommer, non pas M œe de Beauvert, mais M 1 " 6 de Barruel-Beauvert ou
la baronne d’Angel); « Ferney » pour Fernig (les deux amazones si
connues); « Byron » pour Biron (p. 4); v Cara » pour Carra (p. 59);
« Yon » pour Yoncq (p. 21); « Marque « pour Marcq (p. 2 3 ); « Du-
bosquet » pour Dubouquet (p. 22); la route de Sedan à Grandpré par
Vouziers ne peut passer à Rethel (p. 19); le colonel prince de Ligne,
tué à La Croix au Bois, était le fils, et non le frère, du célèbre prince de
ce nom (p. 3 i); et Davout n’a pas « changé de cocarde, pendant les Cent
Jours, deux ou trois fois » (p. 294). Mais la narration est toujours exacte,
précise, animée; l’auteur a su retracer la situation des partis, les rapports
deDumouriez avec les membres du gouvernement et les chefs de la Con¬
vention, la politique du général en Belgique avec autant de soin et d’in¬
térêt que les faits militaires. Les dernières pages du volume sont relatives
aux ouvrages que Dumouriez composa dans la retraite. Rivarol disait
ce mot, que ne cite pas M. de B. : « L'opinion a tué Dumouriez, lors¬
qu’il a quitté la France. Dites-lui donc en ami de faire le mort; c'est le
seul rôle qu’il lui convienne de jouer; plus il écrira qu’il vit, plus on
s’obstinera à Je croire mort ». M. de B. analyse les œuvres de Dumou¬
riez et montre qu’elles font honneur à son coup d’œil politique, à la
perspicacité de son esprit : dans le Tableau spéculatif de l'Europe paru
en 1798, Dumouriez déclare que « la possession de la Vénétie est pré¬
caire et sera pour l'Autriche une source de grandes guerres », que l'Al¬
lemagne n’est pas encore une nation et ne Je deviendra que « par une
guerre nationale, de l'union et un homme-roi qui relève l'aigle germa¬
nique ». En 1810, dans un mémoire à Castlereagh, il prouve que l'ar-
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RBVUK CRITIQUE
mée française de Napoléon n’est plus la même qu’autrefois; en 1819,
dans le Coup d’œil politique sur l’Europe, il prédit la grandeur future
de la Prusse qui ne peut rester comme elle est et qui se mettra un jour
à la tête de l’Allemagne, et il conseille à 1 ’Àngleterre de prendre les îles
de l’Asie-Mineure et à l’Autriche d'annexer la Bosnie, l’Albanie et la
Serbie.
M. de B. a naturellement un vif enthousiasme pour son héros, et son
admiration va si loin qu'il ne tient aucun compte des critiques si vives,
si mordantes de Gouvion Saint-Cyr (voir l’Introduction aux Mémoires
sur les campagnes des armées du Rhin et de Rhin-eUMoselle ). Il essaie
de justifier Dumouriez en toute circonstance et y réussit souvent; mais
a-t-il raison de soutenir que a les buts et les desseins de Dumouriez
étaient toujours purs, et qu’il ne se trompa que dans les moyens? » On
est peut-être trop sévère pour le vainqueur de Valmy et de Jemmapes;
on ne devrait pas oublier, selon le mot de Thiers, que s’il nous aban¬
donna, il nous avait sauvés. Mais, comme dit encore Thiers, en passant
à l’ennemi, il n eut pour excuse ni l’entêtement aristocratique de Bouillé,
ni la délicatesse des principes de Lafayette, car il avait toléré tous les dé¬
sordres jusqu’au moment où ils avaient contrarié ses projets. Il est vrai
qu’ « on ne peut se défendre d’un profond regret, à la vue d’un homme
dont cinquante années se passèrent dans les intrigues de cour, trente
dans l'exil, et dont trois seulement furent employées sur un théâtre di¬
gne de son génie. »
L'ouvrage de M. de Boguslawski, que nous recommandons à tous les
amis de l'histoire, vaut surtout par le récit des opérations militaires; il
est accompagné de cartes bien faites et d'appendices, parmi lesquels on
remarquera l’ordre de bataille de l’armée du centre le 5 septembre 1792
et l'inscription latine gravée sur le tombeau de.Dumouriez dans l’église
de Henley. A. C.
188. — Ludwig Frelherr von dei* Tonn-RoiL«amliauaen 9 Kœniglià
bayerischer General der Infanterie, und Kommandierender General des Kœniglich
bayerischen I Armeekorps,eine Lebensskizze von Hugo von Helvig, Kœniglich ba¬
yerischer Oberslieutenant. 1 883 . Berlin, Minier u. Sohn. In-8, 212 p. 3 mark 5 o.
Louis, baron von der Tann-Rathsamhausen, naquit le 18 juin 181 5
à Darmstadt. Il fut admis en 1827 parmi les pages du roi Louis I (« in
die kônigliche Pagerie », comme dit l’auteur), puis entra au service mi¬
litaire et devint lieutenant au i er régiment d'artillerie, lieutenant et ca¬
pitaine d’état-major, et aide de-camp du prince royal de Bavière (plus
tard, Max II) qu'il accompagna dans un voyage en Grèce, à la cour du
roi Othon. En 1848, le major von der Tann obtint de son souverain la
permission de prendre part à la guerre du Sleswig-Holstein contre les
Danois. Il reçut du prince de Noer qui commandait en chef toutes les
forces militaires des duchéj, la direction des corps francs et des compa¬
gnies de volontaires, et exécuta le coup de main de Hoptrup, « le seul
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2l3
D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
acte de la guerre qui ait montré de l’initiative et une hardie confiance en
soi-même » (p. 34). De retour à Munich, il fut nommé lieutenant-colo¬
nel, et, en 1849, lorsque la confédération envoya contre le Danemark une
armée de 80,000 hommes, chef d’état-major de la première division com¬
mandée par le prince Edouard de Saxe-Altenbourg. L’année suivante,
lorsque les duchés luttèrent seuls contre les Danois, von der Tann fut en¬
core le chef d’état-major du général en chef Willisen ; il prit part à la
bataille d’Idstedt. Rentré définitivement en Bavière, et toujours aide-
de camp du roi (de Max II, puis de Louis II), il assista en amateur à la
prise de Düppel par les Prussiens (1864). L’année 1866 fut « la plus
difficile de sa vie, la plus abondante en épreuves morales et en expé¬
riences amères » (p. io 5 ) ; chef détat-major du commandant en chef des
contingents de TAllemagne du Sud, le feld-maréchal prince Charles de
Bavière, von der Tann fut accusé par ses compatriotes, après sa
malheureuse campagne, d’avoir « trahi » et de n’étre qu’un « prussien
déguisé ». Son biographe le justifie, en prouvant que les Bavarois n’ont
pu, malgré la rapidité de leur marche, arriver à temps pour « délivrer »
les Hanovriens qui, comme on sait, capitulèrent à Langensalza ; que
leur premier engagement avec les Prussiens eut lieu le 3 juillet à l’heure
mémeoü le prince royal de Prusse paraissait sur le champ de bataille de
Kônigsgràtz; que les états du Sud, alarmés, ne songèrent plus qu’à
leurs propres intérêts politiques et dynastiques, et non aux combinai¬
sons militaires (p. 122); que le prince Alexandre de Hesse, commandant
du huitième corps, n’obéit pas aux ordres du généralissime. Von der
Tann fut blessé au combat de Kissingen et en 1869, nommé général
d’infanterie et commandant du premier corps de l’armée bavaroise. On
connaît son rôle pendant la guerre de 1870 : il arriva trop tard pour
prendre part à la bataille de Reichshoffen; il surprit à Beaumont le
cinquième corps, commandé par le générajde Failly; il prit Bazeilles
et les hauteurs de la Moncelle; après le combat d’Artenay, il entra dans
Orléans, mais dut abandonner la ville, après Coulmiers, et, dans les
« jours de décembre », perdit le tiers de son corps d’armée et plus de la
moitié de ses officiers. Il est mort à Munich le 26 avril 1881.
Telle est, esquissée à grands traits, la biographie de von der Tann,
que vient de retracer le lieutenant-colonel de Helvig. Elle est écrite
simplement ; elle fait assez bien revivre la figure de cet homme de
guerre brave, énergique, et, à ce qu’il semble, froid et stoïque; elle
n’aura pas un grand succès auprès du public allemand, car elle manque
un peu d’agrément et de chaleur, et les faits de guerre sont racontés
très longuement et d’une façon tout à fait technique; mais elle aura
beaucoup de lecteurs parmi les officiers bavarois. Elle rendra de grands
services à l’histoire. Si le récit de la guerre franco-allemande n’offre
rien de nouveau et ne fait que reproduire, sur beaucoup de points, la
publication de l’état-major allemand, les pages consacrées à la guerre
du Sleswig-Holstein et à la guerre de 1866 méritent d’étre consultées
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RKVUB CRITIQUE
214
et renferment plus d’un détail inédit. L auteur a été l’ami de von der
Tann, il a servi sous ses ordres et a eu communication de ses papiers;
il raconte fort minutieusement les campagnes de 1848-1850; il publie
des extraits de la correspondance de von der Tann, ses rapports sur le
combat de Hoptrup et sur l’attaque de Düppel, une lettre importante
de Willisen à son chef d'état-major (pp. 90-95). Le document le plus
précieux est peut-être le Journal de la campagne de 1866, ou, pour être
plus exact, une relation de cette campagne écrite par un ami de von der
Tann et revue, corrigée, remaniée par le général ; on a là un exposé
bref et clair des « intentions et des motifs qui dirigèrent les mouvements
de l’armée de la Confédération en 1866 ».
Çà et là quelques anecdotes qui ont leur prix. Le grand-père maternel
du général, Louis Samson de Rathsamhausen-Ehenweiher était Fran¬
çais, (né en 1740 à Strasbourg) et inscrit sur la liste des émigrés ; 1 son
fils lui annonça la naissance de celui qui devait devenir « le général
von der Tann t en français et par ces quelques mots : « ma femme
vient d’accoucher d'un gros marmot » (p. 1). Une sœur de von der
Tann est mariée à un Alsacien, M. de Dietrich, de Niederbronn;
M. de Helvig rapporte qu'en 1 856 , von der Tann disait : « Ma sœur,
je ne viendrai te voir que pour te reconquérir » et que le 8 août 1870,
en se présentant sur le seuil de la maison, il s’écria: « Nous vous tenons
maintenant et ne vous lâcherons plus ! » (p. 140). La surprise de Beau¬
mont est tout à fait navrante; d’une hauteur, von der Tann et son
état-major aperçoivent au fond de la vallée des gens en manches de
chemise, des chevaux errant en liberté, pas un poste, pas une sentinelle,
et, à cette distance, on ne peut distinguer l'uniforme ;« le camp ennemi
offrait un aspect pacifique et vraiment idyllique; « enfants, dit von der
Tann, c’est un camp de bohémiens, mais pas du tout un camp de sol¬
dats » ; chacun prit tour à tour la longue vue; mais, comme on ne
voyait pas les postes les plus usités même dans un camp de plaisance,
on commença à douter, on soupçonna que ce pouvaient être des habi¬
tants de Beaumont, qui étaient venus dans le camp abandonné par leurs
compatriotes. Von der Tann se tenait sur le bord extrême de la hauteur
et attendait l'apparition de la cavalerie de l'avant-garde sur la lisière de
la forêt, de l'autre côté, plus près de Beaumont. Cette cavalerie devait
enfin l’éclairer sur ce camp énigmatique. Soudain éclate la cannonade :
« Voilà l'énigme résolue, s’écria von der Tann » (p. 144).
Il y a quelques fautes dans le livre de M. Helvig; lisez p. 181 Laval
et non « La Val », Cathelineau et non « Chatelineau »; pp. 192 et 193,
La Maladerie et non « Maladrie »; pp. 194 et iq5 Schloss (Goury) et
non « Chateau Goury » (de même Schloss La Touane et non « Châ¬
teau Touane 1); pp. 192 et 196 nous ignorions jusqu’ici qu'il y eut
un sous-préfet (Souspràfekt) à Orgères, qui n'est qu’un chef-lieu de
canton de l’arrondissement de Chateaudun. C.
1. M® # de Gérando, — M. de Helvig eût pu le rappeler — était une Rathsarahausen;
voir Lettres de la baronne de Gérando , Paris, Didier, 1880.
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o'HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
215
t8g. — Getehlclile de** Beobachtoog» Blnschlleflaung» Belagerang
und Beschlesiang von nézlère», von Spohr. Berlin, Vossische Buchhand-
lung (Strikker). 1880, v et 3 12 p.
L’inspection générale de l’artillerie allemande a fait rédiger par quel¬
ques officiers de mérite une « Histoire des sièges des forteresses fran-
çaisesdurant la guerre franco-allemande. » Cette histoire, qui comprend
plusieurs volumes, mérite d'être connue du public français et ceux de
nos lecteurs qui étaient, durant la guerre, enfermés dans une de nos
places fortes, nous sauront gré de la leur signaler. Le siège de Sois-
sons a été traité par le major Müller; celui de Longwy, par le lieu¬
tenant-colonel Wolf; celui de Verdun, par le lieutenant-colonel de
Hellfeld; celui de Belfort, par la capitaine Castenholz; celui de Toul,
par le lieutenant-colonel de Werder; les sièges de Schlettstadt et de
Neu-Brisach. par le lieutenant-colonel Neumann ; les sièges de Thion-
ville, de Montmédy, de Mézières, par le major Spohr. Nous avons sous
les yeux la relation du siège de Mézières, qui nous a semblé très minu¬
tieusement faite; Fauteur décrit d’abord la forteresse ; puis il raconte
l'investissement et le bombardement en cinq chapitres remplis de détails
techniques, et sans oublier les opérations de la division allemande con-
trelescorps francs des environs. Une suite d’appendices (listes d’effectif,
rapports, etc.) et cinq plans terminent l’ouvrage qui ne^ s’adresse, en
réalité, qu’aux hommes du métier, mais qui doit compter parmi les
monographies les plus consciencieuses et les plus complètes qui aient
été composées en Allemagne sur la guerre de 1870-1871.
VARIÉTÉS
Tliorenc» et non Thorane.
Voici une petite rectification qui intéressera vivement les amis et
commentateurs de Goethe. Le nom du lieutenant de roi, Thorane, doit
s'écrire Thorertc; c'est un descendant du comte, son petit-neveu, M. le
comte Godefroy de Montgrand de la Napoule, qui l’affirme et le prouve
dans une brochure intitulée : François de Théas, comte de Thorenc,
quelques mots à propos d'une erreur de nom dans les mémoires de
Gœthe » et dans une lettre personnelle où il a bien voulu nous confirmer
son dire et l’appuyer de nouveaux et irréfutables témoignages.
Dans sa brochure, M. le comte de Montgrand cite le passage des Mé¬
moires de Gœthe relatif àThorane et fait l’éloge de son grand-oncle, « ce
vaillant soldat dont la noblesse et la délicatesse égalaient la bravoure »,
1. Marseille, Société anonyme de l’imprimerie Marseillaise, Marius Olive. Tiré à
petit nombre. 12 pages.
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2l6
REVUS CRITIQUE
ce « chevaleresque fils de la Provence, qui ne voulait pas faire clouer
aux murs des appartements ses cartes géographiques dans la crainte de
gâter les tentures. » Il ajoute : « Pourquoi le nom de Thorenc a-t-il été
« écrit dans le livre Thorane et non point Thorenc? Il est à suppo-
« ser qu’il y a là une faute typographique, que Goethe n’aura pas eu
« l’occasion de corriger et qui se sera, par conséquent, perpétuée dans
« toutes les éditions du texte allemand. D’ailleurs, Goethe ayant écrit
« ses mémoires dans un âge très avancé, il est également possible que le
« nom du comte de Thorenc, altéré dans les nuages de ses lointains
«t souvenirs d’enfance, soit fautivement devenu le nom imaginaire de
« Thorane. Nous croyons toutefois devoir relever cette erreur de nom,
c afin que dans Pavenir elle puisse être rectifiée dans des éditions subsé-
« quentes... »
« François de Théas, comte de Thorenc, chevalier de l’ordre royal et
« militaire de Saint-Louis, d’une famille noble de Provence, naquit à
t Grasse le 19 janvier 1719. Il était fils de Jacques de Théas, seigneur
« de Caille,•Angles, Esclans et Penafort. Il fit ses études chez les Jé-
« suites, à Aix et à Marseille, et entra au service en 1734. Il fut d’abord
« lieutenant au régiment de Vexin, avec lequej il fit la guerre en Italie,
c Le i er mai 1758, il fut employé dans l’armée de Bohème et d’Allema-
t gne, commandée par le prince de Soubise et le maréchal de Broglie,
« comme aide maréchal général des logis, et il dirigea l’occupation par
« surprise de la ville libre et impériale de Francfort-sur-Ie-Mein.
« Nommé le 3 janvier 1759 lieutenant de roi de cette place, il ne
« exerça les fonctions (comme le dit Goethe) d’une manière si distinguée
« et surtout avec une délicatesse si scrupuleuse que le sénat, n’ayant pu
« lui faire accepter aucun témoignage de sa reconnaissance, sollicita en
« sa faveur, de l’empereur François 1 er , avec le consentement de la cour
<* de France, la dignité de comte du Saint Empire romain, transmissible
« à ses descendants des deux sexes. Le diplôme en fut expédié à Vienne
* le 21 janvier 1762. Nommé brigadier des armées du roi, le 27 dé-
« cembre 1763, le comte de Thorenc fut envoyé à Saint-Domingue
« pour y commander la partie du Sud; mais il n’y mourut point,
« comme l'a écrit Goethe. Revenu en France, il fut nommé lieutenant
« de roi à Perpignan, le i Cr janvier 1768; commandant de la province
« du Roussillon, le i er mars de la même année, et maréchal des camps
« et armées du roi, le 3 janvier 1770. Plus tard, sur sa demande, ayant
« obtenu sa retraite, il vint se fixer à Grasse et y épousa, le i 5 septem-
« bre 1783, M Uo Julie de Montgrand de la Napoule, dont il eut deux
« enfants : i° Jean-Baptiste de Théas, comte de Thorenc, chef d’esca-
« dron de cavalerie et capitaine des hussards de la garde impériale.
* chevalier de la Légion d’honneur, mort sans alliance en i 823;
« 2 0 Flore-Jacques-Joseph de Théas, comtesse de Thorenc, qui épousa
t à Grasse, le 4 mai 1808, Antoine-Marie-François de Paule-Barthé-
« lemi Tonduti, de la ville de Nice, comte de TEscarène et de Thorenc
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d’HISTOIRR RT DK LITTÉRATURK
2I 7
c en Provence, marquis de Blauvac dans le Cômtat-Venaissin, major
« général dans l’armée, et ministre d’Etat de Sa Majesté Charles Albert,
c roi de Sardaigne. Le comte de Thorenc mourut à Grasse, le i5 août
« 1794. »
Il faut donc dire désormais Thorenc et non Thorane, et, dans une
note de sa brochure (p. 9), M. le comte de Montgrand nous apprend que
Thorenc est un « ancien village enjre Cipière et Andon, qui faisait au¬
trefois partie du diocèse de Vence et de la viguerie de Grasse, et dont le
territoire forme une vallée assez étendue. Ce village, dit encore M. le
comte de Montgrand, était situé au-dessus de la ferme de la Vallette. Les
habitants sont nommés dans le pays les Tourrenquians . Le château qui
se trouvait au-dessus du village, sur une hauteur, était entouré de rem¬
parts de tous les côtés, excepté vers le nord, où le rocher taillé à pic le
rendait inaccessible. L’église du château était sur une plate-forme où
elle existe encore. Au nord, on voyait la paroisse, dont le clocher était
sur un arc bâti en pierres de taille. Ce lieu fut détruit par un incendie.
La montagne du pays, qui porte également le nom de Thorenc, offre de
bons pâturages pour les troupeaux, et les sources de ce lieu forment un
ruisseau qui va se jeter au Val-de-Roure. Le climat y est excessivement
froid, et le sol, qui en est bon, est fertile en blé et en poires. »
Ce qui nous explique la forme Thorane adoptée par Goethe et tous
les éditeurs et traducteurs de ses Mémoires, c’est qu on écrivait au siècle
dernier aussi bien Thorane que Thorenc. « Le comte de Thorenc —
nous écrit M. le comte de Montgrand, — comme tous les membres de
l'ancienne noblesse, avant la Révolution, devait signer son nom Tho¬
renc ou Thorane tout court ; à cette époque, les gentilshommes ne si¬
gnaient pas généralement avec la particule, et bien des gens ont pu et
dû ignorer que ce nom était un nom de terre. Tenez pour certain qu’il
n’y a jamais eu un comte de Thorane, mais bien un comte de Thorenc ou
de Thorane 1 ; mais la véritable orthographe du nom est Thorenc , avec
1. Vous pouvez consulter les ouvrages suivants, nous écrit encore M. le comte de
Montgrand. Dictionnaire de la noblesse , par de la Chesnaye-Desbois; 1" édition ;
Paris, 1757-1765. 7 vols, in-12, tome VI, p. 446; 2 e édition. Paris; 1770-1778,
12 vols, in-4 0 , tome Xll, p. 642. 3 * édit. Paris, Schlesinger frères, 1863-1877.
19 vols, in-4 0 , tome XVIII, colonne 890, 37* ligne. — Histoire héroïque et univer¬
selle de la Provence , par Artefeuil. Avignon. 1776-1786. 3 vols. in-4 0 . Voirie
tome II, p. 434, 3 1« ligne. — Etat militaire de la France pour r année 1767. Bri¬
gadiers d’infanterie, pp. 133-1763, 27 décembre : M. Je comte de Thorane servait
dans Vermandois, quand il est entré dans l’état-major général de l’armée en 1758;
il a été nommé commandant en second à Saint Domingue, depuis 1763 jusqu’en
1765. — Etat militaire de la France pour Vannée 1770. Comté de Roussillon.
Gouvernements particuliers. Perpignan : Le comte de Thorane, lieutenant de Roi.
Commandant dans la province, en l’absence du commandant en chef. — Année 1771 .
Maréchaux de camp, p. 127, M. le comte de Thorane a servi dans Vermandois et
dans l’état-major général de l’armée en 1758; commandant en second à Saint Do¬
mingue en 1763. Brigadier le 27 décembre, même anné. — Le comte de Thorane,
nous dit M. de Montgrand, figure jusqu’à l’année 1793 inclusivement, dans l 'Etat
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REVUE CRITIQUE
un e . Je possède un magnifique volume contenant tout Tétât civil de
ma famille depuis le xvn e siècle ; il renferme l’acte de baptême et l’acte
de mariage de François de Théas, comte de Thorenc ; Tacte de baptême
qui prouve que François de Théas est né à Grasse le 19 janvier 1719
et qu’il y a été baptisé le même jour dans l'église cathédrale et parois¬
siale de cette ville, est un extrait de Tacte original, de Tannée 1770, col¬
lationné par M. Mougins Roquefort, curé vicaire-perpétuel de la susdite
églisç; Tacte de mariage a été légalisé par le président du tribunal civil
de Grasse et renferme un fort joli portrait de l’époque, fait à la main, de
ma grand’tante Julie de Montgrand. Dans ces deux actes le nom est fort
bien écrit Thorenc . »
Cependant, M. deLoeper, dans sonexcellentcommentaire d eDichtung
und Wahrheit (IV, p. 235 ) assure que le comte de « Thorane » n était
pas né à Grasse, mais au château de Mouans, près de Grasse. « J’ai moi-
même, dit-il, visité au mois de décembre 1874 ce château de Thorane à
Mouans-Sartoux, mais sans trouver dans la riche collection de tableaux
du possesseur actuel une seule des œuvres des maîtres de Francfort,
dont Gœthe parle dans ses Mémoires. Le château est situé tout près de
la station de chemin de fer de Mouans entre Cannes et Grasse. » Nous
avons communiqué ce passage à M. le comte de Montgrand qui nous
répond : « Il faut avouer que ce commentateur a été mal renseigné.
D’abord, le comte de Thorenc n’est pas né au château de Thorane, mais à
Grasse. Ce château de Thorane n’est pas le véritable château de Tho¬
renc, qui est situé au-dessus de Grasse. Quant aux œuvres des maîtres
de Francfort, il n’est pas étonnant que M. de Loeper n’ait pu en trou¬
ver une seule dans ce prétendu château de Thorane, attendu qu’elles
n’y ont jamais été placées et quelles étaient bel et bien à Grasse, dans
deux maisons que le comte avait fait bâtir, Tune pour son frère et qui
était devenue la propriété de M. de Montmichel, l’autre pour lui-même
et qui a appartenu ensuite à sa fille, la comtesse de l’Escarène. J’ignore
où sont actuellement ces tableaux. »
Il ne nous reste qu’à remercier M. le comte de Montgrand d’avoir
restitué au nom de son grand-oncle, désormais inséparable de celui de
Gœthe, sa véritable forme. L’orthographe du nom du Kônigslieute•
nant est Thorenc ou, si Ton veut, Thorane; mais il faut préférer Tho¬
renc, forme que donnent les actes de l’état civil, les seuls faisant foi.
A. Chuquet.
militaire de la France . Il figure également dans Y Almanach royal , comme brigadier
d’infanterie, depuis l’année 1766 jusqu’à l’année 1770 inclusivement, et, comme
maréchal de camp, depuis l’année 1771 jusqu’en 1792 inclusivement; il est toujours
dénommé le comte de Thorane.
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D’HISTOIRE KT DK LITTÉR4TURK
219
CHRONIQUE
FRANCE. — M. Stanislas Guyard vient de faire paraître chez Maisonneuve la der¬
nière partie de la géographie d’Aboulféda traduite de l'arabe en français (in-4 0 , vm-
320 p.). Cet ouvrage, commencé par Reinaud et de Slane, était resté inachevé de¬
puis 1848. Le volume que publie M. Guyard contient la fin de la traduction et deux
index (index général et index des auteurs et des ouvrages cités dans les notes). Les
provinces décrites dans ce volume sont la Syrie, la Mésopotamie, i’irâq arabe, le
Khoûzistân, le Fârs, le Kirmân, le Sidjistân, le Sind, le Hind, la Chine, les îles de
la Mer orientale, l’Asie Mineure, l’Arménie, l’Irâq persique, le Déilem et le Gîlân,
le Tabaristân, le Khorâsan, le Zâboulistân, le Tokharistân, le Khârizm, la Tran-
soxiane.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 10 août 188 3 .
M. Maspero, conservateur du musée de Boulaq, donne des détails sur les fouilles
opérées sous sa direction en Egypte. L’exploration de la pyramide de Saqqarah a
été terminée et celle de la pyramide de Dakchour commencée. Cette dernière ne
paraît pas avoir de chambre intérieure ; on a cherché s’il n’y avait pas une chambre
mortuaire sous la pyramide, mais cette recherche n’a pas abouti jusqu'ici. On a
commencé aussi à fouiller les deux pyramides de Licht, qu’on avait dû négliger
pendant longtemps, par crainte des voleurs qui infestaient le pays. On a trouvé des
traces d’explorations anciennes, notamment des couloirs creusés par les Byzantins.
On est arrivé, dans l’une comme dans l’autre pyramide, à la chambre d’où semblait
devoir partir un couloir conduisant au caveau sépulcral ; mais, dans la première
pyramide, on a été arrêté par une inondation subite, et, dans la seconde, on a trouvé,
au lieu d’un couloir, un puits en partie rempli d’eau. On a suspendu les travaux
qu’on espère pouvoir reprendre plus tard.
L’académie se forme en comité secret.
Séance du 17 août i 883 .
M. R. Dareste, de l’académie des sciences morales et politiques, communique des
fragments de droit romain retrouvés en Egypte et récemment acquis par le musée
du Louvre. Ces fragments reproduisent des extraits des Reponsa Papimani , avec des
notes de Paul et d’illpien, et paraissent avoir fait partie d’une grande compilation
de droit romain, notablement antérieure aux travaux de Justinien. On trouvera le
texte de ces morceaux dans la Nouvelle Revue historique de droit français et étranger
de juillet-août i 883 .
M. Maspero continue sa communication sur les fouilles d’Egypte. A Thèbes, on
a commencé le déblaiement du temple de Louqsor. A Karnac, on a déblayé le pylône
d’Horus. Ce pylône a été construit avec des matériaux empruntés à un temple plus
ancien, attribué à Aménophis IV ; on y a lu une liste des peuples du Nord vaincus
par Armais (i8* dynastie). On a trouvé : à Deir*el-Bahari, les tombes de Horotpou
et de la reine Tmom, des ostraca coptes et grecs, de nombreuses inscriptions, dont
une de deux cents lignes, des tombes de brique voûtées, procédé de construction
qu’on ne croyait pas avoir été connu des Egyptiens de l’ancien empire; à Saqqarah,
trois tombes de la 6 a dynastie; à Edfou, des monuments coptes et de petits sphynx
grecs; à Philœ, un cimetière copte d’une cinquantaine de tombes.
M. Benlœw termine la lecture de son mémoire par les noms géographiques de
l’Asie-Mineure terminés en anda, etc.
M. Delaunay lit un mémoire de M. Robiou sur le Système chronologique de
M. Lieblein sur les trois premières dynasties du nouvel empire égyptien et le
Synchronisme égyptien de l'Exode, M. Robiou indique des raisons de fixer la date
de l’exode des Hébreux au milieu du xiv° siècle avant notre ère, sous Ramsès 111 ,
bis de Ramsès II ou Sésostris.
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220
REVUE CR1TIQUK O HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
Séance du 24 août i 883 .
M. Maury, faisant fonctions de président, annonce la mort de M. Defrémery, mon
bre ordinaire de l'Académie.
M. le D r Eugène Fournier commence la lecture d’une notice rédigée parM. Egacr
et par lui, pour le Dictionnaire des antiquités grecques et romaines de MM. Da-
remberg et Saglio, sur l’usage des couronnes chez les anciens.
M. Revillout lit en son nom et au nom de M. Krall, son collaborateur, un mé¬
moire intitulé : La vie (Tartiste et de bohème en Egypte . Ce mémoire contient, en
traduction française, un long extrait d’une satire égyptienne, dirigée contre un mu¬
sicien qui, au dire au poète, négligeait son art pour s’adonner à la bonne chère et
à la boisson.
M. Clermont-Ganneau donne quelques détails sur un manuscrit du Deutéronome,
en prétendus caractères moabites de neuf siècles avant notre ère, dont l'acquisition
a été proposée au Musée britannique et pour lequel on n’a pas craint de demander
un million de livres sterling (vingt-cinq millions de francs). M. Clermont-Ganneau
n’a pas été admis à étudier en détail ce manuscrit, composé d’une collection d’étroi¬
tes bandes de cuir; mais il lui a suffi de voir quelques instants une ou deux de ces
bandes, exposées dans une des vitrines du Musée britannique, pour reconnaître la
fausseté du manuscrit et se rendre compte du procédé employé par le faussaire. Les
bandes en question ont été obtenues en découpant la marge inférieure d'un de ces
rouleaux liturgiques hébraïques, de cuir, qu’on trouve dans un grand nombre de
synagogues et qui remontent pour la plupart à deux ou trois siècles. La largeur
des bandes, les traces de coutures, de plis, les lignes tracées à la pointe, qu’on y re¬
marque et dont l’espacement concorde avec celui des coutures, des plis et des lignes
tirées pour limiter les colonnes dans les rouleaux liturgiques, tout concourt à prou¬
ver cette origine. Du moment que le prétendu manuscrit moabite a été écrit sur des
fragments enlevés à des manuscrits modernes, il est clair qu’il doit être plus mo¬
derne encore.
M. Derenbourg s’associe à la conclusion de M. Clermont-Ganneau, en alléguant
des preuves philologiques tirées des parties du texte pseudo-moabite qui ont été
publiées récemment.
M. Cas tan lit une notice sur les Chroniques de Burgos, écrites en latin, entre
1 3 1 3 et 1327, par Gonsalve de Hinojosa, évêque de Burgos, et traduites en fran¬
çais, sur l’ordre de Charles V, par le carme Jean Goulain. 11 décrit un manuscrit de
la bibliothèque de Besançon, qui contient une partie de cette traduction.
M. Ledrain explique une inscription phénicienne gravée sur une pierre qui esc
aujourd’hui conservée au musée du Louvre,
Ouvrages présentés : — par M. d’Hervey de Saint-Denys : Severini (Anselmo),
les Curiosités de Yokohama , — par M. Le Blant : Blancard (Louis), la Notation
pondérale des patères d* Avignon , de Bernav, et la Livre romaine; — par M. Bar¬
bier de Meynard : Hitapadessa ou VInstruction utile , recueil d r apologues et de con¬
tes, traduits du sanscrit par E. Lancereau.
Séance du 3 i août i 883 .
MM. Desjardins et Schcfer sont élus membres de la commission des comptes.
M. Prou continue la lecture du mémoire de MM- Egger et Fournier sur les cou¬
ronnes chez les Grecs et les Romains.
M. Ledrain communique la traduction de deux textes sumériens, gravés l’un sur
une pierre de seuil, de diorite noir, l’autre sur une statue. Le premier se traduit
ainsi : « A Bagas, femme-ministre, fille d’Ana, dame de la résidence élevée, sa
dame : Namkinni, patéri de Sirpurla, son serviteur puissant, a fait venir pour la
porte la pierre de diorite. » Le second est analogue, mais il émane d’une autre pa¬
téri ou roi, Goudéa. M. Ledrain présente à ce sujet quelques considérations sur la
chronologie des patèris de Sirpurla.
M. Oppert fait quelques réserves sur certains détails de la chronologie proposée
par M. Ledrain.
M. Clermont-Ganneau signale quelques monuments phéniciens du musée bri¬
tannique qui lui ont paru dignes d’attention, notamment trois petites coupes de
bronze, qui sont omees à l’intérieur de dessins géométriques et qui portent cha¬
cune un nom en caractères phéniciens.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimei'ie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 23 ,
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in Preussen. — Rohlfs, Meine mission nach Abessenien. — Die indi-
schen Mineralien, ihre Namen und die ihnen zugehôrigen Kràfte Nara-
harisraganighantu varga XIII, sanskrit und deutsch hrsg. v. Garbe. (A
recommander non seulement aux indianistes, mais aux minéralogistes,
aux médecins, aux historiens de la civilisation.) — V. Henry, Etude
sur l’analogie en général et sur les formations analogiques de la langue
grecque. (Brugman : ne satisfait nullement ; l’auteur a entrepris sa
tâche sans s’y être suffisamment préparé ; son livre ne peut être re¬
commandé comme utile; cp. cependant le compte-rendu des thèses dans
la Revue critiqué). — Die Saga von HrafnkeldFreysgodhi, eine islândis-
che Geschichte aus dem X. Jahrhundert nach Christus, zum ersten Male
insdeutsche tibersetzt u. mit ausführl. Erlàuterungen hrsg. v. Lenk.
(Mauvais). — Kudrun, hrsg. v. Symons; Kudrun, hrsg. v. E. Martin.
(Concurrence regrettable; Symons offre beaucoup plus que Martin; in¬
troduction détaillée; point de vue plus indépendant.) — W. Mangold,
Molière’s Tartuffe. (Écrit qui, malgré quelques défauts, sera le bien¬
venu.) — Johannes Veghe, ein deutscner Prediger des XV. Jahrhunderts,
zum ersten Male hrsg. von Franz Jostbs. (Tout un volume de sermons
en bas-allemand, bien imprimés et commentés à fond.) — Lindemann,
Beitràge zur Charakteristik Bôttigers u. seiner Stellung zu Herder. (Des
choses nouvelles, mais trop long.) — Blackib, The wisdom of Goethe. —■
Gœthe’s Gedichte, II, p. p. Lokper, 2 e Ausgabe. — Nestlbhner, Das
Seitenstettner Evancelarium des XII. Jahrhunderts. — Hasselmann,
Initialen nach den Originalien des Herausgebers. — Rosenberg, Ge¬
schichte der modernen Kunst. I u. II Lieferungen. (Histoire de la pein¬
ture française de 1789 à 1851 ; fait avec beaucoup de soin et d'habileté.)
— Osthoff, Die Turnhallen und Turnplatze der Neuzeit.
Deutsche Litteraturzeitung, n° 35 , i ep septembre 1 883 : Nielsen, Aus dem
inneren Leben der katholischen Kirche im XIX en Jahrhundert, tibersetzt
von Michklsen. — Bôlliger, Antikant oder Elemente der Logik, der
Physik und der Ethik. — Firnhaber, Die nassauische Simultanschule.
— Bergaignk, La religion védique d’après les hymnes du Rigveda, to¬
mes Il et III. ( Garbe : grande indépendance de recherche et de juge¬
ment; le principal défaut du livre est le manque complet d’une concep¬
tion historique des hymnes védiques ; B. ne distingue pas les hymnes
anciens et les hymnes récents. Soin extraordinaire, méthode scientifi¬
que, ouvrage d'un homme très pénétrant et plein de talent, mais, mal¬
gré les nombreuses et utiles remarques répandues dans le livre, le tra¬
vail est manqué dans son principe). — Claudii Ptolemaei geographia
p. p. C. Müller I, 1. (Partsch : édition qui fait époque; originalité,
solidité, méthode exacte, soin extrême donné aux détails.) — Die pro-
saische Edda im Auszuge nebst Volsunga-Saga und Nornagetsthattr,
mitGlossar hrsg. v. Wilken. (Gering.) — Hosâus, Ernst Wolfgang Beh-
risch. (Minor : bon.) — Herder, Benjamin Franklins Rules for a club
etablished in Philadelphia, übertragen u. ausgelegt als Statut ftir eine
Gesellschaft von Freunden der Humanitàt, p. p. Suphan (Seuffert). —
Larroumet, Marivaux, sa vie et ses œuvres d après de nouveaux docu¬
ments. (E. Schmidt : monographie complète, avec des notes soignées;
prouve un savoir très étendu; parfois un peu diffus; fines analyses;
excellente bibliographie; travail à la fois très solide et très habile; les
gens qui déclament sur la science allemande et la profondeur allemande
de nos monographies, devraient étudier sur ce domaine l'admirable ac¬
tivité de nos voisins). — Miklosich, Beitràge zur Lautlehre der rumu-
nischen Dialecte. Consonantismus. II. (Gaster : travail d’un maître,
dont il faut le remercier sans réserve.) — Jahrbücher des frânkischen
Reiches unter Karl dem Grossen von Sigurd Abel, fortgeseizt von B
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Simson. II, 789-814. (Oelsner). — W. Bkrnhardi, Konrad III. I. n 38 -
1145. II. 11461 j 52 . (Lindner.) — De Lescure, Rivarol et la société
française pendant la révolution et 1 émigration. 1753-1801. (Kôrting :
travail digne de tous les éloges.) — Blümner, Laokoon-Studien, II. Ue-
ber den fruchtbaren Moment und das Transitorische in den bildenden
Künsten. (G. Hirschfeld.) — Ed. Hôlder, Institutionen des rômischen
Rechts. — Lehmann u. Schnorr von Carolsfeld, Die Njalssage insbeson-
dere in ihren juristischen Bestandtheilen. (Zorn.)
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 36 , 6 septembre 1 883 : von Pflugx-
Harttung, Iter Italicum, I. (Winkelmann : rapport sur un long voyage
en Italie, dans le dessein d’examiner dans les collections publiques les
documents des papes, jusqu’à la fin du xn 0 siècle.) — Leslie Stephen,
The science of Ethics. (von Gyzicki.)
RECUEIL
DE VOYAGES ET DE DOCUMENTS
POUR SERVIR
à l’histoire de la Géographie depuis le XIII e
jusqu’à la fin du XVI e siècle.
Publié sous la direction de MM. Ch. Schefbr, de l’Institut, et H. Cordibb
Tiré à 250 exemplaires dont 25 sur papier de Hollande .
I. JEAN EX SÉBASTIEN CABOT
Leur origine et leurs voyages. Étude d'histoire critique, suivie d'une cartographie,
d’une bibliographie et <rune chronologie des Voyages au Nord-Ouest de
1497 à 1550 . d’après des documents inédits. Par Henry Harrissb. 1882 ,
un beau volume grand in-8, avec un portulan reproduit en fac-similé par
Pilinski . 25 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 40 fr.
II. LE VOYAGE DE LA 8AIYCTE CYTÉ
DE BIÉRUSALEH
Fait l’an mil quatre cens quatre vingtz estant le siège du Grand-Turc à Rhodes,
et régnant en France Loys unziesme de ce nom. Publié par Ch. Schefbr.
1882 , beau volume gr. in-8. .. 16 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 25 fr.
III. UES COHTE-REAL ET LEURS VOYAGES
AU NOUVEAU-MONDE
D’après des documents nouveaux ou peu connus, tirés des archives de Portugal
et d’Italie, suivi du texte inédit d’un récit de la troisième expédition de Gaspard
CorJ,e-Real, et d’une carte portugaise de l’annéo 1502 reproduite ici pour la pre¬
mière fois. Par Henry Harrisse. 1883 , un beau volume gr. in-8, avec une photo¬
gravure et une grande carte chromolithographiée, en un étui. 40 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 50 fr.
FV. UES NAVIGATIONS DU JEAN PARMENTIER
Le premier et le second volume des navigations de Jean Parmentier. Publié par
M. Ch. Schefer. 1883 , un beau volume gr. in-8, avec une carte fac-similé . 16 fr.
Le même, sur papier vergé de Hollande. 25 fr.
Voyagé à bumatra, en 1529 . — Description de l’isle de Sainct Dorainigo.
Le Puy , imprimerie de Marche$sou fils, boulevard Saint-Laurent , 23.
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N* 39
Dix-septième année 24 Septembre 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DE MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt , /
- \
Prix d’abonnement :
\
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 2$ fr.
S PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
fil L icOLK DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES, ETC
28 , RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M . A. Chuqukt
(A u bureau de U Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
MÉLANGES ORIENTAUX
TEXTES ET TRADUCTIONS
PUBLIÉS PAR
LES PROFESSEURS DE L'ÉCOLE SPÉCIALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
A l’occasion du 6® Congrès international des orientalistes,
réuni à Leyde (septembre 1 883 ).
Un beau volume grand in-8 de 40 feuilles avec tableaux, hélio¬
gravures, etc. 25 fr.
RECUEIL DE TREIZE MÉMOIRES
PUBLIÉS PAR
MM, H. Derenbourg, Ch. Schbfbr, de l’Institut, Barbier de Meynard,
de l’Institut, P. Favre, A. Carrière, E. Miller, de l’Institut,
L. de Rosny, A. des Michels, L. Leger, E. Picot, H. Cordier,
J. Vinson.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 592, 8 septembre 1 883 : Seebohm, The English Vil*
t lage Community, examined in its relations to the manorial and tribal
Systems and to the common or open-field System ot husbandry, an essay
on économie history (Elton : clair et intéressant). — Harvey Goodwin,
lord bishop of Carlisle, Walks in the régions of science and faith, a sé¬
riés of essays. — Buck, Walk Witman (Dowden). — Vicente F. Lopez,
Historia de la republica Argentina su origen, su revolucion y su desar-
rollo politico hasta i 852 . 2 vols. (Markham : Fauteur est recteur de
TUniversité de Buenos-Ayres et il est connu par un livre sur c les races
indigènes du Pérou » ; ouvrage fait avec une méthode philosophique et
qui aura une valeur durable). — Upton, Uncle Pats Cabin, or life
among the agricultural labourers of Ireland. —The Shapira mss. of
Deuteronomy (M. Guthe a vu à Leipzig le fameux manuscrit cpie
M. Shapira lui a montré dans les cinq premiers jours de la première
semaine de juillet; il l'a copié, et il le publie dans un volume de 94pa-
f es intitulé « Fragmente einer Lederhandschrift enthaltend Moses, letzte
lede and die Kinder Israel’s *. Il conclut que le manuscrit est faux,
et, dans sa préface, datée du 14 août, observe que ses conclusions ont
été adoptées par MM. Nôldeke et Kautzsch). — The proposed Jordan
Canal (R. F. Burton). — An offer to bibliographes (Nicholson). —
The âge of Homer (Sayce).— Joseph and Osarsiph (Tomkins). — « The
prophecies of Isaian a (Cheyne).— Some books on buddhism. (Analecta
Oxoniensia, Aryan sériés, vol. I, part. I, buddhist texts from Japan,
edited by Max Müller; Hoey, Buddha, his life, his doctrine and his
order : trad. du livre de M. Oldenberg; Kern, Geschiedenis van het
buddhism in Indie; Senart, Essai sur la légende du Buddha, son ca¬
ractère et ses origines). — Hill, The Organ Cases and Organs of the
middle âge and the Renaissance (Mickethwaite). — The Hamilton
Dante. — St Helens church, Norwich.
The Athenaeum, n° 2qi5, 8 septembre 1 883 : Mc Master, A history of
the people of the United States from the Révolution to the civil war
(Le plan est le même que celui de l'ouvrage de M. Green c History of
the english people »; 1 exécution rappelle la méthode et la manière de
Macaulay; trop souvent confus et diffus). — Current économies : Wal-
ker, Political economy ; Stanley Jevons, Methods of social reforms;
Nicholson, Tenant’s gain not landlord’s loss; Milnes, Problems and
exercises in political economy. — A glossary of the dialect of Al*
mondbuiy and Huddersfield, compiled by the late Rev. Alfred Eas-
ther, edited from his mss by Lees (Utile). — Lenormant, A travers
l’Apulie et la Lucanie (Trop de digressions, mais bien attachant). —
Brosch, Lord Bolingbroke und die whigs und tories seiner Zeit. (Ce li¬
vre est plus une dissertation qu’une biographie et l’on n’y trouvera pas
le portrait de ce Bolingbroke, qui fut un composé d’Alcibiade et de Mi¬
rabeau, un brillant débauché, un grand orateur et un intrigant con¬
sommé; mais les faits sont exposés fidèlement; le livre a une grande
valeur). — The Shapira ms. of Deuteronomy (avec un fac-similé). —•
Ivan Serguéyevitch Tourguénief. — An offer to bibliographers jNi-
cholson). — The coming publishing season. — The Shapira ms. — The
common fields of England (Coote). — Perkins, Historical handbook of
italian sculpture (Mauvaises illustrations, mais recherches nouvelles,
style clair, belle ordonnance du sujet). — Excavations at Repton priory,
Derbyshire.
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 39
— 24 septembre —
1883
Sommaire s xgo. La Nîtiprakâçikâ et le Cûkranîtisâra, p. p. G. Oppbrt. — xgi.
Polak, L’Odyssée et ses scholiastes. — 192. Discours de la prise du château de
Saint-Malo, p. p. Joûon dbsLongrais. — xg 3 . Les Annonces Savantes de Francfort
de 1772, p. p. W. Scherer; Quatre poèmes critiques de Bodmer, p. p. Baechtold;
L’infanticide, de H. L. Wagner, p. p. E. Schmidt; Ephémérides et Chants popu¬
laires de Goethe, p. p. E. Martin; Gustave Wasa, de Brentano, p. p. Minor. —
Académie des Inscriptions. — Société des Antiquaires de France.
190. — Gustav Oppbrt. iVItlprakAçlkâ. Madras, Higginbotham and C°. London,
Trûbner and D°, 1882, 83 p. in-8.
-ÇakranltiaÂra.Vol. i. Text, variae lectiones, etc. Madras, Government Press.
1882, xxix-285 p. in-8.
Ces deux publications de M. G. Oppert traitent de la même matière,
la Nîti dans l'acception technique restreinte du mot, l'art moins de se
conduire soi-méme que de conduire les autres, c’est-à-dire la politique.
D'assez bonne heure, les Hindous paraissent avoir eu sur ce sujet quel¬
que chose comme une doctrine plus ou moins nettement distincte des
doctrines sœurs de la morale et du droit proprement dit et qu’ils nous
ont laissée en une double série d’ouvrages. L’une, qui se rattache par le
lien le plus étroit à leur poésie gnomique, est représentée par des livres
tels que le Pancatantra et l’Hitopadeça, où les leçons de l'expérience
sont ramenées à un cadre dramatique et mises, pour ainsi dire, en ac¬
tion. On sait quelle a été la fortune de ces livres dans lesquels les Hin¬
dous ont eu le rare bonheur de créer une forme restée typique dans
lhistoire comparée des littératures. Dans l’autre série d’ouvrages trai¬
tant de la Nîti, ils ont essayé, au contraire, de la présenter sous la forme
abstraite du traité ex professo, et là, il faut bien le reconnaître, ils ont
été infiniment moins heureux. Ils n’ont pas su en tracer une théorie
idéale, en la rattachant, par un lien vraiment organique, à leur morale
et à leur métaphysique. Ils ont réussi moins encore à en faire une véri¬
table science d’observation; car, pour cela, il leur aurait fallu avoir ce
qui leur a fait le plus défaut, le sens historique. Des préceptes d’un em¬
pirisme superficiel, des descriptions d’une certaine organisation politi¬
que et administrative qui seraient tout à fait précieuses si elles étaient
moins suspectes ; c’est là, avec beaucoup de hors-d’œuvre, à peu près
tout ce que donnent ces traités, où il ne faudrait pas chercher, même en
germe, la politique de Platon ou celle d’Aristote.
Ces expositions ex professo du Nîtiçâstra se trouvent éparses dans
Nouvelle série, XVI. 3 g
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ftEVUtf CRITIQUE
un grand nombre d’ouvrages. Sous le nom de râjadharma , le c devoir
des rois », elles forment un des sujets traités dans les Sûtras relatifs au
droit et à la coutume. De toutes, ce sont là les plus sobres et les plus
dignes de confiance. Sous forme versifiée, on les retrouve ensuite dans
les codes de lois proprement dits, tels que celui de Manu, et, avec de
notables développements, dans la poésie épique. Dans le Mahâbhârata,
qui y revieqt sopvçnt, pltjsjqm-s sections et, dans le npjnfcrç, de fort Ion:
gués, sont consacrées au râjadharma. Il en est de même de plusieurs
Purârtas, notamment de l’Agni-Purâaa, cette curieuse compilation où
l’on s'est visiblement proposé de donner la substance de toutes les dis*
ciplines officielles du brâhmaqjsme. Mais, outre ces compositions en¬
châssées dans des ouvrages plus étendus, les Hindous ont laissé un assez
grand nombre de traités spéciaux sur la Nîti, dont un seul, jusqu’ici,
avait été publié dans une édition commode et facilement accessible 1 2 3 .
Grâce à M. O., notre avoir, sur ce point, se trouve donc triplé.
La plupart de ces traités, à en juger par les relevés bibliographiques,
se présentent avec de§ attributions fictives, où pe serait pejnp perdue que
de chercher l’écho de quelque véritable tradition. Çe sont dos livres
nettement, intentionnellement apocryphes. Les uns, comme la Kâman-
dakîyaqîti, prétendent remonter à un personnage de l’époque historique,
iqais qui n'en appartient pas moins entièrement à la legende, Cânakya
Vishmigupta, le rusé ministre du premier des Mauryas \ Les autres se
réclament de quelque rishi ou autre être divin des temps fabuleux. Les
deux traités publiés par M. 0. ne font pas exception à cette règle géné*
raie. Lç premier, la Nîtiprakdçikâ , empruntant le cadre du Mahâbhâ¬
rata, raconte comme quoi elle a été communiquée jadis au roi Janame*
jaya par le rishi Vaiçampâyana. L’autre, le Çuhranîtisâra, se donne
pour l’œuvre de Çukra ou Uçanas, le précepteur des Asuras et le régent
de la planète Vénus. M. 0 . n'entend pas maintenir absolument ces at¬
tributions \ Il aurait dû aller plus loin et les donner nettement pour
ce qu’elles sont, des lieux communs sans la moindre importance.
Le premier de ces traités, la Nîtiprakâçikâ, est le plu9 court. 11 con¬
tient, en 55.7 distiques divisés en huit chapitres, une exposition abrégés
du Dhanurveda, de l’art de la guerre. Premier chapitre: Introduction,
Brahmâ communique au roi Prithu le Dhanurveda. — Deuxième cha¬
pitre: Description du Dhanurveda. Ce chapitre, qui rappelle certaines
allégories de la vieille littérature, a une physionomie assez archaïque et
pourrait fort bien être la paraphrase de quelque pariçish t*. Le Dha-
1. Le Kdmandakîyanîtisdray publié dans la Bibliotheca Indien par le babu Râjen-
draiâla Mitra. Calcutta, 1861.
2. C’est probablement au même personnage que prétendent se rattacher les ré¬
dactions actuelles du Pancatantra c\ de l’Hitopedeça.
3. Mais il ne les repousse pas non plus absolument, et U promet d’ew*încr un
jour ce qu’étaient ces Asuras dont Çukra était le guru. Il est à craindre que cet
examen n’aboutisse entre ses mains à des conclusions étrangement évhéméristes.
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
223
nijrveda y ,çsf décrit comme un être animé, avec l’énumération des di¬
verses armes qui composent ses quatre pieds. — Troisième chapitre :
Origine du glaive, créé par Brahmâ pour le châtiment des méchants.
Mémç observation que pour le chapitre précédent. — Quatrième et cin¬
quième chapitres : Description plus détaillée des armes énumérées dans
Je deuxième chapitre. — Sixième et septième chapitres. Organisation
de l’armée et tactique* Il y a là des détails intéressants sur la paie et les
récompenses des officiers et des soldats, sur les ambulances, les pensions
de retraite. Pans ce chapitre encore, à côté de beaucoup de fantaisies, il
y a des données qui paraissent anciennes. Ce qui est dit, par exemple,
des pensions de retraite, s'accorde mieux avec ce que nous pouvons en¬
trevoir des grandes armées permanentes des dynasties d’avant notre ère,
qu'avec l’organisation toute féodale des armées du moyen âge. On peut
observer que la YesisbMasmriti, xix, 20, contient des prescriptions sem¬
blables. — Huitième chapitre : Préceptes sur le râjadharma en général.
En fait de données externes sur la Nîtiprakâcikâ, nous n’en avons que
deux : u® e allusion au traité qui doit se trouver dans un certain Vikra -
markacarita, et l’ppipion d’un lettré indigène que Sîtârâma, fils de
Nanjunda, qui a commenté le traité, aurait vécu il y a de cela environ
3 pç ans. C’est bien ppu? comme on voit, pour d’aussi hautes préten¬
tions.
Ce peu même nous fait défaut pour l’œuvre suivante, la Çukranîti
Celle-ci est beaucoup plus longue : elle ne comprend pas moins de
2,579 distiques répartis entre cinq livres, dont le quatrième est, à son
tour, subdivisé en sept chapitres. L’auteur du traité a évidemment as¬
piré à épuiser la matière et l’on serait bien embarrassé de dire ce dont
il eeparj/epas, depuis l’administration gépérale du royaume, jusqu'au*
menus détails de la morale usuelle et de l'économie domestique, de¬
puis l'organisation de la justice et de l’armée jusqu’au prix des denrées
et â la confection de l’almanach. On trouvera là un manuel d’archi¬
tecture militaire, religieuse et civile, et une théorie de l’amitié, un
traité de diplomatique et des règles de calcul et de tenue des livres,
une classification générale des sciences et des arts et des préceptes de
jardinage» de physiognomie et de civilité. L’ordre n’est pas la qua¬
lité force de l’pujteur. M. O. a donné une analyse détaillée de l’ouvrage ;
mais, sauf les chapitres v-vii du quatrième livre, qui traitent de la jus¬
tice et de la guerre, il serait difficile d’en résumer le contenu. Mais l’en¬
semble est riche en détails intéressants et inattendus, et la traduction
que promet M. O. sera d'un excellent usage, d’autant plus que l’origi-
k. B n'y pas grand chose à tirer des mentions d'une Çukranîti qui se rencontrent
dans le Mahâbhârata, ni du fait que les vers cités là-bas se retrouvent dans le pré¬
sent traité. Çukra et Brihaspati sont naturellement des maîtres de la Nîti en leur
qualité de gurus des dieux et des Asuras, et les vers en question ne prouvent
qu'une chose, c'est qu’il y avait des maximes sur la matière qui avaient cours sous
leurs noms.
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REVUE CRITIQUE
224
nal n’est pas d'une lecture facile et qu’une infinité de passages exigent,
à défaut d’un commentaire indigène qui paraît manquer, une étude spé¬
ciale et attentive des traités similaires l .
L'âge approximatif d’une composition du genre de celle-ci ne peut se
déterminer que d’après les preuves internes, et l’on sait combien cette
sorte de preuves demande à être maniée avec prudence. D’abord, nous
n’avons, sur beaucoup de points, qu’une connaissance très imparfaite de
l’antiquité hindoue. Ensuite, nous savons que les témoins sont ici par¬
ticulièrement sujets à caution ; que tantôt ils reproduisent avec une
fidélité désespérante des choses qui, depuis longtemps, n’existent plus;
qu’ailleurs, s'il leur arrive de mêler des données nouvelles aux ancien¬
nes, ils se permettent aussi au besoin d’en inventer, et que, du mo¬
ment surtout qu’ils se mettent à énumérer, à diviser, à subdiviser, il
devient presque impossible de faire chez eux la part exacte de la tradi¬
tion, de l'observation et de la fantaisie. Je me bornerai à un seul exem¬
ple. La Çukranîti, I, 124 ss., donne une curieuse liste des titres affec¬
tés aux fonctions royales selon l’étendue de la domination. Parmi ces
noms, il y en a, comme virâj , qui ont disparu de bonne heure; d’au¬
tres, tels que nâyaka, ne semblent être devenus techniques que très
lard. La liste fait l’impression d'être moderne : en réalité, elle ne répond
exactement à aucune époque assignable, et, dans sa précision hiérarchi¬
que, elle est certainement imaginaire. Heureusement, il y a des données
qui nous laissent moins incertains. C’est ainsi que l’emploi du mot
horâ 2 nous reporte au plus tôt vers le iv® siècle de notre ère et que la
mention d’un Yâvanamata , de la religion des Yavanas, adorateurs d’un
seul dieu, c’est-à-dire des Musulmans, nous oblige de descendre encore
quelques siècles plus bas. M. O. ne veut pas en convenir et je lui ac¬
corde volontiers qu’à la rigueur et pris seuls, ces arguments, le dernier
surtout, admettent des échappatoires. Mais il en est d’autres qui les co-
roborent, tel que la mention faite en passant et à l’exclusion de tout au¬
tre procédé, de la numération décimale écrite, et les détails nombreux,
circonstanciés, je ne dirai pas sur l’emploi de l’écriture, mais sur la pa¬
perasserie administrative. Tout ordre, quel qu’il soit, important ou non,
du roi ou d’un de ses représentants doit être donné par écrit, et chacun
de ces actes a son nom particulier. Evidemment c’est là un tout autre
milieu que celui qui nous est représenté dans la vieille littérature. En-
1. M. O. a déjà fourni de bons matériaux pour cette étude dans les nombreux rap¬
prochements qu’il a réunis dans son Appendice. Seulement, il paraît avoir été dirigé
dans son choix par une préoccupation exclusive. Il a recherché, avant tout, les pas¬
sages parallèles . espérant établir par là l’ancienneté de l’œuvre. Il faudrait autre
chose encore. Je veux bien qu’on me démontre jusqu’au bout l'antiquité de la Çu¬
kranîti, mais je demande surtout qu’on m’aide à la bien comprendre.
2. La question n’est pas de savoir si topa est dans Homère, mais à quelle époque
l'astronomie toute grecque qui sert de base à l’astrologie du hordçdstra , a pu être
introduite dans l'Inde. Ce même mot se rencontre dans la Kûmandakiyanîti et suf¬
firait, au besoin, pour classer cet ouvrage.
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d’histoire RT DB LITTÉRATURE 225
fin, il est une dernière preuve qui, à défaut de toute autre, trancherait la
question : la mention des armes à feu. Cette mention est un peu obscure
dans le premier traité * ; mais, dans la Çukranîti, elle est d’une clarté
qui ne laisse rien à désirer. On y donne la recette de la fabrication de la
poudre à canon, et, si je comprends bien, IV, vii, 204, on y distingue
même le projectile creux du projectile plein. Ou ces passages sont inter¬
polés, et rien n’autorise à le croire, ou les traités sont modernes, le der¬
nier même très moderne : il n’y a point de milieu.
Malheureusement, ici surtout, M. O. devait fermer les yeux à l'évi¬
dence même. L'opinion, déjà plusieurs fois émise par lui *, que cette
sorte d'armes était en usage dans l’Inde ancienne, semble, en effet, être
devenue chez lui une conviction absolue, puisqu’il n’hésite plus à en
étendre le bénéfice jusqu'aux Hindous du Rig-Veda. On peut voir cette
démonstration étrange dans la préface de la Nîtiprakâçikâ, avec une
figure à l'appui, représentant une pièce de l’artillerie des rishis,
d’après les textes du Yajur-Veda 1 * 3 . Avec une foi aussi robuste, on com¬
prend qu'il n’ait pas été tenté de récuser ces deux traités qui, pour la
première fois, lui apportaient non pas des témoignages vagues, laissant
tout à faire à l'interprétation, mais des affirmations précises et sur les¬
quelles il n a est pas possible de se méprendre.
Je n’essaierai pas de convaincre M. Oppert. Pour cela, il ne me fau¬
drait peut-être rien de moins qu’une pièce notariée du temps certifiant
qu'on n'y tirait pas le canon. Je lui ferai observer pourtant que, depuis
le in« siècle avant notre ère, nous avons une série de relations écrites par
des étrangers qui ont visité l'Inde, dont quelques-uns y ont séjourné
longtemps, dont plusieurs y ont fait la guerre et dont pas un seul n’a
1. D'une façon explicite, il n’y est question que de la nalikd, le mousquet. La
description en est faite en deux çlokas: La nalikâ est droite, mince, noire, creuse
au milieu ; elle brise les membres et est la réalité même de Tare du fils de Drona
(lire çarîrinî?). Son usage ou maniement (gati) est triple : grahanam , dhmdpanam
et syûtam. Faut-il entendre par ces mots les actes de charger, de faire feu et de per¬
cer le but ? On a là un exemple entre mille de la nécessité d’un commentaire pour
l’intelligence de cette sorte de livres. La description est d’ailleurs maigre en compa¬
raison de celles que l’auteur consacre à l’arc et à la flèche (26 çlokas), au glaive (tout
un chapitre), aux armes mythologiques, telles que le vajra , le carreau de foudre
(6 çlokas), qui a 5 et 10 yojanas de long, et à certains engins fantastiques que M. O.,
à la suite de son auteur toutefois, appelle a les terribles armes en usage dans le
Kaliyuga » (entre autres des pots remplis de serpents venimeux; M. O. aurait bien
dû nous dire s’il prend réellement tout cela au sérieux). L’explication est sans doute
que, pour ces armes anciennes, l’auteur avait des descriptions toutes prêtes et qu’il ne
s’agissait que de les remanier pour les faire entrer dans son texte, tandis que, pour
le mousquet, semblable secours lui faisait défaut.
%. Dans un article du Madras Journal of Uterature for 18 79 et dans On the
Weapons, Army Organisation, and Political Maxims of the Ancient H indus, with
spécial reference to Gunpowder and Firearms . Madras and London, 1880.
3 . Le schéma est tout abstrait et réduit aux données essentielles. M. O. aurait pu
tout aussi bien, et sans risquer davantage, faire dessiner un canon Krupp du dernier
modèle.
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226
RKVÜE CfUTIQUB
rien vu ni entendu d’engins pareils, peu discrets pourtant de léur na¬
ture et aptes à faire quelque bruit. Poür tout juge non prévenu, ce si*
lence parle plus haut que des métaphores de poètes, des expressions
obscures, où l’interprète est embarrassé de sa liberté même ', et le té¬
moignage de quelques traités apocryphes qui peuvent dater d’hier. D’ail¬
leurs ces traités, comment M. O. ne l’a-t-il pas vu? flous montrent eux-
mêmes que ce sont lâ des nouveautés qui sorit venuês se superposer à ün
vieil art de la guerre. L’introduction des armes à feu modifie flofl-seule-
ment la tactique, mais la constitution même d’une armée. Or, pouf tout
ce qui regarde ce dernier point, nos auteurs en sont restés à l’ancienne
théorie du caturanga, de l'armée complète consistant en éléphants, eü
chars, en cavaliers et en fantassins.
Je ne veux pas prolonger cette discussion ni quitter M. Oppert sur ce
débat. Il m'est plus agréable de me séparer de lui ert le remerciant de
l'excellent service qu’il a rendu à nos études par la publication de cés
deux traités. Il a beaucoup fait, avec des ressources médiocres, et les ap¬
pendices où il a réuni les passages parallèles et les formes irr^ulières,
témoignent à eux seuls du soin avec lequel il s’est acquitté de ses de¬
voirs d’éditeur. Quand ces textes seront accompagnés chacun d'une
traduction (car la Nîtiprakîçikâ en mérite une complète aux mêmes ti*
très que la Çukranîti), quand il y aura joint de plus ün bon Index Ver-
borum, qui sera plus utile que la liste des formes irrégulières, car le
lexique y trouvera beaucoup à glaner, il aura accompli une œuvre des
plus méritoires, en dépit de ses théories sür la poudre à canofl. La cor¬
rection laisse à désirer, mais elle est supérieure, en somme, à celle qu’otl
est habitué à trouver dans les publications faites dans l'Inde, et elle
peut passer pour exemplaire, si on tient compte que ces volumes vien¬
nent de Madras, où l’on est plus habitué i imprimer le granthâ que le
devanâgarî.
A. Bàrth.
i. Il faut bien s’entendre. Si M.O. Se contèntàit de revendiquer pôuf 1 éi Hindou!
l’usage d’armes et de projectiles munis de feu, U ne trouverait guère de contra¬
dicteurs. Bien qu’un bon nombre des métaphores usitées chez les poètes S’expliquent
par lâ tendance à rapprocher les armes des héros de celles des dieux, dé Tartné ptf
excellence surtout, de la foudre, il est plus que probable que les Hindous se ser¬
vaient, en effet, d’armes pyrophores, et il se peut fort bien qUe la iûrmt du Ya/tir*
Veda ait été quelque engin semblable. En tout cas, c’est ainsi que l’a entendu le
vieux commentateur Bâskhara (si toutefois le passage est authentique ; car on sait
dans quel état nous sont parvenus les commentaires) et M. O. a parfaitement rai*
son d’écarter la signification de < chandelier » que donne le dictionnaire de Saint-
Pétersbourg. Mais ce n’est pas là la thèse de M. Oppert. Celle-ci consiste essentiel*
lement à affirmer l’existence de projectiles mus par l’Inflammation d’une substance
explosible, de fusées et de boulets de canon.
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D’HISTOltà fe* bk LlttÉRATÜRK 22 j
19I1 — Ad 01 ykAéâiti èjui<)ttfe «ébbllMtaé ctirœ ifeédiidcè) aeripsit
H. J. Polak. Leyde, J. Brill; 2 fascicules 1881-1882. In-8, vm-542 pp.
M. Polak donne enfin une suite, depuis longtemps attendue, à ses
Observationes ad scholia in Homeri Odysseam (Leyde, 1869). Les
deux fascicules qui viennent de paraître forment la première partie d’un
ouvrage qui comprendra tout ce qui concerne la correction du texte des
scholies de l’Odyssée et une histoire critique des grammairiens, lexico¬
graphes, etc., qui se sont occupés du poème. Cette première partie
offre un très grand intérêt et fait vivement désirer la seconde. On retrou¬
vera, dans le présent volume, quelques corrections proposées autrefois
par M. P. dans ses Observationes et, depuis, confirmées par la publica¬
tion des leçons du ms. de Hambourg [Rhein. Mus., 1878).
Il est malheureusement impossible d’analyser ce livre, dont les diffé¬
rentes fractions forment chacune un petit tout, l’auteur suivant l’ordre
des chants et des vers de l’Odyssée. Nous allons essayer cependant de
donner une idée de la façon dont il procède. Après avoir donné le texte
de la scholie en écrivant en caractères espacés les passages suspects,
M. P. discute les opinions de ses devanciers Buttmann> Dindorf, Cobet,
etc- *, il examine ensuite les variantes fournies par les mss., compare les
diverses interprétations qui se rapportent à un même passage, puis, lors¬
qu’il a bien mis en lumière ce qu’exige le sens, il énonce sa correction;
M. Pi ne s’est pas borné à interpréter et à corriger le texte de Dindorf,
il a abordé la question de l’origine des scholies et a recherché de quels
grammairiens, de quels philosophes elles représentent la doctrine.
Voici quelques exemples qui montreront le mérite de cette contribu¬
tion : p. 3 , Qd < 9 i f 252 , le texte de Dindorf donnait oôîef Çfjïèt xô*
xaiq choOufaeg &iAtX(atç eteoufJbévvjç èxl
Tiÿ xai xà xepi <!><*( a xaç à vadxeudcsopeÿ ,> dxb$ 0Jv
xat o&Xeuç xexXavtyjOai. Le ms. de Hambourg porte oâ 8 tX ÇYjretv; M. P;
adopte ce texte, corrige èxet to6t«$> t tp Xéftp xat tà xept xrX« et traduit :
Non oportet quœri, qui fiat ut Cyclops t cum tamen extra notum
terrarum orbem collocetur, communi (Grarco) sermone utatur . Hac
enitn ratione et quœ apud Pheaces aguntur nobis evertenda (sive re-
pudianda) erunt . Fieri etiam potest ut alii errantes ad etirri perve-
rint. M. P. justifie, par plusieurs exemples, cette façon d’entendre
Xéycp.
Pp. 5 o 2 *- 5 o 3 . M. P. défend la scholie sur les vers (Od., p) 160-161 :
èxel %a\ xp'tv eiaeXOsîv èv rjfj vvjt oiwvov eTSe en rappelant au lecteur les
vers ( Od.i 0) 499-555, qui prouvent que Télémaque et ses compagnons
étaient sortis du vaisseau. Il est naturellement partisan de l’athétéste. A
propos du même passage (p. 504), il montre qu’Hérôdien^ danfè ses ci¬
tations, ne tenait pas toujours compte des athétèses d’ArisWrque.
P. 27. Sur le vers 69 ( Od a), on Ht la scholie : Oûxfy 8è povéç 9 aX(Àoç
b K6xXü>^ xaO* V 0 pif]pov u>ç xaô’ 'HdoBov. «ttyai foüv xdfvxa 8é 0! pXé<pap’ dfjupl
xai ôçpuaç (« adde efaev àüTjjrç * Dind.) (Od., t, 389), où/ <*>Ç èséxpiTOç
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228
■BVUE CftlTIQUB
< cûvsxa [loi xXaTcîa (?) jxèv b^piç èxixavri peTtrxt^) * pové?6aXp.oç ouv ÿnuA
"OpTjpov, tou evc; aurou bçOaXpcu xporuoXtodévroç. Cobet a déjà proposé d'é¬
crire èzepfyOàkpcç cuv xtX. M. P. corrige en tête de la scholie oùx ope,
ce qui nous paraît très légitime. Cette particule apa conduit l’auteur à
nous parler d’une scholie du ms. de Hambourg sur le vers (Od x) 3 i 3 ,
où Ton voit Circé redouter le glaive d’Ulysse. On lit dans le ms. :
apa où xovrwç, aXXà tyjv Tpûotv ^oéetTat. Cette scholie paraît satisfaisante à
M. P. à la condition de meure une virgule après apa; il traduit donc :
Igitur mortalis est, non quidern tota, at in eo tamen quod lœdi re¬
for midat.
P. 3 i. M. P. défend une correction que Buttmann n’avait proposée
que timidement. C’est à propos du passage si connu de VOdyssée *,
216 :
... ou yip wS> ebv févov àvèrfHù.
Une scholie de Porphyre donne : où ydp xiç 81’ bauTOu xapà tou baurou xa-
xpoç tyjv xfoTtv lox^v* èvOaîe 8et xiXtv àxouoai, eî pri) xapà xaTpbç xuôax
xa\ cePaaTixwç èxîéÇatTO xbv Xéyov. Buttmann avait conjecturé xepl tou baw-
toù xaTpoç et d pàj xapà p.YjTpoç xuOotTO.
P. 35 , nous voyons une curieuse série de fautes indépendantes les unes
des autres. Il s’agit des Cyclopes : ’AXX* où8’ ?,oov x<£vtsç povéçGaXpor 00
•fàp àvéoTYjaev "OpYjpoç to TepaTeupia. ’A XX’ où8’ 6 üoXuçYjpAç p£véç6aXpoç
fl)v, xapà to t6xov I yt\ tyjv Oéotv tou èçOaXpou, eî xaTexXaatorjoav p.éf*v
tbovTeç (sic) èçO aXpté v, oùx èvexp&Ôvjoav èxi TYjpopç>vj # I8et yàp'Opij -
poç eîxévTOç
....*Hp.tv 8b xaTsxXdbfbj çCXov ^Top
8etodvro)V fov Te {iapùv oùt6v Te xéXwpov,
xpooexiÇeùÇat toi oùt6v Tôt* pouvév t* è^O aXpûv bv lovTa (sic) peTc&wp.
M. P. restitue (divinando, dit-il) àv è<j£-pQ<y€v; cette correction se peut
très bien défendre par la paléographie. M. P. met le second àXX’ entre
crochets (est-ce bien nécessaire?) et écrit xapdkoxov, puis £8et Yàp'Opijpcv
elxévra et TotoÙTév Tt. Enfin, remarquant que la fin de la scholie est une
imitation d’Hésiode (Théog., 144):
Moùvoç 8’ JçGaXpbç pioaq> èvéxetTO p^Ttbxa)
il écrit pouvov t* è^OaXpbv <piaa(j>> èveévTa picTdbxcp• Au lieu de pi^av îîov-
T6ç (sic) èçôaXpév, leçon de YEtymologicum Gudianum, on lit dans les
’ExipeptapoC d’Hérodien : to pifeOoç Kévreç è?9aXp.6v, mais èçôoXpoîî
dans Y Etymologicum Sorbonicum et dans un Baroccianus . M. P. écrit
Tb pifeOoç îîévTcç aÙTou, ce pronom se rapportant à oùxév te xéXu>pov. Le
voisinage de i^OaXpjoù explique la substitution, et pifav peut très bien
provenir de Tb pifeOoç; la supposition contraire serait inacceptable.
M. P. écrit enfin èvexpoTifjOYjaav.
P. 438 [Od. x, 514). KcoxuTéç : XéfeTat b xp&TOç xoTaphç b xbv Pporbvîe-
Xép^voç, tu>v dv8p(i)x(v(i)v xaOûv èx&vupav xaxév. EÎtc nupiçXrféôwv, yjtoi t 8 xup
Tb àçavCÇov Tb oipxtvov t&v PpoTwv. EÎTa b ’Ayéptov p£Tà Tbv KwxuTbv xat to
^ p(ov, 5xsp èçetX^j vexpûv èoTtv îax^î f^ veTat * P- noti s< fi t:
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DHISTOIRK KT DK LiTTéRÀTURK
229
« Scribendum : £txa 6 ’Axépwv <èirel> [xexà xov xtoxuxbv xal xb ^pfov, bxep
&pstXiq<|Aa}> vsxpûv èaxtv, a/jrj Y^vexat. Apparet etymologias hic captari
simulque allegorias. Invertit notnen suum, b Ktoxuxbç ab ejulatu mise -
rorum mortalium .A& tgTîé, quidquid in homine mortale est
consumit , 6 IIupiÿXeYéQwv nomen aperte traxit . Difficilior res èrat in
Acherontis origine indaganda. Commenti sunt igitur etymologiam
vere grœcam : 8x1 y( vsTat piexà xb ^ptov (àx— ’rçptav, iyè pa>v). Nous
souscrivons sans réserve à cette dernière partie de la correction. Mais
l’introduction de èxs( avant p^xà nous paraît discutable ; nous préfére¬
rions écrire piexà Y<*p xb; la disparition de Y«p entre ces deux mots est
beaucoup plus facile à expliquer. Enfin 89 siXyj ou ôçsfXvjpux vexp&v nous
semble bien suspect.
On trouvera encore dans cet ouvrage (p. 3o) une note très intéres¬
sante sur la suppression ou l'omission par les copistes des prépositions
dans les verbes et les mots composés; enfin, p. 127, des particularités de
la langue d’Hérodien. Des indices placés à la fin du second fascicule
rendent les recherches très faciles.
Dans le cours de son ouvrage, M. P. fait profession de recourir à la
divination (ars divinandi), qui lui paraît aussi nécessaire que des colla¬
tions bien faites pour guérir toutes les blessures qui ont échappé jusqu’à
ce jour aux critiques et qui sont plus nombreuses encore que les guéri¬
sons opérées. M. P. a donc l’air de croire que la correction des textes est
surtout affaire de sagacité. Nous croyons, pour notre part, que c’est sur¬
tout affaire de science. Et certes, M. Polak n’aurait pas fait une contri¬
bution aussi importante s’il n’avait eu que de la sagacité.
Alfred Jacob.
192. — Dltconr* apologétique ire»-verl table 9 de» cause» qui ont
contralnct le» habitant» de S* Malo 9 de s’emparer du chasteau de
leur ville t avec une brefve histoire de la prise d’iceluy, advenaé
le 1* de mar» 1 B 90 . Réimprimé par Alph. Le Roy, imprimeur breveté,
à Rennes, i 883 , publié avec une notice sur l’auteur du discours, par F. Joûon
des Longrais. Petit in-8 carré de 107-vn p., plus huit pages non numérotées
occupées par cinq pièces liminaires.
Voici le premier volume d’une collection de pièces rares ou iné¬
dites concernant la Bretagne, auquel les bibliophiles souhaiteront
la bienvenue. Dans ce volume, tiré à 110 exemplaires tous numérotés
et imprimé en beaux caractères sur magnifique papier, est reproduite
avec une irréprochable fidélité une pièce tellement rare, que l’on en
connaît seulement un exemplaire, celui de la Bibliothèque nationale l .
1. Encore cet exemplaire est-il incomplet. Nous lisons (p. 64, note 1) : a II
manque ici deux cahiers, c’est-à-dire 16 pages, dans l’exemplaire de la Bibliothè¬
que nationale (Lb 35 , 214), le seul que nous ayons pu découvrir. Nous les donne¬
rons dans la suite de cette collection, s’ils nous sont signalés ». Avis aux bons
chercheurs !
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REVUS CRITIQUE
2 30
La pièce a un autre mérite encore que son insigne rareté : elle est fort
curieuse au point de vue historique. L’auteur raconte en un langage
d’une savoureuse simplicité l 2 , et animé de temps à autre par de pitto¬
resques figures, un épisode mémorable de l'histoire de la Ligue en Bre«
tagne. Les détails les plus précis et les plus intéressants sont fournis par
le narrateur sur les circonstances de la prise du château de Saint-Malo,
prise dont il fut témoin oculaire et qu’il célèbre avec tout l'enthousiasme
du ligueur le plus exalté a . Le discours « fait voir comme en un ta¬
bleau, » pour me servir d’une expression de l’auteur (p. ioo), tout ce
qui précéda, entoura et suivit la journée du 12 mars 1590. Dans le
récit sont incorporés quelques documents peu connus, notamment une
lettre du gouverneur de Saint-Malo, Honorât du Bueil, seigneur de
Fontaines, écrite à Henri III, le 2 janvier 1389, au sujet du dramesan-
glant de Blois (p. 25-27), deux lettres du roi Henri IV à ce gouverneur,
du 3 août et du 16 septembre 1589 (p. 48, 49 et 5 o), enfin une lettre du
même gouverneur à Henri IV, du 12 octobre 1589 (PP- 5 o- 5 i). Les
deux lettres du roi Henri IV ne sont pas indiquées dans le recueil de
MM. Berger de Xivrey et Guadet, où l’on chercherait vainement aussi
la moindre mention d’Honorat de Bueil.
Pour donner au lecteur une idée de l’agrément qu’il trouvera dans la
lecture de l’opuscule que l'on a achevé de réimprimer le 23 mai i 8 $ 3 ,
je citerai deux passages où sont tour à tour glorifiés les chiens célèbres
de Saint-Malo et les femmes héroïques de cette ville (p. 93). — « Ce¬
pendant avant que passer outre, je ne veux oublier à dire, que deux des
chiens destinez à la garde de la ville, que l'on met hors d’icelle duiant
la nuict, estans venuz par où se donnoit l'escalade, combien qu’ils
soient tellement dressez et façonnez, qu'ils ne sçauroient voir ni ouïr si
peu de chose sans en donner incontinent advis aux sentinelles par leurs
abbois, si est-ce que voyans monter tout ce monde (non sans mener
quelque bruict de parolles ou autrement) jamais ils ne firent semblant
d'abboyer, ains ils s’arrestôrent la à requoy jusques à ce que tous fussent
montez ». — « Sur quoy il fault que je remerque 3 à la louange des
1. Il annonce lui-même (p. 5 ) que son discours a est tissu et tressé d’un style
simple, non fardé de quelque beau langage, ny embelli de quelque belle phrase de
rhétorique, telle que le mensonge cherche et demande pour cacher sa laide face
et vilaine turpitude ». Cf. les vers, en tête du volume, où Yautheur donne congé à
son livre .
2. Cette exaltation se manifeste à toutes les pages de la relation, et principale¬
ment à l’avant-dernière page où, à propos de la mort tragique du sieur de Fon¬
taines, hauteur se livre à la plus fougueuse tirade contre Henri IV qu'il appelle
« tyran hérétique, relaps et excommunié ». Croirait-on que même dans les notes
marginales, qui ont été scrupuleusement conservées par le nouvel éditeur, la colère
du ligueur se fait jour et qu'on trouve, par exemple (p. 3 q), cette note approbative,
laudative, à l’occasion de l’assassinat du roi Henri III par Jacques Clément : « Dieu
délivre Paris de la main du tyran par la mort violente, estrange et admirable d’i-
celuy » ?
3 . Je ne crois pas que Ton trouve beaucoup d’exemples, surtout à la fin du xvp siè-
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O’HISTOIRK KT DK LITTÆraTÜRK
23 I
femmes catholiques, qu’elles se monstrèrent si vertueuses, plaines de zèle
et de courage, d’amener d’elles-mêmes deux grosses couleuvrines du
dessus des ramparts de la ville jusques au plus hault lieu du cymetière,
' pour de la battre le chasteau comme il se peut faire, m’asseurant qu’il
eust failleu un très-grand nombre de chevaux pour enlever de la les
dictes pièces et n’y avoit autre chose à laquelle ses (s/c) honnorables da¬
mes ne s’employassent pour contribuer de leur labeur avec celuy de
leurs parents ou maris, en une conqueste de telle importance pour elles
aussi bien que pour les autres, s'esjouissant en Dieu de se voir délivrées
du déshonneur que leur préparoient les meschans... » l .
M. F. Jotion des Longrais nous révèle, dans la notice rejetée à la fin
du volume (p. i), le nom de l’auteur du Discours apologétique : c’est,
comme il le montre fort bien, frère Marcellin Cornet, théologal de
Vannes. Il a pu reconstituer en partie la biographie de ce moine (proba¬
blement Cordelier), en s’appuyant sur les recherches de M. l’abbé Luco
relatives au diocèse de Vannes (Bulletin de la Société polymathique du
Morbihan, 1874), sur l es Mémoires de Frotet de La Landelle et sur les
registres municipaux des archives de Saint-Malo. Il résulte des recher¬
ches de M. J. de L. que Marcellin Cornet, qui prêchait le carême dans
cette ville en 1590, contribua beaucoup par ses véhéments sermons à
décider les Malouins à s’emparer du château. Ce fut donc, en quelque
sorte, sa propre victoire qu’il célébra en racontant l’entreprise dont il
avait été Tardent promoteur. Son Discours fut presque aussi rapidement
composé que le château avait été rapidement enlevé : il était déjà im¬
primé avant le i 5 novembre 1590, époque où, d’après un registre des
délibérations de la ville de Saint-Malo, l’auteur avait déjà envoyé au
procureur syndic de la communauté 140 exemplaires de sa relation.
Nous apprenons encore que l’impression du petit in-4 0 coûta 36 écus
sol, que le lieu de l’impression fut Vannes 2 , et que l’imprimeur fut très
vraisemblablement Jean Bourrelier, dont on a dès cette époque deux
volumes du même format. Après avoir eu le mérite de découvrir le
nom de l’auteur du Discours , M. J. de Longrais n’a pas deviné avec
cle, de la forme remerque. Il ne faut pas songer ici à une faute d’impression. La
seule que Ton rencontre en tout le volume est un chiffre mis à la place d'un autre,
dans la note 1 de la page 111: 9 3 pour 97.
1. Il y aurait bien d'autres passages intéressants à tirer du Discours . Je me con¬
tenterai d'appeler l'attention sur un vif éloge de Paris (pp. 38 - 39 \ ainsi indiqué dans
le sommaire analytique mis à la marge : Bresve et succincte description des singu¬
larité f de la ville de Paris , et syr d’éloquentes invectives (p. 29) contre Henri III
profanant les corps des victimes de Blois, qu'il « a faict tronsonner, découper par
pièces, comme la chair à la boucherie, brusler et réduire en cendres, par les bour¬
reaux et exécuteurs de sa cruelle felonnie : leur déniant ce que les plus barbares et
infidelles n'ont voulu refuser à leurs plus grands ennemis après leur mort, hono-
rans leur mémoire d’une sépulture digne de leur grandeur ».
2. Le Catalogue de la Bibliothèque nationale (t. I, p. 362) indique à tort Paris
comme le lieu de l’impression. L'erreur a été empruntée à la Bibliothèque historique
de la France (t. U, p. 334, article 9238).
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REVUE CRITIQUE
moins de sagacité et de bonheur le nom des poètes qui, dans les pièces
liminaires, ont chanté le mérite du narrateur : déchiffrant le rébus des
initiales accumulées, il attribue les trois premières pièces à Pierre Mahé,
avocat de Vannes, poète qui figure dans la Bibliothèque franqoise de
La Croix du Maine, et la dernière qui est un fort mauvais sonnet, à Jean
Juhel, recteur de Guégon, conseiller du roi à Vannes, lequel fut le
personnage le plus influent du diocèse de Vannes pendant la Ligue.
T. DE L.
193. — DeaUcbe Utteraturdenltmale de* TL VIII* Jahrhunderts, in
Neudrucken herausgegeben von Bernhard Seuffert. Heilbronn, Verlag von
Gebr. Henni nger.
7 et 8. Frankfurter gelehrte Anzeigen vom Jahr 1772. Erste Hslfte. ln-8,
352 p. 2 mark 80. Frankfurter gelehrte Anzeigen von Jahr 1772. Zweite Hslfte
nebst Einleitung und Personenregister. ln-8, 353-700 et cxxix p. 3 mark 80.
12. Vier Kritische Gedichte, von J. J. Bodmer. ln-8, XLVI et no p. 1 mark20.
1 3 . Die Kindermœrderinn, ein Trauerspiel, von H. L. Wagner, nebst Scenen
aus den Bearbeitungen K. G. Lessings und Wagners. In-8, x et ii 5 p. 1 mark.
14. Ephemerides und Volkslieder von Gœthe. In-8, xx et 47 p. 60 pfennigs.
1 5 . Gustav Wasa. von C. Brentano. In-8, xiv et x 36 p. 1 mark 20.
Disons tout d’abord que ces six volumes nouveaux de la jolie collec¬
tion des t Monuments de la littérature allemande du xvm a siècle » se
recommandent, comme les précédents, par le soin minutieux que les
divers éditeurs ont donné au texte et à l'introduction qui précède ce
texte. Cette collection est décidément une des plus utiles qu’ait entre¬
prises dans ces derniers temps l’active librairie Henninger; nous com¬
prenons qu’elle ait un vif succès et que la librairie se soit résolue à pu¬
blier les volumes, non plus brochés, mais reliés.
Les volumes 8 et 9 renferment les Annonces savantes de Francfort
de l'année 1772. C’est une heureuse idée d’avoir publié au complet les
articles anonymes de cette Revue critique , à laquelle collaborèrent
Merck, Herder, Gœthe, Schlosser, etc.; les t gelehrte Anzeigen > de
Francfort ont été regardées par les contemporains comme la meilleure
revue qui ait paru en l’année 1772; tous les bons esprits de l’époque
ont loué l’impartialité de ce journal, la finesse de sa critique, la largeur
de ses vues, la vivacité et le mordant de son style. M. W. Scherer, à
qui nous devons l’introduction, a soigneusement rassemblé tous ces té¬
moignages des contemporains, parmi lesquels nous en trouvons d'iné¬
dits; il a montré les colères que la revue avait soulevées par sa fran¬
chise et sa juste sévérité; il insiste surtout, en citant tous les documents
à l'appui, sur la querelle du pasteur Goeze avec Deinet, l’éditeur du
journal; il prouve qu’à la requête de Plitt et de tous les prédicateurs
de Francfort qui représentaient les Annonces savantes comme « pleines
de phrases hétérodoxes et de propositions scandaleuses * (cp. le mot de
Gœthe « unsere Spektakels mit den Pfaffen » et celui de M m * de La
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O'HISTOIRK BT DR LITTÉRÀTORK
233
Roche « Pfaffen angepackt »), le conseil de Francfort enjoignit à Tédi-
teur de ne plus insérer d’articles de théologie avant de les avoir montrés
à la censure. A la fin de Tannée, les principaux collaborateurs du re¬
cueil se retirèrent, et désormais les gelehrte An\eigen ne firent plus
que végéter. En 1812, Goethe reçut de Fritz Schlosser les années 1772
et 1773 ; il les parcourut ; il trouva qu’elles donnaient une c idée com¬
plète de Pétat de la société qu'il fréquentait alors et de ses propres sen¬
timents » ; il y remarqua « l'effort qu'on tentait de rompre toutes les
barrières » (aile Begren\ungen \u durchbrechen), et plus tard, lorsqu'il
publia son édition de dernière main, il inséra les articles où il croyait se
reconnaître et qui lui appartenaient entièrement ou en partie ; ce sont
ses propres mots. Depuis quelque temps, la critique allemande étudie
attentivement ces articles, ces « recensions > des Annonces savantes de
Francfort qui figurent dans les œuvres complètes de Goethe ; elle s'ef¬
force de démêler parmi ces comptes-rendus, ceux qui sont évidemment
de Goethe et ceux qu'il s'est attribués à tort, car, comme le dit M. Sche-
rer(p. lxvu), lorsque le poète revit la collection du journal et y cher¬
cha ses articles, il fut guidé dans son choix, dans sa « reconnaissance »,
non point par le souvenir, mais par des conjectures philologiques ; sa
mémoire lui vint en aide ici et là, mais on peut prouver qu'elle le
trompa aussi. M. W. de Biedermann avait déjà, dans ses Gœthe-For -
schungen, que nous avons analysées ici-même, essayé de faire à Goethe
sa part véritable et authentique ; M. Scherer a repris naturellement,
dans cette édition des gelehrte Ançeigen, l’œuvre de M. de Bieder¬
mann, et, après une suite de démonstrations et de citations que nous ne
pouvons exposer ici, il arrive aux résultats suivants. Trois articles seu¬
lement peuvent être sans contestation attribués à Gœthe : l’art, sur les
poésies d’un juif polonais; l’art, sur la Vie et le caractère de Klotç,
par Hausen ; l’art, sur les perspectives de Véternité, de Lavater. Trois
articles qu’il publie sous son nom, ont certainement Merck pour au¬
teur ; l'art, sur la Théorie générale des beaux-arts de Sulzer; l’art,
sur les lettres d'Unzer et de Mauvillon; l’art, sur ïAlmanach des mu -
ses de Gôttingue> de Tannée 1773. En outre, Gœthe a inséré dans ses
œuvres complètes des comptes-rendus des Annonces savantes de Tannée
1773, et l’on sait que ni lui, ni ses amis n'ont collaboré au journal
après 1772. Enfin, il y a trois articles qu’il n’a pas admis dans l’édition
de dernière main, et qui pourtant, d’après les témoignages des contem¬
porains et le sien propre, lui appartiennent en toute propriété : l’art,
sur les idylles deGessner; Tart. sur l’opuscule consacré par George Ja-
cobi à la Vie de Klotz par Hausen; l’«Epilogue au lieu de la préface
promise. * Néanmoins, M. Scherer pense avec raison qu'« aucune de
ces recensions ne doit disparaître des œuvres de Gœthe ; elles doivent,
dit-il, y rester dans l’ordre que Gœthe leur a donné; ce que les éditeurs
voudront en retrancher, devra être signalé dans une préface, et ce qu'ils
voudront y ajouter, reproduit dans un appendice; car, à vrai dire, il
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EBVUB CRITIQUÉ
234
n*y a pas de limites à fixer à ces recherches sur Paüthenticité èt l'illégi-
timité d (pp. lxix-lxx). Il y aurait encore à relever plus d'une heureusé
découverte, plus d’tine fine remarque dâns cette intfoduCtioh dê
M. Scherer. Il détermine, autant qü’il est possible de lé faire, la part de
Herder, dé Merck, dé Jean Georges Schlosser. Il à divisé cette partie
de son étude etl deux parties : les témoignages et lés Suppositions > et,
après avoir vigoureusement démontré qu’il faut, avant toutes chose*, et
quoi qu'on ait dit tout récemment ( Gcethe-Jàrkbuch , IV, p. 36 o),$e
borner à l’année 1772, il fait lui*mérite ses a suppositions. » Il dressé
ufle liste de tous lés articles qui appartiennent oü sont attribués â Gcf
the soit par Goethe soit par les critiques de nôtre temps ; listé bien in¬
téressante, accompagnée de courtes indications bibliographiques, et qui
servira de Tummelplat\ à tous les jeunes philologues avides, torimledlt
M. Scherèr, de montrer leur sagacité. Attendoris-hous â tfri délüge
de conjectures, mais prertorts garde qu'à force de chercher èt dé scruter,
la part de Goethe aux Annonces savantes dè Francfort rie finisse pâr dé¬
venir trop forte. M. Scherer cède déjà à cette tendance conjecturale; ii
nous semble avoir raison sur quelques points. Il nous parait certâiû
que Goethe est l’auteur du petit article sur les deux paysages de Cl&udé
le Lorrain, p. 532 ; c'est bien le style de sa jeunesse; la fin du morcéatl
rappelle tout à fait le Waridertr ; on peut d’ailleurs se rdppéler l’adriai-
ration de Goethe pour lé Lorrain, qu'il recômriiandait aveC tant d’IriSî*
tance â Preller et doflt il louait le génie aimable et seféih [héitét, 1
muthig, liéblich . CoriV. avec Eckermaftri, III, p. 78); reiüarqtfoifê
aussi remploi du mot Ahndung, répété deux fois. Cest peut-être ce*
petits comptes-rendus artistiques que l’bn devrâit lè plus ètüdiéf *.
M. Scherer met le riôtn de Merck, avec üil pôiftt d’iritéfrogâtlôri, en te
gard du compte-rendu des poésies lyrlqüèS de RattileH C’est MerCk, èft
effet, qui a déjà parlé dans le jôurriâl du téctieil lyrique de Gcéttinguê,
et la comparaison de la maîtresse de la maison et de sà servante qui là
chasse (la muse allemande et la muse française, p. 577) se retrouve dans
une lettre de Merck (Wagner, II, *4). ***■ L’éditeur de lâ cbüecfloti,
M. Seuffert, a revu le texte des gelehrte Atiçeigen avec le plus grand
soin et une incroyable patience (voir son avatibpropos, pp. Xcvin-îcVfn)
et ajouté une table des noms dé personnes qui sera très Utile ; à côté du
nom défiguré de Patoniltet , il aurait fallu mettre Patouillet, car tel est
le nom qu’a voulu citer le critique (il mentîônne eri même temps
notte et La Baumelle).
Le volume 12 de la Collection, édité par M. J. Bâchtold, côrftlettt
quatre poèmes critiques de Bodmer, dont voici lés titrés : ï* Charaktet
det deutschen Gedichte; 2 0 Die Drollingerische Musé; 3 # Utitergang
der berühmten Nartên ; 4° Bodmer nicht verkanttt . Ces quatre poê*
1. Je serais porté à croire que Goethe en donna l’idée à ses collaborateurs, en leur
citat&t l'exemple du Mércufe dé Frdticé .
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D’HISTOIRE BT DB LITTÉRATURE
*35
mes, sur lesquels M. Bâchtold donne, dans son introduction, les infor-
mations les plus complètes, forment comme une petite histoire littéraire
du xviPet du xviu # siècle; les deux premiers, bien supérieurs au troi¬
sième et au quatrième par la correction de la forme comme par la sû¬
reté du jugement* méritaient certainement d’être réédités; le premier a
étéTobjet des plus Violentes attaques de Gotfsched et de son école, et, à
et propos, M. Bâchtold analyse longuement une des plus spirituelles
satirôs du xvîn« siècle, der deutsdhé Dichterkrieg, de SchWabe
(pp. x-xxxiv).
M. Erich Schmidt a publié dans le volume i 3 , d’après l’exemplaire
de l’édition originale que son àmi M. Henhing avait achetée à Stras¬
bourg pour un sou (p* rr), le texte de la tragédie de Henri Léopold Wa¬
gner, die Kinderrhërderinn. Nous espérons, comme le savant éditeur,
que cette réimpression sera favorablement accueillie par le public alle¬
mand ; « par la forme comme par le sujet, Y Infanticide de Wagrter
est, dans sa rudesse et ses excès, un exemple instructif du réalisme vi¬
goureux et génial de la période d’orage ; sa peinture de la bourgeoisie,
intéressante par ses Idées révolutionnaires comme par de pénétrantes ob¬
servations* et surtout la figure vivante du boucher Humbrecht font de ce
drame le précurseur de Cabale et amour ; enfin, dans plusieurs de ses
motifs principaux et secondaires, l’oeuvre de Wagner est Un cliché très
grossier de cette tragédie de Marguerite, que Goethe n’avait pas encore
publiée, mais que Wagner connaissait. * M. Er. Schmidt renvoie le
lecteur, pour tout ce qui Concerne la biographie de l’auteur, l'histoire
delà pièce et le sujet alors si complaisamment traité de l’irtfanticide, â la
monographie qu'il a fait paraître en 1879 (Heinrich Léopold Wagner
Gmhes Jugendgenosse . Iena, Ffommann) et dont nous avons rendu
compte dans cette revue. Il ajoute au texte de la Kindermôrderinn quel¬
ques extraits du remaniement dé Charles Lessing, la préface diffuse et
emphatique, le premier acté et un passage du troisième acte (iv é scène)
qui renferme d’évidentes allusions à l’état prussien et à sa puissance mi-
Htaifè; mais l'oeuvre de Charles Lessing n’est, comme la homme
M* Schmidt, qü'uh r farbloses Machwerk ». Wagner avait aussi re¬
manié sa tragédie ; hous en trouvons Ici la préface, la liste des person¬
nages avec l'indication précisé et détaillée dé leurs costumes strasbour¬
geois, et le dénouement transformé pour le contentement du public
(mariage d’Bvà et de Grôftidgseck).
Le volumé 14 de la collection Séüffert est édité par M. Erftest Martin.
Il renferme le9 Ephémérides dè Goethe et un recueil de chansons popu¬
laires. On sait ce que sont ces Ephéméfides : des t Excerpte », des no¬
tes prisés par Goethe à Strasbourg et à Francfort ert 1770 ét eh 1771,
écrites sur un cahièr dont elles remplissent 34 pages et qui, donné par
le poète à deStelh, possédé ensuite par le baron de Stein-Kochberg,
appartient depuis le mois de mai 1878 à la Bibliothèque de l’Université
de Strasbourg. Goethe a transcrit sur ce cahier des titres de livres, de
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236
RBVUR CRITIQUE
courts extraits de ses lectures, etc. ; dans les premières pages, il ne fait
guère que citer autrui et ajoute parfois ses propres jugements; dans les
dernières, il note souvent des observations et des remarques personnel¬
les, analyse assez longuement le Phédon et une ordonnance de Bâle
relative aux bonnes mœurs, jette sur le papier des locutions ou expres¬
sions alsaciennes qui l’ont frappé et quelquefois aussi des fragments des
œuvres qu’il projette, par exemple de son César . Ces Ephémérides
avaient déjà été publiées en 1846 par A. Schôll (Brie/e und Aufsàtye
von Gœthe ans den Jahren 1766 bis 1786, pp. 63-140), mais non telles
que les donnait l'original ; Schôll les avait rangées par groupes et par
ordre de matières. M. E. Martin a publié Toriginal tel quel, en conser¬
vant les abréviations, l’orthographe, la ponctuation de Gœthe. Dans
son introduction, il a reproduit au complet la plupart des titres des ou¬
vrages cités par Gœthe, et dressé une table alphabétique, sous des ru¬
briques diverses (philosophie, droit, médecine, histoire, poésie et art) des
livres que mentionne le jeune étudiant. M. Martin a eu soin, en même
temps, de marquer d’un astérisque les volumes dont Gœthe, à ce qu'il
croit, ne fait que citer le titre, sans les avoir réellement consultés. La
lecture de ces Ephémérides est très curieuse; Gœthe prend note d’ouvra¬
ges qui lui seront utiles pour sa dissertation de licence, mais les cita¬
tions de Paracelse, de passages relatifs à la magie, d’ouvrages de droit
et d’histoire du moyen-âge, prouvent qu’il pensait déjà et à Faust et à
Got\ de Berlichingen . M. Martin ne prétend pas tout commenter et
tout expliquer. Mais l’analyse du Phédon ne se rapporterait-elle pas à
cette vie de Socrate, que le jeune écrivain voulait alors « dramatiser »,
de même que celle de César et celle de Gôtz? (pp. 18-22.) Voici, en ou¬
tre, quelques additions à ses remarques.
Les vers tirés du Mercure de France se trouvent, en effet, dans le
volume de janvier ; ils appartiennent à une pièce qui commence le pre¬
mier volume et qui a pour titre « La vieillesse du sage . Epitre >.
(Pp. 5 -i 1); il y a dans le texte les agrémens et non « des agremens »,
alloient et non « alloit », sentoient et non « sentoit », se distrairez
non « se soustraire » qui n’offre aucun sens, gémissoient et non «c ge-
missoit », venoient et non « venoit *, ramene et non « rammene ». Du
reste, presque toute cette page des Ephémérides est tirée du volume de
janvier du Mercure de France de l’année 1770. L'amour paternelle
est une nouvelle en prose qu'on trouvera dans ce recueil aux pages
39-70; et les trois titres d’ouvrages qui suivent, sont les titres de trois
publications dont le Mercure rend compte aux pp. 94-103, io3-n6et
169-170. Le voyageur François, par M. l’abbé de La Porte (né à
Belfort en 1713, mort à Paris le 19 décembre 1799), est ce grand ou-
vrage, qui parut de 1765 à 1795, en 42 volumes in-12 0 sous le titre Le
voyageur François ou la connoissance de l'ancien et du nouveau
monde ; mais l'abbé de La Porte ne composa que les vingt-six premiers
volumes. Le Mercure rend compte (pp. 94-103) des tomes IX et X
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D'HISIOiRB BT DB LITTÉKaTÜRK
2 37
4l’auteur est arrivé dans le Canada; il fait connaître les peuples sau¬
vages qui habitent ce pays... il passe ensuite dans les colonies angloises,
dans la Louisiane, au Mexique ». L'art des expériences de l'abbé
Nollet (19 nov. 1700-25 avril 1770) a pour sous-titre : ou Avis aux
amateurs de la physique sur le choix, la construction et l'usage des
instruments , sur la préparation et l'emploi des drogues qui servent
aux expériences. 3 vols, in-12 0 . Paris, Durand. Goethe ajoute « pour
servir de suppl. aux leçons de physique. » L’article commence, en ef¬
fet, par ces mots : • Cet ouvrage est comme le supplément des leçons
de physique expérimentale de l’auteur. « (Ces leçons ont été souvent
réimprimées ; la première édition parut à Paris, chez Guérin, en six
volsin-12 0 , 1743 et ann. suiv.).
Enfin, c’est encore dans le Mercure de France, premier volume de
janvier, que le jeune étudiant a trouvé la mention du < Recueil des ou¬
vrages en serrurerie que Stanislas [roi de Pologne, duc de Lorraine
et de Bar] a fait faire pour la place royale de Nancy, [à la gloire de
Louis le Bien Aimé, composés et exécutés] par Jean Damour, son ser¬
rurier ordinaire, avec un discours sur l’art de la serrurerie, et plusieurs
autres dessins de son invention, dédiés au roi. Vol. in-folio, format
d’atlas. A. Nancy, chez l'auteur, rue Notre-Dame. A Paris, chez la
veuve François, graveur du roi, rue Saint-Jacques, à la vieille poste »
(p. 169). Evidemment, comme le pense M. Martin, Goethe eut un ins¬
tant l’intention de visiter l’intérieur de la France, et il comptait s’arrê¬
ter à Nancy pour y voir la place royale et ces grilles, dont parle le cri¬
tique du Mercure ; « il serait difficile à celui qui n'a pas vu les super¬
bes grilles qui décorent la place royale de Nancy, de s’imaginer jusqu’à
quel point le fer s’assujettit à recevoir les formes les plus agréables et
les plus variées. » — P. 14, ligne 19, « Iudicium de notis Scalig. vid
in Mélangés de Vigneul-Marville. Tom. III ». Ce jugement de Bona-
venture d'Argonne (Vigneul-Marville) sur l’édition de l'Astronomie de
Manilius se trouve dans le 3 e volume des Mélanges d'histoire et de
littérature , pp. m-114; « cet ouvrage, dit Vigneul-Marville, est de¬
meuré fort imparfait. 11 faudrait des Cassini ou des Maraldi, pour tra¬
vailler utilement sur un poème de cette nature, et Scaliger aurait mieux
fait d'abandonner cette entreprise... Feu M. Huet ne juge pas bien fa¬
vorablement du travail de Scaliger. Voici ce qu’il écrivit à Graevius en
i632, etc. » — P. 8, ligne 25 , on lit dans les Ephémérides : « Lemerys
Vegetatio oder Arborificatio Martis » etM. Martin commente ainsi (p. vu)
« Alchimistische Schrift > ; je ne crois pas que le mot alchimistisch soit
bien exact ; voici le titre du mémoire cité par Goethe et qui se trouve
dans le volume de l’année 1707 de l’Histoire de l’académie royale des
sciences, pp. 299-330 : « Réflexions et observations diverses sur une vé¬
gétation chimique du fer et sur quelques expériences faites à cette occa¬
sion avec différentes liqueurs acides et alkalines f et avec différents mé¬
taux substitués au fer , par M. Lémery le fils (il y a eu trois Lémery,
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RBVOB CRITIQUE
Nicolas Lémery, 1645-171 5 et ses deux fils, Louis Lémery, 1697-1743, et
Lémery dit le jeune, mort en 1721 ; tous trois furent médecins et chimis¬
tes; l'auteur du mémoire cité par Goethe est Louis Lémery). Les pre»
mières lignes de ce mémoire nous expliquent l'intérêt qu'il ayait excité
chez le jeune étudiant : a Quoique le mot de végétation ne convienne
proprement qu'aux plantes, cependant il est en usage parmi les chimis¬
tes pour exprimer certaines cristallisations particulières, dont la figure
extérieure ressemble sensiblement à celle de6 plantes ; c'est en ce sens
que je m’en suis servi, et que je me servirai encore du mot de végéta»
tion. J'ai déjà parlé dans un mémoire lu le i 3 novembre 1706 de la vé¬
gétation chimique dont il s'agit, et è laquelle je donnerai le nom d’ar-
bre de Fer ou de Mars , à cause de l’analogie qu'elle a avec une autre
végétation d’arbre appelée communément arbre de Diane , ou arbre
Philosophique ... Je remis à une autre fois un détail plus circonstancié
d'expériences et de raisonnements physiques sur cette matière. C'est ce
détail qui fait la principale partie du présent Mémoire, etc/». — P. i 5 ,
ligne 9, sur ce nom de Magog qui paraît seul 6ur une ligne, et que sui¬
vent les noms Baath et Finiusa Farsu, je ferai remarquer que le Mer¬
cure de France de février «770 rend compte d’un ouvrage intitulé
Anecdotes du Nord et dit (p. 80) : « Si l’on en croit le6 Suédois, ils
descendent de Suenon, fils de Magog , petit-fils de Japhet, et attribuent
la fondation d’Upsal à son frère Ubbon ». — P. 27, ligne 1, Gay
« gemauerter Platz, etc. » est évidemment le franç. quai et l'ailem. kai.
— P. 12, n'est-il pas curieux de retrouver cette citation de Thou, sur
l'esprit de Henri III qui s'irrite facilement durant la gelée, dans une let¬
tre écrite par Goethe à Schiller bien des années plus tard? t zu einer Z«it
wo ich recht begreife, wie Henrich III den Herzog von Guiseerchtessea
liess, bloss weil es fatales Wetter war »(II, Append. n 9 i 3 ). —Outre
les Ephémérides , le volume XIV de la collection Seuffert renferme des
chants populaires. Ces Volkslieder ont été également transcrits par Goe¬
the sur un cahier que possède aujourd'hui la bibliothèque de l’Université
de Strasbourg; en voici les titres : 1® Das Lied vom Pfal\grafen ; 2*
Dos Lied vom eifersüchtigen Knaben; 3 ° Das Lied vom Grafen
Friderich ; 4 0 Das Lied vom Herrn vom Falckenstein ; 5 ° Das Lied
vom verkleideten Grafen; 6® Das Lied vom Zimmergesellen ; 7 0 Das
Lied vom Lindenschmit ; 8° Das Lied vom Herrn und der Magd; 9*
vom braun AnneL Deux de ces lieds, le et le 4 e , ont été insérés par
Herder dans son recueil de Chants populaires. Ils avaient été recopiés
par Goethe et joints & une lettre à Herder que M. Düntzer a publiée dans
le premier volume de l'ouvrage intitulé « Aus Herder*s Nachlass »;
M. Düntzer les a en partie reproduits entièrement, en partie collationnés
avec l'édition des Chants populaires de Herder. M. Martin compare dans
son introduction le texte donné par son manuscrit avec le texte publié
par M. Düntzer et avec celui des mêmes lieds ou de lieds semblables que
renferme l’œuvre d'Achim d'Arnim et de Clément Brentano, Des Kna~
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D’HISTOIRB BT DB MTTBRATURB %3g
ben Wunderhorn ; il cite aussi les jugements portés plus tard par Gœ-
tlje sur ces « favoris de $a jeunesse • dans son compte-rendu du premier
volume du Wunderhom. De cet examen, il résulte que les variantes dç la
copie envoyée à Hçrder viennent, soit de l’inexactitude du copiste, soit
de 1 effort qu'il a fait pour donner au lied la forme du haut allemand ; et
te primitif, publié aujourd’hui par M. Martin, d’après le cahier de
Gopthe, se rattache manifestement à la tradition populaire « d’une façon
vraiment exemplaire et vraiment philologique » (p. xx).
Nous arrivons au XV® volume de la collection où M. J. Minor a re^
produit le texte du Gustave Wasa de Clément Brentano, d’après la
première édition de 1800. L’éditeur a eu bien soin de conserver les
fautes d’impression commises malicieusement par Brentano, mais U a
corrigé celles qui étaient involontaires. Une introduction détaillée était
jci fort nécessaire au lecteur; car tout le monde ne sait pas que ce Gus¬
tave Wasa est une parodie et une satire de la pièce de Kotzebue, Der
hyperÇoreisçhe Esel oder die heutige Bildung , qui était eile^méme une
parodie et la satire des Schlegel. M. Miqor prouve quu le Gustave Wasa
de Brentano a été composé sous l’influence des comédies de Tieck, et
particulièrement du Chat botté. JJ analyse finement le comique de
Brentano et montre que Gustave Wasa ne peut ét;re nullement com¬
paré à la satire de Guillaume Schlegel, la Porte de triomphe , et que
presque tout l'esprit n’y consiste guère que dans les jeux de mots [« der
Witxwird fast nur aus diesem Sàckel bestritten »). Une faute, légère,
il est vrai, c'est d’avoir cru que le prince de Conti, mis en scène par
Brentano, est l’auteur du Paragone délia poesia tragica d'Italia eon
quella di Francia* paru en 1732. Il s’agit d’Armand de Bourbon, l’au¬
teur du Traité de la comédie et des spectacles (réimprimé, il y a deux
ans, par M. K. Vollmôller à ia librairie Henninger), et dans la scène de
la bibliothèque de Weimar, où les œuvres de Kotzebue se disputent avec
les vieux classiques et les Pères de l’Église, il est facile de retrouver le
texte même d’Armand de Bourbon. Lorsque le prince de Conti (ou
Cpnty, comme écrit Brentano) prononce ces paroles 1 « Aile diese guten
Leute strafen zwar das Laster und belohnen die Tugend, aber das Mittel
reizt uns nie so sehr, als es das Gift gethan », p. 14, n’est-ce pas ia trar
duction de ces mots du Traité de la comédie •* * Le vice y est repris, çt
le vertu y est louée, souvent même récompensée; mais le remède y
plaît moins q\iç ne fait le poison t; ce vers est d’ailleurs cité en français
par Brentano. (Vollmôller, pp. 17 et 18.) A. C.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 7 septembre i&83.
M. Prou lit U firç du mémoire de MM. Egger et Fournier sur l’usage des couron-
nC M C ^ Z les ****** et chcz les Romains.
h commu nique quelques observations au sujet des très anciens étalons
cpaldéens de mesures linéaires qui nous ont été conservés sur les statues du roi
uoudéa. On remarque, sur ces étalons, une longueur d’une demi-coudée, qui équi-
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24O REVUE CRITIQUE DHlfcTOlRK ET DE LITTÉRATURE
vaut à o" 27. Cette longueur est divisée tantôt en six parties, tantôt en cinq, en
seize, etc.; ces divisions diverses doivent être des multiples d’une unité commune
très petite. M. Oppert indique des calculs d’où il conclut que cette unité devait être
1/2800 de la demi-coudée de 0*2 y, c’est-à-dire moins d’un dizième de millimètre.
M. Maspero, conservateur du musée de Boulaq, donne des détails sur l’organisa¬
tion du service des fouilles en Egypte et les ressources dont ce service dispose. Jus¬
qu'en 1878, il n’y avait pa6 de budget fixe des fouilles; la maison du khédive sub¬
venait aux dépenses et donnait, selon ses ressources, tantôt beaucoup, tantôt peu,
tantôt rien. Depuis 1878, un crédit régulier est alloué sur le budget du ministère
des travaux publics; bien que ce crédit soit insuffisant (il n’atteint pas 35 ,ooo ff.
par an, tant pour les fouilles que pour les achats d’antiquités), c’est quelque chose
d’avoir une somme fixe sur laquelle on peut toujours compter. Par suite de la mo¬
dicité des ressources affectées au service, on n’a pu faire entrer, dans le personnel
chargé de la conservation et de la recherche des antiquités, que trois employés
européens, tous trois à poste fixe, au musée de Boulaq. Les autres employés sont
des indigènes. 11 y a six inspecteurs (officiers de l’armée égyptienne) et vingt-sept
gardiens placés sous leurs ordres, tous chargés de veiller à la conservation des mo¬
numents et de signaler à la direction du musée les trouvailles qui viendraient à être
faites. Malheureusement les inspecteurs manquent de notions archéologiques et ne
savent pas discerner les monuments intéressants; ils ne peuvent donner aucune in¬
dication sur la nature et l’âge des objets dont ils annoncent la découverte. Pour
former un personnel oui puisse mieux le seconder dans l’avenir, M. Maspero a
réuni au musée de Boulaq cinq jeunes gens indigènes de quatorze à seize ans, qui
reçoivent un enseignement archéologique sommaire, comprenant des notions sur le
déchiffrement des hiéroglyphes et les caractères des divers genres de monuments
anciens qu’on rencontre en Egypte. Pour les fouilles proprement dites, elles sont
placées d'une manière permanente sous la direction de huit chefs de travaux indi¬
gènes, appelés reis ; plusieurs de ces chefs, employés depuis longtemps à la recher¬
che des antiquités, ont pris intérêt à leur tâche et s’en acquittent avec un véritable
zèle ; ils oht même acquis, par la pratique, des notions sommaires de la lecture des
hiéroglyphes, qui leur sont d’un grand secours dans le travail délicat dont ils sont
chargés. En ce qui concerne la conservation des monuments, M. Maspero ajoute en
terminant qu’il n’y a guère de tentatives de destruction à craindre de la part des
indigènes : ceux-ci ont compris que les antiquités attirent les visiteurs et qu’ainsi
un monument conservé rapporte plus d’argent qu’on n’en gagnerait à le dépecer et
à en vendre les morceaux. Les vrais ennemis des monuments, ceux dont on doit
craindre les déprédations, ce sont les marchands d’antiquités et les touristes.
L’Académie se forme en comité secret.
Ouvrage présenté, de la part de l’auteur, par M. Deloche : Falhbeck (P.-E.), la
Royauté et le Droit royal francs pendant ta première période de Vexistence du
royaume (Lund, 188 3 , in-8 0 ;. Julien Havbt.
SOCIÉTÉ NATIONALE D ES AN TIQUAIRES DE FRANCE
Séance des vacances.
M. le baron Dard est nommé associé correspondant à Aire-sur-la-Lys (Pas-de-
Calais).
M. l’abbé Thédenat communique le dessin de deux mosaïques trouvées à Ta-
barka (Tunisie) par M. le capitaine Rebora. La première comprend l’épitaphe delà
vierge Castula, la seconde, de la fin du v* ou du commencement du vi* siècle, repré¬
sente un évêque debout, devant un siège épiscopal, dans l’attitude delà prière.
M. l’abbé Thédenat communique, en outre, plusieurs inscriptions ae Tabarka,
également découvertes par M. Rebora.
M. Mazard place sous les yeux de la Société les photographies de sculptures
gallo-romaines provenant de Vittet (Vosges).
M. Flouest donne lecture d’une lettre de M. Morel, de Carpentras, signalant l’exis¬
tence, dans sa collection, d’un casque en bronze et de tout point semblable à celui
qui a été découvert, en 1882, à Breuvannes et qui a été grave dans les mémoires de
la Société.
M. de Villefosse communique, de la part de M. l’abbé Cérès, directeur du musée
de Rodez, le dessin d’une inscription romaine conservée dans la même localité.
Cette inscription, qui provient probablement d’une borne milliaire, est datée de
l’année 252 de notre ère.
M. de Villefosse signale également un cachet d’oculiste découvert à Reims dans
les premiers jours du mois de juillet i 883 et dont une copie lui a été adressée par
M. Demaison.
M. Duplessis lit un mémoire sur les différentes éditions de la Bible de Holbein.
E. Mûntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy t imprimerie de Marchessou JIls , boulevard Saint-Laurent, a 3 ,
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literarwches Centralblatt, n° 37, 8 septembre 1 883 : Martensbn, Aus
meinem Leben. I. 1808-1837, aus dem dànischen v. Michelsen. —
Reich, Die persônliche Entwickelung des Menschen u. die Civilisation
(Sans méthode et absolument sans gêne, attachant parfois). — Thiele,
Die philosophie Immanuel Kant’s nach ihrem systematischen Zusam-
menhange und ihrer logisch-historischen Entwickelung, I. — Jung, Le¬
ben u. Sitten der Rômer in der Kaiserzeit. I. (Petit livre qui se lit avec
agrément.) — Durmayer, Reste altgermanischen Heidenthums in un-
seren Tagen. (Compilation de choses non comprises ou mal comprises
et disposées confusément.) — Kong Christian den fierdes egenhàndige
Breve, p. p. Bricka og Fredericia. IV-V 1 . (Termine le 2° vol. des let¬
tres de Christian IV.) — Baumstark, Plus ultra, Schicksale eines deut-
schen Katholiken. 1869-1882. — Ferdinand Christin et la princesse
Tourkestanow. i8i3*i8i5. (Lettres publiées par le baron de Budberg;
elles ont été écrites de 181 3 à 181 5 par le Suisse Christin, ancien agent
de Calonne et de Catherine II, à une amie de Russie ; ne renferme rien
de bien intéressant; à peine quelques anecdotes sur la guerre et la so¬
ciété russe.) — Schmitz, Die Éussbticher und die Bussdisciplin der Kir-
che, nach handschriftlichen Quellen dargestellt. — Van Lys, Outlines
of basque grammar. (Petit livre de 52 pages consacré à la grammaire
d’une langue qui fourmille d’irrégularités; on croirait tout d’abord
qu’un pareil livre est un « humbug »; néanmoins, il atteint son but et
mérite beaucoup de reconnaissance.) — W. von Humboldt, Sprachphi-
losophische Werke, hrsg. u. erklàrt von Steinthal. I. — T. Livi ab
urbe condita libri, recogn. H. J. Mueller. V, Jibros XXIII et XXIV
continens. (Suite excellente de cette édition.) — Plauti Mercator, re¬
cens. Ritscfcl. editio altéra a G. Goetz recognita. (Nouveau présent de
Tactivité et de la sagacité de Goetz.) — A. Thomas, Nouvelles recherches
sur l’entrée de Spagne, chanson de geste franco-italienne. (Intéressant et
prouve d’une façon pénétrante et complètement convaincante que l’au¬
teur n’est pas Nicolas de Padoue, mais un Padouan anonyme, peut-
être Minocchio, et que l'œuvre fut continuée par un certain Nicolas qui
ne nomme pas sa patrie, mais qui doit être l’auteur d’une « Passion »,
Nicolas de Vérone.)— Passarge, Henrik Ibsen, ein Beitrag zur neues-
ten Geschichte der norwegischen Nationalliteratur. (Très attachant et
bien fait.) — Krause, Die Wissenschaft von der Landverschônerkunst,
hrsg. v. Hohlfeld u. Wünsche. — Abriss der skandinavischen Musik;
Waxel, Abriss der Geschichte der portugiesischen Musik, nach dem
franz. Manuscripte libers, v. Cl. Reissmann.
Deutsche Litteraturzeitung, n° 36 , 8 sept. 1 883 : di Viccenzo, Epimenide
di Creta e le credenze religiose dei suoi tempi. (Travail de dilettante,
insignifiant.) — Lindemann, Herder u. die Realschule unserer Zeit;
Beitràge zur Charakteristik Bôttigers u. seiner Stellung zu Herder.
(Suphan.) — Reinisch, Die Bilin-Sprache, I. Texte der Bilinsprache.
(Dillmann.) — Hübschmann, Armenische Studien. I. Grundzlige der
armenischen Etymologie. I. (Tomaschek : nouvelle théorie contre la¬
quelle semblent protester toutes les considérations historiques.) — Plo-
tini Enneades præmisso Porphyrii de vita Plotini deque ordine librorum
ejus libello ed. Volkmann. (H. F. Müller.) — Kleinschmit, De Lucili sa-
turanum scriptoris genere dicendi. (Léo : manque de connaissance, de
méthode et de jugement.) — Rockinger, Der Kônige Buch und der
sogenannte Schwabenspiegel. (E. Schrôder.) — Schneeberger, Das
Urbild zu Schillers Jungfrau von Orléans; Seuffert, Klein u. Schil¬
ler; Abert, Schlaf u. Traum bei Calderon. — Octavian, altfranz. Ro¬
man nach der Oxforder Handschrift hrsg. v. Volmôller. — Jullien,
La comédie à la cour, les théâtres de société royale pendant le siècle
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dernier, la duchesse du Maine et les grandes nuits de Sceaux, M" e de
Pompadour et le théâtre des petits cabinets, le théâtre de Marie-Antoi¬
nette à Trianon. Très intéressante contribution à l’histoire des mœurs.)
— Sickel, Das Privilegium Otto' I für die rômische Kirche vom Jahre
962 (Bresslau). — Wille, Philipp der Grossmüthige von Hessen und
die Restitution Ulrichs von Würtemberg 1526-1 535 (Kluckhohn :
nouveaux et attachants documents). — Rinhuber, Relation du voyage
en Russie fait en 1 685 , publiée pour la première fois d’après les manus¬
crits originaux qui se conservent à la bibliothèque ducale publique de
Gottha (Brückner : Rinhuber, saxon de naissance, était médecin et di¬
plomate en Russie; on trouve dans le volume la relation de son voyage
et 41 pièces concernant les rapports de la Saxe et de la Moscovie).—
Bôtticher, Auf griechischen Landstrassen. (Lolling : impressions de
voyage qui ont déjà paru dans des revues.) — Karabacek, Die Theodor
Grafschen Funde in Aegyptien : der Papyrusfund von el-Faijûm, die
textilen Gràberfunde. (Erman. conférence instructive.)
Theologische Literaturzeitung, n° 18, 8 septembre 188 3 : JoëL, Blicke in
die Religionsgeschichtezu Anfang des zweiten christlichen Jahrhunderts
mit Berücksichtigung der angrenzenden Zeiten. II. Der Conflict des
Heidenthums mit dem Christenthum in seinen Folgen für das Juden-
thum. (Harnack.) — Klimek, Conjectanea in Julianum et Cyrilli
Alexandrini contra ilium libros. (Neumann.)
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 37, 12 septembre 1 883 : Gorboducor
Ferrex and Porrex, a tragedy by Norton and Sackville, edited by
L. Toulmin Smith (Breymann : édition qui est presque un modèle ac¬
compli).
N° 38, 10 septembre 1883 : Thoma, Die Genesis des Johannes-Evan-
geliums (Weizsâcker : travail méritoire à beaucoup d'égards).
Athenaeum belge, n° 9, i5 septembre 1 883 : E. Renan, souvenirs d’en¬
fance et de jeunesse. — De Gerbaix Sonnaz, Studi storici sul contado di
Savoia e Marchesato in Italia nella eta di mezzo. (Ruelens). — Gbigbr,
Ostiranische Cultur im Alterthum (De Harlez : donne de l’Eran avesti-
que un tableau aussi fidèle que celui que M. Zimmer a tracé de l’Inde
de» Vedas; ces deux ouvrages devront marcher de pair). — Les langues
de l’Asie centrale (Ch. Michel : art. sur les travaux du P. Van den
Gheyn ; L’étymologie du mot Pamir. Les tribus de THindou-Kouscb.
Le Yidghah et le Yagnobi, étude sur deux dialectes de l’Asie centrale).
— L’Amérique découverte par les Irlandais cinq siècles avant Christo¬
phe Colomb. (J. Leclercq : à propos du livre de M. Anderson, America
not discovered by Columbus, an historical sketch ôf the discovery of
America by the Norsemen in the tenth century). — Publications alle¬
mandes.) Kühn, Die Révision der lutherischen Bibelübersetzung; Lüc*
king, Franzôsische Grçynmatik ; Andresen, Ueber deutsche Volksetymo*
Iogie; Tobler, Schweizerische Volkslieder; Der Messias pp. Munckk*;
Uthoff, La Chaussée’s Leben u. Werke; Mahrenholtz, Voltaire. "
Studien; Zeitschrift für neufranz. Sprache u. Literatur, V, t.
Le Puy , imprimerie de Marckessou fiis, boulevard Saint- Laurent, 23.
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MÉLANGES ORIENTAUX
TEXTES ET TRADUCTIONS
PUBLIÉS PAR
LES PROFESSEURS DE L’ÉCOLE SPÉCIALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
A l’occasion du 6° Congrès international des orientalistes,
réuni à Leyde (septembre 1 883 ).
Un beau volume grand in-8 de 40 feuilles avec tableaux, hélio¬
gravures, etc... 2 5 fr.
RECUEIL DE TREIZE MÉMOIRES
PUBLIÉS PAR
MM. H. Derenbourg, Ch. Schkfer, de l’Institut, Barbier de Meynard,
de Tlnstitut, P. Favre, A. Carrière, E. Miller, de l’Institut,
L. de Rosny, A. des Michels, L. Leger, E. Picot, H. Cordier,
J. VlNSON.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 5o3, i5 septembre 1 883 : Mrs. Oliphant, Sheridan.
(Caine.) — Scarth, Roman Britain. (Watkin : ce n'est qu’un manuel,
mais il est bon). — B. Ten Brink, Ëarly-english literature, translated
trom the german by Kennedy (Minto : trad. d’un excellent ouvrage, le
guide le plus satisfaisant qu’on possède pour cette période obscure de
l’histoire littéraire de l'Angleterre; on ne saurait croire tout ce qu'il
y a d’érudition dans ce petit nombre de pages). — Gibbs, British Hon¬
duras, an historical and descriptive account of the colony from its seule¬
ment 1670 (R. Brown.) — Rumânische Mârchen, übersetzt von Mite
Kremnitz. (Ralston : excellent recueil de contes populaires de la Rou¬
manie.)— Turgenev (Barker). — Dr. John Walker, Bentley’s coadjutor
(J. Wordsworth). — The name of Robin Hood(Bradley : rappelle le
nom d’un endroit du Worcestershire, Hôdesâc ou Hod’s oak, et d’un
autre du Nottinghamshire, Odesach). — The âge of Homer (W. Leat).
— Hâve animais mind? (Reader). — The chronicle of Joshua theSty-
lite, composed in syriac 5o7, with a translation and notes by Wright.
(Bensly). — Dr. Isaac Taylor's a the alphabet » (J. Lecky). — Dr. Abels
« Ilchester lectures ». (Morfill.)
The Athenaeum, n° 2 ^ 16 , i5 septembre 1 883 : Benn, The greek philoso¬
pher, 2 vols, (trop diffus et aussi trop tranchant). — Maxime Du Camp,
Souvenirs littéraires. —The voyage of the Wanderer, from the journals
and letters of C. and S. Lambert, edited by G. Yoüng. — A. F. Mit¬
chell, The Westminster assembly, its history and standards ; Scottish
divines. — Bendall, Catalogue of the buddhist sanscrit manuscripts in
the University library, Cambridge. — Archer, William Ewart Gladstone
and his contemporaries, fifty years of social and political congress. -
Tourguénief (Ralston). — Library association of tne united Kingdom.
The etymology of London (Browne : on peut peut-être accepter
«dinn » ou « dun », colline, espace fortifié, pour la seconde syllabe;
pour la première, on peut la découvrir dans les noms Lonan, dans l'Ile
de Man, Lonmay (Aberdeen), Lunan (Forfar), Luncarty (Perth), Lun-
din (Fife). — The coming publishing season. — The oriental congress
at Leyden. — Tapisseries de la cathédrale de Reims, reproduction en
héliogravure, texte par Ch. Loriqüet.
Literarisches Centralblatt, n° 38, i5 septembre 1 883 : Cross, Introduc-
tory hints of the english readers of the old testament. — Guthe, Frag¬
mente einer Lederhandschrift enthaltend Moses’ letzte Rede an die
Kinder Israël, mitgetheilt und geprlift, mit einer autographischen Ta-
fel. (Donne le texte complet du fameux fragment et un jugement porté
avec soin et qui n'est autre qu’une condamnation décisive ; « das Ge-
sammtergebmss ist ein vernichtendes •; sans voir l’original ni posséder
les connaissances techniques à ce sujet, ni même faire valoir des consi¬
dérations paléographiques, il suffit de remarquer l’orthographe dudit
manuscrit, qui montre une foule de fautes grossières. D’ailleurs le faus¬
saire ne connaissait qu’un peu la critique moderne du Pentateuque;il
n’était pas en état de faire un tout, un ensemble nouveau et limité en
soi-même; il dépend trop du texte hébreu habituel, quoiqu’il l’ait sou¬
vent modifié. Ce faussaire est évidemment un homme habile et qui a
du savoir ; mais sa tâche était trop difficile.) — Noiré, Die Lehre Kant’s
und derUrsprungderVernunft.—HosTiNSKY,Ueberdie Bedeutungderpra-
ktischen Ideen Herbart’s für die allgemeine Aesthetik. — Aug Mommsen,
Chronologie, Untersuchungen tiber das Kalenderwesen der Griechen,in-
sonderheit der Athener. (Quelques résultats peuvent être contestes,
mais l’ouvrage est utile, scientifique, et doit être recommandé.) — Epis-
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
H # 40 - 1" octobre — 1888
sommaire t 194. Pigeonneau et de Foville, L’administration de l’agriculture au
contrôle-général des finances. — 195. De Bernhardi, Frédéric le grand, général.
— Variétés : L. Havet, Un manuscrit de Pline le Jeune. — Thèses de doctorat
de JH. Albert : Les villas de Tibur au siècle d’Auguste et Le culte de Castor
et de Pollux en Italie. — Chronique. — Académie des Inscriptions.
/p4- — li’admlnlotratloi» de l’agriculture au contrôle général dea
Financée ( 17011 - 19 ®T). Procès-verbaux et rapports publiés par Henri
Pigeonneau, professeur suppléant à la Faculté des lettres de Paris, professeur à
l'Ecole des sciences politiques et Alfred de Foville, chef de bureau au ministère
des Finances, professeur à l’Ecole des sciences politiques et à l’Ecole des hautes
études commerciales. Paris, Guillaumin et C ie , 1882. In-8, xxxu-496 pp. 7 fr. 5 o.
A la veille de la Révolution fut institué, près du contrôleur général
des finances, un comité d administration d’agriculture, sorte de conseil
supérieur, destiné à éclairer le ministre sur les réformes les plus urgen¬
tes à apporter soit dans les procédés de culture, soit dans les impôts.
La mode était alors aux études de ce genre. Les physiocrates avaient
des élèves jusque sur le trône. Calonne était trop bon courtisan pour ne
pas feindre un vif enthousiasme en faveur de doctrines dont Necker
était l’ennemi et Marie-Antoinette la protectrice plus ou moins éclai¬
rée.
Le comité d’agriculture fut donc créé. Il était fort bien composé :
Veigennes, le neveu du ministre, en était président; Lavoisier, Dupont
de Nemours, un peu plus tard le duc de Larochefoucauld-Liancourt et
Lazowski en firent partie. Très compétents, très zélés, les membres de
cette assemblée se sont livrés à des enquêtes fort sérieuses sur les besoins
de l’agriculture ; ils ont écrit des instructions sur les procédés à intro¬
duire ou à généraliser en France. Les procès-verbaux de leurs réunions
que viennent de publier MM. Pigeonneau et de Foville montrent à
quel point ils prirent à cœur leur importante mission.
Mais ils ne furent ni soutenus, ni écoutés. Calonne, qui trouvait des
millions pour la cour, jugea qu’il avait fait assez pour l’agriculture na¬
tionale en donnant à des savants le droit de s’enquérir, comme ils pour¬
raient, de subsides : on ne put tirer de lui que la maigre somme de
3,ooo livres par an.
C’était vraiment bien peu pour organiser une correspondance, faire
les essais, imprimer des circulaires et vulgariser les recettes utiles. Aussi
te comité insista. Il demanda qu’il lui fût alloué sur le budget une sub¬
vention annuelle de 200,000 livres : • Le véritable restaurateur de l’a-
Nouvelle série, XVI. 40
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242 KKVUK pHITiQOfc
« griculture sera le ministre qui forcera ses successeurs de s’en occuper
* en plaçant dans leurs fonctions annuelles celle d'employer avec uti-
« lité les fonds qu’il aura formés pour son encouragement. Ce sera
« vous. »
Mais Calonne ne tenait pas à ce que ce fût lui. Il mit en avant, pour
refuser, une fort belle théorie. Il n’était jamais à court de sophismes. 11
en avait pour dire oui et pour dire non. Le comité dut s’ingénier et tirer
beaucoup de rien.
Ses principaux correspondants furent les curés, surtQUt ceux qiji dé¬
pendaient de l’ordre des Prémoqtrés. Il est curieux dç vpjr le§ rainas
qui firent rechercher ce concours. On ne pouvait pas s'adresser aux sub¬
délégués : « On ne peut obtenir de renseignements que par les curés;
« autrement, on jetterait la terreur dans Jçs campagnes * (p. 338). Telle
était la confiance dont était entourée l'administration français! L’E¬
glise, d’ailleurs, avait un intérêt direct aux progrès de l'agriculture « sur
a les produits de laquelle sont assises les dîmes, principale richesse du
« clergé. » Aussi se proposait-op de demander beaucoup aux curés.
Leur autorité était si grande 1 Leurs conseils seraient si facilement ac¬
cueillis! Combien de paroisses en France ou le prêtrç et le procpre^
fiscal du seigneur étaient seuls un peu instruits! f)e nos jours, c'$stà
l'instituteur qu'on adresse principalement circulaires et instructions.
C'est à lui qu’on dénonce les insectes nuisibles et Jes cryptogames fu¬
nestes. Il faut qu’il note, pour l’Observatoire, les hauts et Je? bas de U
température et les écarts de la girouette. Autres temps, autres hafîto -
des. On trouvait partout des gens d’pgüse; on n’aurait pas trouvé par¬
tout des maîtres d’écoje. La tâche entreprise par M* de Vçrgjennesçtses
associés était lourde. En somme, sous ce nom si modeste, c'était un vé¬
ritable ministère, mais un ministère sans lpcal propre, ce quj s’est Y u
souvent, sans budget et sans commis, ce qui pat plus rare. Les person¬
nages éminents qui composaient ce conseil faisaient eux-mémes l'office
de rédacteurs et d’expéditionnaires. Les hommes de ce temps-14
culaient pas devant la besogne quand il s'agissait du bien public*
« Aucune branche d’administration ne pourra être aussi utile auserr
« vice du roi, à la gloire du ministre, au progrès de la population et des
« richesses. Aucune cependant ne sera moins coûteuse, les tnepaht^^
« l’assemblée d’administration se trouvant suffisamment payés ^
« satisfaction qu’ils envisagent dans l'utilité et dans J'imporUW ^
« services qu'ils peuvent rendre » (p. 202 ).
Mais que d’obstacles ! Il fallait d’abord obtenir des société* d’agricul -
ture et des intendants qu'ils voulussent bien communiquer leurs réali¬
gnements. On se heurtait à la mauvaise volonté et à 4e fâcheuses
tudes d'esprit.
Les intendants voyaient d’assez mauvais œil cette organisation oou?
velle, ce bureau indépendant, étranger à la routine administrative.
là des résistances sourdes ou déclarées. Bertjer 4* §auviggy, ifttçpd# 0 *
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d’HISTOIRB BT DB LITTÉRATURE
243
de Paris, qui devait périr si misérablement en 1789 , répond à une cir¬
culaire du comité : € Il régne dans cette lettre un ton de sarcasme qui
- « n’a pas été agréable i rassemblée. • M. de Vergennes est obligé de
répliquer assez vertement, ce qui n’a pas dû adoucir l’humeur du puis¬
sant fonctionnaire.
L'intendant de Champagne, M. Rouillé d’Orfeuil, prend une ordon¬
nance pour empêcher un marchand de bestiaux d’accaparer les bêtes à
cornes du territoire de Langres. « Le comité a trouvé que la conduite de
< M. l’intendant n avait pas été suffisamment mesurée. » Et il se plaint
au ministre; il est probable que M. Rouillé d’Orfeuil trouva fort raau-
vais d’étre rappelé au respect des principes économiques.
L’administration avait ses habitudes et n’entendait pas les changer.
Ainsi, dans la plupart des provinces, on souffre d’une cruelle disette de
fourrages. Les bestiaux meurent par milliers faute d’aliments. On a
trouvé un procédé : c’est de hacher la paille et les plantes coriaces qui
poussent dans les marécages ; en les mélangeant avec un peu de foin et
en les saupoudrant de sel, on aura une ressource qui sauvera de la mi¬
sère d’immenses régions. Le roi n’y a-t-il pas un grand intérêt? Le co¬
mité n’a-t-il pas mille fois raison de dire : « Le royaume est une grande
« métairie que le roi fait valoir à peu près à moitié avec les propriétaires
« du sol, nobles ou roturiers, après qu’on a, comme de juste, payé les frais
■ d'exploitation ? • Pour soulager tant d’infortunés, que faut-il? Faire
fléchir un peu les rigueurs de la gabelle, accorder des secours en sel
(p. 39 ). a Malgré la contrebande possible, il faut donner, car la perte des
« bestiaux serait beaucoup plus préjudiciable à l’Etat. ■ Mais des rai¬
sonnements aussi simples n’étaient pas faits pour convaincre le fisc d’a¬
lors.
Et cependant le gaspillage du sel était effrayant. On jetait à l’eau le
sel marin séparé du salpêtre dans les raffinages, c Or, avec un quintal de
« ce sel, on obtient 90 livres d’acide marin (chlorhydrique) si utile pour
« le blanchiment des toiles. » La France était tributaire de l’Allema¬
gne, de l’Italie et de l’Angleterre pour les belles toiles de lin. Berthollet
avait inventé des procédés nouveaux pour blanchir les tissus de lin, et
l’introduction de cette industrie en France pouvait enrichir des provin¬
ces entières, surtout les pays pauvres. Avec ce désintéressement qui fait
l’honneur de grands savants et qui n’était pas plus rare de ce temps-là
que du nôtre, Berthollet abandonne au public sa découverte. Les agents
du roi persistent dans leur déplorable aveuglement.
Les sociétés d’agriculture, surtout celle de Paris, n’étaient pas dispo¬
sées à se soumettre à la tutelle d’une autre assemblée. L’esprit de corps
ne pouvait admettre une telle dépendance. Parmentier refuse de pren¬
dre part aux travaux du comité, et combien d’autres suivent cet exem¬
ple !
Toutes, il est vrai, n’écoutent pas les conseils de l’amour-propre, et
quelques-unes consentent à entrer en correspondance. Malheureusement
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RRVUK CRITIQUR
244
leurs mémoires ne sont pas toujours rédigés avec goût, a On ne veut
a pas présenter uniquement des faits; on veut y joindre des réflexions,
a les adapter à un système. On veut faire un ouvrage d'esprit. »
Le comité demande d’autres qualités à des instructions avant tout
pratiques destinées à des agriculteurs. Quel bon sens dans son langage!
cc Elles ne doivent contenir que des faits, et des faits bien prouvés, bien
« constatés, tels qu’ils ne puissent pas être autres dans les essais qui se-
cc ront tentés. Vérité, simplicité, clarté. Voilà les caractères nécessaires
cc de ces feuilles qui finiront, plus ou moins tôt, par produire beaucoup
cc de bien, par être lues et réfléchies. Celui qui saura lire instruira les
cc autres ; tous voudront savoir lire : ce désir impuissant pour les gens
cc âgés sera utile aux enfants, et le bien s’opérera » (p. 214).
Joignant l’exemple au précepte, les membres de l'assemblée rédigent
des circulaires, des mémoires et des rapports d’une admirable lucidité.
Qu'ils publient des recettes contre la carie des blés ou les ravages des
hannetons et des chenilles, qu'ils signalent les fléaux de l’agriculture
résultant de l’organisation sociale ou politique, ils s'expriment avec une
sagesse, une netteté qui n’excluent point l’éloquence.
On est parfois surpris de rencontrer, dans ces documents officiels, des
doctrines qui devaient paraître un peu bien révolutionnaires au minis¬
tre qu’ils étaient destinés à convaincre. Sous le coup de la déclaration
royale faisant « défense d'écrire et d'imprimer aucuns écrits, ouvrages
et projets concernant la réforme de l’administration et des finances >, le
comité appelle la taille un impôt inique, un reste de servitude; il atta¬
que le vingtième : « C’est une prime de découragement ! » Il ne ménage
pas plus le droit de parcours, la corvée et le carême et dit parfois sévè¬
rement son fait à l'organisation sociale de ce temps-là. Ecoutons cette
parole qui semble justifier à l'avance le fameux décret de la Convention
sur le maximum (p. 238 ) : « On ne peut se dissimuler que toutes les
<c lois qui fixent à Paris le prix des denrées ont été faites en faveur des
« riches consommateurs, mais que l'intérêt du peuple n’a point été con-
« sulté. »
Quels beaux projets, quels plans magnifiques sont élaborés par ces
patriotes : tantôt c’est une proposition pour l'établissement, dans cha¬
que généralité, d’un dépôt de toutes les productions minéralogiques qui
s’y rencontrent. Ces musées sont encore presque partout à créer. Tan¬
tôt ce sont des discussions sur l'établissement de la carte géographique
en France : il a fallu attendre jusqu’en 1840 pour que ces vœux fussent
réalisés. Ailleurs, il est question de créer des caisses de bienfaisance,
d’organiser le crédit agricole, de fonder des lycées d'économie politique
et rurale.
En vérité, quand on lit ces procès-verbaux, on est frappé de la gran¬
deur des projets de ces hommes de bien. « Tout est dit, » écrivait La
Bruyère en parlant des ouvrages de l’esprit. On peut appliquer cette pa¬
role aux réformes sociales et politiques; le xviii* siècle a agité tous les
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o’histoirr kt ûk littkk aturr
2.;5
problèmes et préparé toutes les solutions. Malheureusement les esprits
les plus éclairés n'étaient pas les maîtres. Ils constataient le triste état
des choses, indiquaient les remèdes et ne pouvaient les appliquer. L’ad¬
ministration les consultait parfois, pour la forme, provoquait des en¬
quêtes, des rapports, et c’était tout; et il ne pouvait en être autre chose :
tous finissaient par le reconnaître, et ces procès-verbaux publiés par
MM. Pigeonneau et de Foville le montrent suffisamment.
De tous côtés on se heurte à la taille, à la dîme, aux prohibitions.
On sentait trop bien que les petites réformes étaient impuissantes. Et
comment faire les grandes, puisque Turgot y avait échoué?
Les projets du comité ont fait moins de bruit de par le monde que
ceux du grand ministre; cependant ces papiers méritaient de sortir des
dossiers où ils étaient enfouis, et ils apportent un témoignage de plus à
l’appui de cette vérité que la Révolution était inévitable, nécessaire.
L ancien régime était à l’agonie : le mieux était qu’elle fût courte, et l’on
ne peut s'empêcher de souscrire à ces belles paroles du duc de La Ro-
chefoucault-Liancourt : a On ne peut concourir à cette administration
« sans être ému par l’aspect du bien immense qui se trouve à faire et de
« la nécessité de n'y pas perdre un moment. Une saison manquée perd
« un an et prive l’Etat d’un grand nombre de millions. »
Louis Bougier.
195. — Frledrlob der Growe, « 1 « Feldherr, von Theodor von Bernhardi.
Deux volumes. Berlin, E. S. Mittler und Sohn. 1881. In-8, x et 468 p. ; v et
647 p. 21 mark.
On s’est beaucoup occupé dans ces derniers temps de Frédéric II ; on
a étudié minutieusement ses principales batailles ; on a publié et com¬
menté ses instructions et son testament militaire l . Le gros ouvrage de
M. de Bernhardi, en deux forts volumes qui forment ensemble plus de
onze cents pages, a été écrit pour mettre en pleine lumière et dans tout
son relief le génie guerrier de Frédéric IL Frédéric le Grand , comme
général : tel est le titre du livre, et, d'après ces mots, on s’attend que
M. de B. commence son récit à la bataille de Molwitz, et nous montre
tout d'abord Frédéric dès les premiers jours dans les hésitations et
les tâtonnements de ses débuts, ou bien encore qu’il nous indique
les livres que le roi avait lus sur l'art de la guerre, les hommes qu'il
avait fréquentés ou dont il prenait les conseils, etc. Mais il semble
qu’aux yeux de M. de B., Frédéric II n’ait été qu’un novice dans l’art
i. Cp. les Miscellaneen j \ur Geschichte Friedrichs des Grossett, où a paru, par
les soins du major de Taysen, le Testament militaire du roi (1879) ; M. de Taysen
a publié aussi (1877) Friedrichs des Grossen Lehren von Kriegt und deren Bedeu-
tung für den heutigen Truppenführer .
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rkvob critique
246
militaire durant la guerre de la succession d'Autriche (ou, comme disent
les Allemands, durant les deux premières guerres de Silésie), et ni
Molwitz ni Czaslau ne sont cités dans l’ouvrage. M. de B. ne s’attache
qu’à la guerre de Sept Ans. N’aurait-il pu nous le dire sur la pre¬
mière page de son livre ? 11 était facile d’ajouter ces trois mots : itn si*
benjâhrigen Kriegè.
Selon M. de B., Frédéric II a beaucoup d'admirateurs, mais qui ne
savent pas l’apprécier à sa juste valeur ni comprendre entièrement les
principes qu’il appliquait à la guerre. En outre, même au temps du
grand roi, il existait dans l'armée prussienne une coterie d’officiers su¬
périeurs qui s’efforçaient de rabaisser la gloire militaire de Frédéric. A
la tête de cette coterie était le propre frère du roi, le prince Henri de
Prusse, le vainqueur de Freiberg, qui se regardait comme un plus
grand général que Frédéric et comme le véritable héros de la guerre de
Sept Ans. Les jugements sortis de ce cercle d'officiers n'ont pas encore
été complètement réfutés, et M. de B. a voulu réduire une bonne fois
au silence cette critique hautaine et dédaigneuse qui s’est exprimée parti¬
culièrement dans le Journal ( Tagebuch) inédit de Gaudi, dans les con¬
sidérations de Berenhorst sur l'ait de la guerre (Betrachtungett liber
die Kriegskutist ), dans la « Caractéristique des événements les plus
importants de la guerre de Sept Ans » de Retzow (Charakteristik dtr
wichtigsten Ereignisse des siebenjâhrigen Krieges) , dans un mé¬
moire de Kalkreuth inséré dans la Minerve d’Archenholtz, dans les pa¬
piers militaires {Militârischer Nachlass ) laissés par le comte Henckel.
Enfin, depuis les derniers travaux les plus remarquables sur la Stratégie
de Frédéric II, c’est-à-dire ceux de Jomini et de Clausetvit2, de nou¬
veaux documents ont été mis au jour, de nouvelles sources se sont ouver¬
tes, et il est permis de porter désormais sur le génie militaire du « vieux
Fritz > un jugement définitif.
Voici la thèse, d’ailleurs juste au fond, que soutient M. de Bernhardi.
Frédéric II n'a pas suivi dans la guerre de Sept Ans la théorie qui s’é¬
tait formée depuis le règne de Louis XIV, qu'il fallait à la guerre attein¬
dre autant que possible un but politique sans livrer de combat et sans
verser de sang; que le beau et le fin de l'art, c'était de faire de savantes
manœuvres qui ne coûtaient presque pas de victimes; qu’on ne devait
donner bataille qu’à la dernière extrémité, car une bataille était la plus
incertaine des ressources et la plus douteuse des chances, et le plus sou¬
vent elle ne terminait rien. Telle était la théorie que pratiquaient le
frère du roi, le prince Henri, et le duc Ferdinand de Brunswick; ils
n'aimaient pas, selon un mot de Westphal cité par M; de B. (i, p. 2i5)
à faire la besogne de vive force; vainement Frédéric II leur recomman¬
dait d'aller droit à l’ennemi pour le combattre, de lui causer autant de
mal et de pertes que possible, de lui tuer beaucoup de monde, de ne pas
lui laisser lieu de se reconnaître et de retourner en force, d’en venir aux
mains sans ménagement (I, pp. 212, 2i3, 214); Ferdinand de Bruns-
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D’HISTOIRB BT t>K LITTÉRATURE
2 47
wick écrivait ch marge de la lettre où le roi lui ordonnait de ne pas
permettre du* Français de c revenir de la bredouille * : t Quel f....
raisonnement est cela! » (I, p. 214). Frédéric II au contraire — et tout
le livre de M. de B. n’est qu’une démonstration de cette thèse —
rayait clairement que le grand point, c’était de gagner, non pas du ter¬
rain, mais la bataille même, et que pour tirer de la victoire le plus
grand profit, il fallait, non-seulement chasser l’ennemi du champ de
bataille^ mais le détruire complètement et, selon une de ses expressions
(I, p. 3 i f), frapper dé ces coups décisifs qui anéantissent les puissances.
Frédérie II semblé donc & l’auteur avoir dépassé de bien loin ses con¬
temporains ; M. de B. le loue d’avoir brisé le joug de l’école régnante,
reconnu le véritable caractère de la guerre, compris mieux qu’aucun
des capitaines de son époque, que la destruction de l’adversaire [die
Zertrümmerung der fèittdlichen Streitkrâfte , I, p. 16) devait être le
bot unique d’un général. Voilà pourquoi Frédéric voulait, selon le mot
ironique du prince Henri, toujours batailler *, pourquoi la plupart de
ses batailles de la guerre de Sept Ans ont été des batailles à outrance
( VemichtttHgsschldchten).
Il nous parait cependant que M. de B. exagère sa pensée. Il est bien
vrai que Frédéric a voulu, dans la guerre de Sept Ans — à quelques ex¬
ceptions près, que M. de B. reconnaît d’ailleurs — ne livrer que des ba¬
tailles décisives et qu’il n’attaquait le plus souvent l’adversaire que pour
le briser et le mettre en pièces. Mais suivait-il un plan déterminé et
absolu? Se disait-il qü’il fallait appliquer, coûte que coûte, la théorie qu’il
s’était faite èt né combattre que d’après les principes qu’il s’était posés ?
M. de B. tt’a pâS assez vu que la guerre des Sept Ans était une guerre ex¬
traordinaire, une guerre oti Frédéric ne luttait pas pour faire briller son
talent de gagneur de batailles, mais pour Sauver sa vie et son royaume. Il
était, comme il dit, dans les vers célèbres à d’Argens, menacé du nau¬
frage, et il se souciait peu de fehdre les vagues avec grâce; l’essentiel,
c’était de se débattre avec vigueur au milieu des flots et d’arriver au ri¬
vage à force de côuràge et d’habileté. En somme, il s’agissait peu de la
théorie dans cette guerre, que M. de B., a prise pour type de la stratégie
de Frédéric. Lfe roi rt’étrit-il pas à Algarotti qu’il ne se tire d’affaire que
par des à peu près ? S’il fut grand dans cette guerre de Sept Ans, c’est
moins par l’application des idées que lui prête M. de B. que par son in¬
fatigable activité, par son sang-froid, par son âme qui ne désespérait ja¬
mais au fort même de la détresse, èn un mot, par le caractère. « J’ai
trop d’ennemis », disait-il, avec l’accent de la lassitude, puis, Se repre¬
nant, et revenant à lui, ranimant son courage, se rejetant dans la lutte
avec une incomparable égalité d’âme, « cependant, ajoutait-il, avec un
peu de fortune de notre côté et un peu de sottise du leur, on peut en ve¬
nir à bout. » Evidemment, il cherchait à détruire l’adversaire (ver-
nichten , \ertrtimrnern, comme dit si souvent M. de B.); mais il ne
peut être question de la théorie, de la « grise » théorie dans ces terribles
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REVUS CRITIQUE
248
années où, selon une autre de ses expressions, il rassemblait toutes ses
forces et en donnait sur les oreilles aux uns après les autres, tantôt vain¬
queur, tantôt vaincu, luttant contre la moitié de l’Europe, et luttant pour
l’existence. Il importait peu à ce moment suprême de vaincre dans les
règles; il fallait vaincre à tout prix. Croit-on que Frédéric eût cons¬
cience d’inaugurer une méthode nouvelle ? Faites abstraction des guer¬
res anciennes qui ne cadrent pas avec les nôtres, écrivait-il au prince
Henri (I, p. 343 ) et envisagez ce qui doit arriver naturellement, selon
les projets des ennemis. Dans toute autre guerre que celle-ci, dit-il, en¬
core. (I, p. 345). II pense donc que la guerre où il est engagé est une
guerre où il faut agir un peu à l’aventure; c’est une c crise épouvanta¬
ble » où Ton doit tantôt reculer devant l’ennemi, tantôt « se mettre I
son dos et l’obliger à combattre ». Il ne faut pas voir seulement dans
le Frédéric II de la guerre de Sept Ans ce que veut voir uniquement
M. de B., un esprit puissant et indépendant qui se crée son propre
point de vue, qui voit tout de plus haut et avec un regard plus étendu,
qui pénètre au fond des choses plus profondément que la foule des sa¬
ges (I, p. 3 ) ; mais il faut se dire aussi que Frédéric ne pouvait agir au¬
trement, et qu’il a combattu en désespéré. Il s'agit de l'Etat, écrivait-il
à son frère, et je le sauverai ou je périrai. (I, p. 385 .)
M. de B. a, dans presque tout son ouvrage, opposé les deux frères
l’un à l’autre. Il montre comment, à chaque instant, à chaque incident
de la guerre, le roi et le prince différaient d'avis. Il prouve que presque
toujours Frédéric avait raison et que l’issue de l’évènement donnait tort
au prince Henri. M. de B., lui aussi, livre à ce prince une Vernichtungs •
schlacht; il l’écrase sous les arguments et les faits; il lui reproche d’a¬
voir, à diverses reprises, traversé les desseins du roi et exercé sur les
évènements une influence incommode et dangereuse; il le blâme rigou¬
reusement de n’avoir pas su pousser ses avantages et de s’être trop souvent
contenté d’un demi-succès. Mais la correspondance des deux frères que
M. de B. cite fréquemment, ne fait que démontrer ce que nous disions
plus haut. On y voit que le prince Henri croyait toujours avoir fait
ce qu’il était possible humainement de faire (I, p. 345) et craignait à
tout moment de ne pas tenir; Frédéric au contraire tenait bon jusqu’au
bout avec une inébranlable fermeté; il ne pensait jamais avoir fait tout
ce qui était possible et comptait encore faire l’impossible ; il demeurait
hardi, prêt à tout oser, avec le courage du désespoir : « Vous ne voulez
jamais rien hasarder, écrit-il au prince Henri, il faut prendre des partis
vigoureux, quand on pousse la circonspection trop loin, elle devient
timidité; remettez votre esprit; que la tête ne vous manque point », et
encore « en toute guerre qui se fait avec des forces égales, votre système
comme le plus sûr, doit être préféré au mien ; mais nous n’avons que
deux armées et nous en avons quatre contre nous; il faut se défendre
d’une pour courir à l’autre, et compasser le temps pour que les armées
puissent paraître doubles. » (II, p. 321.) Il est vrai que Frédéric parle
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d’histoirk KT DK LITTÉRATUHK
249
ici de son système; mais est-ce un système que de courir au plus pressé
et, selon le mot du roi, de faire la navette? Est-ce le système que
M. de B. prête à Frédéric ?
Ce n’est pas que le prince Henri n’ait eu parfois raison. M. de B.,
emporté par son enthousiasme pour Frédéric II, a été peut-être trop sé¬
vère pour le vainqueur de Freiberg. Frédéric II ne ménageait pas son
frère; il savait que tout ce qu'il ordonnait était amèrement critiqué par
Henri et son entourage ; mais il savait aussi que Henri avait de grandes
aptitudes militaires, et, quoiqu'il le sentît mécontent et frondeur, il le
laissait à la tête d'une de ses armées. Il ne faut pas, tout en critiquant le
prince Henri, faire de lui un incapable. M. de B. n’a pas manqué de
rappeler que le prince célébrait assez ridiculement sa victoire de Frei¬
berg; tous les ans, au 29 octobre, anniversaire de la bataille, Henri se
faisait donner une fête dont il rédigeait le programme avec cet en-tête :
« Surprise que je me fais à moi-même à cause de la bataille de Frei¬
berg. » (II, p. 616.) Mais enfin, cette bataille, il l’avait gagnée.
Toutefois, M. de B. a bien décrit les petitesses d’esprit et les jalousies
de ce cercle militaire qui s’était formé autour du prince Henri et qui
regardait comme des fautes et des folies tout ce que Frédéric faisait de
contraire aux règles convenues du métier. Il a justement montré que,
du vivant même de Frédéric, il s’était fondé une école de tacticiens pé¬
dants et raffinés qui ne voyait dans la guerre que faisait Frédéric
qu'« un grossier et absurde naturalisme » (I, p. 228). Il aurait même
pu ajouter qu’après la mort de Frédéric, cette école de tacticiens régna
souverainement sur l’armée ; le duc de Brunswick lui appartenait, et,
comme M. von der Goltz vient de le prouver dans son remarquable li¬
vre Rossbach uni Ietia , ce fut elle qui causa la grande et si imprévue
catastrophe de 1806. Les officiers ne juraient plus que par le prince
Henri et le duc Ferdinand de Brunswick (dont M. de B. a, du reste,
heureusement caractérisé la tactique, I, pp. 213-21 5 ). Frédéric II n'était
pas un modèle qu’on pût facilement imiter; il était plus aisé de se pro¬
poser comme exemple ses deux lieutenants qui n'avaient jamais fait
qu’une guerre régulière, méthodique, circonspecte, et, comme dit
M. de B., civilisée, une guerre selon l’étiquette, comme écrivait Bu-
iow en 1807. Massenbach et tous ceux qu’Iena frappa comme un coup
de foudre, faisaient du prince Henri et de Ferdinand de Brunswick l’é¬
loge le plus emphatique; Frédéric II était, à leurs yeux, un révolution¬
naire et ils parlaient du vainqueur de Rossbach et de Leuthen, comme
des généraux de la République, comme de Bonaparte, sans admira¬
tion.
L’ouvrage de M. de B. est bien long, et les développements, d'ailleurs
bien menés, pourraient être quelquefois plus courts; l’auteur aurait dû
imiter Clausewitz qu'il cite si volontiers et qui, dans son étude critique
sur Frédéric, dit beaucoup en peu de mots, in wenigen Worten vieles
sagt. Mais le style de M. de B. est agréable et clair — toutes les fois
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25 o
KKVUK CRITIQUE
qu’il n’emploie pas de mots monstrueux comme le participe drang -
salirt (I, p. 221) —; une foule de réflexions ingénieuses sont mêlées au
récit; l’introduction, par exemple, renferme des considérations instruc¬
tives sur les guerres de la Révolution et de l’Empire, et l’on trouve, à la
fin du second volume, un chapitre utile sur les œuvres militaires de
Frédéric II. Il y a bien, de temps en temps, des détails contestables. On
est étonné de lire (I, p. 25 ) que la guerre de Sept Ans était, $ proprement
parler, une guerre de religion et la suite de la guerre de Trente Ans. Il
y a même des erreurs de faits : Bernis ne reçut pas (I, p. 323 ) un évê¬
ché, mais les deux abbayes de Saint-Médard de Soissons et de Troisfon-
taines et le priorat de la Charité-sur-Loire ; il fut question pour lui, en
1760, de l’évêché de Lisieux ou de Condom; mais il ne fut évêque que
d’Albano, titre que lui donna Clément XIV, et, en mai 1764, il fut
nommé archevêque d'Alby. Il n’a donc pas été exilé, après son minis¬
tère, dans l’évéché d’Aix, comme dit M. de B.; c'est à son château de
Vic-sur-Aisne, près de son abbaye de Saint-Médard, qu’il passa le
temps de son exil. Il n’alla pas ensuite à Venise comme ambassadeur
de France. C’est de 1752 à 1755 qu’il fut ambassadeur à Venise. Après
son exil, il alla représenter la France au conclave (1769) et fut nommé
ambassadeur à Rome *.
Ce qui fait la haute valeur de l’ouvrage de M. de Bernhardi, ce qui
lui assure une longue existence et le range parmi les publications désor¬
mais indispensables à tous ceux qui veulent connaître à fond l’histoire
militaire du xvm® siècle, c’est non-seulement la réfutation, un peu lon¬
gue, mais nécessaire (on a vu que M. von der Goltz est revenu sur le
même sujet) des panégyristes du prince Henri ; c'est surtout la minu¬
tieuse analyse des batailles de la guerre de Sept-Ans. A cet égard, ces
deux volumes peuvent passer pour une histoire, qu’on ne possède pas
encore, de la troisième guerre de Silésie, comme on nomme parfois en
Allemagne la guerre de 1756 à 1763 ; ils forment un véritable ensemble;
on y trouve l’indication détaillée des marches et des mouvements, les
jugements portés sur les opérations par les militaires de l’époque et des
temps postérieurs, de nombreuses citations tirées de la correspondance
de Frédéric II et de ses généraux, enfin une esquisse générale des évé¬
nements qui aide à mieux comprendre tous ces menus détails et à les
suivre sans peine *. C.
1. Pourquoi écrire Louxembourg et non « Luxembourg » le nom du vainqueur
de Steinkcrque (II, pp. 63 o et 63 1). Pourquoi dire, en style d’émigré, Napoleone
Buonaparte (II, p. 507) quand nous lisons ailleurs Napoléon (II, p. 645)? II, p. 5 io,
lire échauffourée et p. 5 o 8 Aquitaine .
2. Voici l’indication des chapitres; elle donnera l’idée de l’abondance des détails
rassemblés dans l’ouvrage : Premier volume : I. Généralités. — II. 1756. Pirna et
Lowositz. —III. 1757. Prague; Kolin; la retraite de Bohême; Rossbach, Breslau;
Leuthen. — IV. 1758. La situation générale et les plans de Frédéric; Olmûtz;
Zorndorf; Hochkirch. — V. 1759. L’offensive prussienne; Schmotseifen, Kay et
Kunersdorf; Dresde et Glogau; Maxen. —Deuxième volume : I. 1760. Nouveaux
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DHISTOIRK RT DR UITÉKàTURK
VARIÉTÉS
25 I
Un manuscrit de Pline le Jeune.
Dans la collection de lord Ashburnham (fonds Libri, 98), figure un
précieux manuscrit des lettres de Pline, incomplet malheureusement,
car il fait partie d'une classe de manuscrits qui s’arrêtent à la sixième
lettre du livre V.
Ce manuscrit présente des ressemblances tout à fait frappantes avec
celui du palais Riccardi, qui se trouvait encore à Florence en 1829 et
qui depuis a disparu; des ressemblances si frappantes, que l’identité des
deux manuscrits est à peu près certaine. Quelques détails permettront
d’apprécier cette extrême similitude. — Le Riccardianus est connu par
une description de catalogue et par une collation exécutée en août 1728
par Gori, collation qui, après avoir passé par plusieurs mains, fut
publiée à Amsterdam en 1734 dans le Pline de Cortius (impression
posthume due aux soins de Longolius). Il était relié avec le Riccar¬
dianus de Pline l’ancien, encore subsistant à Florence *. Quant
au manuscrit Ashburnham, j’avais reçu de mon frère Julien, au
mois de mars 1 883 , quelques indications prises rapidement, mais pour¬
tant suffisantes pour me laisser entrevoir ce qui en faisait la principale
valeur. M. H. Omont, qui partait vers ce moment pour Londres,
voulut bien se charger de recueillir pour moi les renseignements qui me
parurent alors le plus nécessaires. Depuis, grâce à l’entremise obligeante
de M. E.-M.Thompson,conservateur des manuscrits au British Muséum,
j’ai été autorisé par le propriétaire du manuscrit à publier les résultats
qui découlaient des notes que j’avais reçues. — Le Riccardianus com¬
prenait dix-huit feuillets (cotés jadis 174-191 dans le double Pline de
Florence); le manuscrit Ashburnham a dix-huit feuillets. Tous deux
sont in-folio, à deux colonnes par page, et tous deux sont du x° siècle.
Le manuscrit Ashburnham donne en titre : C. P Uni Secundi epistula -
rum libri numéro decem. Cette formule insolite avec numéro se trouvait
dans le Riccardianus a . Les deux manuscrits ont les mêmes lacunes. Ainsi
le bourdon de atque [etiam katque[amicissimum (II, i, 3 ). Au ms. Ash-
traités, situation générale et plans d'opérations; Landeshut; Dresde et Glatz; Bres-
lau et Liegnitz; Hohen-Giersdorf et Berlin; Torgau. — II. 1761. Campagne d’hi¬
ver en Hesse; Préparatifs et plans d’opérations; La campagne de Silésie; Bunzelwitz
et Schweidnitz; la campagne de Poméranie et de Saxe. — III. 1762. Changements
dans la situation politique et les plans d’opérations; Pretschendorf et Wilhelmsthal;
Burkesdorf, Rcichenbach et Schweidnitz; Freiberg; les écrits militaires de Frédé¬
ric 11.
1. Sur le Pline l’ancien, voir Detlefsen, Rheinisches Muséum , XV(i86o), p. 276
ss., et H. Keil, dans son édition de Pline le jeune, p. xis. (Lipsiae, Teubner, 1870).
2. Le Riccardianus aurait porté Plinii au lieu de Plini, s’il fallait s’en fier à
l’exactitude des érudits d’autrefois relativement à ces vétilles d’orthographe.
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252
RBVUK CRITIQUK
burnham il manque les deux dernières lignes de III, v (après librosfu *
tura) et tout ce qui suit jusqu’à la dernière demi-ligne de III, xi [ami-
cos suos quant sunt arbitrantur uale ); or, dans le Ricc., « sexEpi-
stolaeaVI. ad XI. desunt. » Dans le ms. Ashburnham, une lacune
commence après creditor solus (II, iv, 2); c'est, il est vrai, trois lignes
plus bas que l’édition de Corrius porte : a Ms. Riccard. hinc usque ad
Epist. XII. n. 4. nos deserit »; seulement le hinc est vague, car celte
remarque est placée à la fois à propos de f amant defuncti et à propos de
facilitatis ; mais la concordance est parfaitement précise quant à la fin
de la lacune, le ms. Ashburnham reprenant à xn, 4 (avec les mots
praebere praeterea), — Les variantes de détail présentent des ressem¬
blances aussi frappantes que celles des caractères généraux. Ainsi, seuls
des mss. connus de Pline le Jeune, les deux mss. donnent, au commen¬
cement de III, xvn, recte au lieu de rectene . Parfois ces concordances
ont quelque chose de bien caractéristique. Suivant Cortius, la liste des
lettres du livre V, dans le Riccardianus, donnait pour destinataire à la
la lettre vi non pas Scaurus tout court, mais Terentius Scaurus . Au
premier abord, ce serait là une divergence marquée à l’égard du ms.
Ashburnham, car celui ci, comme tous les autres, porte simplement ai
Scaurum ; mais, quand on regarde les choses de plus près, la divergence
se change en accord : par une erreur qui ne se retrouve nulle part ailleurs,
le ms. Ashburnham fait adresser la lettre suivante ad Terentium Scau¬
rum au lieu de l’adresser ad Valeriahum.
Les deux mss. s'arrêtent juste au même mot, pererrat (V, vi, 32):
détail d'autant plus caractéristique qu’un autre ms. de la même classe,
le Florentinus, achève la lettre V, vi. L’arrêt brusque du ms. Ashburn¬
ham tient à l'arrachement d’un 19 e feuillet, car pererrat termine la
seconde colonne du feuillet 18. Cette dernière circonstance conduit
pratiquement à un résultat important. Elle défend de supposer que le
ms. Ashburnham ait été copié sur le Riccardianus, ou tous deux copiés
sur un même original; elle prouve que si, comme on peut le conce¬
voir à la rigueur, les deux mss. n'étaient pas identiques *, c’est le
Riccardianus qui dériverait de l'autre, que par conséquent il ne peut
avoir de valeur indépendante, et qu’il doit cesser d’être tenu compte,
dans l’appareil critique des lettres de Pline, des variantes recueillies
par Gori. — La même conclusion ressort d’ailleurs de la nature des
deux grandes lacunes du ms. Ashburnham, déjà signalées tout à
l'heure : elles sont dues à la perte de quelques feuillets. Ainsi la
1. Il y a quelques divergences entre les leçons du ms. Ashburnham et celles
qui passent pour avoir existé dans le Riccardianus. On verra (deux notes après
celle-ci) quelques échantillons de ces divergences. Je n’entreprendrai pas d’examiner
ici avec quelle exactitude Gori f puis Cortius, puis Longolius, nous ont transmis
les variantes du Riccardianus, et dans quelle mesure par conséquent les divergences
en question peuvent être probantes.
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O’HISTOIRK RT DK LITTIÊR ATÜRK 253
Jacune II, iv-xii commence juste après 6 v° et s’arrête juste à 7 r°; la
lacune III, v-xi est de même comprise entre 10 v°et 11 r° *.
D’après ce qui précède, il est clair que beaucoup des leçons du ms.
Ashburnham sont déjà connues comme ayant été trouvées par Gori
dans le Riccardianus ; très souvent d'ailleurs elles ne diffèrent pas de
celles du Florentinus; de sorte qu’un dépouillement complet n’aurait
qu’une utilité restreinte. Mais un dépouillement partiel, effectué par
M. Omont sur un point choisi exprès, fournit un nombre relativement
considérable de renseignements de valeur : je veux parler du dépouille¬
ment des précieuses listes de destinataires, placées par le copiste en tête
de chaque livre des Lettres.
Dans ces listes, en effet, la plupart des noms de personnes sont donnés
in*extenso y tandis que l'en-tête de chaque lettre les réduit d'ordinaire au
cognomen . Déjà, grâce aux listes du Riccardianus examinées par Gori, on
connaissait beaucoup de gentilices que les autres sources ne nous pré¬
sentaient pas; exemple le Terentius Scauruscité tout à l’heure, exemple
Boebius Macer III, v. On conçoit de quel secours sont de telles indica¬
tions pour identifier les amis de Pline avec des personnages connus d’ail¬
leurs, pour distinguer entre des individus partiellement homonymes
(on trouve dans Pline le jeune des Rtifus appartenant à seize gentes dif¬
férentes); elles ont puissamment aidé M. Mommsen dans la confection
de l’admirable Index qu’il a joint au Pline de M. Keil. Or, les listes
de destinataires du ms. Ashburnham, dont j’ai sous les yeux copie inté¬
grale, confirment quelques identifications conjecturales, et font connaî¬
tre quelques noms inédits. Voici les endroits qui présentent ainsi quel¬
que intérêt pour l’histoire. Il n’y en a pas dans les listes placées en tête
des deux premiers livres: ils sont, en général, plus succincts que les trois
autres ; peut-être aussi Gori avait-il été plus exact dans le commence¬
ment de ses extraits du Riccardianus et a-t-il ensuite, par lassitude, laissé
plus à glaner après lui *.
1. L’étendue de la première est de 3 oi lignes de l’édition Keil, celle delà seconde
de 294; elles représentent donc chacune deux feuillets perdus, car les 6 feuillets qui
précèdent la première font 870 lignes de Keil, les 4 feuillets qui séparent les deux
lacunes en font 570. Le ms. se compose de trois cahiers. Le premier est un ternion
dont les six feuillets sont intacts : le feuillet t porte la signature q. i. Le second
est un quaternion qui, conformément au calcul qui précède, a perdu deux fois
deux feuillets, à savoir les deux feuillets initiaux et leurs contrefeuillets; il subsiste
les feuillets intérieurs 7 et 8 et leurs contrefeuillets 10 et 9; le premier feuillet
subsistant (7) porte la signature <*. ii, qui évidemment n’a dû être inscrite qu’après
la mutilation du cahier. Enfin un quaternion intact comprend les feuillets 11 à 18;
le feuillet 1 x porte la signature q. ni.
2. Les variantes des listes I et II n’ont guère d’intérêt que pour l’histoire de la
transmission du texte. Voici les plus marquantes : I, 1 ad Secundum. x ad Atticum .
xi ad Faustum Iustum. II, iv ad Galuinam ou Galiunam. vii ad Magnum, xv ad
Valerium. xvi ad Dannium. xxni ad Dinarcium (au lieu de Mauricum). — Dans les
autres livres, on trouve, parmi les variantes de ce genre, III, xn ad Tatilinum
Seuer. (le Ricc. est donné comme portant pour gentilice Attilius). xvi ad Patilium
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REVUE CRITIQUE
254
III, i ad Caluisium Rufum . Les autres sources ne donnent pas le
cognomen ici ; on le connaissait par d'autres passages.
III, 11, ad Vibium Maximum . Gentiliee inédit; M. Mommsen na-
vait pu identifier ce ci Maximus », qui fut questeur, tribun de la plèbe,
préteur, légat impérial;
III, iv ad Caecilium Macrinuni. Gentiliee inédit. M; Mdmmsenfai-
sait de ce Macrinus un Mihicius.
IV, v ad Iulium Sparsum. Gentiliee inédit.
IV, xüiad Cornelium Tacitum . Partout ailleurs le gentiliee manque
pour cette lettre.
IV, xv ad Minic . Fundan. 1 Même observation.
V, tx ad Sempronium Rufum . Gentiliee inédit. M. Momfnsen n’avait
pu identifier ce Ru/us.
V, xiv ad Pontium Allifan . Cognomen ihédit.
V, xvi ad Aefulan. Marcellinum. Le premier nom est inédit:
Vj xvn ad Vesttic . Spurinna. Partout ailleurs le gentiliee manque
pour cette lettre.
V, xix ad Valerium Paulinum . Gentiliee inédit, dont l'absence fai¬
sait hésiter M. Mommsen sur l’identification du personnage.
V, xx ad Cornelium Vrsum. Gentiliee nouveau. — Il n’est pas fait
mention de cette lettre dans l’index Mommsen.
V, xxi ad Pompeium Saturn. Partout ailleurs le gentiliee manque
pour cette letrre.
Il ne me reste qu'à compléter par quelques détails la description da
ihs. Ashburnhatn. Il a 400 millimètres de haut* 3 xo de large. Au bas
du premier feuillet oit lit (à demi-gratté), en écriture du xn e ou xm e siè¬
cle, Sci Pétri Beludcthsis. Les cinq listes de destinataires sont aux
feuillets : 1 a, 6 a, 9 b; 12 v° b, ty b; dans la dernière, entre ad Dontit.
Apollinàr. et ad Calpurnium Rufum , une main du xm® ou xtv« siècle a
écrit hic ad fi. La disposition de ces listes varie. La première donne
d’abord tous les noms des destinataires, puis tous les incipit. La seconde
donne chaque nom immédiatement suivi de l’incipit. Lès trois autres
bht le& iioms en première colonne, les incipit en seconde colonne; la
quatrième prépose à chaque nom le numéro de la lettre. Dans là liste
du livre II, l’ordre des lettres est i* 3 , 3 , 7, 9, 11-12, 2, 4, 6, 8, io, i 3 >
14, 16, 18; 19, i 5 , 17, 20.
Louis Havet.
(Ricc. Pacilium). xviii ad Virium Seuerum (Ricc. Viuium). xx ad Mae sium Rufum .
IV, vu ad çcitium Lepidum (Ricc. Catium). xvn ad Clusinium (Ricc. D. Frsfa;)
Gallum. xxiv ad Fabium Valent. V, x ad Seueton. Tranquillum. xii ad Scaurum.
xiii ad Terentium ScaurUm.
1. Je reproduis les formes abrégées conformément au ms. Ashburnham.
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d’hISTOIRB BT DE LiTTBRATURB
THÈSES DE DOGTORAT ÈS LETTRES
255
Soutenance de M* M* Albert*
I. Thèse latine : De villis tiburtinis principe Augusto . (Paris, Thorin, in-8°,
ç 3 pp. et 1 pl«). — H. Thèse française : Le culte de Castor et Pollux en Italie .
(Puis, Thorin, in-8°, 172 pp. et 3 pi.)
M. Albert a étudié les villas de Tibur au siècle d’Auguste, au moyen des textes et
des inscriptions. Son travail est suivi d’un plan de Tibur et des environs.
M. Himly trouve que la thèse deM. A. est un travail léger, pimpant* aimable, lit¬
téraire; il y a de l'archéologie, mais surtout des vers d’Horace et de Tibulle. Il sera
lu avec plaisir par tous les gens qui ne sont pas du métier. P. 11, l’inscription citée
est fausse, M. A. le dit lui-même; pourquoi la citer? P. 5 i, il y a un solécisme au
bas de la page. M. Himly reproche à M. A. de n’avoir pas indiqué l’orientation de
son plan, de n’avoir mis aucune indication auprès de l’emplacement douteux d’une
villa (Peut-être de la villa de Mécène). M. A. ne paraît pas fixé sur les distances;
pourquoi indique-t-il, p. i 5 , 20 milles, et p. 82, 16 seulement ? La description est trop
littéraire et artistique, elle n’est pas assez géographique ; le chap. in rappelle les
descriptions de villes d’eaux ; il aurait fallu dire ce qu’est le pays, parler des mon¬
tagnes, de l’Anio, tandis qu’on doit attendre jusqu’à la p. 40 pour apprendre qu’il ÿ
a des cascades et que l’Anio fait une courbe, jusqu’à la p. 53 pour savoir qu’il y a
un lac. Les collines et le fleuve sont mal décrits. M. A. a été trop affirmatif dans sa
comparaison entre Tusculum et Tibur; c’est une autre nature, parce que ee sont
d’autres montagnes, les unes calcaires, les autres volcaniques.
M. Lallier trouve que la thèse a de la gr&te et de l’agrément : c’est un travail
d’archéologie et de critique littéraire. Elle est écrite dans un latin agréable, plus
poétique que latin, qui n’est pas toujours assez précis. C’est une agréable prome¬
nade archéologique. M. A. expose sa méthode de recherche. Elle a consisté à réunir
les textes, à chercher sous le nom moderne, et à employer les inscriptions; il au¬
rait pu se servir aussi des objets d’art, mais il ne l’a pas lait, c’est un moyen trop
hypothétique. Il voulait d’abord ne parler que des villas, de la construction, de l’o¬
rientation, de l’arrangement intérieur; mais il s’est aperçu que le travail ne serait
pas complet s’il ne parlait pas des propriétaires. — M. Lallier trouve qu’il n’y a là
qu’une juxtaposition, M. A. a parlé d’Horace comme Simonide parlait de Castor et
Pollux, — pour remplir sa thèse. S’il s’était plus occupé de la chronologie des
œuvres d’Horace, il aurait pu éclairer certains points. Le livre de Walckenaer est
vieux aujourd’hui. — P. 34, M. A. n’a peut-être pas été très exact au sujet de la jeu¬
nesse de Virgile.
M. Marthe regrette qu’il n’y ait pas d’erratum. — P. 34, pourquoi renvoyer à
Cabrai et non aux témoignages anciens? — Différentes critiques de détail au sujet
de Quintilius et Calpurnius Piso.
M. Geflroy s’étonne que M. A. n’ait pas fait revivre tout ce magnifique pays; les
promenades, le culte local, la vie de chaque jour, et qu’il n’ait pas usé de la descrip¬
tion de Stace; on pouvait du temps de Domitien conclure à celui d’Auguste. On
aurait pu se servir des catalogues d’objets d’art fournis pat Tivoli et restituer ainsi
la vie artistique.
M. Perrot trouve que la villa de Quintilius est la seule réellement placée.
M. Benoist fait de nombreuses critiques de détail. Â propos de la villa de Cyn-
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256
RRVUK CRITIQUE
thie, il aurait fallu ne pas se contenter des vers d’Horace et de Properce et donner
des faits nets et précis. — Quelle preuve a-t-on que Properce ait connu Mécène par
Horace * — Il y a beaucoup d’impropriétés et de fautes de latin, une citation inexacte
(le pseudo-Acron est pris pour Acron); il aurait fallut connaître les idées des scho-
liastes. Il y a abus d’élégances, notamment du quippe qui .
II
La thèse française est une étude sur le culte des Dioscures en Italie, leur attributs
comme divinités maritimes, guerrières, commerciales, cosmiques et funéraires. La
deuxième partie est un catalogue descriptif des monuments figurés, vases, miroirs,
monnaies, statues, bas-reliefs, pierres gravées, qui représentent les Dioscures.
M. Perrot trouve que cette thèse a le même défaut que la thèse latine : elle pique
la curiosité et ne la satisfait pas. M. A. a voulu s’en tenir à l’Italie et cependant
indiquer les origines grecques et aryennes des Dioscures, et donner leur biographie
mythologique à cause des mythes visés par les monuments qui figurent au catalo¬
gue; on aimerait mieux une étude complète sur les Dioscures. — Le catalogue
porte sur la Grèce comme sur l’Italie, il ne se rapporte donc pas parfaitement à
la thèse.
Au sujet des origines védiques, les comparaisons faites sur la traduction Langlois
sont douteuses, parce qu’elle contient de nombreux contre-sens. Pourquoi ne pas
indiquer un autre élément, l’élément phénicien, que M. A. n’ignore pas? Les Dios¬
cures arrivent à se confondre avec les Cabires. Les Anvins ne sont pas des divinités
funéraires ni maritimes. Le travail manque de conclusion. Beaucoup de fautes
d’impression. Le chap. sur les monnaies au type des Dioscures est bon; bonne
aussi l’explication de la façon dont s’est formée la légende de l’apparition des Dios¬
cures au lac Régille; c’est une hypothèse, mais ingénieuse et probable. Il y a, no¬
tamment dans le chapitre sur le rôle de Castor comme dieu des commerçants, nne
ampleur d’idées qui manquait à la thèse latine. M. A. n’a pourtant pas une méthode
toujours assez sévère, il ne sait pas assez dire : Je ne sais pas; quelquefois il se
contredit. P. 4g, il parle d’un monument polychrome et semble le regarder comme
caractéristique, ce n’était pourtant pas une exception. P. i 3 , il ne faudrait pas se
fier à une étymologie ridicule de Tusculum pour lui donner une origine grecque,
aussi douteuse que l’origine troyenne de Rome. Le grand fait, c’est que de très
bonne heure la civilisation grecque a rayonné sur le Latium. P. 3 o, il n’est pas
juste de dire que le temps de Domitien ait été moins superstitieux, aucune époque
ne l’a été davantage (v. A. Gelle, Philostrate, etc.), on est plus crédule au temps
des Antonins qu’au temps de Cicéron. P. io 3 , il n’est pas tout à fait exact que
la mort n’apparaisse jamais que sous une forme gracieuse, une figure de bronze
représente un squelette. M. A. n’insiste pas assez sur les origines étrusques; les
Dioscures sont arrivés par les villes grecques de Campanie et par l’Etrurie. — Bon
chapitre sur le temple de Castor à Rome bien connu depuis les fouilles récentes. —
Pourquoi dire que les Dioscures sont devenus des dieux romains à Sparte parce qu’ils
y ont une inscription latine? —Le catalogue est fait avec soin, néanmoins il ne per¬
mettrait pas de trouver les vases du musée de Naples.
M. Geffroy trouve la thèse intéressante et amusante. M. A. sent avec esprit les
écueils et les évite presque à son insu. Il y a une grande différence entre un
travail de l’Ecole de Rome et une thèse. Dans une thèse on demande des résultats;
les travaux de l’Ecole de Rome sont plutôt des catalogues raisonnés d’érudition
d’où sortiront des idées générales. Le problème topographique ne doit pas être
abordé, ce n’est pas en cinq ou six ans de travaux que de telles questions sont
solubles. Le problème mythologique même est bien ardu. Comment démêler le
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o’msrOlRK ET DR LITTÉRATURE
257
syncrétisme de la science mythographique? De là vient ce qu’il y a de flottant dans
la thèse. — Le catalogue a pour première qualité d’être complet, il n’est pas
toujours assez précis. C’est par le catalogue que le travail avait commencé. M. A.
y a joint des conclusions que le catalogue ne permettait pas encore. 11 a tiré un
excellent parti de la numismatique. L’idéal eût été un catalogue dans l'ordre
chronologique, M. A. a adopté une division purement matérielle. Il aurait fallu
marquer les formes devenues romaines et les formes restées purement grecques.
M. Bouché-Leclecq trouve que l’impression produite par la thèse n’est pas bonne.
Cest un catalogue bien fait, quoique dogmatique et dépourvu de discussion, précédé
d’une préface où l’on indique la manière de se servir du catalogue. Cette préface,
qui est la thèse proprement dite, est vague, indécise au point de vue mythologique.
Chaque attribut est donné comme un surcroît. M. A. parle à la fin de Castor et Pollux,
divinités cosmiques; c’est par là qu’il aurait dû commencer, c’est en tant que cosmi¬
ques qu'elles sont maritimes. Il y a beaucoup de phrases qui ne sont que des
phrases, il faut que M. A. ait beaucoup de talent littéraire pour en avoir gardé
dans cette course rapide. — Le mythe qui fait sortir les Dioscures de l’œuf est tout
à fait récent. — P. i 3 , le mot Tuscus n’est pas dans Festus, c’est Tufculum. — M. A.
n’a pas lu Klausen, en quoi il est excusable, mais non de lui faire dire autre chose
que ce qu’il dit. — P. 76, qu’est-ce que le patricien préposé à la frappe de la
monnaie? — P. 72, de quelle loi Valeria M. A, veut-il parler.' M. Bouché-Ledercq
fait beaucoup d’autres critiques de détail. 11 est interrompu par le Doyen ; ces
critiques, dit-il, enlèvent de la valeur à la thèse, mais elles laissent subsister le
talent et la bonne volonté.
M. Lallier dit que le de praetura urbana fournit des renseignements précieux sur
l’administration du temple de Castor.
M. P. Girard trouve que le grand mérite du travail est dans la méthode, l’em¬
ploi comme textes des monuments figurés. De quelle manière la méthode a-t-elle
été appliquée v Le catalogue est très fautif; il y a une série de miroirs étrusques
qui peuvent étonner le lecteur. Les Dioscures étrusques sont-ils les mêmes que
les Dioscures romains ? — 11 y a de nombreuses fautes d’impression dans les mots
grecs. M. A. abuse un peu du symbolisme.
CHRONIQUE
FRANCE. — Nous annoncions récemment la mort du célèbre arabisant hollandais
R. Dozy et voici qu'à son tour la France perd l’un de ses plus illustres orientalistes.
Charles-François Defrémery, né à Cambrai le 8 décembre 1822, aborda en 1840 l’é¬
tude de l’arabe et du persan sous la direction de Reinaud, de Caussin de Perceval, de
Quatremère et de Jaubert. Il excella bientôt dans ces deux langues et se consacra dès
lors tout entier aux recherches historiques et géographiques dont il avait fait le but
de sa vie. Ses premiers travaux furent consacrés à cette période obscure de l’histoire
de la Perse et de la Mésopotamie qui s’étend depuis la décadence du khalifat de Bagh-
dad jusqu’à l’arrivée des Mongols. Personne ne connaissait mieux que lui et ne con¬
tribua plus à faire connaître cette foule de petites dynasties qui se partagèrent alors
les provinces orientales de l’empire musulman. Les Assassins ou Ismaéliens, qui
jouèrent un si grand rôle pendant les croisades, attirèrent aussi de bonne heure son
attention et l’on peut dire que ses Recherches ont épuisé la question tout au moins
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258
RBVUB CRITIQUE
en ce qui concerne l’histoire politique de ces sectaires. Au milieu de ces études,
Defrémery recueillait les éléments d’un mémoire de géographie orientale, qui parut
en 1849 dans le Journal asiatique sous le titre de « Fragments de géographes et
d’historiens arabes et persans inédits relatifs aux anciens peuples du Caucase et de
la Russie Méridionale.» Quelques années après il commençait à s’occuper du célèbre
voyageur arabe Ibn Bitoutah et le conseil de la Société asiatique le choisissait pour
en donner une édition avec traduction. Secondé de Sanguinetti, arabisant distingué
dont la science regrette aussi la perte récente, Defrémery fit paraître de i 853 à i 85 g
les Voyages d'Ibn Batoutah (4 volumes in>8* avec index), publication qui restera
son œuvre capitale et qui peut être considérée comme un modèle de saine érudition.
Defrémery contribua également pour une large part aux Historiens arabes des
Croisades publiés par l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. Il y travaillait
encore peu avant que la mort vînt le frapper. — Mais indépendamment de ces grands
travaux historiques et géographiques, Defrémery écrivit sur les sujets les plus divers
et donna de nombreux articles de critique au Journal asiatique, à VAthenœum
Français , aux Annales des Voyages , et à notre Revue critique , à laquelle il ne cessa
de collaborer depuis sa fondation. Beaucoup de ces articles, antérieurs à 1854, ont
été réunis par lui sous le titre de Mémoires d'histoire orientale . Defrémery ne se
contentait pas d’être un orientaliste consommé. L’histoire littéraire de la France
avait en lui un fervent adepte et plus d’une fois nos lecteurs ont dû s’émerveiller
devant la minutieuse érudition qu’il déployait dans ses articles de biographie et de
bibliographie, érudition qui supposait d’immenses lectures. Defrémery lisait beau¬
coup en effet ; il lisait sans relâche, prenant des notes qu’il devait au surplus bien
rarement consulter, car sa mémoire tenait du prodige et faisait l’étonnement de tous
ceux qui l’approchaient. Il avait la passion du détail et de la précision et apportait
à ses moindres travaux l'honnêteté qui fut la règle de sa vie. Modeste, réservé, en¬
nemi de l’intrigue et des compétitions, Defrémery ne dut qu’à son mérite la haute
situation à laquelle il s’éleva graduellement. Elu en 1869 membre de l’Institut, il fut
nommé en 1873, au Collège de France, titulaire de la chaire d’arabe qu’il occupait
depuis de longues années déjà comme suppléant de Caussin de Perceval. A l’Ecole
des hautes études, il était directeur de section depuis la fondation de cet établisse?
ment (1868). En 1879, la Société asiatique le choisit pour l’un de ses vice-présidents.
Defrénqery avait, en outre, remplacé la même année M. de Slane comme membre de
la commission des impressions gratuites à l’Imprimerie Nationale. Depuis plusieurs
années, Defrémery voyait sa santé s’altérer. Il supportait ses souffrances avec une pa¬
tience admirable. Jamais il ne se plaignit. 11 s’est éteint le 18 août à Saint-Valéry-
en-Caux et ses dépouilles mortelles ramenées à Paris ont été inhumées au cimetière
Montparnasse. D’éloquents discours ont été prononcés sur sa tombe au nom de l’Ins¬
titut par M. Alfred Maury, au nom du Collège de France par M. Ernest Renan, au
nom de la Société Asiatique par M. Barbier de Meynard. A notre tour, au nom de
la Revue critique, nous disons un dernier adieu à l’homme de bien et à l’érudit qui
fut l’un des premiers à venir à nous et à nous apporter l’appui de son savoir et de
son caractère.
HOLLANDE — Le congrès des Orientalistes a pleinement réussi à Leyde et tous
ceux qui y participaient garderont un souvenir ineffaçable de l’accueil qu’ils ont
reçu des savants et des habitants de ce généreux pays de Hollande. Le congrès a été
solennellement ouvert le lundi 10 septembre par le Ministre de l’Intérieur Heems-
kerk, qui a prononcé en cette occasion un discours vivement applaudi. M. Kuenen,
président du congrès, lui a succédé à la tribune et a tenu les assistants sous le
charme de sa parole émue et pleine d’une charmante bonhomie. La langue offi-
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D HISTOIRB BT OB LITTÉRATURE
25g
ciellfi du coagrès était le français. Le lendemain ont été constitués comme
il $çit Jfis bureaux des diverses sections : i° Section arabe , président,
Cb. Sohefer; yicsrpfésideat#, Socin et Qoldaiher; secrétaires, Stanislas Guyard
et Snouck Hurgronje. — 2 0 Section sémitique , président, Schrader; vice-prési¬
dents, Robertson Rgiitb et Kautzscb; secrétaires, Carrière et W. H. Rylands.
— I® Section aryenne, président, Roth; vice-présidents, Weber et Lignana; secré¬
taire, Rhy# Ravies ç* Ch, Michel. — 4 0 Section africaine , président, Lieblein ; vice-
président, Eisenlohr ; secrétaire, Golénischeff. — 5 ° Section de P Asie centrale et de
l’gftrêwe-Qrfent , président, G. Schlegel; vice-président, de Rosny; secrétaire,
H. Cordiez. — 6° Malaisie et Polynésie , président, l'abbé Favre; vice-présidents,
Cuçt et V#q Musschenoroek ; secrétaires, Marre et Humme, Les séances de ces di-
venat sections ont été bien remplies, car il y avait plus de soixante communication#
à l'ordre du jour, et les discussions qu'elles ont soulevées ont été nombreuses et
anjm#es. Le jeu# J 3 avait été réservé pour une visife collective à J’exposition
d'Amsterdam. Les membres du congrès, transportés par un train spécial et par troii
bateaux à vapeur, ont été reçus à l'exposition par M. le bourgmestre d'Amsterdam
qui leur a souhaité la bienvenue et a donné en leur honneur, le soir même, une
grande réception à l’Hôtel de Ville. Les jours précédents, des concerts avaient eu
lipu au £omm*r{Qrg, de Leyde, et #9 Qofch, de La Haye. Le lendemain vendredi, un
grand banquet, offert par le comité organisateur du congrès, réunissait à Leyde deux
cent vingt et un Orientaliste#. J)e nombreux tgats ont été porté# par MM. Kuenen,
Schefer, Weber, Nœâdeke, etc., etc. Le nom de De Goeje, prononcé par M. Nœl-
deke, a été couvert d’applaudissements. Une place d'honneur était réservée aux dé¬
légués des gouvernements» parmi lesquels noua signalerons, pour la France,
MM. Schefer et Barbier de Meynard. Un touchant incident a marqué la fin de ce
banquet* Lejeune, mais déjà éminent assyriologue, M. Paul Haupt, devait partir le
soir même pour Baltimore, où il est nommé professeur de langues sémitiques. Tous
les assyriologues présents l’ont conduit à la gare et, dans la salle d’attente, plusieurs
discours ont été prononcés, notamment par MM. Qppert et Halévy. Un toast au
père dp r$çsyrio)ogie, proposé par Haupt, a été accueilli avec enthousiasme et le
nom d’Oppart a été acclamé. — Le samedi i 5 , séance de clôture. Jamais congrès np
fut mieux organisé, et tout l'honneur en revient au comité, qui était formé de
MM. Kuenen, Kern, De Goeje, Tiele, Pleyte, Land, Leemans, Van der Lith, Oort,
Pijngppel, Çchlegel, Serrurier, Yeth, Vreede et Wijnmalen, c'est-à-dire Jdes savants
les plus illustres et des talents les plus distingués que possèdent les Pays-Ras*
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRÉS
Séance du 14 septembre ?883.
M. Albert Dumont donne des détails sur cinq vases antiques du musée de Mar*
saille, dont les dessins lui ont été envoyés par M. Augier, attaché à ce musée. Deux
de ces vases sont des œnochoés, d'un type très ancien, trouvées, l'une dans le port
de Marseille, en i#37 , l'autre dans la ville, à une date toute récente. Ces œnochoés
présentent une ressemblance frappante avec celles qu’on a trouvées à Santonn, sous
U pouzzolane, dans des maisons dont la très haute antiquité est certaine aussi bien
pour les géologues que pour les antiquaires. Les trois autres vases sont probable¬
ment du ni® siècle avant notre ère. Us sont ornés de figures rouges. Ce genre d'or¬
nementation ne s'est encore rencontré que rarement sur les vases antiques qui ont
été trouvés jusqu'ici en Gaule.
M. Ferdinand Delaunay continue la lecture du mémoire de M. Félix Robiou sur
Ifl date de l’exode des Hebreux d’Egypte.
M. Benloew lit une note sur l’usage des diminutifs dans le style poétique des Ski-
pétars ou Albanais. L'emploi fréquent et peu raisonné des diminutifs se rencontre
chez tous les peuples de l’Europe méridionale; chez les Albanais et principalement
chez les populations albanaises d’Italie, l’usage des formes diminutives, dans la poé¬
sie, dépasse toute mesure. M. Benloew en cite divers exemples. Les suffixes dimi-
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2Ô0
RKVUE CRITIQUE D HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
nutifs peuvent s'ajouter, non-seulement aux noms ou aux adjectifs, mais aussi aux
verbes, aux pronoms, aux adverbes, etc. Dans les verbes, ces suffixes s’ajoutent après
la désinence qui marque le temps et la personne : on n’a donc pas un verbe dimi¬
nutif, distinct du verbe principal et possédant sa conjugaison propre, mais chaque
personne du verbe a sa forme ordinaire et sa forme diminutive.
M. Ledrain communique :
i° Une inscription araméenne, gravée sur une brique qui a été rapportée de Ba-
bylonie par M. Dieulafoy; cette inscription se compose d’un seul mot, et ce mot
est un nom propre : Belschounou;
2° Une inscription sumérienne, gravée sur une des statues du patesi ou roi Gou-
déa, dans la collection de Sarzec. Cette inscription se traduit ainsi :
a A la dame des montagnes, dame savante du destin, mère du fils des fils, sa
dame : Goudéa, patesi de Sirpurla, a fait le temple de son heureux séjour. Il a fixé
son culte brillant. Il a déterminé le service stable de sa divinité. U a construit en
briques le temple où elle est établie. La pierre ag^ enfermée dans la carrière, en la
montagne de Magan, il l’a taillée pour sa statue, La dame du ciel, de la terre, des
êtres infernaux, la déesse Nintu, mère des dieux, de Goudéa qui a fait son temple
a prolongé la vie. Elle a proclamé la gloire de son nom, car il a construit le temple
en briques. »
Ouvrage présenté par M. Egger : Vit a sanctæ Euphrosinœ secundum textum grœ-
cum primarium nunc primum édita opéra et studio Anatolii Boucherie (publication
posthume; extrait des Analecta Bollandiana , t. II).
Séance du 21 septembre 188 3 .
M. Germain commence la lecture d’un mémoire intitulé : Pierre Flamenqui, étude
sur ses manuscrits autographes entièrement inédits . Ces manuscrits sont conservés
aux archives du département des Bouches-du-Rhône, dans le fonds de l’abbaye de
Saint-Victor de Marseille; ils ont été signalés à l’attention de M. Germain par l’ar¬
chiviste, M. Blancard. Pierre Flamenqui, oui mourut abbé de Saint-Victor en 1424,
avait été auparavant vicaire-général de l’évegue de Maguelonne. En cette qualité, il
était charge d’exercer une partie de l’autorité épiscopale sur l’Université de Mont¬
pellier et notamment de présider à la collation des grades; il devait adresser une
harangue latine à chaque nouveau licencié lors de sa promotion. Les papiers conser¬
vés aux archives des Bouches-du-Rhône contiennent dix-sept de ces harangues, dont
la première est du 22 janvier i 3 gi et la dernière du 22 novembre 1401. M. Germain
en cite de nombreux extraits, propres à taire connaître le goût littéraire de l’épo¬
que. Comme chaque harangue contient le nom du licencié et la date de la promo¬
tion, le recueil de Pierre Flamenqui fournit aussi des renseignements précis sur la
biographie de plusieurs savants de cette époque, qui avaient fait leurs études à Mont¬
pellier.
M. Carapanos fait une communication sur une petite plaque de plomb, de o m o 3 de
largeur et de hauteur et d’un demi-millimètre d’épaisseur, qui a été trouvée à Do-
done et qui porte gravée sur une face une demande adressée à l’oracle de Dodone
et, de l’autre côté, la réponse de l’oracle. M. Carapanos transcrit ainsi cette question
et cette réponse :
Demande : 0 eé[ç tu]x<x dtyaOà èp[(*)T]st ’Avt(ox©Iç to]v Al xat xàv Au 5 >v[a]v
uicep CrfieCaç [<x]utoû xal TtaTpbç xoù àBeXçaç t[(]voc 8eu>v ^ *?jp[c*>a>]v xtpivTt
X[d!>]iov xal àjJLStvov et T). « Dieu et bonne fortune. Antiochus demande à Jupiter et à
Dioné lequel des dieux ou des héros il doit honorer, afin qu’il lui soit mieux et
plus avantageux pour sa santé et pour la santé de son père et de sa sœur. *
Réponse : Efç Tpp.téva 6pp.oca avTt. « A Hermione qui s’élance vis-à-vis. »
Cette réponse a toute l’obscurité qui convient à un oracle. Elle semble désigner
une déesse honorée dans l’île d’Hydréa, située en face d’Hermione et séparée par un
étroit bras de mer.
M. Carapanos communique ensuite une petite chalcédoine, longue de o m i 85 et
large de o m 012, où est gravé un tableau à cinq personnages. Ce tableau paraît re¬
présenter une scène historique : c’est César recevant la tête de Pompée.
M. Benlœw continue la lecture de ses études sur la littérature poétique des Alba¬
nais ou Skipétars. Après avoir communiqué la traduction de plusieurs morceaux de
poésie albanaise, il présente des observations sur l’usage et l’introduction graduelle
de la rime dans la versification populaire des Skipétars.
Ouvrage présenté, de la part de l’auteur, par M. Siméon Luce ; Gasté fArmand),
Noels et Vaudevilles du manuscrit de Jehan Porée. étude critique et historique
(Caen, i 883 , in-8°; extrait du Bulletin de la Société des Antiquaires de Nor¬
mandie).
Julien Havbt.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy t imprimerie de Marchessou fils< boulevard Saint-Laurent , 2 3 .
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tolae sæculi XIII e regestis pontificum romanorum selectae per Pertz,
edjd. Car. Rodenbrrg. — Wolf, Historische Skizzenaus Oesterreich-
Ungarn. — Frry-Herosé, Aus der handschriftlich hinterlassenen Auto¬
biographie. — Ephrem des Syrers, des heiligen Hymnen aus dem Zwei-
strômeland, Dichtungen aus dem syrischen Urtext metrisch insdeutsche
übersetzt u. mit erklàrenden Anmerkungen versehen von Macke. (Tra¬
vail qui témoigne non-seulement de soin et de savoir, mais encore d'un
coût ingénieux.) — Der Tod des Husein ben' Ali und die Rache, ein
historischer Roman aus dem arabischen, libers, v. Wüstenfeld. —
Kleinschmidt, De Lucili saturarum scriptoris genere dicendi. (Travail
méritoire.) — P. Antoine, Aperçu sur la littérature française du xix e siè¬
cle depuis le premier empife jusqu’à nos jours. (Ecrit pour ceux qui
veulent se contenter d’une connaissance superficielle des œuvres litté¬
raires.) — Freymond, Jongleurs und Ménestrels. (Travail instructif qui
prouve des lectures étendues, très digne d’être lu.) — Ausfeld, Ueber
die Quellen zu Rudolf s von Ems Alexander (Plein de choses). — Klop-
stocks Wingolf, Kritische Ausgabe nebst Commentar von Pawel (As¬
sez bon). — Koch, Die Siebenschlâferlegende, ihr Ursprung und ihre
Verbreitung, eine mythologisch-literaturgeschichtliche Studie. (Mérite
tous les éloges qu’on lui a donnés déjà ; l’auteur devrait poursuivre ces
études.)
Deutsche Litteraturzeitung, n° 37, i 5 septembre 1 883 : Schmitz, Die
Bussbücher und die Bussdisciplin der Kirche (Kraus : beaucoup de ma¬
tériaux inédits). — Kirchnkr, Katechismus der Psychologie. — Jrger,
Aus der Praxis, ein pâdagogisches Testament. — Jüschke , Tibetan
Gramm ar. — The book of the Mainyo-i-Khard also an old fragment
of the Bundehesh edit. by Andréas (H. Zimmer : fac-similé qui rend
désormais accessible sous sa forme la plus ancienne un des monuments
les plus importants du parsisme). — K. Wagner, Quaestiones de epi-
grammatis graecis ex lapidibus collectis grammaticae. (Hinrichs : beau¬
coup de soin, de la méthode, des principes sains). — Stangl, Boethiana
velBoethii commentariorum inCiceronisTopica emendationes; Pseudo-
boethiana. (R. Fôrster). — Eraclius, deutsches Gedicht des XIII. Jahr-
hunderts hrg. v. üraef (Lichtenstein : très louable). — Achim von Ar-
nim, Hollins Liebeleben, ein Roman, neu hrsg. von J. Minor. (D.
Jacoby). — Saubr, Geschichte der italienischen Literatur (Gaspary : une
foule d’erreurs et de fautes d'impression, jugements peu profonds, quel*
S iefois plats et absolument superficiels). — Exempla scripturae visigo-
icae XL tabulis expressa, p. p. Ewald et Loewe (Wattenbach). —
Ehrenberg, Der Deutsche Reichstag in den Jahren 1273-1378, ein Bei-
trag zur deutschen Verfassungsgeschichte, eingel. von Arndt (Th. Lind-
ner : travail de valeur). — Delà ville Le Roulx, les archives, la biblio¬
thèque et le trésor de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem à Malte
(Herquet : publication de très grand mérite et d’une non moins grande
utilité). — Schmarsow, Bernardino Pinturicchio in Rom (Janitschek :
travail qui fait honneur au soin, à la sagacité, aux aptitudes naturelles
de l’auteur).
In dem unterzeichneten Verlage ist neu erschienen :
M, TULL1I CICERONIS DE LEGIBUS LIBRI
EX RECOGNITIONEIOHANNIS VAHLENIITERUM EDITI. 1883.
XXIV u. 208 S. gr. 8°. Geh. 4 Mark.
Variai von Franz Vahlen In Berlin, W.
Mohrenstrasse 13/14.
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, *8, RUE BONAPARTE, 18
REVUE ÉGYPTOLOGIQUE
Publiée sons la direction de MM. H. BHUGSCH, F. CHABAS. B. RÉVILLOUT
Première année. 1880, in-4, avec 5 feuilles de planches autographiées. . . . î 5 fr.
Deuxième année. 1881, in-4, avec 12 feuilles de planches autographiées. . . i 5 fr.
Troisième année. i 883 , in-4. — N° i, avec une feuille de planches autogra-
P hiées et 3 planches en héliogravure. L’année complète,
aris, 3 o fr. — Départements, 3 i fr. — Etranger, 3 a fr.
801H1VIA11HE* : PREMIÈRE ANNEE, numéro 1. — Avis de l'éditeur. — Quelques notes
chronologiques sur l'histoire des Lagides par E. Révillout. — Le mot adon par H. Brugsch. -
Notices géographiques. Le lac Maréotis par H. Brugsch.
Numéros 2 et 3 . —Premier extrait de la chronique démotique de Paris : Le roi Amasis et les
Mercenaires. — La syntaxis des temples ou budget des cultes sous les Ptolémées. — La question
du divorce chez les Égyptiens. — Les droits du fils aîné comme Kyrios. — L'intervention des en¬
fants dans les actes chez les Assyriens. — Le divorce assyrien. — Les régimes matrimoniaux dans
le droit égyptien : régime de séparation des biens ; régime dotal ; communauté de biens entre époni;
régime dotal mixte avec communauté partielle. — Reconnaissance d'enfant avec légitimation par
mariage subséquent. — Régime matrimonial chez les Assyriens. — Union légitimée après séduc¬
tion. — Hypothèque légale de la femme et donations entre époux. — L'omnipotence des femmes et
le décret de Philopator sur l'autorité maritale. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — En-
tion. — Hypotheque légal
le décret de Philopator sur
tretieds philosophiques d'i
phique.
Numéro 4. — Second ei
éthiopienne.
Numéro 4. — Second extrait de la chronique démotique de Paris : Les prophéties patriotiques.-
Entretiens philosophiques d'une chatte éthiopienne et d*un petit chacal koufi. — Le reclus de Séra-
réum : sa bibliothèque et ses occupations mystiques selon de nouveaux documents démotiqoes. -
Les arts égyptiens.—Données géographiques et topographiques sur Thèbes, extraites par MM. Brugsch
et Révillout des contrats démotiques et des pièces corrélatives. — Le serment décisoire chez 1»
Egyptiens. — Notes historiques sur les Ptolémées. — Récits de Dioscore, exilé à Gangres, sur k
concile de Chalcédoine. — Notice nécrologique sur M. de Saulcy par M. Oppert. — Correspon¬
dance. — Revue bibliographique.
DEUXIÈME ANNEE, numéro 1. — Second extrait de la chronique démotique de Paris: Les
prophéties patriotiques. — Un fragment de la légende osiriaque. — Le serment décisoire chez te
Égyptiens. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — Récits de Dioscore, exilé à Gangres, snr
le concile de Chalcédoine. — Les sarcophages D 5 et 7 du Louvre. — Un contrat de mariage de
l’an 4 de Psammétique II. — Une vente de maison de l’an 12 de Darius l #r . — Acte de fondation
d’une chapelle à Hor-merti dans la ville de Pharbaetus, en l'an 52 de Psammétique l* r . — Acte de
fondation d'une chapelle à Bast dans la ville de Bubastis, l’an 32 du roi Amasis. — Correspon¬
dance ; H. Brugsch-Pacha. — Nécrologie et nouvelles. — Revue bibliographique.
Numéros 2 et 3 — Lettre à M. Révillout sur les monnaies égyptiennes, par M. Lenormant, de
l'Institut. — Second extrait de la chronique démotique. — Statue a’un ministre. — Les affres de U
mort. — Le sermeut décisoire, — Le groupe Pehti, par Paul Pierret- — La requête d'un Taricheute
d'ibis. — L’antigraphe des luminaires. — Entretiens philosophiques d’une chatte et d’un chacal. —
Un quasi-mariage. — La femme et la mère d’Amasis. — Un prophète d’Auguste et sa famille.—
Authenticité des actes. — Le papyrus grec XIII de Turin. — La loi de Bocchoris et l'intérêt à3o
pour 100. — Les reclus de Sérapéum. — Le roi Anchmachis. — Les pensions alimentaires. —
Données métrologiqucs des prêts ae blé. — Nouvelles mesures agraires. — La tenue des livres en
Egypte. — La valeur de l’huile. — Les mesures de capacité. — Le mot grec cuwdCOÇ écrit hiéro-
glyphiquement, par Brugsch-Pacha. — Quelques poids égyptiens et assyriens. — Lettre de M. Stem.
— Note métrologique de M. Ledrain.— Lettre ae M. Golenischeff. — Poids sémitico-égyptiens. —
Lettre de M, Aurès. — Lettre de M. Oppert, de l'Institut — Comparaison des mesures égyptien¬
nes et hébraïques. —Première lettre de M Révillout à M. Lenormant. — Note sur les plus an¬
ciennes monnaies hébraïques. — Seconde lettre à M. Lenormant. — Un bilingue monétaire. —
Note additionnelle. — Un rapport de police. — Contrat de mariage du temps de Darius. — Livre
d'incantation. —Les poésies bilingues de Moschion.— Revue bibliographique. — Note sur 1^-
querre égyptienne. — Correspondance numismatique. — Nouvelles. — Àug. Mariette-Pacha. —
querre égyptienne. — Correspondance numismatique. — Nouvelles. — Àug. Mariette-Pacha. —
Planches contenant les traductions mot à mot des articles démotiques.
Numéro 4. — Congrès de Berlin (Eug. Révillout) : i* La table ethnique des anciens Egyptiens :
système égyptien, système atricain, système asiatique (H. Brugsch-Pachai ; 2 e la nouvelle édition
du Livre des Morts (E Naville); 3° Concordances entre l’année vague et l’année solaire (Lieblem);
4® une épopée gréco-égyptienne (L. Stern) ; 5° un ancien conte égyptien (Golénischeff) ; 6° sur la
cachette découverte à Deir-el-Bahari par M. Maspéro \Eug. Révillout). — Les ostracade Kamac (A.
Wiedemann). — [IépTtÇ (Jacques Krall). — La particule copte X1N, Z1N (A. Baillet). — Note
de la rédaction. — « Liber Proverbiorum * (M* r Bsciai)
TROISIÈME ANNÉE, numéro i. — Association de Ptoléméc Epiphane à la couronne et qnel-
2 ues autre associations royales — Le tribunal égyptien de Thebes — Récits de Dioscore, exile a
rangres, sur le concile de Chalcédoine — Les prêts de blé. — La vie du bienheureux Aphon, eve-
que de Pemdje (Oxyrinque). — Le martyre de saint Ignace. — Le papyrus Anastasi n* 0. transcrit
et traduit par M. Chabas. — Index du vocabulaire mythologique de M. Chabas. — Nouvelles ac¬
quisitions du Musée égyptien du Louvre. — Nécrologie et nouvelles. — Nota. Sigles dc6 divisions
ae la drachme lors de l'étalon d’argent en Egypte.
Le Puy , imprimerie de Marckessou fils , boulevard Saint-Laurent, 23 .
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N* 41
Dix-septième année 8 Octobre 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RBCURIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
o* MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt
Prix d’abonnement :
Un an, Paris, ao fr. — Départements, aa fr. —• Etranger, 2 5 fr.
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DE LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
OR l'iCOLI DES LANGUES ORIENTALES VIVANTBS, ETC
28 , RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqubt
(Au bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, *8.
MÉLANGES ORIENTAUX
TEXTES ET TRADUCTIONS
PUBLIÉS PAR
PROFESSEURS DE L'ÉCOLE SPÉCIALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
À l'occasion du 6 e Congrès international des orientalistes,
réuni à Leyde (sepiembre 1 883 ).
Un beau volume grand in-8 de 40 feuilles avec tableaux, hélio¬
gravures, etc.«... 25 fr.
RECUEIL DE TREIZE MÉMOIRES
PUBL1Ê8 PAR
MM. H. Derenbourg, Ch. Schkfer, de l'Institut, Barbier de Meynard,
dei l'Institut, P. Favre, A. Carrière, E. Miller, de l'Institut,
L. de Rosny, A. des Michels, L. Leger, E. Picot, H. Cordier,
J. Vinson.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 594, 22 septembre i 883 : Green, Prolegomena to
Ethics, edited by Bradley. (Myers.) — Burrows, The life of Edward
lord Hawke, admirai of the fleet. (Courtney : c’est plus qu’une étude
sur l’amiral, c’est un court sommaire de l’histoire de la flotte anglaise
de son temps.) — Loünsbury, Fenimore Cooper. (Purves : livre digne
d’être lu, la première biographie complète du célèbre romancier.) —
Jacob Grimm, Teutonic mythology, translated from the fourth édition,
with notes and appendix, by Stallybrass. Volume II. (Powell.) — Cur-
rent theology. — A translation from Typaldos. (Edmonds.) — Hendrik
Conscience. — The Library Association at Liverpool. — Pithom and
Rameses, a reply. (Regin. Stuart Poole.) — Tel es-Sagur. (Tomkins.)
— A Sonnet by Pope. (S. Waddington.) — Jron in early Greece. (A.
Lang.) — Bibliotheca wiffeniana. (W. Webster.) — Bezzenberger, Li*
thauische Forschungen, Beitrâge zur Kenntniss der Sprache und des
Volkstumes der Lithauer. (Jane Lee : recherches soignées et entièrement
originales; non seulement un recueil de formes et de mots, mais un
recueil de chants, traditions et mélodies populaires.) —The oriental
Congress. (A. Sayce.) — Indian translitération. (Isaac Taylor.) —
Imhqof-Blumer, Monnaies grecques; publié par l'académie royale néer¬
landaise des sciences. (Barclay \V. Head : ce n’est ni une histoire des
monnaies grecques, ni un manuel de numismatique, c est un choix de
monnaies jusqu’ici en grande partie inconnues.) — The Apollo and
Marsyas at the Louvre attributed to Raphaël. (Conway.) — S 1 John
the Baptist at Timberhili, Norwich. (W. Vincent).
The Athenaeum, ^2917, 22 septembre 1 883 : Cave-Brownb, Lambeth
Palace and its associations, with a supplementary chapter on mediaeval
life among the old palaces of the primacy. — A. von Schiefnkr, Tibe-
tan taies derived from indian sources, translated from the tibetan of the
« Kahgyur », done into english from the german, with an introduction
by Ralston. — Fitzgerald, Kings and queens of an hour, records of
love, romance, oddity and adveniure. — Beowulf, an anglo-saxon
poem, translated by J. M. Garnett. —Ch. E. Davis, The Bathes of Ba*
the’s ayde in the reign of Charles II. (Brillante et agréable contribution
à l’histoire de la plus brillante et de la plus agréable ville de province
de l’Angleterre.) — The other side of Mr Froude’s « leaf from the real
life of Byron. » (Jeafireson.) —The etymology of London (Round : peut
être « fortress of the lake »). — Library Association of the United
Kingdom. — The reports of the royal commission on historical ma-
nuscripts. (Millar). — The Luther Exhibition in the Grenviile Library.
(K. Pearson.) — Hendrik Conscience. — The Oriental Congress at
Leyden.—V ambéry, Der Ursprung der Magyaren, eine ethnographische
Studie. (Très important, si contestable que ce soit.)
Literarisches Centralblatt, n° 3 o, 22 septembre 1 883 : Thoma, Dr. Lu-
ther’s Leben, fürs deutsche Haus. — Schrader, Sprachvergleichunf ‘
und Urgeschichte, linguistisch historische Beitrâge zur Erforschung des
indogermanischen Alterthums. (Bgm. : travail très remarquable, œu¬
vre d’une critique sagace, sobre, mesurée qui cherche à créer de sûrs
fondements à une science qui a trop donné jusqu’ici aux hypothèses;
réfute beaucoup d’opinions insoutenables; prouve que certaines ques¬
tions ne peuvent pas encore être résolues dans l’état actuel des choses;
mérites qui valent tout autant, et qu’il faut estimer au même degré que
les nouveaux et acceptables résultats positifs, acquis par l’auteur sur ce
difficile domaine) — Ehrenberg, der deutsche Reichstag in den Jahren
1273-1378. — Correspondance ministérielle du comte S. H. E. Berns-
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 41
- 8 octobre —
1888
Sommaire s 196. M. Choisît, Essai sur la vie et les œuvres de Lucien. — 197.
Commentaires de César, p. p. Hôlder. — 198. Dillmann, Manuel exégétique
de l’Ancien Testament (premier article). — Variétés : J. Destrem, Document sur
le mouvement populaire du 14 juillet 1789 et sur le meurtre de Foulon et de
Berthier. — Chronique. — Académie des Inscriptions.
19S. — EmbI «nr la vie et le* œuvre* de Laden, par Maurice Croiset.
Paris, Hachette et C, 1882.
Le titre de ce livre ferait croire que M. Croiset a consacré à la bio¬
graphie de Lucien autant de place qu’à l'étude de ses œuvres. Il n’en est
rien, heureusement. Sur treize chapitres, un seul traite de la vie de l'é¬
crivain grec. Bien loin d’en vouloir à M. C., nous lui-aurions demandé
de glisser plus vite sur cette partie de son programme. Les renseigne¬
ments que nous avons sur la vie de Lucien tiendraient dans quelques
lignes; tirer quarante pages de ces maigres données, c’est un regrettable
tour de force. Nous ne nous arrêterons pas aux hypothèses de ce premier
chapitre : elles flottent pour la plupart dans un vide absolu où elles se
dérobent à toute réfutation comme à toute preuve. Au lieu de cette bio¬
graphie presque imaginaire, un ensemble d’informations authentiques
et précises sur l’époque littéraire à laquelle appartient Lucien aurait été
le meilleure introduction à l’étude de ses œuvres.
Dans le chapitre ji, M. C. classe les écrits de Lucien par ordre chrono¬
logique et les caractérise sommairement. Quand on ne sait à peu près
rien de la biographie d’un écrivain, quoi de plus difficile que d'éta¬
blir la chronologie de ses œuvres? Ici encore M. C. remplace les données
qui lui manquent par des suppositions qui lui viennent trop à comman¬
dement. Page 47, il dit que le Jugement des Voyelles « cet amusant plai¬
doyer du Sigma indignement dépouillé par le Tau » a dû être composé
par Lucien à la fin de la première période de sa vie littéraire, à un mo¬
ment où la rhétorique le possédait encore, mais où il avait terminé ses
tournées de conférences pour s’établir définitivement à Athènes. Quelles
sont les preuves de M. Croiset? a Plus tôt Lucien voyageait; or ce genre
de badinage qui porte sur la prononciation attique ne pouvait être bien
goûté qu’à Athènes; plus tard son esprit était tourné vers d’autres pen¬
sées, et il mettait en générai une intention plus sérieuse dans ses inven¬
tions légères ou plaisantes. » Pour relever le seul point spécieux de cette
argumentation, M. C. oublie-t-il qu’à l’époque où vivait Lucien, la soi-
disant spoliation du sigma par le tau était un des faits les plus connus
Nouvelle série, XVI, 41
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2Ô2
REVUE CRITIQUE
des atticistes de tous les pays, un de ceux qu'ils reproduisaient avec
le plus de complaisance dans leurs pastiches? Les lettrés goûtèrent la
plaisanterie de Lucien à Rome aussi bien qu'à Athènes.
Page 48 et suivantes, par une chaîne d’inductions et de déductions qui
nous paraissent peu solides, M. C. arrive à fixer Tan 1 65 pour la date de la
composition de ÏHermotime. Or Lycinus, le principal personnage du
dialogue disant quelque part qu’il a quarante ans, et Lycinus exprimant,
sans aucun doute, les opinions philosophiques de Lucien, M. C. conclut
que Lucien avait quarante ans à l’époque où il composa YHermotimt.
Et c'est du résultat ainsi obtenu qu'il part pour déterminer la date delà
naissance de Lucien et de la composition de plusieurs de ses ouvrages.
A l’exposé de cette méthode chronologique, nous aurions préféré
quelques pages de critique où M. C., qui déclare éliminer treize des piè¬
ces attribuées à Lucien c parce qu'elles lui paraissent présenter des ca¬
ractères différents de ceux des oeuvres authentiques », aurait expliqué
ces différences et justifié cette élimination. M. C. s’y est refusé. « Bien
entendu, dit-il page 43, je ne puis pas entrer dans des discussions qui
rempliraient à elles seules des volumes ».
Nous comprenons que M. C. n’ait pas voulu grossir pareillement üu
livre qui compte près de 400 pages ; mais nous nous serions contentés
d’un simple résumé. En cherchant bien, M. C. en eût trouvé la place et
il y aurait une fâcheuse lacune de moins dans son travail.
Les chapitres suivants, qui forment le corps même de l’ouvrage, of¬
frent une série d’études littéraires et morales. M. C. aborde successive¬
ment l’esprit critique chez Lucien, ses rapports avec les moralistes de
son temps, ses opinions en philosophie et en religion, sa critique litté¬
raire, sa critique d'art, son style, sa fantaisie. On le voit par cette seule
table des matières, M. C. a décomposé dans ses divers éléments la subs¬
tance des écrits de Lucien, pour grouper ensuite ces éléments sous cer¬
taines catégories correspondant aux différents aspects du caractère, du
talent et de la pensée de l’écrivain. Ce système avait le grand avantage
de mettre beaucoup plus vite et plus facilement en relief la personnalité
de Lucien. Mais il avait des inconvénients plus grands encore. Arrivés
à la fin de l’ouvrage, nous connaissons assez bien Lucien —tel du moins
que l’a vu M. C. — mais nous connaissons mal ses oeuvres. On dirait
presque que le système de M. C. ne fait revivre l’écrivain qu’en tuant ses
écrits. Pas un traité, pas un dialogue qui apparaisse dans son orga¬
nisme complet. Tantôt on ne nous montre qu'un fragment, tantôt c’est
bien, si l'on veut, l'écrit tout entier, mais seulement au point de vue abs¬
trait de la morale de Lucien, de sa critique littéraire ou de son style.
C'est ainsi que l’analyse de YHermotime revient trois fois sans que, à
moins de connaître déjà ce dialogue, l’œuvre la plus forte de Lucien*
nous arrivions à nous en faire une idée exacte. Même chose pour
toireVraie que M. C. étudie à plusieurs reprises sans nous apprendre ni
la portée ni la raison d’étre de cette singulière composition ni sa place
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d’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE 203
dans l’histoire littéraire du temps, ni rien de ce que nous fera si bien
voir une simple page du livre de M. E. Rohde sur le roman grec.
Le système de généralisation adopté par M. C. explique-t-il toutes
les lacunes de l’ouvrage? Nous ne le croyons pas. Certes, chacune des
études de M. C. abonde en choses pleines d’intérêt, mais il est décidé¬
ment enclin à supposer connu ce qu’il s'agirait de nous apprendre. Il
développe souvent des points qu’il a indiqués à peine, il donne volon¬
tiers la résultante des faits sans les avoir énoncés. Nous parle-t-il, par
exemple, de Lucien écrivain, il nous dira, p. 594 : « L’antiquité classi¬
que est derrière lui, semblable à une série de foyers lumineux qui l'é¬
claire; toutes ces lumières se concentrent dans son esprit comme dans
un cristal transparent qui les réunit; et le rayon qui en sort les mêle si
intimement que le regard est désormais incapable de les discerner ».
Image très ingénieuse, un peu éblouissante peut-être; mais n’aimerions-
nous pas mieux une étude sérieuse du style de Lucien, des ressources et
des secrets de sa rhétorique? De tous les écrivains grecs il n'en est pas
peut-être un seul chez qui le procédé, la manière joue un plus grand
rôle et soit plus facile à prendre sur le fait. M. C. qui excelle à rajeu¬
nir son auteur, eût trouvé, à ce propos, une comparaison tout indiquée
avec tel de nos littérateurs contemporains dont la manière répète exac¬
tement celle de Lucien.
Enfin les citations de M. C., vrais modèles de traduction pour la fidé¬
lité et l’élégance, ne nous semblent pas toujours très bien choisies. Ceci
s'applique en particulier à quelques-unes de celles qu'il a faites pour
nous montrer sur le vif l'esprit de Lucien. L'esprit de Lucien est un
lieu commun : en lisant les passages des Sectes à VEncan et de l 'Icaro-
ménippe cités d’abord par M. C. (p. 137 etsqq.), on croirait presque
que c’est un préjugé.
En résumé, l’essai de M. Croiset n’est pas une œuvre d'initiation,
mais c’est une lecture qu'on ne fera pas sans beaucoup de plaisir et de
profit si l'on connaît les écrits de Lucien.
J. Nicole*
igy. — CL luit Cæ*arla Bell! Galllcl llbrl VII. Accessit A. Hirti liber
octauus. Recensuit Alfred Hôlder. Freiburg i. Br. und Tùbinge», 1882, Akad.
Verl. v. J. C. B. Mohr (P. Siebeck). vit et 396 pages. Prix : 18 fr. 75.
Pour toute préface, M. Hôlder donne un tableau généalogique des
manuscrits, une description succincte de chacun, et la liste des principales
lacunes. Tout cela tiendrait facilement en une page, et cela suffit, ou
peu s’en faut. Les principes essentiels de la critique du texte de César
sont connus. On sait quels sont les meilleurs manuscrits de la Guerre
des Gaules, et M. H. nous apprend, d’une manière très claire en son
laconisme, quelles sont, selon lui, leur parenté et leur importance rela-
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REVUE CRITIQUE
264
tive. Le texte est basé sur l'archétype (X) de six mss. : les mss. d’Ams¬
terdam 81 (A) et de Paris 5 o 56 (M) A', ceux de Paris 5763 (B) et du
Vatican 3864 (R) = B' (A r -f- B' = a), enfin de Paris 5764 (T) et du
Vatican 3324 (U) == fi (a + 0 = X). La filiation très nettement établie
de ces mss. permet de déterminer la leçon de l'archétype avec une
grande sûreté, et cette leçon est généralement la bonne. Il reste cepen¬
dant bien des passages qui ont besoin d’émendation. M. H. les corrige
soit d'après des mss. autres que les siens, soit d après des éditions an*
ciennes ou modernes, un très petit nombre enfin au moyen de conjec¬
tures entièrement nouvelles*. En outre, beaucoup d'interpolations sont
signalées d’après MM. Paul, Dinter, Dittenberger et autres.
La recension de M. H. donne lieu à deux objections. D abord, M. H.
emprunte certaines leçons, par exception, à des mss. tels que le Paris.
6106, le Vindob. iv, et à d’autres, qu’il appelle simplement détériorés .
Plusieurs de ces leçons sont notées en italiques, ce qui veut dire sans
doute qu’aux yeux de M. H. elles sont dues à des conjectures. Rien de
plus légitime que cette opinion ; on est souvent trop timide à attribuer
de bonnes conjectures aux copistes du moyen âge; quant à ceux du
xv e siècle, on sait assez à quoi s’en tenir. Cependant, il est des cas où
une pareille supposition est peu vraisemblable, comme par exemple
pour probandae 5 , 44, 3 ; et ailleurs, M. H. lui-même, en imprimant
des leçons tirées de mss. détériorés en caractères romains, semble admet¬
tre, lui aussi, qu’elles sont dues à la tradition et non à la conjecture a .
Mais l’archétype (y) de ces détériorés , aussi bien que tous les mss. con¬
nus, doit être issu de X; qu’il le soit directement ou par un intermé¬
diaire ( 5 ) qui lui serait commun avec P, et surtout dans ce dernier cas,
est-il croyable que a et (J soient tombés tant de fois dans une erreur
identique, que y aurait évitée? Et s’il a eu ce bonheur surprenant, pour¬
quoi son témoignage n’est-il pas invoqué régulièrement, aussi bien que
celui de a et de P? Toutes les fois que a et $ se contredisent, l'accord de
Y avec l’un ou l'autre ferait connaître la leçon de X. Il semble presque
impossible que M. H. n’ait pas fait lui-même ces réflexions. Pourquoi
alors ne s’explique-t-il pas sur le parti qu’il a pris? — La seconde
objection est moins importante. En plusieurs endroits 3 , M. H. a adopté
1. Je n’ai garde de dire ceci par manière de reproche. Il me semble au contraire
que ce serait un grand bien si les éditeurs, au lieu d’inonder les textes de conjec¬
tures le plus souvent fausses ou inutiles, se préoccupaient davantage de fournir
à la critique et à l’interprétation une base sûre, par des collations toujours renou¬
velées et une recension méthodique, telles que M. H. nous les donne. Mais il faut
de l’abnégation pour cela ; il faut être moins désireux de briller que de rendre
service.
2. Par exemple, 1, 35 , 1 relatis; 3 , 27, 1 Elusates ; 5 , 17, 3 quoad; 7, 70,
3 coaceruantur .
3 . Comme 1, 7, 3 principem T; 1, 28, 5 condicionem T; 1, 40, 10 conferrent U,
etc. Il est vrai que la proche parenté attribuée par M. H. à ces deux mss. T et U
n’est pas aussi bien établie que celle de A M et B R. T paraît offrir un texte psuxa-
ché.
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d'histoire et de littérature
265
des leçons d’un seul ms., contredites à la fois par d’autres mss. de la
même famille et par une autre famille; ces leçons, selon toute probabi¬
lité, ne se trouvaient pas dans la source commune; il aurait fallu les
signaler comme conjectures.
Le choix des émendations m'a paru, en général, fort judicieux. Mais 1,
2, 1, où M. H. lit d’après Oudendorp M . Messala etM. Pupio Pisone
consulibus (les mss. : m. messala etp . m. pisone consulibus ), il faudrait
admettre : i° que César aurait employé et, contrairement à l’usage;
2° qu'il aurait donné deux noms à l’un des consuls, trois à l'autre;
3 ° que les copistes eussent fait de M . Pupio d'abord M. Publio, puis
4 0 M . P. et enfin 5 ° P. M . On avouera que l’explication donnée de la
leçon des mss. dans la Revue critique , 1881, t. I, p. 349 est plus sim¬
ple : E TP serait une dittographie de M P(ISONE). 1,21, 1 cogno -
scerent me paraît inutile : les éclaireurs ont signalé la présence de l’en¬
nemi ; il s’agit de reconnaître le terrain ; il faut pour cela un officier :
qui cognosceret. 5, 12, 4 au t al iis, que M. H. écrit pour aut taleis
témoigne d’un respect exagéré, j'allais dire puéril, pour la tradition
(aut aliis a U) : respect d’autant moins fondé 1 que d’autres mss. (T, par
exemple) portent aut taleis en toutes lettres, ce qui certes n'a pas l’air
d’étre une conjecture de copiste !
Les notes critiques donnent toutes les variantes des mss. A et B, et
celles des autres mss. dans la mesure où l’on peut admettre qu'elles re¬
montent à une source commune. Ainsi, par exemple, dans le groupe
A', les leçons particulières à M ne sont mentionnées que si elles s'accor¬
dent avec B' contre A, ou s'il y a désaccord général. On gagne ainsi
beaucoup de place sans inconvénient : évidemment les leçons présentées
par M seul contre A B' p ne viennent pas de l’archétype X ; celles de M
qui contredisent A B' ne se trouvaient pas dans a; ce sont des erreurs
toutes récentes qui n'ont aucune valeur. On peut se demander s’il y
aurait eu grand dommage à agir de même pour A et B. On aurait re¬
tranché une quantité de lapsus insignifiants pour la critique de César,
et dont l'intérêt paléographique, dans des mss. du x« siècle, n'est pas
très grand non plus. Il n'y a guère que l’orthographe (très fautive) de
l'archétype dont on obtient par ces variantes de détail une image plus
fidèle. —M. H. rapporte encore dans les notes des conjectures et des
athétèses proposées par différents critiques, mais celles-là seulement qui
ont un haut degré de probabilité et qu’il n’est pas éloigné d'adopter lui-
même.
On peut relever dans ces notes un certain nombre d’inconséquences
et d'inexactitudes. Pourquoi répéter cent fois Heluitii , Heluicii , Hael -
1. Les mss. de César portent mille traces de l’orthographe barbare des vi* et
vu* siècles, dont un trait saillant est la confusion de e et i, surtout devant d’autres
voyelles. Il faut croire que l’archétype X (ou a?) est de cette époque. Parmi ses des¬
cendants, c’est B qui paraît avoir subi le moins de corrections en ce qui touche à
l'orthographe.
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REVUE CRITIQUE
266
uicios , etc., tandis que dans Aeduus la variante e pour ae est seule
mentionnée? Il faut avoir recours à d'autres éditions pour apprendre
que ce nom commence régulièrement par H dans les bons mss. Pour¬
quoi les abréviations de populus romanus, partout employées, du moins
par B M, ne sont-elles enregistrées qu’à partir de 1, 3 o, 3 ? Pourquoi
ne dit-on ni à la page vii ni à la page 4 que la lacune de B 1, 7 à 20
vient de ce que des feuillets sont arrachés, que ce n’est donc pas à pro¬
prement parler une omission? 1, 17, 3 l’athétèsede debeant est attribuée
à M. Dinter : Nipperdey, p. 53 , la fait remonter à Daehne, Duebner en
fait honneur à M. Madvig. — Enfin, voici quelques rectifications que
je suis en mesure * d’apporter à la collation des mss. B M pour le li¬
vre I : 21, 2 titum labienum B M;2Ô, 1 impedimenta M ; 3 i, 3 p. t.
haeduos B p . t. heduos M; 33 , 1 futura e (e biffé et gratté) B; 35 ,
4 messalla B; 39, 2 periculum ... magnum (en surcharge) de seconde
main B; 39, 5 etiam ii qui M ; 39, 6 et (en surcharge) de seconde main
B, inter de première main B; 40, 10 uni (en surcharge sur itineris )
de seconde main B; 43, 5 beneficium corrigé en beneficio B; 47, 4ma*
rium titum, mais avec 1 en surcharge, pour faire titium M ; 52 , 2 esse
omis B. Tout cela n’est pas très grave. Il n’eût pas valu la peine d'en
parler peut-être, si la réputation d’exactitude de M. H., si bien mé¬
ritée d’ailleurs, ne pouvait porter à croire que désormais toute nouvelle
vérification des mss. serait inutile. Après les collations les plus minu¬
tieuses, il n'arrive guère qu’on ne trouve encore à glaner.
Le volume se termine par une collation du ms. de Paris 6842 B (ex¬
traits), deux index uerborum semblables à ceux de l'Horace Keller et
Hôlder, l'un pour les livres I à VII, l’autre pour le VIII* livre *) ; enfin
des Addenda et corrigenda 1 2 3 . L’impression est très soignée 4 , trop
luxueuse dans les notes si ce sont les frais occasionnés par là qui sont
cause du prix énorme du volume. M. H. a fait figurer par diverses
combinaisons typographiques, et même par des caractères fondus ex¬
près, des abréviations, des mots effacés et autres détails qu’il était aisé
de décrire. L’édition de M. Hôlder méritait d’être très répandue. Il ne sera
1. fcrâce à l’accord de mes propres collations avec celles de Nipperdey, de Frigcll
ou de Duebner. Je supprime quelques minuties sur lesquelles je puis m’être trompé
aussi bien que M. Hôlder.
2. Au mot nituntur pour 63 , 3 lisez vu, 63 , 3 . Les mots Teutomatus et Tovtorna*
tus devraient être pourvus de renvois réciproques. Au reste, l’exactitude d’un iode*
de ce genre ne peut être vérifiée que par un usage prolongé.
3 . J’y trouve une singulière inadvertance : « I, 44, 26 fratres ] e S. C. fratrts
Maxim. Bonnet. » M. H. vise sans doute un article de la Revue critique , 1881, t.l,
p. 347 (note) où l’on rapporte une phrase de M. Guardia qui mentionne cette an¬
cienne leçon; je n’en suis nullement l’auteur.
4. 7, 5 g, 5 lateram lisez altérant) page vi, ligne 16, effacez le premier et; ligne 16
1. 3864 (à moins que l’erreur ne soit du côté de Frigell, Duebner, etc.); p. * 4 » 1 «^
des notes, effacez le 47; p. 28, ch. 46, 11, note, il faut / en surcharge sur coal*
quium; p. 100, ch. 17, 8, note, 1 . quo B’ T.
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d’histoire et de LITTÉRATURE 267
pas beaucoup plus facile de l’acquérir que celles de Nipperdey, qui est
aujourd’hui inabordable, ou de Duebner, qui Ta été dès l'origine.
Max Bonnet.
198. — KarzgefaMlea exegetltches Handbucli zum Allen Testament.
Elfte Lieferung. Die Genesis, von Dr. Augtist Dillmanw, ord. professor der Théo¬
logie in Berlin. Vierte Àuflagt. Leipzig, Verlag von S. Hirzel, 188a.
I
L’exégèse biblique, si négligée chez nous, est cultivée en Allemagne
avec un soin empressé et avec une hauteur de vue qui s’impose à notre
attention. Toutes les découvertes faites sur le domaine de l'archéologie,
de la géographie, des religions et des littératures des peuples sémitiques
sont mises à contribution pour élucider ce faible reste de la littérature
prophétique d’Israël, dont une fortune exceptionnelle a fait le livre de
l'humanité civilisée. C'est surtout le Pentateuque qui a été, dans les
derniers temps, l'objet de nombreux travaux, parmi lesquels les com¬
mentaires de M. le professeur Dillmann occupent un rang éminent
aussi bien par la solidité de l’érudition qu'il y déploie que par le calme
serein de la réflexion qui sait se tenir dans le juste milieu entre les deux
extrêmes opposés qui s'appellent conservatisme et hypercritique. M. D.
admet tous les résultats de la critique relativement à la formation des
quatre premiers livres du Pentateuque ou plutôt de l’Hexateuque (en y
joignant le livre de Josué) par la fusion de trois documents indépen¬
dants, cotés A B C, fusion due à un rédacteur postérieur (R) qui y
rattacha le Deutéronome -Josué, D, lequel formait également un livre
séparé. Pour l'orientation des lecteurs, je crois utile de donner un
aperçu général du caractère distinctif de chacun de ces documents.
Le document A , nommé élohiste parce qu’il emploie l’expression
Elôhtm pour Dieu, a un caractère sacerdotal, aime les généalogies, les
aperçus statistiques et chronologiques, recherche les termes savants et
précis du droit et limite les récits développés aux événements qui font
époque, comme la création, le déluge, l'alliance avec Noé, l’alliance
avec Abraham, la descente des patriarches en Egypte, ou bien aux
faits qui motivent la possession de certains droits et privilèges, comme
l’acquisition du droit d’aînesse par Jacob au détriment d’Esati. La façon
dont il parle de Dieu est sévère et digne ; il ne fait même pas men¬
tion de l'existence des anges 1 et, à plus forte raison, exclut-il toute
1. Cettê proposition ne me semble pas assez sûre. Voyez Genèse 1 , *6.
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REVUE CRITIQUE
268
pensée et expression qui rapproche trop l'anthropomorphisme ou les
conceptions mythologiques, si aimés des poètes et des penseurs popu¬
laires. Son auteur appartient sans doute au cercle du sacerdoce jérosa-
lémitain. La date de sa composition, grâce aux nombreuses modifications
qu’elle a subies ne peut être déterminée avec certitude, mais M. D.,
s'appuyant spécialement sur les données ethnographiques des chapitres
x et xxxvi delà Genèse, se décide en faveur d'une antiquité relativement
reculée.
Les deux autres documents B et C sont d'une nature toute différente,
en ce qui concerne leur origine et le but qu'ils poursuivent. Ce sont, à
de rares exceptions près, des écrits mi-historiques et mi-légendaires,
groupant ensemble tout ce qu'on racontait dans les sphères populaires
sur les anciens temps. L'un de ces écrits, B, nommé encore par quel¬
ques-uns le second élohiste, parce que le nom de Dieu y est encore
Elôhîm , peut être désigné le livre mythico-historique israélite. Il offre
les plus riches informations des légendes locales concernant les lieux
saints des parties moyennes et orientales du pays et se préoccupe sur¬
tout des avantages accordés à Joseph, tout en laissant deviner l'ancienne
importance de Reüben. La représentation de Bethel en qualité de sanc¬
tuaire où l'on apporte les dîmes, rend hors de doute que le livre fut
écrit dans le royaume d'Israël. Ce livre n'est arrivé jusqu’à nous que par
quelques fragments fondus dans les autres documents. x Il n’est pas sûr
qu'il ait porté en tête une histoire de la création ; il devait en tous cas
s’éloigner à cet égard des autres narrations. Il ne possédait pas de récit
du déluge et se rapprochait des théories phéniciennes sur le développe¬
ment de la première humanité, tandis que les documents A et C s’ac¬
cordent plutôt avec les théories babyloniennes. Dans les affaires du
culte, ce livre fait voir la façon dégagée des tribus israélites, mais con¬
damne l'adoration des terâphîm et des idoles. Il parle beaucoup d’anges
et de révélations nocturnes, considère Abraham comme prophète et
cherche à démontrer que le plan de Dieu révélé aux anciens s’est réalisé
successivement par l’ingérence divine. Ce livre appartient sans aucun
doute au temps le plus florissant de la prophétie dans le royaume des
dix tribus, c'est-à-dire au x® ou au ix® siècle au plus tard.
Le troisième écrit, C, celui du jéhoviste, où le nom donné à Dieu est
constamment Jého va, porte un caractère prophétique. Contrairement à l’a¬
vis de MM. Schrader et Reuss, M. D. lui attribue une origine judéenne.
L’auteur de ce document puise souvent dans .A et B, surtout dans le der¬
nier qu'il surpasse par la vivacité et la beauté de ses descriptions. Des
trois narrateurs, c’est lui qui montre la connaissance la plus profonde
relativement à l’origine et au développement du péché dans le genre
humain, aux mesures prises par Dieu pour en empêcher l’extension,
à son plan de salut, à l’élection du peuple d’Israël pour le bien de l'hu¬
manité. Il représente les patriarches comme des prototypes et des mo¬
dèles et combat avec persistance les usages idolâtriques des dix tribus.
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d’histoire et de littérature 269
L’esprit qui l’anime est celui des prophètes et son âge se fait aussi re¬
connaître pour leur être contemporain. Par rapport à la langue et au
style de ses narrations, C se rapproche plus de J? que de A, au point que,
malgré quelques nuances distinctives, les narrations de C ne se
dégagent pas aisément de celles de B avec lesquelles elles sont con¬
fondues par le rédacteur. Un des mérites de M. D. consiste dans le
soin particulier qu’il a consacré à faire, autant que possible, la part
exacte de ces deux sources si apparentées.
Les trois documents A B C, après avoir circulé séparément et acquis
un certain degré d’autorité parmi les lettrés, furent fondus ensemble
plus tard par le rédacteur (R) sous la forme que les quatre premiers li¬
vres du Pentateuque ont aujourd’hui, à l’exception toutefois de quel¬
ques changements et corruptions qui s’y sont produits à des dates
relativement récentes. Autant que cela faire se pouvait, le rédacteur don¬
nait la parole à ses auteurs, mais une simple juxtaposition de leurs
narrations n’était pas toujours réalisable, ne lui semblait pas d’une uti¬
lité bien évidente. Quand les versions divergeaient trop l’une de l’autre, il
prenait pour base l’une d’elles et ne conservait des autres que quelques
particularités intéressantes qu’il intercalait dans le récit principal après
les y avoir adaptées par des soudures ou par de légers adoucissements ou
par des remarques explicatives. Dans la Genèse, A sert de cadre au ta¬
bleau, mais le récit intégral de ce document ne s’étend que jusqu’à x,
26, celui de x, 27-32 a été abrégé, et tout le reste, relatif à l’histoire
d’Abraham avant le chapitre xu. à la révélation à Isaac, au séjour de
Jacob à Paddan Aram, et à toute l’histoire de Joseph avec la descente de
Jacob en Egypte, a été abandonné et remplacé en grande partie, par
les narrations de B . De ce document israélite, le rédacteur n’a accueilli
que fort peu dans l’histoire des origines comme, par exemple, ch. iv-vi,
1-4, peut-être aussi les chapitres xiv et xv. Le fond de l’ensemble forme
néanmoins le document C, dont les idées convenaient le mieux au
rédacteur.
M. D., à l’opposé de l’opinion de M. Wellhausen, soutient que le do¬
cument A est antérieur à l’exil. Ses arguments, que je regrette de ne
pouvoir exposer ici, me paraissent des plus solides l .La question relative
à la date des sources pentateutiques est réservée pour la fin de l’Hexa-
teuque.
L’analyse rapide que je viens d’extraire de l’introduction suffit pour
fixer la position qu’occupe M. D. dans la critique biblique, mais pour
connaître les raisons dont le savant auteur étaie chacune de ses propo¬
sitions, il faut lire le commentaire tout entier et ne perdre aucune des
observations qui y sont consignées, car M. D. possède à un haut degré
Fart de joindre l'extrême concision à l’extrême clarté et d’instruire sans
accabler. Son argumentation comme sa diction coule de source vive et
v. J'ai défendu cette opinion par des arguments tout différents dans Mélanges de
critique et d’histoire, pp. 107, 108.
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REVUE CRITfQUE
27O
atteint son but sans brusque détour ni bond artificiel. L’ensemble est
conduit avec un tact et une mesure admirables et sous ce rapport le com¬
mentaire de M. D. me paraît devoir longtemps encore chercher son
égal.
Voici cependant quelques points de détail que j’ai notés au courant
de la lecture et que je prends la liberté de soumettre au savant auteur :
P. 6. J'ai montré dans Mélanges de critique et d’histoire, p. 38 i
suiv., que le principe du désir (x66oç) dans la cosmogonie phénicienne
de Philon deByblos est dû à des tendances hellénisantes. L’introduction
dans cette cosmogonie du principe également grec de l'Oeuf cosmique,
dont auraient été formés le ciel et la terre, semble reposer, en outre, sur
une fausse interprétation de l’auteur précité, car, autant que je vois, chez
Philon, l'œuf symbolise seulement la génération des espèces animales
( ibid. t p. 382). — P. 16. En dépit de ma meilleure volonté, je ne peux
admettre avec l’école critique que le document élohiste ait eu primiti¬
vement pour suscription la formule « Celles-ci sont les générations du
ciel et de la terre lorsque Dieu les eut créés » formule qui, avec quelques
modifications, sert de souscription dans le texte actuel (11, 4 a ). Après
une pareille introduction, l’expression beréshtt € à l’origine «(comme le
traduit très bien M. D.), formant elle-même une introduction, devient
oiseuse et superflue. M. D. le sent lui-même et se voit obligé de l'attri¬
buer au rédacteur, mais on peut se demander si la critique ne tourne
pas ici dans un cercle vicieux. Si le transfert de la formule fait tort au
contexte, pourquoi l’entreprendre ? Est-il donc si indispensable que
tous les paragraphes de l'Elohiste commencent par cette formule? On
me dira que le verset 11,4 a, si on lelaisse à sa place, dérange le système
documentaire admis par la critique ; mais à cela je répondrai : tant pis
pour le système, s’il ne peut se soutenir qu’au moyen de manipulations
arbitraires. — P. 20. Rien ne force de supposer une différence entre le
septième jour (sabbat) qui commence, d'après la législation hébraïque,
par la nuit de vendredi et les six autres jours qui commenceraient par
le matin. Dans la description du premier jour, l'auteur biblique ne
prend au chaos ténébreux que la durée de 12 heures qui précède la
création de la lumière, durée pendant laquelle les ténèbres dominent
encore après la création des luminaires *. — P. 22. M. D. a mille fois
raison de repousser l’hypercritique qui prétend deviner que tel ou tel
mot de la Genèse est d'origine araméenne et, par conséquent, postérieur
à l’exil. Ces singulières prophéties lexicographiques sont, pour la plupart,
démenties par les découvertes récentes. Pour ce qui est tout spécialement
1. Au verset Lévitique xxnr, 32 , les expressions « au soir » et a du soir au soir ■
ont pour but de renforcer la rigueur du jeûne. Quant à l’ordre d’immoler l’agneau
pascal entre les deux soirs (deux lumières), Exode, xn, 6, il vise à concilier deux
prescriptions divergentes : la défense de travailler pendant la fête et la nécessité de
célébrer la pâque dès l’entrée du t 5 Nissan, c’est-à-dire le soir du 14. Ces versets
ne prouvent donc pas que le jour civil partant du matin ait jamais été en usage
dans le culte juif.
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d'hISTOIRK et DE LITTERATURE 2J I
de la racine raqa\ elle forme le phénicien mirqa 1 2 3 (ou meruqqa') * et Tas-
syrien rukku * (pour ruk’u) qui signifient « plaque ». — P. 23 . Je crois
que l’omission de la formule t Dieu vit que c était bon » au second jour
de la création s’explique par cette circonstance que, suivant la concep¬
tion hébraïque, le firmament e st la demeure de la divinité et n’est d’au¬
cune utilité pour les hommes. — P. 3 o. Demût se trouve en assyrien
sous la forme dimêtu 1 « apparition, fantôme ». — P. 34. Il me paraît fort
douteux que le verset 1, 29 recommande à l’homme le régime végé-
taire. Le verbe râdâ au verset précédent (cf. v. 26) marque toujours
l’exploitation violente et sans pitié 4 de l'objet possédé. Du reste, quel
autre usage, si ce n’est celui de l’alimentation, l’homme peut-il faire des
poissons et des reptiles? Tout ce qu’on peut dire, c’est que le plan de
l’auteur exigeait d'insister uniquement sur les moyens d’alimentation
que l’homme trouve partout dans le règne végétal et qui, vu la rareté de
la nourriture animale chez les peuples agricoles, surtout dans l’antiquité,
peuvent être regardés comme un don gracieux de la divinité. Au verset
3 o, où il s’agit delà nourriture des animaux, Tauteur a également fait abs¬
traction des carnivores qui, conformément aux idées de son temps, for¬
maient une minorité infime dans la série desêtres vivants. — Pp. 38-40.
J’ai produit ailleurs 5 quelques considérations contre l’hypothèse qui fait
du verset Genèse 11, 4 b la suscription d’un récit nouveau et même
opposé à celui du chapitre précédent. Les arguments qu’on produit en fa¬
veur de cette opinion ne m’ont pas convaincu, mais je réserve cetteques-
tion à une occasion plus propice. Je remarquerai seulement que rien
n’autorise à attribuer au rédacteur l’insertion de Elôhim après Iahwé aux
chapitres n et ni. Cet auteur qui, suivant la thèse des critiques, ajoute
et retranche, arrondit et modifie en toute liberté les documents qu’il
réunit et qui n’a certainement pas eu l’intention de faciliter aux savants
modernes la séparation des originaux, cet auteur, dis-je, aurait plutôt
remplacé Elôhim par Iahwé dans tout le premier récit, ou du moins
aurait-il mêlé ces deux noms. En faisantainsi, il aurait eu pour excuse
le désir d’indiquer que la création de l’univers est l’œuvre du Dieu vrai,
Iahwé, tel que le prophétisme le comprend. Mais à quoi bon insérer 2 ?/d-
him dans un document jéhoviste, où la création du monde n’est mention¬
née qu’en passant? S’il fallait absolument que le rédacteur eût modifié
quelque chose aux noms divins de ces narrations, j’inclinerais plutôt à
penser quelepremierrécitportait primitivement Iahwé-Elohim aussi bien
que chap. 11 et m; là, du moins, l’expression « Iahwé le (vrai) Dieu », si
ce sens est exact 6 , serait parfaitement à sa place. Mais au fait, aucune né-
1. Corpus inscriptionum semiticarum, p. 107.
2. Lotz, Die Inschriften Tiglalhpileser’s, l, p. 124.
3 . Halévy, Documents religieux de l'Assyrie et de la Babylonie y texte, p. 2.
4. C’est aussi le sens du verbe Kdbash (v. 28;; cf. Nombres xxxii 22.
3 . Voir M C. H., p. 5 i, note.
6. Pour ma part, j’en doute fort : il faudrait Iahwé hdelôhîm. Dana Exode ix, 3 o,
le mot Elôhîm semble être une variante accueillie dans le texte.
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REVUE CRITIQUE
272
cessité n’impose à soupçonner un remaniement quelconque dans les
noms divins. Comme produit de la réflexion religieuse (Exode, m, i 3 -i 5 ),
le nom lahwé serait un anachronisme dans le récit général de la créa¬
tion, lequel ne comporte que le nom commun Elôhtm . Dans le récit
particulier des rapports fréquents de Dieu avec le premier homme
(n-111), au contraire, la mention de lahwé est indispensable et l’auteur
ne lui adjoint Elôhtm qu’afin d’effectuer la transition. — P. 5 o. Quoi
qu’on dise, l’esprit pratique de la Bible est tout ce qu’il y a de plus con¬
traire à Pidée que la création de l'homme ait précédé celle des plantes
dont il tire sa nourriture; du moins le narrateur aurait-il dû ajouter
que la production des plantes alimentaires y suivit immédiatement. Au
lieu de prendre cette précaution indispensable et élémentaire pour l’exis¬
tence de l’homme, Dieu, dans cette narration, se donne le temps de
planter dans le lointain et à son propre usage un jardin magnifique où
il fait pousser des arbres délicieux autant qu’extraordinaires; puis,
quand tout est prêt, il y transfère l’homme qui, soit dit en passant,
devait déjà être mille fois mort de faim, avec l’ordre de le cultiver et de
le surveiller ! Eh bien, non, on n’est pas autorisé à imputer au jéhoviste
un système pareil, d’après lequel Dieu ne crée l’homme que parce qu’il
a besoin d’un jardinier! Ajoutez que ce récit ne mentionne ni la
création des plantes hors des arbres du paradis ni la création des
animaux aquatiques dont la multitude et les formes prodigieuses (1,21)
servent d'images aux poètes (Isaïe, xxvn, 1 ; Ezéchiel, xxix, 3 ; Job, il,
25 ); cette lacune montre bien que l'auteur se réfère au récit du chapitre
précédent. Le verset 19 a n’est qu'une reprise de 1, 20-21, 24-25 ayant
pour but d’indiquer que les animaux ont été créés pour Futilité de
l'homme. — P. 65 , Nefesh ‘haxyd (11, 19) étant du genre féminin ne
peut, comme glose, se rapporter au suffixe masculin de lô . Je pense
que cette expression est le régime du verbe yiqrâ (cf. 1, 5, 8,10).
Au verset 7, l’homme est déclaré nephesh * hayyâ , c’est-a dire « être
vivant par excellence, celui dont la vie importe seule au créateur •;
ici, où il s’agit de lui adjoindre une aide inséparable et digne de lui,
Dieu lui amène les animaux pour voir si, gagné par une sympathie
spontanée pour l’un d’eux, il se déciderait à transporter sur celui-ci ce
nom glorieux et l’accepterait ainsi comme son aller ego et son sembla¬
ble. Mais celui-ci, animé du souffle divin, sent une antipathie ins¬
tinctive contre une trop grande intimité avec les animaux et se contente
de leur donner des noms qui servent à marquer les espèces et qui ne sont
en aucun rapport avec son être. La forme de cette légende a visiblement
pour but de combattre les habitudes monstrueuses de bestialité qui étaient
très répandues en Egypte.— P. 72. Sur le mot i âlé{ ni, 7) voyez Mélanges
de Critique et d'Histoire, p. 202. —P. 90. L'expression t vers Abel et son
offrande, vers Caïn et son offrande (iv,4, 5 )i s'explique par cette circons¬
tance que la divinité est censée invitée à assister au sacrifice. La raison du
rejet de l’offrande de Caïn a été donnée dans M. C. ÜT. p. 62. — P. 92. h
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d'histoire et de littérature
273
me réjouis de trouver ici quel* correction àtwayyômer[\v, 8)en wayyish-
môr que j'ai proposée, il y a longtemps, avait aussi été faite par quelques
exégètes. Un autre exemple de la confusion de shxn avec aleph est le
mot beé'hdt (Proverbes, xxviu, 18) pour beshahat. — P. 94. La ven¬
geance promise contre qui tuerait Caïn (iv, 1 5 ) n’est pas contraire à
l’idée que le meurtrier appréhendé soit un animal de proie (pour mdqa\
cf. I, Rois, xm, 24) ; voir ix, 5 . Il n’est donc pas nécessaire d’attribuer
cette narration à un autre auteur. La circonstance que Caïn devient
constructeur d'une ville (17), c'est-à-dire de maisons entourées d'une en¬
ceinte, ne contredit pas la condamnation du verset 12, car les nomades
de l'Arabie, et ce sont les seuls dont l'auteur ait connu le genre de vie,
sont toujours concentrés autour de petites villes où ils se procurent les
armes ou les objets de parure dont ils ont besoin. M. D. remarque
très bien que par l’expression wayehi bôné ‘îr, l'auteur indique que
Caïn a commencé la construction de la ville et que celle-ci a été termi¬
née par d’autres. Ces autres sont naturellement ses petits-fils, surtout ceux
qui ont fait de l’élève du bétail ainsi que du travail des métaux la bran¬
che principale de leur industrie (20, 22). — P. 97. Je pense avec le
Dr. Frankel 1 que le texte primitif des Septante portait 0 o 6 ïk Kafv au
lieu de 0. xat — P. 11 5 . Comme les versets, vi, 11,2 ne parlent que
des agissements des anges, il ne peut être question, au verset 3 , de l’a¬
baissement de l’esprit de Dieu dans l’homme. Ce dernier verset étant
visiblement corrompu, je proposerai d’en restituer la première partie
comme il suit : lôyikkôn (pour y âdôn) rû‘hî bââddm le^ôlâm beshag-
gâm [ki] hû bâsdr « (Iahwé dit) : mon esprit ne demeurera (cf. Psau¬
mes, clx, 11) pas toujours dans l’homme à cause de leur (des anges) erre-
ment, car il est chair. » Dieu prévoit que la nature charnelle de l’homme
ne résistera pas longtemps aux instigations des anges rebelles, il fixe
donc son existence sur la terre (non la longueur maximum de la vie hu¬
maine 2 ) à 120 ans. Les versets suivants énoncent que la corruption du
genre humain alla en grandissant au point de rendre nécessaire un ca¬
taclysme général.
(A suivre). J. Halévy.
VARIÉTÉS
Document rar le mouvement populaire du 14 Juillet 1T§9
et sur le meurtre de Foulon et de Bertliler.
La Revue historique (Tome I, 2 0 fascic.) a publié un document (inter-
1. Vorstudien der Septuaginta, p. 66.
2. Comme la corruption prévue et accomplie plus tard affectait l’espèce humaine
tout entière, la mesure préventive prise par Dieu, doit aussi avoir en vue l’espèce
humaine en général et non pas seulement les individus en particulier, dont la durée
de vie moins longue n’empêche nullement l’extension de la démoralisation dans les
générations suivantes.
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REVUE CRITIQUE
274
rogatoire du nommé Desnot} qui donne de curieux renseignements sur
l’état d’esprit de la population parisienne, à l’époque du 14 juillet 1789.
A ce point de vue, la pièce suivante, qui n’apporte, du reste, aucune
révélation nouvelle sur les événements en eux-mêmes (sauf peut-être
quelques détails secondaires de l’exécution de Foulon et Berthier), paraîtra
tout aussi frappante. Elle montre bien quelles haines implacables l’an¬
cien régime avait accumulées contre lui.
Soit par distraction, soit par quelque motif que je ne devine pas, l’au¬
teur de la lettre que l’on va lire, n a pas signé son œuvre; il n’est pas
impossible que cette pièce ait été destinée à un mode quelconque de pu¬
blicité (lecture dans une réunion de patriotes, communication à telles ou
telles personnes de la ville, etc.); l’homme qui a écrit cette lettre a pu
penser, dans tous les cas, qu’elle circulerait de mains en mains dans la
contrée; cet usage de se donner les nouvelles politiques par le moyen de
correspondances privées était alors fort répandu, car la lecture des jour¬
naux, surtout dans les provinces éloignées de la capitale, était loin
d’avoir pénétré, comme elle pénétra un peu plus tard, dans les habitu¬
des de la population des départements. Ce serait donc peut-être à un
motif de prudence personnelle, motif explicable, à une époque ou le ré¬
sultat final de la révolution pouvait encore sembler une question sou¬
mise à quelques aléa , qu’il faudrait attribuer l’absence de signature.
L’auteur du document se dit comédien; j’ai inutilement cherché à
découvrir, par la lecture des almanachs des théâtres de 1789 et 17901e
nom qui manque ici.
M. Auguste Fourès, adjoint au maire de Castelnaudary, de qui je
tiens la pièce publiée ici, a du moins, en consultant les registres du club
de sa localité *, pu me fournir quelques renseignements sur le rôle ré¬
volutionnaire du personnage auquel elle était destinée. Je vois, par les
notes que M. Fourès a l’obligeance de me transmettre, que Metgé,
membre du club de Castelnaudary, dès 1790, préside plusieurs fois en
l’an II, les séances des Jacobins de cette ville ; le 22 floréal de la même
année, un arrêté du représentant Chaudron-Rousseau, le nomme prési¬
dent de cette société o régénérée * ; — pendant les Cent Jours, on le re¬
trouve conseiller municipal de sa ville.
Jean Destrem.
« A Monsieur, Monsieur Metgé, avocat en parlement,
à Castelnaudary.
« Paris, le 26 juillet 1789.
« Il est tems, mon cher ami, que je te donne de mes nouvelles. L'état
de comédien que j’ai embrassé depuis deux ans, m’avait fait quitter cette
x. Archives de Catelnaudary, registres de la Société des amis de la constitution de
cette ville. Trois volumes (I. 28 novembre 1790-18 novembre 1792; II. *5 no¬
vembre 1792-22 nivôse an II; III. 1 pluviôse an II-19 pluviôse an III.
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d’histoire et de littérature
275
capitale pour parcourir la province, afin de m’y perfectionner; m'y
voila rentré, et je n’en sortirai pas sans avoir débuté : j’ose t’avancer
sans prévention que j’y ai fait les plus grands progrès, le succès que j’ai
eu dans trois rôles que j'ai joués sur le théâtre de M. le comte de No-
gent, me donne beaucoup d’espoir de réussite sur celui de la comédie
Italienne; mon emploi est celui que jolie Trial, et pour te mettre
mieux au fait, ce sont les mêmes rôles que Chevalier jouait à Toulouse.
c Tu as sans doute appris les révolutions qui se sont oppérées dans
cette capitale depuis plus d’un mois, mais, te connaissant bon patriote,
je dois te rendre un compte exact de ce qui s’est passé depuis le 12 du
courant.
« Le mardi 14, était, s’il faut en croire le cri public, l'époque d’une
incendie et d’un massacre général : de toutes parts nous étions environ¬
nés de troupes et canons, on nombrait environ cinquante mille hom¬
mes, qui n’attendaient soi-disant que le signal. Les scélérats auteurs
de ce complot odieux voulurent sans doute s’assurer auparavant desd.
troupes, ils ne tardèrent pas à s’appercevoir que la majeure partie se dis¬
posait à se ranger du côté du liers-état, ce qui derrangea leur plan.
c Le renvoy de M. Necker, confirmé le dimanche 12, fit soulever le
peuple. Il se porta en foule chez Curtius *, prit deux bustes en cire re¬
présentant M* r le duc d'Orléans et M. Necker et les promena dans toute
la ville, les gardes française se joignirent à lui, arrivés à la place
Louis Quinse, à six heures du soir, le prince Lambesc qui était à la tête
d’un escadron de son régiment royal-allemand fit une sortie sur le peu¬
ple dans le jardin des Thuilleries oli il massacra, dit-on, un vieillard
qu’il trouva sur son passage et qui expira sous ses coups; ce coup de son
autorité jetta l’aliarme dans tous les esprits. Alors le citoyen de Paris
que tu connais si docile et si affable devint homme. On fit fermer les
spectacles, le tocsin qu’on sonna de toutes parts augmenta la terreur et
son courage, et ne suivant que le premier mouvement plusieurs prirent
les armes, secondés et encouragés par les braves soldats des gardes fran¬
çaises, ils firent feu sur un détachement de royal-allemand qui était de
piquet sur le boulevard à côté du dépôt des gardes françaises et tuèrent
cinq cavaliers et un cheval; cet évènement arriva à dix heures du soir,
ce détachement se retira sur le champ, la nuit se passa dans l’allarme,
et toute la populace qui était innombrable parcourut toutes les rues. Le
lendemain elle força tous les magasins des arquebusiers, y prit toutes les
armes qui s’y trouvèrent, comme fusils, sabres, épées, etc., se porta aussi
au garde-meuble du roy, et en fit de même. Pendant ce tems les ci¬
toyens prenant de l’énergie s'assemblèrent, il se trouva avant la nuit de
quoi former une armée de 100,000 hommes, il fut formé sur le champ
soixante districts ou chaque individu allait se faire inscrire et le même
soir il y eut une garde bourgeoise journalière de 48.000 hommes avec
1. En marge ; Guillaume Curtius.
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REVUE CRITIQUE
276
un ordre inconcevable, on eut dit des troupes réglées! Le lendemain
mardi, jour à jamais mémorable 5 o,ooo hommes au moins [se portèrent
à l’hôtel royal des invalides, s’emparèrent des canons, qui étaient char¬
gés, forcèrent tous les magasins d’armes, et emportèrent tout ce qu’ils
purent en trouver (on m’a assuré qu’il y avait plus de 40,000 fusils)
pendant ce tems une autre détachement s’était rendu à la Bastille pour
en faire autant (tu sais qu’on n’y entre pas comme dans l’église) il f&lut
demander M. de Launay qui en était gouverneur, et sur la réclamation
il permit aux citoyens d'entrer les assurant qu’il allait leur en faire dé¬
livrer, (ils étaient au nombre d’environ 200) mais ù peine eurent-ils
passé le pont qu’il le fit de suite lever, et fit faire feu sur eux, très peu
échapérent à cette trahison. Alors l’allarme devint générale au dehors,
et au même instant les citoyens se rassemblèrent pour secourir leurs
frères et en moins de quatre heures cette forteresse formidable, si
connue dans l’histoire et ou Henry IV avait passé longtemps pour en
faire le siège fut emportée d’assaut, ce fut un soldat aux gardes françai¬
ses qui y monta le premier, il sabra en y arrivant tous ceux qui s’oppo¬
saient à son passage, courut droit au gouverneur et l’arrêta secondé par
les citoyens et d’autres soldats qui coururent le même danger. Ce
monstre fut conduit à l’hôtel de ville ainsi que le sous-gouverneur et
deux invalides, les deux premiers eurent la tête tranchée par le peuple
sans autre forme de procès, et les deux invalides furent pendus à des
potences de fer destinées à porter les reverbaires. La tête de M. de Lau¬
nay fut mise au bout d'une pique, après cette expédition il fut trouvé
sur M. de Launay une lettre de M. de Flesselles, prévôt des marchands,
qui annonçait la trahison (il présidait alors à l’hôtel de ville) le peuple
s'en désemparer lui fit subir dans le même moment semblable sort, son
corps fut traîné et foulé aux pieds dans toute la place de Grève. Ensuite
les têtes de ces deux traîtres furent portées en triomphe dans toutes les
rties. Ce spectacle à la fois horrible et imposant dissipa la foudre qui
était prête à nous engloutir. Ainsi se termina cette journée.
« Le lendemain mercredi, ou pour mieux dire la nuit de mardi, envi¬
ron huit mille Suisses qui étaient campés au Champ de Mars, craignant
sans doute pour eux, déménagèrent sans tambour ni trompette laissant
partie de leurs équipages et leurs tentes. Notre roi si bon et si juste, que
ses courtisans avaient trompé, ne tarda pas à savoir ce qui venait de se
passer. Rempli de confiance dans un peuple qui n'a cessé un instant de
le chérir, il se décida à venir dans sa capitale le vendredi suivant sans
aucune suite pour l’assurer de son amitié. Jamais spectacle plus beau et
plus imposant; figure-toi voir au moins deux cent mille citoyens sous
les armes sur trois et quatre rangs depuis Chaillot jusqu’à l’Hôtel de
Ville, au moins mille deux cents à cheval précédaient et suivaient le
carrosse du roi (les seigneurs qui étaient dans sa voiture étaient MM. les
ducs de Villeroi et Brissac, le comte Destaing et le prince Beauveau) .*
voilà toute sa suite (pouvait-il être mieux gardé que par son peuple?);
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d'histoire et de littérature
277
son carrosse était précédé de quatre pièces de canon qui fesaient l'a-
vant-garde tambour battant, mèche allumée; partie des députés l'avaient
précédé, et, d'un bout jusqu’à l'autre de cette armée iformidable, on en¬
tendait retentir l'air des cris de : Vive la nation et le Tiers-Etat 1 Ainsi
arriva le roi à l'Hôtel de Ville où il resta environ une demi-heure et y
fut complimenté par M. de Corni, son procureur à la ville, sur la bonté
qu'il avait de vouloir venir au milieu de son peuple pour rassurer sa
bonne ville de Paris; il y fut reçu par M. Bailli, ex-président de l'As¬
semblée nationale et nommé maire (en marge : la place de prévôt
des marchands finit en la personne de Af. Défiés selles 9 et est rempla¬
cée par celle de maire), à l’acclamation du peuple, et par M. le marquis
de Lafayette, nommé aussi colonel-général de la milice parisienne qui
fut constituée de ce même moment et autorisée par Sa Majesté, qui per¬
mit aux braves soldats des différents régiments qui ont aidé les gardes
françaises à nous soutenir de s'y incorporer. Cette journée si brillante
et qui faira époque dans l’histoire dissolut à jamais la conspiration des
ennemis de l’Etat.
« Ces monstres n'échaperont pas à la J ustice divine, ni à la vindicte
publique qui a fait subir, le 22 du courant, à deux des principaux, le
châtiment le plus horrible qui puisse être inventé, j’en été le témoin, je
frémis en le traçant.
« M. Foulon qui avait été nommé controlleur général après le renvoy
de M. Necker, aspirait depuis près de vingt ans à cette place, la haine
publique avait appris à cet homme odieux tous les dangers qui le mena¬
çaient. Les têtes livides et sanglantes du prévôt des marchands et du
chevalier de Launay promenées, les remords qui le rongeaient, ne l'em¬
pêchèrent pas cependant de chercher les moyens de pourvoir à sa sû¬
reté.
« La mort éteint toutes les haines et toutes les vengeances; il le savait,
il craignait les inconvéniens d’une fuite précipitée; il eut l’adresse de
se faire passer pour mort, et tout le monde le crut, parce que tout le
monde le désirait pour le bien public. Il s'était retiré à Viry-sur-Orge
distant à cinq lieues de cette capitale, accompagné d'un domestique
affidé, et là, sous un costume bien différent de celui d'un conseiller
d'Etat, il attendait de nouvelles révolutions (qu'une ligue de princes
ennemis nous prépare peut-être) lui fournisse des moyens nouveaux de
persécution et de tirannie.
« Les scélérats ont beau se cacher, ils portent sur leurs fronts un si¬
gne de réprobation qui les fait reconnaître. Foulon fut reconnu par les
paysans de Viry \
« Du tems de l'abbé Terray, il avait tenu un propos qu'on n'a ja¬
mais oublié. Je les réduirai à manger le pain à 5 sous la livre où à se
nourrir de foin.
1. Ici un renvoi indiqué, mais la note que ce chiffre indique fait défaut .
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REVUE CRITIQUE
278
« Les paysans furieux chargent ses épaules d'une botte de luserne, ils
lui en attachent un faisceau de chaque côté de son habit et lui entrelacent
un espèce de colier composé de chardons, le conduisent à Paris dans cet
état, et le forcent à marcher pieds nuds derrière une voiture chargée de
foin. Cette marche pénible l'ayant fait beaucoup transpirer, on coupa
des orties et l’on s'en servit pour lui essuyer le visage. Arrivé à Ville-
juif, excédé de chaleur et dejfatigues, on lui fit avaler un verre de vinaigre
dans lequel on avait mêlé beaucoup de poivre ; enfin il est conduit à l'hô¬
tel de ville au milieu d’une foule immense. Le peuple demandait à grands
cris qu’on le jugeât, mais ni M. Bailli ni les électeurs n'avaient de carac¬
tère pour prononcer son jugement, leur embarras était extrême, ils vou¬
laient le faire conduire à la prison de l’abbaye Saint-Germain. Mais com¬
ment y parvenir! chaque moment ajoutait à leur incertitude. Le peuple
cependant le demandait à grands cris* Enfin il s'impatiente de ces len¬
teurs et se précipite à grands flots dans l’hôtel de ville. La multitude
arrivée dans la salle du Commité permanent est invitée à prendre place;
on lui expose qu’il faut que justice soit rendue, mais aussi qu’il faut
qu’elle le soit légalement. Le peuple demande qu’on appelle sept juges
afin que son procès lui soit fait sans désemparer. Pendant ces entrefaites
arrive M. de Lafayette. On veut qu’il prononce, il harangue pendant
trois quarts d’heure, à plusieurs reprises. Voici, en substance, ce qu’il a
dit : « Messieurs, sans doute il convient de procéder avec célérité à l’ins¬
truction du procès, mais il faut le faire légalement. Pour moi, comme j’ai
une opinion très défavorable sur le compte de ce personnage, qu’on a
dit mort depuis quelques jours, je ne puis être son juge ; l’horreur même
que j'ai pour les hommes méchants m’oterait la force de le juger. Voici
ce que je vous proposerai pour qu’il soit, jugé suivant les formes légales ;
Je me transporterai sur le champ vers l’assemblée nationale. Des com*
missaires seront nommés pour interroger le coupable, afin de découvrir,
par ses dépositions, les auteurs d’un parti abominable que nous avons
tous en horreur, puisqu’il est contraire à cette liberté après laquelle
nous soupirons tous. » Je répète que je ne transcris ici que la substance
du discours de M. de Lafayette.
« En vain M. de Lafayette épuise-t-il ses forces et sa raison, le peuple
n’entend plus rien. Les forfaits de Foulon sont connus, il faut qu’un
exemple terrible épouvante les médians, On le précipite hors de i’hôtei
de ville, chacun se dispute la gloire d’insulter à cet homme odieux, à
l’ennemi de la nation, à l’ennemi connu de M. Necker. Le gibet seul
peut expier ses crimes, on l’y entraîne. La corde casse, il tombe aux
genoux du peuple; ses supplications sont inutiles : il expire d’une mort
honteuse et flétrissante. Ce supplice n’assouvit pas la fureur, la tête
est séparée du tronc, on la met toute sanglante au bout d’une pique, et
celui qui la porte en triomphe par toute la ville semble s’enorgueillir de
ce fardeau * qui glace d’effroy tous ceux qui osent y fixer leurs regards.
1. Les chereux et l’habit de celui qui la portait étaient inondés de sang.
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d’histoire et de littérature 279
« Cette scène n'est pas finie qu’une scène plus affreuse se prépare en*
core.
« M. Bertthier de Sauvigni, intendant de la généralité de Paris, gen¬
dre de M. Foulon, soupçonné et en quelque manière convaincu par
plusieurs lettres trouvées dans un portefeuille qu'on saisit entre les
mains d'un Courier qu'il avait dépêché, avait pris la fuite. En passant
à Compïègne, il y fut reconnu et arrêté; la municipalité de Compiègne
en instruisit le bureau de cette ville qui invita 2 5 o hommes delà mi¬
lice parisienne d’aller le chercher. A l'instant ils montèrent à cheval
et furent s’en emparer (ils s'en saisirent à Senlis). Je n’entrerai pas
dans les détails de la route, je me bornerai à te dire qu’on eut beaucoup
de peine à l'arracher des mains des habitans dud. Senlis (le régiment
royal-Bourgogne s'est réuni à eux à leur retour).
« Une foule immense était allée au devant de lui jusqu'à la Villete.
L’on exige qu'il soit mis dans un tombereau et, comme on n'en trouve
point, on abbat l’impériale du cabriolet dans lequel il avait été conduit,
afin qu’il soit exposé à toute l’ignominie qu’on lui prépare. Il avait
affecté dans toute la route une sérénité sans doute bien éloignée de son
âme. A la porte Saint-Martin, le premier objet qui frappe ses regards,
c’est une tête défigurée; c'est le tronc sanglant et fangeux de son beau-
père qui vient d’être traîné dans la boue par un peuple furieux.
« Des cris d’indignation et d’horreur le poursuivent jusqu'à la ville;
il en monte les degrés avec une fermeté qu'il n'a plus : on l'interroge
quelque momens, et pour éviter que le peuple ne se précipite de nouveau
dans l’hôtel de ville, pour ne pas accroître la fureur, ou l'envoye sous
bonne escorte à l’abbaye, mais à peine l’a-t-on apperçu que cette escorte
est forcée, on le traîne au même gibet ou son beau-père venait d’expirer.
Il vomit mille imprécations contre ceux qui l’environnent, il se défend
même contre eux avec une rage inexprimable. On parvint enfin à lui
passer le lacet fatal; il le saisit avec force et continue d'insulter la mul¬
titude; on lui porte plusieurs coups, la corde est coupée deux fois et
deux fois on la remplace. Enfin il tombe percé de mille coups; sa mort
ne suffit pas à la rage dont on est animé, on lui arrache la tête plutôt
qu'on ne la coupe, on la mutile après l'avoir arrachée, ses membres sont
mis en pièces; une main furieuse fouille dans ses entrailles ; on en sé¬
pare le cœur qu'il est indigne de porter *; ses intestins a sont déchirés en
mille pièces, ses vêtements même ne sont point à l'abri de la fureur ; ils
sont mis en un instant en lambeaux, des torchent éclairent ce spectacle
d’horreur. Bientôt elles offrent la ressource d'un supplice nouveau, et
dont l'œil ne peut soutenir la vue. Le croiras-tu? on porte ces torches
1. Propres termes de celui qui a arraché le cœur du cadavre. On assure que c*est
un chevalier de Saint-Louis.
2. Ses intestins ont été divisés en une infinité de pièces, que mille personnes se
sont empressées d’emporter. 11 en a été de même de ses habits, qui ont été coupés
en mille morceau qu’on s'arrachait les uns aux autres.
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REVUE CRITIQUE
280
ardentes sur les parties les plus sensibles de ce cadavre. On oublie qu'il
ne respire plus. La fureur cherche encore à se faire illusion; enfin, quand
elle est assouvie, on rassemble les affreux restes de ce cadavre sanglant;
on le traîne dans la fange des rues les plus sales, la tête portée sur un
piquet le précède. Enfin, le cloaque le plus infect, la voierie doit être
le lieu de leur sépulture.
« Voilà, mon ami, les horreurs dont j'ai été témoin, qui doivent faire
trembler tous les traitres au roy et à la nation. Je désire ardemment que
ma plume puisse bientôt te tracer des détails plus consolans ; adieu, je
t'embrasse de tout mon coeur, ainsi que tout ce qui t’appartient, et suis
pour la vie
« Ton ami sincère. »
CHRONIQUE
FRANCE. —Voici le programme du Congrès des Sociétés savantes à la Sorbonne
en 1884. Section d'histoire et de philologie: i° Origine, signification et formes suc¬
cessives des noms de lieu d’une région ; 2 0 mode d'élection et étendue des pouvoirs
des députés aux Etats provinciaux; 3 ° les villes neuves, les bastides, les sauvetats et
autres fondations analogues à partir du xu* siècle; 4 0 les biens communaux au moyen
âge; 5 ° origine et organisation des anciennes corporations d'arts et métiers; 6° indi¬
cations fournies par l’emplacement des établissements charitables pour fixer le tracé
des anciennes voies; 7 0 origine, importance et durée des anciennes foires; 8° utilité
et importance des registres de notaires, des registres de paroisse et des documents
des greffes; — mesures prises ou à prendre pour en assurer la conservation et en
faciliter l’usage; 9 0 anciens livres de raison et journaux de famille; io° données
géographiques et statistiques à tirer des procès-verbaux de rédaction des coutumes;
n° état de l’instruction primaire et secondaire avant 1789; ia° liturgies locales
antérieures au xvm* siècle; i 3 ° les ermites et les reclus ; 14 0 origine et règlements
des confréries et charités antérieures au xvn e siècle; i 5 ° quel jour commençait l'an¬
née dans les différentes provinces de la France au moyen âge ? — Section d'archéo¬
logie ; i° Quelles sont les contrées de la Gaule où ont été signalés des cimetières à
incinération remontant à une époque antérieure à la conquête romaine? — Q uc ^ s
sont les caractères distinctifs de ces cimetières? 2 0 Essayer une classification des en¬
ceintes fortifiées, oppida gaulois, camps romains, mottes féodales. — Indiquer quels
sont les caractères distinctifs de chacune de ces séries; donner des exemples; 3 °dé¬
terminer la date exacte des murs d’enceinte de l’époque romaine dans la construction
desquels sont entrés des monuments funéraires ou des débris d’anciens édifices;
4° décrire les monuments connus sous le nom de piles, comme la pile de Cinq-
Mars, près de Tours. — Caractériser ces monuments, en rechercher l’origine et 1 »
destination; 5 ° dresser la liste, faire la description et rechercher l’origine désœuvrés
d’art hellénique et des inscriptions grecques qui existent dans les collections publi¬
ques ou privées de Marseille et des villes de la Provence ou de la basse vallée du
Rhône. Distinguer entre ceux de ces monuments qui sont de provenance locale et
ceux qui ont été importés dans les temps modernes; 6° étudier les plus récentes
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d'histoire et de littérature 281
théories qui ont pu être émises sur l’origine des basiliques chrétiennes. Décrire les
plus anciennes basiliques que l’on connaisse en dehors de l’Italie, en paiticulier
celles de l'Algérie; 7 0 étudier les caractères qui distinguent les diverses écoles d’ar¬
chitecture religieuse à l’époque romane en s’attachant à mettre en relief les éléments
constitutifs des monuments (pians, voûtes, etc.); 8° quels sont les monuments qui,
par l’authenticité de leur date, peuvent être considérés comme des types certains de
l’architecture en France avant le xiu* siècle? 9° Quelle est la distribution géographi¬
que des églises à une seule nef dont les cathédrales d’Albi et de Perpignan sont les
types principaux? Quelle est l’origine du plan de ces édifices? io° Quelles sont les
églises à coupoles de l’Aquitaine dont la date peut être établie par des documents
historiques? Produire et discuter les textes relatifs à leur construction; 14° Quels
sont les monuments dont la date attestée par des documents historiques peut servir
à déterminer l’état précis de l’architecture militaire en France aux différents siècles
du moyen âge? ia<» Etudier avec accompagnement de coupes et de plans, les cons¬
tructions rurales élevées par les abbayes, telles que granges, moulins, étables, co¬
lombiers, etc.; 1 3 ° signaler et décrire les peintures murales antérieures au xvi* siècle
existant encore dans les monuments civils ou religieux de la France; 14° signaler
les œuvres de la sculpture française antérieures au xvi e siècle, qui se recommandent
soit par la certitude de leur date, soit par des signatures d’artistes; i5° étudier les
tissus anciens et les broderies, qui existent dans les trésors des églises, dans les mu¬
sées et dans les collections particulières; 16 0 quels sont les progrès réalisés depuis
dix ans dans le classement des monnaies gauloises, soit au point de vue chronolo¬
gique, soit au point de vue de leur distribution géographique. — Section des sciences
économiques et sociales : i° la division de la propriété en France, avant et après
1789; a° étudier les mouvements de la population sur un point déterminé de la
France rurale, soit sous l’ancien régime, soit depuis la Révolution ; 3 ° étudier sur un
point quelconque de la France l’influence économique et sociale d’une voie de com¬
munication nouvellement ouverte : chemin de fer, canal, route, pont; 4* les colonies
françaises considérées au point de vue des conditions politiques et économiques dans
lesquelles elles se sont formées et des moyens propres à en assurer le développement;
5 * étudier la situation légale des sociétés commerciales françaises à l’étranger et des
sociétés étrangères en France; 6* de l’unification de la législation en matière de
lettres de change; rapprocher les législations étrangères de la législation française et
mesurer à ce sujet les besoins du commerce; 7* rechercher s’il ne conviendrait pas,
à l’exemple de certaines législations étrangères, d’accorder à la femme mariée, indé¬
pendamment de toute convention matrimoniale, l’administration et la libre disposi¬
tion d’une partie de ses biens; 8* l’enseignement secondaire spécial, ses caractères
distinctifs, ses limites et ses relations avec l’enseignement supérieur. — Section des
sciences naturelles et des sciences géogi'aphiques : Etudier au point de vue de l’an¬
thropologie les différentes populations qui, depuis les temps les plus reculés, ont oc-
cupéen totalité ou en partie une région déterminée de la France. — Indication som¬
maire des anciennes cartes possédées par les différentes sociétés de géographie, par
des établissements publics ou par des particuliers. — La section des sciences écono¬
miques et sociales, créée par arrêté du 12 mars x 883 , signale aux sociétés savantes
et aux correspondants les sujets suivants, dont elle partagera l’étude avec la section
d’histoire et de philologie pour les siècles passés et dont elle traitera spécialement
pour la fin du xvnt® siècle et pour le temps présent : i° La population, état numéri¬
que aux diverses époques de notre histoire, nombre des feux ou des habitants, chan¬
gements économiques qui ont exercé une influence sur la population, constatations
relatives à l’état moral et matériel de la population française; 2 0 la condition des
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REVUE CRITIQUE
personnes et des terres, droit privé, propriété foncière et mobiliaire, amodiation des
terres, nature et rendement des cultures; 3 ° le commerce et l’industrie, foires et
marchés, péages, tarifs de douanes, routes et voies navigables, corps de métiers et
liberté du travail, manufactures royales, règlements de fabrication et d’atelier, ré¬
sultats de la production industrielle; 4 0 les prix, valeur des marchandises, valeur
de la terre, salaires, circulation des monnaies; 5 ° le système financier, impôts,
comptes de finances, projets financiers, administration des impôts; 6° la pédagogie,
petites écoles, collèges et universités, plans de réformes, enseignement primaire, se¬
condaire, supérieur, technique; 7 0 l’organisation judiciaire, justices royales et sei¬
gneuriales, officialités, tribunaux, coutumes et lois, réformes introduites dans le
droit par les ordonnances royales, par les lois et règlements de la période contenl-
poraine; 8° l’organisation administrative, conseils, intendances, élections, pays
d’Etat, districts, départements, municipalités. Pour les deux derniers groupes dont
l’étude est liée étroitement à l’histoire générale, la section des sciences économiques
et sociales n’envisagera, dans les périodes antérieures à la Révolution de 178g et
dans les événements qui l’ont préparée, que les côtés qui concernent le droit civil,
criminel et administratif.
— Le XIV® volume des Archives de la Bastille , documents inédits recueillis et
publiés par M. François Ravaisson, conservateur-adjoint à la Bibliothèque de l’Arse¬
nal (Pedone-Lauriel, 1 883 . In-8% 542 p. 10 fr.), est consacré aux années 1726-1737;
la répression du jansénisme et la surveillance des mœurs publiques, dit l’éditeur dans
son Avertissement, font presque toute la matière du volume.
— Le P. Rivière a publié dans le fascicule d’août du Polybiblion (pp. i5g-i68)
un Essai de bibliographie malgache ou catalogue des ouvrages écrits sur Mada¬
gascar ou en tangue madécasse.
— M, H. Omont va publier un Inventaire sommaire des manuscrits du supplément
grec de la Bibliothèque Nationale ; ce travail porte sur environ 920 manuscrits.
— M. Salomon Refnach doit publier prochainement chez l’éditeur Baer une in¬
traduction de l’essai de M. Newton a on greek inscriptions ». Cette traduction sera
augmentée de notes, d’appendices, de fac-similés et de textes épigraphiques choisis,
de manière à pouvoir tenir lieu du Manuel d’épigraphie grecque qui nous manque.
— M. Paul Stapfer, professeur de littérature française à la Faculté des lettres de
Grenoble, est transféré, sur sa demande, dans la chaire de littérature française delà
Faculté de Bordeaux, en remplacement de M. Roux, nommé professeur honoraire.
ALLEMAGNE. — Outre le Litteraturblatt für orientalische Philologie (dirigé par
M. Kuhn), la librairie orientale d’Otto Schulze, de Leipzig, publiera une autre revue,
la Zeitschrift für Keilschrift-forschung. Cette revue, dirigée par MM. Cari Bezold
et Fritz Hommel, de Munich, avec la collaboration de M. T. G. Pute h es, paraîtra
quatre fois par an (prix de l’abonnement : 16 mark).
GRANDE-BRETAGNE. — Les prochains volumes de la collection « English men
of letters » publiée par la librairie Macmillan, seront les suivants : Adam Smith,
par M. Léonard H. Courtney; Sir Philip Sidney , par M. J. A. Symonûs, et Berke -
ley, par M. Huxley.
GRÈCE.—Un de hoS correspondants nous écrit d’Athènes : * un important travail
dont nous avons annoncé, dans la Revue critique , la préparation, a été publié, il J
â quelques mois (Coromilas, 1 883 , p. té- 3 gg), par le professeur E. A. CoumanouMS
Su vocyu'fy XéÇswv <i6Y]aaup(ŒTü>v £v toiç IXXyjvtxoTç XeÇixGiç.
— Un savant anonyme, qui n’est autre, dit-on, que l’ancien professeur de FUnV-
versité d’Athènes, D. N. Bernardakis, actuellement à Mytilène, publie une suite
d’articles de vive polémique dans le journal grec de Trieste, I’ « 'Hpipà $ à pfdpoS
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d’histoire et de littérature
283
de la publication des rXti>ff<jtxal QapaTY]pif)aeiç du professeur C. S. Contos. D’un
autre côté, la KXeuH), autre journal grec de la même ville, a publié, il y a quelque
temps, dans une suite de numéros, un travail important de Th. Lwadas, en faveur
des doctrines de M. Contos.
— Deux numéros de la ’Ap/atoXor^T) ’EçYîixep'tç ont déjà paru chez Perris ; cette
revue, organe de la Société archéologique d’Athènes, paraît quatre fois par an.
— Vient de paraître la première livraison du AeXxtov Ttfc fo'toptx.Tfc mat iôvoXo-
YWÙjç 'EtatpCa; ttJç *EXXi8oç. Ce recueil paraîtra, de même (chez Perris) quatre
fois par an, et s’occupera de l’histoire, — dans l’acception la plus étendue de ce mot, —
de la nation grecque au moyen âge et dans les temps modernes. Mœurs, tradition,
langue, manuscrits, etc., tout y trouve sa place.
— Le professeur J. Pantazides a publié (Perris, 1 883 ), en l’honneur du cinquan-*
tième anniversaire de son ancien maître, M. H. Sauppe, la seconde partie de ses
AtopO&aetç efç tîjv xpovo^pa^favMt/ai/jX WcXXou. La première partie avait été pu*
bliée dans 1* ’AWjvouov et séparément (1878).
— M. G. N. Hadjidakis vient de publier (Trimis, 1 883 ) deux importants symbolat
à Phistoire de la langue néo-hellénique : Ilspt tôv slç ouç ffuvtjpTQpivwv T
P’vjXCaeuç xat tôv eiq oç oJSsTéptuv 5 vcp.i?<*>v ty;ç h rf, via éXXr ( vtxY) et Ilepi
t ûv çôoffoXoftxwv vép.ti)v %a\ ty)ç aûxwv tlq crxouS^v véaç èXXvj*
votïjç. Ces deux petits travaux ont été soumis à la Faculté de philosophie de l'Uni¬
versité d’Athènes, l’une pour le grade du doctorat, l’autre pour la venta docendi,
M. Hadjidakis se préparant à enseigner comme privat-docent.
— Viennent de paraître (Perris, i 883 ) les üpaxTtxi vf\% ’Apx<xtoX$YtXYfo 'ETatpCaç,
contenant le compte-rendu des travaux de la Société depuis janvier 1882 jusqu’à
janvier i 883 . Suivent des rapports détaillés des éphores sur les fouilles exécutées
dans les provinces : Stamatakis, fouilles en Boétie; Cawadias, travaux exécutés à
Epidaure; Puiuos, travaux exécutés à Eleusis.
—* Le OXiTùiv, revue philologique et pédagogique publiée par la Société didasca -
lique de Grèce, a changé de direction et a subi de notables améliorations. Parmi
les rédacteurs, on cite MM. Contos et Coumanoüdis; parmi les travaux publiés dans
les deux numéros déjà parus depuis le changement de direction, on signale les
KptTiKÀ %*\ YpapLpATixd Contos; le travail Ilspt Tïjç TpaxsÇouvtCaç îtaXéxxou
de E.T. Coussis; les AiopOumxà de Pappavassiliou et de Vassis; les Kpmxà avj-
(UubpLata tlq Tbv ’laatovdeC. Catévénis et Y ’Exfxptciç de la Tf axwvtxt;
TtXY] de Deffner, par Hadjidakis. Le IlXaicov se publie sous la direction de J. Pao-
todikos , S. Vassis, G. Hadjidakis et S. Soungras, qui eft Sont aussi les rédacteurs
ordinaires.
— M. M. Damiralis vient de publier Une traduction du Cotiolan de Shâkspeare
(Üopvaaaéç, i 8 $ 3 ). Cette traduction, parue d’abord dans le ilapvxjsjç (7 e cahier du
Vil® tome), a été aussi publiée en brochure. »
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 28 septembre iS 83 .
L’Académie décide, au scrutin, qu’il y a lieu de pourvoir à la place de membre
ordinaire laissée vacante par la mort de M. Defrémery. L'examen de» titres des can¬
didats est fixé au 16 novembre. .
M. Germain continue sa lecture sur les manuscrits autographes laissés par F. ,e J re
Flamenqui, vicaire-général de l’évéque de Maguelonne, puis abbé de Saint- Victor
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284 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
de Marseille, à la fin du xiv* siècle et au commencement du xv® et aujourd’hui
conservés aux archives du département des Bouches-du-Rhône. Outre les harangues
universitaires, dont il a été question à la dernière séance, ces manuscrits contiennent
un grand nombre de sermons. Ce ne sont généralement que des canevas destinés à
être développés de vive voix. Deux sermons seulement sont rédigés sous une forme
définitive; ce sont deux panégyriques, l’un de saint François a Assise, prêché le
4 octobre i 38 g au couvent des frères mineurs de Montpellier, l’autre de saint Tho¬
mas d’Aquin, prononcé au couvent des dominicains de la même ville, le 7 mars i 3 go.
On trouve encore dans les manuscrits de Pierre Flamenqui : i* la confirmation de
l’élection d’un recteur de l’école de droit de Montpellier, faite au nom de l’évêque
de Maguelone, le 8 février i 3 $b, unique document de ce genre qui nous soit par¬
venu ; 2 0 une allocution de Pierre Flamenqui, à l’ouverture de son cours de droit
canonique, contenant à la fois une prédication, une prière et une leçon ; 3 ° un pro¬
jet de recommandation à Benoît Xlfi, en faveur du collège de Saint-Germain de Mont¬
pellier ; 4 0 un compliment adressé, le 5 septembre 1406, au même pape, lorsqu’il
visitait l’abbaye de Saint-Victor de Marseille; 5 ° une pièce qui n’est pas de Pierre
Flamenqui et qui a été mêlée on ne sait pourquoi à ses papiers, mais qui présente
un assez grand intérêt historique. C'est une supplique adressée au pape Clément VI
par les consuls de Naples, pour appeler l’intervention de sa justice contre les assas¬
sins de leur roi, André de Hongrie, époux de Jeanne P*, tué au couvent de Saint-
Pierre de Morone, près d’Aversa, le 18 septembre 1345.
M. Mowat lit une note sur les inscriptions et les tuiles romaines de Mirebeau
(Côte-d’Or). Il signale notamment des estampilles appartenant à des vexillationcs ou
détachements de diverses légion s, la il* Augusta, de r armée de Bretagne, la VHP Au-
gusta, la XI® Claudia et la XIV e Claudia, de l’armée de Germanie supérieure. Ces tui¬
les sont des restes d’un établissement militaire, dont M. Mowat fait remonter l’origine
à l’insurrection des Lingons, provoquée par Julius Sabinus, en l’an 70 de notre ere.
M. Chodzkiewicz donne quelques détails sur divers petits monuments d’origine
slave qui lui ont été communiqués par M. Gustave Schlumberger, savoir :
i° Bulle de plomb. A la face, buste de la Vierge, tenant Tentant Jésus. Au revers,
légende slave : « Sceau de Varlam, igoumène du monastère de Khiton. 1» Ce monas¬
tère de Khiton est probablement le couvent qui est attenant à la cathédrale de l’As¬
somption, à Moscou, et qui est placé sous l’invocation de la sainte Tunique
(XlT<î>v).
2° Médaille de bronze. Face : buste de saint Antoine le Romain. Revers : la Vierge
et l’enfant Jésus. Légendes en langue slave sur les deux côtés. Cette médaille parait
avoir été frappée à 1 occasion de la solennité qui fut célébrée par ordre de l’impéra¬
trice Elisabeth Pétrovna,le 3 août (vieux style) 1747. En ce jour, six-centième an¬
niversaire du jour présumé de la mort du saint, ses restes furent placés dans un cer¬
cueil de bois de cyprès, recouvert de lames d’argent.
3 ° Croix de bronze, moulée, haute de o ra io, large de ©“08, trouvée près de Bey¬
routh, en Syrie. Cette croix est double : sur une croix plus grande s’en trouve une
plus petite, et celle-ci porte la figure de Jésus-Christ; l’une et Tautre sont à deux
traverses, dont la plus petite, placée au-dessous de l’autre, est fixée obliquement
sur le montant de la croix. Des tableaux composés chacun de deux petits personna¬
ges ont été soudés sur les côtés. Des inscriptions slaves se lisent en divers endroits.
D’après ces inscriptions, les personnages représentés dans les tableaux latéraux sont
sainte Marie Madeleine, sainte Marthe, saint Jean et saint Longin. Sous la petite
croix, qui porte le Christ, est figuré, dans un enrochement, le crâne d’Adam. En
effet, suivant une légende reçue dans l’Eglise orientale, le Golgotha, où a été cruci¬
fié Jésus^Christ, était le lieu de la sépulture d’Adam. Cette croix, ou tout au moins
le moule sur laquelle elle a été faite, peut remonter au xvi® ou au xvii* siècle.
M. Salomon Reinach communique une inscription grecque découverte par lui à
Délos en 1882. Cette inscription, gravée sur une base de statue, se lit ainsi :
2epo6tov KopvfjXtov Sepoutou utov ÀIvtoXov, arpaTTyfbv àvôuxaTOV 'PcoixaUdy, A 10 -
vùaioç Nfxuvoç ’AOtjvatoç Tbv iauTOu Çévov xal ç£Xov ôtxÆtoauvtjç ëvexev rqç eî;
lattfbv ’A7téXXci)V, « Dionysios, fils de Nicon, Athénien, consacre à Apollon, (la
statue de) Servius Cornélius Lentulus, fils de Servius, préteur proconsul de» Ro¬
mains, son hôte et son ami, en reconnaissance de son amitié envers lui. » L’équi¬
valent grec du titre de préteur proconsul arpaTtjf^Ç àvôuxaxoç, ne s’était pas encore
rencontré. M. Reinach s’attache à établir que Lentulus, préteur de Sicile, selon
Tite-Live, en l’an 169 avant notre ère, fut, en réalité, préteur de la flotte, et que
les négociations pendantes depuis 171 entre Athènes et Rome, au sujet de la ces¬
sion de Délos à Athènes, furent une des causes de son séjour dans I'île. Quanta
Dionysios, fils de Nicon, l’auteur de la dédicace, il est déjà connu par un grand
nombre d’inscriptions de Délos. 11 fut gouverneur de I’île sous la seconde domina¬
tion athénienne. Julien Havbt.
_ Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marçhessou fils , boulevard Saint-Laurent, * 3 .
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torff p. p. Vedel. I et II (comprend la correspondance des années 1751 —
177 °)- — Lehmann, Preassen und die katholische Kirche seit 1640.
IV. 1758-1775. — Hunziker, Augustin Keller, ein Lebensbild dem
aargauischen Volke gewidmet. — Koch, der Kaukasus. — Frôbels pà-
dagogische Schriften hrsg. von Seidel. I. Menschenerziehung, Erzie-
hungs, = Unterrichts =und Lehrkunst ; II. Das Kindergartenwesen.—
Delisle, Les très anciens manuscrits du fonds Libri dans les collections
d'Ashburnham-Palace ; Notice sur les ms. disparus de la bibliothèque
de Tours pendant la première moitié du xix° siècle; Les ms. du comte
d'Ashburnham, rapport adressé à M. le Ministre de l’instruction publi¬
que et des beaux-arts.
Deutsche Litteraturzeitung, n° 38 , 22 sept. 1 883 : Jacobsen, Untersu-
chungen über die synoptischen Evangelien. — Hume (David), eine
Untersuchung über die Principien der Moral, deutsch hrsg. u. mit ei-
nem Namen-und Sachregister hrsg. v. Masaryk (Gizycki). — Lucien
Adam, Les idiomes négro-aryen et maléo-aryen (Gerland : à recomman¬
der à tous les linguistes, ethnologues et anthropologistes ; un des tra¬
vaux les plus intéressants de la linguistique moderne). — Eliger, Die
Zusâtzezu dem proômium der Hesiodischen Théogonie; vers 36 -11 5
(Hiller : fait avec soin, quelques remarques justes, un jugement sensé et
réfléchi). — Boissière, L’Algérie romaine. 2 e édition entièrement revue
et considérablement augmentée. 2 vols (Habilement fait, plein de cou¬
leur et d’enthousiasme, quoique diffus et abondant en répétitions; pas
de recherche indépendante ; paraphrase ou copie ou traduit autrui ;
l’auteur dit une fois d’un chapitre de Marquardt « je suis de très près et
je traduis presque, en animant un peu le texte, les citations et les no¬
tes 3 ; voilà la recette du livre entier qui n’est qu'une compilation. Non
pas qu’une compilation soit blâmable; mais il faut la faire avec la con¬
naissance et le soin suffisants. L'auteur destine son livre aux jeunes
maîtres des lycées; ils feront bien de s’instruire sur l’antiquité romaine
dans des œuvres plus solides). — Parthey, Ein verfehlter und ein ge-
lungener Besuch bei Gœthe (Seuffert : 2 0 édition de ce récit attachant).
— ViNiNG, das Geheimniss des Hamlet, ein Versuch zur Lôsung eines
alten Problems (Zupitza : pourquoi traduire ce livre où l’auteur — un
Américain, agent de la compagnie du chemin de fer du Pacifique —
prétend que Hamlet est une femme déguisée en homme?). - J. Lemaî¬
tre, La comédie après Molière et le théâtre de Dancourt (Donne à la
fois plus et moins que ne le laisse attendre le titre). — Hecker, Die
territoriale Politik des Erzbischofs Philipp 1 von Côln, 1167-1191
(Lamprecht). — Hans Prutz, Geschichte der Kreuzzüge (Winkelmann :
voilà une vraie « Culturgeschichte *, puisée aux sources; les meilleurs
chapitres sont consacrés aux ordres de chevalerie et aux Templiers; il
aurait toutefois mieux valu condenser et « comprimer » ; l’auteur se
répète trop souvent; quelques petites fautes qui ne doivent pas faire
oublier que ce sujet gigantesque n'avait pas encore été traité avec autant
d'étendue; livre tout à fait méritoire). — O. Roquette, Friedrich
Preller, ein Lebensbild.— Welcker, Schillers Schàdel und Todten-
maske, nebst Mitteilungen Über Schâdel und Todtenmaske Kants.
Theologisohe Litteraturzeitung, n° 19, 22 sept. 1 883 : Schaff, A religious
encyclopaedia or Dictionary of biblical, historicai, doctrinal, and practi-
cal theology, based on the Real Encyclopàdie of Herzog, Plitt and
Hauck. I (Harnack : Entreprise américaine : Schaff et plusieurs théo¬
logiens des Etats-Unis ont entrepris, du consentement des éditeurs de
l'Encyclopédie de Herzog, de publier en trois volumes un extrait de
cette Encyclopédie, car « une traduction ne répondrait pas aux besoins du
public américain » ; ils ont obtenu le droit d’agir à leur guise avec les
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rticles. Mais les collaborateurs de l’Encyclopédie? Leurs articles sont,
aréduits au huitième ou au dixième de leur étendue, et portent leur nom
quoiqu’ils aient perdu tout ce qui les caractérisait essentiellement. Il n'y
a pas dans l'histoire de la librairie d’exemple semblable. Harnack dé¬
clare qu’il défendra à M. Schaff de citer son nom ) — Theologische Stu-
dien aus Württemberg unter Mitwirkung von Braun, Hâriog, Kittel,
etc. hrsg. v. Herrmann u. Zeller. — Hatch, Die Gesellschaftsverfas-
sung der christlichen Kirchen im Alterthum. Acht Vorlesungen ; Ue-
bersetzung der zweiten Aufl. p. p. Harnack. (Weizsàcker : dont l'art,
est consacré à l'un des chapitres du livre sur les évêques et les diacres.)
— Hauck, Die Bischofswahlen unter den Merovingern. (Harnack : fort
bon travail.) — Publications à propos du jubilé de Luther. (Entre au¬
tres, de M. Max Lenz, Martin Luther, Festchrift der Stadt Berlin für
ihre Schulen zum io november i883.)
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 38, 19 septembre 1 883 : Thoma, Die
Genesis des Johannes - Evangeliums, ein Beitrag zu seiner Auslegung,
Geschicht^ und Kritik. (Weizsàcker : travail méritoire à beaucoup d’é¬
gards, mais qui provoque la critique en maint endroit).
Revue de rinstruction publique supérieure et moyenne eu Belgique; tomeXXVI,
4 e livraison : Eug. Hubert, Les réformes de Marie Thérèse dans ren¬
seignement moyen aux Pays-Bas. — Motte, Le prêt à Sparte. — : Hno,
Des aspects dans la conjugaison française. —La syntaxe de Viïlehar-
douin (suite). — Comptes-rendus : Die Historien des Tacitus, I u II,
p. p. Prammer. (P. Thomas.)— Choix de lectures françaises à l’usage
des écoles secondaires, pp. Wingerath. (P. Thomas.) — Corneille, Le
Cid, pp. Larroumet. — Discailles, Histoire des concours généraux de
l’enseignement primaire, moyen et supérieur en Belgique, 1840-1881.
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
PUBLICATIONS DE LA SOCIÉTÉ DE L’ORIENT LATIN
SÉRIE GÉOGRAPHIQUE : TOME III
ITINÉRAIRES FRANÇAIS MICHELANT « G. RAY¬
NAUD. In-8. 1* fr.
— Le même, sur papier de Hollande. 24 fr.
SÉRIE HISTORIQUE : TOME III
TESTIMONIA MINORA ROEHRICHT.*^-».. i a fr.
— Le même, sur papier de Hollande. 24 fir.
LES NORMANDS EN ITALIE, lit .ttt
jusqu’à l’avènement de Saint Grégoire VII, par O. DELARC. Un fort volume
In -8 . 12 fr.
Le Puy , imprimerie Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent . 2S
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:;ov18-r
N* 42 Dix-septième année 15 Octobre 1883
MÉLANGES ORIENTAUX
TEXTES ET TRADUCTIONS
PUBLIÉS PAR
LES PROFESSEURS DE L'ÉCOLE SPÉCIALE DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES
A l'occasion du 6* Congrès international des orientalistes,
réuni à Leyde (septembre 1 883 ).
Un beau volume grand in-8 de 40 feuilles avec tableaux, hélio¬
gravures, etc. 25 fr.
RECUEIL DE TREIZE MÉMOIRES
PUBLIÉS PAR
MM. H. Derbnbourg, Ch. Schbfer, de l’Institut, Barbier de Meynard,
de l'Institut, P. Favre, A. Carrière, E. Miller, de l’Institut,
L. de Rosny, A. des Michels, L. Leger, E. Picot, H. Cordier,
J. Vinson.
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PÉRIODIQUES
The Àcademy, n° 595, 29 septembre i883 : Green, Prolegomena to
ethics, edited by Bradley. ( 2 e article). — A roll of the owners of land
in the parts of Lindsey in Lincolnshire in the reign of Henry I, transla-
ted with a commentary and compared with the Domesday Survey of
Survey, by Chester Watbrs. (Elton). — The Encyclopaedic Dictionary,
a new and original work ot reference to ail the words in the english
language, by Robert Hunter. A-Des. (L. Toulmin Smith). — Mrs.
Hibbert Ware, The life a. correspondence of the late Samuel Hibbert
Ware. — A lost chronicle of Peru : The second part of the chronicle of
Peru by Pedro de Cieza de Leon, translated and edited with notes a. an
introduction by Cléments R. Markham. [Hakluyt Society). — James
Darmbsteter, Essais de littérature anglaise. (S. L. Lee : livre tr&s re¬
marquable; essais sur Shakspeare, JByron, Browning, Wordsworth,
Sheiley, Toru Dutt, Shelley, ce dernier, le meilleur du volume.) —
J. Payne Collier. — Henry Stebbing. — C. J. Stewart.—The iron
âge in Greece. (Sayce et Morice.) — The library rate. (Axon.) —
« Choice novelists' english ». (Betham-Edwards.) — Some bookson mo¬
dem english. (Geldart, A simplified grammar of modem greek ; Nico-
laides, Topographie et plan stratégique de l'Iliade, etc.) — The Naga-
nanda, a buddhist drama. (Samuel Beal.) — de Vaux, La Palestine,
illustré par P. Chardin et Mauss. (Am. B. Edwar is : très attachant et
très joliment imprimé.) — Art books (Parker, The runic crosses of
Gosforth, Cumberland.)— The « Novissimi • of Nasini. (Mercer.) —
How was the trireme rowed ? (H. F. Brown).
The Àthenaeum, n° 2918, 29 septembre i 883 : Connbll, The économie
révolution of India and the public works policy. — Champfleury, Les
vignettes romantiques. 1825-1840. (Livre très attachant, épitome de la
« graphiologie » du romantisme.) — Keim, The history of Jésus of Na-
zara treely investigated in its connection with the national life of Israël
and related in detail, translated by Ransom. Vol. VI. — Gomme, Folk¬
lore relies of early village life. — The sacred books of the East, vol. XVII,
Vinaya Texts, translated from the pâli by Rhys Davids a. H. Oldbn-
berg. II. — Fleet, Glimpses of our ancestors in Sussex, first and se¬
cond sériés. 2 vols. — Henry Stebbing. — « Annals of the early cali-
phate t. (W. Muir.) — M. John Payne Collier’s Diary. — The coming
publishing season. — The private collections in England. LXXV lnce
Blundell Hall, Liverpool.
Literari8che8 Centralblatt, n° 40, 29 septembre i 883 : Renan, Histoire
des origines du christianisme, Index général avec une carte de l'exten¬
sion du christianisme vers l'an 180. (Index très utile.) — Martin Lu¬
ther als deutscher Klassiker in einer Auswahi seiner kleineren Schrif-
ten. 3 vols. — Evers, Martin Luther, Lebens=und Charakterbild. —
Guttmann, Die Religionsphilosophie des Saadia dargestellt u. erl&utert
(Très méritoire). — Aristoteles’ psychology in greek and english wieb
introduction and notes by Edwin Wallace. (Travail excellent qui té¬
moigne qu’on s’occupe de plus en plus d’Aristote en Angleterre.) —
Rhomberg, Die Erhebung der Geschichte zum Range einer Wissen-
schaft oder die historische Gewissheit und ihre Gesetze. (Un de ces livres
qui font secouer la tête au critique; l’auteur est un brave dilettante qui
a soudainement découvert que 1 nistoire est une science, et qui annonce
triomphalement cette découverte à l’univers.) — Waltrami ut videtur
liber de unitate ecclesiae conservanda, recogn. Schwenkbnbecher. (Fait
partie de l'édition scolaire des < Monuments. »)—Gerbaix Sonnaz, Studi
storici sul Contado di Savoia e marchesato in Italia nella eta di mezzo.
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 42
— 15 octobre —
1888
Sommaire s iqg. Dillmann, Manuel exégétique de l’ Ancien Testament; Lenor-
mant, La Genèse, traduction d'après l'hébreu avec distinction des éléments consti¬
tutifs du texte. — 200. Uber, Etudes sur Salluste. — 201. Kock, Etudes sur la
phonétique du vieux suédois. — 202. Journal historique de littérature italienne,
p. p. Graf, Novàti, Renier, I. — 2o3. Annuaire de Goethe, iv, p. p. L. Gbiger.
— Chronique. — Académie des Inscriptions.
199. — Uurzfefaaatea exegelltches Uandbuch zum Alten Testament.
Elfte Lieferung. Die Genesis, von Dr. August Dillmann, ord. professor der Théo¬
logie in Berlin. Vierte Auflage. Leipzig, Verlag von S. Hirzel, 1882.
La Genèse, traduction d'après l'hébreu avec distinction des éléments constitutifs
du texte, suivie d'un essai de restitution des livres primitifs dont s’est servi le
dernier rédacteur, par François Lenormant, membre de l’Institut. Paris, Mai¬
sonneuve et C 1 ®, libraires-éditeurs, 2 5 , Quai Voltaire, 1 883 .
II
J'aurais bien des réserves à faire sur la façon dont la critique distri¬
bue le récit du déluge (Genèse, vi, i 3 -ix, 17) entre les documents A et
C; je me bornerai à un seul point. D’après l’opinion admise, A fait en¬
trer dans l’arche une seule couple d’animaux, de sorte que Noé sauvé
ne peut offrir aucun sacrifice quand, par son intermédiaire, Dieu conclut
avec le genre humain une alliance éternelle. C, au contraire, fait entrer
sept couples de chaque espèce pure dont Noé fait un sacrifice après sa
sortie de l’arche, sacrifice par suite duquel il reçoit la promesse qu’il
n’y aura plus de déluge. Eh bien, je suis fâché de le dire, cela me paraît
impossible. Quoi, n’est-ce pas méconnaître la nature des choses que
t d'admettre qu’un prêtre (A) qui vivait des sacrifices du temple et à qui
lies sacrifices devaient paraître le moyen unique pour rendre favorable la
[divinité, ait retranché sciemment ce rite solennel et sacrosaint à la
conclusion de la première alliance entre Dieu et le genre humain ? D’un
t utre côté, n’est*il pas également étrange qu'un prophète (C) qui, d’or-
inaire, n’attribue aucune valeur intrinsèque au sacrifice, fasse précisé-
aent déterminer la bonne disposition de la divinité pour les hommes
ar Todeur alléchante du sacrifice que lui apporte le patriarche? Sans
Dute, le récit du déluge renferme plusieurs passages qui ne sont que
rs répétitions et même d'apparentes contradictions à l’égard du reste
t qui semblent venir de sources diverses. Mais, ce dont je doute fort,
est l’attribution des morceaux élohistes à un membre du sacerdoce et
es morceaux jéhovistes à un membre de l'école prophétique.
Nouvelle série, XVI.
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REVUE CRITIQUE
286
P. 171, la ville de Saba au Sabae dans le golfe d’Adoulis ne peut ré¬
pondre au Sebâ de la Genèse x, 7, la fondation de l’Etat des Ag’âzi
(Abyssins) en Afrique étant, suivant toutes les apparences, postérieure
à l’époque biblique. —Les *Pa|X|i.avTT«t de l’Arabie méridionale sont, sans
aucun doute, les Radmân des inscriptions sabéennes et des géographes
arabes. Radmân est encore de nos jours le nom d’un canton au sud de
Mareb. — Sur Shin'âr et Kalné , ainsi que sur la restriction du rôle de
Nimrodà la Babylonie, voyez Revue critique , n° 29, pp. 1 3 ,14.— P. 184.
Il n'est guère probable que le peuple sémitique nommé Lûd dans la Genèse
soit les lointains Lydiens qui ne furent connus que très tard par les
Assyriens. Je ne crois pas que l’auteur biblique ait considéré le Taurus
comme la limite entre les Sémites et les Japhétites. J’aime mieux ad¬
mettre que ce Lûd est identique aux Lûdîm d’Egypte (v. 23 ). La tradi¬
tion hébraïque hésite souvent à propos de certains peuples méridionaux
et elle les range tantôt dans la famille sémitique, tantôt parmi les Ha-
mites (cf. Shebâ, * Hawilâ , Dedân). —P. 190. Les inscriptionsignorent
l’existence en Babylonie de populations non sémitiques, car la dénomi¬
nation indigène de ce pays, Sumer et Accad, quoi que disent lesacca-
distes, n’a point de portée ethnographique. — P. 194. Je suis tenté de
croire que l’orthographe assyrienne bab-ilu (hiér. Ka-dingir) « porte
de Dieu » repose sur un calembour. Le vrai nom de Babylone, babilu f
est le participe du verbe babalu « amener, apporter, produire », faisant
allusion à la fertilité du territoire (cf. Yebûs et Çion ), lequel était ar¬
rosé par le canal Arahtou qu*on désignait comme celui qui apporte la
vie à Babylone (sha ana tin-tir ubbalu ti). Il y a même lieu de penser,
d’accord avec M. Guyard, que l’idéogramme tin-tir n’est qu'une va¬
riante orthographique de Babilu. En effet, tir a aussi la valeur lu et
fin, qui équivaut d'ordinaire à { ikaru « mâle » semble aussi désigner
l’enfant dont un des noms est babu. Le troisième idéogramme de Ba¬
bylone, é-ki, signifie clairement <c lieu de canal ». — P. 21. Les Chal-
déens de l’Arménie doivent très probablement leur nom à Haldi, la di¬
vinité supérieure du pays, et n’ont rien de commun avec les Chaldéens
de la Babylonie. Ceux-ci occupaient principalement la rive droite ou
syrienne de l’Euphrate (Job, Pline) et c’est là et nullement au nord da
Masius, au milieu de populations allophyles, qu’il faut placer Our
Kasdtm, patrie d'Abraham. Que ce soit Mouqayar, on ne saurait l’af¬
firmer, attendu que le nom cunéiforme Uri paraît devoir se prononcer
Shamri . Je persiste aussi à penser que la ’ Hârân abrahamide est une
ville de la Syrie moyenne, située à sept journées de marche du mont Ga-
laad, d'après la donnée explicite de Genèse, xxx, 22, donnée que les par¬
tisans de la tradition ne sont pas autorisés à attribuer à je ne sais quelle
source secondaire et contradictoire. Pour d’autres arguments, voyez mes
Mélanges d’épigraphie, p. 7•» suiv. — P. 221, Amraphtl est en bon
assyrien (ilu) imur-pal « (Dieu) a vu le fils ». Comparez l’hébreu Reû-
bên. — Ellâsdr a l’air de répondre à une forme assyrienne al-esktr
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d’histoire et de littérature 287
« ville du sanctuaire ». Une conjecture sur Goyîm se trouve dans M.
C. H., pp. 32 , 33 . — Pp. 233 , 234. Damme$eq-Elie\er me semble étie
le nom vrai du serviteur d’Abraham; sa forme primitive, probablement
Dammeseq-êU'e\er « Dammeseq (Dieu éponyme de la ville de ce nom)est
un Dieu de secours », est ordinairement écourtée en Elie\er. — P. 240.
La correction proposée par M. Wellhausen au verset xvi, 1 3 est d’autant
plus inacceptable que la ponctuation massorétique du nom du puits, beêr
la haï rôt , (v. 14), sans analogie ailleurs, est certainement fausse. Il faut
lire beêr le ht rôt « puits de la saillie de celui qui me voit », ou mieux
encore, en accentuant la pénultième de rôî (forme pausale de rot) « puits
de la saillie de vision », c’est-à-dire de la proéminence près laquelle eut
lieu une vision, une apparition divine. Le ht (forme pausale lé'ht), avec
le sens de « saillie, proéminence » figure dans un nom de lieu de Juda
(Juges, xv, 10, 19). La légende de Samson a brodé un conte épique
sur le sens propre du mot qui est « mâchoire ». On le trouve encore
plus fréquemment dans la Mischna. Si le verset i3 a besoin de correc¬
tion, on peut lire elôhé au lieu de a'harê « est-ce qu’ici même j’ai vu le
Dieu qui me voit? » l’expression Elôhé roî serait ainsi parallèle à êl
roî . — P. 25 o. La traduction de Kaêt'hayyd (Genèse, xvm, 10, 14) par
« quand ce temps revit », quoique généralement admise, n’est ni gram¬
maticalement correcte ni bien conforme à l’usage delà langue hébraïque
qui n’emploie pas la locution inverse « le temps meurt », mais celle de
« le temps (mô‘êd) est passé » ; il faudrait donc quelque chose comme
liteqûphat hasshdnâou hayydmtm. Je propose de corriger partout Ke*êt
’hdyâ ce à l’époque strictement nécessaire pour que la femme devienne
mère (mot-à-mot : « comme le temps d’une accouchée ») », c’est-à-
dire : après environ neuf mois. Le mot ’hâyd désigne dans la Mischna
aussi bien la sage-femme que la femme accouchée. La première accep¬
tion se constate dans l’Exode, 1, 19.— Pp. 33 o, 337. Les difficultés des
versets Genèse, xxxi, 44-52, ne me paraissent pas assez considérables
pour admettre qu’il y ait enchevêtrement de pièces divergentes ou des
confusions de noms propres. Voilà comment suivant moi l’événement est
censé s’être passé : Jacob, ayant accueilli le projet d’alliance que lui fait
Làbân (44), érige une pierre en cippe (45), emblème de la présence divine,
et dit à « ses frères », c’est-à-dire à Lâbân et à ses gens (cf. v. 54) de
ramasser des pierres pour faire un monceau afin d’y prendre ensemble le
repas de confraternité. La cérémonie accomplie, les deux contractants
donnent à ce signe visible de leur alliance, chacun dans sa langue, le nom
de « monceau de témoignage •. Puis Lâbân, le promoteur de l’alliance et
le plus intéressé à son observation, adjure Jacob de ne jamais enfreindre-
les rapports d’amitié ni envers ses filles (48 a 5 o) ni envers lui-même (5 1,
5 a). Jacob affirme par serment d’y rester fidèle et l’entrevue se termine par
un dîner d’adieu (Juges, xix, 5 ) après lequel, le lendemain matin, ils se
séparent. Toutes les expressions du récit sont parfaitement exactes, même
l’expression « que j’ai fixé » relative au cippe (5 1), car, si Jacob en l’éri-
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REVUE CRITIQUE
288
géant élève un monument religieux, c’est Lâbân qui établit sa vraie si¬
gnification comme symbole d'alliance immuable. La mention de Gal-'êd
et de Miçpâ dans la phrase incidente, 48 b et 49, trouble seule l'unité de
la narration, mais la ponctuation massorétique de ces noms est certaine¬
ment incorrecte et il faut lire GiVâd et Miçpé : le premier désigne la
montagne, le second la crête ou la vigie qui la couronne (Juges, xi, 29).
C’est par suite de l’explication donnée par Lâbân (48 a) du nom bilingue
du monceau (47) qu’on nomme (cf. xvi, 14) ce lieu GiVâd et aussi
Miçpé (vigie, observatoire) parce qu’il (Lâbân) avait dit « Dieu nous obser¬
vera l’un et l’autre quand nous nous serons perdus de vue ». — P. 344.
Bien que chez les Hébreux la spiritualité de Dieu (Deutéronome, iv,
12, 1 5 ) n’ait pas empêché la croyance que celui-ci peut se montrer passa¬
gèrement sous forme humaine (Genèse, xvin. Cf. saint Jean, xx, 20, 27,
28, malgré iv, 24), il n’existe aucune raison pour admettre que le per¬
sonnage qui lutta avec Jacob ait été Dieu même. Le prophète Hosée(xi1,
4 suiv.) qui rapporte cette légende emploie formellement le terme maVak
« ange » et il devait mieux savoir que nous. Le caractère d’ange résulte
encore de ce que l’assaillant mystérieux refuse de dire son nom ; or, les
Hébreux antérieurement à l'exil ne donnaient pas des noms aux anges (Ju-
ges, xni, 18), tandis que le nom de Dieu était hautement proclamé. — P.
389. L’expression « terre des Hébreux » (Genèse, xl, i 5 ) ne saurait déjà
par cela seul être un anachronisme pour a terre de Kena ( an » qu’elle n’a
jamais été en usage. Joseph emploie à .dessein cette expression inusitée
pour faire comprendre en même temps qu'il n’est ni Arabe ni Chananéen,
deux noms peu en honneur chez les Egyptiens, mais issu de la race hono¬
rable des Hébreux. — P. 391. Les motsyeôr et â’hû sont tout à fait sé¬
mitiques. En assyrien, aru signifie « couler » et comme substantif « flot,
eau courante, rivière ». On trouve aussi la forme non contractée iauru,
tandis que le nom du Nil est Iaru'u. Dans la même langue, a‘hu désigne
ainsi qu’en hébreu le bord de rivière (ou de mer), ordinairement couvert
de végétation. — P. 419. On ne voit pas bien la nécessité de bouleverser
l’ordre du récit, Genèse, xl, i-6. En se rendant auprès de Pharaon pour
lui annoncer l’arrivée de sa famille, Joseph avait amené (lâqa’hj avec lui
cinq de ses frères. Le roi, après avoir entendu la nouvelle, s’adresse par
politesse ou par curiosité aux frères du vizir, s’informant de leur manière
de vivre, et ceux-ci, suivant le conseil de Joseph (xl, 33 , 34), ajoutent à
leur réponse la demande de la permission d’habiter le pays de Gosen.
Alors Pharaon, se tournant vers Joseph, lui répond que, puisque son père
et ses frères sont venus, il peut les faire résider dans la contrée qui leur
plairait le plus, notamment à Gosen. — Pp. 422-423. Je propose de lire
he^ebîd au lieu de he'ebîr (Genèse, xlvii, 21). Joseph contraint le peuple
aux travaux des villes, lesquels étaient ordinairement exécutés par les
esclaves (Exode, 1, 11,1 3 ). — P. 431. La première personne du singulier
(Genèse, xlviii,22) a été choisie pour établir le droit de Jacob de donner
la ville de Sichem à quiconque lui plaît. Bien que la ville fût prise par
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d'histoire et de littérature 28g
Siméon et Lévi seuls (1 ibidem , 25 , 26), comme d'une part le butin est
devenu le bien commun de la famille ( ibidem , 27-29) et que, de l'autre,
l’attaque avait pour but de venger un outrage fait à son honneur, Ja¬
cob (malgré v. 3 o) a pu se regarder comme ayant lui-même conquis la
ville. — P. 435, que la locution bea’harit hayyâmim (Genèse, xlix, i)
n’est pas relativement moderne, c’est ce qu’il résulte de la forme assy¬
rienne ina a'hrit (ou i'hrit) ûmi qu'on lit dans une inscription du roi
babylonien Kimtou-rapashtou (hiér. Ha-am-mu-ra-bï) qui vivait pro¬
bablement au xvi* siècle avant l’ère vulgaire. Cet exemple doit faire ré¬
fléchir ceux qui prétendent pouvoir fixer la date au-delà de laquelle
tel mot ou telle expression pentateutique n’a pu exister. — P. 437.
Il me paraît impossible de prendre l’abstraction pa'ha\ kammayim
(Genèse, xlix, 4) « débordement comme (celui de) l’eau » (Ueberschwall
n>ie Wasser) pour une épithète de Reüben. On obtiendrait un sens plus
acceptable, si on lisait pohê\ « ô toi, bouillonnant comme l'eau, tu
n'auras pas la primauté! »> Mais le verbe hôtîr ne peut signifier que
« laisser un reste ou un surplus » (Exode, x, i 5 ; Rut, 11, 18). Il faut
donc considérer pa'ha\ kammayim comme le complément du verbe :
toi Reüben, en qualité d’aîné, tu dois posséder un surcroît de dignité et
de puissance; quant au débordement de l’ambition qui est semblable
à l'impétuosité des eaux, ne le conserve pas; tu sais à quelle action hon¬
teuse ton impatience de me remplacer t’a déjà entraîné jadis, car tu es
monté 1 sur le lit de ton père et sans plus d’égard tu as souillé ma cou¬
che! C'est une admonition que Jacob mourant adresse à son aîné pour
le mettre en garde contre une trop grande avidité de domination dont la
première tentative avait imprimé une tache à son nom. Elle implique,
mais indirectement, la déchéance de Reüben de ses droits. — P. 438.
Au sens de « couteau courbé, faucille » pour l’hébreu mekêrd , sens
qui a le double inconvénient de ne se retrouver dans aucune des lan¬
gues sœurs et de contredire les autres données relatives à l'extermination
des Sichémites par l’épée(Genèse, (xxxiv, 35 , 36 ) et par l'arc ( ibidem ,
XLvm, 22), je préfère celui de « complot, intrigue » (appuyé par l’arabe
et l’éthiopien) et je traduis kelê ’ hdmds mekêrôtêhem (pour la conser¬
vation de Yê avant les suffixes, cf. shephêlâtô , Josué, xi, 16) par t calculs
d’iniquité sont leurs complots. » Je considère le mot kêlîm ici et Isaïe,
xxxji, 7, ainsi que l'épithète kêlaï ou KxlcCi « avare » comme formé
d'un verbe kly, dénominatif de kelâyôt « reins. » Les reins sont le
siège de la spéculation, du conseil; (Psaumes, xvi, 7, Lxxin, 21; Jérémie,
xn, 2. Cf. la sentence talmudique : Kelâyôt yô'açôt). Comparez l’autre
désignation de l’avare : nôkêl (Malachie, 1, 14) « mauvais spéculateur d.
— Dans une note encore inédite, lue, il y a un an, à la Société de Lin¬
guistique, et intitulée Corrections de passages bibliques à Vaide des
inscriptions assyriennes , j’ai démontré que la leçon des Septante Kebêdî
1. Je restitue avec M. Olshausen i âlô * âlîtd.
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pour le massorétique Kebôdî dans la Genèse, xlix, 6, est très exacte.
En effet, le parallélisme de l’âme ou de la vie [napishtu = héb. nephesh)
et du/o/e [Kabadtu = héb. Kâbêd ) est des plus fréquents dans les ins¬
criptions assyriennes, soit démotiques, soit hiératiques. Cette lecture
doit aussi être rétablie dans d’autres passages, par exemple dans les
Psaumes, xvi, 16. — Pp. 441-444. Le savant auteur me semble faire
trop d'honneur à l’hypothèse de M. Wellhausen, d’après laquelle le
verset Genèse, xlix, 10, serait une interpolation. L'emploi de me'hôqêq
dans le sens de c bâton de guide » qui ne se trouve que dans l’ancien
chant, Nombres, xxi, 18 (où une glose l’explique par mish'enet), en ga¬
rantit l’ancienneté à la fois et l’authenticité. Ce verset est l’interprétation
nécessaire du verset précédent. Après avoir assimilé Juda à un lion¬
ceau qui se lève de dessus sa proie et s’accroupit pour la dévorer sans
craindre d’être dérangé par les autres animaux, le patriarche ajoute
dans un ton prophétique : Le bâton de chef ne s’éloignera point de
Juda, ni le bâton de commandant d’entre ses pieds (c’est-à-dire: il
ne cessera point d’attaquer ses ennemis. Cf. le tour un peu diffé¬
rent Juges , v, 9, 14) jusqu’à ce qu'il vienne en paix (shdlâm pour
shilôh L Comparez Isaïe, xu, 3 ; lvii, 2) et qu’à lui soit l’obéissance
des peuples ». — P. 446. L'exclamation, Genèse xlix, 18, « En ton se¬
cours j'espère , ô Yahwé! » n'est pas une prière faite par le patriarche
au nom de ses descendants, lesquels devront mettre leur espérance en
Yahwé pour vaincre leurs ennemis, mais une formule qui exprime la
conviction du patriarche que sa prière en faveur de Dân, formant le
verset précédent (remarquez y le précatif yehî!), sera exaucée. Com¬
parez les expressions analogues en conclusion de prières, Isaïe, xxxvm,
20. Jonasn, 10. Psaumes ni, 9. Une conviction aussi ferme équivaut à
une suprême insistance.
III
De cet ouvrage magistral, fruit de profondes connaissances linguisti¬
ques et de toute une vie d’études et de méditations sur le texte biblique
et sur toute la littérature afférente, le passage à La Genèse de M. Fran¬
çois Lenormant n’est pas seulement difficile, mais excessivement péni¬
ble. Après une préface qui résume l’état de la critique biblique en Alle¬
magne, et encore un état déjà arriéré, puisqu’on n’y insiste que sur les
deux sources principales, M. L. nous offre une traduction française de
la Genèse d’abord en conservant le texte dans son état actuel, mais en
distinguant par des types différents les parties qui appartiennent aux
deux sources originaires, le jéhoviste et l’élohiste ; puis en reproduisant
ces sources séparément l’une après l’autre afin de faire voir l'uni té decha-
cunede ces compositions. Il a fallu que lesétudes bibliques fussent très né¬
gligées en France pour qu’une pareille dissection, que l’on peut examiner
1 .La confusion de mêm final et de hê n'est pas rare dans la Bible Voyez, par exemple,
Abiydh et Abiyâm.
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291
à loisir, depuis des années, dans une fouie de manuels allemands, ait pu
être présentée comme une nouveauté ! M. L. ne dit pas de quel auteur
allemand il a emprunté la distribution des doubles narrations, mais si je
ne me trompe, c’est le système de Schrader-Wette qui a obtenu ses préfé¬
rences. La majorité des notes, assez insignifiantes d’ailleurs, qui se rap¬
portent à des déplacements ou à des modifications de versets, malgré rem¬
ploi fréquent des pronoms « je » et « nous », sont aussi puisées dans les
ouvrages d exégèse allemands. Quant à la traduction elle-même, elle est
faite, nous dit-on, d'après l'hébreu , ce que nous croyons parfaitement,
si ces mots que j’ai soulignés se complètent par ce membre de phrase» et
non pas d'après la Vulgate ou les Septante. » Autre question est de savoir
si M. L. a traduit de l'hébreu ou bien de l’allemand, en compulsant
de temps en temps le texte hébreu pour la transcription des noms
propres. Dans un compte-rendu consacré dans cette Revue, il y a
deux ans , à un autre ouvrage du même auteur , j’ai été obligé
de signaler certaines fautes de transcription qui ne témoignaient pas
d’une grande connaissance de la langue hébraïque en faveur de
M. Lenormant. L a-t-il acquise depuis ? On pourrait le supposer, mal¬
gré les autres ouvrages volumineux qu'il a publiés dans l'intervalle et
relatifs à des domaines tout différents, car, avec l'étonnante facilité dont
l'auteur a si souvent donné la preuve et qui lui avait permis par exemple
de maîtriser une vingtaine de langues touraniennes dans l'espace de quel¬
ques mois 1 , avec une telle facilité, dis-je, apprendre l'hébreu dans deux ans,
ne paraît plus qu’un fait bien au-dessous de ses forces et bien au-dessus du
doute. En effet, le désir de M. L. de faire sentir à ses lecteurs qu'il a
travaillé sur le texte hébreu résulte indubitablement de deux points qui
frappent aussitôt dans sa transcription. Il transcrit ainsi, d’une part, les
voyelles longues ô, otfsans accent circonflexe chaque fois qu'elles sont
dans le texte massorétique privées du n>dn> mater lectionis; de l’autre, la
voyelle î finale par y pour marquer son caractère adventice. J’avoue que
c'est précisément ce soin méticuleux de choses si insignifiantes qui m’a
rendu méfiant. En regardant de près, on ne tarde pas à constater de nom¬
breuses infractions à cette règle ; telles sont, par exemple, les formes
Nôa’h, Pischôn , Gômer, Paraâh, Sedôm (à partir de la page 3 y) et tant
d’autres qu'il serait oiseux d’énumérer. Mais cette inconséquence n’est
que de mince importance. Plus graves, parce qu’ils impliquent une
singulière insouciance de règles de lecture élémentaires, sont les cas
suivants : i° lectures inexactes du shewd : Schine'ar^Yice'hdq, Tide'âl ,
Gale’êd, etc. ; 2 0 méconnaissance de la nature du qdméç bref : Y&qtân ,
Keddrldômer , be'anyt, beaschry , etc. ; 3 ° méconnaissance de l'i bref :
Qaîn, Miçraîm, Md’hanatm (trois fautes!) etc.; 4 0 mise d’un schewd
où il n'y en a pas et vice versa : Bêr(!)-SchdVa, Abîd’d ; Yischmdêlîm;
5 ° confusion de hê et ’hêt : BiVhdh; 6 ° confusion de o avec û : ûdéh
1. La langue primitive de la Chaldée et les idiomes touraniens . Voir M. C. H.
p. 47, 48.
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(p. 88). En voilà assez, je crois, pour se faire une idée comment M. L.
lit l’hébreu. En ce qui concerne la grammaire, je me bornerai à citer
la forme ya'eqbénjr dont je ne sais que faire, et le curieux bâgâd (Genèse,
xxx, 11) qu’il traduit : < par fortune », sans se douter que ceux qui
traduisent ainsi lisent begdd, tandis que la lecture massorétique vise au
sens de « est venue la fortune ». Dans de telles circonstances, la tra¬
duction de M. L., forcément éclectique et de vulgarisation, échappe à
la critique, laquelle a autre chose à faire qu’à restituer à chacun des
auteurs primitifs ce qui lui appartient dans la masse accumulée par une
sorte de communisme littéraire.
Parmi les notes qui appartiennent bien à ’M. L., je relèverai les
trois suivantes qui seraient d’une certaine importance si elles étaient
fondées. Archéologue et auteur de nombreux ouvrages assyriologiques
ainsi que de la première grammaire accadienne, M. L. est certaine¬
ment plus que beaucoup d’autres en état de parler de l’antiquité
orientale en pleine connaissance de cause. Voici cependant ce qu’il
nous donne. Au sujet du verset Genèse, xm, 10 qui vante la fertilité du
territoire de Çoar dans la Pentapole, M. Lenormant remarque (p. 3 y)
que la vraie lecture antique était Çâr et qu’il s’agit de la ville égyptienne
de Tsar , la première que l’on rencontrât en venant de Palestine à l’en¬
trée des terrains irrigués du Delta. Cette conjecture se heurte malheu¬
reusement à une petite difficulté qu’il fallait prévoir, c’est qu'en égyp¬
tien le mot tsar ne s’écrit jamais avec le signe qui correspond au ’aïn
hébreu 1 2 . Cela est si vrai que quelques égyptologues voient dans le nom
sémitique d’Egypte, Miçr, Miçraïm, l’égyptien ta ma-\or (ou tsar)
« pays fortifié ». Dans une autre note (p. 38 ), M. L. nous assure que
Amrâphel est le nom accadien amar-pal , sans nous dire s’il signifie
t eau-faire-gouvernement » (a mar-pal) ou « gazelle-gouvernement»
(amar-pal) ou bien « lumière-sacrifice »,sans compter une dizaine d au¬
tres significations dont ce nom est susceptible. A cette confusion de Babel,
on préférera, j’espère, l’étymologie assyrienne rapportée plus haut et que
M. L. aurait trouvée avant moi s’il n’était pas tout entier au désir de
découvrir dans la Bible la trace d’un peuple introuvable ailleurs. Mais
voici ce qui est incomparablement plus curieux. Dans ses Origines de
Vhistoire (Préface, xvm), M. L. avait émis cette opinion singulière
que les Térahides, en quittant Our*Kasdîm , auraient emporté avec eux
des légendes babyloniennes toutes rédigées. Il citait à l’appui le jeu de
mot de Genèse, xr, 4, lequel « a purement sa source dans l’analogie de
mots (assyriens) \ikru « souvenir, nom » et \ikurat c tour, pyramide à
étages, x A cela j’ai remarqué * que le verset cité ne contient pas le mot
hébreu correspondant, \éker, et que le jeu de mot y est relatif aux
mots schêm « nom, renommée » et schâmatm c ciel, hauteur ». L’édifice
s’écroula ainsi par la base, et M. L. a tacitement supprimé cette pré-
1. La Peshîthâ a du moins transcrit Çô*an au lieu de Ç&ar.
2. Voir M. C. /f., p. 54.
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293
tendue preuve dans La Genèse. Mais l'idée même n'a pas été aban¬
donnée et voici par quelle nouvelle preuve il cherche maintenant à la
démontrer. Il s’agit de Genèse, xi, 29, où Hârân, frère d*Abraham, est
appelé c père de Mil kâh et père de Yiskâh ».Ces mots sont accompagnés
par la note qui suit : « Nous avons ici certainement une glose margi¬
nale passée dans le texte, et cela avec une double variante, d'où il résulte
d’une manière positive que ces généalogies ont été révisées au temps de la
captivitésur des généalogies parallèles existant chez les Babyloniens et con¬
çues en caractères cunéiformes. En effet, le nom de Yiskâh, qui est demeuré
jusqu’à ce jour une crux interpretum , n’est pas autre chose que la se¬
conde lecture dont serait susceptible, en vertu de la polyphonie du signe
initial, l’orthographe la plus simple et la plus naturelle du nom de
Milkâh dans le système de l’écriture cunéiforme ». Ainsi, ce ne sont
plus les Hébreux eux-mêmes qui auraient conservé les généalogies de
leurs ancêtres, ce sont les Babyloniens qui auraient précieusement con¬
servé, imprimées sur des briques, pendant quinze cents ans pour le
moins, les généalogies des ancêtres des Hébreux, hommes et femmes,
jusqu’au moment où ceux-ci ont émigré en Palestine. Grâce à un ha¬
sard vraiment extraordinaire, les Hébreux, violemment ramenés en Ba-
bylonie quinze cents ans plus tard par Nabuchodonosor, sont tout à coup
illuminés de la science des cunéiformes et se mettent à copier ces précieu¬
ses généalogies; mais, ô douleur! en arrivant à la nièce d’Abraham, ils
trouvent son nom écrit avec un signe initial qui a deux valeurs diffé¬
rentes et, pour trancher cette difficulté insoluble, ils sont obligés
d’écrire ce nom deux fois suivant les deux lectures possibles ! Voilà une
aventure extraordinaire à laquelle un nom de femme seul peut donner
lieu. Par malheur, M. L. se trompe sur l’orthographe hébraïque du mot
Yiskâh : le signe cunéiforme qui a la double lecture de ish et mil est Ish
avec la chuintante, tandis que Yiska s’écrit avec la sifflante ordinaire, le
samek . Or, si l'on trace en cunéiforme is-ka, on ne pourra plus jamais
lire milka . Je suis désolé d'avoir à relever des erreurs aussi colossales,
chez un auteur qui, en travaillant avec moins de précipitation, les aurait
facilement évitées. Pour tout dire, le domaine sur lequel l’activité de
M. Lenormant peut déployer ses remarquables facultés d’écrivain et de
penseur sont ailleurs que dans la philologie ou dans la critique biblique.
Ces graves études, toutes composées de faits minutieux et de recherches
patientes et menées avec circonspection, ne conviennent guère aux
esprits synthétiques, épris de grandes généralisations et de hardies pers¬
pectives ; ces études veulent en tout cas qu'on les cultive sans relâche et
exclusivement elles seules et elles se refusent à tous ceux qui les abais¬
sent à la qualité d’un hors-d’œuvre qu’on sert entre la soupe et le
poisson.
J. Halévy.
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200, — QtreeftfaMuea aHqMt WaHiitUwæ gr—Mnatlc» «t crHftev. Diflêcr-
tfttio inaugura lis philologica qpam scripsit Félix Ubkr. Berolini, 1881, 54 p„
Comme le titre l’indique, la dissertation de M. Uber se divise en
deux parties bien distinctes : 1° Questions de grammaire; 2° Questions
de critique verbale.
Dans la première partie, M. U. commence par traiter fort sévèrement
ses devanciers. Il n’épargne surtout pas M. L. Constans. Nous n’igno¬
rons pas que la thèse de M. Constans (De sermone Sallustiano. Paris,
1880) a des défauts. Ces défauts ont été relevés* avec une très grande
autorité, par M. Othon Riemann, dans un long article de cette Revue.
Mais, si M. Constans donne prise à la critique, M. U. mérite-t-il d’être
mieux traité? La partie grammaticale du travail de M. U. ne nous ap¬
prend pas grand chose de nouveau. M. U. n’y signale que des faits bien
connus ou de médiocre importance. Là où nous espérons que l’auteur
nous apportera des vues personnelles, nous ne trouvons que des listes de
mots, des listes d’exemples. Ainsi, à propos de l’emploi de l’infinitif
historique dans Salluste, l’Allemand M. U. se montre très dur pour le
Français (Francogallus) Constans. Mais, lui-même* que nous apprend-
il de neuf? Salluste a employé à peu près cent infinitifs historiques dans
le Catilina , trois cent soixante dans le Jugurtha, environ trente dan*
les fragments des Histoires , en tout environ cinq cents, c'est-à-dire à
peu près le seizième des verbes dont Salluste s’est servi. Salluste a em¬
ployé, en effet, sept mille neuf cent quatre-vingts verbes ainsi répartis :
Transitifs..........
CAO*-
i 36 o
IBB.
*870
BIST. FRIC*.
I2T0
Verbes employés absolument.......
IOQ
200
80
Intraasùtifs...
460
IO40
35 a
CoptUatifs . ....
09a
370
n 3 a
Si M. U. trouve que MT. Constans est un compilateur (voir p. r), nous,
nous trouvons que M. U. prend la statistique pour de Fërudïtion.
Il serait trop long cFexaminer le travaif de M. U. en détaiF. Nous nous
contenterons de signaler, entre autres petits faits, une erreur de M. U.,
qui croit (p. 28) que remploi du génitif du participe en dns, da, dwn,
avec ou sans le verbe esse, pour marquer le but d’une actfon, est parti¬
culier à Salluste. On en rencontre, cher d'autres écrivains, un asse*
grand nombre d’exemptes, qu’un des compatriotes deRf. U., M. KOhwer,
cite dan® sa Grammaire (11, p. 55r. 1878). FI nous semble aussi que
M. U. aurait pu insister davantage sut la question de TempFoi de Fard-
verbe avec esse, du génitif de qualité, du génitif de prix dans Saftaste.
Ces questions noua paraissent aussi intéressantes que d'autres, sur les¬
quelles M. U. a concentré toute son attention.
La question de la langue et du style de Salluste n’est donc pas mieux
connue après le travail de M. U. qu’eHene l’était après la dissertation
de M. Baldstübner, après la thèse de M. Constans. Mais M. U. nous
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jmmonc&flon intention de publier sur Salluste an ouvrage analogue aux
excellents travaux de Diriger sur Tacite, de Lupus sur Cornélius Népes.
M. U. résérve sans doute pour l’avenir ce qu'il n’a pas encore donné, et
mus espérons qu’au moment oü paraîtra son travail, fruit de ses sérieuses
études sur Sailuste, nous poumons lui adresser les éloges qu’il na pas
su mériter aujourd’hui.
Quant à la deuxième partie delà <üssertation{ questions de critique ver-
-baie^ elle est peut-être supérieure à la première. Si noussortunes loin de
ituus trouver d'accord avec l’auteur sur bien des points, nous nous plai¬
sons cependant à reconnaître que certaines conjectures de M. U ber sont
ingénieuses» quoique parfois téméraires.
1 . V.
201. — Studler cefver fornivensk ljudlœra, af Axel Kock. Vol. 1 . Lund
(Gleerup), 1882. 242 p. In-8.
M. Aaad Kock stest fait pattiaaiiiremeM connaître «u public savant
par un ouvrage important sur l’accent dons la langue suédoise (Spràk-
historisk* undersôkningu r <om Svensb Akernt , 1878). Le volume
qu’il public aujourd'hui se compose d’une série d'articles détachés,
d’ailleurs inédits, portant sur divers points de la phonétique du vieux
suédois. Le Thème de chacune de ces études est fourni par un fait nou¬
veau, «àgnadé dune la langue ou l'orthographe des textes, puis discuté à
tons les points de vue. Plus encore que dans ses précédents écrie, l’au¬
teur s’adresse à un public de Montiamtstrès spécial, et les côtés du m-
ijetqoi offrent des points d’attache naturels «vec l'islandais ou le nov-
diqae dons son ensemble, ne sont pus précisément ceux qu’il recherche
et qu’il aime à développer. Nous ne nous permettrons que quelques ve-
tnaïques d’une portée générale à l'égard deB opinions de M. K. qu’on
vpécixlute serait seul à même d’apprécier en tonte compétence.
Les cent quinze première* pages sont consacrées à des questions de
uonsonandsme. Le premier article a trait h l’histoire du 9 suédois, pro¬
noncé à l'heure qu’il est comme le v français, bien qu’issu d’une semi-
voyelle nordique ayant le son de notre ou dans otn. M. K. constate
dans nue certaine classe de vieux textes suédois deux notations distinc¬
tes : i* v et sa» équivalent a qui, certain eurent, as lisaient déjà comme
le y actuel ; 2® ur, lequel n’apparaît qu’à des places parfaitement déter¬
minées, notamment après une oosamme comprise dans la même syllabe
(ts'ÜBjgu*). De nos jours «m écrit et on prononce uniformément v
{tvmgo. comme vimto). Redsercbnot quelle pouvait être la différence de
prononciation, maintenant effacée, qui se cache sous l’emploi <da w,
l'auteur conclue à «-consonne (l’eu de «mi). Ainsi, dans les groupes
spéciaux caractérisés par la graphie u>, la semi-voyelle primitive aurait
été préservée du change méat en v jusqu'à une date relativement ré-
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REVUE CRITIQUE
296
cente (xv® siècle), de même qu’elle persiste encore actuellement, à la
faveur de groupes phonétiques analogues, dans quelques dialectes lo¬
caux cités par M. Kock.
Nous n'avons aucune raison particulière pour mettre en doute l'exac¬
titude de ce résultat. Il est singulier seulement devoir le débat touchant
la valeur phonétique du w réduit d’emblée à un dilemme entre fricative
labio-dentale et semi-voyelle « labio-labiale », comme si les physiolo¬
gistes de la parole ne connaissaient pas concurremment une fricative
labio-labiale \ Cette fricative existe, par exemple, dans l’allemand quelle
par opposition à welle . De plus, à l’égard du développement historique
des sons, la fricative de quelle s’est séparée de celle de welle précisé¬
ment en vertu des mêmes circonstances phonétiques dont on voit que
dépendent v et w en vieux suédois, et elles avaient également une
semi-voyelle pour point de départ commun ( uu du vieux allemand). Il
n’y a donc certainement pas lieu d’écarter de la discussion cette troi¬
sième hypothèse.
L’étude suivante (pp. 35-5o) illustre par de nouveaux exemples un
fait sur lequel M. K. avait autrefois attiré l'attention, le passage de k à
gh (g) par l’effet de l’atonie. Il est traité ensuite (pp. 51-69) de l’emploi
orthographique de c; à ce propos, M. K. montre que, dans certains
dialectes du vieux suédois, la voyelle ô sortie de au laissait, quoique
palatale, subsister devant elle le k .
Pp. 69-109, l’auteur recherche les traces, en suédois, d’une fricative
gutturale sourde (ch allemand dans sache ) que Rydqvist niait avoir ja¬
mais existé. Elle a existé d’une part vers 1700, au témoignage des éru¬
dits de l’époque, dans des mots empruntés à l’allemand. D’autre part,
à la fin du moyen âge, dans des mots indigènes où elle a.fait transition
entre k et gh . Elle est marquée par ch. Ce chapitre renferme la dé¬
monstration, très intéressante pour l’étude des facteurs qui agissent sur
la forme des mots, de la formation du doublet och c et », ock « etiam ».
Il est difficile, en revanche, de comprendre à quelles fins figurent (pp.
75-76) les ch de dialectes modernes, comme celui qu’on prononce,paraît-
il, dans tjena (allemand dienen). Peut-être, dans la pensée de l’auteur,
la remarque est-elle simplement dirigée contre ce que l’assertion de
Rydqvist avait de péremptoire. Mais M. K. semble y chercher bien
plutôt la confirmation de sa thèse sur l’existence du même son en vieux
suédois, dans des formes d’un tout autre genre que tjena. Entre les ch
archaïques supposés et ces ch modernes, il n’y aura jamais d’autre point
commun que celui de leur concordance physiologique. Des premiers
aux seconds, nulle filiation ne saurait s’imaginer; des seconds aux pre¬
miers, aucune conclusion rétrospective n’est permise. M. K. accordera
tout le premier qu’un lien historique n’est concevable qu’entre deux
formes , ou entre deux phonèmes en tant qu 'éléments constitutifs de
1. Et celle-là véritablement labio-labiale, tandis qu’il y aurait beaucoup à dire
sur la même épithète appliquée par M. K. à la semi-voyelle.
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d’histoire et de littérature
297
formes . L’identité comme la diversité acoustique des phonèmes n est
en elle mêmed aucune signification pour l'histoire.
En dernier lieu le passage de th initial à dh dans les mots sujets à
perdre leur accent est brièvement étudié, pp. 111-11 5 . La forme du
pronom de la deuxième personne notamment repose dans les différents
rameaux du nordique tantôt sur thu , type originaire, tantôt sur dhu, type
déterminé par l’atonie. L'auteur combat une opinion de MM. Noreen et
Leffler qui, tout en admettant la raison d’accentuation, croient devoir
reculer jusqu'à l'époque de l’unité nordique l’origine du doublet thu -
dhu. En suivant ce système, répond M. K., pourquoi ne pas remonter
du coup jusqu'à l’unité germanique, puisqu’en anglais aussi nous avons
une consonne douce daus le pronom thou ? L'observation ne porte pas.
Le dh de l’atone dhu pour thu va de pair évidemment avec le dh mé¬
dial de brôdhir pour *brüthir . Et, de même qu'aux yeux de tout le
monde le tk doux anglais de brother s’est développé indépendamment
du dh de brùdhir , de même il n'y a pas à faire intervenir thou dans la
question relative à dhu .
Les études de vocalisme qui occupent la seconde moitié du volume
portent premièrement sur une tendance « d’harmonie des voyelles » en
vertu de laquelle la qualité d'une voyelle radicale influe sur celle d’une
voyelle suffixale; en second lieu, sur un fait pour lequel M. K. propose
le nom de balance des voyelles, vokalbalans. Dans la langue suédoise
officielle, de i 35 o à i 5 oo, Vu des suffixes de flexion et de dérivation
permute assez régulièrement avec 0, suivant la quantité de la syllabe ra¬
dicale. Ex. : stadhwgha : syndoghan. Une remarque semblable a été
faite par M. Paul (Beitr. \ur gesch. der deutsch . spr ., VI, 1 55 )
relativement à l’i des comparatifs en - iro dans Otfrid et d’autres textes
du vieux-haut-allemand. Lï est remplacé par e après une syllabe lon¬
gue, be\iro : hérero. Peut-être l'interprétation que M. Paul donne de
ce fait demande-t-elle à être revisée en tenant compte du parallèle offert
par le vieux suédois. — Si les observations de M. Kock sur l’alter¬
nance u : o se confirment, elles prouveraient indirectement, comme le fait
remarquer l’auteur, que les syllabes radicales brèves se sont conservées
en suédois jusqu'à une époque plus récente qu’on ne le pensait. On sait
que dans la langue actuelle toute syllabe radicale est longue.
Les études sur le vocalisme du vieux suédois ne seront complétées
que par la publication prochaine d’un second volume. Nous sommes
assuré d’y retrouver les qualités de clarté et d’ordre méthodique qui ren¬
dent très facile la lecture du premier.
F. de S.
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REVUE CRITIQUE
298
202. — Olornale otorlco délia letteratura Itallana* diretto e redatto da
Arturo Graf, Francesco Novati, Rodolfo Renier. Anno I, Fascicolo I, gr. in-8,
188 p. Roma-Torino-Firenze. Ermanno Loescher editore. i 883 .
Après avoir signalé les défiants de 1 a plupart des histoires littéraires de
l’Italie, publiées depuis le grand ouvrage de Tiraboschi, et montré la
nécessité « d’un long travail préparatoire » pour rendre possible la tâche
du futur historien de la littérature nationale, les directeurs du Giornale
storico délia letteratura italiana ajoutent ces réflexions que je traduis
parce qu’elles sont pleines de justesse et qu'on y trouve résumé le pro¬
gramme de la revue qu’ils viennent si courageusement de fonder : < 11
faut que la nouvelle histoire de la littérature italienne ait essentielle¬
ment pour base l’étude directe des monuments et qu’elle évite toute
construction systématique. Nos bibliothèques et nos archives abondent
en documents ou entièrement ignorés, ou à peine entrevus via plupart
de nos textes ont besoin d’étre soumis à un examen nouveau et attentif;
les rapports de la littérature italienne avec celle des autre* nations de
l’Europe et les relations multiples des belles-lettres avec la politique» la
science et les arts figuratifs 9ont, comme au sortir du moyen âge, à peine
soupçonnés ; nombre de points de l’histoire biographique», de l'histoire
de la langue, de la bibliographie sont à discuter et à éclaircir ; en un
mot, il y a des matériaux innombrables à mettre en valeur et â ordon¬
ner avant qu’on puisse, d'une manière digne de la science, affronter la
tâche immense d’écrire une histoire générale de la littérature Ju¬
lienne. s
C’est pour répondre à ce besoin et dans le désir de contribuer à at¬
teindre un but aussi utile que MM. Anuro érfaf, Francesco Nova» et
Rodolfo Renier ont fondé le Giomale storico. Destiné à embrasser» de¬
puis ses origines, l'histoire entière des lettres italiennes, à l'exception seu¬
lement de la littérature contemporaine, il comprendra — je traduis de
nouveau — : « 1" Des articles (scritti) originaux d’histoire et de critique
littéraires ; 2* des textes inédits ; B» des Variétés , courtes notices, doca-
ments,etc.; 4* une Bibliographie , composée à^\Ske Revue bibliographique
et d’un Bulletin bibliographique ; 5 ° enfin une Chronique, contenant «n
résumé des faits qui peuvent, à quelque titre que ce soit, intéresser les
études de littérature et ceux qui s’y livrent ; l'annonce de toutes les pu¬
blications ayant trait à Thistoire littéraire de l’Italie récemment publiées,
enfiri le dépouillement des revues indigènes et étrangères. » Rien ne
manque, on le voit, à ce programme aussi bien conçu qu’il promet
d’intérêt, et les noms des trois écrivains qui l’ont signé sont un garant
qu’il sera aussi bien rempli qu’il a été bien conçu. Il suffit, pour en être
persuadé, de parcourir le premier numéro du journal dont ils ont en¬
trepris la direction.
Il s’ouvre par deux articles d’un incontestable intérêt; le premier
( 5 - 33 ), dû à la plume de M. Tommaso Casini, traite de la Culture bo¬
lonaise au xii* et au xiii* siècle , le second, de M. G. Mazzatinti, nous
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d’histoire et de littérature
299
donne l’inventaire de la bibliothèque des Visconti et des Sforza, rédigé
par Ser Facino da Fabriano en 1459 et 1469; puis viennent, comme
variétés, un court article de M. Marc Landau sur « les traditions juives
dans les nouvelles italiennes », la publication par M. Francesco Novati
de « Trois lettres badines de Cecco cPAscoIi » (62-75*), une étude de
M. Achille Nerf (75-87) sur une «r Commedîa deîParte », le Medico vo -
lante; enfin une lettre de Vmcenzo Monti, publiée par M. Giuseppe
Bîadego. La Revue bibliog r ap hi que n’offre pas moins «Tintérêt et de di¬
versité; elle comprend (gi-i?i) six longs articles consacrés à l'examen
d’ouvrages cTune grande importance, tels que le livre de M. F. Scaduto
sur « l’Etat et l’Eglise dans les écrits politiques depuis la fin de la que¬
relle des Investitures jusqu’à la mort de Louis de Bavière (1122-1347) »,
le « Marsile de Padoue » de B. Labanca, les a Odes de Giuseppe Fa-
rinî », publiées par F. Salveraglio, « Le antkbe rime volgari a etc.
vol. fl, de MM. Ancona et Comparetti, le III e volume du Machiavel
de M. Pasquale Villari, etc. Quant au Bulletin bibliographique (1 3 1-
1 5 2), il se compose de vingt-quatre notices sur des ouvrages nouveaux
parmi lesquels il suffit de citer la <r Crestomazia délia poesia italiana »
cTAdolfo Bartofi, <r GaRIeo GaTîlei e lo studio dî Padova » d’Ant. Fa-
varo, le « Cosimo de* Medici » de L. A. Ferraf, t Pietno Giordani e la
sua Dittatura letteraria » d’Ild. delfa Gibvanna, etc.
On voit queîle variété d’informations offre le Giomate storico; le dé¬
pouillement des périodiques en est une source non moins grande; on y
trouve analysés ou résumés les articles ayant trait à l’histoire littéraire
de Tltalîe de cinquante revues ou journaux indigènes et de trente-un
périodiques étrangers, français, allemands, anglais; si ces derniers sont,
en général, facilement accessibles, il n’en est pas de même de la plupart
des journaux italiens ; quelques-uns sont à peine connus hors de la Pé¬
ninsule, et il est bien difficile de les avoir tous à sa disposition. Par là le
Giornale storico sera du plus grand secours à tous les savants étrangers
qui s’occupent de l’histoire littéraire de l’Italie, et on peut dire qu’il ne
sera guère moins utile aux savants italiens eux-mêmes. On est donc en
droit de lui garantir l’accueil le plus sympathique. Mais ce qui le recom¬
mande non moins que la variété des informations qu’on y trouve, c’en
la compétence des écrivains qui les donnent; on a vu de quels noms au¬
torisés sont signés la plupart des articles bibliographiques; les articles de
variétés ne sont pas dus à des plumes moins compétentes, et les sujets
qui y sont traités, les renseignements curieux qu’ils offrent leur assurent
un succès mérité. On peut, à plus forte raison, en dire autant des arti¬
cles de food par lesquels s’ouvre ce fascicule. J'ai à peine besoin de dire
quelle est l'importance pour TUstoire des lettres et de l’érudition au
xv® siècle de l’Inventaire de la bibliothèque des Visconti et des Sforza
publié par M. G. Mazzatinti, d’après un manuscrit de la Bibliothèque
nationale, et il sera accueilli avee d’autant plus cTempressement que, à
Pexception de la partie qui concerne les ouvrages français, il était « en-
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REVUE CRITIQUE
3 oo
tièrement inédit ». Mais on remarquera surtout l’article de M. T. Ca-
sini sur « la Culture bolonaise au xn c et au xm* siècle ».
On sait quelle place considérable l’Université de Bologne a occupée
dans l'histoire du droit au moyen âge; les étudiants de tous pays qui s y
trouvaient rassemblés ne pouvaient manquer d'entretenir des relations
littéraires et scientifiques entre la capitale de la Romagne et les nations
voisines; c’est ainsi que Bologne fut une des villes où fut connue le plus
tôt la poésie française et provençale : comment s’étonner qu’elle ait été,
de bonne heure, un des foyers de la civilisation et de la littérature ita¬
lienne? M. T. Casini nous fait connaître trois grammairiens qui y étu¬
dièrent ou enseignèrent à la fin du xn* et au commencement du xm* siè¬
cle : l'Anglais Geoffroy de Vinnesauf, contemporain de Richard I er ,
Boncompagno de Florence, « le précurseur de ces esprits bizarres et sa¬
tiriques », si communs alors dans la société littéraire de la Toscane,
écrivain fécond auquel Salimbene a consacré une longue notice, enfin
maître Bene de Florence qui, après y avoir étudié, enseigna à Bologne
jusqu’à sa mort. Ces trois grammairiens, comme les savants de leur
temps, n'écrivirent qu’en latin ; s'il était proche, le moment n'était pas
encore venu où l'idiome national devait servir d'organe, sinon à la
science, du moins à la poésie, et le premier écrivain que nous voyons se
servir à Bologne d’un idiome moderne est un disciple des troubadours,
Rambertino Buvalelli (i 170-12 22). Cependant le xin« siècle devait voir
l'italien devenir, à son tour, une langue littéraire, et bientôt il fut em¬
ployé par les poètes anonymes du temps. Mais si dans les sirventes, bal¬
lades, débats, etc., qu’ils composèrent domine l'élément populaire et
national, il est facile aussi d’y découvrir l’influence de la poésie fran¬
çaise contemporaine. Nous avons là le dernier des éléments qui concou¬
rurent à la formation de la « Culture bolonaise au xin* siècle », et, en le
révélant, M. T. Casini a achevé le tableau rapide et précis qu’il en a
fait. J’ai tenu à insister sur l'étude où il est ainsi retracé, afin de donner
aux lecteurs de la Revue une idée des articles de fond du Giornale sto~
rico et de le leur faire mieux connaître. On voit quelles qualités précieu¬
ses le distinguent et le recommandent à leur attention, et la richesse et la
variété de renseignements qu’il présente et qui lui donnent un caractère
particulier ne peuvent manquer de le faire accueillir favorablement
par quiconque s'intéresse à l’histoire de la littérature et de la civilisation
italiennes. C. J.
203 . — Gœthe*«lahrbnch 9 herausgegeben von Ludwig Geiger. Vierter Band;
Frankfurt am Main, literarische Anstalt (Rütten und Loening), i 883 . In-&, vr et
478 p. 12 mark.
Le Goethe-Jahrbuch de 1 883 , —c’est le quatrième volume — ren¬
ferme, comme dans les années précédentes : 1° des essais et recherelies
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d’histoire et de littérature 3 oi
( Abhandlungen uni Forschungen) ; 2° des communications nouvelles
[neue Mittheilungen)\ 3 ° des mélanges, une chronique, une bibliogra¬
phie.
On trouve dans la première partie une étude de M. Fr. Vischer
(Kleine Beitrâge \ur Charakteristik Gœthes) oti ce fin et spirituel
critique, qui est en même temps un excellent écrivain, expose, un peu
à bâtons rompus, d’ingénieuses idées sur le vers et la langue de Goethe
(Vers und Sprache), sur sa prétendue immoralité, sur l'amertume qu'il
a parfois, sur la sagesse et la raison qui brillent dans ses dernières œu¬
vres (Sinnlichkeit, Bitterkeit, Vernunft ) ; tout cela est délicatement
pensé et très bien dit. Vient ensuite un article de M. W. Scherer sur
l’arrangement des œuvres de Gœthe ( Ueber die Anordnung Gœ-
the'scher Schriften , pp. 51-78); M. Scherer s’y occupe du recueil de
poésies mêlées qui fut imprimé en 1789 ; il distingue plusieurs groupes
dans ce recueil, et montre, comme il la fait dans le volume de l’année
précédente, que, même dans la disposition et l’ordre de ses poésies,
Gœthe reste toujours artiste, et « y fait régner, non pas une contrainte
pédantesque, mais une liberté esthétique. » Cet article est suivi d’une
étude de M. Hermann Hüffer sur la Campagne de France; nous y
reviendrons à la fin de ce compte-rendu (pp. 79-106). M. Burkhardt
dresse une liste chronologique très minutieuse et fort patiemment faite
des représentations des œuvres dramatiques de Gœthe sur le théâtre de
Weimar de 1775 à 1817 ( Gœthes Werke auf der Weimarer Bühne y
pp. 107-126). M. Erich Schmidt poursuit ses études sur l’histoire pré¬
liminaire du Faust (Zur Vorgeschichte des Gœtheschen Faust , pp.
127-140); il cherche Faust ou mieux ce qu'il appelle das Faustische
dans le Turbo de Jean Valentin Andrea; on sait que cette œuvre d'An-
dreà est une pièce en cinq actes, en prose latine, parue en 1616 sous le
titre Turbo sive moleste et frustra per cuncta divagans ingenium ;
M. Schmidt analyse avec beaucoup de verve cette œuvre, la première,
dit-il, du drame allemand où un problème, comme celui de Faust, a
trouvé une forme qui ne manque pas de profondeur (p. i 3 o). — M. Fr.
JZarncke traite des portraits qui représentent Gœthe dans sa jeunesse
(Goethe's Jugendportraits, pp. 141-154). Le plus ancien qu'on con¬
naisse est celui de Schmoll, le gendre de Lavater, qui le dessina le
2 5 juin 1774; ce portrait figure en tête du Jahrbuch de cette année.
Mais revenons à l’étude de M. Hüffer sur la Campagne de France ;
cette œuvre de Gœthe est surtout intéressante, pour nous Français, et
les résultats auxquels arrive M. Hüffer méritent d’être connus. L'éminent
historien démontre, en invoquant les témoignages de 1 epoque, le récit
du « témoin oculaire », les Réminiscences du prince royal, les lettres
des Lombard qu’il a publiées récemment dans la deutsche Revue, que
le récit de Gœthe est très exact, et que, s’il y a quelques erreurs, elles ne
viennent pas d’un parti-pris ou du mépris de la vérité; M. Hüffer rend
hommage à l’impartialité de Gœthe, à la perspicacité de ses vues, à la
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302
fidélité de ses peintures ; « plus on pénètre dans l’histoire de l'époque,
plus on apprend à reconnaître la valeur des souvenirs de Goethe, même
au point de vue purement historique » (p. 82). Chemin faisant, et tout
en prouvant que les témoignages de Goethe concordent avec ceux des
contemporains, M. Hüffer rectifie quelques erreurs qui se sont glissées
dans toutes les éditions de la Campagne de France, même dans la
meilleure, celle de Strehlke. C’est ainsi qu’il faudra lire désormais
Henri XIV de Reuss, et non Henri XI ou XIII ou XLIII ; qu'il faudra
signaler la confusion, faite d’ailleurs non-seulement par Goethe, mais
par le témoin oculaire et par Massenbach,du fameux Drouet, lemaîtrede
poste de Sainte Menehould, avec le maire de Varennes, George, etc. On
saura surtout beaucoup de gré à M. Hüffer pour nous avoir renseignés
sur l’énigmatique Grothus ou Grothaus, cet aventurier qui porte à Ver¬
dun la sommation de se rendre. Je me contenterai d'ajouter à l’étude
de M. Hüffer quelques observations.
Tout d’abord, voici des additions à sa précieuse et instructive biblio¬
graphie (p. 81); les lettres du témoin oculaire ont été traduites en fran¬
çais sous le titre Campagne du duc de Brunswick contre les Français
en 1792 (Paris, Forget. An III de la République); le traducteur (d’au¬
cuns disent que ce serait Desrenaudes) ne dit pas son nom, mais nous
apprend dans sa préface qu’il est « né dans l’intérieur de la Suisse, qu’il
n’a presque cessé d’habiter. » Les Réminiscences du prince royal ont
trouvé aussi un traducteur français; Paul Mérat, lieutenant au 24* lé¬
ger, les a publiées sous le titre de Réminiscences de la campagne de
1792 (Paris, Corréard, 1848). Le même Mérat a fait paraître une tra¬
duction des souvenirs du général Money et une étude sur Verdun en
1792 qui renferme d’intéressants détails , mais malheureusement con¬
fuse et gâtée par l’esprit de parti. Sur l’épisode des vierges de Verdun on
peut consulter les Portraits politiques et révolutionnaires de M. Cu¬
villier-Fleury (1 85 1) que cite d’ailleurs M. Hüffer et le troisième vo¬
lume de Y Histoire du tribunal révolutionnaire de Paris , par M. H.
Wallon (1881, pp. 3 1 8 - 338 ).
M. Hüffer fait très bien remarquer que la Campagne de France ,
quoiqu’elle soit en réalité une suite de Dichtung und Wahrheit } ren¬
ferme plus de vérité que de poésie. Il y a pourtant quelque cc poésie > et
cette poésie, je la chercherais surtout dans les pages qui portent la date
du 27 septembre. Goethe rappelle, à cet endroit de son récit, qu’il a
voulu, sinon amuser, du moins distraire la société réunie sous la tente
du grand-duc de Weimar; il s’est fait conférencier; il a raconté la ba¬
taille de la Mansourah et la captivité de saint Louis. Il cite même les
paroles du comte de Soissons à Joinville : « encore en parlerons-nous
de cette journée es chambres des dames. » Mais Goethe ne savait pas
son Joinville par cœur; il est évident qu’en 1792 il n’a pu faire à ses
compagnons un récit aussi minutieux de la croisade de Saint-Louis en
Egypte; si expressives et si connues que soient les paroles du comte <ie
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d'histoire et de littérature 3o3
Soissons, il ne les a pas citées au complet et dans le texte original. Je
croirais plutôt qu'à l’époque de la rédaction définitive de la Campagne de
France c’est-à-dire en 1820 et dans l’hiver de 1821 à 1822, il lut les
Mémoires de Joinville ; et, en effet, on voit par ses Annales , à cette
même date, qu’il s’intéressait vivement aux œuvres de la littérature
française ancienne et moderne, qu’il lisait à la fois les Mémoires de
M mo Roland, l’histoire de Jeanne d’Arc et les poésies de Marie de France
(année 1820). 11 lui parut qu’une citation de Joinville serait à sa place
dans le récit de la campagne ; elle ferait en quelque sorte diversion ; elle
interromprait un instant la monotone narration des misères et des
souffrances de l’armée prussienne; ce serait une légère digression, une
Zwischenrede qui ne détournerait pas le lecteur du sujet principal et
qu’il rencontrerait avec plaisir.
A ce propos, M. Hliffer se demande quelle est l’édition ou la traduc¬
tion de Joinville que le poète a consultée. Ce ne peut être, selon nous,
que le texte français qui a paru dans la « Collection des mémoires par¬
ticuliers relatifs à l’histoire de France » (2 vols. 1785). On y lit, p. 110 :
« Seneschal, lessons crier et braire ceste quenaille. Et par la creffe Dieu,
ainsy qu’il juroit, encores parlerons nous, vous et moy, de celle journée
en chambre devant les dames. » Goethe a traduit les deux infinitifs
« crier et braire » (dans les autres éditions, simplement a huer ») égale¬
ment par deux infinitifs, bellen und blôken. Plus loin, à la date du
29 septembre, il cite en français les trois mots <c devant les dames » (il
a d’ailleurs traduit « im Zimmer vor den Damen », et les autres éditions
portent <c ès chambre des dames »). Enfin, Gœthe traduit ainsi le juron
favori du comte de Soissons t bei Gottesthron » (tandis que la plus an¬
cienne traduction allemande de Joinville donne t bei Gottes Ober-
kàppchen »). Mais Gœthe avait sous les yeux l’édition, ou, pour parler
comme M. Htiffer, dont la sagacité n’est jamais en défaut, le remanie¬
ment de Joinville, paru en 1785. Il lisait, non point « par la quoife
Dieu » (comme dans l’édit, de 1761 ou dans celle de M. de Wailly),
mais « par la creffe Dieu » ; il ne vit pas que creffe était une faute d’im¬
pression pour « coefïe », et, dans son embarras, il écrivit ou dicta, à
tout hasard, bei Gottesthron ; peut-être encore aura-t-il lu cresse au
lieu de « creffe » et suppléé « chesse » ou « chaise ».
Goethe ne se contente pas de rappeler à ses compagnons la mort du
comte d’Artois et la victoire des Sarrasins; il leur raconte la bataille
des champs catalauniques et leur montre que, malgré la défaite, Attila
sut échapper aux vainqueurs avec les restes de son armée. Le rappro¬
chement est heureux : Gœthe fait entendre que Dumouriez, de même
qu'Aétius, laissera décamper l’adversaire, sans trop l'inquiéter. Mais est-
il bien certain qu'il ait fait en 1792 cette comparaison historique aux offi¬
ciers de Weimar ? J’en doute; mais en 1820 ou l’année suivante, lorsqu’il
lisait les Mémoires de Massenbach, le nom de Teufels/eld ou du champ
d'Attila, que rappelle l’officier prussien, lui tomba sous les yeux; ils’em-
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REVUE CRITIQUE
304
para de ce thème et broda là-dessus quelques lignes de développement.
Aux erreurs et inexactitudes que cite M. Hüffer, on pourrait encore
ajouter la suivante. Gœthe rapporte qu'il a lu dans le Moniteur du
3 septembre 1792 cette phrase laconique et menaçante : « Les Prus¬
siens pourront venir à Paris, mais ils n’en sortiront pas. » C’est encore
un de ces mots qui ne sont pas exacts de tout point, mais qui résument
une situation d’une manière saisissante. On pourrait croire que la
phrase figure en tête du journal et qu'elle vient d’un rédacteur parisien,
qui parle au nom de la population ; elle se trouve, au contraire, sous la
rubrique Hollande et dans un morceau intitulé « extrait d’une lettre de
la Haye, du 28 août » ; et en voici le véritable texte, légèrement modifié
par Gœthe : « Il n’y a plus à douter ici que la Lorraine et l’Alsace ne
soient prêtes à subir le joug; et de là jusqu’à Paris, qui pourra empê¬
cher la colonne brunswickoise d’y arriver ? Il est vrai qu'elle n’en sorti¬
rait pas, et que vît-on entrer 60,000 hommes, le seul faubourg Saint-
Antoine est capable de les écraser. » A mon avis, c'est surtout dans les
Mémoires de Massenbach et ceux de Dumouriez 1 que Gœthe a puisé le
i. C’est ainsi que tout le passage commençant par ces mots : a Ein franzœsischer
General, Lafayette, Haupt einer grossen Partei... etc. » (Strehlke, p. 121, à la date
de novembre) est la traduction absolument littérale des premières lignes du chapi¬
tre xiv des Mémoires de Dumouriez, intitulé « Réflexions » (éd. Barrière, I, p. 3i2) :
a Un général français, chef d’un grand parti... etc. ». Mais ce passage a été
intercalé par Gœthe dans son récit, bien après la narration proprement dite de la
Campagne et il appartient à la seconde partie de l’ouvrage, qu’on pourrait intituler,
non plus u Campagne de France », mais « Retour à Weimar ». Voici, du reste, les
phrases de Dumouriez que je retrouve dans la Campagne de France : I,p. 254, « qui
n’ayant jamais eu de commandement, n’avait aucune réputation, et n’était qu'un
homme de plume » (C. de F., 4 sept.); !, p. 262 « les Islettes.... (Galbaud) avait fait
sa retraite sur Sainte-Menehould où se trouvaient deux bataillons de volontaires de
la garnison de Longwy... un détachement d’émigrés entra dans Varennes, la terreur
s’empara des troupes qui gardaient le poste des Islettes... (C. de F., 4 sept.);
I, p. 275, il est évident que Gœthe a lu le récit de la prise de la Croix aux Bois
« einem dergleichen Auftrag nicht gewachsenen oder nachlœssigen » ; I, p. M
« dix mille hommes firent poursuivis par quinze cents hussards» (C. de F., 1 3-17 sept.);
I, p. 291 a les équipages des Prussiens, qui étaient très mal escortés » (il s’agit de
la Wagenburg); p. 3o2, les deux premiers paragraphes du chapitre xi où il est
question de la mission de Manstein et de Heymann se retrouvent dans le passage
de Gœthe: « am 22 September hœrte man... etc.;» 1 , p. 3 o 5 « La plus grande
cordialité s’établit entre les avant-postes des deux armées, et les Français parta¬
geaient leur pain avec les Prussiens qui mouraient de faim » (C. de F., 24 sept.)
« Jene theilten daher einiges mit, und man ward immer kameradlicher ») ; I, p. 293,
a Sedan et Montmédy gênaient par leurs garnisons les convois qui leur arrivaient
lentement » (C. de F, 23 sept.) « Von Sedan und Montmédy her uns die Zufuhr
erschweren » ); I, p. 3 o 3 , a Ces mouvements firent reculer le corps des émigrés »
(C. de F., 27 sept.) a Die Emigrirten waren ans uns herangedrückt worden ». I, p.
3 i 3 .« L’épidémie était dans Grandpré,où les Prussiens avaient tenu leur hôpital. Les
soldats français montrèrent beaucoup d’humanité. » (C. de F., 3 octobre). On peut
aussi rapprocher « ein zweites Thermopylæ » du fameux mot « les Thermopyles de
la France »(l’Argonne) ; mais cette citation se trouve partout. Je n’ose dire toutefois
si Gœthe a consulté le texte français des Mémoires ou la traduction allemande de
Girtaner (1794).
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d’histoire et de littérature 3o5
plus ; mais cette démonstration me mènerait trop loin ; j’aime mieux
poursuivre l'analyse du Gœthe^Jahrbuch après avoir remercié encore
M. Hüffer de cette excellente contribution historique à l’une des oeu¬
vres de Goethe les moins connues et les moins appréciées.
Les t Nouvelles communications », qui forment la deuxième partie
du Gœthe-Jahrbuch (pp. 1 57 - 338 ), renferment: i° trente-et-une lettres
écrites par Gœthe de 1798 à 1 83 1 à divers correspondants, entre autres
à Léopold Stolberg, à Klinger, à Henri Meyer, à M œo de Stein ; 2 0 des let¬
tres de Gœthe à Bertuch, publiées par l’éditeur du recueil, M.L. Geiger,
et accompagnées de notes copieuses et instructives; 3 * des lettres de Char¬
lotte de Schiller, la femme du poète, à Gœthe ; une autre lettre, du fils
de Schiller, datée de Cologne le i 3 janvier 1720; des lettres de Christian
Gottfried Kôrner et de Gœthe ; toutes les lettres publiées dans cette troi¬
sième partie des Communications , ont été tirées, cette fois encore, comme
l'année précédente, des archives domestiques de Gœthe, que la famille du
poète s’est décidée libéralement à ouvrir ( € im Auftrage der von Gœ-
theschen Familie »); elles ont été copiées par M. Bratanek qui y a joint
un recueil de tous les passages de la correspondance de Gœthe où il est
question de Charlotte Schiller et de C. G. Kôrner ; 4 0 des citations et
informations sur Gœthe, tirées de sources manuscrites ; on y remarquera
les lettres de Vulpius à Nie. Meyer (entre autres, les deux dernières sur
la mort de Christiane et la douleur profonde du poète), ainsi que les pas¬
sages tirés des papiers de Bôttiger ; la conversation du 6 juin 1794, ra¬
contée par ce dernier, prouve que le docteur U bique, n’a pas toujours
menti, puisque les quatre anecdotes, qu'il cite, se retrouvent dans la
Campagne de France ; elle démontre aussi la véracité de Gœthe, puisque
les anecdoctes racontées en 1794 se retrouvent à peu près telles quelles
dans un récit composé près de trente ans après. € An die schône Weile
(Weiber?) », p. 323 , ligne 32 , ne faudrait-il pas lire, au lieu de Weile
ou de Weiber, Wille; ce serait peut-être la femme ou la fille de l’artiste
allemand établi à Paris.
La troisième et dernière partie du Gœthe-Jahrbuch de 1 883 contient
des mélanges ou Miscellen , parmi lesquels nous citerons surtout deux
canevas, relatifs au 3 e acte du second Faust, v. 507-640 et 640-954 (ces
« Dispositionen » sont publiées par M. de Loeper) une note de
M. Schrœer sur le mot Doppelreich (Faust, II, v. 1942), de M. M. de
Waldberg sur la poésie Diné \u Coblen\ (Emmaus rappellerait Ems , il
y aurait là un jeu de mots), de M. Werner sur les Annonces savantes de
Francfort de l’année 1773 où, selon ce critique, on pourrait retrouver
des articles de Gœthe ; de M .G. Hauff sur Gœthe et la peine de mort, etc.,
etc. ; signalons encore un poème adressé àOeser par ses élèves en 1767.
La Chronique et la Bibliographie sont faites avec le plus grand soin et
la plus minutieuse exactitude; elles sont dues à l’éditeur, M. L. Geiger,
qui a dressé, en outre, deux tables des matières, l’une pour les noms de
personnes, l’autre pour les œuvres de Gœthe et les événements de sa vie
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3 o 6
REVUE CRITIQUE
qui sont cités dans le tome IV du Jahrbuch; aussi ne terminerons-nous
pas ce long article sans féliciter, comme les années précédentes, M. L.
Geiger de l’habile et heureuse direction qu’il a su donner à cette publi¬
cation, d’ailleurs une des plus jolies et des plus élégantes de la librairie
allemande.
A. C.
CHRONIQUE
FRANCE. —■ A l’occasion du sixième congrès international des orientalistes réuni
à Leyde au mois de septembre, les professeurs de l’Ecole spéciale des langues orien¬
tales vivantes ont publié un volume de textes et traductions intitulé Mélanges
orientaux. Ce volume s’ouvre par une Notice historique sur VEcole spéciale des
langues orientales vivantes , qui a été tirée à part (Leroux. In-8°, 55 p ). On la lira
avec un très vif intérêt ; on y voit que l’idée de créer une école spécialement con¬
sacrée à l'enseignement des langues orientales vivantes est due à Langlès; ce fut lui
qui obtint le décret du io germinal an m ( 3 o mars 1795), demeuré la charte consti¬
tutionnelle de l’Ecole. L’auteur de la notice analyse le discours prononcé par Langlès
à la rentrée des cours du 11 novembre 1796, discours où Langlès accentuait forte¬
ment le caractère pratique de renseignement qui devait être donné; il donne la
biographie des trois premiers titulaires des chaires de l’Ecole; Langlès, pour le
persan, Silvestre de Sacy, pour l’arabe, Venture de Paradis, pour le turc; il montre
les chaires nouvelles s’établissant peu à peu, celles d’arménien (1812), de grec vul¬
gaire (1819), d’arabe vulgaire (1820). Lorsque mourut Langlès (8 janvier 1824L il
laissait l’école en pleine prospérité; les cours avaient lieu, il est vrai, dans une sorte
de hangar, éclairé d’une manière insuffisante par d’étroites fenêtres; mais l'école
était dans l'enceinte de la Bibliothèque nationale, près des manuscrits orientaux, et
autour des six chaires de l’école se réunissaient des élèves de tout âge, dont la moitié
au moins venaient de l’étranger ; Paris était alors le vrai centre des études orien¬
tales (voir la lettre intéressante d’un jeune Allemand, datée du 24 mars 1828 et tra¬
duite par l’auteur de la notice, pp. 25-27). En 1828 fut introduit à l’Ecole, sous l’ad¬
ministration de Silvestre de Sacy, un nouvel enseignement, celui de la langue
hindoustani, confié à Garcin de Tassy. Mais, après la mort de Silvestre de Sacy
(21 février i 838 ) et l’ordonnance de réorganisation du 22 mai de la même année,
l’Ecole qu’on tentait de « faire rentrer dans le savant mécanisme universitaire, vécut
comme elle put, dans les plus déplorables conditions, avec un règlement qui n'était
pas observé ». Ce fut la deuxième période de l’Ecole, qui s’étend de i 838 ,
jusqu’au décret du 8 novembre 18^9. Ce décret ouvre une troisième période où noua
sommes aujourd’hui; c’est un retour net et formel à la loi cfu 10 germinal an m.
A la suite des dernières pages de la Notice où l’auteur anonyme esquisse rapidement
l’économie de la nouvelle organisation, on trouvera : i° un tableau des professeur»
de l’Ecole depuis sa fondation; 2 0 les fac-similés de deux affiches, l’une annonçant
l’établissement de l’Ecole des langues orientales, l’autre, l’ouverture des cours d
l’Ecole.
— La librairie Klincksieck fera paraître incessamment des Dialogues français —
persans, précédés d’un précis delà grammaire persane et suivis d’un vocabulaire
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d’htstoire et DE LITTÉRATURE 307
plus de 15,000 mots ou locutions par M. A. de Biberstbin-Kazimirski. Ce volume
(in-8°, 1200 pages) coûtera a5 francs.
— La même librairie vient de publier en une brochure in-8° de xii pages, au
prix d’un franc, la Liste des périodiques français et étrangers qui se trouvent à la
Bibliothèque de VUniversité (à la Sorbonne). On a inséré dans cette liste un certain
nombre de périodiques dont la publication a cessé depuis plus ou moins longtemps.
Un astérique indique les revues auxquelles est abonnée la section historique et phi¬
lologique de l'Ecole pratique des Hautes-Etudes, revues qui sont également commu¬
niquées à tous les lecteurs delà Bibliothèque de l’Université.
— Nous recevons de M. Henri Omont deux brochures importantes, tirées à part,
la première, du « Bulletin de la Société de l’histoire de Paris et de Pile de France »
(juillet-août i883); la seconde, du « Cabinet historique » (i883, pp. ig3-2o8). La
première de ces brochures est un Inventaire sommaire des manuscrits grecs con¬
servés dans les bibliothèques publiques de Paris autres que la Bibliothèque nationale
(20 à la Mazarine, 16 à l’Arsenal, 8 à Sainte-Geneviève, 4 à la Sorbonne, 3 à la Fa¬
culté de médecine, 2 à l’Institut, 1 au Musée du Louvre); M. Omont donne en quel¬
ques lignes le titre complet et l'origine de ces manuscrits, ainsi qu’un index alpha¬
bétique. La seconde brochure est un Inventaire sommaire des manuscrits grecs des
bibliothèques des départements ; il y a dans nos bibliothèques publiques de province
96 manuscrits grecs (17 à Besançon, i5 à Montpellier, 10 à Caen, 7 à Lyon, 6 à
Evreux et à Schlettstadt, etc.); quelques-uns sont importants, et l'on saura le plus
grand gré à M. Omont d’avoir rédigé, même sous une forme sommaire, cet inven¬
taire exact et complet qui les fera connaître aux érudits; ici encore, M. Omont a
d’ailleurs dressé un index alphabétique qui rend les recherches plus faciles et plus
rapides.
— M. Eug. Müntz a fait tirer à part (22 p. ; extrait des a Mémoires de la Société
d'archéologie lorraine pour i883. Nancy, Crépin-Leblond) une étude sur les fabri¬
ques de tapisseries de Nancy ; on y voit que les manufactures de haute et de basse
lisse établies à Nancy aux xvii 0 et xviii" siècles ont été très actives; M. Müntz a con¬
sulté les documents publiés par M. Lepage sur les progrès de l’art de la tapisserie
dans la capitale de la Lorraine, les descriptions contenues dans ïAnnuaire des musées
impériaux d’Autriche de cette année, quelques témoignages de provenance italienne;
tout cela montre le rôle important que Nancy a joué aux deux derniers siècles dans
l’histoire de la peinture en matières textiles, et il est fort regrettable que la produc¬
tion des ateliers nancéiens, alors si distinguée et si considérable, n’existe plus au¬
jourd’hui.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 5 octobre i883.
M.Casati adresse à l'Académie quelques renseignements, tirés d’un rapport de
M. Fiorelli, sur une découverte importante qui vient d’être faite dans les environs
d’Orvieto. On a trouvé une tombe étrusque, ornée de peintures et renfermant de
très nombreux débris de vases peints, etc. Les peintures sont très bien conrervées
sur deux côtés, presque détruites, au contraire, sur les deux autres. Les figures sont
presque de grandeur naturelle et tournées de profil. La signification des scènes re-
I présentées n'est pas très claire ; on croit y reconnaître des scènes funèbres. On a re-
evé aussi divers fragments d’inscriptions, en lettres étrusques, qui donnent le nom
de la famille à laquelle la tombe appartenait; c’était la famille Hescana ou Thescana.
L'une de ces inscriptions est écrite de gauche à droite, à la manière latine, contraire¬
ment à l’usage ordinairement suivi en étrusque. Cette tombe a été découverte sur le
flanc de la colline Patarazzo, sur les bords du torrent Pontacchione. On espère trou¬
ver d'autres tombes semblables dans le voisinage.
M. Barbier de Meynard donne quelques détails sur le congrès des orientalistes qui
a siégé à Leyde au mois de septembre. Après avoir insisté sur l’accueil hospitalier
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3 o 8 RBVUB CRITIQUE d’histoire RT DE LITTÉRATURE
3 ue les membres du congrès ont reçu des savants et des autorités des Pays-Bas, il in¬
ique la division du congrès en sections et fait connaître, par un aperçu sommaire,
les travaux de chacune. Aux renseignements qui ont déjà été donnés dans celte Revue
(ci-dessus, pp. 258 et 25 q), M. Barbier de Meynard ajoute, entre autres, la mention
d'une résolution qui a été votée par le congrès et qui intéresse également les savants
adonnés à des branches de l'érudition autres que les études orientales : on a émis le
vœu que le règlement du Musée britannique soit modifié de manière à permettre le
prêt des manuscrits de cet établissement aux érudits de tous les pays.
M. Desjardins fait connaître le texte de deux fragments d’un diplôme militaire ro¬
main, qui ont été trouvés à Coptos, en Egypte, et qui sont aujourd’hui conservés au
musée de Boulaq ; ce texte lui a été communiqué par M. Maspero. Ces deux frag¬
ments se lisent ainsi :
. ARDIV..ANII DOMITIAN.
.S PONTIFE IVS TRIBVNIC.
.I II IM P ni PP COS VIIU DESIGNA.
.I... PEDITIBVS QVI MILITANT IN AL..
.I.. COHORTIBVS SEPTEM QVAE APP..
.AVGVSTA ET APRIANA ET COMMA..
.II PANNONIORVM ET ï HISPANORVM
.AS.T.VRVM ET î ET fl THEBAEORVM..
.BAEORVM ET SVNT IN AEGYPTO
.O MAXIMO QVI QVINA ET VIC...
.NDIA..T PLVRA MERVEVANT.
...SCRIPTA SVNT.IS.
... .RVM CIVITATE.
[Imperator Caes]ar Div[i Vespasi]ani filius Domitian[us Augustuls, pontife[x maxil-
mus, tribunicfia potestajte II, tmpérator III, pater patriae, consul Vllil, designa[to X,
equitibus] e[t] peditibus qui militant in al[is tribus e[tl cohortibus septem, quae ap-
p[ellantur] Augusta et Apriana et Comma[genorum et] 11 Pannoniorum et F Hispa-
norum [et...] Asturum et I et II Thebaeorum [et... et... Itujbaeorum, etsunt in Ae-
gypto [sub.]o Maximo, qui quina et vic[ena stipendia [e]t plura meruerant,
[quorum nomina sub]scripta sunt, [ipsjis, [liberis posterisque eo]rum civitate[m dé¬
dit..]
.M CVM VXOR..BVS QV.
.VMIS I CIV 1 TAS.... S.
.AEIII..S ESSE NT CVM I.
.ENT DVMTAXAT SIN.
.D V IDVS IVNIAS
. IVLIANO...CO.
.ONE ERVCIO HOMVLLO.
.PANORVM CVI PRAEST
. FVSCVS
.NTVRIONI
.NO CH..O.
...MEX TABVLA.
.N CAP..TO..IO
’.... et concubiujm cum uxor[i]bus qu[as tune habuissent, c]um est civitas [ei]s
‘data, sut, si qui c]aelib[e]s essent, cum e[is quas postea duxiss]ent, dumtaxat sin-
‘guli singulas, Antel diem V idus Junias. Juliano ...co... [et].one Erucio Ho-
mullo [consulibus. Cohortis I. His]panorum, cui praest ... Fuscus, [cen]turioni...,.
...no Ch...o... [Descriptum et recognitu]m ex tabula [aenea quae fixa est Romae i]n
Cap[i]to[llio.
Ce diplôme esi du 9 juin 83 . Il nous fait connaître, incomplètement, il est vrai,
le nom de deux consuls suffecti qui étaient tout à fait inconnus jusqu’ici. On y
trouve aussi des renseignements sur la composition de l’armée romaine qui se trou¬
vait en garnison en Egypte en l’an 83 . Le personnage auquel avait été donné le di¬
plôme est, cette fois, non plus un simple soldat, mais un centurion.
M. Ravaisson présente, de la part de M. Champoiseau, consul général de France
à Turin, la photographie d’un groupe antique de marbre conservé en cette ville. Ce
groupe représente Esculape et Hygiée; c’est une de ces variantes du groupe d’un
dieu et d’une déesse, que l’antiquité nous a laissées en grand nombre, et qui repré¬
sentent, le plus souvent, Mars et Vénus. On sait que, selon M. Ravaisson, la Vé¬
nus de Milo faisait partie d’un de ces groupes. La déesse Hygiée, dans le groupe de
Turin, est vêtue; il devait en être de même de Vénus, pense M. Ravaisson, dans
l’œuvre primitive qui a servi de modèle à celle de Milo.
Ouvrage présenté, de la part de l’auteur, par M. Alexandre Bertrand : Bezier (ins¬
pecteur primaire). Inventaire des monuments mégalithiques du département dille -
et-Vilaine. Julien Havet.
__ Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent , xi.
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I, i. (Bien fait et utile.) — Gonzenbach (von), DerGeneral Hans Ludwig
von Erlach von Castelen, ein Lebens-und Charakterbild aus den Zeî*
tendes dreissigjâhrigen Krieges. III. (Termine cette publication; va
de 1648 à i 65 o; traite des troubles de la Fronde, des querelles entre
Erlach et Turenne, de la campagne d’Erlach en Flandre où il s’unit à
Condé et prit part à la bataille de Lens, etc.) — Beer, Die orientalische
Politik Oesterreichs seit 1774. (Beaucoup de documents inédits.) —
Tommasini, La vita e gli scritti di Niccolo Machiavelli nella loro rela-
zionecol Machiavellismo, storia ed esame critico. I. (Un nouveau livre
sur Machiavel et qui fait honneur à son auteur..) — Kaufmann-Har-
temstein, Ueber die wichtigsten Resultate der Sprachwissenschaft. (Peu
E rofond, mais habilement fait.) — Q. Horatius Flaccus, Episteln er-
iârt von H. Schütz. (Travail qui, dans son ensemble, fait une impres¬
sion entièrement favorable; quiconque s’occupera des Epitres d’Horace
y trouvera un auxiliaire sinon indispensable, du moins suffisant dans la
plupart des cas). — Rhys, Early Britain, Celtic Britain. (Livre bien
écrit, très intéressant, qu’il faut recommander très vivement à tous ceux
qui s’intéressent à l’ancienne histoire celtique de l’Angleterre; les maté¬
riaux nouveaux n’en font pas la valeur, mais les vues originales; l’au¬
teur est d’ailleurs un des celtologues les plus compétents, et son livre est
bien au-dessus de celui de Thomas Wright ; bref, ce n'est pas une sim¬
ple récapitulation de choses connues, c’est un ouvrage qui plonge et pé¬
nètre dans la vieille Angleterre). — Bijvanck, Specimen d’un essai cri¬
tique sur les œuvres de François Villon. Le Petit Testament. (Première
partie d’une œuvre préparée par l’auteur, et qui donne les meilleures
espérances; critique sagace, propre à résoudre les questions difficiles;
recherches très détaillées sur les quatre mss. de Villon.)— Freuden-
spiele amHofe des Herzogs Ernst des Frommen von Sachsen-Gotha und
Alteoburg, hrsg. und erlàutert von Devrient. (Deux pièces tirées d’un
ms. de la bibliothèque de l’Université d’Iena). — Mahrenholtz, Vol¬
taire Studien, Beitrage zur Kritik des Historikers und des Dichters.
(Bon : parfois un peu prétentieux ; faits en somme déjà connus.) —
Braun, Schiller u. Gœthe im Urtheile ihrer Zeitgenossen. I. Schiller,
i8oi-i8o5; IL Gœthe, 1773-1786. (Travail très utile et qui sera le
bienvenu). — Frankl, Zur Biographie Franz Grillparzer’s. (Peu de nou¬
veau.) — Das Tyrfingschwert, eine altnordische Waffensage, deutsch
von Poestion. — O. J&ger, Aus der Praxis, ein pàdagogisches Testa¬
ment. — Rulf, Maria Theresia u. die ôsterreichische Volksschule.
Deutsche Litteraturzeitung, n° 3 p, 29 septembre 188 3 : Hatch, Die Ge-
sellschaftsverfassung der christlichen Kirchen im Altertum, acht Vor-
lesungen, vom Vert, autorisierte Uebersetzung der zweiten durchge-
sehenen Auflage, besorgt und mit Excursen versehen von Ad. Harnack.
(Heinrici: travail d’un mérite durable.) — Kayserling, Moses Mendels-
sohn, Ungedrucktes und Unbekanntes von ihm und liber ihn. (Minor :
beau coup de documents inédits.) — Minhâdj at-talibîn, le guide des
zélés croyants, manuel de jurisprudence musulmane selon le rite de
Châfi’i, texte arabe p. p. Van den Berg. I. (Ph. Wolff.) — Victor
Henry, Etude sur 1 analogie en général et sur les formations analogi¬
ques de la langue grecque. (Collitz : livre très superficiel, compilation
le quelques travaux récents.) — Rumpbl, Lexicon rindaricum. (Lexique
de Pindare, utile.)— Ebrard, Peter Lotich der Jtingere, sein Leben und
eine Auswahl seiner Gedichte metrisch ins Deutsche übertragen. (Ben-
rath.) — Rôsiger, Neuhengstett [Bursetl, Geschichte und Sprache einer
’W'aldenser Colonie in Wurtemberg. (Ulrich; la principale valeur de ce
travail consiste dans les matériaux.) — Libro de’ sette Savi di Roma.
(Varnhagen.) — G. Weber, Allgemeine Weltgeschichte. 2 e Aufl. IV.
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Geschichtedes rômischen Kaiserreichs, der Vôlkerwanderungenundder
neuen Staatenbildungen. (A. Bauer.) — H. Reynald, Louis XIV et
Guillaume III, Histoire des deux traités de partage et du testament de
Charles II d'après la correspondance inédite de Louis XIV. I. (Philip-
pson : éclaire presque entièrement les évènements qui amenèrent la
guerre de la succession d'Espagne; œuvre très utile et très recomman¬
dable par l'abondance et l'importance des documents.) — Strassburger
Studien, I, IV. (Kossinna.) — Aus Erzherzog Johann Tagebuch,
eine Reise in Obersteiermark im Jahre 1810. — C^mmerer, Friedrichs
des Grossen Feldzugsplan für das Jahr 1757, Vortrag.
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 39, 26 septembre 1 883 : Ludwig
Fritze, Kausika's Zorn (Tschandakauçika) ein indisches Draina
von Kschemisvara, zum ersten Male und metrisch übersetzt. (Pischel:
travail scientifique très méritoire qui prouve une connaissance profonde
du sanscrit classique; traduction faite avec soin et habileté.)— Düntzbr,
Christoph Kaufmann, der Apostel der Geniezeit und der herrnhutische
Arzt, ein Lebensbild mit Benutzung von Kaufmann's Nachlass, entwor*
fen. (Minor : toujours beaucoup de documents, beaucoup de choses
importantes et inédites, mais toujours le même désordre, la même con¬
fusion, un vrai chaos; au lecteur à se débrouiller) — Kleinschmit, De
Lucili saturarum scriptoris genere dicendi. (Marx : grossières et très
grossières fautes).
Archiv fur Slawische Philologie. Tome VII, 2° livre : Scholvin, Einleitung
in das Johannes' Evangelium. — Hanusz, Ueber die Betonung der
Substantiva im Kleinrussischen. (A suivre.) — Kœmmel, Die Slavischen
Ortsnamen im nordôstlichen Theile Niederœsterreichs. (Intéressante
collection de noms, mais dont la partie étymologique paraît incom¬
plète.) — Gaster, Scholomonar, d. i. der Garabancijasdijak, nach der
Volksüberlieferung der Rumânen. (Ce personnage légendaire, espèce de
magicien, apparenté par étymologie populaire à Salomon, serait tout
simplement l’élève de Salamanque.) — Veillée des morts, texte polonais
inédit publié par M. Nehring. — Comptes rendus : Spasovicz, Histoire de
la littérature polonaise (en russe). — Krauss, Sagen und Màrchen der
Slidslaven. (A. Wesselovsky, pas assez d’exactitude.)— Rupei oder Rupa-
lani in Thracien und Macédonien Eigentümlichkeiten îhres Dialectes
(Jagic).
ERNEST LEROUX, ÉDITE U R, 2 8, RUE BONAPARTE, If
PUBLICATIONS DE LA SOCIÉT É DE L’ORIENT LATIN
SÉRIE GÉOGRAPHIQUE : TOME III
ITINÉRAIRES FRANÇAIS MICHELANT et G. RAY¬
NAUD. In-8. ti fr-
— Le même, sur papier de Hollande. 14 fr.
SÉRIE HISTORIQUE : TOME III
TESTIMONIA MINORA ROEHRICHT. In-8.. » fr-
— Le même, sur papier de Hollande. 24 fr.
LES NORMANDS EN ITALIE, ÎKS .TJT,
jusqu'à l’avènement de Saint Grégoire VII, par O. DELARC. Un fort volume
in-8... ia fr-
Le Puy, imprimerie Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 2J
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N # 43
Dix-septième année 22 Octobre 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RBCUBIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DB MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt
Prix d'abonnement :
Un an, Paris, ao fr. — Départements, aa fr. — Etranger, a 5 fr.
^ PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
LUKA IKK DB LA 80CI*T* ASIATIQUE
OS L'icOLK DBS LANGUES ORIENTALES VIVANTES, ETC
a8, RUE BONAPARTE, a8
Adresser les communications concernant la rédaction à M . A. Chuqubt
(A u bureau de U Revue : rue Bonaparte, a8).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, *8.
RELIGION NATIONALE ET RELIGION
UNIVERSELLE Islam, israélisme, judaïsme et chris¬
tianisme, buddhisme. Cinq lectures faites à Oxford et à
Londres, par A, Kuenbn, professeur à l'université de Leyde.
Traduit du hollandais par Maurice Vernes. In-8, br. 7 fr. 5 o
LES ÉPOQUES LITTÉRAIRES DE
L’INDE. Etudes sur la poésie sanscrite par Félix Nève.
In-8, br.... 9 fr.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 596, 6 octobre 1 883 : The Quatrains of Omar
Khayyam, the persian text, with an english verse translation, by Whih-
field (C. E. Wilson). — The Lives of the Berkeleys, lords of the Ho*
nour, Castle and Manor of Berkeley, in the county of Gloucester, from
1066 to 1618, by John Smyth of Nibley. I. edited by Maclean (Wa-
ters). — G. de Azcarate, Ensayo sobre la historia del derecho de pro-
priedad y su estado actual en Europa (W. Webster). — H. Cabot Lodgb,
Daniel Webster t american statesmen sériés » (A. Werner). — The
Epistles of St. John, the greek text, with notes and essays, by West-
connr. — Conrad Bursian (Cari Bezold; art. nécrol.). — Forgea babylo-
nian tablets (Budge). — Phonetic translitération (Terrien de La Coupe*
rie). — Pithom and Ramsès (Ed. Naville). — The name of Robin
Hood (M. Peacock). — The chinese mythical kings and the Babylonian
Canon (James Lecky). — J. Anderson, Scotlana in pagan times, the
Rhind Lectures on archaeology (I. M. Stokes). —The Apollo and Mar-
syas (Conway). — How was the trireme rowed? (Vule et Laughton).
The Athenaeum, n° 2019, 6 oct. 188 3 : Mallesoh, The décisive battles
of India, from 1746 to 1849 inclusive (Travail excellent, rend un
compte exact de batailles dont les bulletins officiels sont défectueux; ou¬
vrage digne de la haute réputation de l’auteur). — Tiie Epistles of St.
John, the greek text, with notes and essays by WKSTCorr. — Starkwra*
ther, The Jaw of Sex. — Montaeu Burrows, The life of Edward lord
Hawke, admirai of the fleet, with some account of the origin of the en¬
glish wars in the reign of George II, and the State of the royal navy at
that period (Ouvrage qui fait bien revivre cet homme, sinon grand, du
moins remarquable). — The sacred books of the East, XIX : The Fo-
sho-hing-tsan-king, a life of Buddha, by Asvaehosha Bodhisattva, trans-
lated from sanskrit into chinese by Dharmarakska. A. D. 240 and from
chinese into english by Sam. Beal; Anecdota Oxoniensia, Sukhavati-
vyuha, description of Sukhavati, the land of Bliss, edited by Max Mül-
ler and Bunyiu Nanjio, with two appendices : I. Text and translation
of Sanghavarman’s chinese version ot the poetical portions of the « Su-
khavati-vyuha » II. Sanskrit text of the smaller « Sukhavati-vyuha. »
— Antiauarian books. — The Luther exhibition in the Grenville li-
brary (H. Stevens). — Gold Coast customs.
Literarisches Centralblatt, n°4r, 6 octobre i 883 : Lippert, Allgemeine
Geschichte des Priersterthums. (« Livre qui servira à l’émancipation des
esprits, dont nous avons de notre temps le plus pressant besoin. ») —
Hatch, Die Gesellschaftsverfassung der christlichen Kirchen im Alter-
thum, acht Vorlesungen, autoris. Uebersetzung v. Ad. Harnack. (Très
instructif.)— Hirsch, Kritisch-exegetische Einleitung in die V/erke des
Thomas von Kempen nebst einer reichen Blumenlese aus demselben.
— Auffarth, Die platonische Ideenlehre. (D après l’auteur, Platon se¬
rait déjà, dans ses traits essentiels, un disciple de Kant avant Kant.) —
Bardchhewer, Diepseudo-aristotelischeSchrift tiber das reine Gute, be-
kannt unter dem Namen liber de causis (profonde connaissance des lan¬
gues orientales et de leur littérature aussi bien que du moyen-âge chré¬
tien). — Wirtembergisches Urkundenbuch, hrsg. v. dem Staatsarchiv.
in Stuttgart. IV. Mit Anhang : zwei Weinberger codices aus der II.
Hâlfte des XIII. Jahrhunderts. —Von Zahn, Die deutschen Burgenin
Friaul, Skizzen in Wort und Bild. (Attachant). — Johannis Burchardi
Argentinensis Diarium sive rerum urbanarum commentarii i 483 -i 5 o 6 ,
p. p. Thuasne. I (Nouvelle édition complétée et faite avec un soin phi¬
lologique).— von Druffel, Beitrâge zur Reichsgeschichte 1546-1552.
IL Bnefe u. Akten zur Geschichte des XVI Janrhunderts, III, 2. -
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N° 43
— 22 octobre —
1883
Sommaire t 204. D’Arbois de Jubainville, Essai d’un catalogue de la littérature
épique de l’Irlande. — 2o5. Bulletin de la Société historique et ethnographique
de la Grèce. — 206. Jadart, La population de Reims et de son arrondissement;
Table des travaux de l’Académie de Reims. — 207. De La Ferrière, Les projets
de mariage de la reine Elisabeth. — 208. H. Kœrting, Deux paraphrases
religieuses de Pierre Corneille. — 209. Documents sur la Fronde en Gascogne,
p. p. De Carsalade du Pont. — Variétés : Le suicide d’un soldat français après
la capitulation de Verdun. — Chronique. — Académie des Inscriptions.
204. — D’Arbois de Jubainville. EsmI d'on catalogne de la littérature
épique de l*Irlande 9 précédé d’une étude sur les manuscrits en langue irlan¬
daise conservés dans les îles britanniques et sur le continent, par H. d’Arbois de
Jubainville, professeur au collège de France. Paris, Ernest Thorin, i 883 . 1 vol.
in-8.
Dans son Introduction à Vétude de la littérature celtique, M. d’Ar¬
bois de Jubainville montrait au public de quel intérêt était pour nos
origines gauloises l'étude de la littérature celtique et en particulier de la
littérature irlandaise, sans parler de sa valeur intrinsèque, et le prépa¬
rait à pénétrer plus avant dans ces études toutes nouvelles, surtout en
France. Le présent ouvrage donne une base solide à l’étude de la littéra¬
ture irlandaise et prouve qu’il n'y a pas en Europe, en dehors du monde
gréco-latin, de littérature plus riche et à la fois plus originale.
L’ouvrage se divise en deux parties bien distinctes.
Dans la première, portant le titre d'introduction et se composant de
1 55 pages, M. d’A. de J. passe en revue tous les manuscrits des îles bri¬
tanniques et du continent, écrits en irlandais ou contenant de l’irlan¬
dais, sans distinction de matières et arrive à un total de mille neuf ma¬
nuscrits du ix 6 au xix° siècle. Vingt-sept de ces manuscrits, ou portions
de manuscrits, dont vingt sur le continent et sept dans les îles britanni¬
ques, sont antérieurs au xi° siècle : les plus anciens sont du vin*. Du
xi e au xvii 0 siècle, M. d'A. de J. compte 1 33 manuscrits dans les îles
britanniques et trente-cinq sur le continent, dont quatre que M. Zim-
mer doit publier prochainement. Les manuscrits antérieurs à la fin du
xi* siècle n'offrent guère d'intérêt qu’au point de vue grammatical. Le
manuscrit le plus ancien, contenant des récits épiques, connu sous le
nom Leabhar na-h UidreQivre de la vache brune, à cause de son an¬
cienne couverture), a été écrit vers la fin du xi® siècle. Le livre de
JLeinster, le plus important avec le Leabhar na-h Uidre est du xn e siè¬
cle. Dans un dernier chapitre de son introduction, M. d’A. de J. donne
Nouvelle série, XVI. 4^
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REVUE CRITIQUE
3 10
des manuscrits irlandais une récapitulation générale par matières, en
réservant les fragments épiques qui font l’objet de la seconde partie.
Le catalogue de la littérature épique qui a fourni la matière princi¬
pale du volume, est disposé par ordre alphabétique, suivant le titre même
des récits épiques : Acallam dialogue, Baile extase, Cath combat,
etc... A la suite du titre, on trouve l’indication autant que possible delà
date de la composition, du cycle auquel se rattache le récit, des manus¬
crits par siècle d’oü il est tiré, enfin des publications dont il a été l’objet.
Quelques-unes de ces dernières reposent sur des manuscrits aujourd’hui
perdus, mais sont signalées par deux catalogues en irlandais, l’un connu
et publié, tiré de deux manuscrits dont l’un du xn* siècle, l'autre inédit
tiré de manuscrits dont le plus ancien est du xiv e -xv« siècle, mais attribué
à un lettré du x* siècle. M. d’A. de J. s’est fait une loi d’examiner par lui-
même tous les manuscrits contenant des récits épiques, lorsqu’ils étaient
antérieurs au xvn® siècle. L’œuvre de M. d'Arbois de Jubainville, mal¬
gré des lacunes inévitables dans un travail de ce genre, est destinée à
rendre les plus grands services aux celtisants, comme suffit à le prou¬
ver l'analyse rapide que nous venons de lui consacrer. Une pareille en¬
treprise ne pouvait être menée à bonne fin que par un celtisant, doublé
d’un paléographe et d'un historien, comme l’auteur, et demandait au¬
tant de patience, de dévouement aux études celtiques, que d’érudition.
J. Loth.
*o5. — AeXTfov laxopixtte xoù èflvoXo^ixtSc fcxatpfaç ’EXXdîoç. Tépç
tcû&toç, Teu/oç TCpûxov • loùXtoç i883. ’Èv ÂOiqvaiç, èx, toü v)zoypa^eloo
àoeXçwv IIspûY^. In Commission bei Cari Beck in Athen, i 883 . In -3 de vm-184
pp. et 4 planches. Prix : 7 fr. 5 o.
Pendant trop longtemps, à notre avis, les Grecs, justement fiers de
leur passé, ne se sont proposé qu’un but : redevenir ce qu'étaient leurs
illustres aïeux. Cette idée, fort louable en elle-même, mais malheureu¬
sement plus facile à concevoir qu’à mettre en pratique, les a longtemps
empêchés d’étudier sérieusement leur histoire durant la période obscure
du moyen âge, qu’ils prolongent, non sans raison, jusqu'à leur réveil
national de 1821. L'étude de l'antiquité, est-il besoin de le dire? exerce
sur ceux qui s'y livrent un charme autrement séduisant que ne saurait
le faire celle de l’époque byzantine et turque. Cependant cette période,
quêtant de gens jugent avec dédain sur quelques phrases de Gibbon
qui la connaissait fort mal, ou de Montesquieu qui l’ignorait complète¬
ment, cette période, pour n'étre pas aussi brillante, aussi féconde en
grandes choses que celle qui finit avec les derniers Pères de l'Eglise
grecque, n’en présente pas moins une suite d'événements fort curieux et
très dignes d’étude, tant au point de vue historique et religieux que sous
le rapport juridique, artistique et même littéraire.
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d’histoirb et de littérature
3 i i
Jusqu'à la prise de Constantinople par les Turcs, l’admirable série
des chroniques byzantines fournit à l’historien une abondante moisson
de documents ; mais, pour quiconque veut étudier la période qui s’étend
de 1453 à 1821, l’embarras est considérable. Les matériaux sont peu
nombreux, difficiles à se procurer, et, en général, publiés d'une façon
déplorable. Il est juste de dire que, depuis trois ans, M. Sathas, avec le
zèle qui le caractérise, a commencé l’impression de documents tirés des
archives de Venise ; mais il semble que l’histoire de la sérénissime Ré¬
publique doive plus profiter de cette importante publication que l’his¬
toire de la Grèce proprement dite. Du reste, ces documents ont surtout
trait à l’histoire administrative. Dans ses possessions grecques, la poli¬
tique du sénat vénitien était la même que dans les autres parties de la
République : on laissait bien subsister par ci par là quelques coutumes
locales, mais de peu de conséquence ; car, du moment où ces coutumes
gênaient en quoi que ce fût la bonne administration, elles étaient impi¬
toyablement abrogées. Ce n’est donc pas de cette publication que doit
sortir l’histoire du peuple grec pendant l’asservissement quatre fois sécu¬
laire dont sa guerre de l’indépendance l’a partiellement affranchi. Ce
qu’il faut, c’est tirer de la poussière, où elles sont ensevelies, les vieilles
chroniques locales, les éphémérides écrites par quelque pope obscur;
c’est transcrire, publier et commenter ces graffiti que l'on trouve sur
divers monuments d’Athènes, et dont des esprits peu accessibles aux
entraînements de l’amour-propre national ont reconnu, paraît-il, l’au¬
thenticité. La nécessité d’une pareille tâche a été comprise par les hom¬
mes éminents qui fondèrent, il y a un an à peine, à Athènes, la Société
historique et ethnographique de la Grèce.
Le but que se propose cette Société est assez indiqué par son titre
même pour que nous n’ayons pas besoin de l’exposer. La Grèce doit se
montrer reconnaissante envers le principal organisateur de cette Société,
M. T. Philémon, homme d’une intelligence et d’une activité au-dessus
de tout éloge, fondateur de l'admirable bibliothèque du Parlement hel*
lénique; envers M, N. G. Politis, son zélé collaborateur, folkloriste dis¬
tingué, qui apporte dans toutes ses publications une critique si perspi¬
cace, une méthode si sûre.
Cette Société, jeune encore, vient de publier le premier fascicule de
son Bulletin, et, nous ne craignons pas de le dire, son début est excel¬
lent. Cette publication la met de pair avec les meilleures sociétés analo¬
gues du reste de l’Europe. Nous ne saurions trop recommander au co¬
mité de direction la plus grande sévérité pour le choix des articles qu*il
est appelé à insérer dans son bulletin. Je sais que, dans un petit pays
comme la Grèce, ce que je recommande ne laisse pas de présenter plus
d’une difficulté; mais, si la Société tient à honneur de mériter vraiment le
titre qu’elle a pris, il lui faut être sans pitié pour les billevesées du genre
de celles que l’on voit parfois s’étaler dans certaines revues d’Athènes en
disette de copie; il faut qu’elle fasse fi du chauvinisme; qu’elle n’ait
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3 12
qu’un culte et qu’une passion : la recherche de la vérité. Les gens à
système, elle doit les fuir comme la peste. C*e$t à cette condition seule¬
ment qu’elle pourra vivre et accomplir une œuvre utile, sérieuse et du¬
rable.
Passons maintenant à l’examen du premier fascicule. Il débute par
une préface aussi bien pensée que bien écrite, dans laquelle le président,
M. T. Philémon, expose et développe le but de la Société historique.
Viennent successivement :
i° Une étude sur les maladies dans les croyances populaires grecques,
par M. N. G. Politis. Dans cette étude, le jeune et sympathique secré¬
taire de la Société énumère les causes attribuées par le peuple aux mala¬
dies dont il est affligé ; ce sont : le Ver, Dieu, le Diable et les sorciers.
Le Ver a surtout la réputation de produire le mal de dents. Dieu accable
de maux ceux qui ont le malheur de l’offenser; le Diable prend plaisir
à tourmenter tout le monde, sans la moindre raison. En Acarnanie, le
peuple croit que quiconque s'avise de compter les étoiles voit ses mains se
couvrir de verrues, lesquelles ne se peuvent guérir que des deux façons
suivantes : i ° en brûlant dessus de l’amadou; 2°en récitant dans l’église une
prière à la Vierge qui commence par ces mots : ’EÇatpéxox; Tîfc II avorta:,
sans oublier de frotter lesdites verrues, en disant : Çspéxo), Çepéxw (quelle
dessèche!). Alors les verrues se dessèchent, et l’on entend tinter les vi¬
traux de l'église, signe infaillible que les diables qui logeaient dans les
verrues ont pris la fuite. Enfin, les sorciers non-seulement jettent des
jnaladies, mais possèdent le pouvoir de les guérir. Cette industrie qui,
chez nous, conduit en police correctionnelle ceux qui l’exploitent, est
encore fort répandue en Grèce. Les personnes d’une piété plus éclairée,
ajoute M. P., n'attendent que de Dieu et des saints la guérison de leurs
infirmités. On a recours aux prières, aux exorcismes, quand il s’agit
d’un cas isolé; aux processions, quand sévit une épidémie. On invoque
saint Charalambis et saint Bessarion (archevêque de Larisse au xvi # siè¬
cle) contre la peste; sainte Maure et sainte Barbe contre la variole. A
Œtylo, en Laconie, on croit que saint Alexis, dont on implore la pro¬
tection en temps d’épidémie, se montre dans le ciel, une torche à la
main, pour chasser le fléau. Par suite d’une fausse interprétation du
nom d’un saint, ôn lui demande à être délivré d’une maladie sur la¬
quelle il est censé exercer une grande puissance. Ainsi, saint Bissounas
de Chypre guérit de la toux (Wjxa;) î saint Acouphos (= qui nest pas
sourd, suivant l’interprétation populaire; car v Axou<po<; est une forme dia¬
lectale chypriote pour ’làxwêoç, Jacques) de la surdité (xouçuxitç); saint
Eleuthère délivre (èXsuOepévsi) les femmes en mal d'enfant ; saint Théra-
pon résume en sa personne tous les autres saints, car il guérit (Oepaæ&sO
toutes les maladies. Dans les conjurations, le peuple mêle volontiers aux
formules magiques le nom de Dieu, de la Vierge, des saints. M- P*
cite une fort curieuse conjuration contre la colique, et reproduit la
pieuse légende qui lui aurait donné naissance. Nous trouvons ensuite
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d'histoire et de littérature
31 3
différentes manières d'exorciser plusieurs maladies : la fièvre, le mauvais
œil, etc. On nous permettra de faire remarquer ici que nous avons nous-
même publié des formules de ce genre dans le tome II de notre Biblio¬
thèque grecque vulgaire (Paris, 1881, in-8). Elles sont beaucoup plus
anciennes, au moins comme rédaction, que celles citées par M. P.,
qui ne semble pas les avoir connues. Jusqu'ici il n'a été question que
de la manière dont on procède pour chasser une maladie d’un individu;
mais, quand il s'agit d'une épidémie, les moyens diffèrent, et les céré¬
monies usitées ont un caractère plus archaïque et plus solennel. En
Corinthie, on croit que, pour chasser la peste, il faut tracer autour de
la localité contaminée un sillon avec une charrue attelée de deux veaux
(SapéXta) jumeaux. C’est, dit-on, à un fait pareil que le village de Da-
mala (l’antique Trézène) doit le nom qu'il porte. M. P. relate différents
faits d'où il résulterait, suivant la croyance populaire, que, toutes les
fois qu’on a eu recours à de pareilles cérémonies, le fléau a disparu. La
maladie se présente à l’imagination du peuple (nous l’avons déjà dit)
comme produite par une cause surnaturelle et hostile à l'homme ; de là
à la personnifier, il n'y avait qu’un pas. Aussi trouve-t-on personnifiées
la variole (6Xo"fta), Yhépatite (px<rffapa), la rougeole (dtarpaxta), etc., etc.
Les maladies sont souvent désignées par un euphémisme : la variole
s’appelle euXofta, bénédiction ; le mal caduc, •{hnnh ou xaXb, le doux ou
le bon; le panaris, xaXorptàôi, bonne épine , etc. Cette sèche analyse ne
peut donner qu’une idée bien imparfaite du mémoire de M. P. et de
l'érudition que l'auteur y prodigue ; il y prouve combien est solide et
étendue sa connaissance des mythologies populaires de toutes les nations.
2°. Le second article est un choix de lettres de Mélétius Pigas, pa¬
triarche d’Alexandrie, publiées par M. Jean Sakkélion, conservateur des
manuscrits delà Bibliothèque nationale d’Athènes. M. S., dont l’é¬
loge n’est plus à faire comme érudit et paléographe, passe en revue,
dans le court prologue qu’il a mis en tête de ces lettres, les différents
manuscrits contenant la correspondance de cet illustre prélat. Qu’on
nous permette d'ajouter à sa liste un ms. acquis par nous à Constanti¬
nople, en i88o.Les lettres publiées présentent toutes un véritable intérêt
et apportent une précieuse contribution à l'histoire de l'hellénisme. Il en
est même une que nous devons mentionner tout spécialement, elle est
adressée à la reine Marguerite de Valois, qui avait désiré connaître les
écrits du saint patriarche, et était entrée en relations avec lui par l’in¬
termédiaire de François Camus. Nous faisons des vœux pour la pu¬
blication intégrale des lettres de Mélétius.
3 °. L’article trois est une réfutation, par M. Politis, d’une étude de
M. C. Sathas, publiée sous ce titre : La tradition hellénique et la lé¬
gende de Phidias, de Praxitèle, et de la fille d % Hippocrate, au moyen
âge \ M. P. n’a pas eu de peine à démontrer que la légende de Phidias et
i. Dans Y Annuaire de VAssociation des Etudes grecques en France, année 1882,
pp. 122 et suiv. — Il a été fait un tirage à part.
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REVUE CRITIQUE
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Praxitèle n’a jamais existé que dans l’imagination de M. Sathas. Toute
cette prétendue légende repose sur un passage corrompu de Georges
Acropolite, que M. Sathas ne savait pas avoir été restitué grâce à un meil¬
leur manuscrit. Quant au mythe de la fille d'Hippocrate, M. P. le ra¬
mène à ses justes proportions avec un luxe d'érudition vraiment mer¬
veilleux. 11 termine son étude par une critique sévère mais juste des
préfaces-manifestes dont M. Sathas a pris, depuis quelques années, la re¬
grettable habitude de faire précéder chacune de ses publications. Les
audacieusesconclusions ethnologiques de M. Sathas paraissent absolument
inadmissibles à M. P., comme reposant sur des données invraisemblables.
M. P. réfute encore l’opinion de M. Sathas relativement à la commu¬
nauté d'origine des Grecs et des Albanais. M. Sathas veut que les Mé-
linghi, tribu albanaise du Péloponnèse, soient les descendants des anciens
Myrmidons, parce que les Albanais et les Tzaconiens appellent \uki^n
ce que les anciens appelaient jjl6pjj.y)Ç (fourmi), d’où l’on dérive le nom des
Myrmidons. M. P. répond que ce n'est pas avec ces armes étymologi¬
ques que l’on réfutera l'opinion, jusqu'à ce jour reçue, de l'origine
slave des Mélinghi ; car, outre que psXtffévi s'emploie ailleurs qu’en Pé¬
loponnèse pour désigner la fourmi, il faudrait prouver : i ê que le nom
des Myrmidons, comme nation, s'est conservé depuis les temps héroï¬
ques jusqu'à l’époque byzantine (chose impossible, car l'histoire ne
mentionne aucune population hellénique de ce nom); 2* que les peuples
traduisent aussi facilement leur nom pour en perpétuer l'étymologie
originelle, qui, sans cette précaution, courrait grand risque de tomber
dans l’oubli; 3 ° que l'étymologie qui fait venir Mup|AY} 8 < 5 veç de pupixtjÇ est
exacte, car d’autres le font venir de Muppt&wv, fils de Jupiter; 4 0 que le
mot peXtfYévt est grec; 5 ° que l'auteur byzantin n’a pas nommé les Mé¬
linghi Myrmidons , par la raison que les autres byzantins appelaient
ainsi les Bulgares, mais parce qu’ils tiraient leur origine des Myrmidons.
Loin départager l’avis de M. Sathas qui affirme que ce n'est que par
des conjectures hardies qu’on fera jaillir la lumière du chaos des légen¬
des et des contes, M. P. estime que les « conjectures hardies » obscur¬
cissent au lieu d’éclairer. Ce n’est, dit-il, qu’en rassemblant avec soin
les documents épars et en les soumettant' à un examen sévère qu’il
sera possible d'arriver à un résultat présentant quelque garantie de cer¬
titude.
4°-5°. Le quatrième article est un discours d'un moine du xvi* siècle,
nommé Pacôme Roussanos, sur les superstitions et les préjugés de son
époque. Cette homélie, tirée du ms. cxxv de la Marciane, renferme des
détails intéressants. Elle est publiée par M. Sp. Lambros. Le même sa¬
vant a donné, à la suite de cet article, un chrysobulle de l'empereur
Andronic Paléologue, daté de mars 1289. Cette pièce fait partie des do¬
cuments appartenant au couvent des Météores. Par ce chrysobulle l’em¬
pereur grec confirme une donation de biens faite au monastère de
N. -D. de la Pitié, en Thessalie, par la femme du sébastocrator Jean
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d’histoire et de littérature
3 i 5
Comnène Ducas, qui avait embrassé l’état monastique sous le nom de
Hypomoni. M. L. a donné tous les détails désirables sur Pétât et la
provenance du chrysobulle ; il a aussi élucidé tout ce qui avait besoin
de l’être. Cette publication fait honneur au jeune agrégé de PUniversité
d’Athènes.
6°. On trouve ensuite une note de M. Politis sur deux Albanais créés
chevaliers à Halle en Tyrol, par l’empereur Maximilien I 0P , le 5 octo¬
bre 1497. Ces deux chevaliers étaient Zôto Khoto, de Janina, et Nico¬
las Caradja, d’Arta.
7°. Une note de M. Sp. Lambros sur un portrait de Jérémie I", pa¬
triarche oecuménique, d’après une fresque du couvent de Stauronikita
(Mont Athos), dont il fut le fondateur. Le portrait est reproduit assez
médiocrement en chromolithographie.
8*. Une étude sur les coutumes observées lors de la célébration des
mariages à Vissoca de Calavryta, par M. Démétrius Papanicolaos; cette
étude, qui comprend une dizaine de pages, est un morceau de grande
valeur, mais qui échappe à l’analyse.
9 0 . Chants populaires recueillis à Gouvès, village de l’Eubée septen¬
trionale, par M. Georges Drossinis, le Sully-Prud’homme d’Athènes.
io°. Quatre contes recueillis à Athènes par M mo Marianne Cambou-
roglou, tous fort intéressants. Le troisième, intitulé les Néréides, se
recommande tout spécialement à l’attention des folkloristes.
ii°. La traduction, par M. Politis, d'un article bibliographique de
M. R. Kôhler sur les contes albanais publiés par M. G. Meyer (extrait
du t. XII de l ’Archiv für Litt. Geschichte).
12°. Le catalogue raisonné des ouvrages concernant l’histoire et la
philologie de la Grèce médiévale et moderne, qui ont paru dans les sept
premiers mois de la présente année. Ce catalogue, rédigé par M. Poli¬
tis, est très complet et rendra de précieux services aux personnes qui
s'occupent de la Grèce byzantine et moderne.
i 3 °. La liste des dons faits aux Archives et au Musée delà Société
historique et ethnographique. Parmi ces dons on remarque le sceau du
fameux armatole Christos Milionis, portant la date de 1744 (offert par
M. Paul Lambros); un billet d’indulgence, vendu par Chrysanthe No-
taras, patriarche de Jérusalem, à une certaine Christine, le 8 septem¬
bre 1720 (don de M. P. Lambros); des gravures sur bois de l’île de
Syra, datant du siècle dernier (don de M. T. Ambélas).
14 0 . Enfin, la liste des souscripteurs, dans laquelle figurent les noms
de ceux qu’on est accoutumé à voir appuyer toute œuvre oü est engagé
l’honneur de la Grèce. Nous sommes heureux de constater que la So¬
ciété historique a su se concilier tant de sympathies, et particulièrement
celles des hommes éminents qui sont aujourd’hui à la tête du gouver¬
nement. Le Parlement hellénique, qui s’est montré si souvent généreux
pour des entreprises privées, ne marchandera pas non plus son concours
à une Société fondée par l’élite des érudits du pays, autour desquels
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REVUE CRITIQUE
aimeront à se grouper tous ceux qui apportent dans leurs travaux une
critique saine et un esprit désintéressé de toute préoccupation étrangère
à la science.
Emile Legrand.
206. — La population de Reims et de son arrondissement; relevé des
recensements contemporains avec recherches historiques sur les feux et habitants
de chaque localité à diverses époques depuis le moyen âge, par Henri Jadakt,
juge suppléant au tribunal civil, secrétaire général de l'Académie de Reims. Reims,
Renart, i 883 , In-8, vii et 1 36 p. (Extrait des travaux de l'Académie de Reims,
Tome LXXI).
Table des travaux de l’Académie de Reims depuis sa fondation
(1841-188$), répertoire alphabétique des documents inédits, annales, séances
et travaux, avec renseignements biographiques sur l’ensemble des publications,
par Henri Jadart, secrétaire-archiviste. Reims, imprimerie de l'Académie et chez
Renart, i 883 . In-8, vin et 184 pp.
I. Dans le premier de ces ouvrages , M. Jadart, dont la Revue criti¬
que a déjà analysé les solides travaux sur Jean Gerson et Mabillon, a
voulu écrire un chapitre d’un livre qui est encore à faire, « l’histoire de
la population rémoise », parcourir, comme il dit, les rares documents
qui renseignent sur le chiffre ancien de cette population, rechercher
quel fut dans le passé le progrès ou la décadence des générations dispa¬
rues et rattacher ainsi, par une série de comparaisons, les temps meil¬
leurs où nous vivons à ceux que nos pères ont traversés au milieu de
tant de crises et d’incessants labeurs.
M. J. a divisé son livre en trois chapitres. Le premier Vhistoire et
Véconomie politique (pp. 1-8) est une sorte de préface. — Le deuxième
a pour titre la population avant 178g (pp. 9-40) ; M. J. étudie d'abord
les registres des tailles et les lettres des rois qui fixent ou abaissent les
impôts ; ce sont les premières sources qui lui offrent des renseignements
sur le nombre des habitants, car elles donnent approximativement le
chiffre des feux de Reims au xiv e et au xv* siècle. Mais, outre les docu¬
ments relatifs aux impôts, il y a encore les inventaires des subsistances
dressés en 1482, en 1495 et en ifoo; on peut affirmer qu'à la fin du
xv e siècle, il y avait à Reims environ 2,000 feux, taillables ou non, soit
une population de 10 à 12,000 habitants. Ces relevés des individus à
nourrir ou, comme on disait, des bouches à gouverner , et ces recense¬
ments de grains s’exécutaient d’ailleurs à chaque alerte et dans la prévi¬
sion d'un siège. Mais l'évaluation des gardiens des remparts, leur grou¬
pement en différentes classes, les querelles qui s'élèvent à propos de ce
service du guet entre les laïques et les gens d’église, entre les lays et
les clercs, fournissent encore de précieuses indications. A partir du
xvi* siècle, grâce aux mémoires de Pussot et de Coquault, les ren¬
seignements se multiplient; Coquault, par exemple, donne des dé¬
tails sur la mortalité à Reims en 1624, en 1 65 1 et en i 652 . Au
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d’histoire et DE LITTÉRATURE 317
xvn* siècle, se présente un autre genre d’informations; c’est la liste des
communiants de chaque paroisse, c’est-à-dire des membres de la com¬
munauté, de l’un et de l’autre sexe, au-dessus de l’âge de la première
communion, et qui représentent, en tout cas, plus des deux tiers du to¬
tal des habitants. Au xvm* siècle, la Gabelle recense les feux et les per¬
sonnes qui consomment le sel; les registres paroissiaux, qui préludent
à notre état civil, établissent dans ses grandes lignes le mouvement de la
population; l’administration des intendants recueille des statistiques et
dresse des relevés généraux. En résumé, Reims, après avoir subi une
sensible diminution à la fin du xiv # siècle par suite de la guerre dite de
Cent Ans, compte, à la fin du xv e , une population d’environ 12,000 ha¬
bitants, et dans les premières années du xvn* siècle, malgré les guerres
de religion et la Ligue, plus de 20,000. Dans les environs, au contraire,
dans ce qu’on appelle le pays rémois, dès le xiv e siècle, de l’invasion
anglaise à la Fronde, la population s'est notablement abaissée ; que de
localités ont alors disparu ! Que de villages et de hameaux taxés en 1 363
pour les aides royaux, dont l'on chercherait vainement le nom sur la
carte! Il est évident que ces localités disparues concouraient à l’accrois¬
sement de la population de Reims; c'était derrière les remparts de
Reims que se retiraient les habitants des villages. Au xvii* siècle, la ville
comptait plus de 3 o,ooo habitants, grâce à Colbert et à l’essor de l’in¬
dustrie. La révocation de l’édit de Nantes n’eut pas pour Reims de con¬
séquences fâcheuses, car la population était restée universellement ca¬
tholique. Au xviii 9 siècle, le chiffre resta le même, mais vers 1763 il
s’abaissa un peu Jusqu’en 1780 (de trois à quatre mille).
Le chapitre troisième du livre de M. J. est consacré à la population
de Reims depuis 178g, et montre quelles proportions, véritablement
énormes, a pris l’augmentation du chiffre des habitants (en 1789,
32,000; en i 836 , 38 , 359 ; en 1 856 , 48,350; en 1866, 60,734; en 1872,
70,434; en 1881, 93,823). Cet accroissement, uniquement dû à l'immi¬
gration, s’explique assez par l'activité prodigieuse de l’industrie manu¬
facturière. L’arrondissement, qui subit, comme ailleurs, l’action absor¬
bante de son chef-lieu, voit au contraire sa population décroître (en
i85i, 92,277; en 1881, 91,289 habitants); il est moins peuplé que
Reims, après l’avoir été deux fois plus au commencement du siècle; sa
population rurale, surtout, diminue sensiblement, tandis que s’accrois¬
sent les cantons viticoles et les villages où s'installe l’industrie.
A la suite de son livre, M. J. a reproduit, en douze tableaux, les chif¬
fres qui lui ont fourni les conclusions précédentes; il donne la liste des
habitants d’un quartier de Reims en i 328 et celle des localités qui
formaient l'élection de Reims en 1 363 , avec la taxe de leurs impôts; les
listes du chiffre des feux en i6i5, en 1629, en 1726, en 1773 ; des pa¬
roisses et secours avec le total de leurs communiants en 1675 et en
1775; les recensements annuels de Reims dressés par la Gabelle de
1742 à 1777; la statistique des hôpitaux de Reims en 1776, 1777 et
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3 18 REVUE CRITIQUE
1778; les reoseigaemeQts relatifs à la population et contenus dans
le dénombrement général de la Champagne en 1773 ; l’addition des
baptêmes, mariages et morts constatés en 1773 dans chaque localité du
bailliage de Reims» ainsi que les habitants recensés à cette date; les ml'
mes résultats en 1881, d’après 1 état-civil; le chiffre des habitants de
chaque commune en 1773, i8o5, i83i, i85i et t855, avec la différence
observée entre ces deux dernières années; enfin, l'analyse du travail
considérable nécessité dans la ville de Reims par le recensement de
18&1..
U» Quelque temps après çe.t instructif et laborieux travail sur la po¬
pulation dfi faims, M,. J. publiait la table des travaux de l’Académie,
dQAt U est secrétaire. L’Académie de Reims existe depuis le 6 décembre
1841 ; ses travaux ont été publiés dans une collection de 89 volumes,
dont 74 renfermant ses annales, ses séances et ses mémoires, et 1 5 , con¬
tenant des documenta inédits; elle fait paraître chaque année deux va-
lûmes, chacun de quatre cents pages en moyenne. EUe a été, en 1876,
désignée, par la section d’histoire et de philosophie, en même temps que
la. % Société des antiquaires de Normandie » et la * Société pour l’étude
des langues romanes «, comme digne d’être signalée d’une manière toute
spéciale pour la mérite et l'importance de ses publications. Ce qui la re¬
commande plus particulièrement, disait alors M. Hippeau, ce sont les
publications importantes d’ouvrages devant servir de base et de point de
départ aux travaux historiques ; l’Académie n’a pas hésité à s’imposa
pour ces ouvrages d’assez lourds sacrifices, et même à recourir à des
emprunts lorsque ses ressources ont été insuffisantes. M. Jadart a entre¬
pris l’analyse, de toutes ces publications en un répertoire méthodique,
qu’il a ainsi divisé : i° renseignements, bibliographiques; a° table alpha¬
bétique par noms d'auteurs; 3 ° table analytique par ordre de matières;
4° table des concours; 5 ° explication des planches. Cette !Ta£fe, sous 1*
forme d’un double catalogue, le catalogue alphabétique qui donne
265 noms d'auteurs (parmi lesquels Léon Faucher,. Léon, Say, Oppert,
Paulin et, Louis Paris} et le catalogue, par ordre de matières, qui renferme
plus de milfe: notifies, rendra incontestablement de grands services à L'é¬
rudition,. C-
207. — Comte de La Ferrière. Le» projet* de mariage de la reine Eli¬
sabeth. Paris, C&imann Lévy, 1882. Vol. in-18 de 288 p.
Le récit de M. de- La Fbrrière a tout l'intérêt d'un roman et toute fa
valeur d’un excellent livre d’histoire :■ de nombreux documents inédits
y ont été habilement employés j l'auteur n’a pas tiré un moins heureux
parti de divers ouvrage» étrangers avec lesquels l'ont familiarisé ses
voyages en Europe et particuliérement en Angleterre ; il n'a pas négligé
non plus lesressoureesque les collections de tableaux offrent à l'histo-
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d’histoire et de littérature 319
rien, et le charmant début de son livre, par exemple, a été inspiré par
une des toiles du palais de Hampton-Court. Aussi ce livre aide-t-il
beaucoup à mieux connaître Elisabeth et sa cour, Catherine de Médicis
et ses trois fils, Charles IX, Henri III et le duc d’Alençon, qui recher¬
chèrent tour à tour la main de la reine d’Angleterre. A côté de ces per¬
sonnages principaux sont vivement dépeints divers autres prétendants,
le duc de Nemours, Don Juan d’Autriche, divers diplomates mêlés aux
négociations matrimoniales si bien racontées par M. de La F., Paul de
Foix, Cecil, Vulcob, Cavalcanti, Walsingham, La Mothe-Fénelon, La
Môle, Maisonfleur, Vilieroy, Castelnau, Stafford, etc., enfin divers per¬
sonnages qui furent plus ou moins amoureux et plus ou moins aimés
d’Elisabeth, sir Walter Raleigh, Essex, Arundel, sir William Picke-
ring, Christophe Hatton, le comte d'Oxford, Simier, enfin Leicester,
qui fut le plus constant de tous les poursuivants que je viens d’énumé¬
rer et qui fut aussi, selon la remarque du savant éditeur des Lettres de
Catherine de Médicis , « après Cecil, la plus grande personnalité du
règne ».
On ne peut analyser un livre où s’agitent tant de personnages, où se
déroulent tant d'aventures, où se multiplient tant d’incidents, un livre
qui reproduit les plus minutieux et les plue piquants détails de cette
comédie aux cent actes divers qui dura dix-huit années et qui est inti¬
tulée : Les projets de mariage de la reine Elisabeth. Ce que l’on ap¬
préciera surtout en ce livre, c’est la fidélité des portraits. M. de La F.,
qui (p. 142) appelle les ambassadeurs vénitiens « ces grands maîtres
dans l’art de peindre i, saisit, comme eux, avec bonheur la ressemblance
de tous ceux dont il s’occupe, soit qu’il ne leur dônne qu’un coup de
pinceau, comme quand il nous présente dans Jean de Monluc, évêque
de Valence (p. 9) « le plus habile diplomate de son temps », soit qu’il
les étudie avec complaisance. Citons, entre toutes les remarquables pages
de ce genre, les pages consacrées à Elisabeth (p. 5 et suiv.). La beauté de
la reine y resplendit tout entière, vivante, en quelque sorte. Son carac¬
tère y est décrit avec une non moins frappante vérité, ce caractère si
violent, si emporté, si digne du brutal Henri VIII, ce caractère qui fai¬
sait dire à la reine elle-même : Tai des colères de lionne Un autre
f>ortrait bien enlevé est celui de ce duc d’Alençon que M* de La F. sur¬
nomme (p. ia8), le Gaston d'Orléans de la branche des Valois , et
dont il dit, après avoir rappelé le mot de Catherine de Médicis : il n'est
que guerre et tempête dans son cerveau : t Cette phrase résume sa
1. M. dé La Ÿ. déclare (p. 6), d f apfètf d’incontestàbles témoignages que non-seule¬
ment Elisabeth ne reculait pas devant des grôs mots, das jurons, — ces jurons ont
été signalés dans le Scaligcrana , — thaïs qu’enCore elle allait jusqu’aux coups et
tolessures. C’est ainsi qu'tln jour elle souffleta sîf Henri Killegrew, qui revenait sans
Fïatton, qu’iî avait ordre de lui ramener; qu’elle souffleta aussi fniss Elridges,
qfti’Esâex regardait de trop près; qu’elle brisa le doigt de AlsS Skedmuf, une dé Ses
filles d’honneur.
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REVUE CRITIQUE
320
vie agitée et vide, où les grandes audaces sont suivies de défaillances
plus grandes encore ». M. de La F. aurait pu rapprocher du mot de la
mère du duc d'Alençon, le vers de d’Aubigné, dans les Tragiques :
Et ce cerveau venteux est le jouet du vent.
M. de La Ferrière aurait encore pu rappeler, au sujet du mariage pro¬
jeté d'Elisabeth avec le duc d’Alençon *, ce piquant passage d’une lettre
écrite par l'ambassadeur du roi de France à Constantinople, Jacques de
Germigny, à Catherine de Médicis, et qui a été emprunté par Charrière
[Négociations du Levant , t. III, p. 824) à l 'Illustre Orbandale : Ledit
bassa ma tenu aussi propos de mariage de Monseigneur en Angleterre,
duquel il se parle par deçà, me disant qu’il trouveroit meilleur de faire
alliance avec quelque belle jeune princesse dont mondit seigneur peult
avoir lignée, qu'avec cette roine jà surannée et mal sentante de la foy,
laquelle, dit-il, seroit plus propre pour estre mariée avec le pape, qui,
par ses saintes persuasions, la pourroit réduire au vray sentier ».
T. de L.
208. — Ueber zwel rellglœte Paraphrase n Pierre Corneille’*
L’Imitation de «léeue-Chrlet nnd die Louange* de la Sainte-Vierge*
Ein Beitrag zur Corneiile-Forschung von Heinrich Kœrting. Oppeln, Maske.
In- 8 , 55 p.
Malgré Guizot qui a dit que les poésies religieuses de Corneille prou¬
veraient seulement que le théâtre était son impérieuse vocation et Tuni¬
que carrière où il pût paraître avec gloire, l’auteur de cette dissertation
a voulu prouver que ïImitation de Jésus-Christ et les Louanges de la
Sainte-Vierge méritaient une étude minutieuse. Selon lui (p. 11), cette
étude a un grand intérêt historique (« ein hohes kulturhistorisches In¬
teresse ») et elle est certainement indispensable à qui veut comprendre
profondément Corneille (« für das tiefere Verstândniss Corneille’s
gewiss unentbehrlich »). Voilà une exagération naïve, comme s’en per¬
met tout débutant ; il nous suffira de réfuter M. H. Kôrting par M. H.
1. Elisabeth traita le duc d’Alençon plus qu’en fiancé. A Whitehall, s'il faut en
croire a le très indiscret Vénitien Lippemano », elle lui apportait chaque matin dans
sa chambre une tasse de bouillon. Un jour que, mécontent du manque de parole de
la reine, le prince voulait partir, Elisabeth, selon les Mémoires de Nevers , « le re¬
tint par de nouvelles démonstrations accompagnées de baisers, privautés, caresses et
mignardises ordinaires aux amants ». Enfin, selon les mêmes Mémoires, Elisabeth
(proh pudor!) vint, un beau matin, « le trouver au lit ». Les détails curieux abon¬
dent dans le livre de M. de La F., même les détails inattendus. Voir (pp. 54, 55 )
des indications bien intimes sur le tempérament et sur la conformation d’Elisabeth.
Je tiens à citer un joli mot trouvé par M. de La F. dans les papiers du Record of¬
fice, mot dit par le cardinal de Pellevé, transmis à la cour de Londres par l’ambassa¬
deur sir Francis Walsingham, et que l’on a si souvent refait pour l’appliquer au
prince Albert : « Monsieur n’eut point été le roy, mais le mari delà royne, »
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d’histoire et de littérature
321
Kôrting lui-même. Ne dit-il pas quelques pages plus loin (pp. 18-19)
que la traduction de l'Imitation , malgré quelques beautés poétiques,
peut être regardée comme une entreprise manquée, et qn'en la lisant, on
éprouve une impression bien différente de celle qu'inspire l'original?
Mais le travail de M. K. est un travail très soigné, très consciencieux,
fait avec une patience et une minutie qui méritent de grands éloges. Il
a, en ce qui concerne F Imitation de Jésus-Christ , montré comment
Corneille a traduit son modèle, ou plutôt Fa paraphrasé ; il divise —
peut-être trop subtilement — en cinq groupes, selon le but qu’elles doi¬
vent atteindre, les additions et amplifications (Zusâtçe) du poète ; il
compte les passages, bien peu nombreux, que Corneille a négligés, ses
inexactitudes, ses contre-sens (il n’y en aurait que deux); il analyse les
rimes; il montre que dans ce poème de Corneille, le rythme est très
varié et il énumère jusqu’à 134 combinaisons de strophes. M. K. s'est
livré au même travail dans la partie de son opuscule relative aux Louan¬
ges de la Sainte-Vierge, composées en rimes latines par saint Bo -
naventure et mises en vers français par P. Corneille (Rouen, i 665 ) ;
là encore il analyse par le menu la façon de traduire de Corneille. Il
n'était pas inutile d’entreprendre cette étude et l’on devra savoir gré à
M. H. Kôrting, si aride que soit la lecture de sa dissertation, d’avoir
montré qu’il y a dans ces deux paraphrases religieuses de Corneille une
beauté et une variété de rythme qu’on n’avait guère remarquées jus¬
qu’ici.
209. — Document* Inédit» »ur la France en Gascogne, publiés pour la
Société historique de Gascogne, par M. J. de Carsalade du Pont. Paris, Cham -
pion; Auch, Cocharaux, 188 3 . ln-8, 201 p.
Ce volume forme le premier fascicule des Archives historiques delà
Gascogne , collection de documents relatifs à cette province et publiés,
en fascicules indépendants, à partir de l’année 1 883 , par la Société histo¬
rique de Gascogne *. M. de Carsalade du Pont y a publié un certain
nombre de documents qui embrassent une période de six années, depuis
les commencements de la Fronde, à la fin de 1648, jusque en 1654 in¬
clusivement. Ces documents sont, en très grande partie, des lettres
adressées à Henri de Baylens, marquis de Poyanne, lieutenant-général
des armées du roi, gouverneur de Dax, Saint-Sever et Navarrens, et
lieutenant du roi en Béarn et Navarre. Le marquis de Poyanne prit
une part très active aux opérations militaires des troupes royalistes con-
1. Chaque fascicule forme un tout complet, constitué par une seule pièce ou par
une série de pièces relatives au même objet, et accompagnées de notes, notices, ta¬
bles, glossaires. La commission de publication donnera, chaque année, la valeur de
hoo à 600 pages grand in-8°. Le prix de la souscription annuelle a été fixé à
12 francs.
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322
tre les frondeurs que commandait le colonel Balthazar. Ses fonctions le
mirent ea rapport avec les généraux de l'armée du roi, avec les ducs
d’Epernon, de Candalle, de Gramont, le comte d’Harcourt, les mar¬
quis de Saint-Luc et de Tracy, le chevalier d’Aubeterre. Il commanda
en chef un petit corps qui lutta plus d’une fois avec les soldats de Bel'
thazar, et tantôt vainqueur, tantôt vaincu, ne cessa de disputer la
Guyenne à la Fronde. C’était un excellent gouverneur, vivement préoc¬
cupé d’alléger les charges si lourdes qui pesaient sur l’habitant, entre
autres celle du logement des troupes. Les lettres publiées par M. C. du P.
nous montrent ce fidèle serviteur de la royauté sous ce double aspect de
capitaine et d’administrateur; elles ont été tirées par l’éditeur des archi¬
ves de la maison de Poyanne ou lui ont été communiquées par des
amis; il a d’ailleurs soin d’en indiquer chaque fois la provenance. On
devra lui savoir gré d’avoir ajouté à ces documents d’autres pièces, en
petit nombre, non inédites, il est vrai, mais perdues dans des recueils
inaccessibles et qui servent à mieux faire comprendre la marche des
événements. Toutes ces lettres sont accompagnées de notes sur les per¬
sonnages et les faits qui y sont mentionnés; l’éditeur indique toujours
les sources dont il s’est servi pour son annotation.
Ce volume est donc un recueil de matériaux précieux pour celui qui
voudra un jour écrire l’histoire de la Fronde en Gascogne. U sera suivi
d’autres fascicules; la Société historique de Gascogne a l’intention d’étre
une des plus actives et des plus laborieuses sociétés de la province; elle
annonce déjà les publications suivantes : Documents relatifs à la
chute de la maison d'Armagnac-Fe\ensaguet et à la mort de Gérard
d'Armagnac, comte de Pardiac (1380-1410), publiés par M. Paul
Durrieu ; le Voyage en Terre-Sainte du seigneur de Montauf (1490),
qui sera publié par notre collaborateur M. Tamizey de Larroque; les
Actes consulaires de Bagnères-de-Bigorre pendant Vannée i 56 g et
les huguenots en Rigorre, par M. Durier; Y Histoire des couvents de
l’ordre de Saint-Dominique en Gascogne, par Bernant Guidon»,
manuscrit inédit qui sera publié par M. l’abbé Douais ; les Compta
consulaires de Riscle (1440-1507), texte gascon que publiera M. Paul
Parfouru ; le Cartulaire de Saint-Mont et le Cariulaire municipal
de Mirande, dit le Livre Rouge, qui seront édités par M. Justin
Maumus.
VARIÉTÉS
Le Müdde «Fan «oléat fgmgab après la eapfttalatloa de Verdun-
Goethe dit dans son récit de la Campagne de France, à la date du
3 septembre 1792 : « Lors de la prise de possession de Verdun, il sepassi
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d'histoire et DE LITTÉRATURE 323
un événement qui, bien qu’isolé, excita une grande rumeur et provo¬
qua Tintérét général. Les Prussiens entraient, et de la masse de la po¬
pulation française partit un coup de fusil qui, il est vrai r ne blessa
personne; mais un grenadier français ne voulut ni ne put nier qu’il
était l'auteur de cet acte téméraire. Je Fai vu moi-même au corps degarde
principal, où il avait été mené ; c’était un jeune homme très beau et
bien bâti, au regard ferme et au maintien tranquille. Jusqu’à ce que
son sort fût décidé, on le gardait assez négligemment. Tout près du
poste était un pont, sous lequel passait un bras de la Meuse; le soldat
se plaça sur le petit mur, resta quelque temps tranquille, puis se ren¬
versant en arrière, se précipita au fond de l'eau ; on ne l’en retira que
mort. »
La plupart des historiens ont répété cette anecdote, après Goethe, et
on la trouve racontée par M. Victor Duruy dans les termes suivants
[Histoire été France , II, p. 565 ) : « Un soldat refusa aussi de caprtu»
1 er. A l’approche des Prussiens, il déchaîne» snr eux son fusil. Saisi
aussitôt, il fut laissé libre, quoique gardé à vue, en attendant qu'on dé¬
cidât de son sort. C’était un beau jeune homme au regard assuré, à la
contenance calme et fière. Près du poste où on le gardait, était un pont
de la Meuse; il gravit le parapet, reste un instant immobile, puis se
précipite dans le gouffre et y meurt. »
Mais Goethe n’a écrit ou dicté son récit de la Campagne de France
que dans l'hiver de 1821 à 1822, par conséquent près de trente ans
après Févénement; il n’y aurait rien d’étonnant que ses souvenirs se
fussent ef&cés; sa Campagne de France renferme quelques erreurs, et
il est bon de contrôler toutes ses assertions par les témoignages des con¬
temporains.
Un officier prussien qui a gardé l'anonyme, mais qui nous a laissé
un récit intéressant de la campagne, le • témoin oculaire » (Augen-
feuge), rapporte qu’un soir, un patriote tira dans la rue sur un officier
prussien et le tua ; mais; ajoute-t-il, le véritable meurtrier ne fut pas
découvert ; on mit la main sur un homme suspect de l 1 c armée des pa¬
triotes ou desgardes nationales », et, quoiqu'il n'eût pas été convaincu,
il fut condamné à passer par les verges (zum tiasseniaufen); mais, con¬
dor l’officier, autant que je sache, ce jugement n'a pas été exécuté. —
Ainsi, contrairement à* Goethe, Patronyme assure qu’un soldat a tiré, un
s oir, sur un officier et qu r fl l’a tué, mais qu’il s’est échappé; il ne sait si
ce soldat appartenait aux troupes de la ligne, aux: volontaires ou aux
gmdm nationales \
Les Mémoires de Massenbach nous disent simplement qu'un Prus¬
sien reçut traîtreusement dans le dos un coup de poignard; Massenbach
ajoute que c’était un de ses camarades, par conséquent un officier \
1. Brie/e êincs preuuUchtn Augenfcugen über den Feid^ug im Jahre 1792,
p. 184.
a. Memoiren furGmckitht* des prtustischen Staates, I, p. 41.
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324
Mérat, dans son ouvrage sur Verdun en 17g2 (p. i 33 ), cite le pas¬
sage suivant, tiré d’un Mémoire historique et militaire sur la ville de
Verdun, par A. Dufour : « A l’entrée des Prussiens dans la ville, un
chasseur du 9 e s’était caché dans une maison de la rue Saint-Victor;
trompé par l’uniforme d’un général prussien, le prince de Waldeck,
aide-de-camp du roi, il le prit pour le roi et le tua d’un coup de pisto¬
let. Arrêté sur-le-champ, et prévoyant la punition de son crime, il solli¬
cita de ses gardiens, au corps de garde du pont Sainte-Croix, où il était
déposé, la permission de satisfaire un léger besoin ; écartant alors les
deux hommes qui l'accompagnaient, il se précipita dans la Meuse et y
trouva la mort. » Les faits sont racontés ici avec plus de précision; mais
ce n’est pas le prince de Waldeck qui a été tué d’un coup de feu, puis¬
que ce même prince assistait alors au bombardement de Thionville;
« le prince de Waldeck, en visitant nos batteries, eut un bras emporté
par un boulet de canon et promit d’employer l’autre à rétablir le roi de
France sur le trône » (Mémoires d’Olivier d’Argens, p. 55 ). « Cette ri¬
dicule démonstration sur le glacis de Thionville n’eut d’autre résultat
que de faire enlever le bras du prince Waldeck 1 (Souvenirs de l'émi¬
gration, de Marcillac, p. 109).
Le nom de l’officier prussien tué par un Français nous est donné par
les Réminiscences du prince royal, depuis Frédéric Guillaume III, et
par les lettres de Lombard qu'a récemment publiées M. Hüffer. Il s’ap¬
pelait le comte de Henkel et était lieutenant dans le régiment des hus¬
sards de Kôhler. Le prince royal place l’évènement au 2 septembre et
ajoute que le meurtrier échappa au châtiment par le suicide. Un de nos
officiers, le comte de Henkel, écrit Lombard, fut tué dans la nuit (de
la reddition de la place) par un coup de fusil, et le meurtrier échappa
par une mort volontaire à celle que le jugement lui destinait.
Grâce aux Réminiscences du prince royal et aux lettres de Lombard,
les faits se précisent donc; il ne reste plus qu’à interroger le comman¬
dant de place, de Neyon, successeur de Beaurepaire. On sait que Neyon
fut accusé fort injustement d’avoir livré la place par trahison; il n'a¬
vait commis d’autre crime que de signer la capitulation à laquelle Beau-
repaire avait, la veille déjà, consenti en principe. Dans ses < Motifs de
défense t (Archives nationales, dossier W 352 , n° 718, première
partie, pièce 29), Neyon dit : « Un chasseur français ayant tué le diman¬
che, deux, soir, jour de la reddition de la place, un officier prussien,
le gouverneur * constitua Neyon son prisonnier, lui disant qu’il répon¬
drait sur sa tête de l’auteur de l’homicide; Neyon lui observa que, ne
commandant plus, il n’était nullement responsable de ce qui était ar¬
rivé, et que c’était à lui, gouverneur, à prendre les précautions nécessai¬
res pour la sûreté dans la place. » Lorsqu’il fut interrogé devant le pré¬
sident du tribunal criminel de la Meuse *, Neyon dit encore qu’ « obligé
1. De Courbière, le futur défenseur de Graudeoz en 1807.
2. Archives nationales, W 352 , dossier 5 18, première partie, pièce 35 .
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d’histoire et de littérature
325
de faire exécuter les articles de la capitulation, il est resté quelques jours
à Verdun » et qu’ « à l’entrée des Prussiens, un chasseur à cheval ayant
tué un officier prussien, il fut mandé chez le général prussien Cour-
bière qui lui dit qu’il répondrait sur sa tête de cet assassinat, s’il n’en
découvrait point l'auteur. »
Ces déclarations inédites de Neyon achèvent de faire la lumière sur ce
petit incident historique. 11 est dès lors évident que le meurtre eut lieu
le 2 septembre, au soir, comme le disent Lombard, le prince royal et
Neyon. Il y eut, ce soir-là et dans la nuit, de grands désordres dans la
ville; le procureur de la commune Viard défendit vainement « aux vo¬
lontaires et autres soldats, sous peine d’étre dénoncés et punis très sé¬
vèrement, de se porter aux magasins qu’ils pillaient et d’où ils enlevaient
le lard, le vin et autres approvisionnements de bouche » *;le prince royal
raconte que les gardes nationaux s’enivraient et couraient par les rues
de la ville, en vociférant et tirant des coups de fusil a ; une partie de la
garnison, dit Lombard, se montrait si furieuse que la commission des
vivres courut pendant quelques heures un sérieux danger; ils tiraient
des coups de fusil, mais sans atteindre personne * ; le grand duc de Saxe-
Weimar qui passa à Verdun la soirée du 2 septembre, raconte qu’il a
vu la sortie d’une garde nationale à moitié ivre et à moitié folle 4 , et
l’on sait que la garnison, une fois partie de la ville, se livra à de tels
excès que le général Galbaud, qui venait à sa rencontre et qui la vit
s’avancer vers la côte de Biesme en tirant des coups de fusil, le long du
chemin, dans les arbres, lui reprocha en termes sanglants la lâcheté
dont elle faisait preuve 5 ; Marceau, alors capitaine au i #r bataillon des
volontaires d’Eure-et-Loire, était tellement indigné de la conduite de
ses hommes qu’il voulait donner sa démission 6 . C’est donc dans cette
soirée de désordre du 2 septembre que, malgré la capitulation, le comte
de Henkel, lieutenant des hussards Kôhler, fut assassiné par un soldat
français. Ce soldat était, non pas un grenadier, comme dit Gœthe, mais,
comme Neyon l’affirme par deux fois, et comme Dufour l’écrivait d’a¬
près la tradition du pays, un chasseur à cheval. Il fut arrêté et aima
mieux se tuer que d’être fusillé par les Prussiens; on remarquera que
Gœthe et Dufour sont les seuls qui assurent que ce chasseur se jeta dans
la Meuse; mais nous ne pensns pas pas qu’on puisse récuser leur témoi¬
gnage; Gœthe assure même qu’il a vu le meurtrier au corps-de-garde,
et cela doit être vrai, puisqu’il accompagnait le grand-duc de Saxe-
Weimar qui passa dans la ville la soirée du 2 septembre.
1. Déposition de Viard, archives nat. W 352 , dossier 718, ni 0 partie, pièce 36 .
2. Voir les Réminiscences du prince royal et Mérat, Verdun en 1792, p» 64.
3 . Lettres de Lombard, deutsche Revue , p. 3 o 3 .
4. Lettre de Charles-Auguste à Einsiedel, 3 sept. 1792, citée par Dûntzer, Gœthe
und Karl August , II, p. 72.
5 . Mérat, Verdun en 1792 , pp. ioo-io 3 .
6. Lettre de Marceau, du 7 septembre 1792, citée par Doublet de Boisthibault,
Marceau , i85i, pp. 141-144.
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RBYUE CRITIQÜB
En tout cas, il faudra désormais s’abstenir de juger « héroïque » le
suicide de ce chasseur français, ou de dire que « lui aussi refusa de
capituler. » Il avait violé la capitulation ; il avait tué traîtreusement un
officier sans défense, pendant [une suspension d'armes ; lui-méme d'ail¬
leurs se rendit justice. Bien loin d’admirer son action, il faut la flétrir
et la condamner ; car elle faillit amener le pillage et le sac de Verdun.
Le général de Courbière, dit Neyon dans ses Moyens de défense ,
« ajouta que sa troupe demandait le pillage de la ville, et qu’il ne pou¬
vait l’empêcher. Neyon alla sur-le-champ informer les corps adminis¬
tratifs qui s’assemblèrent et allèrent en représentation près du roi de
Prusse et obtinrent que le pillage n’aurait pas lieu. * Peut-être même,
sans ce malheureux coup de fusil, les dames et jeunes filles que l’histoire
a nommées les Vierges de Verdun, n'auraient-elles pas été traduites
devant le tribunal révolutionnaire. L’une de ces jeunes filles, Barbe
Henry, racontait plus tard dans un récit naïf reproduit par M. Cuvil¬
lier-Fleury dans ses Portraits politiques et révolutionnaires , (p. 411) :
« (Après le meurtre de l’officier) les premières autorités vont en répara¬
tion près du général prussien, qui répond que les droits de la guerre
sont sévères dans ces occasions, que le roi son maître vient d’arriver
au camp et qu’il va envoyer prendre ses ordres. A ce sujet, dans cet
instant oü la crainte l’emporte sur l’espoir, chacun s’agite pour savoir
le sort qui attend la ville, Ce fut alors qu’on imagina d’aller en dépu¬
tation offrir des dragées et des fleurs au roi de Prusse... » Ainsi, dit
M. Cuvillier-Fleury, dans un moment de panique, on croyait au pillage,
on voulait sauver la ville, d’honorables dames se dévouaient à une
démarche, sinon périlleuse, au moins pénible et humiliante. Si le fait
est vrai, si ces dames de Verdun qui avaient à leur tête la baronne de
Lalance de Mongaut, ont voulu fléchir le roi de Prusse, en venant
dans son camp lui offrir des dragées et des fleurs, on voit que le meurtre
du comte de Henkel par le chasseur français, leur aurait coûté la vie;
le coup de fusil, tiré par ce soldat qu’on cessera désormais, espérons le,
de regarder comme un héros, aurait fait bien d’autres victimes encore
que le lieutenant prussien *.
A. Chuqüet.
1. Cp. les remarques ingénieuses et les citations de M. Hûffer dans le Gæthe -
Jahrbuch, IV, pp. 88-89, 1 03-104. Il me semble néanmoins bien singulier que
M ra * de Lalance et les dames accusées avec elle n’aient pa9 tenté de se justifier dans
leurs interrogatoires en protestant qu’elles n’allaient au camp de Regret que pour
apaiser la colère du roi de Prusse; aucune n’a invoqué ce motif de défense.
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d’histoire et de littérature
327
CHRONIQUE
FRANCE. — Nous avons reçu une étude* tirée des « Mémoires de la société d'ar¬
chéologie lorraine pour i 883 »; elle a pour auteur M, J. Favier, de la bibliothèque
publique de Nancy, et pour titre : «1 Coup d'œil sur les bibliothèques des couvents
du district de Nancy pendant la Révolution » (Nancy, Sidot. In-8°, 60 p.). M. Favier
y fait le récit intéressant des recherches entreprises par les deux commissaires-bi¬
bliographes nommés en 1791 par le directoire du district de Nancy, l’abbé Marquet et
l’homme de loi Fâchât, pour recueillir, installer et cataloguer près de 75,000 volumes,
provenant de 36 bibliothèques de maisons religieuses et de 112 maisons d’émigrés ou
de détenus. Cette énorme quantité de livres appartient désormais à la bibliothèque
de Nancy; mais, quelque temps plus tard, les émigrés reprirent possession de leurs
livres; les ouvrages doubles ou de peu de valeur furent donnés à d’autres bibliothè¬
ques; d’autres furent vendus au poids ou mis au pilon ; finalement, de 75,000 vo¬
lumes, 1 5 ,ooo seulement entrèrent dans la composition de la Bibliothèque publi¬
que. M. Favier regrette qu’on n’ait pas été plus large pour l’admission; quelques
traités de théologie furent rejetés, qui offraient un grand intérêt bibliographique ;
on regarda comme doubles les éditions différentes d’un même ouvrage; on donna à
la bibliothèque de l’évêché un exemplaire des Essais de Montaigne, édit, de Paris,
i 635 , in-fol., sous prétexte que la Bibliothèque de la ville possédait l’édition de
Genève, 1727, 5 vol. in-12; on préféra à l’édition des Bollandistes, d’Anvers, qui
provenait des Chartreux et que Brunet estime 3 ,000 fr. la réimpression de Venise
qui est à très bas prix, parce qu’elle faisait partie de l’ancien fonds ; les commis¬
saires ne furent donc pas toujours heureux dans leur choix, et la Bibliothèque de
la ville de Nancy ne s’enrichit pas autant qu’on le croit communément. Près de la
moitié des livres, dit M. Favier, qui avaient appartenu au clergé régulier devinrent
la propriété du clergé séculier; ce résultat était loin de celui que se proposait la
Convention.
— Sous ce titre : Etudes sur VAutriche t le Kahlenberg , notes de voyage et cChis -
foire, M. Joseph Roy vient de faire paraître à Lyon (librairie Claude Dizain) un vo¬
lume qui annonce chez son auteur un goût intelligent pour les sciences histori¬
ques. M. Roy réunit autour du Kahlenberg tous les souvenirs qui s y rattachent
depuis l’époque romaine jusqu’à Sobieski. Il y ajoute des impressions de voyage in¬
téressantes et des réflexions sur l’état actuel de l’Autriche-Hongrie. Cet ouvrage
paraît un début littéraire, et l’auteur mérite d’être encouragé. 11 y a joint le
fac-similé d’une curieuse gravure du xyi^ siècle.
ALLEMAGNE.—La librairieTeubner, de Leipzig, publiera prochainement les ouvra¬
ges suivants : 1 0 Geschichte und Topographie der Stadt Rom im Alterthum , parM. Otto
Oilbsrt (aura deux parties : la première, qui sera publiée avant la fin de cette année,
renfermera, en cinq chapitres, l’histoire et la topographie du Palatin, de l’Esquilin,
du Capitolin et du Quirinal; la seconde partie, qui paraîtra dans un an, traitera,
en cinq autres chapitres : i° de l’histoire et de la topographie du Caelius et de l’A-
ventin ; 2 0 — et ce sera le vin* chapitre de tout l’ouvrage, — de la formation de la
ville en une seule cité et des ordonnances qui l’ont régie; 3 ° du développement de
Rome comme ville libre et ville impériale [ix e et x* chap.); 2* Aristotelis quae fe -
rsrmtur Magna Moralia, recognovit Fr. Suseuihl ; 3 ° Aristophanis Eçclesiajfusae ,
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328
REVUE CRITIQUE
recensuit Ad. von Velsen (III* vol. de l'édition complète des œuvres d'Aristophane);
4° Die Musiklitteratur des Mittelalters bis qur Blüthe der Reichenauer Sœnger-
schule, 500 - 1050 , par M. W. Brambach; 5 ° Die Musik Wilhclms von Hirschau ,
Wiederherstellung , Ueberset^ung und Erklcerung seines musiktheoretischen Wer -
kes, par M. Hans Mûller.
— Le volume que publie tous les ans, en Allemagne, M. Wilhelm Mûller, pro¬
fesseur à Tubingue, et qui correspond à V Année politique de M. Daniel, en France,
vient de paraître ( Politische Geschichte der Gegenwart . Das Jahr 1882. Berlin,
J. Springer. In-8°, xv et 333 p., 4 mark 20). C'est le seizième volume que fait pa¬
raître M. Mûller; on y trouvera l’exposé bref et exact des événements de l’année
1882; l'auteur commence par l’empire allemand (pp. 1-71), pour passer ensuite à
la péninsule des Balkans et à l'Egypte (pp. 73-1 38 ; « das Jahr 1882, dit-il, hit
durch die ægyptische Krisis seine Signatur erhalten), et de là, à la France (pp. i 58 -
187), à l’Autriche, à la Russie, à l’Italie, à la Grande-Bretagne, à l'Espagne, etc.; il
termine par un dernier chapitre sur l’empire allemand (pp. 266-307). Comme dans
les volumes précédents, on trouve, à la fin, une table alphabétique et une « Chro¬
nique des événements » ou table chronologique qui est utile; p. 174, lisez Roche et
non « Roches. »
— L'école bien connue de Pforta a célébré les 20, 21 et 22 mai son 340 e anniver¬
saire : le premier jour, les élèves ont joué Y Antigone de Sophocle dans la langue
originale; on avait adapté aux chœurs la musique composée par Mendelssohn pour
le texte allemand ; la scène, dressée absolument comme dans le théâtre antique, se
trouvait dans la salle de gymnastique décorée, pour la circonstance, des statues de
divinités grecques; à la fin de la pièce, le D r Bonitz, délégué par le gouvernement,
adressa en grec un discours aux élèves. Le deuxième jour eut lieu l’inauguration
solennelle des nouveaux bâtiments de l’école; le D r Bonitz rappela, dans un nouveau
discours, le souvenir de Neu qui, cinquante ans auparavant, lui avait expliqué So¬
phocle dans cette même école. Le troisième jour, eut lieu un concert religieux; une
excursion sur le Knabenberg qui domine Pforta, termina la fête.
ALSACE. — Sur les 866 étudiants de l’Université de Strasbourg, 160 sont inscrits
à la faculté de philosophie ou des lettres; cette faculté compte 20 professeurs ordi¬
naires, dont 3 honoraires, 2 extraordinaires et 3 privat-docent. Le traitement des
professeurs varie de 1,800 à io, 5 oo mark; les rétributions payées par les étudiants
l’augmentent en moyenne de la moitié. Les dépenses annuelles de l’Université s’élè¬
vent à 923,200 mark, et ses recettes à 434,450 mark; l’Université ne possède pas de
fortune personnelle, comme les autres universités de l’empire allemand; c'est donc
l’empire qui lui donne une subvention de 400,000 mark pour compléter son budget.
BOHÊME. — La Revue slave (Slovansky Zbornik), de Prague, publie dans ses
deux derniers numéros uçe traduction de Y Essai sur la mythologie slave de M. L.
Leger. Cette traduction est accompagnée de notes et d’additions de M. le Dr. Po-
livka. Cette revue publie également un travail inédit de feu Erben sur les ViUs
de la mythologie slave.
GRANDE-BRETAGNE. — Les éditeurs Smith, Elder et Comp. annoncent une
nouvelle édition des œuvres complètes de Thackbray, qui renfermera quelques-uns
de ses articles du Punch t du Fraser*s magazine, etc.; l’édition qui sera la a standard
édition » de Thackeray, formera vingt-six volumes.
ITALIE.— M. Salvatore Cusa, professeur d’arabe à l’Université de Palerme, vient de
publier la seconde partie des diplômes grecs et arabes conservés dans les archives de
Sicile. Ce volume se termine par une table analytique des documents selon l'ordre
chronologique, suivie d’index grecs, arabes et latins des noms d’homme et de lieu.
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d’histoire et de littérature
329
Cette vaste publication honore à la fois le savant qui Ta entreprise et le gouverne¬
ment qui en a supporté les frais. M. Cusa nous promet un troisième volume de
traductions et d'annotations historiques et philologiques, complément indispensable
du travail.
POLOGNE. — Les histoires de la littérature polonaise ont, pendant longtemps,
considéré comme des documents sérieux des monuments runiques apocryphes ou
même purement imaginaires. La question des runes slaves a déjà été tirée au clair,
dans un sens purement négatif, par MM. Jagic et Beaudouin de Courtenay. M. Ro¬
man Zawilinski vient de la résumer nettement dans une brochure publiée à Craco-
vie; il faut espérer que désormais personne ne reviendra sur ces fantaisies qui ont
fait tourner bien de3 têtes.
RUSSIE. — M. Beaudouin de Courtenay, le savant linguiste polonais, est
nommé professeur de philologie slave à rUniversité de Dorpat.
— M. Lavrosvky, professeur de philologie slave à l’Université de Péterabourg, vient
d'entrer dans sa vingt-cinquième année d’enseignement. A cette occasion, ses élèves
anciens et nouveaux ont publié un intéressant volume de Mélanges slaves.
— M. A. Vkselovsky, de Moscou, dont nous avons déjà signalé les importantes
études sur Molière, vient de faire paraître un volume intitulé : L'influence occiden¬
tale sur la littérature russe moderne.
SLAVES MÉRIDIONAUX. — La Revue Slovinac de Raguse continue de publier
des traductions inédites de Molière, écrites au siècle dernier, et adaptées à la vie
ragusaine. Ces traductions sont en prose. Le Slovinac publie en ce moment
Tartuffe ; 1 * « imposteur »a pris le nom de Ttrto; Dorine s’appelle Franusa ; Elmire,
Mara; etc.
— Le ministre de l’instruction publique, à Sofia, vient de fonder une Revue péda¬
gogique (Outcheben Viestnik). Elle comprend tous les renseignements officiels con¬
cernant la Bulgarie et la Roumélie, des articles de fond et une bibliographie (prix
d’abonnement, 8 fr. par an).
— M. Geitler va publier prochainement à Agram une paléographie glagolitique.
SUISSE. — M. Joseph Hornung, professeur de droit public et de droit pénal à
l’Université de Genève, a fait tirer à part l’étude qu’il avait lue au Congrès des socié¬
tés suisses de géographie en août 1882 et publiée dans les Actes de cette société, sur
les races de la Suisse au point de vue historique et juridique (In-8°, 21 p.) Nous
nous bornerons à en résumer les points essentiels. M. Hornung fait remarquer
que les races sont ailleurs séparées et hostiles ou se fondent dans une unité supé¬
rieure; en Suisse, elles sont unies par le lien d'une libre confédération et gardent
chacune leur originalité; ce fait provient avant tout de ce que la Suisse s’est trouvée
à distance des centres de reconstruction, et pour ainsi dire, au point <$indifférence
des forces représentées par les grands états. L’unité de la Suisse, dit M. Hornung,
est donnée dès le principe par la nationalité celtique des Helvètes, comme celle de
la France par la nationalité gauloise. Mais l’invasion germanique partage le pays
entre les Burgondes à l’ouest et les Alamanni à l’est; les Burgondes étant chré¬
tiens et très modérés avec les Romains, les contrées qu’ils occupèrent restèrent es¬
sentiellement romanes; les Alamanni, païens encore, germanisèrent entièrement le
pays dont ils s’emparèrent, c’est-à-dire l’Allemagne au sud du Main et 1 Alsace. La
division ethnique de la Suisse date de cette époque, et il y eut équilibre entre les
deux races, suivant une ligne qui passe parSierre, Fribourg, Morat et Bienne. L’em¬
pire carolingien christianise la Suisse (avec l’abbaye de Saint-Gall comme centre).
Après sa chute, la Suisse passe tout entière en principe à l’Allemagne, et la Suisse
allemande fait partie du duché d’Alemannie; mais le royaume de Bourgogne transju-
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33 o
REVUE CRITIQUE
rane va de Besançon à Marseille et de Lyon à la Reuss. Au x e et au xi« siècle, l'Em¬
pire comprend toute l'Hélvétie et même toute la vallée du Rhône jusqu'à la mer.
Mais bientôt il se décompose; la féodalité suisse se forme, malgré les Zaehringen,
recteurs de l’Empire, qui fondent Berne et Fribourg. Mais la maison de Savoie, dy¬
nastie essentiellement romane, acquiert le pays de Vaud, tandis que la maison d’Au¬
triche cherche à englober la Suisse allemande; les destinées des deux Suisses se
séparent pour plus de deux siècles. Cependant la vie municipale, éclose depuislong-
temps, se développe de plus en plus; les communes de la Suisse allemande se grou¬
pent contre l’Autriche et la féodalité locale, et forment une confédération qui l'em¬
porte finalement sur la dynastie de Savoie, tout en affirmant son indépendance
vis-à-vis de l’Empire dans la guerre de Souabe; cette confédération s’adjoint Fribourg;
certains cantons conquièrent le Tessin; Berne occupe le pays de Vaud. Mais Genève
engagée dans une lutte suprême contre la maison de Savoie, se fait protestante, de*
vient absolument autonome, et s'oppose décidément à la race qui l'entoure : elle est
le centre du monde calviniste et bientôt de toute la Suisse protestante après la dé¬
faite du zwinglianisme. C’est alors qu’il y a deux Suisses : la Suisse française, Genève
et Vaud, recevant de la France le calvinisme et lui rendant le rationalisme de Rous¬
seau, offrant un refuge aux réformés français, produisant Benj. Constant, M** de
Staûl, Sismondi, etc.; la Suisse allemande, où Zurich « prend part à la restauration
du germanisme ». M. Hornung insiste sur « l’antithèse entre la race mixte et secon¬
daire de la Suisse française et la race pure des cantons allemands ». La civilisation
de la Suisse allemande est toute germanique; elle a rejeté le droit romain; elle à
contribué à l'histoire et à la théorie du droit germanique avec Bluntschli, Blumer
et Segesser. Les tendances de la Suisse allemande sont conservatives et corporatives;
elle s'étudie dans son développement historique; elle revient volontiers à son pissé
(fêtes historiques)!; elle est restée tout près de ses origines; sa Réforme, plus libérale
et tolérante que celle de Calvin, foncièrement nationale, locale et populaire, ayant
peu de rayonnement et d’action, a dû céder au calvinisme ; mais la Suisse allemande,
ayant l’unité de race, tient beaucoup moins aux cantons que la Suisse française et
centraliserait volontiers le pays, en maintenant l'esprit corporatif des institutions;
elle est moins préoccupée des droits individuels; elle aime peu les abstractions; sa
littérature est réaliste (Haller, Jean de Müller, Gotthelf, Gottfried Keller); de là la
part qu’elle a prise à la restauration du germanisme en Allemagne, au xvm* et au
xixe siècle; les cantons allemands, en un mot, constituent la base solide de la con¬
fédération, son principe historique et corporatif. La Suisse française n'a pas un passé
primitif comme celui de la Suisse allemande; elle repose sur une civilisation mixte;
son centre n'est pas la race, mais une idée ; son droit, sans être exclusivement la*
tin, et tout en penchant du côté de la France, a un caractère mixte ; c'est à Genève
et dans la Suisse française que se dessinent l’individualité et ses droits ; les cantons
français ont toujours défendu les droits individuels et la liberté économique, tandis
que la centralisation, la subordination des individus aux buts spéciaux était repré¬
sentée par les cantons allemands. M. Hornung se demande laquelle des deux races
est en progrès. Là où elles sont en conflit, c’est l’élément latin qui avance (Valois
et Fribourg) ; l’allemand ne gagne du terrain que sur les idiomes romans des Gri¬
sons. Mais, à un autre point de vue, l’élément germanique gagne du terrain : la
législation fédérale s'inspire «c trop exclusivement » des idées germaniques et abuse
du principe de la tutelle, particulièrement dans l’ordre économique. L’essentiel en
Suisse, conclut M. Hornung, c’est le canton; ce qui fait la Suisse, c’est la libre union
de ces cantons appartenant à des races diverses ; mettre l’accent sur une des races,
c’est préparer la décomposition de la Suisse, <* Les exigences de la politique nous ont
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d’histoire et de littérature
331
fait passer de la confédération d’états à un état fédératif, n’allons pas plus loin ;
gardons nos originalités cantonales et nos esprits de race; que la Suisse conserve
fidèlement cette variété de peuples, de cités, d’états souverains qui la distingue en
Europe et qui fait son honneur et sa force. La Suisse laisse cqexister en elles les
éléments qui ailleurs se heurtent ou s’oppriment réciproquement; puisse-t-elle de¬
meurer fidèle à ce beau rôle de conciliation et de transaction entre les races! »
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Seance du 12 octobre i883.
M. Deloche communique un fragment de bijou de l’époque mérovingienne qui
fait partie de la collection formée par feu M. Benjamin Fillon. C’est une rondelle
d’or fin, de o“oii de diamètre, de o® oo 3 d’épaisseur et du poids de 2 grammes.
Cette rondelle paraît avoir formé un chaton de Dague. Elle est composée de deux la¬
mes soudées l’une sur l'autre, qui portent chacune une inscription, savoir: sur l’une
des faces, autour d'un chrisme :
* ROCCOLANESV
et sur l’autre face :
VVAR
ENBERTV
SDEDI
Warenbertus est un nom d’homme et Roccolane un nom de femme, usités l’un et
autre sous les Mérovingiens. On pourrait être tenté de lire, en groupant les deux
légendes et en suppléant deux lettres : Roccolane sw[e] Warenbertus dedi[t ] ; le bi¬
jou serait le chaton d’un anneau de fiançaille. Mais les deux faces de l’objet ne pré¬
sentent pas le même aspect et semblent d’un travail différent. M. Deloche préfère
donc reconnaître dans le bijou le reste d’un anneau sigillaire, et lire séparément, d’un
côté Roccolane su[bscripsi] t de l’autre Warenbertus dedi. En effet, le chaton était
disposé de manière è tourner sur deux pivots et à présenter, à la volonté de celui qui
le tenait, l'une ou l’autre de ses faces. On possède plusieurs anneaux sigillaires qui
offrent la même disposition, et elle est décrite en termes exprès dans une lettre de
saint Avit, évêque de Valence (494-525).
M. Ferdinand Delaunay dépose, de la part de M. Fonssagrive, officier de l’armée
française en Afrique, une collection d’estampages d’inscriptions latines, relevés en
diverses localités de la Tunisie.
L’Académie se forme en comité secret.
A la reprise de la séance publique, M. Revillout lit une Note sur Vargenteus-ou-
ten. Dans cette communication, destinée à compléter les études précédentes de l’au¬
teur sur le système monétaire des Egyptiens, M. Revillout s’attache à établir que
l’unité monétaire connue sous le nom d 'arpenteus correspondait primitivement à
l’unité de poids appelé oulen : Vargenteus était à l’origine (sous Amasis et Darius,
par exemple) un outen d’argent. Plus tard, les monnaies subirent une dépréciation
graduelle et Vargenteus en vint à ne peser que les quatre cinquièmes de l 'outen.
M. Delaunay commence la lecture d’un nouveau mémoire de M. Romanet du Cail-
laud sur la date de la loi Junia Norbana (voy. le compte-rendu de la séance du
a 5 août 1882, ci-dessus, nouvelle série, t. XIV, p. 232). M. Romanet du Caillaud
présente de nouveaux arguments pour établir que la loi Junia Norbana a dû être
rendue antérieurement à la loi Aelia Sentia.
Ouvrages présentés : — par M. Barbier de Meynard : i° Géographie d’Aboul-
Fèda, traduite de l'arabe en français et accompagnée de notes par M. Stanislas Guyard ;
2 0 Basset (René), Notes de lexicographie berbère (extrait au Journal asiatique ).
% Julien Havet.
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REVUE CRITIQUE d'hISTOIRB ET DE LITTÉRATURE
SOCIÉTÉ ASIATIQUE
Séance du 12 octobre i883.
M. Barbier de Meynard, vice-président, fait un rapport sur le congrès des orienta¬
listes de Leyde auquel il assistait en qualité de délégué du Collège de France et de
la Société asiatique. .
M. Halévy traite de quelques mots hébreux et assyriens. Signalons particulière¬
ment son explication du mot El « dieu * par El « colonne ». On sait, en effet, que
les Sémites représentaient la divinité sous la forme d’une colonne, emblème de 1 a
montagne qui, dans leur esprit, était la divinité même.
LIVRES DÉPOSÉS AU BUREAU DE LA REVUE CRITIQUE
— K. G. Andrbsen, Konkurrenzen in der Erklærung der deutsche Geschlechtsna-
men. Heibronn, Henninger. -- Bournet, Rome, Etudes de littérature et d’art. Pans
Plon.— Cauer, Deîectus inscriptionum graecarum propter dialectum memorabilium
iterum composuit. Leipzig, Hirzel. In-S°, xvi et 365 p. — H. Cordier, Bibliogra¬
phie des œuvres de Beaumarchais. Paris, Quantin. ln- 8 °, vi et 143 p. — Die Ur-
kunden der Grafen de Lagardie in der Universitœtsbibliothek zu Dorpat, hrsg. v.
Lossius. Dorpat, 1882 (Leipzig, Kœhler. In-8°, xiv et i 58 p.) — Gartner (Th),
Raetoromanische Grammatik. Heilbronn, Henninger. — Klette, William Wicher-
ley’s Leben und dramatische Werke. Münster, Coppenrath. (ln-8°, 74 p.) — La¬
nier, Etude historique sur les relations de la France et du royaume de Siam de
1662 à 1703. Versailles, Aubert. — Mispoulet, Les institutions politiques des Ro¬
mains ou exposé historique des règles de la constitution et de l’administration ro¬
maines depuis la fondation de Rome jusqu’au règne de Justinien. Tome II. L’admi-
nitration. Paris, Pedone-Lauriel. (ln-8\ 56 o p.). — Moguel, Calderon et Goethe ou
Faust et le magicien prodigieux traduit en français par Magnabal. Paris, Leroux.
(In-i6 # , xxvi et 207 p.). — Perry, English literature in the XVIII. century. Nevr-
York, Harper and brothers (In 8 °, xm et 450 p.) — von Pflugk Hartung, Iter ita-
licnm I abth. Stuttgart, Kohlhammer, In-8 # . — Rœsiger, Neu-Hengstett (Burset),
Geschichte und Sprache einer waldenser Colonie in Württemberg. Greifswald,
In-8 # . — Socard, Biographie des personnages remarquables de Troyes et du dé¬
partement de l’Aube. Troyes, Lacroix. (1882, in-8°, 446 p.). — Turmair’s gennannt
Aventinus, bayerische Chronik, hrsg. von Lexer. I, 2. Buch II. München, Kaiser.
(In-8% pp. 581-1184.)
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent , 2 J.
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Geographisches Jahrbuch, begründet 1866 durch Behm. IX. — Reinisch,
Texte aer Bilin-Sprache. (Riche mine pour le linguiste, l’historien de la
civilisation et l'ethnologue.) — Isaei orationes cura fragments a Diony-
sio Halicarnassensi servatis, p. p. Buermann, (Edition qui marque un
nouveau progrès.) —Theophanis chronographia, rec.DE Boor. I. Textum
graecum continens. (Très bon.) — Monin, Monuments des anciens idio¬
mes gaulois, Textes, linguistique. (Date de 186r, vieilli par conséquent
et renfermant beaucoup de fautes.) — Mahrenholtz, Voltaire im Urteile
seiner Zeitgenossen. (Beaucoup de soin et de travail.) — Düntzer,
Christophe Kaufmann, der Apostel der Geniezeit und der herrnhutische
Arzt, ein Lebensbild. (Comme toujours, récit sous forme d’annales).
— Rjegel, Beitràge zur niederlàndischen Kunstgeschichte. 2 vols.
Deutsche Litteraturzeitung, n° 40, 6 octobre 1 883 : Maybaum, Die En-
twicklung des israelitischen Prophetenthums. (Schanz.)-L. Ferri, La
psychologie de l'association depuis Hobbes jusqu’à nos jours. (Ebbin-
ghaus : clair, soigné, conforme aux sources.) — De Harlez, De l'exé-
S èse et de la correction des textes avestiques (W. Geiger : grande ré¬
exion, beaucoup de modération dans la polémique). — Briefwechsel
zwischen Boeckh und Otfried Müller. (M. Hertz.) — Reinkens, Les-
sing ueber Toleranz. (Er. Schmidt : insuffisant.) — H. Weiss, Ge-
schichte der Tracht una des Geràts im Mittelalter vom IV bis zumXIV
Jahrhundert. (A. Schultz : travail bien réussi dans son ensemble et qui
mérite d'être étudié par l’historien comme par l'artiste.) — Theophanis
Chronographia rec. De Boor. I. (Sp. Lambros : travail excellent.) — H.
Hahn, Bonifaz und Lui, ihre angelsâchsischen Correspondenten. (Loofs :
utile.) — Kalkoff, Wolfger von Passau, 1191-1204, eine Untefrsuchung
ueber den historischen Wert seiner Reiserechnungen. (Holder-Egger :
travail très remarquable, plein de soin et de sagacité.) — Max Lehmann,
Preussen und die Katholissche Kirche seit 1640. IV. 1758-1765. (Ko-
ser.) — Edlbacher, Landeskunde von Oberôsterreich, geschichtlich-
georaphisches Handbuch ftir Leser aller Stànde. — Audebert, Beitràge
zur Kenntniss Madagaskars. I. Madagascar und das Hovareich. —
Ch. Nicolas, Les budgets de la France depuis le commencement du
xix 6 siècle. — Kerkhoffs, La cryptographie militaire.
Theologische Litteraturzeitung, n° 20, 6 octobre i 883 : Birt, Das antike
Buchwesen in seinem Verhàltniss zur Literatur, mit Beitriigen zur
Textgeschichte des Theokrit, Catull, Properz und anderer Autoren.
(Heinrici : ouvrage d’un très grand savoir et de profond intérêt.) Vil-
mar, Collegium biblicum, praktische Erklàrung der heiligen Schrift
Alten und Neuen Testaments, aus dem handschriftl. Nachlass der aka-
dem. Vorlesungen hrsg. v. Chrn. Müller. IV. Die Propheten. (Holtz-
mann.) — Glock, Grundriss der Pâdagogik Luthers (Kawerau). —
Scheurl, Die bevorstehende Lutherfeier. — Sci^ollmeyer, M. Hierony-
mus Tilesius. der Reformator Mühlhausens, eine Skizze. (Enders.) —
Criegern, Johann Amos Comenius aïs Theolog.
Gcettingische gelehrte Anzeigen, n° ^.o, 3 octobre 188 3 : Librorum veteris
Testamenti canonicorum pars pnor graece P. de Lagarde, studio et
sumptibus édita (P. de Lagarde). — Otto von Heinemann, Geschichte
von Braunschweig und Hannover. I (Steindorff). — # Soltau, Die
ursprüngliche Bedeutung und Competenz der aediles plebis (PIcw : tra¬
vail considérable et précieux pour l’histoire; recherches profondes sur
un des problèmes les plus obscurs du droit public romain). Adalb.
Schroeter , Geschichte der deutschen HomerÜbersetzung im XV111
Jahrhundert. (Minor : beaucoup d’observations fines et de remarques
importantes, mais aussi beaucoup de points contestables).
N° 41, 10 octobre i 883 : Hübschmann, Armemsche Studien, 1 (&. J.
von Dillon). — Klostermann, Problème im Aposteltexte (Klostermann).
— Martensen, Aus meinem Leben. I (Lemme).
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28 , RUE BONAPARTE, .8
REVUE ÉGYPTOLOGIQUE
Publiée 80us la direction de MM. H. BRUGSCH, F. CHABAS. B. RÉVILLOUT
Première année. 1880, in-4, avec 5 feuilles de planches autographiées. ... a 5 fr.
Deuxième année. 1881, in-4, avec 12 feuilles de planches autographiées. . . 2b fr.
Troisième année. i 883 , in-4. -N° 1, avec une feuille de planches autogra-
P hiées et 3 planches en héliogravure. L’année complète.
’aris, 3 o fr. — Départements, 3 i fr. — Etranger, 3 z fr.
SOMMAIBE0 : PREMIERE ANNÉE, numéro i. — Avis de l'éditeur. — Quelques notes
chronologiques sur l’histoire des Lagides par E. Révillout. — Le mot adon par H. Brugsdi. —
Notices géographiques. Le lac Maréotis par H. Brugsch.
Numéros 2 et 3 . — Premier extrait de la chronique démotique de Paris : Le roi Amasis et le
Mercenaires. — La syntaxis des temples ou budget des cultes sous les Ptolémées. — La questio
du divorce chez les Egyptiens. — Les droits du hls aîné comme Kyrios. — L'intervention des en
fants dans les actes chez les Assyriens. — Le divorce assyrien. — Les régimes matrimoniaux dan
le droit égyptien : régime de séparation des biens ; régime dotal ; communauté de biens entre époux ;
régime dotal mixte avec communauté partielle. — Reconnaissance d'enfant avec légitimation pa
mariage subséquent. — Régime matrimonial chez les Assyriens. — Union légitimée après sédo
tion. — Hypothèque légale de la femme et donations entre époux. — L'omnipotence des femmes
la décret de Philopator sur l'autorité maritale. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — E
tretiens philosophiques d'un petit chacal koufi et d'une chatte éthiopienne. — Revue bibliog
phique.
Numéro 4. — Second extrait de la chronique démotique de Paris : Les prophéties patriotiques.—
Entretiens philosophiques d'une chatte éthiopienne et d*un petit chacal koufi. — T »
péum : sa bibliothèque et ses occupations mystiques selon de nouveaux documei
Le reclus dé Sér*-
péum : sa bibliothèque et ses occupations mystiques selon de nouveaux documents démotiques. —
Les arts égyptiens —Données géographiques et topographiques sur Thèbes, extraites par MM. Brugsch
et Révillout des contrats démotiques et des pièces corrélatives. — Le serment décisoire chez les
Egyptiens. — Notes historiques sur les Ptolémées. — Récits de Dioscore. exilé à Gangres, sur k
concile de Chalcédoinc. — Notice nécrologique sur M. de Saulcy par M. Oppert. — Correspon¬
dance. — Revue bibliographique.
DEUXIÈME ANNEE, numéro i. — Second extrait de la chronique démotique de Paris: Le»
prophéties patriotiques. — Un fragment de la légende osiriaque. — Le serment décisoire chez tes
Egyptiens. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — Récits de Dioscore, exilé à Gangres, sar
le concile de Chalcédoine.— Les sarcophages D 5 et 7 du Louvre. — Un contrat de mariage de
l'an 4 de Psammétique II. — Une vente de maison de l'an 12 de Darius l ,r . — Acte de fondation
d'une chapelle à Hor-merti dans la ville de Pharbaetus, en l'an 32 de Psammétique I' r . — Acte de
fondation d'une chapelle à Bast dans la ville de Bubastis^ l’an 3 a du roi Amasis. — Correspoo-
lonnanL de
affres de U
Taricbcste
Stem-
dance : H. Brugsch-Pacha. — Nécrologie et nouvelles. — Èevue bibliographique.
, Numéros 2 et 3 — Lettre à M. Révillout sur les monnaies égyptiennes, par M. Len<
l ‘Institut. — Second extrait de la chronique démotique. — Statue d'un ministre. — Les 1
mort. — Le serment décisoire, — Le groupe Pehti, par Paul Pierret. — La requête d'un
d'ibis. — L'antigraphe des luminaires. — Entretiens philosophiques d’une chatte et d'un chacal. —
Un quasi-mariage. — La femme et la mère d'Amasis. — Un prophète d’Auguste et sa famille. —
Authenticité des actes. — Le papyrus grec XIII de Turin. — La loi de Bocchoris et l'intérêt à 3 c j
B )ur 100. — Les reclus de Sérapéum. — Le roi Anchmachis. — Les pensions alimentaires. — i
onnées métrologiques des prêts de blé. — Nouvelles mesures agraires. — La tenue des livres cal
Egypte. — La valeur de l’huile. — Les mesures de capacité. — Le mot grec ouwaoq écrit biero j
glyphiquement, par Brugsch-Pacha. — Quelques poids égyptiens et assyriens. — Lettre de M. ‘
— Note métrologique de M. Ledrain. — Lettre ae M. Golenischeff. — Poids sémitico-égy
Lettre de M, Aurès. — Lettre de M. Oppert, de l'Institut — Comparaison des mesures L
nes et hébraïques. — Première lettre de M Révillout à M. Lenormant. — Note sur les r _
ciennes monnaies hébraïques. — Seconde lettre à M. Lenormant. — Un bilingue monétaire. ■
Note additionnelle. — Un rapport de police. — Contrat de mariage du temps de Darius. — 1 : -
d incantation . — Les poésies bilingues de Moschion. — Revue bibliographique. — Note sur
P uerrc égyptienne. — Correspondance numismatique. — Nouvelles. — Aug. Mariette-Pacha. •
lanches contenant les traductions mot à mot des articles démotiques.
Numéro 4. — Congrès de Berlin (Eug. Révillout) : i # La table ethnique des anciens 1
système égyptien, système africain, système asiatique (H. Brugsch-Pacha) ; 2* la nouv
du Livre des Morts (E Naville); 3 ° Concordances entre l'année vague et l'année solaire (L~
4° une épopée gréco-égyptienne (L. Stern) ; 5 # un ancien conte égyptien (Goléniscbeffi ; 6* —.
cachette découverte à Deir-el-Bahari par M. Maspéro (Eug. Révillout). — Les ostracade Kara tc (
Wiederaann). — IldpTlÇ (Jacques Krall). — La particule copte XIN, 2IN (A. BailleQ. — 1
de la rédaction. — « Liber Proverbiorum • (M« r Bsciai).
TROISIEME ANNÉE, numéro i. — Association de Ptolémée Epiphane A la couronne et<
ques autre associations royales — Le tribunal égyptien de Thèbes — Récits de Dioacore, c~
uangres, sur le concile de Chalcédoine — Les prêts de blé. — La vie du bienheureux Aphoi
que de Pemdje (Oxynnque) — Le martyre de saint Ignace. — Le papyrus Anastasi n* o, traa|
«MufÆ? 11 R ar .^* > haba * Index du vocabulaire mythologique de M. Chabas. —Nouvel
3 ? i- iïïîhî? ¥ U5é S *® pt ï* n ?. u Couvre. - Nécrologie et nouvelles. - Nota. Sigles des
de la drachme lors de Péta Ion d argent en Egypte.
Le tuy, imprimerie Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 2 3
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N" 44
Dix-septième x ànûée 29 Octobre 1883
REVUE CRITIQ1JE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
de MM. S. GUYARl), L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt
Prix d'abonnement ;
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 2 5 fr.
PARIS
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR
libeaihb de la société asiatique
!>■ l'ÉCOLK DBS LANGUES ORIENTALES VIVANTES, ETC
28, RUE BONAPARTE, 28
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqubt
(A u bureau de la Revue : nie Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
RELIGION NATIONALE ET RELIGION
UNIVERSELLE Islam, israélisme, judaïsme et chris¬
tianisme, buddhisme. Cinq lectures faites à Oxford et à
Londres, par A. Kuenen, professeur à l'université de Leyde.
Traduit du hollandais par Maurice Vernes. In-8, br. 7 fr. 5 o
LES ÉPOQUES LITTÉRAIRES DE
L’INDE. Etudes sur la poésie sanscrite par Félix Nève.
In-8, br ....« 9 fr.
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 597, i 3 oct. i 883 : Ch. Beard, The Reformation of
the sixteenth century in its relation to modem thought and knowledge.
Hibbert Lectures for i 883 . (Bass Mullinger.) — W. Jones, Crowns and
Coronations, a history of regalia. (Edit. Peacock.) — (Studies in logic,
by members of the John Hopkins University. (Edgeworth.) — Bastian,
Vôlkerstàmme am Brahmaputra und verwandtschaftliche Nachbarn;
Inselgruppen in Océanien, Reise-Ergebnisse und Studien. (Keane.)
— New éditions. — Historical books. — c Edgar Poe and his biogra¬
phes. » (Ingram.) — The iron âge in Greece. (W. Leaf et A. Lang.) —
Robin Hooa (Isaac Taylor). — The word « fubs » (White). — Philolo-
gical books (Saalfeld, Italograeca. II Heft, et der griechische Einfluss
auf Erziehung in Rom; Plauti Menaechmi, ed. J. Vahlbn; Plauti Co-
mœdiæ, IV, a, Pseudolus et Poenulus, p. p. Ussing; Volk a. Füchs,
Die Weltsprache ; Bloomfield, Remarks on a comparative study of the
greek accent. — Curtis, Velasquez and Murillo. — The « Apollo and
Marsyas » (J. G. Waller).
The Athenaeum, n° 2920, i 3 oct. 1 883 : Anthony Trollopb, An auto-
biography. 2 vols. — Molloy, Court Life below Stairs, or London
under the last Georges. 1760-1830. III a. LV. (Offre le spectacle édifiant
de personnages.royaux qui ne font que boire et courtiser les femmes;
espérons que ce sera de longtemps le dernier livre sur le dernier des
Georges.) — Sir Thomas Brassey, The british navy, its strength, re-
sources and administration. IV et V. (Les deux derniers vols. d Y un ou¬
vrage qui représente 3 o années de travail.) — Journal of the Pâli Tex-
Society. 1882; The Buddhavamsa and the Cariya Pitaka, ed. by R. Mor¬
ris; The Anguttara Nikaya, I ; The Ayaranga Sutta of the Çvetambara
Jains, edit. by H. Jacobi. — An american plagiarist. (T. Humphry
Ward : le livre de M. Welsh, « The development of english literature
and language », est une pure copie des <t English poets » de M. Ward.)
— The original of the nero in the comedy of « feastward Hoe » (Ch.
Edmonds). — The Luther Exhibition in the Grenville Library. (K.
Pearson.) — The etymology of London. (W. Rye.) — Shakspeareana.
(P. A. Daniel.) — Dresser, Japan, its architecture, art and art manu¬
factures. — Taurel, De christelijke kunst (Part chrétien) in Holland en
Vlaanderen, van den gebroeders Van Eyck tôt aan O. Venius en Pour-
bus, voorgesteld in der tig staalplaten en beschrieven. (Recherches dont
un crand nombre ont été couronnées de succès.) — Notes from Rome
(R. Lanciani).
Literarisches Centralblatt, n° A2, i 3 octobre 1 883 : Wright, The book
of Koheleth, commonly called Ecclesiastes, considered in relation to
modem criticism and the doctrines of modem pessimism ? with a criti-
cal and grammatical commentary a. a revised translation (Excellent
travail). — JoëL, Blicke in die Religionsgeschichte zu Anfang des zwei-
ten christlichen Jahrhunderls mit Berticksichtigung der angrânzenden
Zeiten. II. Der Conflict des Heidenthums mit dem Christenthum in
seinen Folgen für das Judenthum (Beaucoup de critique à faire, mais
renferme bien des choses utiles). — Halfmann, Cardinal Humbert, sein
Leben und seine Werke mit besonderer Berticksichtigung seines Trac¬
tâtes : t Libri très ad versus simoniacos. » (Grand savoir et bon juge¬
ment historique). Hirschfeld, Gallische Studien (matériaux abon¬
dants, argumentation solide, points de vue larges et féconds). —
Morpurgo, Arbogaste e Timperio romano dal 379-394 (Programme de
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
44
— 29 octobre —
1883
Sommaire i aïo. Choix de textes de l’ancien français du x* au xi e siècle, p. p.
Aubertin. — au. Lyon, Les Minnesinger; Rapports de Goethe et de Klopstock.
— 212. Description de Madrid par Cock, p. p. A. Morel-Fatio et Rodr. Villa.
— 2i 3 . Les grands écrivains de la France, p. p. Ad. Regnier; La Fontaine,
Tome I. — 214. Seeley, le baron de Stein et son temps, i. — Socard, Biogra¬
phie des personnages remarquables de Troyes et du département de l'Aube, I. —
Variétés : C. Jullian, A propos des lettres de Bossuet à Leibniz. — Chronique. —
Académie des Inscriptions.
210. — Choix, de texte» de l'Ancien français du x° nu xvfc e siècle» par
M. Aubertin, 35 y p. Paris, Eugène Belin.
Nous possédons un excellent recueil de textes de Pancien français,
c est celui de M. Paul Meyer; mais ce recueil n’ayant pas été fait pour
les classes, plusieurs libraires de Paris en ont depuis longtemps déjà an¬
noncé de nouveaux destinés particulièrement aux élèves de nos lycées.
Si ces ouvrages se font attendre, c’est qu’on ne les improvise pas, même
quand on est très savant romaniste. M. Aubertin a trop tenu, il nous
semble, à arriver bon premier, et par suite le choix de textes qu’il pu¬
blie sent la hâte et la précipitation. Trois extraits de nos chansons de
Geste ne donnent pas une idée suffisante de la richesse de la poésie épi¬
que au moyen-âge : il y avait de beaux passages à prendre dans le ro¬
man dCAlixandre , Aliscans, Ogier le Danois . la Conquête de Jéru¬
salem, etc. Quant aux poèmes historiques, ils brillent par leur absence :
rien de Garnier de Pont-Sainte-Maxence, rien de Benoit de Sainte-
More, rien de Guillaume le Maréchal. M. A. ne donne que deux
extraits tirés du Roman de Rou, et il n’a pas trouvé de meilleure édi¬
tion à suivre que celle de Pluquet, qui ne vaut absolument rien l . On
est étonné de ne pas voir le nom de Rutebeuf parmi les poètes satiri¬
ques. Froiss^rt a fait de bien jolies pastourelles, des ballades gracieuses;
il eût été indispensable de choisir quelques pièces de ce poète qui rimait
avec une facilité tout ovidienne, comme a dit Sainte-Beuve, d’autant
plus que maîtres et élèves ne connaissent Froissart que comme histo¬
rien. Les morceaux de prose sont trop rares; il n’y en a que quinze ou
seize, parmi lesquels les Lois de Guillaume le Conquérant , texte hé¬
rissé de difficultés, tout à fait propre à rebuter des novices dans l’étude
x - Ces deux vers feux n'ont pas attiré l’attention de M. Aubertin :
Plai\ de biés, plais de moutes .
E a sagetes e a tineus.
Nouvelle série* XVI.
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REVUE CRITIQUE
33 4
du vieux français, et d’ailleurs trop altéré pour être un bon spécimen
de langue. Le recueil de M. A. est pourtant assez volumineux, mais les
notes et notules sont si abondantes, semées avec tant de profusion
qu’elles occupent souvent plus de la moitié des pages. Il y en a assuré¬
ment de bonnes et d’utiles, mais, quand une remarque a été une fois
faite sur tel ou tel mot, à quoi bon répéter à satiété cette remarque cha¬
que fois que ce mot se rencontre? Dans un extrait de Villehardouin
« Contremont » se présente trois fois, trois fois il est expliqué. Il en est
de même pour « Contreval , » p. 35 , 280, 329, 333 . La négation
« ne, * qui revient sans cesse, a toujours cette petite note : « ne ni
(nec) », p. 46, 52 , 119, 125, 126, 161, 212, 319, 324, 355 . — « Si 1
ne se présente jamais sans que M. A. ne le saisisse au passage : « si du
latin sic, ainsi, » p. 8, 10, 22, 23 , 3 o, 33 , 37, 47, 5 o, 59, 92, 97, 98,
101, 119, 120, 127, 129, 139, 140, 208, 212, 214, 224, 259, 261, 269,
276, etc., etc. — « DunCy alors, du latin tune , » (ce qui n’est pas cer¬
tain, T'initiai ne se transformant jamais en D) — el mis pour en le, >
— € es mis pour dans les * — « adonc du latin ad tune, » voilà les
remarques qui sautent au yeux à presque toutes les pages. Un glossaire
des mots difficiles, placé à la fin du volume, eût été préférable à ces no¬
tes continuellement répétées, dont un bon nombre d’ailleurs sont su¬
perflues, et quelques-unes inexactes ou erronées, ce qui est grave dans
un ouvrage qui prétend a être classique. Ainsi nous croyons qu’il était
parfaitement inutile d’expliquer les mots suivants : eschappatoire,
p. i 56 , boulanger, 170, escuelle , 171, angoisse , 180, passe-passe,
188, confort , 197, 202, huis, 204, esbatentent y 206, porte-panier, 219,
cardinales (vertus), 3i2, mystère , 317, cape, 3 i 8 , larron , 319, re¬
garder , 320 , argentier, 32 1 Dans ce vers du roman de Rou, « Boche -
1 er de bele invente » ; p. 55 , expliquer bâche 1 er per « cultivateur »,
est plus que hasardé. — « En la champaigne out un fossé Normant l’a¬
vaient adossé ; En belivant l'orent passé, » p. 61; « en belivant, » en
combattant, dit M. A. : « dans l’ardeur du combat ils l'avaient franchi
sans prendre garde ». Il fallait consulter Godefroy aux mots belif et
beliver. — « Plure des oilz, son cors detuert, » p. 48; « tord, épuise, a
lisons nous en note, c Tordre a est à peu près juste, mais < épuiser »
n’a rien de commun avec t détordre ». A la page 338 , note 5 , a on di¬
sait despis et même despit pour signifier mépris, » que signifie cette re¬
marque? M. A. semble ne pas s’être aperçu que la première forme est le
cas sujet, la seconde la cas régime. « Vous avez la plus grant affaire et
le plus perillos entrepris que onques gens entreprissent », p. 277; rien
de plus clair que cette phrase de Villehardouin, mais M. A. a vu un
substantif, dans le participe « entrepris », d'où cette note étrange : « En¬
trepris. Ce substantif, formé du verbe « entreprendre », et qui n’est
qu une sorte de participe, prend ordinairement la forme du féminin ;
« entreprise, entreprinse » — « Par mautalent palla à lui, » p. 141 ;
«f pal la, pour parler, forme primitive paroler. » Il y a longtemps ce-
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d’histoire et de littérature
335
pendant que Ton a démontré qu’ii n'a jamais existé un infinitif « pa-
roler, » et M. A. devrait avoir lu sur ce verbe une note très intéressante
de M. Cornu dans la Romania. — * Ma pucele va tuer deux chapons,
por déporter à sause aillie », p, 96; « déporter à sause aillie , » ac¬
commoder à la sauce piquante, explique M. Aubertin. « Déporter »
n’a jamais en cette signification; il faut mettre une virgule après ce
verbe, et le sens sera « pour nous divertir. » — « Se contoier », p. 99,
note 4, = être fier, s'enorgueillir, et non « se flatter de, se promettre de,
se dire à soi-même. » — « Et si vous di tout en oiant », p. 110, note
9; « vous m'entendant » offre une explication inexacte. C’est une locu¬
tion bien connue dont le sens est « à haute voix, coram omnibus , »
équivalent de « en oiance, en audience. » A propos du mot « déluge »
= destruction, massacre, M. Aubertin prétend qu’on disait aussi « dé¬
loger » 1 = dévorer. Cela est plus que douteux; en tout cas, ce mot
n'appartient qu'à la langue savante du xvi« siècle, et signifie inonder,
noyer :
Quant un ravage long déluge nos guérets.
(Du Bartas, 2 0 jour de la semaine, 47, édit. 1610.)
Il est aussi regrettable, à notre avis, que lesextraits de vieux français
soient, pour la plupart, suivis d’une traduction en français moderne :
c’est favoriser, nous ne le savons que trop, la paresse naturelle chez les
enfants, et leur ôter le plaisir de vaincre quelques difficultés.
A. Delboulle.
a il. — Otto Lyon, Mlnne-und MeUtersang, Bllder au» der Geachlchto
altdeutacher Uteratur* Leipzig, Grieben. ln-8, 444 p. 6 mark 40.
— Gœtliea VeiiiwltnU* zu H.lop*lock, llire gelstlgen, llterarlaclicn
vincl peraoenllclaon Bezloliungen. Leipzig, Grieben. In-8 , i 34 p.
JL’ouvrage de M. Otto Lyon sur les Minnesinger et les Meistersin -
est, comme le titre l’indique, une suite d’études ou mieux d’esquis¬
ses sur l’histoire de la littérature allemande du moyen âge; c'est, ainsi
que le dit l’auteur dans son avant-propos, un livre destiné au grand pu¬
blie, et qui a pour but d’éveiller l’amour du passé, de faire des amis à
l’antiquité allemande. Il nous semble toutefois que le livre est bien
gros, bien compacte (444 pages!) pour le public auquel il s'adresse, et le
prix (8 francs) un peu trop élevé. Pourquoi l’auteur n’a-t-il pas fait im¬
primer en petits caractères la longue traduction qu’il donne du Wins-
beke (pp. 24-36) et du Frauendienst d’Ulrich de Lichtenstein (pp. 53 -
j cx>) ? On par ces chiffres, que sur les cent premières pages de
!-ouvrage, soixante ne sont que traduction. Ces traductions qui forment
x . XI est vrai que Godefroy donne deluger et renvoie à diluvier, mais il ne cite
p^înt ‘exemple du premier verbe.
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336
REVUE CRITIQUE
la plus grande moitié du volume, sont exactes et animées; elles rendent
l'allure et le mouvement de l’original; elles prouvent que M. L. con¬
naît bien l’allemand du moyen âge et qu'il a du goût; mais pourquoi
les unes sont-elles en vers, et les autres en prose? Hâtons-nous d'ajouter
que les vers sont bien tournés. En somme, l’ouvrage de M. L. ne ren¬
ferme pas d’erreurs et d’inexactitudes graves; mais il nous paraît trop
long; le style même de l’auteur est diffus; ses réflexions sont justes, sen¬
sées, parfois ingénieuses; mais il se répète un peu, il abuse des épithètes.
Nous lui conseillons de diminuer considérablement les citations, de
supprimer en certains endroits une ou deux phrases, un ou deux adjec¬
tifs qui sont de trop, d'exprimer avec plus de discrétion et de sobriété
soit l’éloge, soit l’admiration, en un mot d’alléger son volume au moins
de la moitié ; s’il est plus concis, s’il supprime sans pitié tout ce qui est
superflu, s’il ne cite de tant de poésies que le plus beau et le plus parfait,
son livre trouvera l’accueil que probablement il n'aura pas sous sa
forme actuelle.
Nous ne ferons que citer le titre du second ouvrage de M. L.; nous
en avons déjà rendu compte ici-même; mais l’ouvrage n’était alors
qu’une dissertation de doctorat ; depuis, il est devenu un livre de vente,
et l'auteur nous fait même l'honneur de mentionner notre article dans
sa préface; il l’a, dit-il, lu avec grand plaisir, mais il ne partage pas,
malgré tout, notre opinion sur certains points; il est vrai, ajoute
M. Lyon, que ces points sont précisément ceux « in denen die deutsche
Anschauung von der franzôsischen abzuweichen pflegt ». Vérité en
deçà des Pyrénées, erreur au-delà ; cependant, pour ne citer que ce seul
témoignage, le regretté Herbst traite d'« Albernheiten », c’est-à-dire de
sottises les racontars de Klopstock, de Voss et autres sur la vie excentri¬
que du grand-duc et de Goethe (Fo$s, I, p. 3 oi).
C.
212. — Montua Carpeutana lierolce desci-Ipta, Descri pci on de Madrid
compuesta à fines del siglo xvi en exametros latinos par Enrique Cock, natural
de Gorkum, y publicada por vez primera con introduccion y notas por A. Morel-
Fatio y A. Rodriguez-Villa. Madrid, imprenta de D. G. Hernando, calle de
Ferraz, num. i 3 , i 883 . In-18, 61 p.
Ce petit et très curieux volume est divisé en deux parties : la pre¬
mière (p. i-32) renferme une introduction en espagnol, de MM. A.
Morel-Fatio et Rodriguez Villa, sur le poème épique latin composé à la
fin du XVI e siècle par le Flamand Cock en l’honneur de Madrid (f/rsa-
ria sive Mantua Carpentana ); la seconde partie (pp. 33 -61) contient la
dédicace de Cock au cardinal Granvelle et le texte de son poème, en
tout 471 vers.
Le poème de Cock n'est pas un modèle d'élégance; le style latin de ce
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d’histoire et de littérature
33 7
Flamand du xvi« siècle est très disgracieux et incorrect, (excepté dans
les endroits où il s’empare bravement d’un vers ou d'un demi-vers de
Virgile ou de tout autre poète de l’antiquité) ; il parle ainsi des algua-
zils :
Uctores habet elatos Ursaria multos ,
Qiios alguaziles, Poenorumvoce , vocamus . (v. 256-257.)
et il dit du Prado, où ont lieu les rendez-vous d’amour :
Aptus adultei'io et plantandi corrtua campus (v. 83 ).
Mais, comme les deux éditeurs le font remarquer dans leur introduc¬
tion, Cock a longtemps vécu à Madrid qui était devenu sa patrie adop¬
tive ; il a composé deux relations historiques qui sont très appréciées
(voir la note 1 des pp. 4 et 5 ) ; il est impartial, véridique, et il sait obser¬
ver. Il décrit non-seulement le Prado où se réunissent les amoureux
et les « sportsmen » du temps, mais le pont de Tolède, le Manzanares,
les églises et les couvents de la ville, le palais royal (v. 196-231 ) 1 ; il
expose le gouvernement du pays et celui de la cité ; il parle longuement
des courses de taureaux, etc. On ne peut que savoir gré à MM. A. Mo*
rel-Fatio et Rodriguez Villa d’avoir si bien édité un texte intéressant,
qui mérite, comme ils le disent, « alguna atenciôn por parte de los
eruditos y de los aficionados à estudios histôricos » ; le poème de Cock
est un des documents les plus précieux qu’on puisse désormais consul¬
ter pour la connaissance des mœurs et des coutumes de la société madri¬
lène à la fin du xvi« siècle.
ai 3 . — JLe* grandi écrivain* de la France» nouvelles éditions publiées sous
la direction de M. Ad. Regnier, membre de l’Institut, sur les manuscrits, les
copies les plus authentiques et les plus anciennes impressions avec variantes,
notes, notices, lexiques, portraits, etc. J. de La Fontaine. Tome I. Paris, librairie
Hachette, i 883 , in-8 de cc-xxiv-471 p. Prix : 7 fr. 5 o.
Je ne puis écarter, en commençant ce compte-rendu, une pensée pro¬
fondément douloureuse. Un de nos plus savants et de nos plus chers
collaborateurs, qui était pour moi un de ces amis qui valent un frère,
M. Charles Defrémery, se serait certainement chargé, — s'il nous avait
été donné de le garder parmi nous tel qu’il était autrefois, c’est-à-dire
possédant au plus haut degré toutes les facultés qui font le critique ac¬
compli, — de présenter le nouveau La Fontaine à nos lecteurs. Nul
n’ignore que notre ami, qui était sans contredit un des premiers orien-
1. On trouve dans ce passage les deux vers :
Nam gémit Italus et Germanus vociferatur,
Belga canit, duras voces emittit Iberus ;
les éditeurs rapprochent de ces deux vers le passage suivant de l’auteur de « La
Lx>zana andaluza » : Itali ululant, Hispani plangunt, Galli canunt (p. 32 5 ).
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REVUE CRITIQUE
talistes de l’Europe, était aussi un des plus admirables connaisseurs de
la littérature du xvn« siècle. L’écrivain de ce beau siècle qu'il aimait le
plus, qu’il connaissait le mieux, c’était La Fontaine. Il avait réuni
dans sa magnifique bibliothèque un grand nombre d’éditions de l’in¬
comparable fabuliste ; il avait joint à ces éditions anciennes et nouvelles
presque tous les ouvrages ou opuscules relatifs à son auteur favori. Per¬
sonne, parmi les érudits d’aujourd’hui, n’aurait pu rendre compte avec
plus de compétence du volume que j'ai sous les yeux. Au poignant re¬
gret d’avoir perdu un ami dont la bonté et le dévouement ne peuvent
être assez loués, s’ajoute pour moi le regret particulier d’avoir vu dispa¬
raître un critique dont chaque article était une bonne fortune et qui, au
sujet de La Fontaine notamment, aurait à coup sûr enrichi notre re¬
cueil d'un inappréciable trésor d’observations l .
Cet éminent érudit n’aurait pas manqué de déclarer que l’édition
nouvelle est infiniment supérieure à toutes les éditions précédentes. Il
aurait certainement été aussi satisfait de l’établissement du texte, que
de la rédaction de la notice biographique et des notes.
Nous allons résumer d’abord les données de Y Avertissement de
M. Henri Régnier. Nous examinerons ensuite les diverses parties du
volume.
Ce volume était déjà tiré, a quand les funestes événements de 187071
sont venus tout interrompre et suspendre ». Si les éditeurs n’ont pas,
« comme pour d’autres écrivains de la Collection, repris avec courage,
dès le lendemain de nos désastres, la tâche commencée, c'est qu’il ne
suffisait pas de publier le premier volume, il fallait aussi se préoccuper
de la suite ». Or, pour cette suite, on s’était trouvé arrêté, même avant
la guerre, par l’empêchement que voici : M. Julien Girard, aujourd'hui
proviseur du lycée Condorcet, qui, il y a bien longtemps, du vivant de
M. Louis Hachette, s’était chargé d'éditer le La Fontaine, avait été en¬
levé à ce travail par d'autres devoirs absorbants. Par bonheur, il avait
achevé déjà son annotation des Fables; elle forme le fond du commen¬
taire nouveau. Ici reproduisons en entier un passage où la part de cha¬
que collaborateur est bien déterminée, où le cuique suum est nettement
appliqué (p. 11 non numérotée) ; « Je dis le fond, parce que M. Girard a
bien voulu accepter, pour les notices et les notes des six premiers livres,
mainte addition proposée par le directeur de la Collection, qui a pensé
que, dans la notice dont est précédée chacune des fables, il convenait
de développer l’indication des sources, les rapprochements intéressants,
d’y joindre les appréciations et les réflexions les plus remarquables, soit
d’ensemble, soit de détail, dont beaucoup de fables avaient été l'objet
chez tel ou tel de nos bons auteurs. De même, dans le commentaire pro¬
prement dit, dans les notes au bas des pages, si, pour les livres de lec-
1. Aucun de nous n'a oublié l’article dans lequel M. Defrémery jugea d’une façon
si remarquable le livre spirituel, ingénieux, charmant, mais insuffisant de M. Saint-
Marc Girardin : La Fontaine et tes fabulistes (N° du 26 octobre 1867, pp. 267-270).
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d’histoire ET DE LITTÉRATURE 33g
ture plutôt que d’étude approfondie, le bon goût impose grande sobriété,
il a paru qu’on pouvait, qu’on devait ici, vu le caractère de la Collec¬
tion, se renfermer dans de moins étroites limites pour les explications
de choses et de mots, la langue, le style, les imitations voulues, et même
les ressemblances fortuites, quand elles offrent quelque intérêt. Dans les
livres VII et VIII, l’extension, au sens qui vient d’être dit, est, en
grande partie, l’œuvre de M. Desfeuilles; dans les quatre derniers, IX i
XII, celle du signataire de cet Avertissement , qui a de plus revu, avec
la constante assistance de son père, tout l’ensemble de cette seconde
moitié 1 ».
Le texte est la reproduction « scrupuleusement exacte, en tenant
compte des errata , du dernier texte des Fables publié du vivant de l’au¬
teur et sous ses yeux, c’est-à-dire des impressions successives de 1678-
1679-1684 ». Seulement, « au lieu de suivre la division très confuse,
très arbitraire, de ces impressions », on a fort judicieusement adopté
celle de l’édition de 1705 (Paris, H. Charpentier), où les livres furent
pour la première fois numérotés depuis I jusqu’à XII * ».
Les variantes qu’on peut attribuer à l’auteur lui-même, en d’autres
termes celles que fournit la comparaison des éditions venant de lui, an¬
térieures à sa dernière, sont rares et généralement insignifiantes. Si,
avant la publication première, La Fontaine, comme le dit fort bien
M. H. R., « corrigeait très soigneusement ses fables, s’appliquait à faire
disparaître jusqu’aux moindres fautes typographiques, substituant même
des cartons aux pages qui en offraient de trop choquantes, il ne leur a
fait subir que peu de changements après qu’elles eurent vu le jour ».
Les éditions rapprochées du texte définitif, avec relevé des différences,
sont en assez grand nombre, à commencer par l’édition de Paris, 1668,
à finir par l’édition donnée dans la même ville par la compagnie des li¬
braires en 1729. On trouvera dans les deux avant-dernières pages de
VAvertissement une indication sommaire des diverses éditions consul¬
tées, sur laquelle la Notice bibliographique fournira tous les détails
utiles.
La Notice biographique sur la Fontaine (pp. i-cchi) est l’œuvre [de
M. Paul Mesnard. M. H. R. la juge très bien quand il dit, à la fin de
Y Avertissement : « Le lecteur pourra reconnaître dans ces pages l’au¬
teur de la biographie de M m ® de Sévigné, de l’édition de Racine, et des
Notices que doit déjà à M. Mesnard notre édition de Molière, en atten¬
dant qu'il y ajoute une Vie de notre grand comique, telle que nous
nous la promettons de lui ». M. Mesnard a eu le difficile mérite de dé-
1. Comme l’impression du tome I était achevée avant l’année 1870, on ne s’éton¬
nera pas qu’il n’y soit pas fait mention, dans les notes et notices, de publications
postérieures qu’il eût été parfois opportun de citer, entre autres, « de la très inté¬
ressante édition de M. Moland, publiée de 1872 à 1876 ».
2. M. H. Regnier emprunte à Walckenaer ( préface sur les Fables de La Fontaine ,
1827) un passage où est parfaitement démontrée l’impossibilité de suivre le singu¬
lier mode de division des premières éditions.
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REVUE CRITIQUE
340
passer Walckenaer lui-même, qui semblait pourtant avoir traité le sujet
d’une manière définitive dans son Histoire de la vie et des ouvrages
de Jean de la Fontaine . « En repassant sur ses traces », dit le nouveau
biographe (p. iv), nous aurons encore à faire quelques rencontres, qui
ne se sont pas offertes à ses investigations; et, sur quelques points, des
travaux plus récents et nos propres recherches nous rendront possible
ou de le compléter ou de le rectifier ». M. Mesnard [Ibid.) appelle le tra¬
vail de son devancier « agréable et savant ouvrage ». Les mêmes épithè¬
tes s'appliquent plus justement encore à sa notice si finement écrite et si
profondément fouillée. L’excellent biographe a eu l'heureuse chance de
pouvoir interroger soit à Paris, soit à Château-Thierry, divers docu¬
ments inédits qui lui ont permis d’apporter dans les renseignements sur
La Fontaine et sur sa famille une précision qui ne laisse rien à désirer.
Parmi les choses les plus nouvelles et les plus piquantes de la Notice ,
j’indiquerai tout ce qui regarde Marie Héricart, la femme du fabuliste
(pp. xxx-xlvi). M. Mesnard prend contre l’abbé d’Olivet, contre la tra¬
dition, la défense de M me de La Fontaine, et l’habile avocat gagne com¬
plètement la cause d’une cliente trop méconnue. On remarquera aussi
ses révélations touchant les nombreux amis et les amies plus nombreu¬
ses encore du bon La Fontaine. Un éloge bien dû à M. Mesnard, et
qui, j’en suis sûr, le touchera plus que tout autre éloge, c’est que non-
seulement ses deux cents pages font admirablement connaître son héros
et le milieu où il vécut, mais encore qu’elles font mieux aimer « ce
beau génie, cette âme sans plus de replis que celle d’un enfant ». Il y a
tel et tel passage de la Notice où le biographe semble, en quelque sorte,
avoir emprunté à La Fontaine, pour le caractériser, quelque chose de
sa spirituelle bonhomie.
Je n'ai presque aucune observation à soumettre à l’auteur d'une no¬
tice qui n’est pas moins exacte qu'attachante. Ne me trouvera-t-on pas
critique bien minutieux si à cette désignation trop vague (p. xiv,
note 2) : Il parut, vers le même temps (c’est-à-dire vers 1621), une autre
traduction française par Pierre d’Audiguier, du traité espagnol du
P. Rodriguez, intitulé Pratique delà perfection chrétienne, je substitue
cette désignation précise : la traduction de Pierre d’Audiguier parut en
1623 (Paris, Gervais Alliot) ? — M. Mesnard surnomme Voiture (p. xvm)
Y écrivain cher à Vhôtel de Rambouillet . Voiture fut-il bien aussi cher
que cela au célèbre hôtel? Il me semble qu'on l*y toléra toujours plus
qu’on ne l’y aima. On sait que Montauzier le détestait cordialement et
que la princesse Julie eut avec lui plus d'une retentissante querelle. On
sait encore de quelles railleries son origine fut l’objet dans l’entourage
à!Arthénice . Les Historiettes de Tallemant des Réaux et les Lettres
de Chapelain 1 ne permettent guère de croire que Voiture, loin d’être le
1. A propos des Lettres de Chapelain , constatons que M. Mesnard ne paraît pas avoir
connu les lettres écrites à La Fontaine par l’auteur de la Pucelle . On les trouvera
dans le second volume du recueil, dont on achève en ce moment d'imprimer les Tables.
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d’histoire et de LITTÉRATURE 341
favori de la Chambre bleue , ait jamais été complètement accepté dans
la ruche dont la marquise de Rambouillet était l’élégante reine. Autre
objection. M. Mesnard dit (p. lxvi) de Claudine Le Nain *, la dernière
femme de Guillaume Colletet : « Servante d’abord du poète académi¬
cien, et la troisième que de cette humble condition il avait fait passer
au rang de son épouse, la belle Claudine avait séduit La Fontaine par
ses jolis vers, plus encore par sa jolie figure ». J’ai jadis eu l’occasion,
en écrivant une notice sur Guillaume Colletet dans l’introduction aux
Vies des poètes gascons tirées du manuscrit autographe de la biblio¬
thèque du Louvre *, de rappeler que, malgré les plaisanteries de plu¬
sieurs des contemporains de l’heureux époux de Claudine, la réputation
à'ancillomanie qui lui a été faite n’est pas incontestablement établie.
En effet, un intime ami de notre homme, son confrère comme avocat
au parlement, P. Cadot, affirmait dans VEloge et abrégé de la vie de
M . Guillaume Colletet , etc., mis en tête de la copie des Vies des poè¬
tes français , anéantie, en mai 1871, avec l'original, qu'il « n’eut que
deux femmes en sa vie et non pas trois , comme quelques-uns ont cru ».
Cadot affirmait encore avec l’autorité d’un narrateur qui avait vu de
près le ménage de son confrère et ami, qui avait pénétré dans tous les
détails de cet intérieur si pittoresque, que la première femme de Colletet
n'avait jamais été sa servante et qu'il ne se mésallia qu’en épousant
Claudine, laquelle, ajoute-t-il, comme pour excuser l’entraînement in¬
sensé du pauvre quinquagénaire, « était d’une beauté à faire des adora¬
teurs 3 ». Il ne me reste plus qu’une observation à présenter. C’est au
sujet de ce passage (p. cxcv) sur La Fontaine se disposant à quitter la
maison si doucement hospitalière de M me de La Sablière, après la mort
de sa dévouée protectrice : « On raconte qu’il se préparait à en sortir
[de l’hôtel de la rue Saint-Honoré], lorsqu’il rencontra M. d’Hervart,
qui lui offrit de venir demeurer chez lui. J'y allais, répondit-il. C’est
un des mots les plus charmants qu’ait jamais inspirés l’amitié confiante.
Il est digne de l’auteur de la fable des Deux amis; et cette fois nous ne
craignons guère d’avoir affaire à la légende, qui n’a pas coutume d’in¬
venter si bien ». Et pourtant j’ai bien peur que ce mot d’une naïveté si
touchante ne soit un mot purement légendaire! Aucun des contempo-
1. Et non Le Hain , comme on Ta si souvent imprimé, même du temps de Colle¬
tet. J’avais cru pouvoir, après M. Paulin Paris, en son commentaire des Historiettes ,
adopter la forme Le Hain admise même, semblait-il, par le mari de Claudine. Mais
M. Jal a lu très distinctement Le Nain dans la signature de la seconde femme de
Colletet, et, comme je doutais desa lecture, il daigna m'envoyer, à titre de pièce de
conviction, le fac-similé de cette signature, en me disant, comme dans l'hymne du
jour de Pâques : Noli esse incredulus. 11 fallut bien se rendre et reconnaître que le
nom Le Hain avait été créé et mis au monde par un maladroit imprimeur.
a. Paris, 1866, grand. in-8°, p. 16, note 1. Conférez Revue critique de 1867,
semestre, article sur le Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, p. 3 oi.
3 . Devant ces déclarations si catégoriques, Viollet-le-Duc ( Catalogue de la biblio¬
thèque poétique) et Asselineau (dans les Poètes français de Crepet), ont repoussé
tous les témoignages contraires comme dénués de la moindre valeur.
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REVUE CRITIQUE
342
rains de La Fontaine n’en a jamais entendu parier. Presque tout le
xvw e siècle même s’est écoulé saus qme personne Tait répété. Ce n’est
quen 1774 qu’il parait pour la première fois dans: Y Eloge de La Fon¬
taine par Cbamfort. lin éloge académique 1 source suspecte s’il en fut!
Cbamfort avait certes assez d’esprit pour imaginer un aussi joli mot, si
bien en situation, pour ajouter à son discours cette perle fatrsse qui pa¬
raît si pure et de si belle eau. M. Mesnard a montré avec beaucoup de
sens et de critique combien d'anecdotes fabuleuses ont été peu à peu in¬
troduites dans la biographie-de La Fontaine. Il me pardonnera de re¬
garder comme fabriquée après coup — on ne peut plus ingénieusement
— une repartie qui a seulement vu le jour près de 80 ans après la mort
du bon homme l . II m’eu coûâe assurément de rejeter, comme non authen¬
tique, cette repartie qui, depuis Chamfbrt, a toujours été tant admirée
et qui ressemble à s’y méprendre à un cri du cœur . Mais s’il fout beau¬
coup aimer Platon... je veux dire La Fontaine, il faut encore plus ar¬
mer la vérité, à tout il faut préférer la vérité . C'est la devise de hr
Revue critique , et j'ose dire que c’est aussi la mienne.
La Notice est suivie (pp. ccv-ccx) des Pièces justificatives que voici :
Acte de baptême de Jean de La Fontaine (extrait du registre de la pa¬
roisse de Saint-Crépia,à Château-Thierry); Acte de baptême de Cîaude
de La Fontaine, frère puîné du poète (même registre); Acte de baptême
x. Le P. Adry a prétendu que le trait est rapp o rté pat Marmontel; M.. Mesnarrf
Ta vainement cherché dans les œuvres de ce littérateur : je n’ai pas été plus heureux.
D’ailleurs, Marmontel, né 28 ans après la mort de La Fontaine, ne saurait avoir L’aur
torité d’un contemporain, et son témoignage ne pourrait être admis que sous bé¬
néfice d’inventaire. Cette dernière expression me rappelle que, dans une note de la
page 36 a, sur ces deux vers de la fable V Oracle et Vimpie :
Et qui croyoit en Dieu pour user de ce mot.
Par bénéfice d’inventaire,
on lit : « La Fontaine n’est pas le premier qui ait fait un. tel emploi de cette locur-
tion. L’Estoile, dans ses Mémoires (tome I, p. 83 , édition Petitot, fin de i 573), dit
à propos de Jodelle : il étoit d'un esprit prompt et inventif ; mais paillard , ivivgne,
sans aucune crainte de Dieu, qu’il ne croyait que par bénéfice d’inventaire ». Mal¬
heureusement pour cette citation, elle manque au texte autographe de l’Estoile sir mi¬
nutieusement, on peut presque dire si photographiquement reproduit dans l’édition
louaust. La phrase attribuée au chroniqueur dans la très mauvaise édition de la
collection Petitot est tout simplement, une addition faite par une main étrangère,
une interpolation qui a fini par devenir pour la plupart chose sacramentelle, car
presque tous ceux qui parlent de Jodelle regardent comme un devoir de la répéter.
On ne trouvera dans les Registres-Journaux de Pierre de l’Estoile (t.. 1 , 1876,
p. 48) que la mention d’un Sonnet fait sur la mort d } Etienne Jodelle, poète paré-
sien+par les Hugue&os.~ % sonnet qui était transcrit sur un feuillet aujourd’hui man¬
quant dans le manuscrit de la Bibliothèque Nationale. Faisons observer* de plun, qn*
Jodelle mourut en juillet x 57$ et que les Mémoires-Journaux dit grand audiencietda
la chancellerie ne commencent qu’à la mort de Charles IX ( 3 o mai:^74). U aurait faMu
peut-être faire remarquer encore que* dans le Dictionnai]'* deiattré* au mot ineeeir-
taire, sont indiqués, comme usuelles, les deux formes- soue héùsfion dHaremtaire,
par bénéfice d'inventaire , tandis que, dans les deux dernières éditions du Dictma-
naire de l'Académie , on n’admet que la première de ces formes^
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d’histoire et de littérature
3 4 3
de Marie Héricart, femme du poète ^extrait des registres de la paroisse
de Saint-Vaast, à la Ferté-Milon); Acte de baptême de Charles de La
Fontaine, fils du poète (extrait du premier des registres déjà cité) ; lettre
inédite à mademoiselle de La Fontaine, à Château-Thierry (écrite par
un La Fontaine qui n'est pas le notre) ; Tableau généalogique qui prouve
la parenté du poète Jean Racine et de Marie Héricart , femme de La
Fontaine , comme descendants de Pierre Drouart de Norroy, vivant
en 1400i Acte d'inhumation de La Fontaine (extrait du registre des sé¬
pultures de la .paroisse de Saint-Eustache de Paris); Acte d'inhumation
de Marie Héricart, veuve de Jean de la Fontaine (extrait des registres
mortuaires de Château-Thierry). Après les Pièces justificatives vient
Y Appendice (pp. ocxj-ccxxiv) ainsi constitué : Eloge de La Fontaine
par Fénelon (en latin); traduction de ce morceau ; note sur la sépulture
de La Fontaine; note sur les descendants de La Fontaine ; note sur les
portraits de La Fontaine, communiquée par M. Jules Maciet, membre
de la Société historique et archéologique de Château-Thierry, et divisée
en huit petits chapitres successivement consacrés à la miniature du Lou¬
vre, au portrait gravé par H. Pauquet, d’après Ch. Lebrun, au portrait
gravé par Ch. Duflot, au portrait peint par Fr. de Troy, au portrait
du musée de Reims, an portrait du musée de Versailles, au portrait
du musée de Château-Thierry, au portrait peint par Hyacinthe
Rigaud.
L’annotation des Fables «est d’une ampleur et d*ime richesse qui dé¬
passeront les espérances des lecteurs les plus curieux. Pour ma part (et
Dieu sait pourtant si je suis curieux!), je n'aurais jamais osé autant de¬
mander â l’érudition des commentateurs* Voici, du reste, le beau pro¬
gramme qui a été suivi tel qu'il est consigné dans une note de la pre¬
mière fable (p. 57) : « Pour faciliter les rapprochements, nous indiquons
en tête de chaque fable, dans un premier alinéa, les fables de sujet iden¬
tique ou analogue qui nous ont paru dignes d’être signalées, chez les
anciens, ou chez les modernes antérieurs à La Fontaine, ou chez ses
contemporains; nous ne mentionnons les écrivains postérieurs à notre
fabuliste que lorsqu'ils peuvent être l'objet d'une comparaison vraiment
intéressante. Dans un second alinéa, nous renvoyons aux fables ancien¬
nes contenues dus la Mythologie ésoptque de Nevelet, recueil où nous
pensons que La Fontaine a le plus souvent pris ses sujets ; mais nous
nous bornons à indiquer les pages, afin de ne pas répéter inutilement les
titres. Un troisième alinéa mentionne, quand l’occasion s’en présente,
certains recueils, imprimés ou manuscrits, où la fable a été reproduite,
comme les Manuscrits de Conrart, le Recueil de poésies chrétiennes et
diverses, le Recueil du P. Bouhours, etc. Nous marquons, lorsqu’il y
a. lieu, dans un dernier paragraphe, la source première de la fable, et,
quand ils sont remarquables par eux-mêmes ou dignes d’attention par
le nom de leur auteur, les jugements sur le sujet même ou l’ensemble,
et les allusions qui, ne se rapportant pas à un passage en particulier, à
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REVUE CRITIQUE
3^4
une idée, une expression, une tournure, mais à la fable entière, ne peu¬
vent trouver place dans les notes partielles *
Les commentateurs ont joint à leurs observations personnelles, très
abondantes et très recommandables, des milliers d’observations tirées
des études de leurs meilleurs devanciers, notamment de celles d’Adry,
de Chamfort, de Geruzez, de Robert, de Saint-Marc-Girardin, de Soul-
lié, de M. Taine et de Walckenaer a . Tout cela forme un ensemble qui
est à la fois des plus instructifs et des plus piquants. On fait, pour ainsi
dire, autour de chaque fable, un voyage d’agrément dans lequel on a
pour compagnons, pour guides, des hommes d’autant de savoir que d'es¬
prit, des hommes qui, à eux tous, ne laissent pas subsister une seule dif¬
ficulté, une seule incertitude. Je n’ajouterai qu'un mot pour constater
un résultat évident : les exquis petits tableaux qui, sous le nom de fa¬
bles, furent retracés par le plus inimitable des peintres ont enfin reçu
une bordure digne de toute leur beauté.
T. DE L.
f. Outre les notices qui sont en tête de chaque fable et les notes mises au bas des
pages, on trouve (à la fin du volume, Appendice , pp. 435-465) des citations diver¬
ses qui auraient été trop étendues pour être insérées ailleurs. Ces citations complé¬
mentaires sont empruntées à un grand nombre de recueils anciens et modernes que
bien peu de bibliophiles ont tous sous la main.
2. Les commentateurs ont un peu trop négligé les Etudes sur La Fontaine, ou no¬
tes et excursions littéraires sur ses fables, par Solvet, travail regardé comme estima¬
ble par un spécialiste tel que M. Defrémery (article déjà cité, p. 267). Ils ont encore
plus négligé l’édition des Fables donnée par Charles Nodier et totalement négligé, ce
qui est plus grave, l’édition soignée {soignée est bien le mot) par M. Ch. Marty-
Laveaux, dans la Bibliothèque el^evirienne , édition à laquelle ils auraient pu em¬
prunter plus d’une heureuse remarque. Je ne leur reprocherai qu’un autre péché
d’omission. A propos de ce vers de la fable iv du livre IV {Le jardinier et son sei¬
gneur) :
Peu de jasmin d’Espagne et force serpolet,
ils ont rappelé (p. 277, note 5 ) qu’il n’y avait pas bien longtemps qu’on connaissait
le jasmin d’Espagne en France lorsque La Fontaine publia ses fables, et ils ont cité
cette phrase de Loiseleur-Deslongchamps, dans le Dictionnaire des sciences natu¬
relles de Levrault (1822) : « On le cultive en Europe depuis près de deux cents ans. »
Comment n’ont-ils pas ajouté que l’introduction du jasmin dans nos jardins est due
à l’illustre Peiresc, un des savants qui ont le plus utilement travaillé à l’accHma-
tion en France de plantes et même d’animaux exotiques ? Voir sur les conquêtes
faites, à ce double égard, par ce grand homme les détails que nous fournit son bio¬
graphe, Pierre Gassendi {De vita Peireskii Liber quartus , à l’année i 63 o, édition
de La Haye, i65i, passim , et spécialement, en ce qui regarde le jasmin, gelsemi -
num Indicum, arborescent, semper virens , flore luteo, ac suavissime odorato , la page
3 4 2 ).
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D’HISTOrRE ET DE LITTÉRATURE 3^.5
214* ■” Stein, sein Lebon und seine Zelty Deutschland und Preusten
Im Zeltaltei* Napoléons, von J. R. Seelky, Professor der neueren Geschichtc
an der Universitœt Cambridge. I Band, aus dem Englischen uebersetzt von
Emil Lehmann. Gotha, F. A. Perthes. In-8 , xxii et 432 p. 6 mark.
Ce livre sur Stein a d’abord paru en anglais ; l'auteur est professeur
d’histoire moderne à l’université de Cambridge ; mais la traduction al¬
lemande qui vient de paraître et qui se lit d’un bout à l’autre avec faci¬
lité, sera la bienvenue. Le traducteur, M. Lehmann, n’a mis en alle¬
mand que la première partie de l’ouvrage, depuis les débuts de Stein
jusqu'à ses négociations avec Daru ; mais la seconde partie qui est con¬
sacrée aux grandes réformes du ministre prussien ne tardera pas, dit-on,
à être publiée.
On possédait déjà en Allemagne une Vie complète du grand ministre ;
c’est la biographie publiée par Pertz en six volumes (Das Leben des
Ministers Freiherrn von Stein). Mais M. Seeley n'a pas voulu seule¬
ment retracer la vie du baron de Stein; à l’origine, il avait même le
dessein de retracer le grand changement qui s’accomplit en Allemagne
et en Prusse au temps de Napoléon, mais il se convainquit peu à peu
qu’il valait mieux traiter ce sujet en l’appuyant et l’attachant, pour
ainsi dire, à la vie d'un seul homme qui pouvait passer pour le repré¬
sentant de sa nation et de son époque. Ce n'est donc pas une simple
biographie de Stein, un Lebensbild que nous avons devant nous; c’est
aussi un Zeitbild ; c’est aussi l’époque où Stein a vécu et agi, et,
comme l’indique le sous-titre de l’ouvrage, l'histoire, tracée à grands
traits, de l’Allemagne et de la Prusse au siècle de Napoléon. Le livre
de M. S, diffère absolument de celui de Pertz; il est vrai que le
professeur anglais a puisé la plupart des matériaux qu'il emploie dans
l’ouvrage de Pertz; il reconnaît que la publication de l’historien alle¬
mand est de beaucoup la plus importante sur le sujet, plus importante
même à elle seule que toutes les autres publications relatives au baron
de Stein; c’est Pertz qui lui a fourni le cadre de son œuvre; c’est dans
Pertz qu’il a trouvé une foule de documents qu’il cite lui-méme en en¬
tier ou en partie; Pertz avait eu communication des papiers de la fa¬
mille de Stein, et il reproduit des conversations et des propos du minis¬
tre, en même temps qu’une grande quantité de dépêches diplomatiques,
de rapports ministériels, d’ordres de cabinet, de textes de lois, d’extraits
de brochures politiques. Mais M. S. ne s'est pas borné à tirer de
Pertz ce qu’il y a de meilleur et de plus intéressant ; le livre anglais
n’est pas un résumé ou une adaption du livre allemand ; il y a bien des
endroits où M. S. ne partage pas l’avis de son devancier, où il
ajoute, retranche, modifie, sans s’attacher servilement à Pertz. En un
mot, il a complètement remanié et transformé le sujet. Il écrivait d'ail¬
leurs pour le public anglais, et non pour le public allemaud : Pertz
suppose que ses lecteurs connaissent le monde où vit et se meut son
héros ; il ne s’est pas occupé à peindre le fond de la scène et ses en-
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REVUE CRITIQUE
3 4 6
tcmrs; M. S. sup pos e que *aes lecteurs ne coonaitaest absolument
rien de la matière tjull traite, et il décrit avec soin tout ce qui peut ai¬
der à faire comprendre la vie de Stein, tout ce que Pertz a négligé
comme accessoire; il nous montre, dit-il lui-même, Stein à cause de
son temps, et le temps de Stein à cause de Stein. Ajoutons que depuis
l’apparition du grand ouvrage de Pertz, près de trente années se sont
passées; des documents, que Pertz n’a pas connus, abondent sur l’his¬
toire de la Prusse et de l’AUenugne à l’époque du premier JElmpire ; les
deux volumes des Mémoires de Hardenberg puhliés en 1877 par
Ranke; les Papiers de -Schôn publiés en quatre volumes (1875-1876);
les Mémoires d’un neveu de -Stein, le comte Senfft (1863); les docu¬
ments laissés par un homme d’état hanovrien, Ompteda, et parus en
trois volumes ( 1869).; les biographies de Sdxamhorstpar Klippel (1869),
de Gneisenau par Peutz (1864-1865), du baron de Vincke par Bodel-
schwingh (18 5 3 ), de York par Qroysen (1 85 r-i 85 a) r les ouvrages de Max
Duncker sur € la Prusse pendant l’occupation française », de W. Onc-
ken sur « l’Autriche et la Prusse dans la guerre de 1813 etc., etc.
M. S. a consulté ces divenses publications, -qui lui ont surtout servi
& peindre les collègues et collaborateurs de Stein, üardenherg, Scharn-
horst, Schôn, Niebuhr, Guillaume de.Humholdt.
;Tel est, en effet* un des grands mérites de l’ouvrage de M. S. ; il
fort revivre non-seulement le baron de Steia, mais tous ceux qui ont,
comme lui et avec lui, contribué au relèvement de _la Prusse, et qui
forment comme l’état-major du grand ministre. Non pas que M. S.
fasse honneur à.son héros.de tout ce qui s’est exécuté pendant son mi¬
nistère. Nous relevons, ici encore, une de ses principales qualités, son
iippartialité; il met Stein en évidence avant tous les autres, il loue ses
efforts, .ses actes remarquable^ la force de .sa volonté et la grandeur de
son caractère ; mais il sait éviter le défaut presque inévitable de tant de
biographes; iln’cxalte pas son héros outre mesure; il ne le considère*
dit-il lui-même v (p- 812), que comme « primus inter pares ». Le nom
de .Stein, qui revient .à presque toutes les pages, n’obscurcit pourtant
pas les noms de üardenherg et de Scharnhorst ; les dignes auxiliaires
de Stein ne rentrent pas dans l’ombre; eux aussi sont en pleine lumière*
comme ils le méritent, et occupent le premier plan. M. S. s’efforce
d’accorder à chacun selon ses oeuvres; lorsqu’il traite, par exemple* du
fameux édit d'émancipation, il fait avec justesse et justice la part de
S t ei n et de Hardenbeig z ce n’est pas Hardenberg qui a proposé et
créé, à proprement parler, Jtoute la législation à laquelle se rattache le
nom de Stein; mais.il estie premier .homme d’état qui ait approuvé le
plan de réforme et lui .ait .souhaité la hienvenue; toutefois, ajoute à peu
près M. S., si c’était rendre un grand service que de recommander
chaudement un plan aussi hardi* ce n’était pas Hardenberg qui aurait
pu d’exécuter ; c’était un Jxoxnme de cour ; il fallait un homme impé¬
rieux, .d’une infatjygable ténergie et d’une fermeté implacable, qui sût
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d'histoire et de LITTÉRATURE 347
non seulement reconnaître la nécessité de l'œuvre de réforme, mais qui
eût le courage et l’ascendant de l'esprit nécessaires pour l'accomplir
(p. 363 ).
Il serait trop 1 long de citer tout ce que ce volume renferme d'atta¬
chant, de bien pensé et de bien dit, de soigneusement étudié. Il est di¬
visé en trois parties : r° Avant la catastrophe (I. Jeunesse de Stein;
II. Stein au service de la Prusse; III. La Prusse en lutte avec la Révo¬
lution ; IV. Stein employé en Westphalie; V. Stein, ministre des finan¬
ces). 2° La catastrophe (I. L'état prussien ; IL Frédéric Guillaume II
et Frédéric Guillaume III ; III. Napoléon et l'empire; IV. Neutralité
de la Prusse; V. La catastrophe; VI. Stein pendant la guerre; VII.
Stein dans la retraite). 3 ° Ministère de Stein, première période (L Or¬
ganisation et tâche du ministère; IL Les collègues de Stein; III. Pré¬
paration de l'édit d'émancipation; IV. L’édit d’émancipation ; V. Po¬
sition de 9 tein ; VI. Négociations}.
Nous avons relevé, en lisant ce volume, quelques petites taches;
p. 25 . Le nom de Hambund ne date pas de-1772 ; il a été inventé.par
Voss bien longtemps après, en 1804 (V* e de Hbltjr), et l’on disait
alors le Bund ou le Hain; ce n'est pas en 1770, comme le dit M. S;,
qu’eut lieu la fête des jeunes poètes en l’honneur de Kiopstock ; c'est en
1773 (le 2 juillet] et on y brûla, non pas un buste de Wieland, mais
son portrait qui se trouvait sur une page déchirée de l’Alraanach des
Muses de Leipzig de 1773 ; — p. 56 . Ce « certain » Leuchsenrrng «’é*
tait pas autant estimé que le croit M. S., dans le monde savant de l’Al¬
lemagne; — jk $2 ; on ne comprend guère la phrase : « L’emp&re avait
été attaqué à son point le plus faible au moment où la tentative des
Français, de pénétrer dans les Pays-Bas, avait échoué et où. le roi de
Prusse se trouvait avec son armée à Luxembourg Quelle est cette ten¬
tative des Français? Mayence capitule le 21 octobre, trois jours, aupa¬
ravant Kalkreuth a signé la capitulation de Longwy, et depuis le r»
Dumomiez a quitté son armée pour courir à, Paris presser l’invasion
de» Pays-Bas; c’est même le 20 qu’il arrive à l’armée de Flandre, et
Lille vient de repousser le duc de Saxe-Teschen qui l'assiégeait; la
tentative dont parle M. S. ne serait-elle pas celle de Théobald Dilloa et
de Biron qui eut lieu le 29 avril de la même année? — P. 94, M. 9 . ou
son traducteur dit que Louis Ferdinand tombac im Beginn der Schlacht
Jena », et cependant, dans un autre endroit du livre (p. 281), on lit
qu’il fut tué près de Saalfeld, c'est à dire quatre jours avant Iena; —
p. iSo. Peut-on dire que « Frédéric le Grand semble n’avoir pas pensé
à élever la Prusse au rang d'une grande puissance européenne » ? —
P. 166, M. S. dit que « Frédéric Guillaume II! confia au duc de
Brunswick la direction d'une deuxième campagne » ; il veut dire sans
doute qu’après 1792, Brunswick reparut à la tête de l’armée prussienne
en 1806; mais dans la seconde période de l’année 1792 et en 1793
Brunswick commandait encore les troupes de la Prusse ; on ne peut
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REVUE CRITIQUE
348
donc parler d’une deuxième campagne, et d’ailleurs ce malheureux
Brunswick était, même en 1806, encore un des meilleurs généraux
prussiens. On croit généralement que Valmy porta atteinte à sa réputa¬
tion; mais Pirmasens (14 sept. 1793) et les lignes de Wissembourg
avaient fait oublier Valmy. Aussi, est-il peut-être inexact de dire, comme
M. S., qu’en nommant Brunswick général en chef, Frédéric Guil¬
laume III « montrait peu de jugement dans ses choix >. Il a pris Haug-
witz pour ministre et il a fallu lui imposer Stein ; soit. Mais qui aurait-
il mis à la tête de son armée? Môllendorf, Hohenlohe, Kalkreuth,
Rüchel? (Voir von der Goltz, Rossbach und Iena y p. 40 et suiv.) —
P. 170, lisez le 18, et non le 2 brumaire. — P. 181. Il eût fallu rappe¬
ler à propos de la Ligue du Rhin, celle qu’avait conçue Mazarin en
i 658 .
L’ouvrage de M. S. est certainement un des meilleurs livres d’his¬
toire qui aient paru en Angleterre dans ces dernières années. Ce premier
volume nous fait voir Stein tel qu’il était réellement, épris de l’histoire
et de l’économie politique, peu curieux de littérature, de poésie et de
philosophie, se destinant de bonne heure par des études pratiques au
métier d’homme d’état, apprenant dès ses premières années au service
prussien « un art dans lequel il deviendra maître, l’art de faire passer sa
volonté » (p. 33 ), bon négociateur quoique peu porté à se mêler de di¬
plomatie, connaissant à fond l’industrie, le commerce et les finances de
son pays, et joignant à ce savoir positif et réel une persévérance, une
énergie, une fermeté incroyable; le roi de Prusse, écrit M. S., subissait
le joug de Stein, qui aurait pu dire comme dans le Faust de Goethe :
« Il sent que je suis sûrement un génie, peut-être même que je suis le
diable » (p. 363 ).
Mais, comme nous l'avons déjà dit, le livre est plus qu’une biogra¬
phie de Stein ; 1 auteur connaît très bien l’histoire de l’Allemagne mo¬
derne; il expose à merveille le mécanisme des finances prussiennes; H
montre en plusieurs pages aussi animées qu’exactes les causes qui doi¬
vent amener la chute de la monarchie; il esquisse en quelques traits
précis le gouvernement de Frédéric Guillaume II et de son successeur;
il sait faire bien et court. De temps en temps, des comparaisons avec la
situation des partis ou les hommes d'état de l’Angleterre font mieux
comprendre encore ses exposés. On ne saurait donc que recommander
ce volume rempli de choses, écrit d’ailleurs avec agrément et clarté.
Stein disait que « la littérature anglaise mérite d’être connue, parce
qu’elle a de bons historiens qui représentent les faits et les caractères
avec fidélité, et développent les causes avec compétence et réflexion >
(P- 55 ); M. Seeley peut s’appliquer ces paroles de son héros.
A. C.
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d’histoire et de littérature
349
21 5 . — Biographie de* pertonnagea remarquable* de Troyea et du
département de l'Aube 9 par Emile Socard, conservateur de la bibliothèque
de Troyes, membre de la Société académique de TAube, lauréat des concours de
la Sorbonne. Troyes, L. Lacroix, 1882, in-8 de 445 p. Prix : 6 fr. 1 2 3
On a souvent dit que nous ne pourrions jamais posséder une histoire
vraiment complète de notre pays avant d'avoir de bonnes histoires de
toutes nos anciennes provinces, de toutes nos villes, de tous nos vieux
châteaux. De même, nous n’aurons jamais un définitif dictionnaire na¬
tional de biographie et de bibliographie, tant que nous ne verrons pas
des travailleurs sérieux s’occuper, en chaque département, du récit de
la vie des hommes célèbres qui y sont nés et de l'étude des livres qui y
ont été imprimés, ou qui, publiés ailleurs, sont l'œuvre d'écrivains ori¬
ginaires du département. Je dis travailleurs sérieux , car combien n’a-
t-on pas composé déjà en province de recueils biographiques qui ne
comptent pas, tant leurs auteurs étaient insuffisamment préparés à rem¬
plir une tâche pour laquelle il faut beaucoup de science et beaucoup de
conscience ? Ce n’est pas l’ouvrage de M. E. Socard que Ion rangera
parmi ces recueils dépourvus de toute autorité, de toute valeur. Cet ou¬
vrage mérite, au contraire, d'être recommandé comme un des meilleurs
de tous ceux qu'en ce genre nous devons jusqu’à ce jour à l’érudition
provinciale. Mais aussi combien de précautions ont été prises par le
conservateur de la bibliothèque de Troyes pour éviter, autant que pos¬
sible, le malheur d’être inexact! Quand on a lu {Avertissement, pp. 6-7)
la liste considérable des sources où il a puisé % on ne s’étonne pas
de la richesse et de la solidité des renseignements qu’il a eu la patience
de recueillir.
L'auteur a cru devoir adopter l’ordre alphabétique. Le premier per¬
sonnage dont il s’occupe est Acarie (Jacques) *, dit le laquais de la Li¬
gue , né à Troyes vers 1 555 , mort à Ivry, le 16 novembre 161 3 ; le der¬
nier est Yom-Tob, savant rabbin, né à Plancy (première moitié du
xii* siècle), et qui ne figure pas, ce me semble, dans VHistoire littéraire
de la France continuée par l’Académie des Inscriptions. Je vais m’ar¬
rêter devant quelques-uns des articles compris entre ces points extrê-
1. Voici la double épigraphe du rftcueil : Nisi illustres cuncti, haud inglorius
ullus . Si tous ne sont illustres, aucun n’est sans mérite .
2. Parmi ces sources brillent trois manuscrits : Mémoires historiques de Troyes,
par Sémilliard, en 7 volumes in-f°; Notes manuscrites sur les Artistes de Troyes ,
recueillies aux Archives de l’Aube, par Léon Pigeotte, in-f°; Extraits des Regis¬
tres des Paroisses de Troyes relatifs aux Artistes, par Auguste Huchard, petit
in-f°. Au nombre des imprimés consultés par M. S., on compte, sans parler de tous
nos grands recueils biographiques, un grand nombre de monographies champe¬
noises.
3 . M. Lud. Lalanne (Dictionnaire historique de la France) lui donne les prénoms
de Jean-Pierre et le titre, non mentionné par M. S. t de conseiller-maître de la cham¬
bre des comptes de Paris, titre qui lui est aussi donné par Pierre de l’Estoile (Mé¬
moires-Journaux, édition Jouaust, t. V, 1878, p. 54).
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REVUE CRITIQUE
35o
mes, tantôt pour y signaler quelque petite lacune, le plus souvent pour
y signaler quelque indication curieuse.
Dans l’article sur Etienne d* Acier , poète né à Bar-sur-Aube vers
i 535 , on cite (p. io) une Ode sur le trespas de Monseigneur Jean de
Chigny , baron de Santonay, seigneur de Brullart, imprimée en i 562,
« laquelle ne manque pas d'un certain charme ». On voudrait savoir en
quelle ville et par quel imprimeur cette pièce a été publiée et si elle a
paru isolément ou bien au milieu de quelque recueil» En matière bi¬
bliographique, les renseignements ne peuvent jamais être trop précis. —
L’article (p. îa) sur Antoine Allen, conseiller au présidial de Troyes,
« un de nos plus savants jurisconsultes » et l’exécuteur testamentaire de
François Pithou, nous fait connaître un des correspondants de Guy Pa¬
tin.—Dans la petite notice sur Nicolas Angenoust, auteur de : Para-
nymphe des Dames ', on trouvera des détails sur un de ses manuscrits,
le Traité de la viduité , ouvrage colossal < qui ne comprenait pas moins
de 1,144 pages in-4 0 , d’une écriture très-fine. » — L'article Bérülle, en
ce qui regarde les diverses éditions des ouvrages du cardinal, aurait pu
être plus étoffé \ — On n’a indiqué ni la date de publication, ni le for¬
mat des ouvrages du comte Arthur Beugnot. — J’en dirai autant des
ouvrages de 1 ’ « Oratorien distingué », Louis Bonnaire, docteur en Sor¬
bonne \ — Sous le nom Bonnefons (Jean), on déclare qu'un seul des
poèmes de ce lieutenant-général du bailliage de Bar-sur-Seine est dirigé
contre le maréchal d’Ancre : Evanouissement de Conchine. J'ai eu entre
les mains une satire en vers latins intitulée : Conchini funus etfumus .
Authore Io Bonefonio Io filio apud Barrosequanos prœtore regio
(Paris, Libert, 1617, petit in-8° de 7p.)-— La notice sur Jean Boulan¬
ger , dessinateur et graveur, celui dont le bon abbé de Marolles a dit :
Son burin élégant a beaucoup de douceur,
est complète dans son petit cadre. M. S. y signale quatre portraits de
cet habile artiste qui n’ont pas été connus de M. Le Blanc, l’auteur du
classique Manuel de VAmateur d'estampes (Paris, 1854-1856) 4 . — On
reconnaît bien vite dans l’article sur Bouquet (Stanislas), imprimeur et
libraire, la compétence parfaite du bibliophile auquel on doit le Cata¬
logue-aperçu des ouvrages sortis de Vimprimerie Bouquet (Troyes,
1860, in-18). — En revanche, les articles sur les deux poètes Bourbon
1. M. S. dit que le galant magistrat publia cette apologie du beau sexe en 1629.
Ce n’est là qu’une seconde édition. La première est de 1619. Voir Bibliographie
des ouvrages relatifs.,, aux femmes , 3 e édition, 1872, p. 428. Quoique le Paranym-
phe des Dames soit fort rare, il n’est cité ni dans le Manuel du libraire } ni dans le
Supplément de MM. Deschamps et Gustave Brunet.
2. Voir, comme complément, le môme article dans le remarquable Essai de bi¬
bliographie oratorienne, par le P. Ingold, 1880-82, grand in-8°, pp. 180-186.
3 . Cet écrivain n’est pas môme nommé dans 1 Essai de bibliographie oratorienne
que je viens de citer.
4. Boulanger, né à Troyes le 24 janvier en 1608, mourut, selon M. S., d Paris,
dans un âge avancé. M. L Lalanne le fait mourir en Italie , en 1680.
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d’histoire et de LITTERATURE 35 1
(Nicolas), l’oncle et le petit-neveu, auraient gagné à être rapprochés,
avant l’impression, surtout au point de vue bibliographique, de l'excel¬
lent travail de M. René Kerviler (Nicolas Bourbon , 1574-1644. Etude
sur sa vie et sur ses travaux . Paris, 1878) \
Les notices sur le chanoine Camusat (Nicolas), sur le peintre Carrey
(Nicolas), sur le peintre Chalette (Jean) % sont irréprochables, comme,
du reste, la plupart des notices sur les artistes champenois. Signalons
de piquants détails anecdotiques dans l'article sur le très fécond, trop
fécond polygraphe J. A. S. Collin, dit Collin de Plancy(pp . io3-io5).
— On remarque, au début de la notice sur Danton (p. 121), cette recti¬
fication : « Quoi qu’en aient dit certains biographes, Danton ne fut point
illettré. Au contraire, on le voit d abord élève au collège de l’Oratoire de
Troyes, classé parmi les bons en seconde et en rhétorique, de 1773 à
1775. Il obtint le prix de fable et des accessits de discours latin, d’am¬
plification française et de vers latins. Après ses humanités, il étudia le
droit et devint avocat au Conseil ». — On aurait été heureux de trou¬
ver, à l'article Grosley , la bibliographie complète de cet original érudit
qui, comme le rappelle M. S. (p. 181), a publié [en dehors des dix ou¬
vrages énumérés] une foule de travaux biographiques, littéraires et his¬
toriques, dont une partie est insérée dans les journaux du temps » 1 2 3 . —
Il n’a pas été tenu compte, pour Jean de Troyes (p. 220), des récentes
recherches dont ce greffier de l’hôtel de ville de Paris et sa prétendue
Chronique scandaleuse ont été l’objet. — C’est sans doute par inadver¬
tance qu’en racontant la triste vie de la fameuse intrigante Jeanne de
Luz de Saint-Remy de Valois, comtesse de Lamotte , on attribue au
marquis de Sade (p. 239) l’odieux pamphlet contre Marie-Antoinette :
Mémoires justificatifs , etc. (Londres, 1788, in-8° ). Ces pages « d’une
violence dégoûtante », comme s’exprime M. Socard, auraient été vrai¬
ment dignes de la plume cynique qui écrivit les plus immondes romans.
Mais on n’a jamais accusé de ce nouveau crime le marquis de Sade, le-
1. Relevons (p. 59) la faute typographique qui fait publier en i 553 par Bourbon
dit l’ancien, mort en / 55 o, son premier recueil de poésies, Nugæ i il faut lire
i 533 . M. S. donne Paris comme lieu d’impression ; M. Kerviler indique Lyon et
avec raison. Pour la date de la mort de Bourbon, dit le jeune, M. S. paraît préférer
le 6 juillet 1644 au 7 août. M. Kerviler et le P. Ingold (Essai déjà cité) adoptent la
date du 7 août, à la suite de Moréri . C’est cette date qui est la bonne, comme le
prouve une lettre écrite le 8 août par Guy Patin, qui avait donné ses soins à l’aca¬
démicien-oratorien.
2. Chalette, que M. de Chennevières regarde comme un des premiers parmi les
peintres provinciaux de Vancienne France , fut un des correspondants de Peiresc,
comme je l’ai rappelé, à propos de VAdrien de Vries de M. C. Ruelens, dans la Re¬
vue critique du 11 décembre 1882, p. 460.
3 . Voir, dans le Dictionnaire des Anonymes , de Barbier, une note curieuse sur les
Mémoires historiques et critiques pour l'histoire de Troyes, par Grosley (édition
Daflis, t. III, 1875, p. 226). M. S. s’est spécialement occupé jadis d’une des plus cé¬
lèbres publications de Grosley : Quelques mots sur un ouvrage intitulé : Mémoires de
l'Académie de Troyes (Troyes, 1854, in-8°).
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REVUE CRITIQUE
352
quel aura été ici confondu avec l'auteur des Liaisons dangereuses , Cho¬
derlos de Laclos \ — Pourquoi toutes les notices sur les écrivains du
département de l'Aube ne sont-elles pas aussi minutieusement précises
et complètes que la notice sur EustacheLenoWe, baron de Saint-Georges
et de Thennelières, dont les très nombreux ouvrages sont énumérés avec
indication de format, de lieu et de date de publication, etc, ? — Don¬
nons des éloges particuliers aux notices sur Mignard, sur Passerat*,
sur les frères Pithou, sur Richer (Edmond) 3 , sur Vignier (Nicolas), et
demandons, en finissant, au savant bibliographe qui a si bien rédigé le
Catalogue de la bibliothèque de Troyes , et qui, dans la belle et riche
collection dont il est le conservateur, a tant de livres troyens à sa dispo¬
sition, de profiter de toutes ces circonstances favorables pour nous don¬
ner une seconde édition de son travail fort augmentée et contenant tou¬
tes les indications qui peuvent être justement réclamées par les
bibliophiles. T. de L.
VARIÉTÉS
A propos des lettres de Bossuet à I^elbnlz.
La bibliothèque royale de Hanovre possède, on le sait, la plus grande
partie des autographes des lettres de Bossuet à Leibniz. M. Foucher de
Careil a eu le mérite de les retrouver et de les publier (un grand nombre
pour la première fois) dans son édition des Œuvres de Leibniz (tomes I
et II, 1859, Paris, in-8). C'est d’après lui que les reproduisent d'ordi¬
naire les éditeurs de Bossuet. Il serait bon cependant qu’ils se tinssent
en garde contre les transcriptions de M. Foucher de Careil, trop sou¬
vent fautives, comme on peut en juger par les deux passages suivants,
particulièrement dénaturés dans son édition.
I. A la fin d’une lettre à Peliisson, Bossuet lui recommande de ne pas
oublier de transmettre à Leibniz celle qu’il lui fait tenir par l’intermé¬
diaire de son correspondant :
« Il 4 ne tient qu’a vous de faire passer cette lettre, mais du moins ie
1. Un critique qui a beaucoup de flair, M. L. de la Sicotière, ne croit pas (voir à
ce sujet une note de lui dans les Supercheries littéraires dévoilées de Quérard, édi¬
tion Daflis, t. II, 1870, pp. 647-650) que Laclos ait composé un aussi ignoble fac¬
tum : il n’y reconnaît pas sa touche fine et spirituelle.
2. M. S. nous rappelle que l'ancien professeur au collège de France a laissé des
commentaires autographes sur les poèmes de Virgile, qui sont conservés à la biblio¬
thèque de Troyes.
3 . Il y aurait pourtant à améliorer l'article Richer à l’aide des abondants rensei¬
gnements bibliographiques réunis par M. l'abbé Puyol dans ses deux volumes sur le
vaillant controversiste.
4. Nous reproduisons très exactement la manière dont les mots sont écrits dans
les originaux.
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d’histoire et de littérature 353
vous recommande la cy iointe » (27 décembre 1692, Irenica [Theologica],
I, f° 239, verso).
M. Foucher de Careil écrit cette phrase étrange (I, eu, p. 346).
« Je vous recommande la civilité. »
II. Dans la lettre écrite à Leibniz et confiée à Pellisson, Bossuet traite
en ces termes la question de savoir si Jésus-Christ a eu deux volontés :
«... vous demandez si de bonne foy on s’est touiours avisé que J. C.
eust deux volontez. Cela dépend de scavoir si on s’est touiours avise qu’il
eust deux natures : la divine et l’humaine et toutes deux très entières.
La croyance des deux volontez est visiblement renfermée la dedans; on
pensera aussi tost qu’il n’a pas d’ame que de penser que cette ame ni
n’entend ni ne veut rien. On entend dire tant de fois a Jésus Christ ie
veux ou ie ne veux pas dans des choses qui le regardent en qualité
d’homme qu’on ne peut non plus oublier de luy que des autres hom¬
mes qu’ils ne soient voulants » (f° 23 1, verso). '
On lit, au contraire, dans les éditions, les norpsens suivants :
« Cela dépend de savoir si on s'est toujours avisé qü* il y eust deux
natures , la divine et l’humaine , et en toutes deux une volonté visi¬
blement renfermée là-dedans : on pensera aussi tost qu il n’y a pas
d'âme, etc. On entend dire tant de J.-C. : « Je veux , etc. » (p. 347).
On pourrait multiplier ces exemples à l’infini.
Camille Jullian.
CHRONIQUE
FRANCE. — M. Georges Perrot a été nommé directeur de PEcole Normale su¬
périeure, en remplacement deM. Fustel de Coulanges, nommé directeur honoraire.
— Le R. P. Pailloux publiera, à la fin de l’année, chez les éditeurs Roger et
Chernoviz, une monographie sur le Temple de Salomon ; prix : 100 fr.
— Nous avons reçu le Discours prononcé à la distribution des prix du lycée Cor¬
neille, de Rouen, par M. G. Lacour-Gayet (Rouen, Brière. In-8°, 10 p.). L’auteur
de ce discours n’a pas, comme tant d’autres, débité des banalités agrémentées de cita¬
tions latines; il propose à son jeune auditoire de faire avec lui un voyage à Pom
péi et il leur retrace d’une façon très attachante le spectacle qu’offre cette « anti¬
quité vivante qui donne toujours dans ses moindres détails une impression fraiche
et visible d’une civilisation disparue depuis dix-huit siècles ».
— M. Armand Gasté, professeur à la Faculté des lettres de Caen, avait déjà publié
en 1862, d’après le manuscrit de la Bibliothèque de Caen, les Noéls virois de Jean
Le Houx; il avait démontré, en 1866, l’existence d’Olivier Basselinet de ses compa¬
gnons pendant la première moitié du xv* siècle et donné, d’après les manuscrits de
Hayeux et de Vire, le texte des chansons normandes du xv* siècle; il avait fait paraître
en 1874 à la fois les Vaux-de-Vire de Jean Le Houx, d’après le manuscrit autogra
plie, et une étude critique sur le poète et le Vau-de-Vire à la fin du xvi* siècle. M. Gasté
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REVUE CRITIQUE
35 4
vient encore de publier une étude critique et historique sur les noéls et vaudevircs
du manuscrit de Jehan Porée. Ce manuscrit qui contient 38 noêls inédits, apparte¬
nait naguère à M. Jean-François Lepelleticr, avocat à Vire; M. Lepelletier est mort le
3 o juin 1870, et son manuscrit a passé à la Bibliothèque nationale, où il est inscrit
aujourd’hui sous le n° 1274 des nouvelles acquisitions du fonds français. Ces noêls
ont une certaine délicatesse et cette grâce naïve qu’on remarque en général dans h
poésie populaire ; mais ils renferment encore de nombreux renseignements sur les
compagnons du Val-de-Vire, et M. Gasté a eu soin de montrer l’intérêt que présen¬
tent ces indications pour l’histoire de la poésie française.
— UAcademy rend compte du plus récent fascicule de la Remania (n® 598,
20 oct.) et ajoute: a Cette Romani a, admirablement éditée, ainsi que l 'Anglia et les
Englische Studien en Allemagne, font rougir l’érudit anglais et de lui-même et de
ses compatriotes. Quand de pareilles revues seront-elles possibles dans notre pays';
Sera-ce dans cent ans ? »
ALLEMAGNE. — Le XVI e volume des Indische Studien , Beitrœge fûr die Kunàe
des indischen Alterthums , que publie M. Alb. Weber (Leipzig, Brockhaus), renferme
les articles suivants : Ueber Bhuvanapdla s Commentar %u H cil a s Saptaçatakam ;
— Lückenbûsser (der arische Charakter des Armenischen) ; — Miscellanea : I. Dhar -
makirti . II. Bhamaha. III. Galla, ladaba. IV. Epigramme aus Vallabhadeva 9 s Su -
bhashitavali . — Ueber die heiligen Schriflen der Jaina.
— Le premier numéro du Literaturblatt für orientalische Philologie publié à h
librairie Otto Schulze de Leipzig par MM. E. Kuhn et J. Klatt, renferme des comptes-
rendus de M. G. von der Gabblbntz sur la Malagasy grammar de M. Parker; de
M. L. von Schrœder sur le Çrduta Sutra 0/ Apastamba , p. p. Garbe; de M. Ch.
Bartholomae sur les Etudes iraniennes de M. James Darmesteter; de M. î. H.
Mordtmann sur Tà KojJiava xat xà èpsfuia auxûv de Karolidès et un Catalogue des
livres de la bibliothèque de l’Hamidie Medresse; de M. Fr, Praetorius sur les Sa-
bœische Denkmœler de MM. Mortdmann et Millier; une bibliographie dressée par
M. J. Klatt et une suite de a petites communications ».
— M. Fielke, de Breslau, vient de publier une édition critique du texte, en ancien
anglais, de Sir Orfeo,
— Le 21 septembre est mort le célèbre philologue Conrad Bursian, professeur à
l’Université de Munich* l’éditeur bien connu des Jahresberichte. Il était né à Mutt-
schen, près de Leipzig, en novembre i 83 o; il étudia à Leipzig et à Berlin, passa deux
ans en Grèce, devint professeur à Leipzig (i 858 ), à Tubingue (t86i), à Zurich (1864)
et finalement à Munich (1874). U était membre de la société royale des sciences de
Dresde et de Munich, des sociétés philologiques de Moscou et de Smyrne, de l’ins¬
titut archéologique de Rome. Il avait publié, de 1862 à 1872, une Géographie de la
Grèce et venait de terminer une Histoire de la philologie.
— Le même jour est mort, à l’âge de 40 ans, Wilhelm Ci.emm, professeur de
philologie classique à l’université de Giessen.
BELGIQUE. — M. Alphonse Wauters publie une série de monographies géo-
graphico-historiques sur les communes de Belgique, appartenant à d’autres provinces
que le Brabant; la première de ces monographies, qui vient de paraître, a pour
titre ; Landen , description , histoire , institutions (Bruxelles, Vanderauwera. 1 fr. 5 o).
On sait que M. Wauters avait entrepris avec feu Tarlier et qu’il continue seul U
description des communes du Brabant dans la Belgique ancienne et moderne , géo¬
graphie et histoire des communes belges. Les nouvelles monographies qu’il publie,
sont faites sur le même plan, avec le même savoir et la même conscience que les
notices de la Belgique ancienne et moderne.
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D'HISTOIRE ET DE LITTERATURE 355
— M. G. CtfMONT, secrétaire de la société belge de numismatique, prépare une
Bibliographie générale et raisonnée de la numismatique belge.
— Le dernier volume des Ypriana de M. Alphonse Vandenpbkrkboom vient de
paraître et, à cette occasion, une manifestation a eu lieu à Ypres, le dimanche
3 o septembre, en l’honneur de l’historien. Le bourgmestre d’Ypres a remis, au nom
de la ville, une médaille d’or à M. Vandenpeereboom.
ÉTATS-UNIS. — On annonce la prochaine publication d’une œuvre intéressante
sur la guerre de la sécession; elle est composée au point de vue sudiste, et a pour
titre xThe secret service of the Confédérale States in Eiu'ope or how the cruisers were
equipped ; l'auteur est M. James D. Bullock, le premier capitaine de VAlabama (chez
les éditeurs Puttnam).
— Cent ans se sont écoulés depuis la première publication de VAmerican Spelling*
Book de Noé Webster, dont il se vend annuellement un million d’exemplaires, sur¬
tout dans les états du Sud.
— La Vie de Nathaniel Hawthome, depuis longtemps promise par le fils du célè¬
bre romancier, M. Julien Hawthornb, paraîtra prochainement en deux volumes à
Boston, chez MM. Osgood.
— Sous le titre Prose masterpieces from modem essayists doit paraître, chez les
éditeurs Puttnam, en trois volumes, un recueil de morceaux choisis des écrivains
anglais du siècle présent depuis Charles Lamb jusqu’à M. Leslie Stephen.
— Les éditeurs Estes et Lauriat, de Boston, annoncent une édition illustrée de
Carlyle en 20 volumes, au prix de too dollars.
— Le capitaine William H. Parker fera bientôt paraître chez les éditeurs Scrib-
ner, de New-York, un volume intitulé Recollections of a naval officer . L’auteur, en¬
tré dans la marine des Etats-Unis en 1841, raconte les batailles de Hampton Roads
et d’Elisabeth City, la lutte du Merrimac et du Monitor, l’attaque du fort Sumter,
etc*
— Un mémoire sur l'origine et les progrès des bibliothèques publiques en Amé¬
rique, lu au congrès des bibliothécaires, à Liverpool, par M. Stephens, estime à
plus de 3 ,ooo le nombre de ces bibliothèques qui existent aux Etats-Unis; elles
possèdent ensemble 12, 3 00,000 volumes.
FINLANDE.— M. Kaarlo Krohm a récemment parcouru FEsthonie pour y recueil¬
lir des chants populaires; il en a recueilli plus de mille, et la Société littéraire fin¬
noise de Helsingfors en possède, dit-on, plus de i 3 ,ooo qui ont tous plus ou moins
de ressemblance avec le Kalevala.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du ig octobre i 883 .
M. le chef de bataillon JufTé, commandant supérieur de Mehdia, adresse à l’Aca-
démie les photographies et les estampages de plusieurs inscriptions arabes et ro¬
maines et offre d’envoyer les pierres originales, si cela est jugé utile.
La séance publique annuelle de l’Académie est fixée au 25 novembre. L’examen
des titres des candidats aux deux places d’académicien ordinaire, laissées vacantes
par la mort de MM. Laboulaye et Deffémery, ayant été fixé au t6 novembre, les
deux élections auront lieu, au plus tôt, le 3 o novembre.
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356
REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
L'Académie procède au scrutin pour la formation des trois commissions chargées
de lui proposer des sujets de prix à mettre au concours, dans les trois ordres d'études
de l'Orient, de l’antiquité classique et du moyen âge. Ces commissions sont compo¬
sées ainsi qu'il suit :
i° MM. Adolphe Régnier, Renan, Barbier de Meynard, Schefer;
2° MM. Egger, Jules Girard, H. Weil, Albert Dumont;
3 ° MM. Delisle, Hauréau, Gaston Paris, Siméon Luce.
M. Charles Tissot communique à l'Académie sept inscriptions latines découvertes
par M. Fonssagrives à Zaghouan (Tunisie) et dans les environs. Deux de ces ins¬
criptions sont des fragments sans importance. Les cinq autres méritent d'étre repro¬
duites en entier.
i° Sur un cippe scié par le milieu dans le sens de la longueur, texte mutilé, qui
paraît pouvoir se restituer ainsi : < Veneri Au[g. sacrum Ajnniolenus [C]rescenti[s
films et ...] mminius Misilifssae filius ...] ad ornandam patnam [et in levamentum]
paupertatis suae [... aedem t cellamr] pecunia sua fecerfunt, ob cujus de]dicationem
pugifles et gymnasium universis civious dederunt]. Après paupertatis suae , on lit;
COMPENSATIONEMI, qui doit peut-être se lire ; « [et in] compensationem [calami-
tatum suarum]. »
2° Dédicace a un procurator Augusti par ses employés : a L. Plautio Ita[lico] proc.
Aug. officiaflesl. »
3 ° « Marti Vi[ctori Augusto] pro sa[lute] M. Aureli An[tonini]. »
4° « P. Ligario Maximi Ligarii filio Potito, decurioni et magistrato (sic) annuali
civitatis suae Goritanae, qui ex sua liberalitate rei publicae suae sestercium quattuor
milia nummum inferanda repromisit, ut, ex ejus reditum (sic), id est usurae, denarii
sexaginta die decimo sexto kalendas januarias, natalis ejus, pugilibus et gymnasio
itemque decurionibus epulo, suo quoque anno in perpetuum, ab eadem republica
insumerentur, P. Ligarius Securus ob debitam patri pietatem posuit, loco dato de-
creto decurionum. » Les mots magistratus annualis paraissent désigner une dignité
municipale d’un caractère particulier, propre aux localités dont la condition était
intermediaire entre celle des municipes et celle des pagi. La localité antique de Gor
(Henchir Drâa el Gamra) n'est pas nommée dans les auteurs anciens; mais on avait
la mention d’un episcopus Gorensis , qui assista au concile de 255 .
5 ° a Mario Manno Felicis filio flamini perpetuo, ob insignem in patria (sic) et ci¬
ves suos liberalitatem, qui testamento suo rei publicae suae Goritanae sestercium
duodecim milia nummum dédit, ex cujus usuris die natali suo, idibus Septembribus
quod annis (sic) decuriones sportulas acciperent, et gymnasium universis cW'ibus, ob
quam liberalitatem ejus cum ordo de publico statuam ei decrevisset, Maria Victoria
nlia [et] heres ejus, titulo et loco contenta, [de suo] posuit et cum Ofelio Primo Sa-
turnino, flamini perpetuo raarito suo, ordini epulum dédit. » La mention des fla¬
mmes perpétuels indique que la res publica Goritana avait une organisation supé¬
rieure a celle d’un simple pagus , ainsi que le supposait l'explication donnée plus
haut pour les mots magistratus annualis.
M. Alexandre Bertrand commence une communication dans laquelle il rend compte
d'une visite récente aux principaux musées d’antiquités dites préhistoriques del'ita-
lie septentrionale. Il insiste sur le caractère de certitude et de précision qu’ont pris
ces études, auxquelles le nom de préhistoriques ne convient plus, car on reconnaît
à présent que la plupart des antiquités en question ne remontent pas au-delà des
temps historiques. Les résultats des découvertes nombreuses qui ont été faites de¬
puis quelque temps dans le nord de l’Italie et dans les provinces autrichiennes des
Alpes sont, en général, parfaitement d’accord avec les données de l'histoire et appor¬
tent à celles-ci une confirmation inattendue. Après ces considérations générales,
M. Bertrand met sous les yeux de ses confrères les reproductions galvanoplastiques
de deux « situles » trouvées en Italie, l’une à Trezzo, l'autre à la Certosa, près de
Bologne. On y distingue des séries de figures en relief qui représentent des cortè-
g es de guerriers, des scènes de chasse, des musiciens, des lutteurs, des animaux, etc.
(ans la suite de sa communication, M. Bertrand compte démontrer que ces objets et
d'autres analogues sont des produits de l’industrie des régions où ils ont été décou¬
verts et représentent des scènes de la vie ordinaire des habitants de ces régions.
Ouvrage présenté, de la part de l’auteur, par M. Delisle : Robert (Ulysse), Re¬
cueil de lois, décrets , ordonnances , arrêtés , circulaires , etc., concernant les bibliothè¬
ques publiques , communales , universitaires, scolaires et populaires , publié sous les
auspices du ministère de Vinstruction publique. Julien Havet.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 3j.
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gymnase, rien de nouveau). — Hecker, Die territoriale Politik des
Erzbischofs von Côln Philipp I 1167-1191, p. d. Varrentrapp (Sujet
étendu divisé en 4 chapitres et bien traité). — Mettig, Zur Geschichte
der rigaischen Gewerbe imXIII. u. XIV Jahrhundert (Méritoire). —
V. Segesser, Die Zeit der Ligue in Frankreich u. in der Schweiz. 1 585 -
i 5 ÿA. I et II (vol. III et IV du remarquable ouvrage sur Ludwig Pfyf-
fer, le <c roi des Suisses »). — H. Wagener, Die Politik Friedrich Wil¬
helm IV (Tout à fait pitoyable). — Lichtenheld, Das Studium der
Sprachen, besonders das classische und die intellectuelle Bildung, auf
sprachpbilosophischer Grundlage dargestellt (Trop diffus, mais ingé¬
nieux, très clair, convaincant dans son ensemble). — Landberg, Pro¬
verbes et dictons du peuple arabe, matériaux pour servir à la connais¬
sance des dialectes vulgaires, recueillis, traduits et annotés. i #r vol.
Province de Syrie, section de Saydâ (Première partie d’une grande pu¬
blication qui nous offrira de sûrs matériaux pour la connaissance des
dialectes arabes; l'auteur, suédois, a demeuré plus de neuf ans en
Orient, et fait espérer une suite de travaux considérables; il a prouvé
qu’il possédait une oreille exercée, capable de distinguer les nuances des
sons; il connaît bien l'arabe; un peu de désordre dans son recueil ; mais
f lossaire très utile; additions aux commentaires des textes). — Euclidis
ïlementa, ed. et latine interpretatus est Heiberg MV libros continens
(Edition très utile, très méritoire des quatre premiers livres des Eléments
d’Euclide). — Lyon, Gœthe’s Verhâltniss zu Klopstock (Soigné, un peu
prolixe).
Deutsche Litteraturzeitung, n° 41, i 3 octobre 1 883 : Concordantiae sup-
plementariae omnium vocum Novi Testamenti graeci comp. Fr. Zimmer,
(Holsten). — Max Heinze, Der Endâmonismus in der griechischen
Philosophie. I. (Freudenthal : très instructif). — Herzfeld, Einblicke
in das oprachliche der semitischen Urzeit, betreffend die Entstehungs-
weise der meisten hebr&ischen Wortstâmme. (J. Barth : beaucoup de
travail, de nombreux points intéressants, mais des erreurs.) — Probst,
Beitràge zur lateinischen Grammatik. I. Zur Lehre vom Verbum. (F.
Léo.) — Roscher, Nektar und Ambrosia mit einem Anhang tiber die
Grundbedeutung der Aphrodite und Athene. (E. H. Meyer : art. de dis¬
cussion.)—Johannes Turmairs cenannt Aventinus Baverische Chronik,
hrsg. v. M. Lexer. I. (1 u. 2) [M. Roediger). — Wulfstan, Sammlung
der ihm zugeschriebenen Homilien nebst Untersuchungen tiber ihre
Echtheit, hrsg, v. A. Napier. I. Text und Varianten. H. Varnhagen.
édition de texte qui réunit tous les mérites.) — Handloïke, Die lombar-
dischen Stftdte unter Herrschaft der Bischôfe und die Entstehung der
Communen. (W. Bernhardi : fait avec méthode et clarté.) — Urkun-
denbuch des Hochstifts Halberstadt und seiner Bischôfe. I, bis 1236 ,
hrsg. v. G. Schmidt. (Wenck.) — G. Wolf, Historische Skizzen aus
Oesterreich-Ungarn. (Horawitz : beaucoup de choses intéressantes et
instructives; ouvrage recommandable sur divers points de l'histoire ad¬
ministrative de l'Autriche-Hongrie.) — Der Periplus der erythrâischen
Meeresvon einem Unbekannten, griechisch und aeutsch mit kritischen
u. erklârenden Anmerkungen nebst vollstandigem Wôrterverzeichnisse
v. Fabricius. (Partsch : excellente édition à laquelle l'éditeur a donné
toute son énergique patience et tous ses soins.) — Ch. Clerc, Les Alpes
françaises, étude de géologie militaire.
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
REVUE ÉGYPTOLOGIQUE
Publié* sou U dirtctioi de KM. B. BRUG8CB, F. CHABAS. B. RÉVILLOUT
Première ann Ab. 1880, in-4, avec 5 feuilles de planches autographiées. ... 25 fr.
Deuxième année. 1881, in-4, avec 12 feuilles de planches autographiées. . . 25 fr.
Troisième année. i 883 , in-4. — N° i, avec une feuille de planches autogra¬
phiées et 3 planches en héliogravure. L’année complète.
Paris, 3 o fr. — Départements, 3 i fr. — Etranger, 3 a fr.
•OMMAIBEfl : PREMIÈRE ANNÉE, numéro i. — Avis de l'éditeur. — Quelques notes
chronologiques sur l’histoire des Lagides par E. Révillout. — Le mot adon par H. BrugsdL —
Notices géographiques. Le lac Maréotis par H. Brugsch.
Numéros 2 et 3 . — Premier extrait de la chronique démotique de Paris : Le roi Amaais et les
Mercenaires. — La syntaxis des temples ou budget des cultes sous les Ptolémées. — La question
du divorce chez les Égyptiens. — Les droits du fils aîné comme Kyrios. — L'intervention des en¬
fants dans les actes chez les Assyriens. — Le divorce assyrien. — Les régimes matrimoniaux dans
le droit égyptien : régime de séparation des biens ; régime dotal; communauté de biens entre époux ;
régime dotal mixte avec communauté partielle. — Reconnaissance d'enfant avec légitimation par
mariage subséquent. — Régime matrimonial chez les Assyriens. — Union légitimée après séduc¬
tion. — Hypothèque légale de la femme et donations entre époux. — L'omnipotence des femmes et
le décret de Philopator sur l'autorité maritale. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — En¬
tretiens philosophiques d'un petit chacal koufi et d'une chatte éthiopienne. — Revue bibliogra¬
phique.
Numéro 4. — Second extrait de la chronique démotique de Paris : Les prophéties patriotiques.—
Entretiens philosophiques d'une chatte éthiopienne et d*un petit chacal koufi. — Le reclus de Séra-
E éum : sa bibliothèque et ses occupations mystiques selon de nouveaux documents démotiques. —
,es arts égyptiens —Données géographiques et topographiques sur Thèbes, extraites par MM. Brugsch
et Révillout des contrats déiuotiques et des pièces corrélatives. — Le serment décisoire chez les
Egyptiens. — Notes historiques sur les Ptolémées. — Récits de Dioscore. exilé à Gangres, sur le
concile de Chalcédoine. — Notice nécrologique sur M. de Saulcy par M. Oppcrt. — Correspon¬
dance. — Revue bibliographique.
DEUXIÈME ANNÉE, numéro i. — Second extrait de la chronique démotique de Paris: Les
prophéties patriotiques. — Un fragment de la légende osiriaque. — Le serment décisoire chez les
Egyptiens. — Les affres de la mort chez les Egyptiens. — Récits de Dioscore, exilé A Gangres, snr
le concile de Chalcédoine. — Les sarcophages D 5 et 7 du Louvre. — Un contrat de mariage de
l'an 4 de Psammétique II. — Une vente de maison de l’an 12 de Darius 1 *\ — Acte de fondation
d’une chapelle à Hor-merti dans la ville de Pharbaetus, en l'an 52 de Psammétique I' r . — Acte de
fondation d'une chapelle à Bast dans la ville de Bubastis, l’an 32 du roi Amasis. — Correspon¬
dance ; H. Brugsch-Pacha. — Nécrologie et nouvelles. — Revue bibliographique.
Numéros 2 et 3 — Lettre à M. Révillout sur les monnaies égyptiennes, par M. Lenormant, de
l’Institut. — Second extrait de la chronique démotique. — Statue d'un ministre. — Les affres de U
mort. — Le serment décisoire, — Le groupe Pehti, par Paul Pierret. — La requête d'un Taricheute
d'ibis. — L'antigraphe des luminaires. — Entretiens philosophiques d’une chatte et d'un chacal. —
Un quasi-mariage. — La femme et la mère d'Amasis. — Un prophète d’Auguste et sa famille. —
Authenticité des actes. — Le papyrus grec XIII de Turin. — La loi de Bocchoris et l’intérêt i 3 o
B mr 100. — Les reclus de Sérapéum. — Le roi Anchmachis. — Les pensions alimentaires. —
onnées métrologiques des prêts de blé. — Nouvelles mesures agraires. — La tenue des livres eo
Egypte. — La valeur de l’huile. — Les mesures de capacité. — Le mot grec OUWOOÇ écrit hiéro-
glyphiquement, par Brugsch-Pacha. — Quelques poids égyptiens et assyriens. — Lettre de M. Stem.
— Note métrologjque de M. Ledrain. — Lettre de M. Golenischeff. — Poids sémitico-égyptieus. —
Lettre de M, Aurès. — Lettre de M. Oppert, de l'Institut — Comparaison des mesures égyptien¬
nes et hébraïques. — Première lettre de M Révillout à M. Lenormant. — Note sur les plus an¬
ciennes monnaies hébraïques. — Seconde lettre à M. Lenormant. — Un bilingue monétaire. —
Note additionnelle. — Un rapport de police. — Contrat de mariage du temps de Darius. — Livre
a incantation. — Les poésies bilingues de Moschion. — Revue bibliographique. — Note sur l’é¬
querre égyptienne. — Correspondance numismatique. — Nouvelles. — Aug. Mariette-Pacha. —
Planches contenant les traductions mot à mot des articles démotiques.
Numéro 4. — Congrès de Berlin (Eug. Révillout) : i* La table ethnique des anciens Egyptiens :
système égyptien, système africain, système asiatique (H. Brugsch-Pacha); 2* la nouvelle édition
du Livre des Morts [E. Naville); 3 ° Concordances entre l’année vague et l'année solaire (Lieblem);
4* une épopée gréco-égyptienne (L. Stern) ; 5 ° un ancien conte égyptien (Golénischeff) ; 6* sur la
cachette découverte à Deir-el-Bahari par M. Maspéro (Eug. Révillout). — Les ostracade Karnac (A.
Wiedemann). — üépTtç (Jacques Krall). — La particule copte XIN, 2 IN (A. Baillet). — Note
de la rédaction. — « Liber Proverbiorum • (M« r Bsciai).
TROISIEME ANNÉE, numéro i. — Association de Ptolémée Epiphane à la couronne et quel¬
ques autre associations royales — Le tribunal égyptien de Thèbes. — Récits de Dioscore, exilé i
Gangres, sur le concile de Chalcédoine. — Les prêts de blé. — La vie du bienheureux Aphon, évê-
que de Pemdje (Oxvrinque). — Le martyre de saint Ignace. — Le papyrus Anastasi n* o, transcrit
et traduit par M. Chabas. — Index du vocabulaire mythologique de M. Chabas. — Nouvelles ac-
quisitions du Musée égyptien du Louvre. — Nécrologie et nouvelles. — Nota. Sigles des divisions
de ta drachme lors de l'étalon d'argent en Egypte.
Le Puy t imprimerie Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 23
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LA TERMINOLOGIE GÉOGRAPHIQUE
dans les différents pays du globe. Etude accompagnée d’un voca¬
bulaire des principaux termes géographiques étrangers. Par
Edouard de Luze. In-8. i fr.
LA TRANSCRIPTION ET LA PRO¬
NONCIATION Edouard de Evzb. ?n-8 . E. i fr.
L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE
DE LA FRANCE Par* Édouard ds Lozr. In-8. * t fr.
NOTES DE LEXICOGRAPHIE BERBÈRE
Par René Basset. In-8. 3 fr. 5 o
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PÉRIODIQUES
The Aoademy, n° 598, 2Q octobre i 883 : Seej-ey, The Expansion of
England, two courses of lecture* jCotton : beaucoup de finesse; à re¬
marquer surtout ce qui concerne ^administration anglaise dans les In¬
des et l'avenir de l'empire britannique dans cette contrée). — Goppingee,
Cruise of the « Alert » in Patagonia and Polynesian waters (G. T. Tem¬
ple). — Emma Phipson, Tne Animal-Lore of Shakspeare's Time
(H.Friend; utile et très intéressant, cp. un prochain article de notre
recueil). — Tbree german lives of Christ : Bernh. Weiss, The life of
Christ, translated by S. W. Hope ; Keim, The history of Jésus of Na-
zara, translated by Ransom. VI; Ewald, The history of Israël, VI.
< The life and timesof Christ », translated by Fr. Smith (Drummond).
— Some books on greek history (Ad. Bauer, Themistokles ; J. Schwa-
rcz, Die Démocratie. I; H. Droysen, Athen und der Westen vor der
sicilischen Expédition; Doülcet. Quid Xenophonti debuerit Flavius
Arrianus : F. T. Richards). — Tne sources of Marlowe’s « Tambur-
laine ». (A. Wagner). — The « E. K. > of the « Shepheard’s Calendar »
(D. Beale). — A reference in Shakspeare to open-field cultivation
(W. Ridgeway). — The iron âge in Greece (A. H. Sayce). — The word
* fubs » (Doble). — Saltair na Kann, edited by Whitlev Stores, « Anec-
dota Oxoniensia », mediaeval apd modem sériés. I, III (John Rhys :
travail de très grande importance). — The early history of Cochin
China (J, Edkins). — The « Apollo and Mprsyas » at the Louvre (Sid-
ney Colvin).
The Athenaeum, n° 2921,20 oct. i 883 : Srene, With Lord Stratford in
the Crimean War. Sbeley, The expansion of England. — Nachti-
gal, Sahara und Sudan. I u. IL — Current philosophy : Edmond de
Pressensé, A study oforigins; Ground. Spencer’s structural principles
examined; Spinoza's Ethic, translated by White; Spinoza, Essays,
edit. by Knight. — H. A. Jàschke. — The Luther Exhibition (H. Ste-
vens et H. Jenner). — Thomas Lowell Beddges (E. W. Gosse). —
Crqwe g. Çavalcaselle, Raphaël, his life and works, vol. I (i er arti¬
cle). Thechapel of Lambetb Palace (CJaytou a. A. Bell),
Uteramchee Centralblatt, n°^ 3 , 20 octobre 1 883 ; Schanz, Commentar
tiber das Evangelium des heiligen Lucas. — Charteris, the New Tes¬
tament scriptures, their daims, history and authority. (c Theils glàu-
big, theils wissenschaftlich. ») — Martin van Bracara's Schrift de cor-
rectione rusticorum, zum ersten Male vollstândig u. in verbessertem
Tçxt hrsg. v. Caspari. — Ebrard. Peter Loticfi der Jüngere, sein Leben
und eine Auswahl seiner Gedichte metrisch ins deutsche libertragen.
(Bon ouvrage sur pn humaniste du xyi e $ièele,) Jahre6bericht der
Geschichtswissenchaft, im Auftrage der historischen Gesellschaft zu
Berlin hrsg. von Abraham, Hermann, Edm. Meyer. III. 1880 (Entre¬
prise soutenue désormais par le ministère des cultes; 55 oo numéros;
C as une publication dont il ne aoit rendu compte; l'important est fort
ien distingué de ^insignifiant). — Matzat, romische Chronologie, I.
Grundlegende Untersuchungeu. (Contribution précieuse; éclaircit et
débrouille le terrain scientifique.) — Neumann, Bernard von Clairvaux
und die Anfànge des zweiten Kreuzzuges. (Petit écrit de 68 pages com¬
posé avçc vivacité et sagacité.) — E. Kestner, Beitrage ?ur Geschichte
der Sledt Thorn, aacn archivali$chen Quelien beai^eifet. (Utile.) r-r
M. Brosch, Lord Bolingbroke und die Whigç und Tories seiner Z$it.
(Le livre devrait être intitulé <r les whigs et les tories au temps de Boling-
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t
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 45
— 5 novembre —
1888
Sommaire t 2(6. Buvanck, Spécimen d’un essai critique sur les œuvres de
François Villon. — 217. Delaville Le Roulx, Les archives de l’ordre de Saint-
Jean de Jérusalem à Malte, et Documents concernant les Templiers. — 218. Ed.
de Barthélemy, Les correspondants de la marquise de Balleroy. — 219. Janin,
Les imprimeurs et les libraires dans la Côte-d’Or. — Variétés : L. Legsr , Les
manuscrits slaves de la Bibliothèque de l’Université de Leyde. — Chronique. —
Académie des Inscriptions.
216. — Spécimen d'un essai celtique sur les œuvres de François
Villon, par W. G. C. Buvanck, docteur ès-lettres. Le Petit Testament. Leyde,
de Breuk et Smits, ( 883 .
L'auteur, un savant hollandais, prépare une édition complète des œu¬
vres de Villon. Il soumet actuellement une partie de son travail au pu¬
blic, à titre d’échantillon, comptant profiter, pour l’édition définitive,
des critiques qui lui seront faites maintenant. Il étudie, dans cet Essai,
les sources du texte de Villon, pour le Petit Testament , et il publie ce
poème, plus deux ballades, dont l’une inédite et l’autre non encore re¬
connue de Villon. Son ouvrage, écrit dans un français très alerte et
généralement correct, témoigne d’une vaste lecture, d’un jugement in¬
dépendant et d’une connaissance peu commune de la littérature du
xv® siècle. En ce qui concerne l’établissement du texte, on souhaiterait
une méthode plus rigoureuse. M. Bijvanck choisit sans principe arrêté
celle des variantes qui lui paraît la meilleure, et il lui est ainsi arrivé (pa¬
ges 21 et suiv.) d’adopter la leçon d’un seul manuscrit d’une famille
alors que les autres membres de cette famille s’accordent avec tous les
autres manuscrits pour lui donner tort. Ace compte, la classification des
manuscrits ne sert plus à rien, et, en effet, celle que donne M. B. est
vague, et il n’en a guère tiré parti. On peut aussi lui reprocher d’avoir
attaché tantôt trop, tantôt, trop peu d’importance à la leçon que lui
fournissaient les sources consultées : trop, lorsqu’il s’efforce, par toutes
sortes d’hypothèses ingénieuses, d’expliquer des variantes sans valeur
(ex., pages 87 et 88) ; trop peu, lorsqu’il se permet d’apporter à un pas¬
sage clair des changements que n’autorisent pas les manuscrits (ex., pa¬
ges 62 et suiv.) — Il a cru bon de changer l’ordre traditionnel des hui-
tains, et il nous donne les raisons qui l’y ont poussé; elles ne sont
guère suffisantes, d’autant plus que, pour le commencement du Petit
Testament, tous les manuscrits sont d’accord. — Quant à l’orthogra¬
phe, elle laisse beaucoup à désirer. M. B. s’est ingénié, par une quantité
de remarques de détail et de sagaces hypothèses à reconstituer l’état du
Nouvelle série, XVI.
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REVUE CRITIQUE
manuscrit original, et c'est l’orthographe de ce dernier qu'il a voulu
nous donner. C'est là, à notre avis, une vaine entreprise; nos sources
actuelles ne nous permettent pas de la mener à bonne fin. C'est en
poursuivant ce but insaisissable que M. Bijvanck en est arrivé à écrire
le même mot de deux ou trois façons différentes et à dérouter ainsi le
lecteur. — Voilà bien des critiques. Il ne faudrait pourtant pas mécon¬
naître les mérites de cet Essai . C'est le résultat d’un travail intelligent
et consciencieux; il renferme beaucoup de renseignements utiles sur la
littérature du xv 6 siècle et les auteurs contemporains de Villon, et il ap¬
porte, pour l’explication d'un texte qu’on a trop souvent imprimé sans
le comprendre, une masse d'éclaircissements dont plusieurs sont aussi
neufs que satisfaisants. Mais le plus grand service que l’auteur ait rendu
à la science, est d’avoir le premier collationné avec soin tous les manus¬
crits et de nous donner en variantes, au bas des pages, toutes les leçons
qu'ils fournissent. Un pareil travail n’est jamais perdu.
A. T.
217. — Le» eroblve», la bibliothèque et lo trésor de l*ordre de
8a!nt.Jean de «Jérusalem à Malte» par J. Dklaville lb Roulx, ancien
membre de l'école française de Rome. Paris, Thorin, in-8 de 267 pages.
— Document» concernant le» Templier», extraits des archives de Malte,
par le même. Paris, Plon, 1882, in-8 de 55 pages.
Il y a, relativement, très peu d'années que l’on a commencé à fairedes
recherches, en France, dans les archives des anciens établissements rele¬
vant des ordres du Temple et de Saint-Jean de Jérusalem. Auxvn e et
au xvm e siècle, les savants qui ont mis tant de zèle à recueillir et à pu¬
blier des documents d’archives ont négligé ces deux sources ; on peut
donner deux motifs à cette abstention. D’abord la difficulté qui existait,
probablement, à pénétrer dans les archives des grands prieurés français,
archives qui avaient un caractère privé et dans lesquelles les représen¬
tants de l'ordre se souciaient peu de laisser faire des recherches; ensuite
l’attitude même des commandeurs, mis à la tête des bénéfices d’Occt-
dent, qui se tenaient à l’écart des événements politiques et des affaires
ecclésiastiques. On en était arrivé, ce semble, à penser que les archives
locales des ordres militaires ne devaient rien contenir de bien important
pour l'histoire.
Aujourd’hui, il y a heureusement une réaction ; de tous côtés, en
France, on recherche les chartes des Templiers et de leurs rivaux et
successeurs, les chevaliers de Saint-Jean de Jérusalem ; on recueille et
on publie des documents aussi précieux pour l’histoire locale et l’histoire
générale que ceux des chartriers d'abbaye. M. Delà ville Le Roulx a con¬
sacré ses efforts à la recherche et à l’étude de ces documents et, très ju¬
dicieusement, il commence par ouvrir aux travailleurs les archives de
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d’hISTOIRB BT DE LITTERATURE
359
La Valette, c'est-à-dire les archives mêmes de l'ordre de Malte. Quand
on songe un instant aux origines des ordres du Temple et de Saint-Jean
de Jérusalem, à l’influence prépondérante que la France eut dans les
croisades, à la nationalité de la plupart des grands maîtres, aux posses¬
sions territoriales des deux ordres sur notre sol, on n'est pas longtemps
sans reconnaître qu'il s’agit ici d'histoire nationale; qu’après les pu¬
blications de M. D. Le R., et le Grand Prieuré de France, de
M. Mannier, il faudra que quelques érudits nous fassent connaître les
archives des grands prieurés de Champagne, d’Aquitaine, de Saint-Gil¬
les et de Toulouse.
M. D. Le R. a déjà publié plusieurs dissertations qui se rattachent à
son plan d'études, au point de vue diplomatique et sigillographique;
aujourd'hui il nous offre un volume qui forme le 3a* fascicule de la
Bibliothèque des écoles françaises d'Athènes et de Rome, et qui n'est,
cependant, qu’un spécimen de publications plus importantes qu'il nous
fait espérer; ce sont cent chartes choisies dans les archives de Malte,
de 11 ia à 1298. Nous y reviendrons, dans un instant, après avoir exa¬
miné le travail préliminaire dont cette collection de textes est l’appen¬
dice.
Les archives de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, conservées aujour¬
d'hui à Malte, présentent aussi peu de lacunes que l’on peut craindre
après les diverses translations opérées de Terre Sainte à Rhodes et de
Rhodes à Malte ; plusieurs auteurs les ont consultées avant le xix° siè¬
cle et, parmi nos contemporains, MM. Hopf, de Rozière et de Mas Latrie
y ont puisé largement. M. D. Le R. nous en donne aujourd’hui un in¬
ventaire sommaire qui a, sur le travail analogue rédigé il y a plus de
vingt-cinq ans par M. de Mas Latrie, l’avantage de se rapporter au nou¬
vel ordre adopté postérieurement; cet inventaire sommaire porte :
i° sur la série I, comprenant les diplômes des rois de Jérusalem, des
princes chrétiens de Terre Sainte et d'Europe, les bulles pontificales,
les bulles magistrales; 2 0 sur la série V, contenant les bulles des grands
maîtres; 3° sur la série VII, bullaires pontificaux. — L'auteur décrit
ensuite les sceaux principaux conservés dans ces archives, parle de la
Bibliothèque de Malte, riche surtout en brochures introuvables ailleurs,
dont il nous promet une bibliographie complète, et se garde bien d'ou¬
blier le Trésor de l'ordre, notant les objets qui subsistent encore aujour¬
d’hui.
Nous constatons ici, avec une certaine satisfaction, que malgré les
légendes qui se sont formées sur l'enlèvement des archives de Malte et
le pillage du trésor en 1798, il ne semble pas que l'on puisse croire un
instant que les Français, dans cette circonstance, aient abusé du droit
des vainqueurs qui se croient autorisés à faire main basse sur tout ce
qui présente quelque valeur.
I^es cent actes que M. D. Le R. donne in extenso paraissent très cor¬
rectement transcrits; peut-être aurait-il rendu service au lecteur en
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REVUE CRITIQUE
36o
marquant d’un astérisque leur mention dans son inventaire sommaire.
Chacun est accompagné de notes aussi sobres qu’indispensables; il ne
manque pas de signaler les personnages, omis dans les ouvrages pu¬
bliés jusqu’ici, que ces chartes font connaître : à plusieurs reprises, il
comble des lacunes dans les Familles d*Outremer de Du Cange et, à ce
propos, je m'étonne de ce qu’il semble ignorer l’existence du Sommaire
du supplément aux familles d'Outremer publié par M. E. G. Reyen
1881. Dans ce fascicule, je note Guillaume et Pierre, évêques deTartoûs
(pp. 78 et 11 3 des Archives ), Gilbert de Flori, vicomte d’Acre (pp. 142 et
146), Anterius, évêque de Valénie (p. 159), Roger, connétable d’Antioche
(p. 165), Hugues, archevêque de Tyr (p. 169), Jean, maréchal de Tri¬
poli (pp. 182 et 197) ; mon observation n'est pas très grave; cependant
il est évident que lorsque l’on croit devoir signaler à plusieurs reprises
des lacunes dans un livre, il est indispensable de prendre en considéra¬
tion les errata et addenda fournis plus tard par l'éditeur de ce livre;
d'ailleurs, il est bien difficile, lorsqu’on dresse des listes de noms
d’hommes de ne pas faire des omissions : M. D. Le R., lui-même, n’a-
t-il pas oublié Bernard de Asinaria, châtelain de Belmont, mentionné
page 157 dans l’acte n° lxiii ; les commandeurs de Margat : il a fait
connaître le sceau de l’un d’eux et Bernard Raymond est mentionné en
1232 dans le cartulaire de Sainte-Sophie; je pourrais encore citer Jou-
bert, châtelain de Margat, en 1224, Pierre de Saint-Romain, comman¬
deur de Tripoli, en 1243, Mathieu de Clermont, maréchal du Temple,
etc.; mais il ne faut pas oublier que l'auteur dit lui-même qu’il sait ne
pas être complet. Il ne manquera pas, certainement, de dépouiller les
ouvrages publiés, au fur et à mesure qu’ils paraissent.
Je ne dois pas passer sous silence la Table générale qui complète le
volume; elle est indispensable pour chercher dans ces nombreux textes;
d'autant plus indispensable qu’elle assimile des noms anciens aux noms
modernes. A ce sujet, je soumettrai encore quelques points d’interroga¬
tion à M. D. Le Roulx. — Beroet, qu’il place à l'est d’Hébron, ne serait-
il pas le même lieu que Broet, voisin d’Acre page 184? — Le fleuve Tar-
tar ne serait-il pas l’Oronte? — Meserafe, s’il est dans le territoire de
Margat, peut-il être assimilé à la Meserefe qui était sur le territoire
d’Acre? — Athlit était le Château-Pèlerin des Templiers, il y a donc
lieu de le distinguer du Mons Peregrinus qui, pp. i 52 et 198, appar¬
tient aux Hospitaliers. — Page 118, ligne 23 , je remarque les mots
regis excorticatione qui, s’ils sont bien lus, demandaient une note ex¬
plicative.
Je ne doute pas que l’auteur ne voie dans ces observations, qu’il
trouvera peut-être miticuleuses, non-seulement l’attention avec laquelle
j’ai lu son livre, mais aussi le prix que j’attache à un ouvrage qui four¬
nit tant de précieux matériaux ; j’ajouterai que mon amour-propre fran¬
çais a été flatté de voir un membre de notre Ecole de Rome se consacrer
aussi heureusement à une pareille œuvre, et prendre possession, le pre-
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d’histoire et de littérature 36 1
mier, d’un sujet qui tente de nombreux érudits au-delà des frontières de
France.
Nous n’avons pas à insister sur les Documents concernant les Tem¬
pliers ; les actes, publiés in-extenso dans cette brochure, figurent dans
les Archives . Il est évident que M. Delavilie Le Roulx a voulu, au
préalable (les dates des publications le prouvent), faire connaître ce que
les archives de Malte contenaient sur Tordre du Temple. Nous devons
seulement signaler le préambule dans lequel l’auteur fait connaître son
opinion sur le sort des Archives générales du Temple que, depuis
quelques années, on cherche avec une certaine curiosité. Il paraît croire
que ces archives, ou au moins un de leurs fonds, existaient encore au
xvi e siècle, et que tout espoir n’est pas perdu de mettre la main sur
cet ensemble de documents qui serait égaré et non perdu. Le hasard,
dans ces derniers temps, a si heureusement favorisé les chercheurs in¬
fatigables que nous nous plaisons à espérer que les faits viendront don¬
ner raison à notre confrère.
Anatole de Barthélemy.
218. — Le» correspondant» de la marquise de Balleroy, d’après les ori¬
ginaux inédits de la Bibliothèque Mazarine avec des notes et une introduction sur
les maisons de Caumartin et de Balleroy, par le comte Edouard de Barthélémy.
Paris, Hachette, i 883 , 2 vol. Grand in-8 de ii-lxxxvii-4o3 et 5 q 6 p.
La publication de M. E. de Barthélemy, depuis longtemps annoncée,
était impatiemment attendue. Les extraits plus ou moins considérables
donnés, en ces dernières années, des huit volumes du manuscrit de la
Bibliothèque Mazarine par M. Aubertin, par M. Desnoiresterres, par
M. Kerviier, par M. de Lescure, avaient singulièrement piqué la curio¬
sité ». On avait savouré quelques gouttes de la précieuse liqueur : on n’é-
. tait que plus désireux de puiser largement au tonneau. Remercions donc
M. de B. d’avoir mis à notre disposition — non pas les huit tonneaux
entiers de la Mazarine, — mais la meilleure partie de la collection. Il y
avait un double écueil à éviter : prendre trop et ne pas prendre assez.
Trop, c'eût été fastidieux; pas assez, c’eût été besogne à refaire. M. de B.
s’est habilement tiré d’une situation aussi délicate : il a adopté le parti
qui a été de tout temps le plus sage, le parti du juste-milieu : medio
tutissimus ibis . J’ose affirmer que, parmi ceux des lecteurs de sa publi¬
cation qui pourront la rapprocher des textes originaux, il ne se rencon¬
trera personne pour lui reprocher d’avoir laissé de côté une seule page
intéressante 1 2 , ou d’avoir admis une seule page qui ne le soit pas.
1. M. de Lescure, dans son édition du Journal de Mathieu Marais (t. I, i 863 ,
p. 488), avait cru pouvoir assurer que M. Phiiarète Chasles publierait, avec son con¬
cours, la fleur des huit volumes.
2. Au nombre des pages sacrifiées se trouvent plusieurs lettres du marquis de Bal¬
leroy relatives à ses affaires personnelles, surtout à ses incessants procès, car, en bon
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REVUE CRITIQUE
362
Avant d’examiner les lettres des correspondants de la marquise de
Balleroy, disons, d’après l'agréable et excellente Introduction de l’édi¬
teur, quelques mots de la grande dame à qui ces lettres furent adressées
et des hommes d’esprit qui les lui adressèrent.
La marquise appartenait « à cette vieille race parlementaire des Le
Febvre de Caumartin, qui a tenu une place considérable au xvn* siè¬
cle. » Elle portait les prénoms de Madeleine-Charlotte-Emilie : elle pa¬
raît avoir été très jolie et ttès spirituelle. Elle épousa, le 8 mars 1693,
Jacques de la Cour, seigneur de Balleroy, qui fut d’abord conseiller au
parlement et ensuite maître des requêtes l . Veuve le 19 mai 1725, elle
mourut le 5 mai 1745 a . Quelques années après son mariage, elle suivit
en Normandie, au château de Balleroy 3 , un époux qui préférait « la vie
de campagne à la carrière des intendances a; elle partit sans plaisir évi¬
demment, nous dit son biographe (p. 1), « regrettant Paris, où elle trou¬
vait avec raison qu’elle eût été bien mieux à sa place \ » Cest alors que,
pour tromper son ennui, — car elle ne revint plus que rarement et pas¬
sagèrement à Paris — elle pria ses parents et ses amis de l’aider à oublier
son éloignement en la tenant soigneusement au courant des événements
petits et grands de la capitale. Elle eut lieu d'être satisfaite... Pour obte¬
nir une pareille fidélité à distance, il fallait qu’elle fût très aimée et très
aimable. * — « Du reste, » ajoute M. de B. (p. 11), « M me de Balleroy
ne pouvait être mieux servie; ses correspondants assidus sont ses trois
Normand, cet enragé plaideur put dire à toute époque : Il ne m’eit reste plus que
cinq ou six petits . Tout cela, complètement reproduit, eût été effroyablement en¬
nuyeux.
x. Les noces furent splendides, s’il faut en croire le mot de M me de Sévigné à la
comtesse de Guitaut, du 10 mars i 6 g 3 : « On dit des merveilles de ce mariage. »
En cette même lettre, M* # de Sévigné s’amuse de la facilité avec laquelle M. de Cau¬
martin mariait les demoiselles Le Febvre (édition Monmerqué et Ad. Regnier,
t. X, p. io 5 ). Précédemment (le 25 janvier 1693, et nonie 7 avril 16 7 5 , comme le
fait dire à M. de B. (p. xxxvii) une évidente faute d’impression), M“* de Sévigné
avait déjà plaisanté, à propos du mariage d’une autre nièce de M"* de Guitaut, Mar¬
guerite Le Febvre, sur l’infatigable marieur (Ibid., p. 102) : « M. de Caumartin vous
les mariera toutes, quand il y en auroit une douzaine. »
2. L’annotateur des Lettres de M™ de Sévigné (édition déjà citée, t. X, p. toi,
note 5 ) met cette mort en 1749.
3 . Le château de Balleroy est situé dans la commune de ce nom, chef-lieu de can¬
ton du département du Calvados, arrondissement de Bayeux, à i 5 kilomètres de cette
ville, à 37 kilomètres de Caen. M. de B. (p. lxi) en donne cette description : «Bat-
leroy est une magnifique construction dans iaqueiie Mensart « déployé tout son gé¬
nie, comme on en peut juger encore, car le château, avec ses terrasses et son vaste
parc, est demeuré heureusement intact. » J’ai entendu dire que le plafond d’une des
salles a été peint d’une façon admirable par Lemoyne. Les deux volumes de M.deB.
sont dédiés à la châtelaine actuelle, M mû la comtesse de Balleroy, née Roslin «Flvry.
C’est au château de Balleroy que furent pris révolutionnairement, avec beaucoup
de livres, les manuscrits aujourd’hui conservés à la Mazarlne sous le n° 279Ï.
4. Ces regrets expliquent, s’ils ne la justifient pas entièrement, Yhumeur âigre -
lette de la marquise, humeur que lui reprochait un de ses frères. M. de B. plaide
galamment, à ce propos, les circonstances atténuantes (p. lxi).
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D’HISTOIRE ET DE UmÉRATURE 363
frères, Caumartin de Saint-Ange, Caumartin de Boissy et l'abbé; des
parents, le baron de Breteuil, introducteur des ambassadeurs, dont
Saint-Simon parle si plaisamment, l'abbé de Guitaut, le chevalier de Gi-
rardin, un autre cousin, M. de la Cour de Maltot; ses deux neveux
d’Argenson. Avec une pareille pléiade, elle ne devait rien ignorer, *
M. de B. nous fait connaître successivement tous les astres de cette
pléiade ; il ne se contente pas de donner beaucoup de détails sur les trois
frères de son héroïne; il en donne beaucoup aussi sur leurs ancêtres en
remontant (p. \i) jusqu’à Huart Le Febvre, écuyer, seigneur de Peirette,
frère de Pierre Le Febvre, président au parlement de Paris en 1413. Les
notices sur Louis Le Febvre, seigneur de Caumartin, né en i 552 , mort
garde des sceaux en 1623 (pp. vi*xv), sur Louis*François Le Febvre,
seigneur de Caumartin et de Boissy, né en 1624, mort en 1687, le ma¬
gistrat si célèbre des Grands jours d'Auvergne, l'intime ami du cardinal
de Retzfpp. xv-xxxviii); sur Louis-Urbain Le Febvre, né en 1 653 , mort
en 1720 *, d'abord nommé M. de Boissy, puis marquis de Saint-Ange,
l’élève de Fléchier et le protecteur de Voltaire (pp. xxvm-xux) ; sur l’abbé
de Caumartin, né en 1668, mort en 1733, filleul du cardinal de Retz,
membre de l’Académie française et de l’Académie des Inscriptions, évé-
que de Vannes, puis de Blois (pp. xlix-liii), résument parfaitement ce
que nous ont appris de tous ces personnages les recueils biographiques
et les auteurs de Mémoires. Signalons encore, en celte Introduction oU
se donne libre carrière le grand savoir de M. de B. en matières généalo¬
giques et champenoises, divers renseignements sur Marc-René de Voyer
d’Argenson (pp. uv-lvu), le père des deux neveux et correspondants de
M m6 de Baileroy, sur le baron de Breteuil, qui avait épousé une Cau¬
martin de la branche de Mormant (p. lxiii), sur M. de Baileroy, un des
plus actifs correspondants de sa femme, son « plus grand pourvoyeur de
nouvelles a (p. lxvi-lxxiii). L’étude est terminée par deux complètes no¬
tices (pp. lxvi-lxxiii) sur les deux fils de M®* de Baileroy, Jacques-
Claude-Augustin de la Cour, marquis de Baileroy, lieutenant général
des armées du roi, et Louis-Jacques, chevalier de Malte.
M. de B. n’a pas abusé du droit que l’on a de vanter les documents
que l’on édite, quand il a déclaré (p. 1) que les lettres écrites de 1706 à
1725 par les parents et par les amis de la marquise, pour la tenir au cou¬
rant de la chronique de la cour et de la ville, présentent « un intérêt ex¬
ceptionnel pour le premier quart du xvin* siècle. » Comme il le fait très
justement remarquer un peu plus loin (p. m), c jusqu’à présent nous
n’avions eu que des gazettes rédigées par des mercenaires ou par des
bourgeois. Le Journal de Buvat, les Mémoires de Mathieu Marais, les
gazettes publiées depuis quelque temps dans divers recueils, le journal
même de l’avocat Barbier rentrent dans l’une ou l’autre de ces catégo¬
ries. Pour la première fois, nous trouvons une correspondance émanée
i. M. de B., après avoir indiqué (p. tl) celte date, qui est la bonne, dit par inad¬
vertance (p. lxv) que « M. de Boissy mourut dès 1722. »
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REVUE CRITIQUE
36 4
exclusivement de gens du grand monde et relatant les événements avec
une liberté, une franchise tout à fait nouvelles. Ce n'est plus le duc de
Saint-Simon écrivant à tête reposée ses mémoires, en écoutant ses ran¬
cunes ou ses préférences; le marquis de Dangeau et le duc de Luynes
rédigeant des procès-verbaux froids, mesurés et méthodiques ; ce sont des
personnages du même monde qui recueillent les anecdotes à la volée,
enregistrent les aventures, les cancans, les menues nouvelles politiques,
en y imprimant leurs impressions personnelles, en se faisant plus ou
moins volontairement les échos fidèles de l'opinion publique, alors en
train de devenir si puissante \ »
Je ne puis songer à indiquer tout ce que contient de curieux le re¬
cueil d’extraits des lettres à M 01 * de Balleroy. Citons seulement quel¬
ques particularités entre mille.
Après la perte de la bataille de Ramillies (29 mai 1706), les harengé-
res de Paris (p. 3 ) poursuivirent la livrée du maréchal de Villeroy dans
les rues, et les gens de celui à qui le roi avait si noblement dit : Monsieur
le maréchal, on n'est plus heureux à notre âge , « ne purent avoir de
marée pour leur argent ». — Louis XIV, qui avait déclaré (p. 3 ) qu’a-
vant trois semaines une armée de 5 o,ooo hommes serait constituée, dé¬
chargea (p. 8) « les villes et villages à 10 lieues des costes des provinces
de Normandie, de Poitou et de Guyenne de tous les nouveaux impôts
et des 2 sols par livre, à condition de fournir et d’entretenir des mili¬
ces ». — Un certain Morin, qui tenait un bureau de nouvelles, donne
avis à de Balleroy, le 26 octobre 1706 (p. 9), du départ de Paris de
M 110 de Sery qui, accompagnée par M me de Nancré, alla rejoindre le duc
d'Orléans, grièvement blessé à la bataille de Turin * ». — On remarque
dans la même lettre (p. 11) cet éloge du numismatiste, Jean Foy Vail¬
lant : « M. Vaillant des médailles, garde du cabinet de M. le duc de
Maine et directeur de l'Académie des Inscriptions, mourut samedi der¬
nier d’apoplexie et fut enterré dimanche. Il s'estoit fait une assez grande
réputation dans la république des lettres, et il la méritoit 3 j>. — Voici
quelques nouvelles mondaines d’octobre et de novembre 1707 (p. i 3 ) :
« M. le Prince d’Auvergne épouse le 20 de ce mois à Anvers M 110 d’A-
1. Parmi les gazettes à la main mêlées à la correspondance des amis de M w de
Balleroy, M. de B. en a reconnu, dit-il (p. iv), « un certain nombre écrites par Bu-
vat, dont M. Campardon a fait connaître si utilement le journal relatif à une por¬
tion de la même période. Les phrases sont parfois absolument identiques dans la
forme et dans les termes. A cet égard, il n'y a pas de doute possible. On sait que
Buvat, employé à la bibliothèque du roi, tenait un bureau de nouvelles à la main,
qu’il expédiait moyennant finances, et nous avons tout lieu de croire que cette re¬
crue fut procurée à M rae de Balleroy par son neveu d’Argenson, pendant qu’il était
directeur de la librairie. »
a. On lit dans une lettre du 26 octobre 1706 (p. ta) : « Le duc d’Orléans est
guéri, mais son armée ne l’est pas ».
3 . Voir, au sujet de ce savant, une intéressante plaquette que vient de publier
M. Henri de Grammont, président de la Société historique algérienne : Un acadé¬
micien captif à Alger , 1674-1675 (Alger, i 883 , grand-in-8° de a 3 p.).
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d'histoire et de littérature 365
remberg, qui est fort belle et a 100,000 écus. M. le Marquis de Plancy
a épousé M Uo de Merode, sœur de M. le marquis de Verrins, et lbi a as¬
suré 14,000 livres de rente. M mg la duchesse de Lauzun va se faire sé¬
parer de son mari, qui l'a fort maltraitée ». — A la page suivante, on
voit Louis XIV jouant « au trente et quarante avec des pièces de
20 sols, chez M* e de Maintenon, avec quelques dames choisies » ». —
Le 14 décembre, on annonce à M we de Balleroy la mort (p. 16) de l'ar¬
chevêque de Rouen, J. N. Colbert, qui avait 1 56 ,000 livres de rente et
qui laisse des dettes. — Nous glissons sur les aventures de M lu Flo¬
rence, de l'Opéra, et du jeune prince de Léon, et nous nous arrêtons
avec respect devant ce passage d'une lettre du 24 décembre 1707 (p. 19) :
« Le Père Mabillon, si connu par ses ouvrages et par sa piété, est à l'a*
gonie; il a 76 ans » *. — Les nouvelles académiques abondent dans le
recueil; nous ne reproduirons que celles-ci (p. 19), datées du 24 dé¬
cembre 1707 : « L’Académie française a élu M. l’abbé Mangin [plus
tard évêque de Bazas] pour remplir la place de M. l’abbé Gallois et
M. l’abbé Fraguier pour remplir celle de M. l’archevêque de Rouen.
Us sont tous deux fort connus par leur savoir. Le roy a approuvé ces
deux nominations, et l’Académie est en paix ». — Puis viennent (p. 20)
le mariage du marquis de Chamillart avec de Mortemart, « à qui
le roy donne 10,000 livres de pension » 1 * 3 4 , la mort du marquis de Vil-
lette, celle de l’empereur du Mogol, Aureng-Zeb, âgé de 11 5 ans, et à
qui son fils, âgé de 80 ans, faisait la guerre, las d'attendre , ajoute plai¬
samment le chroniqueur. — En février 1708, on assiste (p. 26) au ren¬
voi de Paris de M mo de Beaumont-Loiaon et (p. 27) au retour de cette
femme aussi galante que jolie \ — Aurait-on cru possible que, devant
le grand roi, dans un des majestueux bals de Versailles (février 1708),
eût osé paraître un cuisinier déguisé en don Quichotte, et que l'on avait
pris pour un seigneur espagnol, lequel dansa (horresco referons!) avec
les duchesses de Noailles et de Villeroy (p. 27). — Je renonce à énumé¬
rer les brillants mariages et les mémorables décès qui ae succèdent.
1. On a souvent décrit Louis XIV inamusable en sa morne vieillesse. Ces des¬
criptions s’accordent peu avec ce passage (p. 3 $) d’une lettre du 19 novembre 1708 :
Le roi ira à Marli mercredi prochain pour dix jours; il ne s’est jamais si bien
orté et n’a été si gai ».
a. L’admirable érudit mourut trois jours plus tard. A la page 38 g, on a substitué,
par une faute d’impression, le nom de Mabillon à celui de Massillon.
3 . Les cadeaux pleuvaient sur la nouvelle mariée. On voit, le 4 janvier 1708
(p. 22), son mari lui donner « pour 5 o,ooo livres de pierreries ».
4. On sait qu’il est fait mention d’elle dans les Mémoires de Dangeau et de Saint-
Simon. C’est ici l’occasion de constate» que les Correspondants de la marquise de
Balleroy complètent tous les mémoires relatifs aux vingt-cinq premières années du
xvin* siècle, et qu’ils sont surtout importants pour les années où nous manquent les
AJémoires de Dangeau , qui s’arrêtent en 1720, et le Journal de Barbier , qui ne
commence qu’au 27 avril 1718. Quant au Journal de Mathieu Marais, rappelons
que, s’il y a quelques pages pour une partie des années 1715 et 1717, il ne com¬
mence réellement qu’en juin 1720.
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REVUE CRITIQUE
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Voici un trait qui fait honneur à Louis XIV (juillet 1708, p. 35 ) :
« M. le prince Frédéric d’Auvergne a gagné son procès contre le roy
pour le prieuré de Nantua, qui vaut 6,000 livres de rentes. Le roy
s’est condamné lui-même ». — La banqueroute de Samuel Bernard ne
pouvait être oubliée (p. 38 , avril 1709). — Une lettre de Caumartin de
Saint-Ange, du 11 octobre 1715, ouvre l'histoire de la Régence (p. 48).
Que de dissentiments tout d’abord ! M. Amelot contre l’abbé d'Estrées,
l'évéque de Troyes contre M. de Torcy, le duc d'Antin contre le duc de
Noailles. L’abbé de Guitaut ajoute (p. 5 1), le 18 octobre, à cette liste la
mésintelligence du maréchal de Villars et du duc de Guiche. — Cau¬
martin de Saint-Ange entretient sa correspondante (p. 33 ) de la banque
de M . de Lasse % « qui a tant fait de bruit » et qui devait tant en faire
encore jusqu'au pouf final, de l'enterrement (p. 54) de Louis XIV â
Saint-Denis : « Le service et la table, • écrit-il le 26 octobre, « ont été
magnifiques, et l'oraison funèbre de M* r de Quiqueran de Beaujeu, évê¬
que de Castres, détestable. J’étais allé ce jour-là à Saint-Germain diner
chez M. de Noirmoutiers. C'étoit le plus beau spectacle du monde de
voir de Chantecot les flambeaux dans la plaine de Saint-Denis : il n'y a
jamais eu de service moins célébré. Il n'y avoit pas un courtisan que
ceux que le service exigeait ». — Le chroniqueur ajoute (p. 55 ) que
dans le grand conseil des finances auquel il fut appelé, « il a esté conclu
que le roy avoit beaucoup de dettes et qu'on ne savoit comment les
payer ». — Parlant, le i* r novembre 1717, de l’assemblée des évêques
et du jansénisme, l'abbé de Guitaut dit avec malice (p. 56 ) : « De cette
incendie *, le père Le Tellier n'a pas laissé de sauver une bonne pension
de 4,000 livres qu’on lui assure ». — Dans une lettre de M m# d’Argen-
son, du 2 novembre 1715, éclate (p. 59) ce joli mot de M m * de Gesvres
(M 11# Mascrany) presque mourante à son mari, auquel elle avait intenté
le fameux procès en impuissance que l'on sait : « Monsieur, estes-vous
aussi porté de me quitter que moi de vous quitter? » s . — Le 9 novem¬
bre 1715, Caumartin de Saint-Ange trace (p. 64) ce tableau peu riant
delà situation : « L’argent est plus rare que jamais; tout le monde
meurt de faim ». — Appelons l’attention des bibliophiles sur l’édition,
réclamée par le même correspondant (p. 67), des Quatrains de Pibrac
que l’intendant Foucault fit imprimer à Caen. — La phrase suivante
(p. 71) prouve que Saint-Simon était aussi peu charitable de vive voix
que la plume à la main : «c i #r février 1716. M. le premier président
demande réparation des paroles peu obligeantes qu’a dit M. le duc de
1. Le nom de Law est écrit ici comme on le prononçait.
2. Incendie , d'incendium , a toujours été un mot masculin. C’est ce que rappelait
spirituellement, sinon poliment, Sophie Arnould à une dame qui lui demandait si
l’on s’était rendu maître d’ime incendie : je n’en sais rien, Madame, dit l’actrice; ce
que je sais seulement, c’est qu’incendie n’a jamais été féminin.
3 . Le mot est à rapprocher de celui que l’on prétend (p. 197) avoir été dit à un
mari par une femme infidèle : a J’aurois bien voulu vous aimer, mais vous êtes si
laid et l’autre est si joli ».
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d’histoire et DE LITTÉRATURE 367
Saint-Simon presqu’en sa présence » \ — L’abbé de Guitaut, à la même
date, fait un grand éloge de la mort édifiante de Philippe-Emmanuel
de Coulanges, l'aimable chansonnier (p. 73). — Les soufflets retentis¬
sent dans toute la page 77 et je recommande cette page, entre toutes,
aux amateurs de narrations comiques \ — Il est plaisant de voir (p. 85 )
le Régent prendre la défense de la morale contre un prélat qui n était
pas assez austère 3 . Ce serait le cas de répéter le vers proverbial de Ju-
vénal sur les Gracques qui se plaindraient d’une sédition. — Des
amours, des duels remplissent en grande partie les lettres suivantes. Le
duc de Richelieu est le héros de cette frivole époque 4 , où tout Paris al¬
lait admirer un âne dansant sur la corde 5 . — On glanerait çà et là bien
des renseignements sur la jeunesse de Louis XV et aussi bien des ren¬
seignements sur les prisonniers de la Bastille € . — M. de Breteuil nous
révèle, le 3 i mars 1717, cette longue faiblesse d’un célèbre personnage
italien : « Albergotti, qui faisoit le pauvre et n’a jamais diné chez lui
ni soupé par avarice, a laissé 700,000 livres d’argent à Gennes et plus
de 5 o,ooo écus à Paris ». — Le 2 avril 1717, le même correspondant,
qui fut un des protecteurs de J.-B. Rousseau, repousse ainsi (p. 140) ce
1. Dans une autre lettre, de la même date, Caumartin de Saint-Ange déclare que
Saint-Simon parla de ce magistrat « en termes de crocheteur », que M. de Mesmes
ne fit pas semblant de l'entendre, et que le Régent feignit d’ignorer ce scandale, de
crainte d’être obligé d’envoyer l’insulteur à la Bastille. Saint-Simon, en ses Mémoi¬
res, n’a rien dit de cet incident. Il est plusieurs fois question de l’irritable duc dans
les deux volumes. Citons seulement cette épigramme de Caumartin de Boissy (t. Il,
p. 287) : a Saint-Simon lui répondit avec son petit filet de vinaigre ... »
2. Ai-je besoin de dire (avec la Régence, il faut s’attendre à tout) que certains ré¬
cits sont bien anacréontiques ? Il en est un (p. 187) qui, dans la bouche de M m * de
Chevilly, était, selon Caumartin de Boissy, un des plus beaux contes du monde et
qui ne déparerait pas les Historiettes de Tallemant des Réaux. Cela pourtant n’é¬
gale pas un récit de d’Argenson, épicé entre les plus épicés du volume (p. 261) et
encore dépassé, dans le tome II (p. 143), par un récit de Caumartin de Boissy, le¬
quel est le nec plus ultra du genre.
3 . M. de B. (p. 85 ) rappelle que l’historien du diocèse de Beauvais, l’abbé Delet-
tre, attribue à la conduite énergique de ce prélat (F. H. de Beauvilliers) contre le
jansénisme, tous les tracas qu’on lui suscita.
4. D’Argenson écrit le 22 janvier 1717 (p. io 5 ) : « M. de Richelieu n’a jamais été
si à la mode... On vous enverroit la liste des femmes qui courent après lui ».
5 . Le chevalier de Girardin, qui se moque du a beaucoup de presse » avec lequel
on allait voir à la foire de Saint-Germain ce danseur d’un nouveau genre, se mon¬
tre bien naïf ou bien distrait (p. 112), en disant que c’était a un âne en vie ».
6. M. de B. n’a pas utilisé dans ses notes le recueil de M. F. Ravaisson. Puisque
nous en sommes aux notes, je dirai que l’éditeur ne les donne pas toujours aussi
complètes qu’on le désirerait. La plupart tiennent en une ligne ou deux. 11 est vrai
qu’il en est quelques-unes qui, par compensation, sont très développées, comme la
note sur le baron de Breteuil (pp. 114-117). Quelques notes ont un tour d’autant
plus piquant, que l’effet est moins cherché, celle-ci, par exemple, qui accompagne la
nouvelle ainsi donnée par Caumartin de Boissy (p. 124) : a Le pauvre duc d’Albret
est plus touché que je ne puis vous le dire de la mort de sa femme ». Le commen¬
tateur reprend : a II se remaria cependant trois fois depuis, avec M 11 ** de Barbezieux.
de Gordes et de Lorraine-Harcourt ».
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368 REVUS CRITIQUÉ
que Ton avait dit du malheureux poète : « Rousseau a fait l'ode dont
vous m'écrivez comme vous l’avez fait, mais c’est assez que quelque
chose ait de la force et de la malignité pour qu'on l'attribue à Rousseau
ou à Arouet, que j'ai faussé à Saint-Ange depuis le commencement du
carême » \ — Le 7 avril, d'Argenson trace du directeur des finances,
Hilaire Rouillé du Coudray (p. 143) ce portrait infiniment peu flatté :
« Le Rouillé tombe de jour en jour du cas que faisoit de lui le Régent,
il est si rebuté de le voir toujours ivre, toujours brutal et plat bouffon,
qu'il le porte partout sur ses épaules » *. — Le séjour du tsar à Paris et
ses voyages à Versailles, à Fontainebleau, ont fourni à Caumartin de
Boissy (mai 1617) un chapitre rempli d’anecdotes qui toutes n'étaient
pas connues (pp. 162-166). — Une lettre de d’Argenson, du 9 novembre
1717, donne (p. 222) la preuve formelle du mariage de la duchesse de
Berry avec Riom 8 . Dans le même document sont attribuées à la fille du
Régent et à Massiilon des relations que l’âge seul de la princesse et de
Porateur rendrait invraisemblables : la duchesse de Berry avait alors
21 ans et Massiilon 53 \ — Relevons (p. 142) cette phrase sur l'impres¬
sion produite par la publication des Mémoires du cardinal de Ret^ (dé¬
cembre 1717) : « Les Mémoires du cardinal de Retz, livre bien écrit,
fait ici beaucoup d'effet. Ils agitent les faibles et augmentent l'inquié¬
tude des inquiets »,
Le second volume n'est pas moins intéressant que le premier. Mais,
comme le premier m’a déjà retenu trop longtemps, je dirai quelques
mots seulement du second, qui nous conduit du 2 janvier 1719 au
3 o novembre 1724. On y trouvera des indications de tout genre sur le
poète Roy (p, 3 ), sur l’abbé de Vertot (p. 4), sur le cardinal de Polignac
(p. 5 ), sur l’incendie de Lunéville (p. 7), sur les Mémoires -de M Ue de
Montpensier (p. 8) 5 , sur le futur maréchal de Broglie(p. 11), sur le duc
de Saint-Simon (p. i 3 ) 6 , sur le président de Folleville (p. 22), sur le
1. On trouve (p. i 63 , à la date du 26 mal 1717) cette nouvelle mention de Vol¬
taire : « Le petit Harouet, poète satirique, a été mis à la Bastille et sera mené, dit-
on, à Pierre-Encise ». Voici (p. 399), à la date du 3 o décembre 1718, une mention
bien différente : « M. le Régent a donné une médaille à M. Arouet un récompense
de sa belle tragédie d'Œdipe ».
2. Voir un peu plus loin (p. 172) une prétendue confession de Rouillé au Régent.
3 . D’Argenson a presque été un témoin oculaire, car il dit : « Je vous en parle
pour avoir vu Phabit de noce qui est fort beau ».
4. M. de B. rappelle (p. 227, note 1) qu’il a fait facile iustice de l’accusation dans
son Histoire des filles du Régent. J’ai aussi protesté jadis contre Te récit de d’Ar-
genson ( Des récents travaux sur Massiilon , 1872, in-8°, pp. 21-22).
5 . L’impression on fut arrêtée en janvier 1719, quand on en était au second tome.
D’Argenson eut, par grâce spéciale, un exemplaire du tome I. En septembre 1721,
d’Argenson (p. 358 ) annonce qu’il est arrivé malheur de nouveau à ces mémoires :
« Son Altesse Royale a fait arrêter l’imprimeur et brûler ce qu’il y avoit de com¬
mencé ». Nous ne l’aurons, ajoute-t-il philosophiquement, que par la Hollande.
6. Opposons aux malices précédentes cet éloge échappé à Caumartin de Boissy
(2 février 1719) : « Il est honnête homme et rend témoignage à la vérité ».
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d'histoire et de LITTÉRATURE 309
cardinal de Bissy (p. 23 ), sur le cardinal de Rohan (p. 25), sur le duel
de MM. de Bénac et de Jussac (p. 26), sur le comte de Stairs, ambassa¬
deur d’Angleterre (p. 3 o), sur le combat singulier à coups de couteau de
M“ # de Nesle et de M me de Polignac (p. 34), sur l'emprisonnement à la
Bastille du duc de Richelieu et du marquis de Lasteyrie du Saillant
(pp. 41-46), sur M 110 de Livry, tant aimée de Voltaire (p. 5o), sur l'iro¬
nique et bien étrange testament verbal de la princesse de Conti (p. 54),
sur le chanoine de Tours si connu par ses contes grivois, l’abbé de Gré-
court (p, 55 ) *, sur la mort de la duchesse de Berry (p. 65 ), sur la chute
des actions du Mississipi, dignes aïeules des actions de l’Uruguay (p. 69),
sur le docteur Chirac (p* 85 ), « aussi riche que grand médecin, et trois
fois plus ardent pour l’argent *> ; sur le chroniqueur Dangeau 1p. 86) qui,
s’étant a tiré gaiement de la taille, revient de loin à quatre-vingt-quatre
ans » ; sur Y Antiquité expliquée « aux belles planches » de Dom Ber¬
nard de Montfaucan, dont le prix s’élève toujours (p. 87), sur le ballet
(p. 118) où le jeune Louis XV « a dansé dans la dernière perfection » ;
sur le mariage de M u# de Valois avec le duc de Modène (pp. 120-122)*,
sar la tragédie d f Artémise par Voltaire, pièce qui eut « une mauvaise
réussite » qu'elle ne méritait que trop (pp. 121-124) 1 2 3 , sur l'abbé Dubois,
le nouvel archevêque de Cambrai (p. i 3 i) 4 , sur l'abbé Boileau, de l’Ar¬
chevêché, que Caumartin de Boissy croyait à tort cousin du flagellant,
comme il s’exprime (p. i 33 ) 5 sur l’aflaire du comte de Horn (p. 142),
sur s la traduction entière de M. de Thou en françois, avec des remar¬
ques » par M. l’abbé de Pons, chanoine de Seez (p. 177), le spirituel
bossu dont Sainte-Beuve s'est tant occupé â propos de la querelle rela¬
tive aux Anciens et aux Modernes, sur la vie de l'abbé Suger (p. 178), par
le P. Gemdse, dont la destinée fut si ondoyante et si diverse, sur l'exil en
province des frères Paris (p. 178), sur Robinson Crusoë , si déplorablement
jugé dans une lettre du 1 3 juillet 1711 (p. 1 85 ) % sur l’internement du Par-
1. Caumartin de Boissy nous fait connaître en style rabelaisien ce personnage qu’il
appelle le poète de la Constitution : a C’est un grand diable de prêtre, plus haut que
moi, bien pourvu de gueule, bien fendu de jambes, bien décrotteur de matines, bien
dépendeur d’andouîlles », etc.
2. Citons ce bon mot sur les bagages de la princesse : « Le duché de Modène se-
roit, à ce qtfon <fit, encombré de ce qu'elle emporte d’habits ».
3 . Caumartin de Boissy revient sur ce sujet (p. 127) : « La pièce cTHarouet tomba
dès le premier jour si prodigieusement que lui-même dit qu’il la trouvoit plus mau¬
vaise que personne ».
4. Voir (p. 169) deux bonnes anecdotes sur Dubois; je n’en garantis pas l’authenticité.
5 . Caumartin de Boissy (lettre du 11 mars 1720), après avoir raconté les circons¬
tances de l’accommodement accepté par le cardinal de Noailies, ajoute : « Boileau dit
assez plaisamment que la formule de l’acceptation doit être : je reçois respectueu¬
sement Verreur masquée sous les apparences de la vérité, dont je ne me soucie guère ».
< 3*681 un mot à joindre à tous ceux que j’ai eu l’occasion de citer de ce personnage
si original dans mon Essai sur la vie et les ouvrages de Vabbé J . Boileau (Agen,
1878, in-8®).
■6. « Je le crois [ce voyage] fait à plaisir; mais je doute qu’il en fasse à ceux qui le
liront ».
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REVUE CRITIQUE
370
lement à Pontoise, d’où il ne devait pas tarder â revenir (p. i 85 ), sur la
peste de Marseille (pp. 188 et suiv.) ', sur l’assassinat du poète Jacques
Vergier, appelé (p. 189) « l’homme du monde le plus agréable, qui a fait de
belles chansons du temps de M. de Seignelay », sur le mariage du prési¬
dent de Maisons avec M 1Ie de Ménars (p. 190), sur les fêtes données à
M llc deMontpensier, fille du Régent, mariée au roi d’Espagne (p. 225) *,
sur M“ # de Phalaris,à propos de laquelle le chroniqueur cite, en le gazant,
un bien vif bon mot de M. de Broglie au Régent (p. 241) 3 sur les cou¬
ches à Rome ( 3 i décembre 1720) de « la princesse épouse du chevalier
de Saint-Georges » (p. 248), auxquelles assistèrent « treize cardinaux »
et « plus de deux cents Anglais », sur l’estampe allégorique du « fameux
graveur » Bernard Picard représentant la Fortune conduite par la Fo¬
lie (p. 256 ), sur la distribution en six départements des livres de la Bi¬
bliothèque du Roi (belles-lettres, droit, histoire, médecine, physique,
théologie), chaque titulaire devant avoir 1,000 livres d’appointements
(p. 25 1), sur la lettre de cachet envoyée à Dom Thierry de Viaixnes,
qui a été surnommé le plus endurci de tous les Jansénistes (p. 267), sur
rentrée de l’ambassadeur turc à Paris (p, 293) et sur l’audience solen¬
nelle (p. 3 oo) où tant de luxe fut déployé par le roi et par toute la cour,
que le chroniqueur dit avec extase : t Jamais rien n’a été si magnifique »,
sur le mariage de M Ile Desmares avec le banquier suisse Hogguers
(p. 309) 4 , sur la conversion (hélas! non définitive) de M me de Parabère
(p. 342), sur la réception de l’évêque de Soissons (J.-J. Languet de Gergy)
à l’Académie française (p. 35 o), sur la mort du cardinal de Mailly, ame¬
née, dit-on, par un accès de colère (p. 355 ), sur l’installation de la Bi¬
bliothèque du Roi dans l’hôtel de la Banque (p. 357), sur l’enlèvement
de M llc de Laigles par l’abbé de Mérinville (p. 358 ), sur les aventures de
Cartouche (pp. 362, 378-386) 5 , sur un bal donné à l’occasion du départ
de la princesse des Asturies et où, devant Louis XV et le duc d’Orléans,
1. Je suppose qu’il faut plus facilement croire à cette nouvelle de la page rj 5 :
a l’évêque de Marseille, qu’on a dit mort, a vendu jusques à sa dernière soutane
pour assister lui-même les pauvres malades qui manquent de tout... », qu’à cette
nouvelle de la page uo 3 : a M. Lass a conseillé au Régent de brûler la ville, les bas¬
tides et tous ceux qui sont dedans ».
2. Ces fêtes furent surtout brillantes en Guienne. On lit dans une lettre du 2 jan¬
vier 1721 : « M u * de Ventadour a écrit de Bordeaux que cette ville s’étoit signalée
par la magnificence et par la variété. Lorsque M Ut de Montpensier fut prête à passer
le Bec d’Ambez, elle fut reçue dans un bac magnifiquement orné et accompagné de
barques remplies de symphonies ».
3 . On se demande avec effroi ce qu’aurait pu être le bon mot, si l'on n’avait pris
la précaution de le gazer.
4. M. de Lescure qui pourtant, comme on l’a vu, a connu les manuscrits de la
correspondance Balleroy, avait sans doute oublié ce détail, quand, dans son livre sur
les Maîtresses du Régent , il a donné pour époux à la galante actrice un fils de Paul
Poisson, de la Comédie française.
5 . Voici la fin de ces aventures (p. 3 go) : « Un chirurgien, ayant acheté le corps
de Cartouche, l’a bien habillé, lui mit une perruque et du rouge et le montroit pour
de l’argent. 11 a gagné 7 ou 800 livres en vingt-quatre heures ».
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d’histoire et de littérature 371
M. de Sabran appliqua « quatre ou cinq coups de pied dans le ventre »
à sa femme en conversation... criminelle avec M. de Mirepoix (p. 368 ),
sur la dispute (p. 370) du comte de Saint-Chamans avec un vicaire qui,
€ dans le feu du combat », lui c emporta avec ses dents presque le doigt »,
sur la retraite en un couvent du fameux duc de Lauzun, prêt à mourir
et imitant le diable de la légende qui, sur ses vieux jours, se fit ermite
(p. 414), sur les lettres de grâce accordées à M ,lc Chéron de Saint-Hi¬
laire qui, vengeant d’un seul coup toute sa famille, avait tué un sieur
Lescache, trompeur de sa sœur aînée et meurtrier des deux frères de ces
demoiselles (p. 416), sur une séance de l’Académie des belles-lettres, pré¬
sidée par le cardinal de Polignac, et où prirent la parole l’abbé Anselme,
Fourmont et Louis Racine (p. 453), sur la séance de réception du car¬
dinal Dubois à l’Académie française (p. 5 o 3 ), sur le projet de publica¬
tion par les Bénédictins de Saint-Germain-des-Prés (p. 5 20) d* « un re¬
cueil complet de tous les historiens de France en 22 volumes in-8° (sic),
qui se livreront deux par deux et ne coûteront aux souscripteurs que
8 livres chacun », sur la représentation d'Inès de Castro, tragédie qui
obtint un vif succès (p. 532).
Restons-en là. Aussi bien avons-nous surabondamment prouvé que
peu d’ouvrages contiennent autant de choses diversement curieuses que
les deux volumes si soigneusement publiés par M. E. de Barthélemy.
T. de L.
219.— Clément Janin.—L es Imprimeurs et les Libraires dans la côte-d*Or.
Seconde édition, avec portrait et fac-similé. Dijon, Darantière, i 883 . Pet. in-8
carré de vh -238 p. p. et 1 f., plus 1 portr. et 2 planches.
La première édition du travail de M. Clément-Janin remonte à l'an¬
née 1873 ; c’était une simple brochure, qui s’est transformée en un véri¬
table volume. L’auteur fait lui-même allusion, en terminant sa préface,
au concours empressé qu’il a trouvé par toute la Bourgogne, tant dans
les archives que dans les bibliothèques publiques et privées, et il ajoute :
c Si mon livre ne satisfait pas le lecteur, il ne devra s’en prendre ni à la
qualité ni à la richesse des matériaux employés, mais à l’inhabileté de
l’écrivain ». Eh bien 1 dussions-nous passer pour sévère, nous avouons
que, malgré les renseignements très utiles que l'on rencontre dans cet
ouvrage, il ne nous satisfait nullement. C’est que M. C.-J. n’a pas l’idée
précise de ce que doit être la bibliographie. Il ne suffit pas de nous don¬
ner un résumé plus ou moins exact des notices biographiques que l’ar¬
chiviste de la Côte-d’Or a dressées à l’aide des actes dont il a fait le dé¬
pouillement (l’absence de renvois aux sources montre suffisamment que
ce n’est pas M. C.-J. qui a fait les recherches), il fallait nous donner une
liste exacte et précise des productions typographiques de Dijon et des
autres villes de la Côte-d’Or, en même temps que des livres qui portent
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REVUE CRITIQUE
372
les noms de libraires du pays. C'est ce que l'auteur n'a pas fait. Il cite,
à la vérité, un assez grand nombre de volumes, mais la plupart des titres
sont tronqués ou infidèlement reproduits ; nulle part le format n'est
indiqué, encore moins la collation en est-elle donnée. 11 serait également
nécessaire de faire connaître les collections qui possèdent ces éditions
provinciales, souvent introuvables.
On conçoit qu’il ne nous est guère possible d’entrer dans des critiques
de détail ; il nous faudrait refaire en entier les listes dressées par M. C.-J. ;
c’est un soin que nous laisserons à d'autres. Nous profiterons seulement
de l'occasion pour citer quelques rares impressions dijonnaises que
M. C.-J. ne semble pas avoir connues :
A l’article Pierre Grangier, il faudrait ajouter la pièce suivante :
f Le Salue Dalkimie. [| % Pource que Ignorans ont resue [| A calciner
tout talk en myes || Lon a cy fait sur Lalkimie fj Yne rime par le Saine.
— Finis . || If Peu et repas. || % Imprime a Dijon. S . d. [v. 1 553 }, pet.
in-8 goth. de 8 ff. de ao et 21 lignes à la page, fig. sur bois avec titre.
Ce poème, farci de latin, est une épître satirique adressée au sieur de
Villeneuve, c’est-à-dire au fameux Michel Servet qui, à la suite de ses
études médicales, fut, paraît-il, accusé de se livrer aux pratiques de l'al¬
chimie. L’auteur dit au sieur de Villeneuve :
Clamamus après la justice
Qui tient ton velours en prison.
C’est une allusion à l'emprisonnement de Servet, qui fut arrêté à Vienne
en Dauphiné, au commencement de l'année 1 553 .
Les caractères sont ceux de l’imprimeur Pierre Grangier \
Les pièces suivantes compléteront l’article consacré à Jean I er Des
Planches :
1. Vray || Discours [| de la Victoire, || Obtenue par le Roy, le troisiesme
iour || d’Octobre, Mil cinq cens || soixante neuf. || * || A Diion, Par I. Des
Planches. || 1569. f| Auec Permission. In-8 de 6 £f. non chiffr*.
Cette relation, datée d’Hervaux, le 4 octobre, et signée : De Nenfviüe,
est l'œuvre de Nicolas de Neufville, sieur de Villeroy ; elle fut imprimée
successivement dans diverses villes. Voy. le Catalogne de ITiistoiredt
France.
2. Larmes || sur le Trespas de || Hault & puissant Seigneur Messin
Io-|| achim de Malain, Baron de Lutz & de |] Malain, Seigneur de Set-
gnelay, &ç. || Cheualier de l'ordre du Roy, & Lieute- ffnant de cinquante
hommes d’armes de f] ses ordonnances en la Compaigme de f| Monsieur
de Tauanes. || A Tresnoble & Très fj excellente Dame ff Dame Margue¬
rite de Rye, Dame de || Lutz & de Malain, mere dudict (J Seigneur f| Par
1. Biblioth. de feu M. le baron James de Rothschild.
a. Biblioth. nat., Lb 88 277*
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d’histoire et DE LITTÉRATURE 373
Il I, B. R. D. Il Imprimé à Dijon || Par /. des Planches . || 1570. In-4 de
8 ff. non chiffr \
Les initiales I. B. R. D. sont celles de Jean-Baptiste Richard,
Dijonnois.
5 . De insigni et insa- (1 tiabili Cuculo ex Affrica in Galliam [| aduecto.
|J Philibertus Colinæus clarissimo Diuionensi || Senatu Consiliarius Re-
gius. — [Fol. ult. r° :] Diuione, || Ex Typographia Ioann. Des Plan¬
ches , || 4. Non . Maii, Anno àpartu Virgineo, || 1572. In-4 de 4 ff. avec
un simple titre de départ \
Le poème sur le coucou est suivi de quatre autres petites pièces facé¬
tieuses.
Le v° du 3 ° f. contient un portrait de Pn. Colin gravé sur bois et
accompagné de sa devise : Stoçpéviaov tïjv ypkrp. — Le v° du dernier f.
est blanc.
4. In célébrés egregii || Stephani Mileti, Diuionensis Senatus || Consi-
liarii Regii, &præclaræ Margaridis Fiot nup-1| tiasEpithalamium,lepi-
dumque nuptiale carmen, ve [| recundè & modestè a Philiberto Colinæo
Senatore|| Regio conditum. — [In fine :] Swçpéviaov tï)v xoMjv. Il Diuione,
Ex Typographia Ioan . Des Planches . 1572. In-4 de 4 avec un sim¬
ple titre de départ \
Le recueil contient neuf petites pièces latines.
5. De || Victoria |] nauali Christiano- || rum aduersus Turcas, |) Non.
Octob. M. D. LXXI. || Ad S. P. Q. Venetum, & cæteros || sacri fœderis
socios, Parænesis. || lac. Vintimillio Rhodio Christianiss. Francorum
|| Regis Consiliario Diuionen. authore. \\ Diuione, \\ Excudeb. Ioann .
Plancius . || i 5 j 2 . In-4 de 1 f* P our * e titre et *3 PP«*•
6. Epithalamium Henrici III., Galliæ Poloniæque Regis, et Lodoicæ
Lotarenæ. Ad V. C. Dion. Brulardum. lac. Vintimillio Rhodio, Chris¬
tianiss. Francorum Regis Consiliario Diuion., authore. Diuione, Ex-
cudeb. Ioann . Des Planches , i 5 y 5 . In-4 5 .
De Jean III Des Planches, dont M. C.-J. mentionne quatre produc¬
tions, on peut encore citer une pièce publiée après la mort du premier
président Brulart :
Consolation à M me la première présidente sur le deces de M. son mari.
A Dijon 9 Par J . Des Planches, 1611. In-8 6 .
De Claude Guyot M. C.-J. ne cite que les impressions « les plus cu¬
rieuses ou les plus rares »; il aurait pu y joindre les quatre suivantes :
x. Biblioth. nat., Y. 4647.
2. Biblioth. nat., Y. 2x35. Rés.
3 . Biblioth. nat., Y. 2134. Rés.
4. Biblioth. nat., Y. 2812.
5 . Biblioth. Sunderlandiana , n* 2069.
6. Biblioth. nat., Ln* 7 3114.
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REVUE CRITIQUE
3 74
1. Le bon Ange de la France, rapportant soixante-deux Anagrammes
en forme de présagés, vœux ou bénédictions, le tout heureusement tiré,
sans addition, diminution ou mutation de lettres, du très-fortuné, très-
grand et tres-auguste nom de Louis XIII de Bourbon, roy de France
et de Navarre; ensemble de tres-haute et tres-illustre princesse Anne
d’Austrie, infante d'Espagne, sur l’heureux mariage de Leurs Majestés.
[Par Thomas Billon]. De l'impression de Dijon , par C. Guyot, i 6 i 3 .
In*8 de i 5 pp. *.
2. Deo Opt. Max. et D. Bernardo pro nova basilicæ Fontanensis in-
stauratione sacrum. [Auctore Joanne a Sancto Malachia.] Divione, typis
C . Guyot , 1620. In-4 1 2 .
3 . Oraison funebre sur le trespas de Monseigneur de Termes pronon¬
cée en l’eglise des RR. Peres Jésuites de Dijon, le 28. d'Aoust 1621,
par Fr. J. Petriny.... Dijon , C. Guyot , 1621. In-12 3 .
4. Officia propria insignis ecclesiae collegiatae divae Mariae Virginis
apud Belnam. Authoritate Venerandorum DD. Decani Canonicorum
et Capituli, ad Formam Breviarii Romani accomodata. Divione apud
Claudium Guyot,Typographum regittm. MDCXXVIII [1628]. In-8 de
20 ff. et 1 52 pp. 4 .
Nous ne nous arrêterons pas plus longtemps aux imprimeurs; nous
passerons directement aux libraires dijonnais dont M. C.-J. parle dans
un chapitre séparé. Sans faire ressortir les inconvénients qui résultent
d’une division par suite de laquelle l’auteur ne peut grouper tous les
faits qui se rattachent à une même époque ou aux membres d’une meme
famille, nous ferons encore quelques observationa sur ceux des libraires
qui ont exercé au xvi« siècle.
M. C.-J. cite, d'après les Coustumes generales du comté de Bout-
goingne , un certain Hugues Danour, demeurant à Dijon, devant No¬
tre-Dame ; mais le renvoi qu'il fait aux Coustumes est si défectueux que
nous ne savons s’il s’agit du volume décrit au Manuel du Libraire 5 . En
effet, M. Brunet dit que cet ouvrage porte une date (celle de 1539) et
appelle l’éditeur Danoux et non Danour . Il faut ajouter qu’Hugues
avait un parent, un frère probablement, qui exerçait à Dôle. Ce der¬
nier, Mongeot Danoux, fut de moitié dans la publication des Coustu¬
mes de 1539. Il était encore libraire en i 552 ,et l’on trouve son nom
(Mongeot Danot) sur le titre des Ordonnances impériales a la court
souveraine de Parlement, etc. 6 . La forme Danot nous donne lieu de
croire qu’un autre libraire dont parle M. C.-J., le correspondant dijon-
1. Biblioth. nat.,Lb 36 176.
2. Biblioth. nat., Lk 7 2867.
3 . Biblioth. nat., Ln 37 1438.
4. Biblioth. de Beaune, n° 7500.
5 . II, 358 .
6. Cat. Tross, i883, n° 6248.
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d'histoire ET DK LITTÉRATURE 375
nais de Jehan Petit, s’appelait, non pas Jehan Davot , mais Jehan Danot ,
et qu’il appartenait à la meme famille *.
Après avoir parlé des Davot, M. C.-J. revient sur les membres des
familles Grangier et Des Planches qui ne furent que libraires, et il cite
divers extraits des registres du corps de ville de Dijon et du Journal de
Gabriel Breunot qui prouvent que Maximilien Des Planches était,
comme son père, Jean I er , un ennemi de la Ligue, et nourrissait des
sympathies secrètes pour la Réforme. Nous sommes surpris qu’il ne
mentionne pas, à cette occasion, l'imprimeur ou libraire genevois Je-
remie Des Planches qui, en 1584, publiait, en 4 volumes in-fol., les
Œuvres de Cicéron et donnait, en 1587, une édition des Psaumes de
Marot et Théodore de Bèze.
En dehors de Dijon, une seule ville de la Côte-d’Or pourrait mériter
quelques remarques, la ville de Beaune. M. C.-J. emprunte à M. Gaul-
iieur la description du Breviarium secundum usum insignis ecclesie
collegiate Beate Marie virginis de Belna, imprimé par Jacques Vivien
à Genève en 1517. Cette description est fort inexacte; pourquoi ne pas
Bavoir revue sur l’exemplaire que possède la bibliothèque municipale
de Dijon? Nous voudrions que M. Clément-Janin eût apporté à décrire
ce livre le soin qu’y a mis M. Peilechet dans une excellente bibliogra¬
phie dont nous rendrons compte prochainement *.
Emile Picot.
VARIÉTÉS
Les manuscrits slaves de In bibliothèque de l’Université de Leyde.
Pendant un récent séjour à Leyde, j’ai constaté, à la bibliothèque de
l’Université, l'existence de quelques mss. slaves sur lesquels je crois utile
d’appeler l’attention :
i* Mss. slavons :
A. Vie de David, examinée par Sreznievsky en 1875 (ms. du
xvi* siècle à miniatures) ; relié à la suite, d’une autre main : Service des
saints .
B. Consultationes piae anochoretarum (onciale du xm* (?) siècle);
provenant de la bibliothèque de Scaliger.
C. Fragment de calendrier du xiv® siècle provenant de la bibliothèque
1. M. C.-J. publie, à propos de ce libraire, une pièce infiniment curieuse : c’est
une liste de livres déposés chez Davot ou Danot par Jehan Chief de Verne, agent du
grand libraire parisién Jehan Petit. Ce document aurait eu encore plus de valeur si
l’auteur s’était préoccupé d’en fixer la date en recherchant chacun des ouvrages in¬
diqués sommairement dans l'acte.
2. Notes sur les livres liturgiques des diocèses d'Autun, Chaton et Mâcon, p. 33 .
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376
de Scaliger, examiné par Sreznievsky en 1875 et par M. Hasdeu en
1 883 .
D. Rouleau calligraphique slavon russe daté de i582 (renferme tou¬
tes sortes d'exercices calli. ou plutôt cacographiques). Ce rouleau a en»
viron 5 mètres de longueur. A la fin, on trouve la liste des titres officiels
d’Ivan le Terrible.
E. Lexicort slavonicum summo studio et labore ex variis auctoribus
partim manuscriptis partim impressis , collectum à Maturino Veys-
sière La Cro\e> Berolini 170g (Fort curieux ; l’auteur y confond sans
cesse le slavon, le russe et le polonais). Il serait intéressant de dépouiller
ce répertoire peu connu et de rechercher à quelles sources l’auteur en a
puisé les éléments.
2 0 Mss. tchèques :
A. Calendrier astrologique Hve\darsti (en trois couleurs, provenant
delà bibliothèque de Vok de Rosenberg, 1509, signé David Prætorius
Havel). Dans la même reliure :
B. Un traité d’alchimie du xiv* siècle, anonyme.
C. Pandecti, traité religieux traduit d’Othon de Brumfels* (inachevé).
A la première page, cette mention : Ce livre m’a été donné par le frère
Jean Abdias en 1584. Ce ms. provient de la secte des frères bohèmes.
Sur la couverture, table des matières et cette mention : J’ai ce livre
depuis 153 g, du jour de la saint Jean-Baptiste (faisait partie de la bi¬
bliothèque de Vossius).
D. Traité d'alchimie traduit de Laurent Ventura, de Venise, dédié à
Otto Henri, prince palatin du Rhin, prince de Bavière, électeur dusaint
empire. A la dernière page, cette suscription : Ce livre a été heureuse¬
ment terminé par moi Bavor, cadet de la famille Rodovsky de Hustir-
zan... à Prague, en l’an 1 585 , le 11 mars \
La couverture porte à l’intérieur les armes de la famille de Hustir-
zan et une mention indiquant que le ms. a été vendu en 1589 pour
5 o thalers.
Ces mss. proviennent de la bibliothèque d’Isaac Vossius qui est,
comme on sait, restée à Leyde. Vossius les avait évidemment rapportés
de Suède. On n’ignore pas que, pendant la guerre de Trente-Ans, les
Suédois ont emporté dans leur pays un grand nombre de mss. tchèques
dont quelques-uns s’y trouvent encore aujourd’hui.
h. Leger.
1. Compilateur allemand du xv* siècle.
2. La famille de Hustirzan s’est éteinte au commencement de ce siècle. Le
Nauc^ny slovnik (encyclopédie tchèque) ne fait pas mention de ce Bavor.
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DHISTOIRE ET DE LITTERATURE
3 77
CHRONIQUE
FRANCE. — La librairie Delagrave va publier,du io au i 5 novembre, une traduc¬
tion française de la deuxième édition des Pvinciples of Philology de M. Sayce. Cette
traduction a été faite par M. Ernest Jovy; elle est précédée d’une préface de M. Mi¬
chel Bréal; M. Sayce a composé pour cette traduction de son livre, trois appendices
importants et un avant-propos qui ne figurent pas dans l’édition anglaise.
— M. Louis Paris, l’ancien directeur du Cabinet historique , a fait paraître le pre¬
mier volume du Catalogue de la bibliothèque d’Epernay, dont il est actuellement
conservateur.
— La seconde série du recueil de pièces rares que M. Henry Chevreul publie
sur la Ligue en Bourgogne , renferme les morceaux suivants : Advis des États
de Bourgongne aux François , touchant la résolution prise aux Estats de Blois
Van i 588 (pamphlet de l’avocat au parlement et député du bailliage de Dijon Etienne
Bernard); Contre-lettre à la noblesse de Bourgongne responsive à certaines lettres
du prétendu conseil d'Éstat estably à Dijon ; Discours de deux belles deffaides des
ennemis, exécutées en Champagne et en Bourgogne par les sieurs d’Hautefort , de
Fervaques, de Gionvelle et autres capitaines le 23 ° jour d’avril i 58 g ; Relation de
ce qui s’est passé en i 585 et i 586 en la ville d’Auxonne sous le gouvernement de
M. le vicomte de Tavanes ; Discours véritable du siège mis devant la ville de Mont -
bard par le sieur de Tavanes associé des reitres du Bearnois, etc. Ce volume, tiré à
120 exemplaires, a paru à Paris, chez Jules Martin.
— Dans une étude intitulée Bossuet àJuilly, et lue le 19 juillet i 883 , à l’inau¬
guration d’un buste de Bossuet, d’après Coysevox (Poussielgue. In-8°, 24 p.), le père
Ingold a raconté l’histoire des relations de Bossuet avec les oratoriens de Juilly; on
trouvera dans son opuscule une lettre inédite de l’évêque de Meaux au P. de Sainte-
Marthe et le récit, également inédit (laissé par le P. André), de la réconciliation de
Bossuet et de Malebranche.
— M. Amédée Gasquet, docteur ès lettres, est nommé professeur d’histoire et de
géographie de l’antiquité et du moyen-âge à la Faculté des lettres de Clermont
(chaire nouvelle).
ALLEMAGNE. — La prochaine session du Congrès des orientalistes a été fixée à
l’année 1886; le congrès se réunira à Vienne, en Autriche.
— La librairie Brockhaus, de Leipzig, publiera prochainement les ouvrages sui¬
vants : Aus dem westlichen Himalaja , Erlebnisse und Forschungen, par Karl
Eugen von Ujfalvy (avec 3 cartes et 25 o dessins de B. Schmidt); Die Stadt Palma,
par l’archiduc Louis Salvator ; un nouveau livre de M. Henri Schliemann, Troja,
Ergebnissc meiner neuesten Ausgrabungen auf der Baustelle von Troja t in den
Heldengrcebern , Bunarbaschi und an andern Orten der Troas im Jahre 1882 , avec
une préface de M. A. H. Sayce, 4 cartes et plans, et i 5 o gravures; la première édi¬
tion complète, d’après le manuscrit de Jean Hauer, du Journal de voyage d Albert
Durer dans les Pays-Bas (Albrecht Durer’s Tagebuch der Reise in die Niederlande) f
par M. Fr. Leitschuh, directeur de la bibliothèque royale de Bamberg, avec une
introduction et des notes.
CEYLAN. — Nous recevons du gouvernement de Ceylan l’avis que le grand ma¬
nuscrit historique du Mahawanso a été confié à deux des plus savants indigènes
pour la révision critique du texte pâli et pour sa traduction en singhalais. Le ré-
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REVUE CRITIQUE
3 7 8
sultat du travail de ces deux savants vient d’être publié par la « Government Press »
à Colombo, en quatre volumes. Le texte pâli forme deux parties publiées au prix de
25 fr. chaque, et la traduction singhalaise deux parties au prix de 18 fr. chaque.
L’éditeur Ernest Leroux est chargé de la vente pour la France.
DANEMARK. — Le congrès des américanistes a tenu sa cinquième session à
Copenhague (21-24 août). La séance d’inauguration était présidée par M. Wo rsaa,
en présence du roi et de la famille royale ; M. Bamps y a traité de l'ancienneté de
Vhomme en Amérique. Le lendemain, 22 août, M. Herrera a présenté un mémoire
de M. Fernandez Duro sur le premier voyage de Colomb et sur le rôle considérable
de Martin Pinzon dans ce voyage; M. Thomben a parlé de la situation du Vinland;
M. E. Beauvois a exposé sa théorie sur le christianisme au Mexique dans les temps
précolombiens et ses propagateurs les papas, missionnaires gaêls de l'ordre de Saint-
Columban . Dans la séance du 2 3 août, le congrès a entendu MM. Lucien Adam, qui a
critiqué un mémoire de M. H. Haie sur rorigine européenne des Américains ; Bamps,
qui a lu, de la part de M. Schmidt, un mémoire sur les traditions relatives à l’homme
blanc et au signe de la croix en Amérique à l’époque précolumbienne; Carstensen,
qui a résumé un mémoire de M. Blackett sur Y Atlantide ; J. Steenstrüp, qui a
exposé sa thèse sur les Voyages des Zeni , etc. Citons encore dans les deux séances
du 24 août divers mémoires et différentes communications, par ex. de M. de Baye,
sur la trépanation dans les deux mondes; de M. Stolpe, sur Part décoratif dans
l'Amérique du sud; de M. Lucien Adam, sur les différences grammaticales entre
l'esquimau et les autres langues de l'Amérique du Nord; de M. de Charencet, sur
la formation des mots en langue maya. La sixième session du congrès des américa¬
nistes se tiendra à Turin.
GALLES. — M. Gaidoz, notre collaborateur, a écrit de Merthyr Tydvil, en date
du 3 octobre, à la Revue de l'enseignement secondaire des jeunes filles 1 a Le nouvel
établissement d’enseignement supérieur fondé à Cardiff pour le sud du pays de Gal¬
les et pour le comté adjacent de Monmouth va ouvrir ses cours à la fin d’octobre.
Il est fondé et entretenu en partie par des dons et souscriptions de particuliers et de
municipalités, en partie par une subvention annuelle du gouvernement britannique,
4,000 livres (100,000 fr.). Ce nouvel établissement n’est pas, à proprement parler,
une Université, car il ne décernera pas de grades, mais il donnera l’enseignement
universitaire qui prépare à l’obtention des grades et il va s’affilier à l’Université de
Londres à cet effet. J’ai raconté, il y a quelques mois, dans la Revue critique , l’his¬
toire de la fondation de cet établissement, et il va s’ouvrir à Banger un établisse¬
ment analogue pour le nord du pays de Galles. Les étudiants des deux sexes sont
admis dans V University college for South Wales and Monmouth-shire sur un pied
absolu d’égalité. »
GRANDE-BRETAGNE. — Les éditeurs Blackwood viennent de publier, en deux
volumes, l'Autobiographie d’Anthony Trollope.
— L'ouvrage de M. Frédéric Seebohk, English Village Community , vient d'avoir
une deuxième édition.
— M. Robert Hannay doit publier avec M. EUiot Stock, sous le titre French pa¬
laces and other essays, un volume d’essais sur les sujets historiques et littéraires.
— Le3 éditeurs Chapman et Hall publieront, au mois de novembre, la seconde
partie de l’ouvrage de MM. Perrot et Chipiez, History of ancient art in Chaldaea
and Assyria, en deux volumes; le traducteur est M. W. Armstrong.
— Paraîtra prochainement, à la librairie Trûbner, un mémoire de M. James Fer-
guson, The temple of Diana at Ephesus y with spécial reference to Mr. WoodPs disco-
very of its remains.
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d’histoire et de littérature
379
— Mr. Percy M. Thornton prépare une Histoire du coliège de Harrow.
— M. Gustave Oppbrt, professeur de sanscrit au Collège de la présidence à Ma¬
dras, doit faire à Berlin, sur l’invitation de MM. Virchow et Bastian, une conférence
sur son nouveau système de classification des langues; une seconde édition de son
travail sur ce sujet sera prochainement publiée par la librairie Trûbner, et une tra¬
duction allemande, par la librairie J. Springer, de Berlin.
— M. Meiklbjohn publiera dans ce mois l'ouvrage suivant : Life and letters of
Prof W. B. Hodgson,
— Une nouvelle édition des Lectures on Shakspeare de Coleridge, publiées d'a¬
bord par Payne Collier, paraît à la librairie Bell, par les soins de M. Thomas
Asus.
— M. E.-A. Braylky Hodgktts vient de terminer une traduction du livre de
M. Nemirovitch Dantchenko : Souvenirs personnels du général Skobeleff .
— L'ouvrage c The life and times of Jésus the Mesiiah , » auquel M. Edersheim
travaille depuis bientôt sept ans, est terminé et paraîtra chez Longmans en deux vo¬
lumes, chacun de 600 à 700 pages.
— Le XVI* volume de 1 * Encyclopaedia britannica renfermera les articles suivants :
Catlkt, Monge ; Tylor et Ksane, Mexique ; Wheatley, Middlesex ; Douglas et
Jûlo, les Mongols ; Harnack, le montanisme ; Robertson Smith, le Messie et Mo-
loch ; S.-R. Gardinir, Montrose ; Masson, Milton; Minto, Thomas Moore ; Andrew
Lang, Molière; Saintsrury, Mérimée, Michelet, Montaigne , Montesquieu ; Sidney
Col vin, Michel-Ange; Symonds, Métastasé; J.-H. Middlbton, mosaïque, mosquée,
etc.
— Le troisième volume de VHistory of civilisation in Scoiland de M. John
Mackintosh, d'Aberdeen, paraîtra très prochainement; il est consacré aux événe¬
ments compris entre les années i 6 o 3 et 1746; un quatrième volume terminera l'ou¬
vrage.
— Le 3 e fascicule de Y Arabie Lexicon de Lane, publié par M. Stantey Lane Poolb,
paraîtra cet automne; il ira jusqu’à la fin de la lettre Lftm. Le VIII e vol. du Catalo¬
gue of oriental coins in the British Muséum, de M. Poole, paraîtra également à la
même époque.
— Les éditeurs Hamilton, Adams et Co. vont faire paraître un volume de M. Wil¬
liam Andrews intitulé Curious epitaphs collected from the graveyards of Great
Britain and Ireland ; l'ouvrage renfermera une bibliographie des épitaphes.
— Une History of Old Dundee, due à M. Alex. Maxwell, doit paraître à Dundee,
chez l’éditeur W. Kidd.
— Les éditeurs Kegan Paul, Trench et Co. publieront bientôt les deux premiers
volumes de l’ouvrage du comte de Lytton sur son père « The life y letters and litc -
rary remains of Edward Bulwer , lord Lytton .
— M. G.-S. Macaulay entreprend, dans un volume qui paraîtra chez Kegan Paul,
et qui est une étude critique sur Francis Beaumont y de distinguer l’œuvre de Beau¬
mont de celle de Fletcher dans les drames qui portent ces deux noms.
— Autres ouvrages qui doivent paraître ou ont paru chez Kegan Paul : The Animal
Lore 0 f Shakspeare*s Time, par Miss E. Phipson; nouvelle édition des Œuvres poéti¬
ques deKeats , parM. W.-T. Arnold; une nouvelle anthologie en cinq volumes, sous
le titre English verses, par MM.W.-J. Linton et R.-H.Stoddard;— chez Sampson Low:
Madagascar and the Malagasy Embassy, par A. Tacchi; George Eliot, a critical
study , par M. G.-W. Cooke; Ceylon in i 883 , par M. J. Ferguson; Antoine Wat -
teau, par M. J.-W. Mollett; — chez Trûbner : Indian Idylls, trad. du sanscrit du
Mahâbhârata par M. Edwin Arnold; The modem languages of Africa, par M. Cust;
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380 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
Buddhist Records of the Western World , being the Si-Yu-Ki , par Hwen Tsang,
traduit par M. S. Beal; A volume of vocabularies , de feu Thomas Wright, p. p.
R. Wulcker, etc.
— Les volumes nouveaux de la collection c Eminent women sériés » seront les
suivants : Maria Edgeworth , par Hélène Zimmern ; Elisabeth Fry, par Mrs. Ptt-
man; Madame Roland, par Mathilde Blind; Harriett Martineau , par Mrs. Fenwick
Miller ; Countess of Albany , par Vernon Lee.
— La Cambridge University Press annonce la publication prochaine du I er volume
d’une édition des Œuvres de Sophocle, par M. Jebb, volume qui renfermera rŒ*-
dipe roi t avec commentaire et traduction en prose anglaise; le III e vol. de l'édition
du De Fini bus par M. Reid et le II e vol. du De Natura deorum avec introduction
et commentaire par M. Mayor et une nouvelle collation des mss. anglais par
M. Swainson.
— On annonce la mort de M. Henry Dunbar, auteur des a Concordances de l’O¬
dyssée », ouvrage dont nous avons rendu compte dans son temps et qu’avait publié
la Clarendon Press. Il était né en 1816, et avait fait ses études à l’Université d’E¬
dimbourg; il avait rendu de grands services aux malades et aux blessés de la guerre
de Crimée; le gouvernement français l’avait nommé chevalier de la Légion d’honneur.
— M. Payne Collier vient de mourir, à l’âge de 94 ans ; on sait qu’il est l’auteur
d’une History of dramaticpoetry et d’un Bibliographical account of rare books.
— Tout récemment ( 1 3 sept.) est mort aussi M. J. F. Nicholls, auteur d’une Vie
de Sébastien Cabot publiée en 1869 et d’un ouvrage composé en collaboration avec
M. John Taylor u Bristolpast and présent ».
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance dit 26 octobre i 883 .
M. Raymond Denou, sous-lieutenant, envoie à l’Académie une prière qu’il a trou¬
vée, en septembre dernier, sur les ruines de Carthage et qui porte une inscription
en caractères puniques. Cette inscription est, dit M. Renan, une de ces dédicaces à
Rabbat Tanit, que l’on possède déjà au nombre d’environ trois mille. La collection
complète de ces dédicaces sera publiée dans le Corpus inscriptionum Semiticjrum.
La communication que l’Académie reçoit aujourd’hui permettra d’ajouter encore un
article à cette collection. Des remerciements seront adressés à M. Denou, qui a fait
don à l’Académie de la pierre trouvée par lui.
L’Académie désigne, pour être lu à la séance publique annuelle, le mémoire de
M. Hauréau sur les Propos de maître Robert de Sorbon .
L’Académie se forme en comité secret.
La séance étant redevenue publique, M. Clermont-Ganneau présente les photogra¬
phies d’une base triangulaire de marbre, découverte récemment sur le mont Garizim,
en Samarie. Cette base porte des sujets sculptés en bas-relief, dont plusieurs parais¬
sent se rapporter au mythe de Thésée, et des inscriptions grecques qui n’ont pu en¬
core être lues en entier. M. Clermont-Ganneau communique aussi quelques inscrip¬
tions latines trouvées à Beit-Meri, dans le Liban: les copies de ces inscriptions lui
ont été envoyées par M. Lœytied, vice-consul de Danemark à Beyrouth. Ce sont des
dédicaces à la déesse Matuta et à Junon.
M. Deloche donne une seconde lecture de son mémoire sur un anneau sigillaire
mérovingien qui porte les noms de Roccolane et de Warenbertus.
Ouvrages présentés : — par M. Alexandre Bertrand : Hochstetter (Ferdinand
von), Die neuesten Grœberfunde von Watsch und Mar gare then in Krain und der
Culturkreis der Hallstœtter-Periode (Wien, 1 883); par M. Alfred Maury : i° Œu¬
vres de A. de Longpérier, publiées par Gustave Schlumberger, t. IV ; 2 0 Rayet
(Olivier), Monuments de l'art antique , 5 * livraison ; — par M. Derenbourg : Düval
(Rubens), les Dialectes néo-araméens de Salamas; — par M. Gaston Paris : Chan¬
sons de Henri d’ANDELi, publiées par A. Héron; par M. Barbier de Meynard : Har-
lbz (C. de). Etude sur l'exégèse et la critique du texte avestique.
Julien Hàvet.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2S.
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broke i; le personnage principal n'est pas assez mis en relief.) — Hamil-
ton, Rheinsberg, Friedrich der Grosse und Prinz Heinrich von Preus-
sen, libers, v. Diklitz. II. (Consacré surtout au prince Henri;
intéressant, sans rien de nouveau.) — Aus Erzherzog Johann's Tage-
buch, eine Reise in Obersteiermark im Jahre 1810, hrsg. v. Ilwof. —
Zejssberg, Aus der Jugendzeit des przherzogs Karl. (Conférence.) —
F. G. Hahn, Insel-Studien, Versuch einer auf orographische und geo-
logische Verhàltnisse gegründeten Eintheilung der Inseln. — Gozzadini,
Di due statuette etrusche e di una iscrizione etrusca dissotterrate neU’
Apennino bolognese. — De Feis, I çjadi scritti di Toscanelja ed i nu-
meri ctruschi. — Briefwechsel zwischen Boeckh u. Karl Otfried Müller.
— Diez’ kleinere Arbeiteq und Recensionen, hrsg. v. Breymann. (Pu¬
blication qui expose le développement scientifique du célèbre savant
et offre ainsi une contribution très importante à Thistoire de la science
qu’il a fondée; recueil d’études et de travaux peu accessibles). — Herder,
Denkmal Johann Winckelmann’s, eine ungekronte Preisschrift ans
dem Jahre 1778, p. p. Düncker; Winckejmann’s Briefe an Seine
Freunde, hrsg. v. H. Blümner. — Klemm, Württembergische Bau-
meister und Bildhauer bis ums Jahr 1750. (Travail très méritoire et
très profond, d’une fort grande importance pour l’histoire de l’architec¬
ture).
Deutsche Litteraturzeitimg, n° 42, 20 oct. i 883 : Krauss, Lehrbuch
der Homiletik. — Veygoldt, Die Stoa nach ihrem Wesen und ihren
Schicksalen, (E. Wellmann : sans prétention, mais clair et agréable.)
— O. Schradbk, Spwhvergjpichung und Grgescbichte, linguistich-his-
torische Beitràge zur Erforschung des indogermanischen Alterthums.
(W. Geiger : « pour la première fois le livre de Victor Hehn révèle ici sa
pleine influence autant sur la méthode que suf les résultats de la paléonto¬
logie linguistique; depuis longtemps, sur le domaine de la linguistique
et de son application à la civilisation et à l’histoire, je n’ai lu une oeuvre
aussi instructive du commencement à la fin... tqut y est vive et fraîche
intuition, examen profond de tous les faits possibles ou existants.) —
W. Gesenius, Hebràisches und chaldàisches Wôrterbuch liber das Alte
Testament, o° Aufl. v. Mühlau u. Volck. (Nowack.) — Lal Behari
Day, Folktales of Bengal. (E. H. Meyer : 22 contes bengalais recueillis
et traduits en anglais par un Hindou converti et devenu révérend.) —
C. Th. Micjmelïs, Lçssings Minna von Barnhelm u. Cervantes' Don
Quijote. (E. Schmidt; résultats puis, trpp subtil.) — Epistolae sae-
culi XIII e regestis pontificum romanorum selectae per Pertz ? ed. c.
Rodenberg (Kaltenbrunner). — Lehns = und Besitzurkunden Schle-
siens und fein§f einzelnen Fürstentümej* im Mittelalter, hrsg. v.
Grünhagen u. Markgraf. II. (Çerstenperg.) — A. Wetzel, Die Lti-
becker Briefe des Kieler Stadtarchivs 1422-1534. (Von der Ropp.) —
Mv^HAeta ,tjç icxopiaç, Documents inédits relatifs à l’histoire .de la
Grèce au moyen-âge publiés par C. Sathas. IV. (Sp. Jlambros.) —- Alf.
vpn Reumont, Lorenzode’ Mcdici II Magnifico. 2 0 Aufl. (W. Bernhardi :
récit lumineux et détaillé.) — Geiseler, Die Oster-Insel, eine Stàtte
prâhistorischer Cultur in der Slidsee. — Karl Baedeker, Griechenland,
Hancjbuch flir Rgisende. (A. Furtwangler : m anu el commode et auqqej
on peut se fier.) — Crowe u. Cavalcaselle, Storia délia pittura in lta-
Jia dal secolo JI al 6ecolo XVI. II. L'arte dopo la môrte di Qiptto.
(j£. Janitschek : donne à chaque page impression d’jun travail coh§r
ciencge^x^infaltiçable.) — Eug. ï^üntz, La tapisserie (Fr. Schneider :
travail solide, qui éveille la confiance et inaugure dignement la « Bi¬
bliothèque de l’enseignement des beaux-arts »). — Cruyplants, His-
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toire de la participation des Belges aux campagnes des Indes orientales
néerlandaises sous le gouvernement des Pays-Bas, i 8 i 5 -i 83 o.
Theologische Literaturzeitung, n° 21, 20 octobre 1 883 : Lecoultrr, De
censu Quiriniano et anno Nativitatis Christi secundum Lucam evange-
listam. (Schürer). — Noltzheüer, Der Brief an die Ebrâer, ausgelegt.
(Schmiedel). — Cunningham The churches of Asia (Ad. Harnack:c’est
plutôt une esauisse qu'un livre). — Zahn, Forschungen zur Geschichtcdes
neutestamentlichen Kanons nnd der altkirchlichen Literatur, II. Der
Evangeliencommentar des Theophilus von Antiochien; Texteu. Unter-
suchungenzur Geschichte der altchristlichen Literatur, hrsg. I, 4, 1 .Die
Evangelien des Matthàus und des Marcus aus dem Codex Purpureus
Rossanensis, hrsg. v. O. v. Gebhardt; 2. Der angebliche Evangelien-
commentar des Tneophilus von Antiochien. v. A. Harnack.
RECUEIL
DE VOYAGES ET DE DOCUMENTS
POUR SERVIR
à l’histoire de la Géographie depuis le XIII *
jusqu’à la fin du XVP siècle.
Publié sous la direction de MM. Ch. Schbfbr, de l’Institut, et H. Cordikr
Tiré à 250 exemplaires dont 25 sur papier de Hollande.
I. JEAN EX SÉBASTIEN CABOT
Leur origine et leurs voyages. Étude d’histoire critique, suivie d’une cartographie,
d’une bibliographie et d'une chronologie des Voyages au Nord-Ouest de
1497 à 1550 , d’après des documents inédits. Par Henry Harrissb. 1882 ,
un beau volume grand in-8, avec un portulan reproduit en fac-similé par
Pilinski . 25 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 40 fr.
II. LE VOYAGE DE LA 9AIMCTE CYTÉ
DE HIÉRUSALEM
Fait l’an mil quatre cens quatre vingtz estant le siège du Grand-Turc à Rhodes,
et régnant en France Loys unziesme de ce nom. Publié par Ch. Schbfbr.
1882 , Beau volume gr. in-8. 16 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 25 fr.
III- LES CORTE-REAL EX LEURS VOYAGES
AU NOUVEAU-MONDE
D’après des documents nouveaux ou peu connus, tirés des archives de Portugal
et d’Italie, suivi du texte inédit d’un récit de la troisième expédition de Gaspard
Corle-Real, et d’une carte portugaise de l’année 1502 reproduite ici pour la pre¬
mière fois. Par Henry Harrissb. 1883 , un beau volume gr. in-8, avec une photo¬
gravure et une grande carte chromolithographiée, en un étui. 40 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 50 fr.
IV. UES NAVIGATIONS DE JEAN PAR M ENTIER
Lepremier et le second volume des navigations de Jean Parmentier. Publié par
M. Ch. Schbfbr. 1883 , un beau volume gr. in-8, avec une carte fac-similé. 16 fr.
Le môme, sur papier vergé de Hollande. 25 fr.
Voyage à Sumatra, en 1529 . — Description de l'isle de Saincl Dominigo.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 23 .
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1 ' ^ •*
* / ; 'Jv-..
N° 46 Dix-septième année 12 Novembre 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUKfl* HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DR MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt
Prix d'abonnement :
Un an, Paris, ao fr. — Départements, aa fr. — Etranger, a 5 fr.
PARIS
E R N E S l’ V LEROUX, ÉDITEUR
LIBRAIRE DR LA SOCI*tA ASIATIQUE
l’Acoli DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES, ETC
28 , RUE BONAPARTE, a8
Adresser les communications concernant la rédaction à M. A. Chuqubt
(A u bureau de 1 a Revue : rue Bonaparte, a8).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, a8.
LA TERMINOLOGIE GÉOGRAPHIQUE
dans les différents pays du globe. Etude accompagnée d'un voca¬
bulaire des principaux termes géographiques étrangers. Par
Edouard de Luze. In- 8. i fr.
LA TRANSCRIPTION ET LA PRO¬
NONCIATION Edouard de Luze. [ô-8 .. i fr.
L’ORGANISATION ADMINISTRATIVE
DE LA FRANCE Par* Edouard de Luze. In-8. i fr.
NOTES DE LEXICOGRAPHIE BERBÈRE
Par René Basset. In-8.,...... 3 fr. 5o
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 5 gp, 27 octobre 1 883 : Anthony Trollope, An auto-
biography. (Hall Carne.) — De vas, Groundwork of économies. — Ka-
tharine Lee, In thealsatian mountains. — Dante's Divine Comedy,The
purgatorio, a prose translation by the late William Stratford Dugdale,
with the text. (Haggard.) — Correspondence : « One touch af Nature »
(Walter W. Skeat). — Goldsmith's « goodnatured man » (J. A. Cross).
— The « E. K. » of the « Shepherd's Calendar ». (John W. Haies.) —
• Fields » and « closes » (Edw. Peacock.)— c Cameos from english his-
tory » (C. M. Yonge). — The recovery of a sanskrit ms. (G. Bûhler : il
s’agit du commentaire de Sâyana-Mâdhava sur la recension Kânva du
du‘Yajurveda). — New Guinea numerals. (Sayce.) — The Gâ. (E. A.
Freeman.) — Reginald Stuart Poolb, The Ptolemies Kings of Egypt.
Percy Gardner, Thessaly to Aetolia. (Oman).
The Athen&eom, n° 2922, 27 octobre 1 883 : Mackenzie Wallace, Egypt
and the egyptian question. — Omond, The lord advocates of ScotJand
from the close of the fifteenth century to the passing of the Reform
bill. — Wanderer, Notes on the Caucasus. — The Roxburgh Ballads,
parts XI a. XII, completing vol. IV, edited for the Ballad Society, with
notes, woodeuts, etc., by Ebsworth. — The life of Sir Henry Durand,
by H. M. Durand. 2 vols, (premier article.) — The William Spottis-
woode memorial. — The Luther Exhibition. (Karl Pearson). — The
Early English Text Society’s édition of Beowulf. — The forged Deute-
ronomy (Lepsius : déclare qu’il a, avec ses collègues, reconnu Tin&u-
thenticite du fameux manuscrit et qu'il a refusé de l'acheter, mais que
jamais il n a eu la pensée d'en faire un jeu frivole contre les étrangers).
— The new « Cartularium Saxonicum » (Hessels).— « Across Chrysé »
(Yule). — The chapel of Lambeth palace (Seddon). — « Spirit Fresco »
at South Kensington. (V. Wallace). — Notes trom Rome (R. Lan-
ciani).
Literarisches Centr&lbl&tt, n° 44, 27 octobre i 883 : Dr. Martin Luther’s
Werke, kritische Gesammtausgabe. I Band. fVolume de plus de 700 pa¬
ges, in-4 0 ; va presqu'en 1 5 18 ; renferme 27 écrits de Lutner, dont 29 en
latin, parmi lesquels un inédit; introduction sur les principes suivis
dans cette édition; en somme, très bon; œuvre nationale.) — Lotz
Quaestiones de historia sabbati (Fondé en grande partie sur des maté¬
riaux assyriens). — Biblisches Wôrterbuch für das christliche Volk. I.
— Benham, Katharine und Craufurd Tait, Gattin und Sohn von Archi-
bald Campbell Erzbischof aus Canterbury. — Bratke, Justus Gesenius,
sein Leben und sein EinHuss auf die hannoversche Landeskirche. (Tou¬
che trop souvent au panégyrique). — Wider J. Janssen und seine Ge-
schichte des deutschen Volkes von einem praktischen Theologen. —
Renan, Der Islam und die Wissenschaft, Vortrag gehalten in aer Sor¬
bonne am 29 Marz 1 883 , Kritik dieses Vortrags von Afghanen Schôk
Djemmal Eddin und Renan's Erwiederung. (Analyse de ces trois écrits.)
— Schybbrgson, Sveriges och Hollands diplomatiska fôrbindelser 1621*
i 63 o, belysta genom aktstycken ur svenska riksarkivet. — Weidung,
Schwedische Geschichte im Zeitalter der Reformation (Travail réussi).—
Geiseler, Die Oster-Insel, eine Stàtte pràhistorischer Cultur in der
Südsee. — Hintner, Griechische Schulgrammatik. (z« édition de ce li¬
vre qu'il faudrait introduire dans les écoles.) — Ariost’s Rasender Ro¬
land, übersetzt von Gildmeister (Traduction fidèle, mais d'allure li¬
bre et aisée, se lit souvent comme un original allemand, grande pureté
des rimes).
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 46
— 12 novembre —
1888
Sommaire s 220. Bouché-Leclercq, Traduction de l’Histoire de rhellénisme de
Droysen. — 221. Ritter, Les déclamations de Quintilien. — 222. Bordier,
Description des peintures et autres ornements contenus dans les manuscrits de
la Bibliothèque nationale. — 223 . Reimann, La déclinaison des substantifs et des
adjectifs dans la langue d’oc jusqu’au i 3 oo. — 224. Freymond, La rime riche
dans la poésie française jusqu'au commencement du xiv° siècle. — 225 . Maximes
de La Rochefoucauld, p. p. Paulv. — 226. Morfill, Histoire de la littérature
slave. — Chronique. — Académie des Inscriptions.
220. — J, G. Droysen. HUtoire de l*Hellénl«me traduite de l’allemand sous
la direction de A. Bouché-Leclercq; tome 1 . Histoire d’Alexandre-le-Grand,
Paris, Ernest Leroux, 188 3 .
L’ouvrage de M. Curtius s'arrête à la bataille de Chéronée. L’histo¬
rien se refuse à suivre au-delà de cette date les destinées du peuple grec.
Il considère sa tâche comme terminée, du moment que la Grèce cesse
d’être libre et se résigne à porter le joug que les Macédoniens lui impo¬
sent. Il ne pourrait guère en être autrement avec la conception que s’est
faite M. Curtius du génie de la race hellénique et de son rôle dans l’his¬
toire. Nous pouvons regretter qu’il nous abandonne aussi brusquement;
mais nous n’avons pas le droit de lui reprocher d'être resté fidèle aux
idées qui dominent toute son œuvre et lui impriment un caractère si
marqué d’unité et de vie. Fort heureusement, ces derniers événements,
qu’il n'a pas voulu raconter, avaient déjà trouvé leur historien,
M. Droysen. Par la date de sa composition, l’ouvrage de ce dernier est
antérieur à celui de M. Curtius, mais, au point de vue chronologique,
il en forme la continuation. C’est ainsi que M. Bouché-Leclercq a été
amené à le traduire, afin d’achever la tâche qu’il avait commencée.
Pour nous présenter dans son ensemble toute la suite de l’histoire grec¬
que, il a rattaché à l’œuvre de M. Curtius celle de M. Droysen. Nous
aurons donc, dans une série imposante de huit volumes, un récit com¬
plet embrassant toute la vie du peuple grec. La première partie de la
tâche est maintenant terminée et elle a été menée à bonne fin plus rapi¬
dement qu’on n’aurait osé l'espérer. Nous pouvons compter en toute
confiance que la seconde partie sera conduite aussi heureusement que la
première et avec autant d’activité. Il est juste d'en remercier dès aujour¬
d’hui M. B.-L. et ses collaborateurs.
La traduction française aura trois volumes, dans lesquels entreront,
sans suppression aucune, les six volumes de la seconde édition alle¬
mande (1877-1878), y compris YIndex général qui termine l’ouvrage.
Il convient même d’ajouter, comme l’explique M. B.-L. dans son aver-
Nouvelle série, XVI.
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382
REVUS CRITIQUE
tissement, que cette traduction sera, par certains côtés, une œuvre vrai¬
ment nouvelle. Je ne parle pas seulement des corrections manuscrites,
qui ont été envoyées par M. Droysen; mais, grâce à un ingénieux tra¬
vail de combinaison, M. B.?L. a trouvé le moyen d’assurer à l’édition
française une sorte de supériorité sur l'édition allemande. L’auteur, en
effet, quand il a fait paraître en 1880 une troisième édition de l'His¬
toire d’Alexandre le Grand, a voulu que cette publication fût à l’a¬
dresse du grand public. Il a donc supprimé les notes et les dissertations
savantes, qui se trouvent dans les deux éditions antérieures (1 833 , 1877-
1 878), pour les remplacer par un certain nombre de remarques, reje¬
tées à la fin du volume. En conservant l’appareil érudit des deux pre¬
mières éditions allemandes, le traducteur en a rapproché les remarques
de l’édition de 1880, toutes les fois qu’elles lui ont paru entièrement
nouvelles ou remaniées d’après les données nouvelles. Ce n est pas là
une simple juxtaposition et les notes, ainsi empruntées à deux éditions
successives, ne forment pas double emploi; c’est une amélioration véri¬
table, puisque nous trouvons réunis dans la traduction française les
renseignements qu’il fallait aller chercher séparément dans les deux édi¬
tions allemandes de 1877 et de 1880.
Les deux volumes qui restent à paraître, — la publication du second est
déjà avancée, — contiendront, l’un l’histoire des Diadoques des succes¬
seurs immédiats d’Alexandre, l’autre celle des Epigones , ou seconde
génération des successeurs d’Alexandre. L’histoire d’Alexandre-le-Grand
remplit en entier le premier volume. Sans vouloir déprécier ceux qui
suivront, on peut dire que c’est celui des trois qui présente le plus d’inté¬
rêt. Il se recommande de lui-même à l'attention des lecteurs par la na«
ture du sujet qui y est traité. Il a encore une autre mérite : il s’ouvre
par une préface très importante du traducteur, une quarantaine de
pages que je louerai suffisamment en disant qu’elles sont certainemeat
au nombre des meilleures et des plus fortes que M. B.-L. ait jamais
écrites.
Pour présenter aux lecteurs français l’ouvrage de M. Curtius,
M. B.-L. s'était contenté de mettre en tête du premier volume une in¬
troduction rapide, dans laquelle il s’effaçait modestement derrière l’au¬
teur qu’il traduisait. Il se bornait à indiquer les améliorations de détail
qu’il avait introduites, en disposant les notes d’une manière plus com¬
mode et en établissant dans le récit des divisions plus nettes. Il a pris
plus de peine pour nous guider dans l'étude du livre de M. Droysen. Il
a tenu, avant que nous nous engagions dans la lecture de l’ouvrage, à
nous faire connaître les théories et les doctrines qui l’ont inspiré. Il a
consacré tout une étude, attentive et pénétrante, à la personne même
de l’historien allemand, examinant son système, le rattachant à l’école
philosophique dont il est un des disciples les plus éminents, enfin ap*
préciant brièvement son talent d’écrivain.
On saisit aisément les raisons de cette différence. Avec ses sympathies
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D HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
383
pour lt gloire et les libres institutions d'Athènes, avec ce qu’il y a de
brillant, d’élevé et de généreux dans la nature de son talent et de son
esprit, M. Curtius se recommandait de lui-méme au public français.
Par avance et d’instinct, nous étions d’accord avec lui. Ce n’est pas
chez nous que ses théories devaient rencontrer des contradicteurs. Nous
sommes volontiers, comme lui, les partisans d’Athènes contre Sparte, de
Démosthène contre Philippe; nous admirons les vaincus qui succom-
bent pour la justice et pour le droit; nous leur réservons les hommages -
que nous refusons souvent aux triomphes de la force. Les doctrines de
M. Droysen sont bien différentes. Dans la lutte engagée entre Démos*
thêne et la Macédoine, c’est pour cette dernière qu'il prend résolûment
parti. Où M. Curtius voit la décadence de la race grecque, il salue avec
une sorte d’enthousiasme le commencement des temps nouveaux. Pour
répéter les termes mêmes dont se sert M. B.-L., « Y histoire grecque
s’arrête au moment de prendre le deuil; Y histoire de l'Hellénisme
transporte brusquement ses sympathies du côté où se fait l’avenir. »
C’est là une disposition d’esprit qui ne nous est pas familière et que
nous comprenons difficilement. Nous ne sommes pas habitués à con¬
damner aussi sévèrement la politique de Démosthène pour glorifier
sans réserve la victoire de Philippe. Au premier abord, de pareils juge*
ments nous surprennent et, s’il faut tout dire, choquent nos sentiments
les plus arrêtés.
M. B.-L. l’a bien compris et c’est pour dissiper nos préventions qu’il
a écrit sa préface. Mais, comme en même temps il est choqué, lui aussi,
dan9 ses convictions, comme il se rapproche bien plus des idées de
M. Curtius que de celles de M. Droysen, tout en nous exposant les doc*
trinesde l’historien allemand, il les combat et en réfute les conséquent
ces. Il semble que, en composant cet avant-propos si considérable, il
ait cédé à un double besoin; il a voulu tout à la fois « familiariser du
premier coup le lecteur français avec le point de vue de l’auteur, ne pas
lui laisser ignorer que Y Histoire grecque et Y Histoire de Vhellénisme
se font suite, mais comme des tableaux éclairés d’un jour tout différent,
et le mettre en état de résister, s’il lui plaît, à la pression d’un système
très arrêté, mis en oeuvre par un esprit supérieur. » [Avant-propos ,
p. xxxv). On voit par là quel est l’intérêt de cette préface. M. B.-L. s’é*
tait proposé une tâche, dont les deux parties paraissent contradictoires
entre elles. Il a triomphé de la difficulté, en dégageant le débat de toute
polémique mesquine pour l’élever à une hauteur vraiment philosophi¬
que. Il a fait voir que M. Droysen est un élève de Hegel, que ses théo¬
ries historiques ne sont que l’application très remarquable des idées de
son maître. Tout se tient et s’enchaîne dans le système qu’il a adopté.
Ce système, M. B.-L. le rejette, mais il démontre que toutes les doctri¬
nes de M. Droysen, tous ses jugements Expliquent par des considéra¬
tions, dont il serait injuste de nier la valeur. Sur l’histoire, sur la mé¬
thode qui lui convient et le but qu’elle doit poursuivre, sur la liberté
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REVUE CRITIQUE
384
humaine, sur le rôle de l’Etat, etc., sur toutes ces grandes questions,
M. Droysen possède un ensemble d’idées très nettes et très fortement
liées entre elles; ce sont ces principes généraux qu’il a sans cesse devant
les yeux, en racontant les règnes d’Alexandre et de ses successeurs. Ils
lui dictent tous ses jugements et le guident pas à pas à travers les événe¬
ments si multiples et si confus dont il nous présente le récit. Après avoir
lu la préface de M. B.-L., nous avons le sentiment que nous allons
nous trouver en face d’une œuvre puissante, conçue par un esprit ri¬
goureux et dominateur, dédaigneux du passé, tourné tout entier vers
l'avenir, estimant que la force et le succès trouvent leur justification en
eux-mêmes, peu disposé à s'attendrir sur les infortunes des peuples
qui succombent, parce qu’il est convaincu qu’ils ont le plus souvent
mérité leur défaite. Nous sommes tout portés à admirer cet effort de
logique, mais nous sommes avertis et nous nous tenons en garde contre
les conclusions auxquelles l’auteur voudrait nous entraîner.
Ce dissentiment exprimé par le traducteur en termes si nets, mais
toujours si mesurés et si respectueux, ces réserves loyales ne sont pas de
nature à déplaire à M. Droysen. D’abord, c’est encore rendre hommage
à un système que de le combattre avec les armes que M. B.-L. a em¬
ployées. De plus, tout en résistant aux doctrines de son auteur, le tra¬
ducteur sait comprendre ce qn’elles ont de vrai dans certaines parties, et
les enseignements élevés qu’elles sont capables de fournir. II suffirait,
pour en avoir la preuve, de lire les lignes par lesquelles se termine la
préface (p. xxxv et xxxvi). Pour nous, nous saurons gré à M. B.-L. de
nous avoir fait pénétrer si avant dans l’intelligence des théories histori¬
ques de l’auteur allemand et d’avoir en même temps soulagé en quelque
sorte notre conscience, en protestant contre des jugements qui nous pa¬
raissent trop absolus.
Il ne reste donc qu’à souhaiter le prompt achèvement d’une entre¬
prise si brillamment commencée. Tout le monde y gagnera. Grâce à
cette traduction, M. Droysen verra se populariser parmi nous un nom,
entouré depuis longtemps en Allemagne du respect de tous les érudits et
qu’ont illustré des travaux si divers et si considérables. Il serait superflu
d’insister sur les avantages qu’il y a pour nous à posséder une traduc¬
tion aussi fidèle d’un livre tel que Y Histoire de l'hellénisme . Il est évi¬
dent que tous ceux qui étudient l'antiquité, contractent envers M. Bou-
ché-Leclercq une nouvelle dette de reconnaissance.
R. La LL 1ER.
221. — Die Qulntlllonlaclieii Declc mat loue». Untersuchung Ober Art und
Herkunft dcrselben von Constantin Ritter. Fribourg en B. et Tubingue, 1881.
Nous possédons, sous le nom de Quintilien, deux collections de décla¬
mations, l’une comprenant 19 morceaux (certains manuscrits en don¬
nent 20) d'une étendue relativement considérable et tels qu'ils auraient
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D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE 385
pu être prononcés par un orateur d’école ; l’autre, 145 morceaux qui
ne sont guère que des plans de discours plus ou moins développés, ac-
compagnés de commentaires rhétoriques sous le nom de sermones. Ces
déclamations étaient complètement négligées depuis longtemps et, sauf
dans l’édition Lemaire, il ne s’en est pas fait, croyons-nous, de réim¬
pression dans notre siècle. On en contestait absolument l’authenticité,
l’on allait même jusqu’à dire sans examen que les manuscrits les attri¬
buaient à un certain M. Florus (Teuflel, Rom . Lift., p. 743). M. Ritter a
repris toute cette question et prépare une édition nouvelle de ces écrits
dans la collection Teubner 1 2 ). Dans l’ouvrage que nous annonçons au¬
jourd’hui, quoique tardivement, il cherche à en étudier l’origine et à en
apprécier la valeur.
Conservant la division en grandes et petites déclamations, il distingue
les premières en deux groupes principaux, l’un formé des déclamations
II, IV, V, VII, VIII, XI, XIV-XIX, l’autre des déclamations III, VI,
IX, XII et XIII. Les déclamations I et X semblent ne rentrer ni dans
l’un ni dans l’autre groupe. Cette distinction se fonde sur un double
examen de ces morceaux, au point de vue d’abord du style, ensuite des
idées et de la composition. Toute cette partie du travail est faite avec un
soin, une minutie presque abusive et il n'est guère possible de creuser
ces questions délicates avec une méthode plus rigoureuse que ne l’a fait
M. Ritter \ Pour achever de convaincre ses lecteurs, il a dressé quatre
tablettes sur lesquelles il a noté tous les idiotismes qui les caractérisent
et qui, au premier regard, justifient la distinction que nous avons déjà
indiquée. Le résultat de cette enquête est que le premier groupe est l’œu¬
vre d’un auteur unique dont le style est ampoulé, déclamatoire dans le
plus mauvais sens du mot, souvent obscur, très riche en antithèses.
Beaucoup de formes de langage lui sont propres, spécialement une ami-
phora coupée assez bizarre. Les idées sont pauvres et la composition
pèche souvent contre les principes de Quintilien. En un mot, il est im¬
possible que celui-ci en soit l’auteur. L’autre groupe, au contraire, se
distingue par son style correct, clair, périodique, conforme aux modè¬
les, par la solidité de son argumentation, enfin par une grande abon¬
dance d’exemples historiques et de réminiscences littéraires. Ces décia-
1. Dans ce cas, il fera bien de renoncer, au moins pour les grandes déclamations, à la
division d’après les pages de l’édition de Burmann pour adopter celle en chapitres
déjà consacrée par l’édition Lemaire. Il semble, du reste, n’avoir eu aucune connais¬
sance de cette dernière publication.
2. Nous ne sommes cependant pas toujours d’accord avec lui sur des questions
d’interprétation ou de texte. 111 , 3 (p. 61 de l’édition de Leyde), prodigium ne s’ap¬
plique point à Marius, mais au tribun licencieux et ce mot est pris dans le sens fâ¬
cheux qu’il a d’ordinaire. Loin d’attaquer les tribuns qui composent le tribunal,
l’auteur se sert à leur égard d’une captatio benevolentiae. — Le texte d’Utrecht n’est-
il pas meilleur, déclam. CCCXXXI, p. 674, Leyde : Si quid ultione dignum non ha -
betjus , tum debetjudex sequiproximum que la phrase que M. R. a citée à la page 237
de son ouvrage ?
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386
REVUE CRITIQUE
mations sont l’oeuvre d’un homme instruit, imbu des préceptes de
Quintilien. Ne scrait*ce pas Quintilien lui-méme? C’est ce que M. R.
admet provisoirement en montrant dans chacune des déclamations un
grand nombre de tournures qui se retrouvent plus ou moins identique¬
ment dans l’Institution oratoire. La couleur générale du style a en fait
une grande analogie avec celui du grand rhéteur. On peut s’en assurer
en comparant les prooemia de ses livres, oti il quitte volontiers le ton
purement didactique pour devenir plus oratoire, avec les cinq décli*
mations en question K Cependant M. R. remarque que divers traits que
l’on considère comme caractéristiques pour Quintilien, ne s’y retrou*
vent pas, comme remploi de porro, nisi forte, tandem après un pronom,
quin, ut opinor ut . ita , continuo et protinus pour annoncer une
conclusion logique, at ou at enim pour prévenir une objection. En ou¬
tre, le sujet de la VI 9 est absurde, tandis que l'Institution (II, 10,4,
sqq.) prescrit de ne jamais traiter que des cas qui peuvent se reproduire
dans la vie réelle et la IX’ pèche par un ton frivole peu d'accord avec le
sujet. Tous les manuscrits connus de M. R. attribuent les dix-neuf dé-
clamations à Quintilien. Le renseignement d'après lequel les manuscrits
l’attribueraient à un nommé M. Florus remonte à Jacques Durant de
Chazelles (Casellius) qui ne l'énonce même que d'une manière dubita*
tive. En présence du grand nombre de manuscrits qu’il a consultés,
M. R. aurait mieux fait, selon nous, de ne tenir aucun compte de ce
Florus. Des allusions de saint Jérôme, d’Ennodius et de l’auteur des
scholies de Lucain se rapportent également à notre collection qui, d’a¬
près cela et d'après le raisonnement un peu subtil de M. Rohde, aurait
existé sous le nom de Quintilien dès le iv* siècle. Même nous savons par
Trebellius Pollio que l’on intercalait des morceaux de Postumius Ju¬
nior parmi ceux de Quintilien.
L'étude des petites déclamations conduit M. R. & des résultats encore
plus précis. Soit dans le sermo , soit dans le texte, nous retrouvons la
doctrine de Quintilien exprimée souvent presque dans les mêmes ter¬
mes que l’Institution. Il en donne des exemples frappants qui enlèvent
toute espèce de doute. De même pour le style, c'est celui de l'Institu¬
tion autant que l'on peut en juger d'après un texte en fort mauvais
état a . Seulement on ne saurait admettre que le maître les ait publiées
telles quelles. Le manque d'un ordre méthodique tel qu'on le trouve
dans l’Institution qui est un modèle à cet égard, lui donne tout à fait
le caractère de notes prises par des élèves. Nous surprenons ici Quinti-
1. On peut regretter que M. R. ne tienne aucun compte de l'opinion des savants
qui ont traité avant lui cette question. Erasme aurait mérité d'être au moins cité.
2. M. Ritter fait, avec raison, justice de l'hypothèse d'Ugoletus (ép. dédie, de
l'ed. princeps) reproduite par Pithou qui attribue les déclamations soit au grandr
père de Quintilien, lequel vivait en Espagne dans un temps où l’on ne publiait pas
de déclamations, soit à son père qui ne semble pas avoir eu beaucoup d’importance
d’après ce qu’en dit Sénèque et ce que n’en dit pas Quintilien.
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d’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
38 7
lien dan< sa classe répétant souvent ce qu’il a déjà dit, appuyant sur
tel ou tel point selon les besoins de l’enseignement ou selon que le sujet
choisi prête au développement de telle ou telle règle oratoire l .
Mais ici se présente une difficulté. Quintilien se plaint dans l'Insti¬
tution (I, 7) que ses deux livres artis rhetoricae aient été publiés
sans sa permission et sans qu’il les ait revus; ces paroles semblent
même désigner notre collection comme formant le second cours de son
enseignement [alternum [ sermonem ] pluribus sane diebus quantum
notando consequi potuerant , interceptum). Si tel est ce cas, on peut se
demander qu'est-ce que sont les quinze grandes déclamations qui lui
étaient attribuées tout à l’heure? M. R., remarquant qu'elles ne sont
pas accompagnées de sermones , finit par les attribuer à un élève du rhé¬
teur qui les aurait composées dans l’esprit du maître. Cette conclusion
ne nous semble pas absolument rigoureuse. D’abord M. R. écarte, sans
la discuter, l’hypothèse que ces cinq déclamations seraient de la jeunesse
de Quintilien et n'auraient été publiées qu’après sa mort. D’autre part,
les grandes et les petites déclamations ne se trouvant pas dans les mêmes
manuscrits ne proviennent évidemment pas de la même tradition, mais
peuvent fort bien avoir pour origine commune le second livre artis rhe¬
toricae. Dans ce cas, les petites déclamations seraient la reproduction
des cahiers d'élèves, tandis que les grandes proviendraient d'une édition
de morceaux de Quintilien extraits du même cours. Rien ne prouve,
en effet, que dans les 248 déclamations que nous avons perdues il n’y
en eût de complètes. Cinq d’entre elles dépouillées de leur commentaire
que chaque maître pouvait refaire à son gré, auraient été jointes à des
morceaux du même genre d’auteurs différents et en tête de la collection
on aurait mis le nom du rhéteur le plus fameux. Il est vrai que ce sys¬
tème n'expliquerait pas les différences du style que nous avons consta¬
tées et que l’on ne saurait se dissimuler. Mais comme le fait remarquer
M. R. ces différences peuvent s’expliquer si l’on admet que l’Institution
et les déclamations ne remontent pas à la même période de la vie du
même homme. Les fautes de goût peuvent être fréquentes au début de
la carrière et condamnées à la fin. La question de l’authenticité des
cinq déclamations en question nous semble donc encore ouverte; en
tout cas, elle n’est pas tranchée par l’absence des sermones .
Quoi qu’il en soit, le travail de M. Ritter doit être signalé pour sa so¬
lidité, surtout dans la première partie; il a rendu un vrai service à l’his¬
toire de la littérature latine en attirant l’attention sur des œuvres pres¬
que complètement négligées dans notre siècle et qui nous initient
directement et, pour ainsi dire, personnellement à l’enseignement de
Quintilien. J. Le Coultre.
1. Il est regrettable que M. Ritter n’ait pas étudié la question des manuscrits des
petites déclinaisons avec autant de soin que pour les grandes. Il faut, par exemple,
noter comme un fait digne de remarque que le manuscrit de Pithou (Montepess.
126 saec. X) qu’il considère comme le plus ancien ne porte point le nom de Quin¬
tilien.
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388
REVUE CRITIQUE
222. — Bordier. Description des peintures et autres ornements conte*
nus sur les manuscrits de la Bibliothèque nationale. Paris, Champion,
i 883 . Première livraison, vm-120 p.
L'ouvrage dont M. Bordier publie le premier fascicule mérite d elre
accueilli avec reconnaissance par tous ceux qui s’intéressent à l'art du
moyen âge. Des manuscrits grecs à miniatures de la Bibliothèque na¬
tionale, quelques-uns ont été plusieurs fois décrits, mais beaucoup sont
à peu près inconnus. D'ailleurs ceux mêmes dont la renommée est bien
établie n’ont jamais été l’objet d'uu examen aussi complet et aussi scru¬
puleux ; grâce à M. B., on pourra désormais se guider sans peine à tra¬
vers tant de richesses. Ses notices bien faites, suffisamment développées
et très précises, n’omettent rien d’important ; l’auteur ne néglige rien
non plus de ce qui peut faciliter la tâche des travailleurs et il indique
toutes les reproductions qui ont été publiées des miniatures dont il
parle.
M. B. ne s'est pas contenté d’ailleurs de décrire ces peintures; dans
une introduction assez longue, il a cherché à indiquer ce qu elles ap¬
prennent sur l’art et la civilisation byzantine. C’est ici que je me per¬
mettrai de présenter à l’auteur quelques observations. En ne se servant
que des manuscrits de la Bibliothèque nationale, il est resté fidèle à son
programme, trop fidèle peut-être. N’aurait-il pu, en quelques lignes,
rappeler que, pour la période antérieure au ix e siècle, la Vaticane, la Lau-
rentienne, la Bibliothèque de Vienne, etc., possèdent des œuvres delà
plus grande importance, que quelques-unes de ces collections sont ri¬
ches également en manuscrits du ix e au xv e s. qu’on peut rapprocher
de ceux de la Bibliothèque nationale? Sans doute, cet avis n'est point né¬
cessaire aux spécialistes, mais une introduction générale ne s’adresse
point seulement à eux.
J aurais désiré aussi que M. B. ne parût point nous présenter tous
ces manuscrits, exécutés à des époques si diverses, comme formant en
quelque sorte un meme ensemble. N’est-ce pas encourager ce préjugé si
répandu d'après lequel l’art byzantin se serait immobilisé presque dès
ses origines et n aurait fait que se répéter de siècle en siècle? Pour s'en
tenir à la période du ix« au xv« siècle, l’art byzantin a compté plusieurs
écoles, et I auteur, grâce à ses études, sait mieux que personne quelles
différences existent entre le style des divers siècles. Il eût été intéressant
de montrer ces variations et d’aider ainsi à la réfutation d'une de ces
vieilles erreurs que leur ancienneté même transforme en axiomes pour
ceux qui ne se mettent point en peine de contrôle.
A vrai dire, ce sont des excès de réserve que, en plusieurs endroits, on
se sent quelque envie de reprocher à M. B. : il semble craindre d’en
dire trop long ou de s’avancer trop loin, ainsi quand il parle des souve¬
nirs de l’antiquité ou des compositions religieuses. Un de mes grands
regrets est que, pour illustrer sa publication, il se soit contenté de quel¬
ques dessins au lieu d'y joindre un album d’héliogravures. Toutes ces
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d'histoire et de littérature
38$
miniatures grecques, souvent si belles, sont à peine connues : les repro¬
ductions faites avant ce siècle sont trop inexactes, celles qu'a données
Silvestre sont fort bonnes, mais n’ont guère été choisies au point de
vue de l'art; les planches de M. de Bastard sont souvent introuvables (je
n'ai jamais vu celles qui ont été annoncées pour l’art byzantin), celles de
Labarte peu nombreuses. Or, les couleurs des manuscrits grecs s’écail¬
lent facilement; quelques-uns ont depuis longtemps souffert. Si M. Bor-
dier consentait à composer cet album, les amis de l'art du moyen-âge
lui seraient doublement obligés d'avoir tourné du côté des manuscrits
grecs une activité qu’il a tant de fois déjà si utilement consacrée à l’his¬
toire de notre pays.
G. Bayet.
223. — Paul Reimann. Die Déclination der SubaUntlva und Adjectlva
In der Langue d’oc bis Zum .labre 1300 . Danzig, 1882. In-12, 82 p.
Voici les conclusions de ce travail, thèse de doctorat de l’université
de Strasbourg :
I. La déclinaison provençale est constamment et étroitement observée
dans la poésie jusque vers la fin du xiv* siècle. Toutefois, quelques pas¬
sages isolés du roman de Flamenca, de Guiraut Riquier et de Matfré
Ermengau violent les règles de cette déclinaison et sont un achemine¬
ment vers le système moderne.
IL II n’y a d’hésitation pour la forme du nominatif singulier qu’en
ce qui concerne les noms qui viennent du latin -er, les noms en - atge
et les infinitifs pris substantivement en -ir et en • re .
III. Les paroxytons masculins en d, influencés par leur genre, sui¬
vent au pluriel la déclinaison des parisyllabiques masculins, tandis
qu'au singulier ils hésitent entre cette déclinaison et celle des paroxy¬
tons féminins en a.
IV. En ce qui concerne les chartes provençales, la région de l’est ob¬
serve rigoureusement la déclinaison; au centre, dans l’Aveyron, le
Tarn, la Haute-Garonne (et non la Garonne, comme dit M. P. Rei¬
mann), le Tarn-et-Garonne, et l’Ariège (moins le Couserans), il y a hé¬
sitation pour le cas sujet .entre la forme propre du nominatif et celle de
l'accusatif; dans la partie orientale de la Gascogne, même hésitation
avec prédominance de l’accusatif; dans le reste de la Gascogne, l’emploi
de l’accusatif, au lieu du nominatif, est pour ainsi dire la règle.
Ces conclusions sont à peu près exactes, mais elles n'ont rien de bien
nouveau. Comme, d’autre part, les exemples sur lesquels l’auteur les ap¬
puie ne sont empruntés qu’à un assez petit nombre de textes, tous im¬
primés et bien connus, il en résulte que le travail de M. P. R. ne fait
pas faire le plus petit progrès à la philologie provençale. Il ne peut
guère être apprécié qu'au point de vue subjectif, comme spécimen de
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REVUE CRITIQUE
390
la méthode de l'auteur. Or cette méthode cloche par plus d’un point.
M. R. a fixé lui-même les textes auxquels il se bornait pour produire
ses exemples ; c’était son droit, mais encore aurait-il fallu épuiser ces
textes. Or, si je prends le Recueil de M. Paul Meyer et que j'examine
l’une des chartes les plus anciennes et par suite les plus importantes
(n # 40, charte de la Drôme, fin du xi° siècle), je m’aperçois que plus
d’une forme intéressante a été négligée ou mal classée par M. R. : li¬
gne 9, muraor (acc. sing. de muraire ) et Chatbertj (acc. sing. incor¬
rect), 1 . r 3 , preveires (acc. pl. de prestre ), 1 . g 5 , le sort (nom.sing.
incorrect), etc. Le nom. plur. senhôr a été relevé, mais il figure dans les
parisyllabiques masculins à accent fixe, comme si M. R. ignorait l’exis¬
tence du nom. sing. sénher . Le nom. pluriel pagadi, qui figure à la li¬
gne 5 de la pièce 47 du même recueil, et qui appelait un paragraphe
spécial, n’a pas été signalé. Il y a quelque profit à tirer des corrections
proposées par M. Reimann pour corriger différents passages des trouba¬
dours qui semblaient violer les règles de la déclinaison : c’est là la par¬
tie la plus intéressante de son travail, bien que ce soit une sorte de hors-
d’œuvre. Ant. Thomas.
224. — Emile Freymond. Uber don rotolien Relm bel •HfranzceaUoben
Dlcbtern bU Zum Anfang dea XIV Jnbrh. Halle, 1882. In-8 de 36 p.
En 1876, l’abbé Bellanger (f 1879) soutenait en Sorbonne une thèse
intitulée : Etudes historiques et philologiques sur la rime française.
Dans cette thèse, spirituellement écrite et pleine de petits faits curieux
et d’observations piquantes, l’auteur avait malheureusement eu le grand
tort de négliger de parti pris tout ce qui concerne la poésie française du
moyen âge. Il semble que M. Freympnd se soit proposé de combler
cette lacune du livre de l’abbé Bellanger. S’il a moins d’esprit que son
devancier, il a une érudition plus étendue et plus sûre, ce qui vaut
mieux en pareille matière, et son travail se lit avec le plus grand profit.
La brochure que nous avons sous les yeux, dissertation de doctorat de
l’université de Strasbourg, ne contient que la première partie de l’étude
de M. F.; il faut chercher la suite dans la Zeitschrift für romanische
Philologie f . Cette première partie se compose essentiellement de re¬
cherches sur les théories du moyen âge en matière de rimes, d’après les
Lejrs d'Amors, le Jardin de Plaisance et les traités d’Eustache Des¬
champs, de Henry de Croy et de Pierre Fabry. C’est en i3g2 que Eus-
tache Deschamps composa son Art de dictier et de fere chançons ;
Henry de Croy est du commencement du xvi e siècle. Il y a donc entre
ces deux auteurs un laps de temps considérable, sur lequel nous som¬
mes sans renseignements. M. F. n’aurait pas dû passer sous silence un
1. Tome VI, pp. 177-215.
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d’histoire et de littérature
391
traité de rhétorique composé en 1432 par un certain Bauldet Hercut;
ce traité lui aurait sans doute fourni des passages curieux qu'il y aurait
eu profit à rapprocher des théories de Deschamps et de celles de Henry
de Croy l . Dans cette sorte de revue préliminaire, M. Freymond éclair¬
cit, entre autres points, l’origine de lexpression rime léonine; il montre
que ce terme a passé de la versification latine du moyen âge dans la ver¬
sification française. La forme léonime que l'on trouve dans beaucoup
de textes n’est pas primitive ; c’est une altération amenée par l'eupho¬
nie; on a dit de même et on dit encore aujourd'hui venimeux , au lieu
de venineux. La brochure se termine par un classement des différentes
espèces de rime6 riches, et par un tableau statistique de l'emploi de ces
différentes rimes dans un grand nombre d'œuvres poétiques du moyen
âge. Ce tableau, qui a demandé une vaste lecture, est curieux et paraît
dressé avec le plus grand soin. A. T.
22S. — üAxImta de Le Roehetiouceeld, premier texte imprimé à La Haye
an 1664, collationné sur le ms. autographe et sur les éditions de i665 et 1678,
précédé d’une préface par Alphonse Pauly, conservateur sous-directeur adjoint
à la Bibliothèque nationale. Paris, Morgand, 1882. In-8 de xx-129 pages.
Longtemps on a cru que la première édition des Maximes de La Ro¬
chefoucauld était de 1 665 . En 1879, M. Alphonse Willems établit dans
une notice spéciale l'existence d'une édition antérieure (La Haye, 1664),
dont il possédait un exemplaire; c'est cette édition que réimprime au¬
jourd'hui M. Pauly, d'après un exemplaire provenant de la bibliothèque
de feu M. Rochebillière.
Quelle est la valeur de cette édition hollandaise et dans quelle mesure
La Rochefoucauld en est-il responsable? C’est là une question qu'il faut
se poser tout d’abord. A en croire IM vis au lecteur placé en tête de
l’édition de 1665, édition faite sous la direction de l'auteur, le texte de
1664 ne vaudrait rien : « Il y a aparence que l’intention du peintre n'a
« jamais esté de faire parroistre cet ouvrage et qu'il seroit encore ren¬
tt fermé dans son cabinet, si une méchante copie qui en a couru et qui a
« passé même depuis quelque temps en Hollande, n’avoit obligé un de
« ses amis de m’en donner une autre qu’il dit estre tout à fait conforme
« à l’original... » Ces paroles ne sauraient être prises au pied de la let¬
tre. Faut-il cependant leur refuser toute part de vérité et admettre avec
M. P. que l’édition de 1664, ballon d’essai lancé par La Rochefoucauld
lui-même, n’était qu’une première ébauche destinée à tâter l'opinion et
susceptible au besoin d’être désavouée par l’auteur? Je ne le pense pas,
car, en comparant les deux textes de 1664 et de 1 665 , on ne trouve que
1. Ce traité encore inédit nous a été conservé dans un manuscrit du Vatican ( Reg .
1468). Voir, à ce sujet, un rapport de MM. Renan et Daremberg dans les Archives
de « Missions , I, 241 et s.
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REVUE CRITIQUE
392
des différences peu importantes, plutôt dans la forme que dans le fond,
différences qui, par conséquent, ne sont pas suffisantes pour motiver un
désaveu.
D’autre part, ces différences, insignifiantes il est vrai, sont nombreu¬
ses ; elles consistent en variantes d’expressions, dont nous n’apprécions
pas toujours à présent la portée, mais qui, à l'époque où les Maximes
ont été composées et dans le milieu tout spécial qui les a vues naître et
se développer, avaient sans doute une signification bien caractérisée (allu¬
sion à telle ou telle personne, mot plus ou moins démodé, etc., etc.).
On comprend donc que lorsqu’une des innombrables copies des Maxi¬
mes qui couraient alors par les ruelles, eut passé en Hollande, il fut
souverainement désagréable à La Rochefoucauld de voir que son œu¬
vre, qu’il se plaisait à corriger et à renouveler sans cesse, allait s’impri¬
mer incomplète sans qu’il ait pu la revoir. Aussi, dès 1664, année même
de l’apparition de l’édition hollandaise, La Rochefoucauld se munit-il
de son privilège pour l’édition de i 665 . Cette édition au moins, il put
la contrôler à son aise, et les fréquents cartons qu’il y introduisit
montrent quel soin il mit à tenir compte des conseils et peut-être
des susceptibilités de son public de beaux-esprits et de femmes litté¬
raires.
On peut donc admettre que La Rochefoucauld n’a pas été l'éditeur
responsable du texte de 1664; mais il n’est pas moins vrai que cette
édition représente un état particulier des Maximes , une sorte de brouil¬
lon, que l’auteur ne voulait pas encore livrer à l’impression, mais au¬
quel il empruntait plus tard certaines corrections qu’il faisait figurer
dans son texte définitif. C’est ainsi que la maxime « la vanité et la
« honte, et surtout le tempérament, fait la valeur des hommes et la
« chasteté des femmes, dont on fait tant de bruit », est abrégée dans
l’édition de 166 5 , qui supprime « et la chasteté des femmes ». L’édition
de 1678, au contraire, rétablit l’esprit, sinon la lettre, de la phrase : « et
« la vertu des femmes ». Cette maxime, sévère pour les femmes dans
l’édition de 1664, était peut-être un de ces traits dont nous parlions tout
à l'heure et que La Rochefoucauld, dans la crainte d’indisposer son pu¬
blic féminin, ne voulait sans doute pas voir paraître dans sa première
édition. Plus tard, familiarisé avec le succès et n’ayant plus les mêmes
ménagements à garder, il rétablit le texte primitif, qui était l’expression
de sa pensée première. Envisagé à ce point de vue, le texte de 1664 est
un des chaînons indispensables dans la grande série des transformations
multiples qu’ont subies, durant toute la vie de leur auteur, les Maximes
de La Rochefoucauld.
M. P. a conservé avec soin, dans sa réimpression, la physionomie de
l’édition originale qu’il a établie ligne pour ligne, page pour page ; il a
reproduit jusqu’aux fautes typographiques, dont il a relevé quelques-
unes à la page xv de sa préface. Il eût été préférable de donner une
liste complète de ces fautes d’impression, car, en présence de celles qui
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D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE 393
ne sont pas mentionnées dans la préface, on peut se demander si elles
sont imputables à l’édition de 1664 ou à la réimpression.
À son texte, M. P. a joint des Notes et Variantes , où figurent les
leçons des éditions de i 665 et 1678, et du ms. autographe publié par
M. Éd. de Barthélemy. Ces notes et variantes sont suivies d’une table
dressée par ordre alphabétique des Maximes de 1664, avec renvois aux
éditions précitées ; d’après ces notes, nous voyons que l’édition de 1664
renferme un certain nombre de maximes non réimprimées jusqu’à ce
jour. Enfin l'éditeur a publié une lettre jusqu’ici inédite de La Rochefou¬
cauld, remerciant M 110 de Scudéry de sa collaboration, et a de plus donné
un choix de sentences, tirées de la Sonde de la conscience . Cet ouvrage
mérite quelques mots d'explication ; c’est la traduction française d'un
livre anglais, où les contemporains prétendent que La Rochefoucauld a
pris la matière de son livre, se contentant d’y ajouter « le beau fran-
çois ». Cette accusation est notamment formulée dans un ms. qui faisait
partie aussi de la collection Rochebillière et porte le titre de Recueil de
diverses choses (voyez la préface, pp. xvm-xx). Le choix des sentences
donné par M. P. permet peu de se rendre compte du plagiat, mais il
est supposable que La Rochefoucauld, qui aimait tant à s'adjoindre des
collaborateurs, ne devait pas craindre, non plus que d’autres écrivains
de la même époque, Pascal et Molière par exemple, de s’approprier par.
fois le bien d'autrui, quitte à le remanier. Autre fait à noter, c’est que
l'auteur de ce ms., écrit en 1671, parle de l’édition de 1 665 comme de
la première édition des Maximes et ne semble pas connaître l'impres¬
sion hollandaise de 1664, déjà rare à cette époque, et que nous savons
gré à M. Pauly de nous rendre.
Gaston Raynaud.
226. — W. R. Morfill. T lie Down of eu r ope on Ht ©rature. Slavonie
literature. Un vol. in-18 de vm-264 p. p. (publié par la Society for Promoting
Christian Knowledge). Londres, i 883 .
<c Sauf quelques rares exceptions, la littérature slave a été jusqu'ici
ou entièrement ignorée en Angleterre, ou présentée sous un jour faux...
Aussi la plupart des Anglais s'imaginent qu’il n’y a rien du tout. »
Ainsi s’exprime M. Morfill au chap. vm de cet intéressant volume. Il
est, à notre connaissance, le premier Anglais qui ait entrepris d’étudier
scientifiquement l’ensemble des peuples slaves. Ce n’est pas là un mince
mérite; il ne suffit pas d'apprendre — sans maître—cinq ou six langues
peu faciles et dont quelques-unes n'ont pas encore de bon vocabulaire;
il faut encore se créer à grands frais une bibliothèque, réunir au prix
de longs efforts des matériaux qui manquent le plus souvent dans les
collections les plus célèbres. Sous un petit volume, le travail de M. M.
résume une masse d'informations que ne fournit aucun ouvrage anté-
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REVUE critique
39+
rieur dans la littérature anglaise. Celui de M* e Talvi (mistross Robin¬
son) publié en i 85 o à New-York est peu connu en Europe et n’a jamais
eu grande valeur. Les études de M. Ralston sur la Russie, de M. Wra-
tislaw sur la Bohême sont fort intéressantes ; mais l'ensemble de la race
slave attendait encore un travail synthétique. On peut regretter que ce¬
lui de M. M. ne soit pas plus développé ; mais il est évident que ses édi¬
teurs lui ont imposé un cadre restreint dont ils ne lui ont pas permis de
dépasser les limites. Ce cadre, il l'a rempli avec conscience, et il y a
fait entrer un total d’informations et de citations qu'on chercherait en
vain dans les ouvrages analogues. Il a abordé les questions multiples
qui se sont présentées à lui avec une réelle érudition et une critique
exercée. Il résume brièvement l'ethnographie des Slaves, l’origine de
leurs alphabets, puis il étudie successivement la littérature des différents
peuples, depuis les origines jusqu’au xvi # ou au xvn® siècle. Il insiste par*
ticulièrement sur la littérature populaire dont il présente des spécimens
nombreux et bien choisis ; chemin faisant, il donne quelques indica¬
tions bibliographiques ; il ne les donne pas d’une façon systématique,
sachant fort bien que le public auquel il s’adresse n’en pourrait guère
profiter. A un ouvrage de ce genre, il serait injuste de demander l’appa-
ratus cfune publication scientifique. Je me contente de lui souhaiter la
bienvenue et je rejette en note quelques observations de détail stfr les¬
quelles je me permets d'appeler l'attention de mon savant confrère \ it
serais heureux si le succès de ce petit volume pouvait décider quelque
éditeur anglais à lui demander un ouvrage plus considérable. M. Mof-
fill a toutes les connaissances nécessaires pour l’exécuter et — ce qui ne
gâte rien — il choisit ses citations avec goût et les traduit avec agré¬
ment.
L. Leger.
CHRONIQUE
FRANCE. — M. Léonce Person vient de publier un nouveau froltime, intitulé :
Les papiers de Pierre Rotrou de Saudreville , secrétaire du maréchal de Guébriant
(Paris, Cerf. ln-8°, 1 35 p., 3 ft\). Un de nos collaborateurs rendra plus amplement
1. P. 18. Quels sont les biographes sérieux de Cyrille qui rapportent qu'il a réco
chez les Khalifes de Bagdad ? P. 22. La bibliothèque du lycée de Laybacb est appelée
le quartier général de la philologie slave. Elle renferme les incunables Slovènes et la
bibliothèque de Kopitar ; mais le mot de head-quarters est certainement exagéré.
P. 67. Le dieu païen Veles est devenu saint Biaise (Vlasii) et non pas saint Basile
(Vasili). P. 97. La grammaire de Krijanitch n’est pas inédite, comme paraît le croitt
M, M., elle a été publiée par M. Bodiansky en 1859; j’en ai un exemplaire dans ma
bibliothèque; p. 104, Kaniov n’est pas une île, mais une ville sur le Dniéper à l’em¬
bouchure de la Kaniovka; i 36 . Biaise et Basile, même observation qu’à la p. 67.—
P. 146, la chronique dite du prêtre de Dioclea n’est pas en vers, mais compilée en
partie d’après des chants nationaux. P. 246, au lieu de Slavianski Slovnik, il faut
évidemment lire Sbovnik.
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D HISTOIRE ET DK LITTERATURE 39 $
compte de cet intéressent volume, dont nous donnons te sommaire : 1 . Pierre de
Rotrou, légataire des papiers du maréchal de Guébriant. II. Quelques exemples
d'indications nouvelles que les historiens pourront trouver dans ces papiers : Jean
Le Laboureur, M. le duc d’Aumale, M. Tamizey de Larroque. 111 . Le siège de Guise
en i 636 , une lettre inédite du cardinal de Richelieu. IV. Premiers rapports de Ro¬
trou avec Guébriant*, il est nommé commissaire des guerres; Rotrou nouvelliste.
V. Rotrou accompagne la maréchale de Guébriant en Pologne. Le seigneur de Sau-
dreville. Comment a-t-il pu donnera son frère le poète le funeste conseil de quitter
Dreux au moment de l’épidémie if VI. Les principaux correspondants de Rotrou; le
maréchal de Guébriant; ses dures épreuves. La maréchale, concours qu’elle prête à
son mari. Une arrestation à Brisach, d’après Priolo et la duchesse de Nemours.
VII. Le ministre Subletde Noyers. Le commissaire général de l’armée d’Allemagne,
M. de Tracy. Ce que nous apprennent les papiers de Rotrou sur les moeurs de l’époque,
le caractère des hommes de guerre et la grandeur de la monarchie française. VIII.
Emprunts faits par Jean Le Laboureur aux papiers de Rotrou. IX. Difficultés de la
transcription de ces documents manuscrits, au point de vue de l’oithographe. X.Lei
descendants de Pierre de Rotrou, seigneur de Saudreville, depuis l’année 1649 jus¬
qu’en l’année i 883 . — Cette table des matières suffit a donner l’idée des informa¬
tions de toute sorte qu'on trouve dans ce volume qui n’est d’ailleurs qu’une intro¬
duction à la prochaine publication des papiers inédits du maréchal de Guébriant et
de Pierre de Rotrou. L’appendicé (pp. io8-i35) renferme une contribution à l’his¬
toire de Y Hypocondriaque, du Véritable Saint-Genest, du Venceslas et du Cosroès
de Jean de Rotrou; M. Person a rencontré sur son chemin quelques nouvelles indi¬
cations qu’on lui saura gré d’avoir réunies au plus tôt dans ce volume ; les pages
précédentes sont consacrées au frère du poète, Rotrou de Saudreville, mais il y est
souvent question du poète, et l’auteur a pu parler encore de Jean de Rotrou sans
que la transition paraisse trop forcée.
BOHÊME. — La librairie J. Otto de Prague commence la publication d’une revue
scientifique, en langue tchèque, VAthenceum. Ce recueil, calqué sur la célèbre revue
anglaise du même nom, embrasse comme elle toutes les sciences, en résume la bi¬
bliographie, et donne le sommaire des principales publications périodiques. 11 paraît
dix fois par an; chaque numéro se compose de 28 pages grand in-8® à deux colon¬
nes. La même librairie a fondé cette année deux autres recueils : la Revue Slave
(Sbornîk Slovansky), revue mensuelle qui renferme des études d’histoire, de géo¬
graphie, de littérature et de bibliographie slave ; elle est fort bien rédigée (directeur
M. Jkllinek); et la Revue historique (Sbornik historicky) publiée par M. Rbiek, pro¬
fesseur à l’Université tchèque de Prague. Ce recueil est trimestriel et s’occupe sur¬
tout de l’histoire de la Bohême et des pays voisins. Trois fascicules ont déjà paru.
Nou3 remarquons dans le premier numéro un important travail de M. Rezêk sur la
politique française en Bohême (tb 19-1534.) Ce développement de la presse scienti¬
fique en Bohême coïncide avec celui de l’Université tchèque qui, si nous sommes
bien informés, compte déjà plus de x, 3 oo étudiants.
GRANDE-BRETAGNE. — Les éditeurs Nisbet publieront prochainement urt
ouvrage de M. William Wright, The Empire of the Hittites in the light of the Bi¬
ble and inscriptions with copies of the inscriptions ; W. Sàyce a composé la préface
du volume.
— M.Dblitzsch publie chez les éditeurs William et Norgate un nouvel ouvrage, « T’A#
hebrtw langage viewed in the Ughtof assyrian research », composé d’articles récem¬
ment parus dans VAthenceum, et modifiés, augmentés considérablement par l’auteur.
— La Wydif Society publiera prochainement une édition du traité de Wyclif, De
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396 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
Incarnatione Verbi , d’après trois mss. de Vienne et le ms. Oriel, par le Rev. Edwin
Harris, de Torquay.
HOLLANDE. — La bibliothèque de feu R. Dozy, consistant en livres imprimés
et manuscrits relatifs à l’histoire et à la littérature arabe et espagnole, a été vendue à
Leyde par M. E. J. Brille le 6 novembre et les jours suivants.
— Nous apprenons la mort de Johannes van Vloten, littérateur et historien hol¬
landais, mort le ai septembre, à l'âge de 65 ans.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 2 novembre i 883 .
M. Barbier de Meynard fait un rapport sur des antiquités arabes trouvées à Mehdya
(Tunisie méridionale) par M. le commandant JufFé, qui en a adressé les estampages
a l’Académie. Ce sont deux pierres tombales, couvertes d’inscriptions en caractères
coufiques, d’une époque relativement récente, c’est-à-dire du commencement du
xm« siècle de notre ère. Malgré l’imperfection des estampages, M. Barbier de Meynard
a pu déchiffrer la date de l’un de ces monuments, l’annee 397 de l’hégire (1201 de
notre ère), que les traducteurs tunisiens, consultés par M. Juffé, avaient méconnue.
A l’aide de cette date et de quelques noms propres que les premières lignes laissent
lire sans difficulté, on peut affirmer que la pierre appartient au tombeau d’un per¬
sonnage historique, Mohammed ben Abd-el-Kerîm et-Koumi. Ce chef arabe se ré¬
volta, vers la fin du xn* siècle, contre Mansour, khalife tatimite. Il proclama son in¬
dépendance à Mehdya même, où il régna pendant deux ans. Assiégé dans cette ville
arabes qui nous ont conservé les annales des Fatimites du Maghreb,
cription est absolument illisible dans l’estampage. Tout ce qu'on peut constater pré¬
sentement, c’est que c’est aussi une épitaphe. M. Juffé avait offert d’envoyer les deux
pierres en France; M. Barbier de Meynard estime que l’intérêt de ces monuments
est tout à fait local et qu’il conviendrait plutôt de les placer à Tunis même, dans un
musée consacré aux antiquités musulmanes.
M. Alexandre Bertrand termine la lecture du mémoire commencé à l’une des
séances précédentes et intitulé : les Cistes ou Situles de bronze, à représentations
figurées , découvertes dans les Nécropoles pré-étrusques de la Haute Italie et les ci¬
metières analogues des Alpes Autrichiennes. Il met sous les yeux de ses confrères
des reproductions galvanoplastiques de plusieurs des objets découverts, ainsi qu’un
tableau dressé par M. Prosdocimi, qui montre, dans un même terrain des environs
d’Este, la superposition des monuments de diverses civilisations qui se sont succédé
dans cette région : âge de la pierre, période euganéenne, période étrusque, invasion
gauloise, période euganéo-romaine et période romaine. Parmi les spécimens les plus
intéressants de l’art ae la période euganéenne, il signale surtout plusieurs situles de
bronze, ornées de zônes parallèles sur lesquelles sont figurées, à l'aide du martelage,
une série de scènes civiles, religieuses, militaires. M. Alexandre Bertrand s’attache à
montrer que les scènes sont la reproductiou des mœurs et usages des populations
primitives indo-européennes, à leur arrivée dans les contrées où les nécropoles sont
situées. L’art est un art local, l’industrie une industrie locale. On pourra retirer de
l’étude de ces nécropoles un tableau fidèle de cette antique civilisation importée
d’Orient, mais fortement implantée dans l’Occident, où elle a fleuri pendant plusieurs
siècles et n’a été détruite ou transformée que par les invasions étrusques et gauloises.
Les traces de ces transformations sont très sensibles dans les nécropoles.
11 suffit, ajoute M. Bertrand, de rappeler que les invasions gauloises et étrusques
sont des vi\ v* et iv* siècles avant notre ère, et que l’industrie des nécropoles euga-
néennes ou pré-étrusques, représentant l’époque antérieure, nous fait remonter aux
vu*, viip et x* siècles, pour faire sentir toute l'importance de ces découvertes.
M. Revillout commence la lecture d’un mémoire intitulé : la Syntaxis des tem¬
ples ou le budget des cultes sous Ptolémée Philadelphe.
Ouvrages présentés : — par M. Egger : Tite-Livb, Livres XXIII, XXIV et
XX V, texte latin , publié, avec une notice sur la vie et les ouvrages de Tite-Live, des
notes , etc., par E. Benoist et O. Riemann; — par M. de Rozière : le Livre des cons¬
titutions demenées el chastelet de Paris , nouvelle édition , avec une introduction , des
notes et un glossaire, par Charles Mortet (extrait des Mémoires de la Société de
Vhistoire de Paris et de VIle-de-France, t. X). Julien Havet.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 3 J.
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Deutsche Litteratuneitung, n° 43, 27 oct. i 883 : K. v. Hofmann, Die
Heilige Schrift Neuen Testaments zusammenhàngend untersucht. X.
Die biblische Geschichte Neuen Testaments (Holtzmann). — Gutber-
let, Ethik und Naturrecht (Jodl). — Neuhaeuser, Anaximander Mile-
sius sive vetustissima quaedam rerum universitatis conceptio restituta
(E. Zeller : la doctrine d’Anaximandre n’est pas exposée avec justesse
dans son ensemble; le style est d'une diffusion fatigante; mais les dis¬
cussions relatives aux passages d’Aristote et de son commentateur grec,
ont une grande valeur). — Whinfield, The quatrains of Omar Khayyam,
the persian text with an english verse translation (Landauer). —
Marcks, Symbola critica ad epistolographos graecos (Maass : utile). —
Maurice Albert, Le culte de Castor et de Pollux en Italie (Jordan : a
recueilli des matériaux de tous côtés, a donné à l’ensemble une forme
agréable, mais n’avance pas les grandes questions). — O. Kellbr, Der
Saturnische Vers als rhythmisch erwiesen (Léo : contestable). —
W. Grimm, Kleinere Schriften, hrsg. v. G. Hinrichs. II u. III Bande
(M. Roediger). — Schobtensack, Beitrag zu einer wissenschaftlichen
Grundlage für etymologische Untersuchungen auf dem Gebiete der
franzôsischen Sprache (Gros livre qu’il faut regarder comme complète¬
ment manqué et sans valeur ; donne par exemple les étymologies suivan¬
tes : encore de « en ce hora » ; rançon de « franc homme 1 ; cajoler de
« canis et joli » ; vignoble de « vinea opulentà » ; ancien de « anticus et
annus *). — Fokkr, Rettungen des Alkibiades. I Teil; die sicilische
Expédition (Niese : renferme quelques pensées justes; long panégyri¬
que; il vaudrait mieux une discussion exacte des conditions et des des¬
seins de l’expédition ; n’a pas, par conséquent, de mérite scientifique).
— Victor von Kraus, Das Nlirnberger Reichsregiment, Gründung und
Verfall, i5oo-i5o2, ein Stlick deutscher Verfassungsgeschichte aus dem
Zeitalter Maximilians I (Boos : contribution très importante à l’histoire
de la constitution allemande). — Heinr. Ritter von Zeissberg, Aus der
Jugendzeit des Erzherzogs Karl fKrones : conférence très instructive et
très habilement faite). — Edw. B. Tylor, Einleitung in das Studium
der Anthropologie und Civilisation. — Bosc, Dictionnaire de l'art, de
la curiosité et du bibelot.
Gcettingischo gelehrtô Anzeigen, n° 42, 17 octobre 1 883 : Bezzenberger,
Litauische Forschungen, Beitràge zur Kenntniss der Sprache und des
Volksthumes der Litauer. (Fortunatow : ouvrage qui sera accueilli
avec une reconnaissance sincère par tous ceux qui travaillent sur le do¬
maine de la langue lithuaniènne; renferme des chants lithuaniens avec
mélodies, des historiettes, des énigmes, des proverbes et locutions pro¬
verbiales, des malédictions et des termes d’injure, des descriptions d usa¬
ges superstitieux et autres idées et coutumes populaires, des contribu¬
tions au dictionnaire de Nesselmann, matériaux abondants et variés
recueillis dans diverses localités de la Lithuanie prussienne et en partie
dans la Lithuanie orientale russe ; beaucoup de textes et de mots dans
les dialectes de la langue de Memel, qui était jusqu'ici très peu connue
dans son usage actuel). — Franz Jostes, Johannes Veghe, ein deutscher
Prediger des XV. Jahrhunderts. (Schrôder: bon travail sur un prédica¬
teur dont le nom appartiendra désormais à Phistoire de la littérature alle¬
mande).— Appel, DasLeben und die Lieder des TrobadorsPeire Rogier.
(Suchier : bonne méthode, profondes connaissances,recherche très exactes.)
— N° 43, 24 octobre 1 883 : Henning, Nibelungen-Studien (Wil-
manns : le deuxième chapitre de l’ouvrage est le plus utile. Mais l'au¬
teur de l’article n’accepte ni les principes ni les conclusions de l'auteur.)
— Zotenberg, Chronique de Jean, évêque de Nikion. — Braasch, Re-
ligionsbegriff in Schleiermacher's Reden. (Minor.)
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
ŒUVRES DE A. DE LONGPÉRIER
Membre de l’Institut
RÉUNIES ET MISES EN ORDRE PAR G. SCHLUMBERGER
Tome I. ARCHÉOLOGIE ORIENTALE, NUMISMATIQUE,
MONUMENTS ARABES. Un beau vol. in-8, illustré de
nombreux dessins dans le texte et de xi planches sur
cuivre. 20 fr.
Tomes II et III. ANTIQUITÉS GRECQUES, ROMAINES ET GAU-
LOISES. Deux beaux volumes in-8, illustrés de dessins et
de planches sur cuivre. Chaque vol... 20 fr.
Tome IV. MOYEN AGE ET RENAISSANCE. Première partie(i 837 -
1 858 ). Un beau volume in-8, illustré de dessins et de plan¬
ches sur cuivre. 20 fr.
ŒUVRES CHOISIES DE A. J. LETRONNE
Membre de l’Institut
ASSEMBLÉES, MISES EN ORDRE ET AUGMENTÉES d’üN INDEX PAR EL TAGNÀN
Première série : Egypte ancienne. 2 vol. in-8. 25 fr.
Deuxième série : Géographie et cosmographie, 2 vol. in-8... 25 fr.
Troisième série: 2 vol. in-8 (sous presse).
Ch. DESMAZE
Conseiller à la cour de Paris.
LES MÉTIERS DE PARIS
D'après les ordonnances du Châtelet, avec les sceaux des artisans.
In-8, fig... 7 fr. io
LE RELIQUAIRE DE M. Q. DE LA TOUR
Peintre du roi Louis XV, sa correspondance et son œuvre.
In-18, elzévir. 2 fr. 5 o
— Le même, sur papier teinté chamois. 3 fr.
— Le même sur papier vergé fort.. 3 fr. 5o
L’ABBAYE DE SAINT-QUENTIN EN L’ISLE
De l’ordre de Saint-Benoît, fondée à Saint-Quentin en Vermandois;
étude historique. In-8... 1 fr. 5o
LE MUSÉE DE LA TOUR A SAINT-QUENTIN
L’œuvre du peintre de la Tour, publiée pour la première fois. 3opho¬
tographies, par M. Hendricks, reproduisant les pastels du Musée
de Saint-Quentin, et texte explicatif. Un beau vol. in-folio 100 fr.
LA PICARDIE
Saint-Quentin en Vermandois, son histoire, sa population, ses rues,
ses maisons et leurs propriétaires au xvn° siècle, ses enseignes.
Nécrologie de son chapitre, ses maires. In-8. 3 fr.
Le Pur, imprimerie Marches sou fils, boulevard Saint-Laurent, sJ
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PÉRIODIQUES
The Ac&demy, n° 600, 3 novembre i 883 : Corpus poeticum boreale,
the poetiw of the old northern tongue, from the earliest times to the
thirteentn century, edited, classified and translated with introduction,
excursus and notes by Gudbrand Vigfusson and F. York Powell.
2 vols (Elton : on n’a pas encore fait aux amateurs de littérature noroise
un don plus beau que ce trésor de l'ancienne poésie Scandinave; on y
trouve rassemblés pour la première fois avec un texte correct et clair,
avec des commentaires exacts et lumineux, les rares restes de la mytho¬
logie germanique et des légendes mi-christianisées de Balder. etc. ; la
traduction qui accompagne les textes est faite en un bon anglais * la-
conic and idiomatic »). — Literary ladies of the past. Miss Thackeray,
A book of Sibyls ; Memories of seventy years, by one of a literary fa-
mily, edited by Mrs. Herbert Martin. — Seventeenth century odds and
ends : John Ashton, Humour, wit and satire of the seventeenth cen¬
tury, collected and illustrated; The Roxburghe Ballads, parts XI, XII,
edited by Ebsworth. — Rich. Jefferies, The story of my heart, my
autobioçraphy. — Rev. Mombert, English versions of the Bible. — A
translation : Cowper's « Hark, my soûl » in riming latin (J. W. Haies).
— Jade implements found in Switzerland (Westropp). — Iron in early
Greece (W. Leaf). — « Fields » and « closes » (G. H. White). —Q. Ho-
ratii Flacci carminum libri IV, edited, with introduction and notes,
byT. E. Page; The satires ot Horace, edited with notes by Arthur
Palmer (H. Nettleship). — The colours of the winds (Max Müller). —
The Ga (H. Bradley). — New Guinea numerals (Krebs). — Mollett,
Watteau (F. Wedmore). — The « Apollo and Marsyas » and the « Ve-
nice sketcn book ». II (H. Wallis).
The Athenaeu», n° 29*3, 3 novembre i 883 : Miss Thackeray (Mrs.
Richmond Ritchie), A book of Sibyls, Mrs. Barbauld, Miss Edgeworth,
Mrs. Opie, Miss Austen. —Victor Hugo, L archipel de la Manche. Le
Prince Noir, poème du héraut Chandos, edited with translation and
notes, by Francisque Michel (Progrès sur l’édition précédente donnée
par Coxe; mais pas d’apparatus criticus ; des corrections faites par con¬
jecture, mais ne donne pas les motifs des conjectures, ni la forme exacte
que fournissent les manuscrits). — The Beckford Library. — The new
« Cartularium > (Walter de Gray Birch et Edmund Madure). —
Browning bibliography. — The Early English Text Society’s édition
of Beowulf (Stephens). — The Luther Exhibition (H. Jenner et
d. E. Hodgkin). — Shakspeares monument and gravestonc (J. Tom
Burgess). — Crowe and Cavalcaselle, Raphaël, his life and works. I
(2 e article).
Literarisohes Ceutralblait, n° 45 , 3 novembre 188 3 : Beck, Die
Erbauungsliteratur der evangelischen Kirche Deutschlands. I. Vor Dr.
Luther bis Mart. Moller (Beaucoup de soin; il eûtfallu laisserde côté cer¬
taines choses, et en admettre d'autres). — Kraus, Lehrbuch der Homi-
letik. — Sinemus, di$ Reformation und Gegenreformation in der che-
maligen Herrscbaft Breisig am Rhein. ein Beitrag zur Geschichte der
evangelischen Kirche in den Rheinlanden, mit Vorwort von W. Krafft.
— Stern, Zur Biographie des Papstes Urban II, Beitràge aus der Zeit
des Investiturstreites. (Rien de nouveau, exposition lourde parfois et
maniérée). — Danske Kancelliregistranter 1 535 -1 55 o, udgivne ved
Erslev ogMoLLERUP. 2 Halvbind. — Kraus, Das Ntirnberger Reichs-
regiment, Gründung und Verfall. i5oo-i5o2 , ein Stück deutscher Ver*
fassungsgeschichte aus dem Zeitalter Maximilians I. (Ouvrage intéres¬
sant, fondé sur de nombreux documents pour la plupart inédits et
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
47
— 19 novembre —
1883
Sommaire t 227. Le Sépher Takhemâni, recueil de Juda Harizi, p. p. Paul de
Lagarde. — 228. Bouc hé-Leclercq, Traduction de l’Histoire grecque de E. Cur-
tius, iv et v. — 229. Sellar, La poésie romaine au siècle d'Auguste. — 23 o.
Emma Phipson, La faune du temps de Shakspeare. — 23 1. Morceaux choisis des
classiques français du xvu* siècle, p. p. Bernardin. — 232 . L’imprimerie et la
librairie dans la Haute-Marne et dans l’ancien diocèse de Langres, par deux
bibliophiles langrois. — 233 . Bournbt, Rome, études de littérature et d’art. —
234. — Sandhrs, La construction en allemand. — Chronique. — Académie des
Inscriptions.
227. — Sépher Tahkemdnl, Jadac Harlzll macamae* Pauli de Lagarde,
studio et sumptibus editae. Gottingae i 883 . Prostant in aedibus dieterichianis
Arnoldi Hoyer.
M. le professeur Paul de Lagarde aime à faire, de temps en temps, de
charmantes surprises au monde des orientalistes. L'an passé, à l’occasion
d’une polémique, il montra, en publiant des textes coptes inédits, com¬
bien la connaissance de l'idiome de l'Egypte chrétienne lui était fami¬
lière. Cette fois, il édite à ses frais le recueil de macames hébreu dit 5 e-
pher Tahkemônî, qui a pour auteur Juda’Harîzî, célèbre poète tolédain
de la fin du xn° siècle. A l’époque où vivait ’Harîzî, la poésie néo-hé¬
braïque, formée sur des modèles arabes deux siècles auparavant en Es¬
pagne, s'était déjà répandue dans toutes les communautés juives du bas¬
sin méditerranéen et de l'Orient. Partout des mécènes généreux tenaient
à honneur de s’entourer d’hommes de génie et d’encourager leurs tenta¬
tives poétiques. Après le repas, le verre de vin à la main, les convives
inspirés récitaient des vers en l'honneur de leur hôte; puis, on se provo¬
quait mutuellement à qui fera les meilleurs couplets. L’objet de ces gaies
improvisations était d’ordinaire l’éloge des vertus, de la bonne chère, du
vin, de l’amour. On y déblatérait aussi contre l’avarice, l’orgueil, l’hy¬
pocrisie, les mauvais poètes et les femmes laides. On riait encore en Israël
à cette époque, surtout dans l’Espagne arabe qui, grâce aux chefs-d’œu¬
vre de Gebirôl et de Juda Halévi, est toujours demeurée le siège princi¬
pal de la poésie hébraïque et où l’on était alors loin de se douter que les
bûchers de l’inquisition chrétienne étaient déjà à la porte. Juda ’Harîzî
appartient à la meilleure école de cette renaissance hébraïque. A peine, sur
l’instance de ses amis, avait-il traduit en hébreu les macames arabes de
’Harîzî que, pris de zèle pour la langue sainte, méprisée par les arabo-
manes comme un idiome défectueux et inapte à exprimer les concep¬
tions d’une civilisation raffinée, il se mit à composer des macames ori-
Nouvelle série, XVI. 47
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REVUS CRITIQUE
3 g 8
ginales qui, sauf quelques réminiscences involontaires, n'ont rien de
commun avec celles du poète arabe. ’Harîzî résume d'une main de maî¬
tre combien l’apparente infériorité de la poésie hébraïque vis-à-vis delà
poésie arabe lui pesait sur la conscience :
Benaphshî ‘dbera rûah qenâôt | le’hokmâ ra'hakd mennû tvesdri
Beshurtyaledd Hdgdr yelddxm \ ’hamûdtm wattehî Saraï ’aqdra
« Mon âme est pénétrée d’une jalousie extrême, au sujet de la science
qui s'éloigne de nous et bat en retraite,
« En voyant Hâgâr * enfanter des enfants charmants, pendant que
Sdraï * demeure stérile. »
Et quand le manuscrit de son Ta'hkemônî fut achevé, avec quelle
satisfaction naïve ne le montra-t-il pas à ses amis qui étaient inquiets
du succès d'une œuvre aussi neuve et aussi hardie, et avec quelle verve
mordante ne se vengea-t-il pas de ceux qui prétendaient que l’hébreu
n’étant plus bon à rien, il fallait s’adonner exclusivement à la poésie
arabe !
Oi ‘alpetdîm kapperâtm yehmû \ eçldm meqôr ‘êdett wehêmyiqmaû ,
Hatnmân le'ênêhem n>e‘ênam nisgdrâ | wayyêqeû lilqôth welô maçdû .
« Oh 1 les sots qui braient comme les onagres ; à leur côté jaillit la
source édénique et ils ont soif 1
« La manne est devant leurs yeux, et, les yeux fermés, ils vont ail¬
leurs pour en cueillir et n'en trouvent point ! »
Juda Harizi a eu raison d’être content, son œuvre n’a pas été dépassée
au moyen âge ni pour la vigueur et la pureté de la diction, ni pour l’am¬
pleur et la vivacité de ses coloris. Son imagination, alors même qu’elle
divague sur un idéal malpropre si profondément fouillé par la poésie
arabe, conserve une pudeur relative et ne dégénère jamais en obscénité.
Par la délicatesse des sentiments, la poésie de Harizi se distingue avan¬
tageusement de celle de Maestro Emanuelle, ami de Dante, où la verve
déborde sans retenue dans un réalisme outré.
Voilà le trait général du livre que M. de L. vient de rééditer à ses frais.
Trouvera-t-il dix savants en Europe qui s’intéressent à sa lecture, et,
dans ce nombre, combien voudront l’acheter? M. de L. ne s’est pas posé
cette question. Aucun sacrifice ne lui a paru trop grand pour remettre
son auteur de prédilection entre les mains du public sous forme d’un
volume charmant et maniable. Papier et types ne laissent rien à désirer ;
ces types hébreux surtout sont des plus beaux que j'aie jamais vus. Les
seules choses qu’on regrette de ne pas y trouver, ce sont un tableau
de variantes tirées des anciennes éditions et un autre renfermant la cor¬
rection des fautes d’impression inévitables. J'ai noté un certain nombre
de corrections au cours de ma lecture, et je prends la liberté de les sou-
1. Hagar, concubine d’Abraham et mère des Arabe».
2. Saraï ou Sara, femme d’Abrahatn et mère des Hébreux.
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d'histoire et DE LITTÉRATURE 399
mettre au savant éditeur. Je ferai seulement remarquer que, n’ayant
sous les yeux aucune autre édition de ce livre, il m’est impossible de
savoir si les lectures que je propose se trouvent déjà quelque part :
P. 12, 1 . 9, lisez hattaawâ pour 'A®. — P. 34, 1 . 1 5 b , lisez te’halléç et
taripàn pour he° et A®. — P. 40, 1 . 3 o, 2, ’Heber pour A°, — P. 41,4,
hannetîbôt habbe'ûlot pour hannestbôt 1 habbe'ûlît. — L. 20, gebârîm
pour gebtrîm . — P. 79, 1 5 , ra‘yunai pour ra'wainaï. — L. 20 (i7 b ),
corrigez mê‘alêhem ‘anenê hahôtvd pour ‘ alêhem ‘anerté hahôyâ . —
P. 86, 6 ( 3 b ), lisez aqaççéç pour alaççéç. — P. 82, 7 ( 3 b ), yeôfêf pour
— P. 83 , 10 (8 b ), ûbên pour ûmirt. — P. 87, 12, nebuktm pour
tiek° . — L. 3 i, Sefâred pour Sefarar .— P. 89, 1, corrigez delâtaïm
segûrtm pour daltê hassegûrîm \ — L. 16, lisez lema‘alat pour /e-
ma'alâ .— L. 34, welô naggî'a alêhem pour nega i ‘alêhem. — P. 91,
i 5 , werakkim pour werabtiim. — L. 28, neum pour weim. — P. 93,
12, he c etaqtâ pour ’A°. — L. 28, hâeben pour hââdâm. — P. 96, 6,
ra*shtm degâlehâ pour rô'shâm raglehâ . — P. 98, 27, mettre la pre¬
mière fois weyig\erû et la seconde fois weyig^elu. — P. 99, 8, hagge -
bîrâ pour 'A®. — L. 23 , litekunâ pour liteb 0 . — L. 27, effacer le hé de¬
vant mib’har. — P. 100, 19, lire ’hashûqôtân> pour tesh 0 . — P. 106,
complétez wàessâ devant ‘ênî. — P. 117, 17, complétez ’halûshôt après
neshamôt. — P. 126, 7, lisez gam ' hablê pour ub'hab °. — P. 127, 3 o,
neum pour weim. — P. 128, 7, L al pour el. — P. i 3 o, 25 , lehyêhem
pour la’h{°. — P. i 5 o, 32 , wiha^eqû pour wïhaq^qu. — P. 157, 12,
werakkû pour n>e\dbû . — P. r 58 , 32, mahêr pour mattîr. — L. 33 ,
mehûmôt pour me hômôt. — P. 159, 1, l innûyîm pour ye l ênîm. —
P. 1 85 , 23 , ma’hsôr pour mahsêl. — P. 187, 17, mûçâq pour mûsâf.
— P. i8h, 17, shetôtehâ pour teshotêhâ. —P. 190, 28, nesheq pour
nôshêq. — P. 171, 4, riwê pour rûah. — P. 196, 27, kaabigail pour
kaagibaxl .
Encore une fois, nous remercions M. de Lagarde de nous avoir donné
une si belle édition d'une des œuvres les plus remarquables de la poésie
hébraïque du moyen âge.
J. Halévy.
228. — Ernest Curtius. Btatolre grecque, traduite de l’allemand sous la di¬
rection de A. Bouché-Leclercq. Vol. IV et V. Paris, Ernest Leroux, i 883 .
I
Ces deux volumes comprennent toute la période qui s’étend entre la
, fin de la guerre du Péloponèse et la bataille de Chéronée. La tâche que
[M. Bouché-Leclercq avait entreprise,se trouve ainsi achevée. Il y a tout
t i. Il ne paraît guère probable que le poète ait employé le verbe purement ara-
éen ueseb <* épouser, se marier. »
2. Le terme technique pour le second hémistiche est à ma connaissance toujours
rit sôgêv , au pluriel sôgerim.
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REVUE CRITIQUE
400
lieu de le féliciter pour la rapidité avec laquelle il a mené à bonne fin un
travail aussi considérable. Grâce à son activité, grâce au zèle des colla¬
borateurs qu'il a su si bien choisir, nous avons maintenant entre les
mains une excellente traduction de l’ouvrage allemand. Il est inutile de
rien ajouter aux éloges qu’on a décernés tant de fois à l’histoire de
M. Curtius; récemment encore, dans la Revue des Deux-Mondes
(i 5 juillet 1 883 ), M. Jules Girard, tout en faisant quelques réserves,
rendait un hommage mérité aux grandes qualités par lesquelles se dis¬
tingue l’œuvre du brillant historien de la Grèce. Quant au mérite de la
traduction, on a pu déjà l’apprécier dans les trois premiers volumes. On
sait avec quelle fidélité intelligente, avec quel scrupule le texte allemand
a été rendu en français.
On a quelquefois exprimé le regret que M. Bouché-Leclercq ait dépensé
une partie de son temps et de ses forces à nous faire connaître les idées
des autres, alors qu'il sait si bien, — il en a fourni plus d’une preuve, —
étudier l’antiquité par lui-même et ajouter à nos connaissances par ses
recherches personnelles. Un pareil reproche n’est pas fait pour offenser !
M. Bouché-Leclercq; mais, s’il lui plaisait de ne pas l'accepter, il lui se- j
rait facile de répondre, en montrant quelle est l’étendue du service qu’il
vient de rendre chez nous aux études historiques. Ce ne sont certaine¬
ment pas les candidats à la licence et à l’agrégation d'histoire qui le
contrediront et, avec eux, tous nos professeurs, tous ceux qui, par de¬
voir ou par goût, tiennent à connaître et à comprendre le développe¬
ment du génie hellénique, sauront gré à M. Bouché-Leclercq de leur
avoir mis entre les mains un ouvrage d'une telle valeur et d’une si haute
utilité.
R. L.
229. — Tlie Roman Poeiry of tho A a gu* t en n âge by Sella*. Deuxième
édition. Londres, Henri Froude, 1 883 . 1 vol. in- 8 , vm-423 p.
Le nom de M. Sellar n’est pas inconnu aux lecteurs de la Revue . On
a déjà eu l’occasion de rendre compte ici-même de l’ouvrage qu’il a
consacré aux poètes latins de la période républicaine. Le volume qu’il
vient de publier n’est guère que la réimpression d'un travail qui avait
paru en 1876. L’auteur a seulement introduit quelques corrections de
détail et, de plus, ce qu'il avait négligé de faire dans sa première édition,
il a traduit les passages qu’il était amené à citer.
Dans un second volume, M. S. traitera d’Horace et des poètes élégia-
ques. Celui que nous annonçons aujourd’hui, est consacré tout entier à
Virgile; encore l’auteur a-t-il réservé pour l’autre volume l’examen des
petits poèmes attribués à Virgile. 11 ne s'occupe dans celui-ci que delà
personne et de la vie du poète et de ses trois grands ouvrages, les Buco -
tiques , les Géorgiques et Y Enéide,
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d’histoire et de littérature 401
Il est difficile d'apporter sur de pareils sujets des idées nouvelles.
M. S. n'a pas eu cette ambition. Très versé dans la lecture de Virgile,
parfaitement au courant de tout ce qui a été écrit sur son auteur en An¬
gleterre, en France et en Allemagne, il s'est proposé simplement de pré¬
senter, sous une forme attachante et vraiment littéraire, les renseigne¬
ments que l’on trouve épars dans les dissertations spéciales ou dans les
préfaces des diverses éditions de Virgile. Il a mis surtout à profit les
Prolegomena de Ribbeck, l 'Etude de Virgile de Sainte-Beuve, l’in¬
troduction et les notes de Virgile de Conington, non sans faire un cer¬
tain nombre d'emprunts à l’édition de M. Benoist, à la Religion ro¬
maine d'Auguste aux Antonins de M. Boissier, à la Cité antique de
M. Fustel de Coulanges, etc. Ce qui lui appartient en propre, ce sont
les qualités de l’exposition. On aurait tort de n’accorder à ce genre de
mérite qu'une estime médiocre. Si le livre de M. S. n’apprend rien ou
presque rien aux érudits, du moins il instruira et intéressera le grand
public, auquel il s’adresse. Il est bien composé et bien écrit; le sujet
est fécondé et parfois rajeuni par des rapprochements ingénieux ; sur¬
tout, on sent à chaque page que M. S. est un admirateur éclairé et con¬
vaincu de Virgile. A ce point de vue, je citerai, comme présentant un
intérêt particulier, les deux premières parties du 11 e chapitre, oü M. S.
fait rapidement l’histoire de la réputation de Virgile. Il recherche
pourquoi la gloire de l'auteur de 1* Enéide, hautement reconnue par les
critiques des trois derniers siècles, a été de nos jours si vivement contes¬
tée. Le problème est posé d’une manière très nette et résolu par des ar¬
guments très heureusement imaginés et déduits.
Sur quelques points de détail, j’ai voulu vérifier l’exactitude des ren¬
seignements apportés par M. S. ; nulle part, je n’ai trouvé son érudi¬
tion en défaut. Tout au plus pourrait-on lui reprocher d’avoir parlé en
termes un peu vagues (p. 1 15 ) des dangers que courut Virgile, lorsque son
domaine fut envahi à deux reprises parles vétérans. Les Prolegomena de
Ribbeck fournissaient sur ce point à M. Sellar des informations précises,
dont il aurait pu faire un meilleur usage. De même, il aurait été bon,
dans le même passage, de donner le nom complet de L. Alfénus Varus,
qui fut le successeur de Pollion dans la Gaule Cisalpine.
R, Lallier.
23 o. — Tlie AnlmuMoro of Bhakeupcare'a l Ime, including Quadrupeds,
Birds, Reptiles, Fish and Insects, by Emma Phipson. ln-8, pp. xvi-476. Londres,
Kegan Paul, Trench and Co. 1 883 .
L’animal joue dans Shakespeare un plus grand rôle que chez aucun
dramatiste du temps. Par instinct de poète et réflexion de penseur, la
grande parenté des créatures était toujours présente dans son imagina-
tion, les deux vies se pénétraient et la vie animale prêtait à la vie hu-
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REVUE CRITIQUE
402
maine ses couleurs, ses élans, ses cris, ses grimaces. Dans le Rêve d'une
Nuit d'été , une faune gracieuse, charmante, toute de chansons et de ca¬
resses ; dans le Roi Lear , une ménagerie féroce qui hurle, qui siffle et
qui mord.
La Faune de Shakespeare a déjà été étudiée partiellement : en parti¬
culier les oiseaux, par M. Harting (The Ornithology of Shakespeare,
1871). Le livre de Mis s Phipson est la première étude complète. Mais,
comme la faune de Shakespeare est aussi et avant tout la faune de son
temps; que sa connaissance du monde animal n’est pas puisée tout en¬
tière dans ses observations personnelles, mais en grande partie dans le
trésor de traditions et de croyances, souvent fantastiques, de l'histoire na¬
turelle du xvi e siècle, Miss Phipson, avec raison, a pris pour sujet, non la
Faune de Shakespeare, mais la Faune de son temps, celle-ci contenant et
expliquant l’autre. Le plan du livre est d'une clarté et d’une simplicité
parfaite : l’auteur passe en revue tout le monde animal dans l’ordre de la
classification naturelle, des mammifères aux mollusques, du singe au
corail, en donnant pour chaque animal les principaux textes du XVI e siè¬
cle, poètes, voyageurs, naturalistes. Un dernier chapitre est consacré
aux animaux fantastiques, licorne, dragon, basilic, cocatrice, gui-
vre, griffon, mantichore, caladrius, etc., etc. L’auteur, avec beaucoup
de modestie, abdique toute prétention à l’originalité et s’efface discrète¬
ment derrière les textes : elle a à cela d’autant plus de mérite que, si
elle parlait plus souvent pour son compte, le lecteur ne se plaindrait
pas, car les quelques réflexions qu’elle se permet çà et là sont en parfaite
harmonie avec l’esprit de ces vieilles citations, la plupart si fraîches, si
naïves, si quaint (un bon vieux mot français que nous avons laissé aux
Anglais et devenu intraduisible) \
Miss Phipson, dans sa préface, fait appel à la collaboration de ses lec¬
teurs pour une édition suivante. Le sujet, par sa nature même, prête in¬
définiment aux additions : la difficulté est de se borner, plus que d etre
complet. Je recommanderais seulement à l’auteur l’étude de la Faune
populaire de M. Eugène Rolland, qui, quoique exclusivement française,
néanmoins par la richesse des comparaisons avec les folk-lores étran¬
gers, peut servir de point de repère pour toute exploration partielle. Je
signalerais aussi l’oubli d’un animal important, l’homme; or, l’homme
occupe une place assez considérable dans la ménagerie fantastique du
siècle : se rappeler les Cannibales qui ont valu à Othello le cœur de
1. Je donnerai comme spécimen le paragraphe sur la licorne (p. 453) : a Ali sorts
of myths grew up around tbis creature’s history; it was supposed to live in soli¬
tude in the woods, and to be of indomitable courage. No man could succeed in ap-
proaching it, but if a pure maiden came near its haunts it would lose its fierceness,
lie down at her fect, and suffer itself to be captured. It is to be hoped, however,
that few maidens consented so basely to betray the confidence reposed in them.
Some say that a young man, dressed in female attire, served equally wcll for the
purpose of alluring the unicorn, but this statement gives the animal little crédit for
shrewdness »
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d'histoire et DE LITTÉRATURE 403
Desdémone (I, 3 ), et les montagnards à fanon de Gonzalvo, les hommes
qui portent leur tête sur la poitrine ( Tempest , m, i), etc. Je ne parle
pas de Caiiban, Ariel, Sycorax, des héros d’une Nuit d’été, etc qui nous
transporteraient dans un monde trop lointain et qui sortent décidé¬
ment de l’anthropologie, même entendue à la façon du xvi* siècle.
James Darmesteter.
231 . — Morceaux cbolele de» classiques français du XVII* siècle»
par N. M. Bernardin, professeur au Lycée Charlemagne, 38 o p., ap. Delagrave.
Paris, i 883 .
Depuis quelque années il nous pleut des Recueils de morceaux choisis
des classiques français du xvn® siècle, en deux volumes, l’un contenant
les prosateurs, l’autre les poètes. Il y en a de bons, et qui n’offrent aux
jeunes gens que la fleur de la littérature du grand siècle. Les auteurs de
ces recueils croient, comme Rollin, « qu'il faut faire lire aux enfants et
d’abord et toujours les meilleurs éerivains, qu'il ne s’agit pas de lire un
grand nombre d'auteurs, mais de bien lire ceux qui sont les plus esti¬
més. » Celui de M. Bernardin est conçu dans un esprit un peu différent;
d’abord, il présente aux élèves, sous la même couverture, les écrivains
du xvii # siècle, prosateurs et poètes; ensuite, et c'est ici surtout qu’il
fait autrement que ses devanciers, il accorde une petite place aux écri¬
vains inférieurs pour embrasser dans son ensemble le xvii® siècle. En
effet, il n'est peut-être pas inutile que les jeunes gens connaissent par
quelques extraits, à condition qu'ils soient faits avec discernement et
mesure, les victimes de Boileau, comme Brébeuf, Pradon, Chapelain,
Cyrano de Bergerac, Desmarets de Saint-Sorlin, La Calprenède, M Ue de
Scudéry, Scarron. Ce sont des ombres qui, pour parler comme le sati¬
rique, donnent du lustre au tableau. Le récit de la bataille de Rocroi
par M l *e de Scudéry ne fait que mieux ressortir la splendide narration
de Bossuet, de même que MHippolyte de Pradon ou de Gilbert, comparé
à la Phèdre de Racine, montre tout l’intervalle qui sépare un versifica¬
teur d'un poète. Il y a du plaisir à savoir que tel passage de Mairet,
tel autre de Du Ryer, ont inspiré à Corneille et à Racine de magni¬
fiques tirades. Les élèves curieux pourront, à l'aide de ce recueil,
faire des rapprochements dont ils tireront sans aucun doute quel¬
que profit. Mais si tout n’est pas à mépriser dans ces auteurs de se¬
cond et même de troisième ordre, il me semble que M. B. va un
peu loin quand il qualifie de « chef-d’œuvre » le Virgile travesti de
Scarron. Une telle appréciation aurait fait frémir le grand peintre Pous¬
sin qui écrivait de Rome à un de ses amis : « Il (Scarron) me menace
d'un sien Virgile travesti . Il prétend me faire rire d’aussi bon cœur
qu’il rit lui-même tout estropié qu’il est; mais au contraire je suis prêt
à pleurer quand je pense qu’un nouvel Erostrate se trouve dans notre
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REVUE CRITIQUE
404
pays. » Il eût suffit de dire que, de tous les auteurs de parodies, c'est le
seul dont ou puisse lire çà et là quelques centaines de vers sans trop de
répugnance. J’ai eu jadis le courage de lire et même de relire le Moïse
sauvé du gros Saint-Amant, qui a été aussi le chantre du melon et du
fromage, et je ne trouve pas que Boileau ait raillé ce poème « avec
une sévérité injuste ». Sainte-Beuve a raison : « Ces poètes du règne de
Louis XIII sont comme une postérité dégradée de Regnier. C'est, en
somme, une très mauvaise compagnie; on ne devrait s’approcher d'eux
et les hanter qu’avec précaution. » Quoi qu’il en dise, M. B. semble
quelquefois avoir oublié que son recueil était destiné à de jeunes lec¬
teurs. Par exemple, le morceau tiré de Molière, Le raisonnement de
Gros-René , Dépit Amoureux , iv, 11, n’est pas fait pour inspirer à des
enfants le respect maternel; c’est d’ailleurs, comme versification, un des
plus mauvais endroits de Molière. Il n’était pas nécessaire d’exhumer
un sonnet de Hesnaut, aussi méchant qu’injuste, contre Colbert, un de
nos plus grands ministres, à moins que ce ne fût dans le dessein de mon¬
trer que la postérité remet chacun à sa place. Il est aussi quelques au¬
tres extraits qui, à cause de leur mince valeur littéraire, n’auraient pas
dû trouver place dans ce recueil généralement fait avec soin. La Glose
sur le Sonnet de Job par Sarrazin a pu intéresser les contemporains,
mais, à franchement parler, c’est une pièce qui est immédiatement au-
dessous de rien; j’en dirais presque autant des éternels « petits mou¬
tons » de M m ® Deshoulières, et surtout de ses ineptes bouts-rimés pour
le Roi , p. 353 . M. B. est sobre de notes, et celles qu’il donne sont tou¬
jours indispensables et justes, à de rares exceptions près. Ainsi compéti -
ter, p. 2 5 o, n’est pas de l’invention de Molière; il avait déjà été employé
au xv® siècle par Chastellain. La notice sur la Bruyère commence par
ces mots : « On suppose que Jean de la Bruyère naquit à Paris en août
1645 », il faudrait corriger : On sait aujourd’hui d’une manière cer¬
taine que La Bruyère est né à Paris. M. Bernardin a trouvé des incon¬
vénients à reproduire l’orthographe du xvn® siècle, sous prétexte, dit-il,
quelle trouble « sans utilité aucune la mémoire et l’esprit des jeunes
gens ». Je ne partage aucunement son avis sur ce point, surtout depuis
que le nouveau programme a prescrit dans les classes supérieures l’étude
du vieux français et de la langue du xvi° siècle. Corriger l’orthographe
de Corneille, de Molière, de Larochefoucauld, etc., ce n’est pas donner
« le texte véritable » de ces écrivains.
A. Delboulle.
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d’histoire et de littérature 405
232. — L’Imprimerie et la Librairie dans la Haute-Marne et dans
Pnnclen diocèse de Langres, par deux membres correspondants de la
Société historique et archéologique de Langres. Paris, H. Champion; Langres,
F. Dangien, i 883 . In-8 de 2 ff. et 5 o pp. (Extrait du Bulletin de la Société
historique et archéologique de Langres, tiré à 100 exempl.)
La bibliographie française est une étude si vaste qu’elle ne peut guère
être abordée dans son ensemble. Il est à souhaiter que les érudits pro¬
vinciaux qui, avec une louable patience, réunissent tous les livres, tous
les documents qui peuvent intéresser leur ville ou leur province, ren¬
dent possible par des monographies détaillées la publication d’un grand
ouvrage embrassant, au moins pour les siècles passés, toutes les produc¬
tions de notre littérature. L’histoire de l’imprimerie et de la librairie
occupe naturellement une grande place dans ces travaux préparatoires ;
aussi annonçons-nous avec une réelle satisfaction les essais qui nous ar¬
rivent des divers points de la France.
Le mémoire que viennent de faire paraître deux bibliophiles langrois
n’est qu'une première tentative ; ils se réservent sans doute de le déve¬
lopper à l’aide de recherches ultérieures ; nous nous attacherons donc
moins à en montrer les points faibles qu'à donner aux auteurs des ren¬
seignements complémentaires qu’ils pourront utiliser plus tard.
Comme l’annonce le titre même de la brochure, les deux modestes
savants à qui nous en sommes redevables ne se sont pas arrêtés aux li¬
mites du département de la Haute-Marne; ils ont fait porter leurs in¬
vestigations sur l’ancien diocèse de Langres tout entier. Ce mode de
procéder n’a rien que de rationnel, nos circonscriptions administratives
modernes n'étant aujourd’hui encore que des unités factices qu’il est
impossible de donner pour cadre à l’histoire du passé. Les auteurs ont
divisé leur étude en trois parties. La première est consacrée aux person¬
nages du diocèse de Langres qui ont contribué d'une manière remar¬
quable aux progrès et à la propagation de l’imprimerie; la seconde nous
fait connaître les localités du diocèse de Langres et du département de
la Haute-Marne qui ont possédé des imprimeries; la troisième renferme
l'énumération des imprimeurs et libraires qui, avant le xix e siècle, ont
exercé dans les villes actuellement comprises dans le département de la
Marne. Ces deux dernières parties eussent probablement gagné à être
fondues ensemble; c’eût été le moyen d'éviter des redites.
Les personnages antérieurs au xvn® siècle dont il est fait mention dans
la première partie sont : Nicolas Jenson , Jehan Fabri ou Le Febvre,
Jacques Le Rouge , Pierre Le Rouge , Pierre de Langres , Jean Du¬
rant et Jehan Chouet. Cette liste peut donner lieu à bien des observa¬
tions.
Nicolas Jenson, que les auteurs ne citent qu'en faisant leurs réserves,
doit être tout à fait écarté : rien, absolument rien ne prouve qu’il fût
originaire de Langres.
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REVUE CRITIQUE
406
Jehan Fabri, de Langres, exerça à Turin (1474), à Casale (1475*
1477), à Turin (1477-1483 ?), et à Genève (1490-1491) 1 2 3 ; il ne doit pas
être confondu avec un Johannes Fabri a Allemand •, autrement dit
Schmidt, qui imprima à Lyon de 1482 à 1493 a , puis à Toulouse, où
il mourut en i 522 \ Nous ne pensons pas non plus qu’il doive êtri
identifié avec le Johannes Fabri qui exerça à Stockholm en 1495 et
1496 4 5 .
L’histoire de la famille Le Rouge n’a pas encore éré écrite, et cepen¬
dant elle mériterait de l'être. Voici les noms de ceux de ses membres
qui ont exercé Pimprimerie :
1. Jacques Le Rouge . — Il débuta comme prote, à Rome, vers 1470,
dans l’imprimerie d’Ulrich Hahn (Gallo), devienne; c'est du moins
ce qui paraît ressortir d’un fragment, imprimé avec les caractères de
Hahn, et signé des initiales IA. RU. (Jacobus Rubeus), qui fait partie de
la collection de M. A. Claudin. En 1474, Jacques était à Venise, où il
continua d’exercer jusqu'en 1481. Dans le courant de Pannéei479, il avait
quitté Venise pour établir un atelier à Pignerol, mais, dès le commence¬
ment de l’année 1480, il était rentré à Venise. Ses productions sont si¬
gnées : « Jacobus Rubeus, Jacobus natione Gallicus, Jacobus Gailicus,
Jacobus de Rubeis, natione Gallicus, Jacomo de'Rossi, etc. * ».
2. Pierre Le Rouge . — 11 exerçait à Châblis en 1478 et en 1483 6 7 8 ;
on le retrouve à Paris de 1488 à 1492 \ Rien ne prouve qu'il ait jamais
imprimé à Troyes.
3 . Laurent Le Rouge . — Il imprimait à Venise en 1482 # . De 1485
à 1 521 il exerce à Ferrare 9 . Ses impressions sont signées « Laurenüus
de Valentia, Laurentius de Rubeis de Valentia, Lorenzo di Rossi de
Valenza, Laurentio de Rossi ». On voit par là que la famille Le Rouge
devait être originaire du Dauphiné et que le diocèse de Langres ne peut
la revendiquer.
4. Jehan Le Rouge . — M. Assier a suffisamment prouvé par une
mention des registres de l’hôtel de ville de Troyes que Jehan exerçait
1. Voy. Panzer, Annales , III, 43, 171; IV, 270; III, 43, 44, 45, 47; GauUieur.
dans le Bulletin de VInstitut national genevois , II, 75, 85 , 86 ; Guillaume Favre,
Notice sur les livres imprimés à Genève dans le xv* siècle, 2 e éd. ( 35 , 58 , 60.
2. Péricaud, Bibliographie lyonnaise du xv* siècle, n®» 77, 91, 107, 3 i 5 , 341,
343. — Ajoutez Hain, n° 2ig6.
3 . Desbarreaux-Bernard, Marque des Cinq-Plaies, 10. —Ajoutez Cat. Didot, 1879,
n # 268.
4. Voy. Klemming et Nordin, Svensk Boktryckeri-Historia (Stockholm, i 883 ,
in-8), 147.
5 . Voy. Panzer, Annales , III, 92, n® xo 5 ; 98, n° i 3 o; 104, n°* 167-170; 110,
n°* 203-206; 117, n®« 241-247; 128, n" 293, 294; 13g, n<* 353, 354; M» 38 i, n« * 3 ;
III, i 5 4 , n® 437; Brunet, IV, 276; Panzer, IV, 434, n® 5 16 b.
6. Brunet, IU, i 3 oo; I, 1229.
7. Brunet, III, 1640; IV, 941 ; V, i 663 ; I, 5 10.
8. Panzer, III, 184, n® 635 .
9. Panzer, I, 398, 400, etc. ; VII, 3 , n» 1; 6, n® 18.
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d'histoire et de littérature
407
dans cette ville en i486. C'est donc de ses presses que dut sortir le
Breviarium Trecertse de 1483, ordinairement attribué à Pierre Le
Rouge. Les bibliographes ont tellement l’habitude de se copier les uns
les autres, qu’il faudra sans doute des années encore pour rectifier cette
erreur d’une façon définitive l .
5 . Guillaume Le Rouge . — Il était probablement fils de Pierre et lui
succéda à la tête de l'atelier de Chablis, où il exerçait en 1489. Il s’éta¬
blit ensuite à Troyes, lorsque Jehan Le Rouge fut mort, ou eut quitté
cette ville. Il y était en 1493. La question de savoir auquel des Le
Rouge on doit attribuer les Heures allemandes de 1492 reste indécise;
mais l'existence de ce volume prouve, aussi bien que l’impression des
privilèges de i486, tirés à 5 oo exemplaires, « pour les envoyer es Aile-
maines », les relations que Troyes entretenait avec les pays des bords du
Rhin 2 3 . Peut-être les Le Rouge y avaient-ils appris eux-mêmes l’art ty¬
pographique.
Au commencement du xvi» siècle, Guillaume est à Paris, où il reprend
la suite des affaires de Pierre comme il l’avait fait à Troyes. D’après
Lottin, il exerçait encore en 1517.
6. Aloïs Le Rouge. — Associé à son frère François, il succède à Jac
ques Le Rouge (probablement leur père), et imprime à Venise en
«499 ’•
7. Nicolas Le Rouge. — Il succède à Guillaume, à Troyes. On le
suit dans cette ville de i 5 io à i 55 o. Il demeurait en la grand’rue, « à
l'enseigne de Venise » 4 5 .
8. François le Rouge. — L’association avec son frère Alois s’étant
trouvée rompue pour une cause que nous ignorons, François transporta
ses presses à Ferrare, où il était en i 532 et 1 536 \ Il eut pour succes¬
seurs dans cette ville trois imprimeurs qui étaient probablement aussi
d’origine française : Joannes de Buglhat , Henricus de Campis et An-
thonius Hucher , qui exerçaient déjà en 1 5 38 6 . En 1549, l’association
ne comprend plus que Buglhat et Hucher 7 8 .
Pour le remarquer en passant, l'imprimerie à Ferrare, pendant un
siècle, ne fut guère pratiquée que par des Français . Quelques années
1. Corrard de Bréban, Recherches sur rétablissement et Vexercice de Vimprimerie
à Troyes , 3 * éd., 3 o.
2. Corrard de Bréban, 3 * éd., 22, 29, 112.
3 . Panzer, III, 466, n° 2 553 .
4. Corrard de Bréban, 3 * éd., n 3 -uq.
5 . Panzer, III, 6, n 08 21, 23 .
6. Ils font paraître en i 538 , a in aedibus Francisci Rubei de Valentia » un recueil
de musique : Liber cantus vocum quatuor ...» in-4 obi., décrit par Eitner, Bibliogra¬
phie der Musik-Sammelwerke , 42.
7. Brunet, art. Messisburgo; Cat. Marchetti, 1876, n° 405.
8. André de Beaufort , (1471-1493), Jehan Picard (1475), Laurent Le Rouge
(1485-1521), André de Chasteauneuf, de Grasse, associé de Beaufort (1492-1493).
— Les successeurs de François le Rouge s’appelaient peut-être : Jehan de Boulhac
ou Bouillac, Henry Des Champs et Anthoine Hucher .
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REVUE CRITIQUE
408
plus tard nous voyons reparaître à Ferrare un Franciscus de Rubeis,
qui imprima, en 1567, les Statuta urbis Ferrariae , in-fol., et, en 1570
VHistoria de' principi di Este de G.-B. Pigna, in-fol. Etait-ce le
même François Le Rouge ou un de ses descendants? Nous n'avons pas
été à même d’étudier la question. Le portrait de l'imprimeur placé en
tête des Statuta permettrait peut-être de l'élucider.
Tous les Le Rouge appartenaient-ils à la même famille? Cela paraît
bien probable, bien que Laurent et François aient seuls rappelé le nom
de Valence, leur pays d’origine. Le doute ne paraîtra guère possible si
l'on se rappelle qu’à Troyes la maison Le Rouge était située à l’ensei¬
gne de Venise. Il importe de ne pas confondre les Le Rouge avec les
membres d’une famille de Verceil qui portèrent le même nom en latin
(Rubeus) et en italien (Rosso , de' Rossi). Giovanni Rosso exerça d'abord
à Trévise (1480-1485), puis s’établit à Venise, où nous le suivons de
i486 à 1 5 14- Pendant plusieurs années, il ne signait ses productions
que du nom de Joannes Vercellensis. De 1492 à 1499, il eut pour as¬
socié Albertino Rosso , qui exerça ensuite tout seul et signa d'ordinaire
Albertinus Vercellertsis, puis il partagea la direction de son atelier avec
son frère Bernardo. Enfin Jean signa seul, en 1514, V Opusculum dis-
tinctum, plénum , etc., de Nola, patria , d’Ambrosio Leone.
Il semble que Jacques Le Rouge n'ait pas voulu être confondu avec
ce confrère qui probablement commença d’imprimer avant 1480;
ainsi s’expliquerait le soin qu’il prit, à la fin de 1476, de signer, ma-
gister Jacobus Gallicus, e Rubeorum familia \
Le désir de faire connaître une grande famille d’imprimeurs nous a
entraîné loin de Langres et de la Haute-Marne ; il est temps d'y revenir.
Pour Pierre de Langres> libraire parisien, dont on ne connaît qu’une
production datée de 1 565 , son nom seul plaide en faveur de son origine
langroise.
Jean Durant et Jean Chouet, libraires à Genève, sont évidemment
cités ici d’après Gaullieur a , qui les fait naître tous deux à Châtillon-sur-
Seine. Pour Durant, nous ne sommes pas en état de contester cette as¬
sertion ; il en est autrement pour Chouet. Gaullieur a confondu l'im¬
primeur Jacques Chouet, qui était, paraît-il, fils d'un procureur au
bailliage d’Auxerre, avec Jean Chouet , de Châtillon-sur-Seine, capitaine
huguenot, qui combattit pour Genève contre la Savoie et fut tué en
1590. Il nous suffira, sur ce point, de renvoyer à la nouvelle édition de
la France protestante \
Nous arrivons maintenant aux imprimeurs et aux libraires qui exer¬
cèrent à Langres même.
1. Panzer, III, 128, n°» 293, 294.
2. Bulletin de VInstitut national genevois , II, 208.
3 . IV, 352 .
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d’histoire et de littérature 409
Les deux auteurs citent Jehan Ventin, libraire, vers i 52 o; Mathieu
Viaudey, libraire, 1 556 ; Jean Des Prey\, imprimeur, 1582-1601 ;
Georges Lombard, libraire, 1593 ; Pierre de La Roche, libraire, 1598;
Pierre Pinay, 1598 ; Jacques Marchis, libraire, 098 ; Guillaume Dé¬
mon, libraire, 1600; Jean Chauvetet, imprimeur, vers i 6 oo-i 63i;la
veuve Jean Chauvetet, imprimeur, 1636-1647. Nous ne les suivrons
pas au-delà de cette date.
A la liste que nous venons de reproduire, nous avons à faire quel¬
ques additions et quelques rectifications.
Martin Alexandre, libraire à Paris, « en la croix de boys, près Sainct
Yves », devait avoir un dépôt à Langres. On ne s’expliquerait pas au¬
trement qu’il eût fait imprimer par Nicole de La Barre , vers i5o6, des
Heures a Vusage de Langres l 2 . Sur ce point, des recherches dans les
archives municipales seraient peut-être fructueuses a .
En i 52 o, Jehan Le Coq , de Troyes, imprima pour Jehan Petit 3 , à
Paris, et pour Jehan de La Roche , probablement à Langres, un Missale
secundum usum Ecclesie Lingonensis 4 . Ce Jehan, que Lottin cite
comme imprimeur et libraire à Paris dès l’année 1 5 12 et dont nous con¬
naissons deux productions de l'année 1 5 14 5 , devait être un ascendant
de Pierre de La Roche cité en 1598.
Il y avait à Langres, vers 1 538 , un libraire appelé Claude Plisson ,
dont le nom se trouve à la fin d'un Manuale Lingonense. Le seul exem¬
plaire que nous connaissions de ce volume est incomplet du titre, mais
voici le texte de la souscription, tel que le donne M. Anatole Alès dans
le Catalogue de S. A R. M« r Charles-Louis de Bourbon, n° 73 : Ex -
plicit Manuale seu caudes sacerdotum ad vsum || atq ; consuetudine
Lingoneh. summa cum diligêtia ac a || variis mendis castigatum : ad -
iectis plurimis commodita - 1 | tibus. Impressum Parisiis a (??) Iohanne
Paruo . Et Lin || gonensis a Claudio Plisson. Le volume, auquel est
joint un almanach de 1 538 à i557, est un in-4 goth. de 96 ff. La sous¬
cription, si elle est exactement reproduite, est évidemment fautive, puis¬
que Jehan Petit n’était pas imprimeur.
Jehan Des Prey\, le premier imprimeur langrois, mériterait une no¬
tice plus détaillée. C’était un curieux et un lettré. Il était grand ami du
célèbre official Jean Tabourot, qui lui confia, en i 582, la publication
du Compost et Manuel Calendrier des bergers, et, en 1589, celle de
VOrchesographie. Tabourot considérait Des Preyz comme son impri¬
meur ordinaire; tel est du moins le sens que nous attribuons à une
1. Didot, Catalogue raisonné , n° 862.
2. Martin Alexandre , qui manque à la liste de Lottin, fit imprimer, en i 5 o 8 , par
Gaspard Philippe , à Paris, une édition de la Pragmatique Sanction en français.
3 . Jehan Petit avait déjà fait imprimer, en 1 5 17, un Missale antiquum dioeccsis
Lingonensis, III, 1763.
4. Corrard de Bréban, loc . ci/., 97.
5 . Brunet, I, 1146; V, 1646.
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REVUE CRITIQUE
410
mention, probablement facétieuse* qu’on relève sur le titre de la pièce
suivante, qu'on doit attribuer à Tabourot : Advertissement en forme
de response d'un gentilhomme poictevin à F . D. L., pair de France .
A Lengres, de l'imprimerie de M. J. Tabourot , [1589], in-8 l .
Il n’est pas douteux que le Jean Des Preyz que nous trouvons à
Châlon-sur-Saôneen 1604 ne soit le même personnage; mais, en i 6 o 3 ,
il était encore à Langres, où il imprimait le Discours tres~veritable
de deux meurtres et massacres merveilleux advenus puis naguéres en
deux et divers mariages , in-8 2 3 .
A côté de Jean Des Preyz, il convient de citer un imprimeur qui ne fit
à Langres qu’un court séjour, Claude Guyot, connu pour avoir exercé
à Châlons-sur-Marne et à Dijon. Les lettres patentes délivrées à Guyot
comme imprimeur du roi à Dijon le 8 avril 1611 portent que cette fa¬
veur lui est accordée « en considération de ses services dans ledit art de
l'imprimerie depuis 1589 jusqu’audit jour, tant en nos livres de Langres
que de Châlons en Champagne*. » Guyot ne fit que passer à Langres,
car, dès l’année 1590, il imprimait à Châlons les pièces suivantes : Con¬
seil salutaire d'un bon François, in-8 4 5 , Discours des exploicts de mon¬
seigneur de Nevers % in-8 \ Requeste présentée au roy par la royne
Loyse, douairière de France, in-8 6 .
Georges Lombard , qui tenait boutique à Langres en 1597, exerçait
en 1599 à Paris, où il publiait : Le Combat au vray d!entre le seigneur
dom Philippes de Savoye et le sieur de Crequy; avec la coppie du car¬
tel de deffit envoyé avec la lettre d'iceluy dom Philippes audit sieur de
Crequy, in-8 7 .
Nous avons déjà parlé de Jehan de La Roche, que l’on peut considé¬
rer comme un ascendant du Pierre de La Roche, libraire à Langres eo
1598. Ajoutons que d’autres libraires portant le même nom avaient
exercé, au xvi e siècle, dans d’autres villes. Mathieu de La Roche publiait
en 1 5 58 à Genève une édition de la Bible en français 8 . Jean de La Ro¬
che, originaire de Grenoble, était au nombre des libraires de Chambéry
en i 583 et i 584 9 .
1. Biblioth. nat., Lb 34 644. — La pièce est signée : Francus Valerius Publicola.
2. Biblioth. nat., Lk 7 . — Il y eut à Langres, quelques années plus tard, un second
Jean Des Prey% (peut-être le fils du premier), que les deux bibliophiles langrois ne
citent que sous la date de 1637. Cet imprimeur exerçait cependant alors depuis biei
longtemps, car, dès Tannée 1620, on voit sortir de ses presses une pièce intitulée:
Cruels et estranges Meurtres et Massacres faits dedans le chasteau de Broignou ,
pièce dont la Bibliothèque nationale possède une réimpression « jouxte la copie »
(Lb 30 i 35 o).
3 . Clément-Janin, Les Imprimeurs et les Libraires dans la Côte-d'Or, a* éd., si.
4. Biblioth. nat., Lb 35 285.
5 . Ibid., Lb 34 6 a 5 A.
6. Ibid., Lb 34 824 B.
7. Biblioth. nat., Lb 35 746.
8. Bibliotheca Sunderlandiana , n* 1436.
9. Dufour et Rabut, L 1 Imprimerie et la Librairie en Savoie , 5 i 6 .
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d’histoire et de littérature
411
A Chaumont, nous ne trouvons, au xvr* siècle, qu’un seul imprimeur,
Quentin Mareschal, dont on connaît une publication datée de 1598.
Ce Quentin mena une existence errante : nos deux auteurs le retrouvent
en 1616 à Jargeau et en 1622 à Châtellerault. Là ne se bornèrent pas
ses pérégrinations. Nous pouvons ajouter qu'en 1619 il était à Loudun,
où il imprima un opuscule intitulé : Description d'un médicament ap¬
pelé Polychreston, dispensé publiquement parJaq.Boisse, m e apotiq .
en la ville de Loudun, avec la haranguefaicte sur ce subject par Théo¬
phraste Renaudot, d. en m., in-8 L Du reste, Quentin ne semble avoir
fourni qu'une carrière des plus modestes, et nous hésiterions beaucoup
à le rattacher à la famille Mareschal, de Lyon, dont les membres occu¬
pent une place si distinguée dans l’histoire de l’imprimerie au xv« et au
xvi e siècle a .
Nous terminerons ces observations déjà trop longues en exprimant le
voeu que les bibliophiles de Langres remettent leur travail sur le métier
et nous en donnent bientôt une seconde édition plus complète.
Emile Picot.
x. Biblioth. du Mans, Sc. et A., n* 2791 du Catalogue imprimé.
2. Voici la liste complète des membres de la famille Mareschal que nous connais¬
sons :
i» Pierre Mareschal , impr. à Lyon : seul, 1490; associé de Barnabé Chaussard,
1496-1 5 i 5 ; seul, 1 5 19-1 53 1 ;
2 0 Jehan Mareschal , impr. à Lyon, 1493 ;
3 ° Jacques Mareschal , dit Rotant , fils de Pierre, impr. à Lyon, i 5 io-i 53 a. —
D’après Lottin, il aurait été à Paris en 1 5 17. En i 5 a 3 , il avait une officine à Cler¬
mont;
4 0 Eustache Mareschal , autre fils de Pierre, impr. à Toulouse, successeur de la
veuve Jehan de Querlins, 1522-1 53 1 (?);
5 ° Jehan Mareschal, impr. à Lyon, 1 53 1 ;
6» Jean Mareschal , impr. à Bâle, 1 554 -i 56 i; à Heidelberg, 1576. Il revient à
Lyon vers i 583 , tout en conservant une officine à Heidelberg. Nous le suivons jus¬
qu’en i 588 . Ses héritiers, cités en ibgi, semblent avoir conservé les deux officines;
7 0 Pierre Mareschal, probablement fils du précédent, exerce à Heidelberg en
1596; l’année suivante, il emploie la rubrique Lyon. En 1623, il est à Heidelberg,
sous le nom de Marschalk;
8° Juan Pablo Mareschal , impr. ou libr. à Barcelone, 1 586 .
Les dates que nous indiquons correspondent simplement aux documents que nous
avons entre les mains; elles ne limitent nullement l’exercice de ces divers impri¬
meurs.
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412 REVUE CRITIQUE
233. — A. Bournet. Home» études de littérature et d’art. Paris, Plon,
i883, in-8, 3o8 pp. 3 fr. 5o.
.Ce champ ne se peut tellement moissonner.
Que les derniers venus n’y trouvent à glaner,
lien est de Rome comme il en était de l'Apologue pour La Fontaine:
le livre de M. Bournet en est la preuve. L’auteur, qui est un amant pas¬
sionné de la Ville Eternelle, a pu encore, après tant d'autres, écrire un
livre qu'on peut dire nouveau, bien qu’il n'ait pas eu la prétention de
rien apprendre à ceux qui se sont occupés du sujet, et qu'il n'ait aspiré
— c’est toujours lui qui parle — à mettre au monde aucun fait nouveau.
Quelle est donc la nouveauté de cet ouvrage?
On connaît ces € livres des voyageurs » que les hôteliers de Suisse et
d'Italie ne manquent jamais de présenter à leurs hôtes : les uns se con¬
tentent d’y mettre un nom et une date, les autres confient leurs impres¬
sions à ceux qui viendront ensuite en quelques lignes de prose ou de
vers. Tout cela fait au bout de quelque temps un livre bizarre, dans
lequel des noms illustres coudoient des noms plébéiens, où quelques
lignes exquises se heurtent à de plates naïveries. L’ouvrage de M. B. sur
Rome est un véritable livre des voyageurs, de voyageurs de choix, s’en¬
tend : écrivains célèbres, philosophes, humoristes, artistes, voire ambas¬
sadeurs. M. B. les a tous interrogés, depuis Rabelais jusqu’à Delacroix,
et c’est de leurs réponses, mises à la suite les unes des autres, dans l’or¬
dre chronologique et sans grands frais de transition, qu'a été fait le
volume dont nous parlons. Montaigne a dit de Rome : C'est une ville
rappiécée d’estrangers. Ceci est un livre rappiécé de citations; et l’on
comprend que lorsqu’on cite du Rabelais, du Montaigne, du de Brosses,
du P.-L. Courier, du Chateaubriand, du Beyle, du Quinet, etc., on ne
peut pas ne pas être intéressant.
Voilà la première partie de l'ouvrage de M. Bournet. Quant à 1*
seconde, intitulée les Maîtres de l'Ecole française à Rome, elle nous
a paru d’un intérêt moindre. Ce sont de courtes études sur N. Poussin,
Cl. Lorrain, Joseph Vernet, David, Prudhon, L. Robert, H. Vernet,
Ingres, H. Régnault pendant leur séjour à Rome. La partie biogra¬
phique de ces notices n’aurait rien perdu à avoir plus de précision, et
l’on aurait souhaité de mieux voir ce que le séjour de Rome a valu à
nos classiques de la peinture. Une tâche, difficile et délicate sans contre¬
dit, mais combien profitable aussi à l'histoire de l'art français, eût été
de dresser un catalogue des œuvres françaises, contenues dans les gale¬
ries de Rome, ne fût-ce que des maîtres : telle galerie de Rome est
fière d’une série de paysages du Poussin, sur l’authenticité desquels on
aimerait à être édifié.
M. B., qui n'a pas entrepris ce travail, termine son livre par deux ap¬
pendices, sans aucune prétention à l’art. Le premier est composé de des¬
criptions de la campagne romaine, empruntées à des auteurs du xix c siè-
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d’histoire et de littérature 413
cle, c’est un petit corpus à l’usage des voyageurs à qui la prose de
Baedeker ne suffit pas. Le second a le titre bizarre de vérités et paradoxes
et n’est pas d’un contenu moins bizarre; on y trouve quelques paroles cé¬
lèbres sur Rome, puis des pensées politiques de Bismarck, de M. Thiers,
des mots, comme Ceci tuera cela, et autres d’une intelligence très diffi¬
cile dans la circonstance et dont on ferait de grand cœur le sacrifice. —
Félicitons M. B. d’avoir terminé par une table analytique, bien faite et
utile, un ouvrage qui ne vise pas à l’érudition.
M. B. n’y vise pas en effet ; on ne le lui reprochera pas, il n’a pas voulu
faire œuvre d’érudit et, d’autre part, il a su remplir le cadre qu’il s’était
tracé. Mais pourquoi ce manque de précision dans les citations ? Quand
on sème les notes au bout de chaque page, pourquoi se contenter, pres¬
que toujours, de ne mettre que le nom de l’auteur, sans indication au¬
tre? Du moment que l'on donne les adresses des gens, il faut les donner
complètes : il n'y a pas pédantisme à cela.
Bien que publié avec soin, ce livre a plus d’une faute d’impression.
Ainsi, p. i 5 , lire 1 5 37 pour le séjour de l'Hôpital à Rome; p. 54,
San(Andrea; p. io 3 , Mario dei Fiori ; p. 125, quando; p. i 5 o,
giovane; p. 154, 1639. P. 161, restituer ainsi le dernier pentamètre des
distiques de Bellori sur le Poussin :
Mirum est, in tabulis vivit et eloquitur.
Corriger encore, p. 205 : Accademia, p. 211. Terracina\ p. 269,
Monte-Cavo; p. 100, C, Cestius et non Caïus Sextus. P. 5 i, l’inscrip¬
tion sur la maison de Gœthe au Corso est incomplète.
Laissons là ces vétilles pour signaler à M. B. quelques passages con¬
testables de son livre.
Est-il certain que Phôtellerie de Y Ours, où Montaigne et Poussin
sont descendus, était située devant l’église de la Trinité des Monts et
qu’elle n’existe plus? On nous avait toujours dit que la demeure de
Montaigne était YAlbergo delVOrso , vieille hôtellerie encore debout à
l’angle et au commencement de la rue Tordinona. Pour les « deux insé¬
parables frères Lacurne et Sainte-Palaye • (sic, p. 36 ), nous croirons
toujours qu’ils 11e constituent, malgré cette multiplicité de noms, qu’un
seul et même personnage J. B. de La Curne de Sainte-Palaye : excel¬
lente raison pour que La Curne soit « inséparable 1 de Sainte-Palaye.
Le palais de la duchesse de Devonshire était place Colonna, comme le
dit Lamartine (p. 87) ; l’auteur fait une confusion en le transportant
place Trajane (p. 104). — P. i 5 o, l’on voit que Poussin et son ami
Duquesnoy passaient leurs journées au Vatican à mesurer la Niobé , le
Laocoon, YHercule Commode et YAntinoüs. Evidemment ce n'est pas
sur la Niobé , ni sur YHercule Commode que le 'peintre et le sculpteur
ont pu trouver des inspirations. Le Vatican ne possède pas d’autre statue
de Niobé , ou plutôt de Niobide que le marbre très mutilé, mais encore
plein de vie, qui est catalogué dans le musée Chiaramonti sous le
n° 176. Gehrard est le premier qui ait signalé dans cette statue la fille
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RBTUE CRITIQUE
4*4
de Niobé Quant à Y Hercule Commode , il ne peut s’agir que de la
statue colossale en bronze doré, n* 544 de la Salle Ronde; M. B. a
oublié que cette statue avait été trouvée, en 1864 seulement, dans des
fouilles au théâtre de Pompée.
Le volume de M. Bournet est appelé à avoir du succès; les voyageurs,
ayant quelque sentiment de l’histoire et de Part de Rome, aimeront i
l’avoir avec eux, pour relire en présence des monuments et au milieu
même des paysages les pages qu’ils ont inspirées aux plus illustres de
nos écrivains et de nos artistes. Aussi, une seconde édition ne tardera
pas à paraître ; c’est en songeant à elle que nous avons relevé dans ce
livre quelques erreurs et quelques imperfections.
G. Làcour-Gaykt.
234. — Batzbau and Wortfolge In der deutachen Bpracbe, dargee-
tellt und durcb Belege erlceutert» von prof. Dan. Sahdeas. Berlin,
Abenheimsche Verlagsbuchhandlung (G. Joël). i 883 . In-8, xvi et 243 p. 2 mark40.
Au milieu du rude labeur que lui impose la publication de son grand
dictionnaire complémentaire de la langue allemande, M. D. Sanders
trouve le loisir d’entreprendre et d’achever des travaux secondaires
d’une grande utilité : témoin le traité sur la construction en allemand
que nous venons présenter aux lecteurs de la Revue critique . On con¬
naît la manière plus qu’imparfaite dont ce chapitre est traité dans les
grammaires allemandes à l’usage des étrangers et des Allemands. M. S.
a donc rendu un grand service aux professeurs chargés de l’enseigne¬
ment de la langue allemande par la publication de ce livre, où se trou¬
vent traitées, sinon toujours résolues, un grand nombre de questions
relatives à la construction que les autres grammairiens n’avaient même
pas encore soulevées. J’ai dit que l’auteur n’avait pas toujours résolu
ces questions : souvent, en effet, il s’est borné à exposer, en attendant, le
plus complètement possible les actes du procès, sans essayer de formuler
une loi précise, et on ne peut qu’approuver cette prudente réserve en
présence d’une langue qui possède des ressources aussi nombreuses et
aussi variées, surtout pour la construction. M. Sanders n’a pas encore
abordé le mécanisme de la période proprement dite ( Sat\gefüge ), qu’il
compte traiter plus tard dans un livre spécial. Espérons que ce livre ne
se fera pas attendre trop longtemps.
A. B.
1. V. F. Lenormant, Galette archéol, 1877, p. 171.
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d'histoire et de littérature
415
CHRONIQUE
FRANCE. — Le catalogue des manuscrits arabes de la Bibliothèque nationale était
impatiemment attendu depuis bien des années. Le baron de Slane, chargé de le ter¬
miner, est mort sans avoir pu en surveiller l’impression ; mais il en a laissé le
manuscrit complet, et c’est au zèle infatigable de M. H. Zotehberg que nous devons la
publication du premier fascicule. Nul doute que dans l’esprit de M. de Slane les
fiches rédigées par lui eussent dû être soumises à une révision attentive avant djétre
livrées [à la publicité. Les notes ajoutées par M. Zotenberg le démontrent surabon¬
damment, et font souhaiter que le savant bibliothécaire les multiplie. Le présent fas¬
cicule contient la description des ouvrages chrétiens (n°* 1 - 323 ), des exemplaires du
Coran (n 01 324-589), des commentaires du Coran (n 08 590-674), des recueils de tra¬
ditions (n°* 675-783), des traités de jurisprudence (n 0 * 784-1120), des traités de théo¬
logie orthodoxe et des écrits hétérodoxes (n 08 1 121-1464). Vient enfin l’histoire uni¬
verselle (n** 1465-1868), dont nous n’avons encore ici qu’une partie. Nous atten¬
drons la fin du catalogue pour lui consacrer un article spécial.
— M. Scheper a publié chez E. Leroux le tome premier d’une Chrestomathie per¬
sane destinée aux élèves de l’Ecole des langues orientales vivantes. Ce volumineux
ouvrage ne comprend pas moins de 23 2 pages de textes inédits, empruntés à des
manuscrits rares et curieux du cabinet de M. Schefcr. Quant aux notes et notices,
elles forment 207 pages! Il y a là une masse de renseignements nouveaux qui ren¬
dront la chrestomathie persane de M. Schefer non moins utile aux maîtres qu’aux
élèves. Le second volume sera précédé d’un historique des études persanes en
Europe et surtout en France.
— M. J. Bonkt-Maury, professeur à la Faculté de théologie protestante de Paris,
vient de publier la traduction du i tf volume de l 'Empereur Akbar , de M. de Noer.
(L'empereur Akbar . Un chapitre de l'histoire de VInde au xvi* siècle, par le comte
F. A. de Noer, traduit de l’allemand, avec une introduction par Alfred Maury, mem¬
bre de l’Institut de France. Leyde, Brill. i 883 ). On sait que l’auteur de cet ouvrage
avait fait trois voyages dans l’Hindoustan, qu’il en avait appris les principales langues
littéraires et puisé aux meilleures sources indiennes et anglaises. On verra par l’in¬
troduction de M. Alfred Maury que le comte de Noer, mort récemment, n’était
autre que le prince Frédéric de Schleswig Holstein-Augustenbourg, dépossédé par
la Prusse et condamné à perdre son nom pour rentrer dans le château de ses aïeux.
Quant à l’empereur Akbar, c’est lui dont M. Renan disait dans son Marc-Aurele
(p. 4) : « L’histoire n’a offert qu’un autre autre exemple de cette hérédité de la sagesse
sur le trône, en la personne de trois empereurs mogols : Baber, Humayoun, Akbar,
dont le dernier présente avec Marc-Aurèle des traits si frappants de ressemblance ».
— M. René Fage vient de consacrer une intéressante et instructive brochure au
château de Puy-de-Val, situé à treize kilomètres de Tulle, sur le territoire de la com¬
mune d’Espagnac. (Le château de Puy-de-Val , description et histoire, avec un des¬
sin de M. L. Bourdery et deux chromolithographies exécutées par M. Ducros sur
les cartons de M. C. Calmon. Tulle, imprimerie Crauffon. In-8°, 72 p.). M. Fage
expose d’abord la situation du château et décrit l’état actuel de cet édifice, remanié
à diverses époques, et qui « conserve l’empreinte de tous les siècles qu’il a traversés,
depuis la tour romane aux murailles épaisses, aux ouvertures à plein cintre, jusqu'à
l’ornementation prétentieuse du xviir siècle. »Mais ce qui rend le château de Puy-de-
Val encore plus curieux que la variété des styles et le mélange des constructions, ce
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REVUE CRITIQUE
416
sont les peintures murales qui décorent sa chapelle : M. Fage les décrit successive¬
ment ; elles représentent un saint, un roi, la tentation de sainte Marguerite, saint
Franpois d’Assise recevant les stigmates, le crucifiement (sujet placé au-dessus de
l'autel et le plus important de la décoration de la chapelle), le martyre de saint
Sébastien, enfin saint Gervais et saint Protais. L'auteur a pu, gr&ce à un document
qu’il a trouvé à la Bibliothèque nationale, le testament de Guy de Puy-de-Val,
déterminer l'époque à laquelle ces peintures murales ont été exécutées; la date qu'il
leur assigne est la fin du xiv* siècle ou le premier quart du xv« (voir la note 1 de la
page 28 et la réponse deM. Fage à M. Robert de Lasteyriequi place, au contraire, ces
peintures à la fin du xv« ou au commencement du xvï® siècle). Cette plaquette se
termine par l'histoire des seigneurs de Puy-de-Val ; on ne peut remonter jusqu'aux
origines du château, et Baluze, dans ses notes inédites conservées à la Bibliothèque
nationale, n'a pu dépasser les premières années du xiv* siècle. Mais M. Fage donne
la liste des châtelains et les principales dates de leur vie depuis 1 339 jusqu'à nos
jours. La valeur de cette savante brochure est encore rehaussée par un dessin qui
représente le château et par deux chromolithographies fort bien faites qui repro¬
duisent les peintures murales de ce vieux manoir.
— M. Albert Liouville, ancien membre du conseil municipal de Paris, vient de
donner au musée Carnavalet le grand portrait en pied de Georges Farcy, tué à l’at¬
taque des Tuileries le 29 juillet i 83 o. On a pu voir jusque vers i 85 o, à l'angle de
l’hôtel de Nantes, derrière une maison qui se dressait comme un énorme donjon
sur le vaste désert du Carrousel avant l'achèvement du Louvre, le petit monument
que les amis de Georges Farcy avaient consacré à sa mémoire. C'était une inscrip¬
tion gravée sur une plaque de marbre noir, encadrée dans un motif d'architecture
funéraire, et décorée de drapeaux tricolores et de couronnes rarement renouvelées
dans les dernières années : « A cette place a été tué Jean-Georges Farcy, âgé de
29 ans, élève de l'Ecole Normale, professeur de philosophie, le 29 juillet i 83 o, en
combattant pour les lois. Hommage de ses amis, » Le portrait, peint par Colin,
l'ami intime de Farcy, figura au Salon de 1 83 1 ; il représente le jeune professeur,
dans l’atelier même du peintre, saisi d’un mouvement d'enthousiasme, foulant aux
pieds les ordonnances et prenant les armes avec lesquelles il va combattre et mourir
pour la liberté. Cette mise en scène est absolument exacte. Georges Farcy, qui de¬
meurait à Aulnay, près Paris, accourut chez Colin aux premières nouvelles des évé¬
nements, et c’est dans l’atelier de son ami, rue d’Enfer, n° 33 , qu'il s'arma pour
prendre part au combat des trois jours. Le 29 juillet, il fut tué à la place même où
lui fut depuis érigé le petit monument dont on a lu plus haut la description.
— La ville de Paris a voulu conserver quelques débris de ce qui fut le château de
nos rois. L'œuvre de Philibert Delorme n’aura pas péri en entier; on construit eu
ce moment dans le parc du Trocadéro, sur le côté gauche faisant face à la Seine,
plusieurs portiques du plus bel effet, avec les meilleurs motifs d'architecture choisis
dans les ruines des Tuileries.
— On a placé à Paris, à l'angle de la rue du Vert-Bois et de la rue Saint-Martin,
une plaque de marbre noir portant l'inscription suivante : a La tour de l'enceinte
fortifiée du prieuré de Saint-Martin-des-Champs, construite vers 1140; la fontaine
du Vert-Bois, érigée en 1712, ont été conservées et restaurées par l’Etat en 1882,
suivant le vœu des antiquaires parisiens. » •
— On vient de placer, sur le piédestal construit à cet efFet dans le square Parmen¬
tier, la statue de Sedaine.
— La statue de Dupleix sera prochainement élevée sur la place de Landrecies.
Une souscription a été ouverte pour couvrir les frais de ce monument. Un comité
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d’h jstoire et de littérature
4*7
a été formé; parmi ses membres, nous remarquons MM. de Lesseps, président; le
général Faidherbe, vice-président; Henri Martin et un grand nombre de membres
de l’Institut, de sénateurs et de députés.
— Des fouilles exécutées à Nîmes pour la construction des caves des halles ont fait
découvrir, à - mètres de profondeur, le sol romain représenté par des parties de
mosaïque et de grand dallage en pierres de Barutel. On a également trouvé un ma¬
gnifique Hermès ithyphallique.
— Le Cercle Saint-Simon occupe maintenant dans la maison où il était précé¬
demment établi (2, rue Saint-Simon et 21 5 , boulevard Saint-Germain), le nouveau
local dont le Comité avait décidé la location. A partir du i 5 novembre, un restau¬
rant sera ouvert dans une des salles du cercle; on y trouvera des déjeuners et des
dîners à prix fixe et à la carte. Les conférences et les soirées musicales reprendront
très prochainement. Le Comité rappelle que les membres qui seront admis avant le
I er janvier prochain n’auront à payer que la cotisation de 1884 (pour les sociétaires
100 fr., plus 20 fr. d’impôt et 2b fr. de droits d’entrée; pour les adhérents de la
province et de l’étranger : 20 fr., plus 4 fr. d’impôt).
— M. Clermont-Gannbau fera, le lundi 26 novembre, à VAssociation philotechni¬
que (section Condorcet], une conférence sur les fraudes archéologiques en Palestine.
Il parlera du manuscrit Shapira, des poteries moabites de Berlin, et d’autres monu¬
ments apocryphes de même provenance.
ALLEMAGNE. — Un nouveau journal d’assyriologie va paraître à Leipzig, chez
Otto Schulze. Il sera dirigé par MM. C. Bezold et Fr. Hommel, avec la collaboration
de MM, Amiaud, Babelon, G. Lyon et Th. G. Pinches. Le titre de ce périodique est
Zeitschrift fur Keilschriftforschung und verwandte Gebiete. La chronique du nou¬
veau journal sera appelée Sprechsaal. M. Hommel a déjà rédigé pour le Sprechsaal
du premier numéro une introduction qu’il nous adresse et où nous lisons avec plaisir
la phrase suivante à propos de la question de savoir si l’accado-sumérien est sim¬
plement une langue artificielle ou, au contraire, l’idiome réel d’un peuple non-sémi¬
tique : « Bien que la majorité des assyriologues tiennent pour la seconde opinion,
l’autorité de noms tels que ceux d’Halévy et de Guyard impose à leurs adversaires le
devoir de tenir compte de leurs objections et de les réfuter méthodiquement. » Ces
sentiments honorent la jeune école et feront certes plus pour le progrès de l’assyrio-
logie que le dédain qu'on affectait jadis pour les idées de notre collaborateur Halévy.
— M. Ed. Sachau vient de faire paraître à Leipzig (chez Brockhaus) en un beau
volume illustré de vingt-deux planches photographiques et enrichi de deux cartes,
de dix-huit gravures et de reproductions d’inscriptions, la relation de son voyage en
Syrie et en Mésopotamie. Un index des noms de lieu termine cette importante publi¬
cation qui intéresse à la fois les voyageurs, les géographes et les épi graphistes.
— M. Dieterici, à qui l’on doit la publication récente de la Pseudo-Théologie
if Aristote, en arabe et en allemand, nous donne aujourd’hui des extraits de Yency-
clopédie arabe de Bassorah , dont il avait précédemment traduit la plupart des traités.
Ces extraits forment un volume de 170 pages de texte arabe (Leipzig, Hinrichs’sche
Buchhandlung).
— Nous avons reçu un exemplaire de la troisième édition, revue avec soin, du
Choix de lectures françaises à Yusage des écoles secondaires (première partie, classes
inférieures), par M. H. Wingbrath, directeur de l’école réale de Saint-Jean à Strasbourg.
Cet ouvrage est destiné à des élèves de neuf à douze ans, et renferme un grand nom¬
bre de morceaux choisis avec goût, à la fois intéressants et clairement écrits. Il y a
quelques fautes à corriger dans l’introduction : p. 7, une orgue!; p. 9, « combien de
travail elle a coûtée/ » et, arrochés au lieu de « accrochés ».
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418
REVUE CRITIQUE
— La librairie Trûbner, de Strasbourg, a publié les derniers fascicules du Diction¬
naire étymologique de la langue allemande , de M. Kluge; elle publiera Tannée pro¬
chaine un volume de W. Mannhardt, intitulé Mythologische Forschungen, avec une
préface de M. K. Müllenhoff; elle annonce que les 49 volumes, parus jusqu'ici, de
la belle collection des « sources et recherches pour l'histoire de la langue et de la
civilisation des peuples germaniques » (Quellen und Forschungen), dirigée paj
MM. Ten Brink, E. Martin et W. Scherer, coûteront désormais, pris ensemble, non
plus 162 mark 70, mais 80 mark seulement.
—Les éditeurs, Henninger de Heilbronn, viennent de faire paraître, dans la collec¬
tion des grammaires romanes, une Raetoromanische Grammatik, de M. Th. Gartner,
ainsi qu'une nouvelle publication de l'infatigable M. C. Horstmann, S. Editha sive
Chronicon Vilodunense im Wiltshire Dialect ims. Cotton Faustina B III) : ils annon¬
cent, comme devant très prochainement paraître, le IV* et dernier volume de l'édi¬
tion complète des Tragédies de Robert Garnier, par M. W. Fobrster; la première
partie d‘une Encyclopédie und Méthodologie der romanischen Philologie , par M. G.
Kœrting; la troisième édition, revue et augmentée, de Touvrage de M. K. Andreser*
Sprachgebrauch und Sprachrichtigkeit im deutschen ; un livre de M. W. Vietor»
Elemente der Phonetik (deutsch), englisch, fran^œsisch, mit Rücksicht au/ die Be-
dürfnisse der Lehrpraxis , et, dans la collection des « monuments de la littérature
allemande du xvin* et du xix* siècle », l’écrit de Frédéric II, De la littérature alle¬
mande, p. p. L. Geiger et les Vorlesungen über schœne Litteratur und Kunst de
A. W. Schlegel(i” partie, 1801-1802), p. p. J. Minor.
— A la librairie Ferdinand Schœningh, de Paderborn, viennent de paraître : i° Le
V* et dernier volume de la traduction en vers allemands, par M. W. Storcx, des
poésies complètes de Camoens (ce volume renferme les Lusiades; toute l’édition
coûte 18 mark); 2 0 Deutsche Mythen-Mœrchen, par M. F. Linnig (a contribution
à l'explication des contes de Grimm »); 3 ° le troisième fascicule des Neuphilologische
Studien , dû à M. A. Prehn et ainsi intitulé : Composition und Quellen der Rœthsel
des Exeterbuchs; 4 0 la deuxième édition, revue et augmentée de 70 pages environ,
de la grammaire du moyen haut-allemand /Mittelhochdeutsche Grammatik) de M. K.
Weirhold.
— On va publier un volume d’Etudes posthumes de Pauli, le professeur de Gœt-
tingue; ces études sont au nombre de neuf, dont huit traitant de l’histoire d’An¬
gleterre; la neuvième est une courte biographie de Bunsen. L’étude principale du
volume compte 160 pages et est consacrée aux commencements du règne de
Henri VIII; elle est malheureusement restée inachevée. Thomas Cromwell,
Henry V de Lancastre , Sir Robert Peel, tels sont les titres d'autres essais. Une
introduction sur 1 a vie et les œuvres de Pauli précède l’ouvrage.
— La Société généi'ale de littérature allemande (a allgemeiner Verein fûr deutsche
Literatur ») publiera prochainement des lettres inédites de Schiller à quelques-uns
de ses plus remarquables contemporains; ces lettres paraîtront par les soins de
MM. Seidel et Wittmer.
— La librairie J. Baer et C ie , de Francfort-sur-le-Mein, met à la disposition du
public le catalogue de la bibliothèque de Lorenz Diefenbach, et la librairie C. Steyer,
de Cannstadt, le catalogue de la bibliothèque d'Adelbert de Relier (première partie,
langues germaniques).
BELGIQUE. — La classe des lettres de l'Académie royale de Belgique arrête ainsi
le programme de concours pour Tannée i 885 : Première question : Quelle influence
la France essaya-t-elle d’exercer dans le pays de Liège, depuis Louis XI jusqu’à la
fin du règne de Louis XVI? Quelle fut, pendant la même période, l’attitude des
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d’histoire et de littérature
419
souverains des Pays-Bas ? Deuxième question : Comment était constituée, jusqu’au
commencement du xiv* siècle, la représentation das communes de Flandre? Troi-
sième question : On demande une étude sur l'application des règles de la métrique
grecque et latine à la poésie néerlandaise; l'auteur y ajoutera un choix d'exemples
variés et une bibliothèque critique. Quatrième question : Faire l'histoire de la lit¬
térature française en Belgique de 1800 à i 83 o; les concurrents consulteront utile¬
ment la bibliothèque léguée par le baron de Stassart à l'Académie. Cinquième ques¬
tion : Exposer et comparer les différents systèmes de colonisation qui se sont produits
depuis la découverte de l'Amérique; déterminer leur influence sur la prospérité et
les destinées de la mère-patrie. La valeur des médailles d'or, présentées comme prix
pour chacune de ces questions, est de 800 francs pour la deuxième, la troisième et
la quatrième, et de 1,000 francs pour la première et la cinquième. En même temps,
la classe offre, pour la cinquième période prorogée (1875-1880) du concours Stas¬
sart — prix pour une notice sur un Belge célèbre — un prix de 1,000 francs à l'au¬
teur de la meilleure notice écrite en français, en flamand ou en latin, sur la vie et
les travaux de David Teniers, né en 16x0, mort en 1690. Le délai pour la remise
des manuscrits expirera le I er février 1886. — Pour la quatrième période prorogée
(1877-1882) du concours Stassart — grand prix pour une question nationale, — la
classe des lettres offre un prix de 3 ,000 fr. à l’auteur du meilleur travail en fran¬
çais, en flamand ou en latin sur la question suivante : Tracer sur la carte de la Bel¬
gique et des départements français limitrophes une ligne de démarcation indiquant
la séparation actuelle des pays de langue romane et des pays de langue germanique.
Consulter les anciens documents contenant des noms de localités, de lieux dits , etc.,
et constater si cette ligne idéale est restée la même depuis des siècles et si, par
exemple, telle commune wallone est devenue flamande, et vice versa\ dresser des
cartes historiques indiquant ces fluctuations pour des périodes dont on laisse aux
concurrents le soin de déterminer l'étendue; enfin rechercher les causes de l’insta¬
bilité ou de l'immobilité signalées. Le délai pour la remise des manuscrits expirera
le i ,r février 1886. — Prix de Saint-Génois pour une question d’histoire ou de lit¬
térature en langue flamande (première période, 1868-1877). La classe des lettres
offre, pour cette première période prorogée, un prix de 700 francs à l’auteur du
meilleur travail rédigé en flamand sur la question suivante : Letterkundige en
wigsgeerige beschouwing van Coornhert's werken (Etude littéraire et philosophique
des oeuvres de Coornhert). Le délai pour la remise des manuscrits expirera le i« r
février 1886. — Prix Teirlinck pour une question de littérature flamande (première
période, 1877-1881). La classe des lettres proroge jusqu'au I er février 1886 le délai
pour la remise des manuscrits en réponse à la question suivante mise au concours
par feu Auguste Teirlinck, greffier de la justice de paix du canton de Cruyshautem
(Flandre Orientale) : Faire l'histoire de la poésie néerlandaise avant Marnix
de Sainte-Aldegonde. Un prix de 1,000 francs sera décerné à l’auteur du mémoire
couronné.
FINLANDE. — On nous annonce de Finlande la mort de M. Robert Castrén,
l'éditeur du Helsingfors Dagblad . Il était né en x 85 x : il suivait encore les cours
de l'Université lorsqu'il publia la Finsk Tidskritk; il avait succédé à Lagerbord
dans la direction du Dagblad. Ses ouvrages sur Mathias Kolonius t premier procu¬
rateur de la Finlande, sur la députation finnoise de 1808, et une série d'études sur
l’ancienne histoire de la Finlande lui avaient assuré une grande renommée parmi
ses compatriotes.
GRANDE-BRETAGNE. — Les éditeurs Chapman et Hall publieront au mois de
décembre un livre sur l’Egypte, par M. A. M. Broadley, conseiller d’Arabi pacha;
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420 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
ce livre est intitulé : How we defended Arabi , a story of Egypt and Egyptians.
— Il va paraître chez l’éditeur Quaritch un ouvrage de M. Herbert A. Giles, vice-
consul à Shanghai : Gems of chinese literature ; il renfermera en un volume plus de
cent extraits de soixante auteurs, les plus remarquables de la Chine.
— M. Ernest Budge, du British Muséum, doit publier la version syriaque d’un
texte du moyen âge, Alexandre le Grand , d’après deux manuscrits, avec variantes,
commentaire et traduction anglaise. Cette version syriaque renferme beaucoup de
mots rares dérivés du grec ou du perse; elle offre quelques points de ressemblance
avec le pseudo-Callisthène. _
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du g novembre i 883 .
M. Olivier d’Espina envoie la copie d’une inscription qui vient d’étre découverte
à 6 kilomètres au sud-est de Sfax (Tuninie), par M. Joseph Awocato, fils de l'agent
consulaire d’Italie [à Sfax. Cette inscription est ainsi conçue :
MEMORIAE
AE TERNAE
CONSORTIOLAE
INPACE
M. Alexandre Bertrand termine sa communication sur les antiquités improprement
dites préhistoriques de l’Italie septentrionale et d’une partie de l'Autriche. Il s’atta¬
che à établir une proposition qu’il formule en ces termes :
a Les antiquités pre-étrusques de la vallée du Danube et de la Haute-Italie sont en
relation intime avec les légendes du cycle homérique et argonautique ainsi qu’avec
les récits des plus anciens logographes. »
M. Maury, revenant sur les premières lectures de M. Bertrand, insiste sur la res¬
semblance frappante que présentent les objets signalés dans cette communication
avec les produits de l’art grec, il lui parait difficile de croire que ces objets aient été
exécutés en dehors de toute influence grecque.
M. Bertrand est disposé à reconnaître l’influence de l’art gre sur l’art de la région
dont il s’occupe, mais il croit que cette action ne s’est exercée qu’à partir du v« siè¬
cle avant notre ère. Les objets de date plus ancienne appartiennent à un art natio¬
nal, indépendant de toute influence étrangère.
M. Ravaisson fait des réserves sur la théorie d’après laquelle les scènes figurées sur
les objets d’art dont a parlé M. Bertrand seraient toujours des scènes de la vie réelle.
Il signale sur quelques-uns de ces objets des figures d’animaux fantastiques, tels
que des lions ailés. M Bertrand répond que ces figures fantastiques ne se trouvent
que dans les bordures qui encadrent les scènes principales. Dans ces dernières, l’ar¬
mement des guerriers représentés se composent précisément des mêmes pièces d’ar¬
mures que les fouilles ont fait découvrir dans la même région. Les guerriers sont
donc figurés avec le véritable équipement qu’ils portaient, et il est naturel d’en con¬
clure que les scènés qu’on a voulu représenter sont des épisodes de la vie réelle et
non des créations de fantaisie.
L’Académie se forme en comité secret.
La séance étant redevenue publique, M, Ferdinand Delaunay termine la lecture du
mémoire de M. Romanet du Caiilaud sur la date de la loi Junia Norbana.
Ouvrages présentés : — par M. Gaston Paris : Mussafia (A.), Zur Prœsensbildung
im Romanischen (extrait des Sit^ungsberichte de l’Académie impériale de Vienne);
— par M. Weil : Jacob (Alfred). Sylloge vocabulorum ad conferendos demonstran-
dosque codices Graecos utilium ; — par M. Delisle : i° Duhamel (L.), Les origines
du palais des paves: 2 0 Omont (Henri), Inventaire sommaire des manuscrits du sup¬
plément grec de la Bibliothèque nationale ; le même, Inventaire sommaire des manus¬
crits grecs conservés dans les bibliothèques de Paris autres que la Bibliothèque natio¬
nale (extrait du Bulletin de la société de Vhistoire de Paris et de Vile de France); le
même, Inventaire sommaire des manuscrits grecs des bibliothèques des départements
(extrait du Cabinet historique ): par M. Jourdain : Tamizey de Laeroquk, Arnaud de
Pontac , évêque de Baças; par M. P.-Ch. Robert : Poulle (A), Inscriptions diverses
de la Numidie (extrait du Recueil des notices et mémoires de la société archéologique
de Constantine, vol. XXII, 1882).
Julien Ha vet.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puyr t imprimei'ie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 2S,
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habilement mis en œuvre.) — Crbll, Helgoland, in 20 Zeichnuneen,
nebst Karte von 1649, Text von W. F. Müller. - Der Rigveda oder
die heiligen Hymnen der Brâhmana, zum ersten Male vollstandig ins
Deutsche übersetzt, mit Commenter und Einleitung von A. Ludwig.
IV u. V. Bande. (Deux volumes d'un commentaire courant qu'il faudra
consulter en même temps que la traduction; polémique amère contre
Grassmann; mais beaucoup de points très savamment traités; commen¬
taire qui n'est pas une compilation des vues des autres, mais qui est, à
de nombreux égards, original et remarquable: le premier commentaire
dû à un savant compétent d’Europe sur le Rigveda tout entier.) —
Thiofridi Epternacensis Vita Willibrordi metrica, p. p. Rossbkrg.
(Edition peu utile d'un texte qui n’a qu’une minime importance ; beau¬
coup de soin, trop de prolixité.) — Shakspeare's tragedy of Hamlet, edi-
^ Elzb. (Excellente édition.) — Antoine, Etude sur le Sim-
pheissimus de Grimmelshausen. (Intéressant et bien fait). — Hild,
La légende d’Enée avant Virgile. (Jugement sain ; résume tout ce qui a
été écrit sur le sujet). — Münzkl, Quaestiones mythographae. (Poursuit
son essai de rétablissement du texte d'Apollodore). — Le livre de For¬
tune, p. p. L. Lalanne ; Les origines de la porcelaine en Europe, par
Deutsche Litteraturzeitung, n° 44» 3 novembre i 883 : Bôhl, Zum Gesetz
und zum Zeugnis, eine Abwenr wider die neukritische Sprachforschung
im Alten Testament. — G. Bréton, Essai sur la poésie philosophique
en Grèce, Xénophane, Parménide, Empédocle. (Diels : quelques aper¬
çus, mais c’est tout.)— H. Jacoby, AUgemeine Pàdagogik auf Grund
der christlichen Ethik. — Penka, Origines ariacae, linguistisch ethnolo-
§ ische Untersuchungen zur àltesten Geschichte der arischen Vôlker und
prachen. (Ouvrage manqué; le critique, Bezzenberger, ne regrette
pourtant de l'avoir lu, car il le trouve écrit avec agrément et il y a çà
et là des choses instructives.)—Thiofridi Epternacensis Vita Willibrordi
metrica, p. p. Rossberg (E. Voigt : édition sérieuse). — R. Prôlss, Ge¬
schichte der dramatischen Literatur und Kunstin Deutschland von der
Reformation bis auf die Gegenwart. 2 Bande. (Minor : travail qu’on
peut qualifier de « tumultuarisch »; choisit inégalement ses sources;
consulte à la fois de précieux documents, souvent même de l’inédit,
mais aussi oublie des œuvres de grande importance; fait avec trop de
rapidité « mit Flüchtigkeit » ; avec plus de soin, l’ouvrage aurait été
meilleur, mais serait-il devenu bon?) — G. Schlosser, Die Révolution
von i848. Erinnerungen, (Kugler : ouvrage intéressant et instructif,
patriotique, rempli de remarques frappantes.) — J. von Pflugk-Hart-
tung, Iter Italicum.(E. Bernheim: contient des communications sur
l’état des archives italiennes qui renferment des documents sur les
S apes; beaucoup de matériaux utiles.) — Aronius, Diplomatische
tudien über die àlteren angelsâchsischen Urkunden. (Wattenbach.) —
S ch wer er, Beitrâge und Kritik der Chorographie des Augustus. III.
Ueber die < Chorographia », die rôraische Quelle des Strabo und über
die Provincialstatistik in der Géographie des Plinius. (Discussion difficile
et fort compliquée, les preuves de la démonstration témoignent d'une
crande sagacité.] — W. Bode, Studien zur Geschichte der holl&ndischen
Malerei. (J. Janitsch : recherches importantes, surtout sur Rembrandt.)
— Kriegsgeschichtliche Einzelchriften, herausg. vom Grossen General-
stabe : Aus dem Nachlasse des Prlnzen August von Preussen; der
Ueberfall bei Fontenoy sur Moselle am 22 Januar 1871. —Meister
Pathelin, altfranzôsischer Schwank in drei Aufzügen, übersetzt und
fur die deutsche Bühne bearbeitet von Graf Wickenburg. (E. Schmidt.)
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Theologische Literaturzeitung, n» 22, 3 novembre |883 : Gothe, Frag¬
mente einer Lcderhandschrift, entbaltend Moses letzte Rede an die
Kinder Israël, mitgetheilt und geprüft (Kautzsch : « après tout» ces ex¬
périences, on peut exprimer le souhait que M. Shapira regarde à 1 avenir
plus exactement les Bédouins qui lui apportent de pareilles trouvailles,
avant qu’ils disparaissent pour toujours »). — The Mishnat, on which
the Palestinian Talmud rests, edited by Lowe (Long article de E. Schü-
rer) — Keppler, Das Johannes-Evangelium und das Ende des ersten
christlichen Jahrhunderts, eine akademische Antrittsrede (Holtzmann).
— Hall, The Greek New Testament as published in America. —
Kôstun, Martin Luther, sein Leben und seine Scbriften. 2 vols.
2 e édition nouvellement remaniée (W. Môller : toujours excellent, et les
changements apportés par l’auteur n’ont fait que rendre son ouvrage
plus parfait). — Jansen, Aleander am Reichstage zu Worms 1521
(Brieger). — Bassermann, Die Bedeutung des Liberalismus in der evan-
gelischen Kirche. — Thieôtter, Darstellung und Beurtheilung der
Théologie Albrecht Ritschl’s.
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
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Conseiller à la cour de Paris.
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N* 48
Dix-septième année 26 Novembre 1883
REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RECUEIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DK MM. S. GU YARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuquet
Prix d'abonnement :
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(Au bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
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Première série: Egypte ancienne. 2 vol. in-8. 2 5 fr.
Deuxième série: Géographie et cosmographie. 2 vol. in-8... 25 fr.
Troisième série: 2 vol. in-8 (sous presse).
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 601, io novembre i 883 # : sir William Stirling-
Maxwell, Don John of Austria. 2 vols. (Creighton : œuvre qui mérite
le plus grand respect, et qui a la plus haute valeur; beaucoup de savoir,
et, si long qu'il soit, l’ouvrage n’est jamais ennuyeux.) — Gosse, Seven-
teenth century studies, a contribution to the history of english poetry.
(E. Donden.) — Flinders Petrje, The pyramides and temples of Gizeh.
(Am. B. Edwards : ouvrage de grand intérêt et de grande importance,
monument de soin et de patience.) — Rev. Lal Behari Day, Folk-Talcs
of Bengal. (Ralston.) — Stoughton, The spanish reformers, their mémo-
ries and dwelling-places. (W. Webster : impartial.) — The Hermes and
Orpheus myths. (Ralph Abercromby.) — K.ing L 6 * 1 * an< * daughters.
S saac Taylor.) — « Fields » and « closes » (Sargeaunt). — P. Ovidii
asonis Libellus de medicamine faciei edidit, Ovidio vindicavit A.
Kunz. (Ellis : très soigné.) — Post-classical latin. (Mayhew.) — New
Guinea numerals. (Keane et Trotter.) — The colour of the winds.
(H. Friend.) — Discoveries in Cyprus. — The t Venice sketch book 1
and other early works of Raphaël. (Sidney Col vin.)
The Àlhenaeum, n° 2924, 10 novembre ^883 : Some professional recol¬
lections by a former member of the council of the incomporated law
society; Romantic stories of the legal profession. — Coppingbr, Cruise
of the Alert. — H. M. Durand, The life of Sir Henry Durand. 2 vols.
(Deuxième article.) — Le comte de Paris, History of the civil war in
Austria. Vol. III. (Claires descriptions de batailles, particulièrement de
celles de Chancellorsville et de Gettysburg; ouvrage d'un homme du
métier, qui a vu les choses de près et connu les principaux personnages
de la lutte.) — Memories of seventy years, by one of a Iiteraiy family,
edited by mrs. Herbert Martin. — The <t dictionary of national bio-
graphy » (lettre B.). — The new « Cartularium Saxonium » ( H esse 1 s.)
— Manor court rolls (Jessopp). — The funeral of Martin Luther (Ch.
Cox). — Notes from Oxford. — Col. Prjevalsky in Northern Tibet.
Literarisches Centralblatt, n° 46, 10 novembre 1 883 ; Schneider, Natur,
Vernunft und Gott. — Die Sprtlche Salomo’s von Bbrtheau und der
Prediger Salomo’s von Hitzig in 2 cn Auflage hrsg. von Nowack. —
Loserth, Hus und Wiclif, zur Genesis der husitischen Lehre (Livre
également intéressant et utile pour l’historien et le théologien ; nom¬
breux documents inédits; récit clair et coulant). — Albrecht, Deutsche
Kônige und Kaiser in Colmar (Intéressant). — Süssmilch, Geschichte
des 2. Husaren-Regiments <c Kronprinz Friedrich Wilhelm des deut-
schen Reichs und von Preussen ». — W. Müller, Politische Geschichte
der Gegenwart. XVI. Das Jahr 1882. — Hartmann, Abyssinien und die
tibrigen Gebiete der Ostküste Afrika’s. — Karsten, die Lehre vom Ver-
trage bei den italienischen Juristen des Mittelalters, ein Beitrag zur
inneren Geschichte der Réception des rômischen Rechtes in Deut-
schland. — Verzeichniss der rheinischen Weisthümer, Vorarbeit zu der
von der Gesellschaft für rheinische Geschichtskunde unternommenen
Ausgabe, nebst einer Orientirungskarte. — Claudii Ptolemaei Geogra-
phia, e codicibus recognovit, prolegomenis, annotatione, indicibus, r a-
bulis instruxit Car. Müller (Edition qui a de fort grands mérites, œu¬
vre excellente qu’il faut recommander le plus chaudement à tous les
amis de la géographie de la Grèce; puisse le savant qui l’a entreprise,
la terminer bientôt et heureusement!). — D'Arbois de Jubainville,
Essai d’un catalogue de la littérature épique d’Irlande, précédé d’une
étude sur les manuscrits en langue irlandaise conservés dans les îles bri¬
tanniques et sur le continent (11 faut reconnaître le zèle de l'auteur qui
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 48
— 26 novembre —
1883
Sommaire s 235 . Niese, Le développement de la poésie homérique. — 236 .
Jurien de La Gravière, Les campagnes d'Alexandre, le drame macédonien. —
237. Van Eys, Grammaire basque. — 238 . W. Fischer, Etudes sur l’histoire
byzantine du xi° siècle, Jean Xiphilin, patriarche de Constantinople. — 23 g.
Léonce Person, Les papiers de Pierre Rotrou de Saudreville. — 240. Lossius,
Les documents des Lagardie à l’Université de Dorpat. — Chronique.— Académie
des Inscriptions. — Société des Antiquaires de France.
235 . — Ole Entwlckelnng dei* homerlaoben Poeale 9 par B. NiESE. Berlin,
Weidmann, 1882; in-8, vi-262 pages.
Comment se sont formés les poèmes homériques? Par quels états suc¬
cessifs ont passé Y Iliade et Y Odyssée pour arriver jusqu'à nous? Telles
sont les questions auxquelles M. Niese entreprend de répondre.
Et d’abord, de toutes les hypothèses imaginées dans les temps moder¬
nes pour rendre compte de l'origine et de la transmission de la poésie
homérique, aucune ne semble à M. N. pleinement satisfaisante. La
seule chose qui lui paraisse certaine (p. 8), c’est, comme l'a pensé Wolf,
que, primitivement, cette poésie n’a point été écrite, qu’elle n'a été con¬
fiée à l’écriture qu’assez tard et que, jusque là c’est par la transmission
orale qu’elle s’est perpétuée. La preuve en est dans Homère même : Dé-
modocos et Phémios peuvent donner une idée de ce qu'étaient ces chan¬
teurs qui contribuaient à entretenir, dans la cour du prince oü ils se
faisaient entendre, le souvenir des combats et des nobles actions des
héros. Mais il est très probable que ces chanteurs, qui étaient en même
temps des poètes, n’ont pas toujours respecté le texte des poèmes qu’ils
débitaient; il y a tout lieu de croire (p. i 1) que ces légendes qui faisaient
le fonds de leurs chants, ils les ont embellies, amplifiées, qu’ainsi les
poèmes homériques, au lieu de nous parvenir tels qu'ils étaient à l’ori¬
gine, nous sont arrivés dénaturés et considérablement augmentés par
les additions et les retouches successives de ceux qui s’étaient donné
pour mission de les vulgariser.
M. N. fait remarquer, en effet, que si Y Iliade et Y Odyssée forment
chacune un ensemble, l’unité de cet ensemble n’est qu’apparente. Par
exemple (p. 17), dans Y Iliade, c’est la volonté de Zeus de donner satis¬
faction à la rancune d’Achille qui fait le principal ressort de l’action.
Pour arriver à ses fins, le dieu trompe Agamemnon à l’aide d'un songe
où il lui promet, si les Grecs livrent bataille, la victoire et la prise de
Troie. La lutte s'engage, mais l'issue eii est d’abord heureuse pour les
Grecs, premier sujet d’étonnement pour le lecteur, qui sait à quoi s’en
Nouvelle série, XVI. 4 #
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422 REVUE CRITIQUE
tenir sur la promesse faite à Agamemnon et qui s’attendait à voir les
Grecs défaits. Plus tard, au chant III, on convient de terminer la guerre
par un combat singulier entre Paris et Ménélas : en permettant le
combat, Zeus doit s’interdire à jamais de donner à Achille la satisfac¬
tion qu’il lui a promise; pourtant, il ne s’y oppose pas; bien plus, au
chant IV (v. 5 sqq.), quand le combat a eu lieu et que Paris a miracu¬
leusement échappé à son adversaire grâce à l’intervention d’Aphrodite,
Zeus semble hésiter à rallumer la guerre entre les Grecs et les Troyens;
il consulte les dieux assemblés pour savoir s’ils veulent pousser de
nouveau les deux peuples l’un contre l’autre ou les réconcilier ; l enga¬
gement solennel qu'il a pris vis-à-vis de Thétis de venger Achille, en
laissant écraser les Grecs, paraît lui être absolument sorti de la mémoire.
Cet exemple et d'autres encore (pp. 17-18) montrent qu’il y a dans l'Iliade
des contradictions, des défauts de suite, qu’on ne peut expliquer que si
l'on admet que ce poème a eu plusieurs auteurs. Un examen attentif
conduit, pour Y Odyssée^ à la même conclusion. Sans doute, il y avait
une Iliade et une Odyssée primitives, mais X Iliade et Y Odyssée que
nous possédons aujourd’hui sont l'œuvre collective d’un grand nombre
de poètes.
Comment rendre compte de l’état actuel des poèmes homériques? Wolf,
Lachmann, Nitzsche, Grote ont émis différentes conjectures qui toutes
ont ce caractère commun, qu’elles supposent l’existence, antérieurement
à l’ Iliade et à l’ Odyssée, d’une poésie populaire dont ces deux poèmes
seraient le dernier terme. Tel n’est pas l’avis de M. Niese. De même,
en effet, qu'on ne saurait voir dans Y Iliade et dans YOdyssée deux œu¬
vres contemporaines, de même, il est facile de discerner, dans chacun
de ces deux poèmes, certaines parties plus anciennes que d’autres
(pp. 53 sqq.'). Ainsi, dans Ylliade , les chants XXIII et XXIV ne fai¬
saient certainement pas partie de l’épopée primitive. On en peut dire
autant des IX 0 et X* chants, etc. La scrupuleuse enquête à laquelle se
livre M. N. lui fait apercevoir, dans Ylliade telle que nous la connais¬
sons, un chaos d'additions de différente nature, ayant les unes avec les
autres, ainsi qu’avec le fond original du poème, des rapports plus ou
moins étroits. M. N. en conclut (p. i 3 p) que Ylliade a été comme
un canevas sur lequel de nombreux poètes sont venus broder tour
à tour; pour grouper les éléments souvent discordants de ce vaste en¬
semble, il n’a fallu ni assembleur ni diorthôte : chaque poète a successi¬
vement collaboré à l'œuvre commune et celui qui a mis la dernière
pierre à l’édifice, l’auteur du dernier épisode ajouté au poème, a fait de
Ylliade ce qu’elle est aujourd'hui. U Odyssée a eu le même sort
(pp. 140 sqq.), avec cette différence qu’elle s’est formée plus tard que
Ylliade , de sorte que les deux poèmes homériques nous représentent,
non pas l’apogée de l’épopée grecque, mais l’histoire même de cette
épopée dans son développement continu, depuis les origines jusqu’aux
cycliques.
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d’histoire et DE LITTÉRATURE 42 3
Le travail de M. Niesç est ingénieux et bien conduit. L'auteur (il
l’avoue lui-même, p, iv) doit beaucoup à ceux qui, avant lui, ont traité
le même sujet, à Muller, à Bergk, à Kammer, à Kirchhoff, etc. Mais
il a su, tout en s’aidant de leurs travaux, rester original et faire un livre
que liront avec plaisir tous ceux qu’intéresse l’histoire des poèmes
homériques.
Paul Girard.
236 . — Le* campagne* d’Alexandre. Le drame Macédonien , par le vice-
amiral Jurien de la Gravière. Paris, Plon, 1 883 . 1 vol. in-18, xix-194 p., avec
une carte de l'Asie mineure.
On sait avec quelle curiosité passionnée et en même temps avec
quelle préoccupation patriotique M. l’amiral Jurien de la Gravière étu-
die l’histoire des guerres de l’antiquité. Il cherche dans ces études à vé-
rifier pour lui-même et à démontrer aux autres les idées qu’il s'est faites
sur le rôle qui doit être réservé à la marine dans les guerres modernes;
il interroge le passé, afin de lui demander des enseignements, qui sont
de nature, dans 6a pensée, à recevoir des applications pratiques et à ser-
vir les intérêts de la défense nationale. Pour rendre plus populaire cette
sorte de prédication, il met en œuvre tous les souvenirs que lui four¬
nissent ses voyages et son expérience ; il emploie toutes les ressources
d’un style très animé, très personnel et, sans être un érudit de profes¬
sion, il réussit souvent à éclairer d’une vive lumière les questions com*
pliquées et difficiles dont il a entrepris l’examen.
Le volume qu’il vient de publier, n’aura pas moins de succès que les
précédents. Il contient le récit des campagnes d’Alexandre, depuis son
passage en Asie jusqu’à la bataille d’Arbèles, jusqu’au moment où le
roi de Macédoine, vainqueur de Darius, va s’enfoncer dans les immen¬
ses contrées de la haute Asie. Dans sa préface. M. J. de G. s’excuse de
mettre le pied sur un domaine qui ne lui appartient pas : « Le drame
macédonien, c’est, avant tout, le triomphe de la cavalerie. Pourquoi
donc alors lui donner place dans un travail qui affiche à bon droit la
prétention de se tenir à l'écart des affaires de terre ferme? (p. xm). » Bien
que l'auteur se déclare ainsi incompétent, nous ne le croirons pas sur
parole. En attendant que M. J. de G. nous raconte, comme il nous l’a
promis, l’expédition de Néarque, nous trouverons plus d'une remarque
pénétrante, plus d'un aperçu ingénieux et fécond dans les pages où il pré¬
sente le récit des premières batailles d’Alexandre. Ces pays que traverse
l’armée macédonienne et où elle remporte tant de victoires, rappellent à
l’auteur les événements dont l’Asie Mineure, dans des temps plus rappro¬
chés de nous, a été le théâtre. Usait très heureusement tirer parti de tous
ces souvenirs, qui se pressent en foule dans sa mémoire. On comprend
mieux la lenteur des mouvements de Darius, quand on se rappelle avec
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REVUE CRITIQUE
424
lui que, pour envahir la Perse avec 3 oo,ooo hommes, il ne fallut pas à
Soliman moins de 200,000 chameaux (p. 27). De même, quand on sait
que, en i 83 q, sous les murs de Caboul, parmi les 80,000 rationnaires
qui figuraient sur les contrôles de Tannée britannique, on aurait eu de
la peine, au moment de l'action, à trouver plus de 7,000 hommes à
mettre en ligne, on est moins étonné de voir qu'il suffit d’une troupe
déterminée de Macédoniens pour disperser les bandes innombrables que
le roi de Perse traînait derrière lui.
Ce n'est pas à dire que le livre de M. J. de G. soit à l’abri de toute
critique. Ainsi, p. 57 et 58 , il ne donne que quelques renseignements
très brefs sur les opérations de Memnon et de sa flotte. Il est regretta¬
ble que Tauteur n’ait pas cru devoir accorder plus d'importance à cette
partie de son sujet. Nous aurions aimé à connaître l’opinion qu'il s’est
faite sur l’amiral de Darius. Pour avoir cette opinion, nous aurions vo¬
lontiers sacrifié le deuxième chapitre, où le récit des campagnes d’Ibra-
him-Pacha tient peut-être trop de place. En outre, il y a des assertions
contestables. P. 33 , je relèverai un passage où Quinte-Curce me paraît
jugé d'une manière bien favorable, au détriment d’Arrien. Dans le der¬
nier chapitre, p. 179 sqq., quand Tauteur raconte la bataille de Méga-
lopolis et les événements qui l’ont précédée, il me semble qu’il se laisse
entraîner bien loin par son admiration pour les institutions de Lycur¬
gue. « Entre Athènes et Sparte, s’il m’eût fallu choisir, je n’aurais pas
balancé... » (p. 187). En lisant ce passage, on ne peut se défendre de
penser qu’il s’est fait de la vertu Spartiate une image trop idéale. On
est surpris qu'un historien, que le respect de la tradition n’enchaîne
pas, qui se dégage aussi facilement des opinions reçues, ait permis aux
anecdotes racontées par Plutarque et répétées par Rollin de prendre
ainsi possession de son esprit.
Mais il serait superflu d’insister sur ces critiques. Ce n'est pas l’exac¬
titude rigoureuse des détails qu’il faut chercher dans le livre de
M. J. de G. ; il se recommande, nous l’avons dit, par d’autres qualités.
Ce qui nous intéresse surtout, c’est la conviction profonde qui anime
l’auteur, et le mouvement rapide qui emporte tout son récit. Il est bon
que l’histoire ancienne ne reste pas un domaine fermé, où les érudits
seuls auraient accès. Nous devons être reconnaissants aux hommes d’ac¬
tion et d’expérience, comme M. Jurien de la Gravière, qui veulent bien
tourner leur activité vers ces études. Sur bien des points, ils apportent
des éclaircissements qu’eux seuls étaient en état de donner. Chemin fai¬
sant, ils soulèvent bien des problèmes auxquels les savants de cabinet
n'auraient même pas songé, et les solutions qu’ils proposent, alors
même qu’elles sont improvisées, ont l’avantage de frapper Timagination
avec cet autre avantage, plus précieux encore, de provoquer la réflexion.
R. Lallier.
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d'histoire et DE LITTÉRATURE 425
237 . — Onillnea of basque grammar, by W. J. Van Eys. London, Trübner,
i883. Pet. in-8 de xij-5a p.
Cet élégant petit volume fait partie d'une série fort intéressante de
simplified grammars dont la librairie Trübner, de Londres, a entrepris
la publication. Un livre sur la langue basque portant le nom de M. Van
Eys est à coup sûr digne de toute attention. Il peut paraître défec¬
tueux ; on peut différer d'avis avec son auteur sur bien des points :
l'ouvrage n’en sera pas moins clair, méthodique, sérieux et utile.
Comme je viens de le faire pressentir, je ne partage pas, dans beau¬
coup de cas, les opinions de M. Van Eys. Lorsqu'il persiste — hypo¬
thèse qu’il a depuis longtemps proposée et que j’ai déjà plusieurs fois
combattue — à regarder le h comme original et primitif dans hi « toi »,
hume « petit, enfant » ; lorsqu'il affirme que ce h est devenu k dans
duk (le-avoir-toi) a tu l’as » oü je crois, au contraire, le k original,
M. V. E. me paraît avoir à la fois contre lui et la vraisemblance et l’a¬
nalogie. Pour les memes motifs, je ne puis lui accorder que, dans les
verbes simples, réguliers, la voyelle initiale devienne toujours a ; dans
dakust , daramat de ikus , eraman, Va est peut-être plus ancien que Ve
ou 17 . Je ne crois plus, depuis longtemps, que dans gi^onetan il faille
voir une permutation de gi\onakan et je regarde comme parfaitement
admissible l’hypothèse du prince L.-L. Bonaparte en vertu de laquelle les
suffixes indiquant les relations locales s’ajoutent aux thèmes suivant des
lois particulières, intercalant, p. ex.,-au pluriel, le suffixe spécial eta
déjà si fréquent dans les noms topographiques. J’ai aussi adopté la pro¬
position du même savant qui tend à ne plus considérer le n final comme
la caractéristique de l'imparfait; son inutilité est démontrée par l’usage
de deux dialectes (haut-navarrais-méridional et bas-navarrais-occidental
d’Aezcoa) et par toute la dérivation : n final est principalement con¬
jonctif.
Je ne voudrais pas trop allonger ce compte-rendu ; il ne m'est pour¬
tant guère possible de ne pas relever des assertions comme la suivante :
« The adverb bai ou bei, in the French-Basque dialects is often found
preceding the verbal flections. This is generalles the case to introduce a
subordinate sentence, something like German so, and, as a rule, it co¬
ntes always after \eren because \oin-ere howsoever, etc. » (pp. 47*68).
Les formes en bai, bei sont essentiellement causatives; elles se rencon¬
trent souvent sans aucune conjonction séparée, et parfois elles prennent
un sens nettement relatif. — P. 47, M. V. E. explique galt\en « en ac¬
tion de perdre » par ce gaîten pour galtan , forme parallèle à hiruretan
« en trois »; pas du tout, dans hiruretan , ta est une syllabe adventice,
une dérivative de relation oblique, tandis que, dans galt\en , t\e est une
dérivative nominale. — P. 29, ke serait caractéristique d'un mode opta-
tif ; les formes en ke me paraissent plutôt aoristiques, conditionnelles,
potentielles qu’optatives : derraket n’est pas « puissè-je dire ! » mais
et je puis, pourrais, ou voudrais dire ».
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426 REVUE CRITIQUE
Certaines indications sont incomplètes. Puisque, à la p. 27, l’auteur
cite les deux formes ehun, eun « cent », à plus forte raison devait-il don¬
ner 4 hogoi à côté de hogei « vingt *. — Lé datif pluriel ft'est pas ei dâns
tous les dialectes français (p. 16); il fait aussi régionalement eritXèt,
— Le souletin prononce bien u comme Ü français; màis il possède aussi
notre ou (p. 1); le même dialecte prononce 7 tomme f français
(p. 2).
La division du basquè trt six dialectes (p. t) ne me semble pas Suffi*
santé; la classification dü prince Bonaparte, qui en a distingué huit, est
plus conforme à la réalité des faits: il y a plus de différences peut-être
entre le bas-navarrais occidental et le bas*navarrais oriental qu’entre le
bas-navarrais occidental le labourdin ou le bas-naVarrais oriental et le
souletin.
Je relève, en terminant, quelques négligences ou quelques coquilles
typographiques : p* îx, le premier livre daté de Larrâmendi est de ïyû
et non de 1725; — p. xi, le Kono Test, de Licassagne est de 1571 et
non de i572 4 , — p. xi encore, l'édition de 1643 du livre d'Axular a pour
titre, non pas Gueroco guero, mais simplement Gvero * — p. 49, Mle\
est of the dead (des morts) et non of death (de la mort); — même p.,
dey en n'est pas thathe hasto thee (qu'il t’ait); c’est une forme plurielle
dont le sens propre est « qu'il l'ait à eux » : il est ici question de la
coutume essentiellement catholique de prier pour les morts; — p. 5 s t
egirt\ie\oten « ils le lui firent 1 est-il suffisamment rendu par they wert
making? C’est que egln n'èst pas du tout un participe présent!
Julien VinSon.
a 38 . — Studleki zut* byzantlulsclien GeacliSelite <le« elften Jahrhun*
derts, par William Fischer. 1 . Joannes Xiphilinus, Patriarch von Constantitio-
pel. II. Die Patriarchenwahlen im elften Jahrhyndert. III» Die Entalehungueit
des Tractatus de pecuiiis, des Tractatus de privilegiis creditorum, dsr Synopsis
legum des Michael Psellus, und der Peira, und deren Verfasser. Plauen, x 883 .
1 vol. in-4, 56 p.
L'histoire de l’empire byzantin au xi* siècle a été peu étudiée jusqu’ici.
Entre la glorieuse renaissance de la dynastie macédonienne, au fx e et
au x e siècle et l’éphémère grandeur de la maison des Comnènfcs au xii # ,
cette période, plus confuse, plus déshéritée de grands noms et de
grands exploits, est demeurée daiis l’ombre; et pourtant l'époque où se
consomma, avec le patriarche Cerularius, le schisme définitif de l’église
d’Orient, le temps où, dans l’empire grec comme dans l’Occident catho¬
lique, l’Etat et l’Eglise s'engagèrent dans un redoutable conflit, mérite
d’être étudié avec une scrupuleuse attention. Les sources peu nombreu¬
ses de cette histoire rendaient pourtant le travail difficile, maïs depuis
la publication récente des œuvres historiques et de la correspondance de
Psellos, depuis que les érudites préfaces de M. Constantin Sathas nous
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d’histoire et de littérature
427
ont fait connaître de près ce personnage, l’un des plus considérables de
la cour byzantine au xi« siècle les recherches dans ce domaine sont
devenues singulièrement plus faciles. C’est à ces travaux, en effet, que
M. Fischer doit d’avoir pu écrire l’intéressante monographie qu’il consa¬
cre à Jean Xiphilin, patriarche de Constantinople.
Par son intelligence, par les hasards de sa fortune, par le rôle politi¬
que qu’il joua, l'homme vaut la peine d’être étudié avec soin. Néà Tré-
bizonde dans les premières années du xi e siècle, instruit aux écoles de
Constantinople avec Psellos, avec Constantin Leichoudès, avec Jean
Mauropous, avec tous les hommes distingués du xi e siècle byzantin,
Xiphilin devient successivement juge au tribunal impérial de l’Hippo¬
drome, professeur de droit à l’université nouvelle fondée par Constantin
Monomaque, restaurateur à Byzance de l’enseignement juridique, mi¬
nistre de la justice enfin. Jeté, comme la plupart des hommes byzantins,
par une intrigue de cour dans la vie monastique, il passe neuf années
dans un cloître du mont Olympe, et, en 1064, revient à Constantinople
comme patriarche et chef de l'église d’Orient. Successeur de Michel
Cerularius et dé Constantin Leichoudès, comme eux il combattit âpre-
ment toute réconciliation avec l’église romaine; comme eux, il s’efforça
de mettre à profit la faiblesse de l’empire, et de placer l’église au-dessus
de l’Etat. Fanatique défenseur de la stricte orthodoxie, implacable cen¬
seur des faiblesses de son clergé, politique et philosophe, juriste et théolo¬
gien, portant partout son esprit réformateur, il lutta jusqu’au dernier
jour (1075) pour les intérêts de l’Eglise d’Orient. Avec lui, comme le
dit M. F., un grand homme, un grand savant, un grand patriarche
disparut.
Malheureusement — et c’est la faiblesse du travail de M. F. — l’insuffi¬
sance des sources ne permettait guère de tracer qu’une esquisse du person¬
nage : en dehors de Psellos, nous ne trouvons presque rien sur Xiphilin ;
et l’on sait que Psellos, qui d’ailleurs parle plus volontiers de lui-même
que des autres, est fort sujet à caution dans l’un et l’autre cas. Il a donc
fallu encadrer ces renseignements peu nombreux et parfois contestables;
et il y a dans le livre moins de nouveauté qu'on ne croit. M. F. nous
décrit, d’après Heyd et Fallmerayer et avec un luxe excessif peut-être de
détails pittoresques, cé qu’était Trébizortde au xi* siècle; il explique
un peu longuement, d'après le travail de Heimbach dans l’encyclopédie
d’Ersch et Gruber, l’état des études juridiques à Byzance au xi° siècle;
il traite trop rapidement pour sortir des généralités et trop longuement
toutefois pour une monographie spéciale, l’affaire du schisme oti l’on
ne sait pas même quel rôle joua Xiphilin ; il explique, de façon d’ailleurs
intéressante, ce qu’était à Constantinople la question sociale et quelle
était son importance; il entre en de longs détails sur la législation rela¬
tive aux mariages, point de départ d’un conflit entre l’Etat et l’Eglise; il
insiste sur les négociations pour l’union entreprises par Alexandre II
1. Cf., sur Psellos, un intéressant article de M. Rambaud. Rev . hist. 1877.
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REVUE CRITIQUE
428
et Grégoire VII, où pas une fois n'est prononcé le nom de Xiphilin.
Toutes ces choses, connues d’autre part, sont sans doute intéressantes :
mais elles auraient gagné à être présentées sous une forme plus brève,
qui ne détournât point l'attention du personnage principal. Grâce à ces
réductions nécessaires, M. F. eût pu donner place à quelques recher
ches qu'il regrette d’avoir dû sacrifier (44, note 3 ), expliquer moins som¬
mairement les motifs de quelques-unes de ses opinions (24, note 3 ) et
exposer plus clairement certains points difficiles, tels que le système phi¬
losophique du personnage qu'il étudie.
J'ai hâte d'arriver au point essentiel, et qui me paraît assez nouveau,
du travail de M. F. : ce sont les observations fort intéressantes qu’il
présente sur la lutte engagée entre l’empire et le patriarcat. C’est là, en
effet, Tévénement capital et comme le centre du gouvernement ecclé¬
siastique de Xiphilin ; c’est à ce but unique que se rapportent tous les
actes politiques, toutes les mesures administratives et réformatrices,
toutes les paroles du patriarche; c’est autour de ce point qu’il eût fallu
grouper toutes les manifestations de son activité. Si M. F., au lieu de
prendre et d’étudier à part chaque affaire spéciale, se fût préoccupé da-
vantage d’expliquer les effets divers d’un même dessein politique, il se
fût épargné bien des détails inutiles, bien des reprises de la même idée :
il eût donné enfin une démonstration plus sévère et plus rigoureuse de
la thèse qu'il soutenait. Et toutefois, sur le fond même, il semble que
M. F. se laisse entraîner trop loin. Il peint le conflit entre l'Etat et
l’Eglise tout autrement aigu qu’il n’était en réalité; en face de l’empe¬
reur byzantin, Michel Cérularius, Xiphilin même lui apparaît comme
un autre Grégoire VII ( 38 ). C’est singulièrement exagérer les termes et
confondre les situations; il y a bien de la différence entre le mouvement
presque unanime d'une église et l’ambition de quelques hommes isolés,
si grands qu'ils puissent être. Là même où M. F. cherche le triomphe
du patriarcat sur l’empire, je retrouve l’action de l’autorité souveraine.
Dans le conflit entre les syncelles et les métropolitains, les plaignants
appellent de la décision du patriarche au sénat d'abord et puis à l’empe¬
reur. Dans l'affaire relative à la législation sur le mariage, c’est à l’em¬
pereur, non au patriarche, que la question est d’abord soumise. Dans la
confirmation donnée en 1080 par Nicéphore Botoniate aux décrets du
synode de io 65 , M. F. voit un affaiblissement pour l'empire : n'est-ce
pas, au contraire, l’exercice d’un contrôle nouveau de l’autorité civile
sur les affaires ecclésiastiques? Et enfin, si la victoire du patriarcat sur
l'empire eût été aussi complète que le veut M. F., Alexis Comnène eût-il
pu, moins de vingt ans plus tard, exercer sans limites l'autorité impé¬
riale en matière de religion? M. F. remarque quelque part que l’opinion
publique, que le clergé même était avec l’empereur plus qu’avec le pa¬
triarche : voilà ce qu'il eût fallu ne point perdre de vue pour mettre
dans son véritable jour le conflit exposé.
Il me reste à signaler à M. F. quelques contradictions un peu étranges.
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d’histoire et de littérature 429
Faut-il croire qu’à Constantinople les jurisconsultes négligeaient l’étude
de la rhétorique ( 5 ) ou bien que cette étude leur était indispensable (8) ?
M. F. admet tour à tour l’une et l’autre opinion. Que Psellos, comme
l’attestent les paroles du patriarche même (2 5), contribua à élever
Xiphilin à la plus haute dignité de l’Eglise, ou qu’il n'eut aucune part
à cet événement? M. F., qui, ici, admet comme prouvé le récit de
Psellos, donne ailleurs des raisons pour le mettre en doute (24, note 7) :
il faudrait pourtant prendre parti. — Pourquoi enfin M. F. cherche-t-il
les origines du schisme oriental dans la situation des deux églises au
IV e et au v # siècle? C’est remonter un peu bien loin, car, malgré ses vel¬
léités d’indépendance, la papauté resta en fait, jusqu’au vm* siècle, assez
étroitement dépendante de l'autorité impériale. — Pourquoi surtout, à
ce propos, citer d’une manière au moins surprenante le témoignage
d’Anne Comnène? — M. F. veut trouver à Byzance, depuis le temps de
Constantin, une monarchie héréditaire (43, n. 5). Sur ce point, il eût
pu consulter utilement un curieux chapitre de M. Rambaud dans son
Empire grec au x e siècle . — Enfin, je trouve M. F. bien dur pour
Psellos (3 1, 46); il y a bien du mal à dire de ce courtisan, homme
d’Etat, mais M. F. passe un peu la mesure. — Je signalerai encore quel¬
ques rapprochements d’un goût contestable entre la vie byzantine au
xi® siècle et la société contemporaine (4, 23 , n. 5 ; i5, n. 5 ).
Si j’ai relevé ces détails et longuement insisté sur le travail de
M. Fischer, c est que, malgré de sérieux défauts de méthode, il est, tout
compte fait, intéressant. De légères erreurs ne doivent point faire ou¬
blier le mérite de recherches consciencieuses et quelquefois nouvelles sur
un sujet digne d’attention.
Charles Diehl.
23 g. — Les papiers de Pierre Rotrou de flSaudrevIIle, secrétaire du
Maréchal de Guebriant, commissaire des guerres à l’armée d’Allemagne, conseiller-
secrétaire du Roi, Maison, Couronne de France et de ses finances, publiés par
Léonce Person, professeur au Lycée Condorcet. Introduction. Paris, Léopold
Cerf, i 883 , In-8, 1 35 p.
A la première nouvelle de la blessure reçue par le maréchal de Gue¬
briant devant Rottweil, Pierre de Rotrou partit de Paris avec des chirur¬
giens expérimentés. Il arriva trop tard : le roi de France avait perdu,
dès le 24 novembre 1643, « le plus fidèle, le plus généreux, le plus ver¬
tueux de ses serviteurs » *. Le secrétaire du vainqueur de Kempen trouva
la dépouille mortelle de son maître à Brisach. Il ramena le corps du
héros jusqu’à Notre-Dame de Paris. Mais, ajoute M. Person (p. 10),
« avec ces précieux restes, Pierre de Rotrou rapporta autre chose en-
1. Lettre du Roy et de la Reyne, du 4 décembre 1643. Dépôt de la Guerre, vo¬
lume LXXVII, folio i 5 o.
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REVUE CRITIQUE
430
core... Diplomate et négociateur, en même temps que général, Gue-
briant avait avec lui des papiers importants, des ordres, des lettres,
des rapports, des conventions et des traités, en un mot des archives. Qui
fut chargé, au dernier moment, de les recueillir et de les garder? N'est-
il pas naturel de penser qu’il dut, avant de mourir, confier expressément
ce soin à son secrétaire, Pierre de Rotrou, à celui qui avait été, de près
ou à distance, son confident le plus intime, qui s était occupé de tous ses
intérêts publics et privés, qui avait eu la plume en son nom et au nom
même de la maréchale? Arrivé à Brisach, Rotrou prit donc possession
de ce legs; il mit en ordre les papiers de son maître, il y ajouta ceux
qu’il avait déjà entre les mains. Et après les avoir communiqués à Jean
Le Laboureur, qui puisa dans cette collection les principaux éléments
de son histoire \ il les transmit à ses descendants. »
C'est la partie encore inédite de ces documents que M. P. se propose
de publier prochainement; il espère qu’on les trouvera assez intéressants
pour ne pas le ranger dans la catégorie de ces gens atteints de la dange¬
reuse maladie qu’un de nos critiques — trop spirituel pour n'étre pas
de temps à autre quelque peu paradoxal — vient d’appeler la manie du
document et la fureur de Vinédit \
Les papiers de Rotrou, d’après l’analyse qu'en donne M. P.(pp. 12-16),
se composent : i° des ordres du Roi et des lettres de ses ministres, Riche¬
lieu et Mazarin, Sublet de Noyers, Le Tellier et Chavigny 3 ; 2° de
lettres d'un grand nombre de personnages célèbres de l'époque, duc de
Longueville, comte de Soissons, duc de Chauines, prince de Condé et
duc d’Anguien, prince Henry de Rohan, duchesse de Chevreuse, Cinq-
Mars, de Thou, duc de la Valette, comte d’Estrades, duc de Saint-
Simon, de Liancourt, Bernard de Saxe-Weymar, d’Erlach, Banier,
Torstenson, les deux Mercy, les magistrats de Strasbourg, M. de l'Isle,
M mo la lantgraff de Hesse, M. de Beauregard, M. de Tracy, M. d’Oy-
sonville et d’une foule de personnages secondaires ou obscurs qui, par¬
fois, ne sont pas les moins intéressants à connaître ; 3 ° des lettres intimes
du maréchal et de la maréchale de Guebriant à Rotrou; des lettres de
1. Histoire du comte de Guebriant , maréchal de France t contenant le récit de ce
qui s'est passé en Allemagne dans les guerres contre la Maison Autriche , depuis
Van i 635 jusqu'à sa mort; avec la généalogie des Budes, etc., par Jean Le Labou¬
reur, prieur de Juvigné (Paris, Barbin, 1 656 , in-folio). Le Laboureur, comme
M. P., refuse l'accent à Ve du nom du maréchal, accent que tous les recueils bio¬
graphiques, y compris celui de Moréri et celui de Bayle, s'accordent à lui donner.
2. M. F. Brunetière, dans la Revue des Deux-Mondes du i« r octobre i 883 . L’ar¬
ticle, écrit avec la plus piquante verve, contient, à côté d'amusantes exagérations,
d'excellentes vérités, et il est, en somme, de bonne et salutaire lecture. Quand
M. Brunetière le réimprimera, je voudrais qu’il lui donnât pour épigraphe le mot de
Diogène : «J'imite les chefs d'orchestre, qui forcent le ton pour que les autres puis¬
sent arriver au ton convenable » (Diogène de Laêrte, livre VI, chap. xxii).
3 . Ces ordres et ces lettres, dit M. P. (p. ia), sont encore revêtus de leurs cachets
et de leurs fils de soie; les lettres des ministres, celles de Sublet de Noyers notam¬
ment, sont, pour la plupart, autographes.
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D’HISTOIRE ET DE LHTÉRATÜRE
43.
Rotrou au maréchal; des copies des lettres du maréchal aux ministres
et à d'autres personnages ; 4 0 d’un certain nombre de documents officiels,
tels que le traité de Brisach, revêtu de la signature des trois commis¬
saires français et des onze délégués allemands et suédois ; de plusieurs
états de troupes, dressés par les intendants; de projets divers d’expédi¬
tions et de campagnes; de rapports très circonstanciés sur différents
combats livrés par l'armée française; de chiffres, accompagnés de leurs
clefs, pour la correspondance secrète, etc.
Une grande partie de ces pièces étant déjà connue par la publication
de Jean Le Laboureur, M. P. se gardera bien d’en surcharger son livre.
Il mentionnera simplement leur existence, dans l’ordre chronologique.
D'autres, en assez petit nombre, se retrouvent à la Bibliothèque natio¬
nale, au Dépôt de la Guerre; le futur éditeur indiquera ces duplicata,
minutes ou copies, partout oü il aura pu les constater, faisant remar¬
quer d’avance que, dans la plupart des cas, les originaux seront entre
ses mains.
M. P., après avoir rappelé (p. 18) que la figure de Guebriant vient
d'être mise tout récemment en relief par des publicistes éminents,
MM. de Parieu, Chéruel et le duc d’Aumale, s’exprime ainsi : « Il nous
a semblé que les papiers recueillis par le secrétaire du maréchal ajou¬
taient encore quelques traits au tableau, précisaient certains faits restés
dans l’ombre, en rectifiaient même quelques autres. > Voici deux petites
erreurs relevées par M. P. (pp. 18-26) : « Dans son brillant chapitre sur
le secours d’Allemagne ( Revue des Deux-Mondes du i 5 mai i 883 ,
p. 252), M. le duc d’Aumale nous dit que le maréchal de Guebriant
vécut sept années (1637-1643) sans revoir la France ni sa Jamille.
L’épreuve, à vrai dire, ne fut pas si longue, car la maréchale de Gue¬
briant avait fait, en mai 1639, auprès de son mari, un premier voyage
qui a échappé à la sagacité du prince historien *. — Un peu plus loin
(p. 262), M. le duc d’Aumale nous apprend que le duc d’Anguien, con¬
duisant les renforts que Guebriant attendait si impatiemment, partit de
Paris le 4 octobre 1643 et arriva le 6 à Bar. Je parierais volontiers que
le duc d’Anguien partit de Paris non pas le 4, mais le 2 octobre, et
arriva non pas le 6, mais le 4 à Bar a . »
1. Ce voyage de la maréchale est indiqué dans une lettre de Ratabon, secrétaire
de De Noyers, à Rotrou, en date du i ,r avril 1639, et dans une lettre collective du
comte et de la comtesse de Guebriant à Rotrou, écrite à Baulmes et datée du 4 juin
i 63 q. Le péché d’omission commis par l’historien des princes de la maison de Condé
avait été déjà commis par Le Laboureur.
2. M. P. gagnerait son pari, car les lettres qu’il cite prouvent parfaitement que
le duc quitta Paris le 2 octobre, au matin, qu’il coucha le 3 à Châlons et qu’il était
le 4 à Bar-le-Duc. M. P. corrige (pp. 27-28) une erreur de Le Laboureur, il donne
aussi (p. 26, note 1 ) la véritable forme d’un nom qui avait été écrit Dubatel dans
les minutes des Lettres de Chapelain et qui avait désorienté l’éditeur de ces lettres.
C’est, à n’en pas douter, dit M. P., une altération du nom de Taubadel ou Taupatel,
général dans l’armée weymarienne. 11 faudra donc remplacer l’imaginaire Dubatel
par le très réel Taupadel dans la lettre à Montauzier, du 3 o juillet 1 638 . Je voudrais
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REVUE CRITIQUE
432
Les papiers de Rotrou jetteront encore quelque lumière sur le siège
de Guise en i 636 , sur les affaires de la Valteline en 1637, sur les intri¬
gues de Banier, en 1641, et les difficultés de sa jonction avec Gue-
briant. On y trouvera beaucoup de curieux renseignements divers, tels
que ceux-ci (p. 46 et p. 49) : « Depuis trois ou quatre jours, on a esté
contraint d’oster de la Sorbonne le corps de feu M. le Cardinal 1 , le
peuple projetant de l’enlever de force et de le traîner par les rues, s’il
arrivoit faute du Roy; le murmure, à ce que Ton dit, a donné beau¬
coup de crainte à Madame d'Eguillon, et l’a obligée de faire oster de
chez elle ce qu'elle avoit de plus précieux » (lettre de Rotrou du 11 mai
1643). — « Sa Majesté n’oublie pas aussi de dire que la dévotion de
M. de Noyers n’estoit pas si grande que s’il avoit eu ordre de feu M. le
Cardinal de prendre le turban, qu’il ne l’eust fait de bon cœur ». J’au¬
rais encore bien d’autres choses notables à tirer du petit volume de
M. P., sans parler de la notice biographique toute neuve sur Pierre
de Rotrou et de l'Appendice ( Contribution à l'histoire de l'Hypocon¬
driaque, du véritable Saint-Genest , du Venceslas et du Cosroès de Jean
de Rotrou). Mais j’en ai dit assez pour donner envie à chacun de lire
d'abord ce petit volume, et ensuite les gros volumes qui contiendront
un choix des papiers de Pierre de Rotrou, choix au sujet duquel on ne
saurait donner à M. Léonce Person de trop chaleureux encourage¬
ments.
T. de L.
bien pouvoir rendre à M. P. service pour service et l’aider à deviner (p. 42) un mot
indéchiffrable dans la lettre de Ratabon à Rotrou, lettre du 18 juin 1639 où le secré¬
taire de De Noyers réclame l’envoi de la tragédie $ Antigone : « Envoyés la moy,
s’il vous plaist, promptement et la faictes escorter par les .au cas qu’elles soient
en estât de faire le voyage ». Ne faut-il pas lire : par les autres? Et Ratabon, tout en
demandant celte belle Antigone tant desirée, ne demandait-il pas les pièces dont le
poète s’était occupé après avoir achevé celle-là?
1. M. P. reproduit (p. 32 ) une lettre mystérieuse écrite à Guebriant par le cardinal
de Richelieu, le 12 août 1 63 6, et qui manque au recueil de M. Avenel. Notons, au
sujet de ce dernier érudit, que M. P. combat son opinion sur un certain Saint-
Martin. Pour M. Avenel, c’est un nom de convention (t. V, p. 536 ). M. P. dit (p. 3 g):
de Je n’en suis pas si sûr que cela. En tout cas, les papiers de Rotrou nous offrent
un passe-port délivré le 12 août pour le sieur de Saint-Martin et deux autres per¬
sonnes allant à Guiqe ». Comme il faut avoir deux fois raison pour avoir raison
contre M. Avenel, j’engage M. P. à chercher les plus claires preuves du monde à
l’appui de son sentiment.
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d'histoire et de littérature
433
240. — Die Urkunden der Grafen de Logardle In dei* Unlveraltaeia-
blbllotlielc von Dorpat, herausgegeben von Joh. Lossius. Dorpat und Leipzig,
Koehler, 1882, xix, 1 56 p. in-8.
Un jeune savant de Dorpat, M. J. Lossius, enlevé à la science avant
d’avoir pu terminer entièrement le travail que nous annonçons ici,
avait entrepris de publier un inventaire complet d’une série de volumes
in-folio, conservés à la bibliothèque universitaire de Dorpat, et prove¬
nant des archives de famille des comtes de Lagardie. Ces documents qui
se trouvaient autrefois au château d’Emmast, dans l'île de Dagoe, ont
été donnés â la bibliothèque en question, en 1848 seulement, par un des
membres de cette famille, qui a joué un rôle important en Suède et
dans les provinces baltiques.
Les Lagardie sont d'origine française, comme leur nom l'indique.
Issu d’une famille du Languedoc, Pontus de Lagardie combattit d’abord
en Ecosse, sous les drapeaux de Marie de Lorraine, la mère de Marie
Stuart. La paix d’Edimbourg (1 56 o) ayant momentanément rendu le
calme à ce royaume, il alla offrir ses services à Frédéric II de Dane¬
mark. Fait prisonnier dans une rencontre avec les forces suédoises
( 1 565 ), il se fixa dans la péninsule Scandinave et fit une carrière rapide
dans ce pays qu’il adopta pour le sien. En 1571, nous le trouvons
comme ambassadeur de Suède à la cour de Charles IX. S’étant attaché
plus particulièrement à la fortune du duc Jean de Finlande, il devint
grand maréchal de sa cour, après la chute d’Eric XIV et le couronne¬
ment de son maître sous le nom de Jean III. Plus tard il devient gou¬
verneur de la Livonie, représente son pays d’adoption à diverses
cours catholiques, et, de i 58 o à i58i, achève la conquête de l’Esthonie
et de l’Ingrie, écartant ainsi pour plus d’un siècle la Russie des côtes de
la Baltique. Il meurt bientôt après, en 1 585 . Son fils Jacques conduisit
une armée suédoise jusque sous les murs de Moscou, pour y renverser
le faux Démétrius, et pénétra triomphalement dans la capitale des tsars
(16 ro). En 1617, il arracha définitivement aux Russes le littoral du golfe
de Finlande, en imposant aux Russes le traié de Stolbowo. Membre de
la régence, grand-maréchal du royaume, Jacques de Lagardie est mort
à un âge avancé, quatre ans après la signature des traités de West-
phalie.
On comprend que les papiers de personnages aussi marquants présen¬
tent bien des pièces curieuses au point de vue de l’histoire locale et gé¬
nérale. Sur les 2,61 5 documents déposés à la Bibliothèque de Dorpat, il
en est évidemment un bon nombre qui n’ont pour les érudits du dehors
qu’un intérêt minime; ce sont ceux qui se rapportent à l’administration
des vastes domaines de la famille, à l’acquisition de terres, etc. Mais à
côté "de ces papiers particuliers, il en est d’une importance politique
considérable. M. L. a choisi d’abord un certain nombre de documents
(72 en tout) dans la correspondance de Pontus de Lagardie, qui embras¬
sent les années 1.^71 à 1 585 . On y trouvera des lettres de Charles IX
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434 RÉVUE CRItlQÜE
et de Henri IIÎ, de Jeân 111 dé Suède et de Catheritîè de Médlcîs, du
duc d’Albe, etc. mais surtout aussi des pièces relatives aux campagnes
du général suédois en Finlande et dans les pays voisins (pp. 1-82).
Après ces documents, reproduits soit en entier, soit par extraits,
nous trouvons un Répertoire de la correspondance du comte Jacques
de Lagardie (pp. 85-146). Cette correspondance est groupée par l’édi¬
teur en quatre chapitres. Le premier renferme les pièces se rapportant
aux relations de la Suède avec la Russie, jusqu'au traité de Stolbowo.
On y remarque de très nombreuses lettres du jeune roi Gustave-Adol¬
phe. Le second chapitre comprend les pièces relatives aux affaires de
Pologne, jusqu’au moment où le roi débarque en Poméranie (i 63 o). Il
s'y trouve également de nombreuses lettres du monarque. La collection
n’en comprend pas moins de trois cents en originaux ou copies. Le
troisième chapitre embrasse la correspondance de J. de Lagardie durant
la guerre de Trente Ans et jusqu'à sa mort, arrivée le 12 août i 65 a.
On y trouve des lettres de la reine Christine, du futur roi Charles X
Gustave, du chancelier Oxenstjema, de Silvercrona surtout, l’agent
suédois à la Haye, qui lui faisait parvenir de curieux rapports de Lon¬
dres et de Paris. Le dernier chapitre enfin se rapporte aux Affaires
privée et nous n’avons rien à y mentionner qui soit d’un intérêt plus
général.
Malheureusement le contenu des pièces nombreuses énumérées dans
l’inventaire de M. L. nous échappe entièrement. L’éditeur, et celui qui
a terminé son travail, M. Engelmann, ne nous donnent absolument,
dans ce catalogue que la date de la lettre, le nom de celui qui l’écrit et
l’indication du volume et du feuillet des manuscrits où l’on peut les
trouver. C'est à peine si nous avons pu noter çà et là quelque indication
fugitive sur les sujets traités. Aussi avons-nous quelque peine à conb
prendre l’utilité de ce registre, si ce n’est pour les travailleurs qui pour¬
raient consulter facilement les manuscrits sur place. Ceux-là parvien¬
dront, erl effet, à s'orienter plus rapidement à laide du travail de
M. Lossius. Mais pour les autres, le laborieux travail du jeune éditeur
sera comme non avenu. Si, au moins, il avait joint à son catalogue de
courts régestes ou des fragments dé pièces plu9 importantes, comme il
l’a fait pour la correspondance de Pontus de Lagardie, on pourrait
se résigner à ne rien apprendre au sujet du reste. Mais en présence de ce
travail qui a certainement coûté beaucoup de temps et de labeurs à celui
qui l’a entrepris, sans avoir la satisfaction de le mettre au jour lui-méme,
nous ne pouvons constater qu’une chose : c’est qu’il existe à Dorpat un
dépôt de pièces fort intéressantes pour l’histoire de la guerre de Trente
Ans, mais qu’il faut y aller voir pour savoir au juste ce qu’il renferme;
peut-être aurait-il mieux valu ne point irriter notre curiosité que de
l'éveiller sans la satisfaire.
R.
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d’histoire et de littérature
435
CHRONIQUE
FRANCE. — Le Bulletin épigraphique de la Gaule dont on pouvait craindre l'in¬
terruption à la mort de Florian Vallcntin, son fondateur, n'a pas cessé de paraître
régulièrement comme par le passé. Déjà quatre fascicules bimestriels, chacun de trois
feuilles d’impression, ont été publiés par les soins de M. Robert Mowat, à l’amitié
duquel Vallentin s’était adressé pour le suppléer dans la direction de ce recueil
lorsqu’il partit, en mars dernier, pour son voyage d’Italie qui devait lui être fatal*
M. Ludovic Vallentiw, de son côté, a tenu à pourvoir au soutien matériel de l’œu¬
vre commencée par son fils, en subvenant aux frais de la publication. Les épigra-
phistes que préoccupe le sort de l’organe de publicité dont ils ont besoin, sont donc,
dès à présent, assurés de l’achèvement prochain du volume de la troisième année en
cours.
— Nous recevons de M. Philippe Taiiizey db Larroque une nouvelle publication
consacrée à Arnauld de Pontac, évéque de Bazas. ( Avnauld de Pontac,évêque de Ba^as^
pièces divises recueillies et publiées. In-8°, 112 p. Bordeaux, Chollet, août i 883 ).
Le nom d’Arnauld de Pontac n’est pas mentionné dans les recueils de biographie;
mais un anonyme lui a consacré en 1877 une Notice bien faite (parue à Bazas,
itnprim. Constant), M. Jules de Gères lui a consacré un chapitre dans ses Alphabets
de Guienne , et M. Jules Delpit a publié dans la « Revue des bibliophiles » des notes
intéressantes sur un ouvrage de l’évêque de Bazas, urt abrégé de l’histoire unlver-
selle ou Chronographie. Grâce à ces travaux, M. T. de L. n’avait pas à revenir, dans
sa préface, sur la vie d’Arnauld de Pontac et sur sa bibliographie. 11 publie, dans
l’Ouvrage que nous signalons, plusieurs pièces curieuses : t° la Remontrance du
clergé de France , prononcée devant le roi par Veveque de Baqas le 3 juillet i 5 yg f
harangue qui était, dit Mezerây, véritablement belle et que les auteurs du « Gallia
christianâ » ont appelée luculenta ; la première édition de ce discours à la fois coura¬
geux et éloquent, publiée en l’année même où il fut prononcé à Melun, a presque
entièrement disparu, et les éditions suivantes sont ensevelies dans de gros recueils
peu répandus; 2 0 deux lettres inédites d’Arnauld de Pontac, l’une adressée le 20 fé¬
vrier i 58 g au duc de Nevers, l’autre le i* novembre 1604 à un personnage qui n’est
pas nommé, mais qui doit être le savant Pierre du Puy; 3 ° une pièce qui parut
pour la première fois peu de jours après la mort du prélat ï Les honneurs funèbres
de tnessire Arnauld de Pontac , conseiller ès conseils d'Estat et privé du roi , et eues -
que de Baqas , avec VOraison funèbre de messire Arnauld de Pontac s evesque de
Baqas, par Ai. G. Dupuy , chanoine et second archidiacre de Baqas. Cette pièce était
des plus rares trois années après sa publication, car l’abbé Dupuy la supprima au¬
tant qu’il put; elle avait été réimprimée en 1854 par M. Henry Ribadieu, mais à
100 exemplaires seulement, et avec une orthographe rajeunie; M. T. de L. a repro¬
duit avec le respect le plus scrupuleux, le texte primitif d’après l’exemplaire de la
Bibliothèque nationale; 4 0 des documents divers : une lettre latine adressée au futur
archevêque d'Aix, Gilbert Genebrard; une note qui renferme un éloge de l’évique
de Bazas retracé au xvn* siècle par un écrivain anonyme du Bazadais; un opuscule
dans lequel figure très honorablement Arnauld de Pontac, intitulé « Lamentation de
la ville de Baqas frappée de la peste » et manquant dans toutes les collections
publiques ou privées de Paris et de la province t « en reproduisant l’exemplaire
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REVUE CRITIQUE
436
unique du château de Mony, dit M. Tamizey de Larroque, c’est-à-dire en donnant,
après des pièces que l’on ne rencontre presque pas, une pièce que l’on ne rencontre
jamais et dont le style est de la plus amusante originalité, j’offre à mes convives,
pour leur dessert, un plat plus friand que tous les autres ».
— M. Léon Vallée, de la Bibliothèque nationale, vient de publier à la librairie
Klincksieck (in-8°, 68 p.) un Essai (Tune bibliographie de la Nouvelle-Calédonie et
dépendances. Cette bibliographie est rédigée par ordre alphabétique; elle est accom¬
pagnée d’un supplément et d’une table par ordre de matières.
— Le Catalogue du musée de Boulaq , de M. Maspero, sera prochainement terminé
et paraîtra probablement à la fin du mois de janvier de l’année prochaine.
— On nous envoie de Colmar la onzième livraison des Biographies alsaciennes
et portraits en photographies (Colmar, Ant. Meyer). Cette collection est dirigée par
M. P. Ristelhuber; elle est « destinée à maintenir et à fortifier le lien qui unit les
membres épars de la grande famille alsacienne et en même temps à rendre un hom¬
mage mérité aux hommes qui ont contribué à créer le milieu intellectuel où vivent
les Alsaciens, les traditions d’instruction, de goût et de lumière qu’ils ont recueillies,
le capital moral dont ils bénéficient ». Chaque livraison donne le portrait et la
notice de quatre personnages pris aux différentes époques de l’histoire jusqu’à nos
jours (chaque livraison, 4 fr. 5 o). La onzième livraison est consacrée au médecin
Marie-Gustave Bleicher, à M me Amélie Ernst, à Joseph Koechlin-Schlumberger
(1796-1863, notice de M. Charles Grad), à Jean Sturm, le célèbre directeur du
gymnase ouvert à Strasbourg en 1.S37, dans le couvent des Dominicains. Le directeur
de la collection avait publié dans la cinquième livraison une notice sur Akdrieux,
qui est très attachante dans sa brièveté; Andrieux est né à Strasbourg le 6 mai
1759; on a dit, écrit M. Ristelhuber, qu’il admirait peu Goethe et Schiller, qu’il
n’aimait point la poésie allemande, enfin, qu’il n’eut jamais rien de commun avec
l’Allemagne que d’être né dans la capitale de l’Alsace. Cependant il a traduit de Vil-
lamow un e fable dialoguée, et, parmi ses poésies fugitives, on lit une romance de
Charlotte au tombeau de Werther. Les portraits reproduits en photographies dans
toute leur originalité par M. Ant. Meyer, sont fort beaux.
— M. Alfred Fouillée vient de publier à la librairie Germer-Baillière, dans la
« Bibliothèque de philosophie contemporaine », un nouvel ouvrage intitulé « Critique
des systèmes de morale contemporains » (in-8°, xv et 411 p., 7 fr. 5 o). L’auteur,
estimant que la morale traverse dans notre siècle une crise analogue à sa crise reli¬
gieuse, a voulu faire voir, dit-ii lui-même dans sa préface, comment les dogmes
moraux finissent. J1 soumet à l’examen tous les systèmes de morale contemporains
et divise les écoles philosophiques en deux classes : les unes s’en tiennent à la
physique des mœurs, à la partie purement psychologique et sociologique de la morale;
les autres qui remontent aux principes et aux causes, et s’efforcent d’établir ce que
Kant appelait la métaphysique des mœurs. Il passe en revue tous ces différents
systèmes, depuis la morale des évolutionnistes et des positivistes jusqu'à celle des
spiritualistes et des néo-chrétiens; il en recherche avec soin les lacunes et les imper¬
fections; enfin, dans sa conclusion, il esquisse à grands traits une théorie person¬
nelle sur la moralité et sur le droit, et essaie « d’élever en face des systèmes trop
optimistes ou trop pessimistes qui se partagent les esprits, une doctrine plus conforme
à notre vraie situation en face de la nature »; peut-être, dit-il, n’est-il pas impos¬
sible, en conformité avec le véritable esprit français et sans se perdre dans des
spéculations transcendantes, d’opposer à la philosophie du désespoir comme à celle
du contentement absolu ce que nous appellerions volontiers la philosophie de l’espé¬
rance; pendant que la science prend pour devise devant l’énigme des origines du
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d'histoire et DE LITTÉRATURE 437
monde c ignorabimus », M. Fouillée voudrait donner à la morale, devant l’énigme
des destinées du monde, la devise suivante u spei'abimus ».
— Le jeudi, ib novembre, a eu lieu la séance publique annuelle de l’Académie
française présidée par M. Rousse, directeur, et assisté de MM. Ernest Renan, chan¬
celier, et Camille Doucet, secrétaire perpétuel. Nous relevons, parmi les prix dé¬
cernés, les suivants : Prix Montyon, destiné aux ouvrages les plus utiles aux mœurs.
— Un prix de 2,5oo fr. à M. Gustave Larroumet, auteur d,’un ouvrage sut Marivaux,
sa vie et ses œuvres. — Deux prix de 2,000 fr., à M. Emile Krantz, auteur d'un Es¬
sai sur l'esthétique de Descartes et à M. Auguste Vitu, auteur de la Maison mortuaire
de Molière. — Un prix de i,5oo fr.,k M. Henri Welschinger, auteur de la Censure
sous le premier Empire. —Neuf prix de 1,000 fr chacun :à M. Maurice Croiset,
auteur d’un Essai sur la vie et les œuvres de Lucien ; à M. Ch. Bigot, auteur de
le Petit Français ; à M. Léon de la Brière, pour son ouvrage Madame de Sévigné
en Bretagne , etc. Une médaille d’or, delà valeur de 1,000 francs, a été décernée à
M. Jules Comte, directeur de la Bibliothèque de l'enseignement des beaux-arts .—
Grand prix Gobert. — Décerné à M. A. Chéruel, pour son Histoire de France sous
Ma^arin ; un second prix est décerné à M. Ludovic Sciout, pour son Histoire de la
constitution civile du clergé. — Prix Thiers ( 3 ,000 fr.). — Décerné à M. G. Rothan
pour ses deux ouvrages sur la Politique française en 1866 et sur l'Affaire du
Luxembourg. — Prix Thérouanne (4,000 fr.). — Partagé entre M. le comte Jules
Delaborde, pour son ouvrage sur Coligny , et M. Albert du Boys, pour son ouvrage
sur Catherine d'Aragon. — Prix Bordin ( 3 ,000 fr.). — Décerné à M, Ferdinand
Brunetière, pour ses ouvrages sur la littérature française. — Prix Marcelin Guérin.
— Ces prix sont ainsi distribués : un prix de 2,000 fr. à M. Bouche-Leclercq, au¬
teur de 1 * Histoire de la Divination dans r antiquité; un prix de i, 5 oo fr. à M. Louis
Favre, auteur d’un ouvrage sur le Luxembourg; un prix de i, 5 oo fr. à M. Alexan¬
dre Beljamb, auteur d’un ouvrage intitulé le Public et les Hommes de lettres en An¬
gleterre au xviii* siècle . — Prix Langlois (i,5oo fr.). — Donné à M. Ch. Emile
Ruelle, pour sa traduction de la Poétique et de la Rhétorique d'Aristote. —Le Prix
Jules ’Janin n’est pas décerné. Mais, sur le montant de la fondation, une somme de
1,000 fr. est accordée à M. Devbj.ay, pour sa traduction de quelques œuvres latines
de Plutarque. — Prix Archon-Despérousbs — Un prix de 2,000 fr. est décerné à
M. Georges Bengesco pour son ouvrage sur La bibliographie de Voltaire (tome I er ) ;
un prix de 1,000 fr. à M. A. Gazier, pour son livre : Choix de Sermons de Bos¬
suet; un prix de 1,000 fr. à M. Ch.-L. Livet, pour ses éditions classiques de Mo¬
lière. — Prix Botta ( 3 ,000 fr.). — Décerné à M. Paul Rousselot, auteur d’un ou¬
vrage intitulé : Histoire de l'éducation des femmes en Frdnce. — Prix Vitet. — Ce
prix, qui s’élève cette année à 6 , 25 o fr. et qui doit être employé par l’Académie,
comme elle l'entendra, dans l'intérêt des lettres, est décerné à M. Emile Montégut.
— M. G. Maspero, sur le point de retourner en Egypte, a fait le samedi 17 no¬
vembre, à la Société historique, (cercle Saint-Simon) une conférence sur La vie
populaire à Thèbes sous la XX* dynastie.
— Le Musée du Louvre va s’enrichir d’un nouveau buste, celui de Longpérier, par
M. Cambon.
— M me Jules Favre a fait don à l’Institut d’un très beau buste de son mari exécuté
en marbre blanc, par M. Barrios. Le ministre de l’instruction publique avait déjà
donné à l’Académie française un buste de son ancien membre, exécuté par M me Claude
Vignon.
ALLEMAGNE. — La librairie Teubner, de Leipzig, doit publier prochainement
les ouvrages suivants : Ontologia platonica, ad notionum terminorumque historiam
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if.38 REVUE CRITIQUE
eymbola, p, p. D, Pgipxxs; Autolyçi Pitanaei de sphaçra quae movetur liber, de
ortibus et occasibus libri 4 m, u e libris manu sçriptis primum edidit, latina inter-
pretatione instruxit, scholia antiqua adiunxit Fridericus Hultsch>;M. Tulli Ciccro-
riU epistularura libri XVJ, reçensuit Ludov. Mendelssohn ; » Kur^gefasste lateinische
Synonymik nebst einem Antibarbarus , p, p. C. Meissner.
GRANDE-BRETAGNE. — Nous avons déjà parlé du grand travail sur les Gâthas,
entrepris par le Rev. («awrençe H. Muls et que tous les étudiants de l’Avesta atten¬
dent avec tant d’impatience. M. Mills est un prêtre américain que des études d'un
ordre purement philosophique sur la Gnose amenèrent peu à peu à l'étude du dua¬
lisme zoroastrien, et en particulier des Gâthas, qui sont généralement regardées
comme le document essentiel de ce dualisme, il reconnut bientôt l'impossibilité de
comprendre le texte zend sans étudier la traduction pehlvie qui en a été faite par les
anciens Parsis, et, son cercle d’études s’élargissant de plus en plus, il résolut de réunir
et d'élaborer tous les documents traditionnels qui servent à éclairer les Gâthas et d'en
tirer une traduction de ces textes. 11 a travaillé à cette tâche pendant huit années,
refondant sans cesse son travail et recueillant les avis des divers orientalistes d'An¬
gleterre, de France et d’Allemagne, des deux écoles d’interprétation, essayant défaire
de tous des conseillers et des collaborateurs. L’impression du premier volume est
achevée; mais, comme il ne doit pas paraître à part, M. Mills a çu la délicate attention
de distribuer à toutes les personnes intéressées dans son œuvre un exemplaire en
bonnes feuilles, — relié et interfolié, s’il vous plaît 1 — pour leur permettre d'at¬
tendre et de se servir dès l’instant, pour leurs recherches personnelles, de ses
travaux de huit années. Ce premier volume comprend les textes, à savoir : i° Le
texte zend, en caractères originaux, avec transcription latine et avec deux traduc¬
tions, une latine et littérale, l'autre anglaise et plus libre et reproduisant Je mètrç
de l'original ; 2° le texte pehlvi en transcription ladue, d'après le vieux m ?n u r <L »
crit de Copenhague (publié par fipiegel) et un manuscrit appartenant au Destour
Djamaspji et copié vingt-trois jours après celui de Copenhague, en i 3 z 3 ; 14. Mills
donne les variantes des deux manuscrits et, de plus, celles qui résultent d’un tcx$
pehlvi en transcription persane, qui fait partie de la collection Haug à Munich*, suif
une traduction anglaise du pehlvi; — 3 ° la traduction sanscrite de Nérioseogh, en
transcription latine et traduction anglaise; — 4° enfin une traduction persane du
texte pehlvi, contenue dans le même manuscrit de Haug. Le volume mis ainsi aux
mains des orientalistes n'est pas encore définitif: une partie seulement est tirée; lç
reste est encore en pages, et M. Mills compte sur les suggestions de ses lecteurs
pour modifier et corriger, s'il y a lieu, et ne craindra même pas du réimprimer U
première partie, si nécessaire : il ne considère le tout que comme un volume
d’épreuves. Le second volume doit contenir une paraphrase, un commentaire, la dis¬
cussion des diverses traductions proposées, enfin un glossaire. M. Mills aura eu le
mérite, non-seulement d'avoir personnellement donné la première traduction com¬
plète du commentaire pehlvi et sanscrit, mais aussi d'avoir réuni et mis aux msiu#
des spécialistes la plus grande partie des ressources indispensables sans lesquelles h
solution du problème des Gâthas était presque impossible. Aussi les sympathies
n'ont pas manqué à M. Mills et à cette œuvre, qui est une des plus intéressantes que
la philologie orientale ait produites, par les circonstances qui lui ont donné nais¬
sance, par la façon tout originale dont elle a été conduite et par l'ardeur et la cons¬
cience infatigable et toute religieuse que Fauteur y a apportée.
M. Monier-Williams va publier la i w partie d'un ouvrage intitulé Religious
thought and life in India ; cette î** partie est consacrée au védisme, au brahma¬
nisme et à l’hindouisme ; la a* partie traitera des autres religions de l’ind^ mais ne
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D’HISTOIRE BT DB UTTÉRÀTURE 439
sera pas publiée avant le rçtour du professeur qui vient d’entreprendre dans l’Inde
un troisième voyage.
— M. John Smail, bibliothécaire de l’Université d’Edimbourg, va prochainement
publier, à la librairie William Brown (Edimbourg), à * 5 q exemplaires seulement,
une réimpression de la Description of the isles of Orkney , du Rev. James Wallace,
parue en i 6 g 3 ; cette réimpression sera faite d’après une copie de l’original qui se
trouve à 1 a bibliothèque de l’Uuivçrsité d’Edimbourg et qui renferme de nombreuses
annotations manuscrites.
— Une Vie de Coleridge va paraître ; elle a pour auteur M. Ceaddqcs, déjà connu
par sa Vie de Charles Lamh.
— L’auteur de 1 ’History of agriculture and prices t M. Thorold Rogers, vient de
terminer un ouvrage qui a pour titre « Six centuries qf WorA: and Wages , the
Undercurrent of English History . »
— On annonce la prochaine publication d’un ouvrage intitulé « Flowers and
Flower-Lore », et dédié par l’auteur, le Rév. Hilderic Friend, à M. Max Müller.
— M. Loserth, de Czernowitz, qui vient de publier un livre important sur Nus
et Wyclif, entreprend une édition du traité du réformateur anglais, De Ecclesia ,
pour la « Wiclif Society ».
— La collection des « Non-Christian religious Systems » qui renfermait déjà le
manuel de M. T. W. Rhys Davids sur le Bouddhisme , s’enrichira prochainement de
nouveaux volumes : de M. Beal, Chinese Buddhism; de M. Edersheim, Judaism , etc.
— M. J. Bass Mullihgbr est revenu à Combridge où il est bibliothécaire et le
cours d’histoire qu’il faisait au Bedford College, à Londres, est fait désormais par
une femme, Miss Alice Gardner, soeur du professeur Percy Gardner.
HAITI: — Une statue de Christophe Colomb sera prochainement érigée à Saint-
Domingue, sur la place du Gouvernement. L’auteur de la statue est M. Guibert, le
môme sculpteur à qui l’on doit la statue élevée à M. Thiers sur l’une des places de
Nancy. L’artiste a représenté Colomb au moment où il harangue ses matelots dé¬
couragés et révoltés, et leur montre à l’horizon le nouveau continent.
HOLLANDE. — Il vient de paraître à Leide un nouveau fascicule de la grande
chronique arabe de Tabari ; c’est le cinquième de la III* série. M. de Goejb y
termine la portion de texte qu’il d’était chargé d’éditer (khalifat de Mo’tasim et de
Wâthiq-billâh) et M. de Rosen y commence la sienne avec le khalifat de Motawakkil.
— Le curieux ouvrage arabe intitulé Livre des merveilles de VInde , et qu’avait tra¬
duit en français M* Dévie d’après le ms. de l’admirable collection de M. Scheferr
vient aussi d’être publié à nouveau. M. Vam dbr Lith, professeur de droit colonial
à l’université de Leide, s’est chargé du texte et y a joint la traduction française de
M. Devic, revue et corrigée par ce dernier, le tout sous la haute direction de
M. de Goeje. Un second fascicule contiendra le glossaire des mots rares et de
petites dissertations géographiques du plus haut intérêt, car elles rouleront sur
ces îles de la mer orientale qui ont tant exercé la sagacité des orientalistes et des
géographes. C’est un passage de ce livre qui a permis à M. de Goeje d’identifier
les îles Waq-Waq avec le Japon. — De son côté, M. Cari Landbbrg, bien connu
pgr son volume intitulé « Proverbes et dictons du peuple arabe », vient de faire
paraître la description sommaire de six cents précieux manuscrits arabes, acquis
d’abord par la maison Brill, puis achetés, sur les instances de M. de Goeje, par le
gouvernement néerlandais, et déposés dans la bibliothèque de l’université de Leide.
Nous remarquons parmi ces manuscrits des ouvrages uniques et l’on ne peut que
féliciter la Hollande de s’étre assuré la possession d’une si belle collection. Au
n° a 3 o, il faut lire ed-Deinawart au lieu de ed-Dînôrî.
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440 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE BT DE LITTÉRATURE
INDES ANGLAISES. — M. Ch. G. Adams, directeur de l’Ecole supérieure du
gouvernement à Maulmain (British Burmah), a publié l’année dernière une traduction
anglaise de la grammaire Pâli de Minayeff, d’après la traduction française de
M. Stanislas Guyard. Ce volume vient seulement de nous parvenir en Europe.
M. Adams a quelque peu remanié l’ouvrage de Minayeff, ouvrage qu’il considère
comme la meilleure grammaire qui ait paru jusqu’ici. U annonce que déjà le profes¬
seur de Pâli de la Rangoon high School a adopté sa traduction comme livre d’en¬
seignement.
ITALIE. — Le 16 octobre, anniversaire de l’entrée des troupes italiennes à Vérone,
a eu lieu, dans cette ville, l’inauguration d’une statue d’Aleardo Aleardi.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 16 novembre i883.
M. le secrétaire perpétuel lit les lettres des candidats aux deux places de membre
ordinaire actuellement vacantes dans l’Académie. Ces candidats sont au nombre de
cinq, savoir : pour la place laissée vacante par la mort de M. Laboulaye, MM. Be¬
noist et Paul Meyer; pour la place vacante par la mort de M. Defrémery, MM. Mas¬
pero et Schlumberger ; sans spécification, M. de Rosny. M. Eug. Revillout retire sa
candidature.
L’Académie se forme en comité secret pour l’examen des titres des candidats.
Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 7 novembre .
PRÉSIDENCE DE M. G. DUPLESSIS
M. Berthele est nommé associé correspondant à Niort.
M. de Marsy communique à la Société un anneau en or du xv* siècle trouvé près
de Gonesse et portant la légende : a Je m’y attens. »
M. de Villefosse annonce qu’il a été informé par M. Georges Guigue d’une impor¬
tante découverte épigraphique récemment faite à Lyon, dans la crypte de Saint-Ni-
zier ; c’est celle de répitapne métrique de saint Sacerdos, évêque de Lyon, mort en
522 , épitaphe qui n’était connue que par une copie du xiv e siècle. Il place sous les
yeux de la Société un estampage de ce texte intéressant exécuté par M. Grisard, con¬
ducteur des travaux de la ville de Lyon.
M. de Villefosse communique ensuite le texte d’une inscription votive découverte
à Vichy, qui lui a été adressé par M. Bertrand, président de la Société d’émulation
de l’Ailier. Le nom topique du dieu Verogius, qui se lit dans cette inscription, est
précisément celui d’une localité antique, voisine de Vichy, inscrite sur la carte de
Peutinger sous la désignation Verogium; c’est aujourd’hui Vouroux, faubourg de
Varennes-sur-Allier.
M. l’abbé Thédenat offre, de la part de M. de la Blanchère, un mémoire intitulé :
Monnaie d’or de Ptolémée, roi de Mauritanie, et lit une note du même auteur con¬
tenant des additions au mémoire. Dans cette note, M. de la Blanchère, après avoir
examiné les hypothèses qui peuvent expliquer l’existence de la monnaie en ques¬
tion, la considère comme le résultat d’une émission illégale du roi Ptolémée.
Eugène Mûntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent, 23 .
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s'efforce autant que possible de naturaliser de plus en plus en France la
« celtologie » et de convaincre ses compatriotes de l'importance de ces
études). — Wagner, Zu Lessing’s spanischen Studien ; Michaelis, Les-
sing's Minna von Barnheîm und Cervantes’ Don Quijote.
Deutsche Litteraturzeitung, n° 45, 10 novembre 1 883 : Dr. Martin Lu-
thers Werke, kritische Gesammtausgabe. I (Kawerau). — J. Kôstlin,
Martin Luther, sein Leben und seine Schriften, 2 e Aufl (Knaake: le seul
f uide auquel on puisee se confier pour connaître la vie agitée et féconde
u réformateur). — W. James, Tne feeling of effort. — L. A. Rosen-
thal, Lazarus Geiger, seine Lehre vom Ursprung der Sprache und
Vernunft und sein Leben (Glogau). — J. Darmesteter, Etudes sur
l'Avesta, observations sur le Vendidâd (W. Geiger : une foule de re¬
marques saeaces et suggestives). — Platonis opéra quae feruntur omnia,
ad codices denuo collatos edidit Mart. Schanz. Vol. VI, fasc. II. Char-
mides, Lâches, Lysis (Susemihl : suite de cette excellente édition). —
Jannarakis, Deutsch-neugriechisches Handwôrterbuch unter besonderer
Berücksichtigung der neugriechischen Volkssprache bearbeitet (Lam-
bros : beaucoup de zèle et de savoir). — Hoffory, Oldnordiske Conso-
nantstudier (Larsson : rien à objecter aux résultats principaux de cette
étude). — Belung, Die Metrik Schiller’s (Minor : travail soigné, dili¬
gent, fort instructif). — Das Altfranzôsische Rolandslied, Text von
Chateauroux und Venedig VII, hrsg. v. Wendelin Fôrster (Stengel).
— Mahrenholtz, Voltaire-Studien et Voltaire im Urteile der Zeitge-
nossen (Très grand soin dans les recherches, et de la finesse dans les re¬
marques). — Nitzsch, Geschichte des deutschen Volkes bis zum
Augsburger Religionsfrieden, aus dessen hinterlassenen Papieren und
Vorlesungen hrsg. von G. MATTHâi. I. Bis zum Ausgange der Ottonen
(Zeumer). — G. Schnürer, Piligrim, Erzbischof von Kôln, Studien zur
Geschichte Heinrichs II und Konrads II (Steindorff : travail méritoire).
— Th. Juste, La Révolution de Juillet i 83 o (Von der Ropp : introduc¬
tion à un récit des principaux épisodes des cinquante dernières années).
— H. Dernburg, Entwickelung u. Begriff des juristichen Besitzes des
rômischen Rechts. — Gerneth, Geschichte des Kônigl. bairischcn 5 .
Infanterie-Regiments (Grossherzog von Hessen).
Gœttingische gelehrte Anzeigen , n° 44, 3 i octobre 1 883 : Graetzer,
Edmund Halley und Caspar Neumann, ein Beitrag zur Geschichte der
Bevôlkerungs-Statistik. (Rehnisch.)
N° 45, 7 novembre 1 883 : Paul de Lagarde, Aegyptiaca (P. de
Lagarde). — Gemoll, Untersuchungen liber die Quellen und Abfas-
sungszeit der Geoponica (P. de Lagarde). — Nachtrag zu Jahrgang
1882, p. 321 , Zahn, Tatians Diatessaron. (P. de Lagarde.) — F. S.
Krauss, Sagen und Marchen der Südslaven, I. (F. Liebrecht : travail
très méritoire, offre un très grand nombre de légendes et de traditions
attachantes, en donne très exactement les sources.)
Theologische Litteraturzeitung, n° 23 , 17 novembre 188 : Gesenius,
hebraisches und chaldâisches Handwôrterbuch liber das Alte Testament,
9° vielfach umgearbeitete Auflage von Mühlau u. Volck. (C. Siegfried.)
— 1. Luther's geistliche Lieder, p. p. Fischer; 2. Gerok, Die Wittem-
berger Nachtigall, Luthers geistliche Lieder; 3 . Danneil, Luthersgeistli¬
che Lieder nach seinen drei Gesangbüchern von 1524, 1529, i545;
4. Luther, Dichtungen, hrsg. v. K. Gœdeke, mit einem Lebensbilde
Luthers von Wagemann; 5 . Schleusner, Luther als Dichter. (Achelis.)
— Luther als deutscher Classiker in einer Au^wahl seiner kleineren
Schriften. 3 Bde, — Ledderhose, Dr Martin Luther, nach seinem
âussern und innern Leben dargestellt. — Kübel, Ein Jahr aus Luthers
Leben, das Jahr i525, Vortrag.
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28.
REVUE D’ETHNOGRAPHIE
PUBLIÉE
SOUS LA DIRECTION DE M. LE D r HAMY
La Revue cI'Ethnographie, paraît tous les deux mois par fascicules in-8
raisin, de 5 à 6 feuilles d’impression, richement illustrés.
Prix de l’abonnement annuel : Paris, 2 5 fr. — Départements, 27 fr. 5 o. —
Etranger, 3 o fr. — Un numéro, pris au bureau, 5 fr.
La Revue d’ETHNOGRAPHiE, fondée en 1882, a publié les articles suivants :
Première année (1882 J Mémoires originaux : L. de Cessac, Observations sur des fétiches de
pierre sculptés en forme d’animaux, découverts à Pile de S -Nicolas (Californie). — L. de Cessac,
Renseignements ethnographiques sur les Comanches. — J. E. de la Croix, Etude sur lesSakaies
de Pérak, presqu’île de Malacca. — E. Duhousset, Les initiateurs de Part oriental, étude d’ethno¬
graphie artistique. — E. Dulousset, Les arts décoratifs au Petit-Tibet et au Cachemire. —
E. Fégueux, Les ruines de la Quemada. — E. T Hamy. Note sur les figures et les inscriptions
gravées dans la roche à El Hadj Mimoun, près Figuig. — E. T. Hamy, La croix de Tcotihua-
can, au Musée du Trocadéro. — A Landrin, Ecriture figurative et comptabilité en Bretagne. —
Fr. Lenormant, Les Truddhi et les Specchie de la terre d’Otrante. — Fr. Lcnormant, Quelques
considérations sur l’ethnographie ancienne des deux bassins méditerranéens à propos d’une décou¬
verte faite à S. Cosimo. — Ern. Martin. Les funérailles d'une impératrice de Chine — J. Mon-
tano, Quelques jours chez les indigènes de la province de Malacca. — J. Moura, Le Cambodge
préhistorique. — A Pency, Mémoires sur l’ethnographie du Soudan Egyptien : I, Le Scnnar ; les
Turcs au Soudan ; II, Le Kourdofan. — A. de Quatrefagcs, Nouvelles études sur la distribution
géographique des Négritos et sur leur identification avec les Pygmées asiatiques de Ctésias et de
Pline. — A. Rctzius. Ethnographie finnoise. L’écorce du bouleau et ses divers usages. —
G. Révoil, Notes d’archéologie et d’ethnographie recueillies dans le Çomal. — A. T. de Roche-
brune, De l’emploi des mollusques chez les peuples anciens et modernes. I. Mollusques des
sépultures du Bas-Pérou. — D r Scheube, Le culte et la fête de l’ours chez les Aînos. — P. Schu¬
macher, L’âge de pierre chez les Indiens Klamaths. — R. Verneau, Les inscriptions lapidaires de
l’archipel canarien. — Variétés. Revues et Analyses. Académies et Sociétés savantes. Exposi¬
tions, collections et musées. Correspondances. Nouvelles. Questions. Réponses. Nécrologie .
Bibliographie.
Deuxième année (188 3). N ot I-IV. A. Carre, Les Sérènes de Joal et de Portudal, côte occiden¬
tale d’Afrique. — H. Tarry, Excursion archéologique dans la vallée de l’Oued Mya. — Alex,
Bertrand, Les Troglodites. — D. Charnay, Exploration des ruines d’Aké. Yucatan. — A. de
Quatrefages, Etude sur quelques monuments et constructious préhistoriques, à propos d’un monu¬
ment mégalithique de l'îlc de Tonga-Tabou. — C. E de Ujfalvy, Les Aryens au nord et au sud
de l’Hindou-Kouch. — T. Maler, Notes sur la basse Mixtèque. — H. Duveyrier, La confrérie
religieuse de Sidi Mohammed ben Ali es-Senousi. — E. T. Hamy, Note sur une inscription chro-
nographique de la fin de la période aztèque, appartenant au Musée du Trocadéro. — H. Duvey-
rier, Isedraten et le schisme ibadite. — G. Duloup, Huit jours chez les M’Bengas. — Alex. Ber¬
trand, L’introduction des métaux en Occident. — Deniker, Les Ghiliaks d’après les derniers
renseignements. — A. T. de Rochebrune, De l’emploi des mollusques chez les peuples anciens et
modernes JL Mollusques des sépultures de l’équateur et de la Nouvelle-Grenade. — H. Ten Kate,
Quelques observations ethnographiques recueillies dans la presqu’île californienne et en Sonora
— Baron L. de Vaux, Les Canaques de la Nouvelle-Calédonie — Variétés , Revues et Analyses.
Académies et Sociétés savantes , Expositions, collections et musées. Correspondances. Nou¬
velles. Questions. Réponses. Nécrologie. Bibliographie.
Le n» V va paraître. Le n* VI paraîtra le 3i décembre.
Le Puy t imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent, 23 .
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SCEAUX ET CACHETS ISRAÉLITES,
phéniciens et syriens, suivis d’épigraphes phéniciennes inédites
sur divers objets et de deux intailles cypriotes, par Charles
Clermont-Ganneau. In-8, 2 planches, br. 3 fr. 5 o
SALOMON. ASSURBANIPAL. BAL¬
THASAR, par A> Delattre. Dr. ••..*.«•••• 1 fr.
PVDTTC d’après une nouvelle méthode historique, par
L/IlxUD, A. Delattre. Br. in-8 ..,... 1 fr.
ESQUISSES DE GÉOGRAPHIE ASSY¬
RIENNE. Par A. Delattre. Br. in-8... 1 fr. 5o.
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PÉRIODIQUES
The Aoademy, n° 602, 17 novembre i 883 : Herodotus. I-JII, the
Ancient Empires of the East, with notes, introductions and appendices,
by A. H. Sayce, Macmillan. (Edition excellente faite par l'homme le
plus compétent.) — The Voyage of the « Jeannette », the ship and ice
journals, of George de Long. — Annals of Chepstow Castle, from the
conquest to the révolution, by John Fitchett Marsh. — Miss Phelps,
Beyond the gates. — Lettere disperse ed inédite di Pietro Metastasio, a
cura di Giosuè Carducci, vol. 1 . 1716-1750. Bologna, Zanichelli. (Ver-
non Lee.) —Jade implementsfouna in Switzerland. jJames Blackhouse.)
— « Fields » and c closes » (L. Toulmin Smith). — Traditions of Baby-
lonia in early chinese documents (Terrien de La Couperie). — Jos.
Anderson, Scotland in pagan times, the Rhind lectures on archaeology,
1881. (M. Stokes.)
€he Athenaeum, n° 2925, 17 novembre 1883 : W. Walker. The life
and times of the rev. John Skinner. — The ancient empires of the East,
Herodotus I-III, with notes and critical essays by Sayce. (Personne
n’était mieux préparé que l’auteur à ce travail.) — Der Codex Teplensis,
enthaltend « die Schnft des neuen Gezeuges ». 2 parties; Wil. Grimm,
Kurzgefasste Geschichte der Lutherischen Bibelüb rsetzung bis zur
Gegenwart. (i er article.) — The battle of Hampst< >d Heath. (J. W.
Haies.) — A neglected art (Besant}. — The < Dictionary of national
biography. » — Notes from Cambridge. — Feuillet de Conches, His¬
toire de lecole anglaise de peinture; Chesneau, La peinture anglaise.
(L'ouvrage de M. Chesneau est plus original que celui de M. Feuillet
de Conches qui n’est qu'une compilation.)
Literarisches Centralblatt n° 47, 17 novembre i 883 : Bibelglaube und
Christenthum, im Zusammenhange des neuen Testaments mit dem
alten Testament neu dargestellt. — Historicorum romanorum frag¬
menta collegit, disposuit Herm. Peter. (Fait avec beaucoup de soin et
de réflexion; rendra au chercheur de grands services ; fort instructif.) —
Caemmerer, Friedrichs des Grossen Feldzugsplan für das Jahr 1757,
Vortrag. — Audebert, Beitràge zur Kenntniss Madagaskar's. 1 . Mada-
gaskar und das Hovareich. — Gerber et Greef, Lexicon Taciteum, fas¬
cicule V. (Suite de cette œuvre distinguée.) — Kraffert, Beitràge zur
Kritik and Erklaerung lateinischer Autoren. (Renferme quelques cen¬
taines de conjectures^ et d’éclaircissements aux écrivains latins, le tout
sans choix et pêle-mêle ; la moitié à peu près sont consacrés à César;
parfois de bonnes trouvailles; mais pourquoi donner au lecteur la peine
de séparer le bon grain et l’ivraie?) — Ôoossens, Ueber Sage, Quelle
und Composition des Chevalier au lion des Chrestien de Troyes. (Re¬
marquable). — Vining, das Geheimnis des Hamlet, ein Versuch zurLô-
sung eines alten Problems. (Suppose que Hamlet est une jeune fille ;
elle s’éprend d’Horatio et elle est jalouse d’Ophélie; elle est hystérique,
etc.). — Die prosaische Edda im Auszuge nebst Volsungasaga und Nor-
nageststhattr, mit ausftihrlichem Glossar hrsg. von E. Wilken. IL
Glossar.—Wolfenbütler Bruchstücke der Gedichte Walther’s von der
Vogelweide, aufgefunden von Milchsack, zum Druck befôrdert von
F. Z. — Meier u. Schômann, Der attische Process, 4 Bûcher, eine
gekrônte Preisschrift, neubearbeitet von J. H. Lipsius. Liefer. 1-4. I.
—• Spitta, Ein Lebensbild Robert Schumann's. — Dreher, Der Darwi-
nismus und seine Consequenzen.
Deutsche Litteraturzeitung, n°46, 17 novembre i 883 : H. A. W. Meyer,
Kritisch exegetisches Handbuch über den zweiten Brief an die Korin-
ther. 6 # Aufl. (Siéffert). — Schleusner, Luther als ’Dichter, inson-
derheit als Vater des deutschen evangelischen Kirchenliedes ; Martin
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N® 49
— 3 décembre —
1883
Sommaire t 241. Beck, De la synonymique chez les anciens. — 242. Weidner,
Le roman en prose de Joseph d’Arimathie. — 243. De Richthofen, Recherches
sur Thistoire du droit frison, vols 1 et II. — 244. A. Zimmermann, Les luttes de
l'Eglise au xv® siècle. — 243. Le Temple de Georges Herbert, p. p. H. Shorthouse.
— 246. H. Cordier, Bibliographie des œuvres de Beaumarchais. — Variétés :
Tamizey de Larroque, L'Etoile et Jodelle; Lacour-Gayet, L'auberge de l'Ours
à Rome. — Académie des Inscriptions.
241. — J. W. Beck. De dlfTerentlarum aorlptorlbu» latlnla* Groningae,
i 883 . 95 pages in- 8 .
Les premières pages de cet opuscule renferment un aperçu de l’his¬
toire de la synonymique chez les anciens. Pendant longtemps, d après
M. Beck, la synonymique n’a été traitée que jointe à la glossographie,
à l’étymologie, à l’orthographe, etc. Au v* ou au vi # siècle seulement, un
compilateur aurait réuni en un vasle recueil les groupes de synonymes
formés par d’autres auteurs. C’est de là que seraient tirées les nombreu¬
ses listes de synonymes conservées dans les manuscrits sous le nom de
synonyma ou de differentiis uerborum, etc. ; c’est ce recueil qu’il im¬
porterait de reconstituer, dans la mesure du possible, en réunissant les
différents extraits qui en ont été faits (p. 1 à 24). Le reste de l’ouvrage
est consacré à une rapide analyse des écrits de ce genre qui se lisent
dans le ms. de Montpellier 3 o 6 (p. 24 à 27) et à la reproduction de l’un
de ces écrits : Differentiae similium orationis partium a Cicerone et
ab aliis sapientibus uiris in sensu et litteratura per alphabetum (p. 28 à
90). Le texte, fort corrompu, est corrigé en beaucoup d’endroits soit par
M. Beck, soit par son maître M. Baehrens. Ces corrections ne sont pas
toutes également heureuses, cela se comprend, et il en reste encore bon
nombre à faire. A 23 , au lieu de admit ... id est promisit, M. Baehrens
veut qu'on lise idem promisit. Cette leçon serait dans le ms., que chacun
corrigerait id est! Le copiste a la singulière habitude d’écrire .1. -r au
lieu de ./. pour id est. M. Baehrens lit tantôt id est , tantôt uel est,
tantôt uelut est , tantôt enfin uelut et. Voilà une abréviation commode!
A 78, anxius adnaturam refertur , soilicitus ad timorem uel ad tem-
pum (s surmj : M. Baehrens corrige ad timorem quem dat tempusl
(ad timorem. n’est sans doute qu'une variante de ad tempum; comp.
B 7, alterum naturae est , alterum temporis). A 90, arundo canna est ,
ab ariditate dicta, herundo auis(aius\e ms.) est quae tignis adheret :
en écrivant hirundo exadhaeret, M. Beck a fait disparaître l’étymologie.
F 19, figura artis opus est , forma naturae bonitas, ex quoformosus
Nouvelle série, XVL 49
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442 REVUE CRITIQUE
dicitur (ex quo , c’est-à-dire ex quo uerbo évidemment): M. Baehrens
change bonitas en bonum! G i, laetamur per omnia s’oppose parfai¬
tement à gaudemus animo de una rc(comp. T 2) : M. Beck écrit laeta¬
mur persona! Mais il serait injuste de multiplier les citations de ce
genre, quand on ne peut mettre en regard les véritables émendations, qui
sont nombreuses. Qu’il soit permis plutôt de proposer quelquescorrec¬
tions nouvelles. A 47, açmulus in studio est , id est imitator et inuidus ,
aduersarius in pugna, inimicus inuidia : les mots id est imitator et (uel?)
inuidus paraissent être une glose ajoutée après coup, comp. Loewe,
Prodr . gloss ., p. 423 ; pour inuidia, lisez in iiita• B 9 y praec\arus ope-
ris claritate , gloriosus quasiprae ceteris clarus : transporte* la virgule
après gloriosus (de même, B 7, mettre le point et la virgule avant ita ,
C 35 les mettre après recepturi). C 24, retranchez uel nomen loci ubi
spectacula danti itur (simplement dantur, comp. A 83 , 114. B 3 .
C 19, etc.), car il ne peut être question que de la préposition circum
et non du substantif circus. Un peu plus loin circiter, numeri
paene infinitif ut circiter ï plus minus ; il semble qu’il faille circiter X
id est x plus minus . C 41, conspicatus aliquem est uel utiquis agenii
principium y conspectus ab aliquo sit patiendi, lisez ; conspicatus
aliquem uel aliquid est agendi participium , conspectus ab aliquo
est patiendi. G 17, retranchez stagnum dicitur etiam métallo plumbi
similis , comp. Gloss, lat. ed. Hildebrand, p. 275. U 3 , lacrimare
leuis strictura cordis est ; lisez stricturae (comp» les génitifs qui
suivent). S 27, exspectamus aliquem uiuentem : lisez uenientem . T 14,
tremulus naturae est , tremens tempore ; lisez temporis , çomp. B 7.
A en juger par les passages que j’ai vérifiés, faute de loisir pour revoir
le tout, le manuscrit n'est pas représenté avec toute l’exactitude désira¬
ble. A 37, après ipsum locum, 1 . ostendit \ A 58 , 1 , albiscentem et
albiscentem que ; A 66, refert, 1 . fert; A 93, 1 ,, conburritur.., conbur*
rit; A io 5 , ordinis, 1 . ordinis est ; Aui, captorum , J. captor ; G 41,
fit, 1 . sit; F ta, usa, 1 . ira; V 3 ,/unditur, 1 . it\funditur> etc, Une table
alphabétique à la fin du volume faciliterait les recherches,
Max Bonnet,
142. — Der Proiaroman von «Io*epli von Arlmat^Ia, hgg. von Georg
Wbibmer. Oppeln, 1881, lxv et 148 pp.
La légende de Joseph d’Arimathie nous est parvenue sous deux formes
distinctes ; un poème en vers octosyllabiques à rimes plates, conservé
dans un seul manuscrit et publié en 1841 par M. Francisque Michel,
et une version en prose, transcrite plus ou moins complètement dans
neuf manuscrits, et publiée en 1874 par M. Hucher. M. Hucher s'était
borné à imprimer le manuscrit qu’à tort ou à raison il regardait comme
le meilleur; l’édition de M. Weidner est, au contraire, une édition cri-
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d’histoire RT PE LITTÉRATURE 443
tique fondée sur l'étude minutieuse et le classement rigoureux des diffé¬
rents manuscrits. Le texte ainsi dressé est accompagné en note d’un
grand nombre de variantes (d’un trop grand nombre même, à notre
sens) et d’extraits de la version en vers, toutes les fois qu’il y a quelque
intérêt à rapprocher cette version des passages correspondants de la ver¬
sion en prose*
La première question que soulève 1 e Joseph d’Armathie est de savoir
si le poème a été fait sur la version en prose ou si, au contraire, cette
version n’est qu’une mise en prose du poème, comme on en trouve tant
dans l’histoire de notre ancienne littérature. La première opinion est
celle de M. Hucher : M. W. la combat longuement et il a d’autant
moins de peine à en démontrer la fausseté que déjà pareille démonstra¬
tion avait été faite dans différents ouvrages de MM. Paulin Paris,
Zarncke et Birch-Hirschfeld. Mais M. W. n’admet pas, comme ses trois
devanciers, que la version en prose que nous possédons dérive purement
et simplement du poème publié par M. Francisque Michel : il lui bâtit
une généalogie plus compliquée. D'après lui, la légende de Joseph d’Ari-
mathie aurait primitivement existé dans un poème en tirades monori¬
mes; ce poème, aujourd’hui perdu, aurait donné naissance à un poème
en vers rimant deux à deux, également perdu, qui serait la source com¬
mune de la version en vers et de la version en prose qui nous sont par¬
venues. Nous ne pouvons exposer ici les raisons que fait valoir M. W.
pour justifier son système et en établir la nécessité, mais elles ne nous
ont pas convaincu, et nous pensons, comme M. Gaston Paris (voyez
Romania , X, 599), que, même après la dissertation de M. W., il faut
s’en tenir à l’opinion toute simple de MM. Birch-Hirschfeld, Zarncke
et P. Paris.
Pour critique qu’il veuille être, le texte que donne M. W. n’est pas
toujours satisfaisant, et cela plutôt par la faute de l’éditeur que par la
faute des manuscrits. En voici quelques preuves :
Page 1, ligne 5 : Et quant deiables les i avoient menez , si quidoient
avoir moult bien esploitié, et il i estoient mult angignie La plupart
des manuscrits, ainsi que le poème, donnent le singulier avoit , quidoit,
esfoit ; on ne voit pas pourquoi M. W. met ces verbes au pluriel. A
supposer qu’il ait eu raison de le faire, à tout le moins devait-il rempla¬
cer Jetables, angignie qui sont des nominatifs singuliers, par des no¬
minatifs pluriels.
Page 2, ligne 9 des variantes : et quant nostre sire^vit que chascuns
aloit en enfer ne ne remanoit pour bu ’ [?] fait que il fesist . Il ne
faut pas être grand clerc pour voir que bu\ qui intrigue si fort M. W.,
doit être lu bh, abréviation bien connue du mot bien.
Pages 6 et 7 : Et li baillis avoit a non Pilâtes. Icil baillis avoit un
suen chevalier soudoier et icel soudoier en avoit .v. aultres avecques
lui. Icil Joseph.,. Comme il n’a pas encore été question de Joseph (d’Ari-
mathie), on ne peut admettre qu’il soit aussi mentionné avec le démons-
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REVUE CRITIQUE
444
tratif icil. Ou il faut supprimer Joseph et alors icil se rapportera à sou¬
doyer ; ou bien il faut faire passer dans le texte la leçon du ms. G qui,
après soudoier , porte qui avoit a non Joseph <TAbarimathie .
Une révision attentive montrerait trop souvent des taches de ce genre
dans Tédition de M. Weidner ; cela est d’autant plus regrettable que ce
texte est publié pour la seconde fois et que l’éditeur avait laborieusement
réuni tous les matériaux nécessaires pour pouvoir en donner une édition
tout à fait satisfaisante.
Ant. Thomas.
243. —Untennclinngen über firletlaclie RechUge»chlchte f von Dr. Karl
Freiherr von Richthofen, Professor. Theil 11 , Band 1, 2. Berlin, W. Hertz. 1882.
2 vol. in-8 de vu et i 32 5 pages.
Le voyage d'exploration entrepris parle baron de Richthofen à travers
l’histoire du droit frison semble terminé. Je le regretterais : tout a une
fin en ce monde... excepté précisément les Untersuchungen et, faut-il
l’avouer tout bas, je nourrissais en secret de plus longues espérances :
1939 pages compactes, toutes pleines de textes, de faits et de citations
ne font qu'aiguiser l’appétit du lecteur que vise M. de Richthofen, le
rassasier, jamais.
Ces deux volumes sont, en tout point, dignes du premier : même
abondance, même sûreté d'information.
Voici l’indication sommaire des question traitées par l’auteur : Etude
sur les privilèges apocryphes concernant la Frise; privilège de Charle¬
magne attribué à l’an 802; privilèges attribués aux années 1248 et 1276.
Introduction du christianisme : les évéchés d’Utrecht, de Münster, de
Brème; doyennés et archidiaconats. La géographie joue un grand rôle
dans ces recherches : deux bonnes cartes sont jointes à l’ouvrage :
carte de la Frise au ix e siècle et carte de la Frise au xui*.
Je signalerai particulièrement l’édition du privilège apocryphe de
Charlemagne fabriqué dans la seconde moitié du xm e siècle et tous les
commentaires de l'auteur; les pages consacrées aux origines de l’énigma¬
tique ascga-frison, en qui le baron de Richthofen aperçoit un souve¬
nir de l’époque païenne [asega significat sacerdotem) \ ce qui est dit
des sacrifices humains chez les Germains, du droit de vie et de mort sur
l’enfant chez les Frisons païens; l’étude du traité von densieben Seelan -
den, assigné à l’année 1417 ; de précieux détails sur la procédure syno¬
dale dans le diocèse d’Utrecht.
On pourrait comparer la critique de certains érudits à une hache in¬
telligente qui, dans la forêt des livres et des textes, ouvre et trace des
routes bien orientées; d’autres érudits n'ont pas de hache, et, semblables
à ces hommes pieux qui marchent avec circonspection, craignant d’écra¬
ser un insecte^ ils se promènent au milieu des bois et des broussailles,
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d’histoire et de littérature
445
sans briser une branche, sans déchirer une feuille. J’admire la première
de ces méthodes quand je lis Boretius ou Paul Meyer; j’aime la seconde,
si je lis le baron de Richthofen.
Paul Viollet.
244. — Die klrcbllchen VerfBMangakaempfe Im XV. Jahrhundert, eine
Studie von Dr. Alfred Zimmermann. Breslau, Trevendt, 1882. In-8, vm et 1 36 p.
L’opuscule de M. Zimmermann veut nous donner un aperçu des
luttes au sein de l’Eglise, qui commencèrent avec le grand schisme
d’Occident en 1378, et son récit s’étend jusqu’en 1438, après la clôture
du concile de Bâle. L’auteur de cette dissertation inaugurale a compulsé
avec un zèle assidu les in-folio nombreux renfermant les délibérations
des conciles, les ouvrages contemporains, plus nombreux encore, écrits
à des points de vue divers par les défenseurs de la papauté ou les parti¬
sans des réformes; il juge avec une impartialité, à laquelle nous rendons
hommage, les tendances diverses qui se manifestèrent alors parmi les
représentants officiels de la chrétienté. Seulement nous n’étonnerons
personne en ajoutant que l’auteur n’a pu rien apprendre de bien nou¬
veau à ceux qui ont étudié la littérature moderne, assez considérable,
se rapportant à son sujet \ Peut-être même était-ce une trop haute
ambition de vouloir retracer en une centaine de pages le tableau d’en¬
semble de ces grands conciles du xv° siècle qui exercèrent une influence
si marquée sur l’histoire subséquente de l’Eglise catholique et dont les
discussions amenèrent, d’autre part, le mouvement de la Réforme. Le
travail de M. Z. servira toutefois à orienter, d’une façon fructueuse, ceux
qui désireraient obtenir, sans trop de fatigue, une idée générale des
grandes discussions religieuses qui se produisirent dans la première
moitié du xv° siècle.
Un appendice d’une trentaine de pages s’occupe de la personne et des
écrits peu connus d’un des pères les plus marquants du concile de Bâle,
Ivan de Ségovie, créé cardinal par l’anti-pape Félix V et mort en Espagne,
après 1458. Son principal ouvrage, VHistoria gestorum generalis
synodi Basiliensis, en dix-neuf livres, est conservé à la Bibliothèque
de Bâle, et M. Birk en a publié, il y a dix ans environ, les premiers
livres, sous les auspices de l’Académie de Vienne. On n’en connaissait
auparavant qu’un Epitome fait par Augustin de Patrizzi, en 1480, et
réimprimé souvent par Labbé, Hardouin, Schannat, etc., mais com¬
pulsé dans un sens tout opposé à la manière de voir de l’auteur pri¬
mitif. C’est ce que M. Zimmermann établit par une série d’observations
1. Nous exceptons la discussion sur le fameux décret « Sacrosancta Synodus »
qui établissait la suprématie des Conciles sur la papauté.
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446
REVUE CRITIQUE
qui se recommandent à l'attention de tout historien futur du concile de
Bâle *•
R.
245. — Th© Temple. Sacred poems and private éjaculations. By Mr. George
Herbert. Fourth édition with introductory notes by J. Henry Shorthouse. (First
Edition, i 633 . Fac-similé reprint). In-12, xxxi-196. London, T. Fisher Unwin,
i 883 .
Cette figure, un peu oubliée aujourd'hui, du « saint Georges Her¬
bert » comme l'appelait le xvn é siècle, est une des plus doucement
attrayantes de l’anglicanisme qui n'a pas été gâté sous ce rapport. Frère
du fameux lord Herbert de Cherbury, le brillant et bruyant aventurier
d'épée et de pensée qui fonda le déisme anglais entre deux duels, Geor¬
ges Herbert fut tout d'abord, lui aussi, homme du monde et homme de
cour. Né en il étudia à Cambridge, devint en 161 5 orateur de
TUniversité, entra en cette qualité en rapport avec le roi Jacques qui le
prit en amité, lui donna une sinécure de 120 livres, et toutes les espé¬
rances mondaines lui furent permises. Mais bientôt la mort du roi, la
faiblesse de sa propre santé et les approches de la maladie lui fermèrent
la voie de l’ambition, et alors, comme il arrive parfois, les tentations se
taisant, Dieu parla d’une voix plus claire. D’ailleurs sa jeunesse n'avait
jamais été bien extravagante; ses pires excès étaient des fantaisies de
costume, a genteel humour for clothes. Des instincts naturels d’élévation
religieuse, hérités de sa mère, nelavaient jamais abandonné: au collège,
il rimait en l’honneur du Christ, s'indignant que le sonnet fût toujours
profané à Vénus et se demandant si le vol de la colombe ne laissait pas
bien loin en arrière celui de leur Cüpidon*. Il imposait déjà assez par
son caractère pour que a le grand secrétaire de la nature t, retiré du
monde à la suite de malheurs en justice, dédiât à ce jeune homme de
vingt-deux ans sa traduction des Psaumes s . A la mort du roi, Georges
Herbert entra dans les ordres, reçut en 1626 la prébende de Layton
Ecclesla et en i 63 o la cure de Bemerton. Il avait épousé en 1629, trois
1. L’auteur établit contre Hûbler (Die Constater Reformations u. s. w.), l’écrivain
qui a étudié de la façon la plus approfondie les décisions du concile de Constance
dans ce s derniers temps, que le concile a réclamé pour ce principe la sanction pon¬
tificale, sans pouvoir l’obtenir d’ailleurs (pp. 66-68).
a. Dôeth Poetry *
Wear Venus' livery ? — Only serve her turn?
Why are not sonnets made of THee, and lays
üpon Thine altar burnt f
Cannot Thy dove
Outstrip their Cupid easily in flight?
♦ Poety, non Pietry, comme le donne la citation dans la préface de M. Shorthouse.
3 . Herbert avait aidé Bacon à traduire en latin ses Ouvrages anglais.
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d’hISTOÎRË ET t>E LtrtéRATtTRE
447
jours après l’avoir vue, une jeune fille qui, sans l’avoir jamais vu, était
depuis longtemps amoureuse de lui sur ouï-dire, comme cela arrivait
dans les romans d’autrefois. Il mourut deux ans après, il passa ces
deux derniers à expliquer le Prayer Book à ses paroissiens, célébrant
le service deux fois par jour et les * paysans quittaient la charrue dès
qu’ils entendaient sonner les cloches de M. Herbert, pour venir adorer
avec lui. » Le seul plaisir qu’il se permit était d’aller, deux fois par
semaine, entendre l’orgue à la cathédrale dé Salisbury. Après sa mort, 11
eut la bonne fortune d’avoir sa biographie écrite par Walton, le Plutar*
que de l’église anglicane.
A son lit de mort, Herbert fit remettre à un ami, Nicolas Ferrar, un
petit livre qu’il avait composé; « il y trouvera, disait-il, une peinture
des maints combats spirituels qui ont eu lieu entre Dieu et mon âme,
avant que je pusse soumettre mon âme à la volonté de Jésus mon maître,
dans le service duquel j’ai à présent trouvé la liberté parfaite. Deman-
dez-lui de le lire et, s’il pense qu’il puisse être de quelque bien à quelque
pauvre âme abattue, qu’il le publie; sinon, qu’il le brûle; car moi et
lui valons moins que la moindre des grâces de Dieu. » M. Ferrar lut le
livre, le comprit et le publia fidèlement avec un changement heureux :
il remplaça le titre primitif l'Eglise (The Church) par le titre plus
mystique et moins establlshed-Church. le Temple (The Temple). Tout
le siècle en fit sa pâture ; en 1641, huit ans après la mort de l’auteur,
le Temple en était â sa sixième édition• Il méritait son succès. Herbert
n’est pas un grand poète, mais il a la poésie d'une conviction noble et
sincère. Il est obscur, affecté, mièvre, plein de toncettl et de pointes â
la façon des poètes métaphysiciens du temps, et pourtant un charme
moral se dégage de tout cet Euphuisme, traversé par instant de notes
d’une simplicité pénétrante. Rarement poésie a présenté tant de raffine*
ment dans l’expression avec tant de sincérité dans le sentiment. L’Eglise
établie, malgré sa faiblesse naturelle de juste milieu, sa raison pratique
et son sens commun mondain, n’ayant ni les splendeurs du catholicisme
ni le feu sombre du puritanisme, a su pourtant çà et là inspirer des
enthousiasmes désintéressés et provoquer une poésie. Herbert est le
vrai poète de cette Eglise ; il l’aime, comme elle doit être aimée, d’un
amour de gentilhomme, pour sa simplicité et son élégance de bon
goût; car elle n’a point baisé les idoles et les châsses comme sa sœur des
sept collines, et elle ne va pas échevelée comme sa sœur de la vallée :
/ Joy, deare Mother, when I view
Thy perfect llneairteritt, àiid hué
Both sweet ând bfiftht...
Blessed be God whose love it was
To double-moat thee with hit grâce,
And nom but thee.
M. Henry Shorthouse qui, dans son roman fameux de John Ingle-
sant, a fait revivre avec tant de vérité et de science les temps de Herbert,
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REVUE CRITIQUE
448
était Téditeur désigné du poète. L’édition présente est un fac-similé aussi
parfait que possible de l'édition princeps de 1 633 : le format même, la
couleur, la texture du papier, la reliure (pleine basane, dos, bordures
et centre jaspés) reproduisent l’original. L’éditeur a seulement ajouté
une intéressante préface, d'un style parfois un peu obscur, mais sous
lequel on devine bien des raffinements et des nuances qui sont de saison
dans la circonstance. Il y a un plaisir à feuilleter ce joli livre et à se
sentir membre de la vieille Eglise anglicane quelques instants, — pas
trop longtemps.
James Darmesteter.
246. — Bibliographie des Oünvrea de Beaumarchais, par Henri CoftDiza,
Portrait d’après Cochin. Paris, A. Quantin, 188 3 . In-8 de vj et 143 pp. f plus
1 portr.
Le volume que M. Cordier vient de publier est exécuté avec le soin
minutieux qui a conquis à l'auteur un rang des plus distingués parmi
ceux qui s’occupent en France d’études bibliographiques. Avec une rare
patience il a recherché et décrit, non-seulement les diverses éditions des
oeuvres de Beaumarchais, mais encore les traductions ou adaptations qui
ont été faites dans divers pays. Il arrive ainsi au chiffre respectable de
522 articles, qui ont pour la plupart passé sous ses yeux.
Nous aurions voulu que M. C. insérât dans son travail quelques
notes historiques et littéraires qui en auraient beaucoup augmenté
l’intérêt. Des notes de ce genre ne nous paraissent pas superflues dans
un livre de bibliographie ; elles nous paraissent même d'autant plus
nécessaires dans un ouvrage consacré à Beaumarchais que le lecteur
n'est pas tenu de connaître dans tous ses détails une existence aussi
agitée.
Nous attachons moins d'importance aux quelques omissions que nous
aurons à relever. Un bibliographe ne peut penser à tout et nous som¬
mes persuadé qu’il serait bien facile de glaner après nous. Voici cepen¬
dant quelques notes qui seront comme un supplément à la publication
de M. Cordier. Nous indiquons nos intercalations par le mot bis .
16 bis . Eugenia, tooneelspel. Naar het fransch van Beaumarchais.
Amsterdam , 1776. In-8.
Traduction néerlandaise, dont l’auteur est inconnu 1 .
Biblioth. de la Société littéraire de Leyde.
17 bis . Eugénie, Schauspiel in 5 Aufzügen. Ausdem Franzôsischen
1. Nous sommes redevable de cette indication et de plusieurs autres à notre
excellent ami, M. F. Vander Haeghen, bibliothécaire de l’université de Gand, l’infa¬
tigable auteur de la Bibliotheca belgica .
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d’histoire et de littérature
449
von Beaumarchais. [Von Chr. Fr. Schwann.] Mannheim, 1768. In-8.
Gœdeke, Grundrisf, I, 1046.
40 bis De twee Vrienden, of de Koopman van Lion. Toonelspel
naar het fransch van Beaumarchais. Amsterdam , 1781. In*8.
Autre traduction néerlandaise anonyme.
Biblioih. de la Société littéraire de Leyde.
43 bis. Der Kaufmann in Lyon, Schauspiel. Von Joh. Christ. Bock.
Cette pièce a été imprimée dans le recueil intitulé : Sammlung von Schauspielen
fur das Hamburgische Theater (Schwerin, 1790-1794, 4 vol. in-8). Cf. Gœdeke,
Grundrisç, 1 , 642.
Bock a modifié le titre des Deux amis comme il a modifié celui du Barbier de
Séville (Cordier, n° 114).
54 bis. Le Barbier de Séville, ou la Précaution inutile, comédie...,
précédée d’une lettre sur la chûte et la critique de cette pièce. M. DCC.
LXXXX. S. /., in- 8 .
Biblioth. de l’Univ. de Gand.
66 bis. Le Barbier de Séville.... Bruxelles, J.•B. Dupon, 1827. In-24.
Biblioth. de l’Univ. de Gand.
75 bis. Le Barbier de Séville... Paris , 1869. 2 vol. in- 32 .
•Tomes 2 3 et 24 de la Bibliothèque nationale .
86. Le Barbier de Séville, opéra comique.
C’est ici le lieu de faire observer que M. C. a catalogué avec une
regrettable confusion les opéras et opéras comiques tirés des œuvres
de Beaumarchais. Ces adaptations, qui ont leur intérêt, auraient dû
former une classe spéciale et être rangées en prenant pour point de
départ le livret composé par tel ou tel auteur, pour tel musicien déter¬
miné. Ce livret, considéré comme un original, devait être suivi de ses
diverses traductions. Il était également indispensable d'indiquer le lieu
et la date de la première représentation. Voici, ce nous semble, dans
quel ordre les adaptations musicales du Barbier de Séville auraient
dû être présentées :
Opéra de Paisiello, Saint-Pétersbourg, 1780;
Opéra de Benda, Hambourg, 1782;
Opéra d’Elsperger, Salzbach, 1783;
Opéra de Schulz, Reinsberg, 1786 *;
Pantomime-ballet, anonyme, Vienne, 1808;
Opéra de Rossini, Rome, 1816;
Pantomime-ballet de Piccini, Paris, 1817.
1. Telle est la date indiquée par Fétis ( Biographie des musiciens, VII, 522) et
par MM. Clément et Larousse, Dictionnaire lyrique, 78; Schletterer {Das deutsche
Singspiel; Augsburg, 1868, in-8, 227) donne celle de 1790.
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tREVUE CRITIQUE
450
m. a ne connaît que quatre -de ces pièces ; il ne fait aucune men¬
tion des opéras de Benda, d'Elsperger et de Schulx. Quant aux autres
livrets, Le désordre dans lequel ils nous apparaissent nous rend difficile
d'en parler. Citons seulement quelques'éditions des paroles adaptées aux
opéras de Paisiello et de Rossi ni. Ces réimpressions n’ont, certes, au¬
cune valeur littéraire, mais elles n’en ont pas moins quelque intérêt,
parce qu'à chacune d’elle correspond une reprise de la pièce. Les histo¬
riens du théâtre ont donc le droit de les .chercher dans une bibliogra¬
phie de Beaumarchais.
Il Barbiere de Siviglia, ovvero l’inutil Precauzione opéra buffa ïn
quattro atti. [Musica di Gio : Paisiello.] — Le Barbier de Séville, ou
la Précaution inutile, opéra comique. Paris , 1790. In-8. (Paroles ita¬
liennes et françaises^
Ûat. Soleinne, iV, n° 4766, p. a 39.
Le Même. Paris , an -Y-1802. In-8.
Cat. Soleinne, IV, n° 4766, p. 140.
Il Barbiere di Siviglia, ovvero l’inutil Pfecaudoue, opéra buffa in
quattro atti. — Le Barbier de Séville, ou la Précaution inutile, opéra-
comique en quatre actes, représenté pour la première fois à Paris, sur
le Théâtre royal italien, salle Louvois, Je 25 novembre 1819, A Paris ,
au Théâtre Louvois. [Imp. de Hocquet.] In-8 de 68 pp.
Bibliographie de la France , «819, v? 4 * 32 . — Cat. Solemne, IV, n° 4766,
p. 143.
Le Barbier de Séville, opéra comique en trois actes, parodié en fran¬
çais [par Nicolas-Étienne Framery]- Musdque de Paisidlo. Paris, S.d.
in-4.
fliblioth. de Bondeamc. Mus. 5 a 8 .
Il Barbiere di Siviglia, dramma giocoso in due atti. [Poesii di
Sterbini- Musica di G. Rcesini.j— Le Barbier defSévtlâe, opéra bouffon
en deux actes, représenté pour la première fois â Pans, sur le Théâtre
royal italien, salle de Louvois, le 23 septembre 1819. A Paris, au
Théâtre Louvois. [Imp. de Hocquet .] In-8 de 91pp. (Paroles italiennes
et françaises.)
Bibliographie de la France, 1819, n P 3527. — Cat. Soleinne, IV, 4766 , P- I 4 3 -
The Correct Play. Il Barbiere di Siviglia. The Barber of SeviUe :
a comic Opéra in two acts. The Music by Rossini. With the argu¬
ment... Loudon, soldby J. Cléments... George Stuart , Prmter, i 5 ,
Archer Street, Haymarket. S. d., In-12 de 56 pp* (Paroles italiennes
et anglaises.)
Biblioth. de l’Université de Gond.
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d’histoire ET DE LITTÉRATURE 4 5 t
Le Barbier de Séville... Paroles, ajustées sue la musique de Rosdni.
Par Castil Blaze... [Paris, i 853 ]. Gr. in-8 à 2 col.
Rblioth. nat., T. Th., ia-4, 33 a.
Le Même. [Paris, 1872}. Gr in-8 à 2 col.
Biblioth. nat., Y. Th., in-4, 336 »
El Barbero de Sevilla, zarzuela en cuatro actos. [MusicadeJ. Ros-
sini.]
Cette pièce fait partie, de. la collection- intitulée El Teatva , dont L’éditeur esc la
libraire Alonso Gallon, à. Madrid, Le traducteur du livret est Leopoldo Bcemoiu
Nous empruntons cette indication au Catalogo general de Gullon, 1873. Une
autre édition figure, en 1874, sur le Catalogo de la Administration lirico^drama-
tica de Don Edusrdo Hidalgo, p. 3 o.
Nous passons maintenant aux traductions proprement dites de la
pièce de Beaumarchais.
107 bis. De BSarbiér van Sevifie; of <fe ormutfe Vocrrzorg, Myspeî.
Gevolgd naar het fransche van de heer Beaumarchais. Door A. Soetenrs.
Utrecht, 1781. ln>-8.
Biblioth. de la Soc. littéraire de Leyde.
107 ter. De Barbier van Sevilie... Te Amsteldam^ by J , Helders
en A. Mars ... 179Æ. In-8de in p.
Biblioth. dh Tunivcrsité deGemk.
107 quater* De Barbier van Sevilie^.., Utreckt % 1793* Ia-8.
Biblioth. de la Soc. littéraire de Leyde.
107 quint0. De Barbier van Sevilie... Amsterdam, i 825\ ïn-8.
Biblioth. de la Soc. littéraire de Leyde.
108. Der Barbier von Sevilîen...
Cette pièce a paru dans le Nettes Wiener Theater, l (1776). Vay. Gœdeke, Grun-
drisf+l* iQ 7 K *
108 bis. Der Barbier von Sevilla, Lustspiel in-4 Akten mit Gesàn-
gen. Nach dem Franzôsischen von Beaumarchais. Von Gust. Fr. W.
Grossmann. Dresden vend Leipzig. 1776. In-8.
Gœdeke, I, 643.
ro8 ter. Der Barbier von Sevîfla... Leipzig, T784. ïn-8.
Gœdeke, I, 643.
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452
108 quater. Der Barbier von Sevilla, Lustspiel in 4 Aufzüzen von
Beaumarchais.
Komisches Theater der Franco sert fur Deutsche . Von Joh. Gottfr. Dyk (Leipzig,
* 777 " 1785, 10 vol. ln-8), III. Voy. Gœdeke, I, 1044.
11 3 . André, que M. C. croit être un musicien, est l’auteur de la tra¬
duction imprimée à Offenbach en 1776. Voy. Gœdeke, 1 , 1082.
1 36 . La Folle Journée... Lyon , 1785, in-8.
L’édition doit contenir une suite de cinq figures gravées par Naudet. Ces pièces,
de format in-4 allongées, sont ordinairement repliées. M. C. n’en parle que dans
une note très confuse, empruntée en grande partie à Cohen, qui suit le n° 129.
159 bis. Le Mariage de Figaro... Paris , Tresse [lmp. Waider ],
1877. Gr. in-8 de 32 pp. à 2 col.
Bibliographie de la France , 1877, n° 7760.
160 bis . Cinq Vignettes et un Portrait dessinés et gravés à l'eau forte
par Eug. Baugnies pour la Folle Journée. Paris , Morgand et Fatout }
1879.In-8.
Cette suite, qui existe en différents états et sur différents papiers, peut se joindre
à toutes les éditions in-8.
Nous pourrions répéter relativement au Mariage de Figaro les ob¬
servations que nous avons faites ci-dessus au sujet des adaptations
musicales du Barbier de Séville ; nous citerons seulement :
Le Nozze di Figaro, opéra buffa. Musica di P. Persicchini. Var -
sovia, circa il 1786.
Fétis, Biographie des Musiciens,VU 3 ; Clément et Larousse, Dictionnaire lyrique ,
485 .
Le Nozze di Figaro, opéra buffa. Poesia di Lorenzo Da Ponte,
musica di W. Mozart. Vienna , 1786.
Le nom de Da Ponte, le librettiste favori de Mozart, n’est cité par M. C. qu’à pro¬
pos des traductions danoises et suédoises (n°* 197 et 2o3).
Le Nozze di Figaro, opéra buffa in due atti. La musica è del célébré
Mozart. — Le Mariage de Figaro... Paris,che\ Véditeur , rue Grange-
Batelière, n° 22 , [imp. de Lange-Lévy ], 1 338 . In-8 de 96 pp. (Paroles
italiennes et françaises.)
Bibliographie de la France , t 83 g, n° 1612. — Cat. Soleinne, IV, n° 4766, p. 146.
170. O Casamento de Figaro, comedia.
M. C. s’est borné à transcrire la note sommaire que nous lui avions communiquée.
En voici le complément d’après Silva : Archivo Theatral , V* sérié (Rio de Janeiro,
1842 et années suiv.).
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d’histoire et DE LITTÉRATURE 453
1 85 bis. Der toile Tag, oder Figaros Hochzeit, Lustspiel in 5 Aufzü-
gen. Aus dem Franzôsischen des Herrn von Beaumarchais. Von
L. F. Huber. Leipzig, 1785. In-8.
Gûedeke, I, 1128.
186 bis. Der lustige Tag, oder Figaro’s Hochzeit. Lustspiel in 5 Auf-
zügen. Von Beaumarchais.
Gothaisches Taschenbuch , 1786, in-16. — La traduction allemande est accompa¬
gnée de 12 figures de Chodowiecki, gravées par Geyser. Cette suite de vignettes se
rencontre quelquefois séparément.
Catalogue de la librairie Rosenthal, à Munich, XXVI, n* 1982. — Répertoire de
la librairie Morgand et Fatout, 1882, n° 715.
186 ter. Die Hochzeit des Figaro. Lustspiel nach dem Franzôsischen.
Von K. A. Rtidinger.
Cette traduction est citée sans autre indication par Goedeke ( Gruniris ^, I, 1088).
Elle ne doit guère être postérieure à 1785.
212-2 53 . Aux parodies et autres pièces relatives au Mariage de Fi¬
garo que cite M. C., on peut joindre les suivantes :
1. Epître de Figaro aux Parisiens. Paris y 1784. In-8.
Cat. Sapin, 1877, n* 429.
2. Coup d'œil sur la comédie et sur la Folle Journée ou le Mariage
de Figaro de M. de Beaumarchais; par Saunier. Paris, 1784. In-8.
Cat. Sapin, n 9 43x.
3 . Le pauvre Figaro! hé! que vous a-t-il fait? Réflexions d'un oisif.
1 7 85 . S. /., in-8.
Cat. Sapin, n* 436 .
4. Le Café littéraire, ou la Folie du jour, comédie-prologue sans pré¬
face, par M llc C*** D ¥ *' [Carrière-Doisin]. Paris, 1785. In-8, fig.
Cat. Sapin, n° 437.
5 . Coup d'œil d’un Arabe sur la littérature française, ou le Barbier de
Bagdad faisant la barbe au Barbier de Séville, Figaro. Ouvrage rédigé
et mis au jour par Nougaret. Paris, 1786. In-8.
Cat. Sapin, n* 439.
6. Le Mariage de Barogo, comédie en 3 actes, en prose, seconde suite
du Ramoneur prince ; représentée sur le Théâtre des Variétés, au Palais-
Royal, le 24 novembre 1785, par M. M.de P....y [Mauroy de Pom-
pigny]. Paris, Catlleau, 1786. In-8 de 112 pp.
Barbier, Dictionnaire des Anonymes, III, 66. — Cat. Paulin Paris, 1881, n* 2716.
7. Lettre de Barogo et consors, maîtres ramoneurs au Palais-Royal,
à M. Figaro et C i6 , négociants au faubourg Saint-Germain. Amsterdam,
1786. In-8.
Cat. Sapin, n* 440.
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hiv ue aonquB.
454
& Figaro ia Dmtsrbiandy Lvstqndi ïr 5 < Aufsügea. Van. Al. W. if-
ftwrd. Berim r 117901- In-8.
Gœdeke, I, io 55 .
9. Figaro, Oper, Pressburg, 1795.
Nous n’avons pas de détails précis sur cet opéra qui serait peut-être mieux classé
dans une autre section. La. musique était de. TosL Voy-Clément et Larousse,. Dic¬
tionnaire lyrique, 289.
10. Il nuovo Figaro* opéra buffa. Musica del maestro Paer. Parma,
l 397 *
Clément et Larousse, Dictionnaire lyrique , 488.
11. Il nuovo Figaro, opéra buffa. Musrca cfi Luigi Ricci. Parma ,
1 833 .
Cet opéra, qu’il ne faut pas confondre avec le précédent, a été joué aussi sous le
titre de Le Ifo^e di Figaro. Le Irvret est probablement he mêine que celui dfe 1797.
Une édition espagnole de ce livret est sommairement indiqués pan M. G. (n* 203 )
d’après une note que nous lui: avions remise» En voici.le.litoe complet :
El nuevo Figaro, melodrama jocoso en dos. actoa que. ha. de. æpcesentacse en ei
teatro Principal de esta ciudad. Cadiç, imprenta de R . Howe , 1834. In-8 de 146 pp.
(Texte italien et traduction espagnole.)
L'opéra de Luigi Ricci a été repris à Milan en i 863 . Voy: Clément et Larousse,
Dictionnaire lyrique, 488 «
12. Chérubin tout settf, ois Un Tour de page, vwdeviüb en un acte
par J.-A. Gardy. A Paris , che\Fagès, 1804. In-8*
Cette pièce est la concce»-parôe dki Figaro touû seaà de Mhntgr (Gondier r nfi 242).
275 bis. L’autre Tartuffe... A Paris , che\ Silvestre v et se. trouve à
Bruxelles che\ Adolphe Stapleaux r libraire. A a V-1.797.. In-8.
Biblioth. de l’Université de Gand.
286 bis. De tweede Tartuffe* of de.schuidig£ Moeder, tooneelspel naar
het franscli van Beaumarchais fdoor R. C. van Goena). Amsterdam ,
1797. In-8.
Biblioth. de la Soc. littéraire de Leyde.
287. D'après GfoMe [G'rundrïs\ y T, rraï); le véritable cracFucteur
allemand de la Mère coupable n’esü pas Lutfwi ; .-Ferd. Huber, mais sa
femme, Thérèse Huber, veuve en premières noces de Georges Fcrrster.
289. Voici le titre complet de la traduct i on polonaise citée sommai¬
rement par M. CbrcRer :
Maika vvystepna czyli cfomowe TrosRi famifii’ AFmavma, dramma w
piecîu aktaclr przez Aug. Caron Beaumarchais, antora kotnedyi Cyru-
lika Sewilskiego i Ma^ensCwaFigaca..Gcananajpie£vraarfr raa w Paxyzu,
dm» 26 czerwca 1792 roku. Wilno, w dsrukam Mmesa iKomp. pr%y
ulicy Zambowéj pod Nr. i 85 . 1827. In-8 de 120 pp.
Estreicher, Bibliogr . polska y I, 77.
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d’histoire et de uttératüre
455
494 bis. Théâtre de Beaumarchais, suivi de ses Poésies diverses et pré¬
cédé d’Obaervatisms littéraires par M . Sainte-Beuve, «tel 1 Académie Fran¬
çais e. Paris, Garnier frères , [J. Claye , imprimeur}. -S. d. [v. 1869],
in-i2 de 2 ff. xvj et 414 pp., plus 1 f.
3 o 6 Ais. Beamonchais. âcstes ans démon dramatischm Wierkea ;
nebst tBemerku^gen über dessen iLeben undSchTiften. Fnei bearbeifcet
von M . TeneilL Gotha, 1827. ^ voL in-ix.
Ce recueil contient : Der Barbier von SeviUa et Eugema. Voy. Gœdeke, II,
i3io.
317 bis. Clavigo. Ein Ttuuerspiei vonGôthe. Leipzig, in der Wejr -
gandschen Buchhandlung, 1774. In-8 de 100 pp.
M. C. ne cite de Clavigo que des traductions en diverses langues
(n°* 3 1 3 - 3 19).Outre l’édition dont nous venons de Teproduire le titre,
Gôdeke (I, 880) mentionne les suivantes :
Clavigo... Leipzig, in der Weygandschen Buchhandlung, 1774. In-8
de 96 pp.
Clavigo... Frankfurt uni Leipzig, 1774- In-8.
Clavigo... Bern, *776. Ln-8.
Clavigo... Leipzig, J777. In-8 de 100 pp.
Clavigo. Ein Trauerspiel in fünf Aufzügen von Gôthe. Au%eführt
auf dem Churf. Theater zu Müncheo. 1778. S. I., in-8 de 72 pp.
314 bis. Oavidja, a Tnagedy in êve Acts, translatai £rom the Ger-
man of Goethe. London, 1798. In-8.
Gœdeke, i, 1860.
367 bis. Mémoires (de Beaumarchais dans Taftaire Goezman. Nou¬
velle (édition... précédée d’une appréciation tirée des Causeries du lundi
par M. Sainte-Beuve, de l’Académie-Trançaiae. Paris, Garnier frères,
1859. Im-ff2 de xk et 411 pp.
374 bis. Réponse de M Ue Dés» àM. de Beaumarchais. A Rome, che\
M. Fr. de Poocharunx* &. d. [377 8 J, rn-ia.
Biblioth. nat. f Ln 87 71 38 .
401. Il serait bon de rétahlir entre crochets le nom de l’académicien
Suard.
426 bis . Stances adressées â M. Bergasse par un étudiant au collège
de Lisieux, le 20 mars 1789, lendemain de sa plaidoirie dans la cause
de M. Koraimim.
Biblioth. nat., Y (Ln 87 1 3 z 8 *).
443 bisu Précis et Jugement du procès de Pierre-Augustin Caron de
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456
Beaumarchais, membre de la représentation de la commune de Paris.
Paris, N.-H. Nyoti, 1789. In-4 (19 août-18 septembre 1789).
Biblioth. nat.. Le** 137.
444 bis. Vieille Ronde gauloise et civique pour la rentrée d’Eugéoie
Beauharnais, de son couvent, dans la maison paternelle. Dédiée à sa
mère et brochée par Pierre-Augustin, son père, le premier poète de
Paris, en entrant par la porte Saint-Antoine. Ce i er mai 1791, grand
jour de joie dans toutes les villes de France.
Biblioth. nat., Y (Ln** i 3 a 5 **).
Cette pièce se retrouve parmi les poésies diverses que M. Sainte-Beuve a jointes au
Théâtre de Beaumarchais . Voy., ci-dessus, le n° 294 bis.
450 bis. Beaumarchais à sa famille. S. /. n. d., in-8.
Lettre datée de Londres, le 9 décembre 1792, et relative à l’accusation portée par
Lecointre contre Beaumarchais.
Biblioth. nat., Lb 41 224.
456-465. La plupart des pièces groupées sous le titre d’œuvres diverses
eussent été beaucoup mieux placées dans le chapitre relatif à la Révo¬
lution. Par contre, M. C. ne cite pas les deux factums suivants ordi¬
nairement attribués à Beaumarchais, et sur lesquels il était nécessaire que
son bibliographe fît quelques recherches :
Le Vœu de toutes les nations et l’Intérét de toutes les puissances dans
l’abaissement et l’humiliation de la Grande-Bretagne. 1778. S. /., in-8.
— Seconde édition, 1778. In-8. — Voy. Barbier, Dict. des anonymes ,
IV, 1045.
Influence du despotisme de l’Angleterre sur les deux mondes. Boston,
Londres et Paris, 1781. In-8. Voy. Barbier, II, 918.
Parmi les œuvres de Beaumarchais, M. C. eût peut-être bien fait de
citer aussi le prospectus des Œuvres de Voltaire qui parut en janvier
1781 sous ce titre : Edition des Œuvres de M. de Voltaire avec les
caractères de Baskerville. Cette mention eût fourni au bibliographe
l’occasion d’examiner la part prise par Beaumarchais à cette œuvre
immense, et de dire quelques mots de l’imprimerie de Kehl.
466 bis. Le Catalogue de la librairie Scheible, à Stuttgart (n° 3 20),
indique cette édition sous la rubrique de Londres.
467. La suite de vignettes qui appartient à l’édition de 1809 se com¬
pose de 25 figures et d’un portrait gravés au trait par Gautier aîné.
471 bis. Œuvres choisies de Beaumarchais. Paris , Roux-Dufort aîné,
1825. 3 vol. in- 32 .
480. La Notice de M. Saint-Marc-Girardin a été tirée à part à la date
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d'histoire et de littérature
457
de i 838 ; elle devrait figurer, sous cette forme, après le n° 495.
N'ayant pas le temps de nous reporter aux originaux, nous citerons
encore ici sans en indiquer la date :
Récit du portier du sieur Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais.
[Par Rivarol.J S. /. n. d., in-8. (En vers.)
Biblioth. nat., Y.
[Chanson satirique contre Beaumarchais commençant ainsi :]
Je suis né dans la capitale...
Biblioth. nat., Y.
Nous ne prolongerons pas cette énumération que les lecteurs de la
Revue trouveront sans doute fastidieuse. Nous ne pouvons cependant
nous empêcher de remarquer qu’il manque un chapitre à la bibliogra¬
phie de Beaumarchais. N’eût-il pas été curieux de dresser une liste des
journaux dont le créateur de Figaro a été, en quelque sorte, le parrain?
Bien des journaux parisiens ont porté ce titre depuis 1826, et la Biblio¬
graphie de la presse de M. Hatin permet de les rechercher aisément;
mais il y a eu des organes du même nom dans plusieurs pays étrangers,
comme le Wiener Figaro et le Figaro Lwontski. On pouvait faire
figurer à côté des journaux les articles satiriques et humoristiques réunis
par Don Mariano de Lara en i 838 sous ce titre : El nuevo Figaro *.
Nous ne terminerons pas ces observations sans répéter ce que nous
avons dit plus haut, à savoir : que les omissions signalées à M. C. nous
paraissent beaucoup moins fâcheuses que l’absence de notes littéraires.
Nous voudrions aussi que la table embrassât tous les noms et tous les
titres et permît de retrouver immédiatement la pièce à laquelle on veut
se reporter. Nous en verrions supprimer sans regret les libraires-anti¬
quaires, dont les noms nous paraissent peu instructifs.
La passion bien connue de M. Quantin pour les auteurs du xvm* siè¬
cle nous permet d’espérer qu’il demandera lui-méme à M. Cordier une
édition plus complète et moins aride que la première.
Emile Picot.
VARIÉTÉS
Li*B«tolle et «Iodelie.
Un des lecteurs de la Revue critique m’a fait l’honneur de me de¬
mander quelques explications complémentaires, au sujet de ce que j’ai
dit de l’Estoile et de Jodelle dans mon article sur le La Fontaine des
1. Voy. Hidalgo, Bibliogr. espaïiola, II, 488.
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458 kKVüfi CRifiQtm
Grandi écrivains de la France (n° du 29 octobre i 883 , p. 342,
note 1). Comme d’autres lecteurs pourraient vouloir connaître ces
explications, je m’empresse de les donnerid avec l'obligeant concours du
savant M. Eugène Halphen, qui a bien voulu se charger, à ma prière,
des recherches et transcriptions dont, loin de Paris, je ne pouvais
m’occuper.
Le passage tant de fois cité à propos de Jodelle mourant dans l’impé-
nitence finale, se trouve dans un manuscrit de la Bibliothèque Natio¬
nale (fonds français, n° 10304, f° 363 ) • Ce manuscrit est un recueil où
l’Estoile a mis et fait mettre un peu de tout. Je dis fait mettre, car plu¬
sieurs morceaux y sont transcrits par une autre main que la sienne.
Le morceau relatif aux derniers moments de Jodelle est, par exemple,
l’œuvre d’un copiste, dont l’écriture et l’orthographe ne ressemblent en
rien à celles du grand collectionneur* Voici le texte du petit récit dont
le ramasseur employé par l’Estoile n’a nullement indiqué la prove*
nance et qui est placé, dans le manuscrit, entre le sonnet annoncé à la
page 48 du tome 1 de l’édition Jouaust et un mémoire sur la mort de
La Mole et Coconas :
« Le proverbe qui dit : telle vie, telle fin, fut vérifié en cet homme *
duquel la vie ayant esté sans Dieu la fin fut aussy sans luy, c’est ft dire
misérable et espouvantable, car il mourut sans donner aucun signe de
recognoistre Dieu, et en sa maladie, comme il fut pressé de grandes dou¬
leurs, estant exhorté d’avoir recours à Dieu, il respondoit que c’estoit
un chaux Dieu ■ et qu'il n’avoit garde de le prier ni recognoistre jamais
tant qu’il luy feroit tant de mal et mourust de ceste façon despltant et
maugréant son créateur avec blasphèmes • et hurlemens espouvantables.
A la Saint Barthélemy il fut corrompu par argent pour escrire contre le
feu admirai et ceux de la religion : en quoy il se comporta en homme
qui n’en avoit point, deschirant la mémoire de ces povres morts de
toutes sortes d’injures et de menteries. Finablement il fut employé par
le feu roy Charles comme le poète le plus vilain et lascif de tous a
escrire l’arriere hilme {sic) que le feu roy appelloit la sodomie de son
prévost de Nantouillet 4 et mourut sur ce beau fait qu’il a laissé im¬
parfait. Pour le regard de ses œuvres, Ronsard a dit souvent qu’il eut
1. L’éditeur de 1719 (p. 3 o), l’éditeur de 1744 (p. 63 ), l’éditeur de la collection
Petitot (t. IV, p. 83 ), enfin l’éditeur delà collection Michaud et Poujoulat, ont avec
un touchant accord substitué à cet Homme la phrase que voici : dans Estienne
Jodelle , poète parisien qui mourut à Paris comme il avoit vescu .
2. Cette expression n’a été reproduite par aucun des éditeurs ci-dessus mention¬
nés, à l’exception du dernier.
3 . Ce membre de phrase, depuis de cette façon , ne figure que dans l’édition
Champollion. J’en dirai autant de la phrase suivante tout entière à partir de : A la
Saint-Barthélemy jusqu’aux mots ; il fut employé •
4. Les éditeurs de 1719, de 1744 et de 1823 ont tous cru devoir adoucir ce para¬
graphe et se contenter de dire : « il fut employé comme le poète le plus vilain à
un vilain ouvrage ». M. Champollion seul a osé reproduire le texte dans toute sa
crudité.
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d’histoirk êt t>È littérature 45 9
désiré pour sa mémoire ' qu’elles eussent esté données au feu % au lieu
cTestre mises sur la piesse, n’ayant rien de si bien fait en sa vie que ce
qu’il a voulu supprimer estant d’un esprit prompt et inventif, mais
paillard, yvrongne et sans aucune crainte de Dieu auquel il ne croyoit
que par bénéfice d’inventaire. »
Redisons-Ie : il n’existe aucune rédaction de l’Estoile qui précède le
Journal de Henri III . Ce que les éditeurs antérieurs à ceux de 187 5
ont donné comme étant du i’Estoile n’est, avant l’année 1S74, qu’une
mosaïque faite de morceaux pris sans règle ni raison dans le volume
10304 du fonds français et dans le volume 770 de la collection Dupuy.
Composer ainsi du l’Estoile, n’est-ce pas commettre le crime du faus¬
saire?
T. de L.
L^lburgd dell’Om A Home.
A propos d’un livre récent, la Revue critique a soulevé 3 une petite
question de topographie romaine, qui n’est pas sans intérêt : quel est
l’endroit précis où descendit à Rome l’auteur des Essais?
Montaigne raconte que, dans son voyage de l’année t 58 o, il arriva à
Rome le dernier jour de novembre, qu’il vint loger A POwrs et qu'il y
resta encore le lendemain et le deuxième jour de décembre, jusqu’à ce
qu’il eût pris un appartement meublé chez un Espagnol, vis-à*vis de
Santa Lucia délia Tinta. Sur la foi de nos souvenirs personnels, nous
tenions pour très suspecte l'opinion d’après laquelle cet Ours , illustré
par le séjour de l’écrivain français, aurait été voisin de l’église de la
Trinité-des-MontS et aurait disparu aujourd’hui. Voici un document *,
qui prouve que l’hôtellerie de Montaigne n’est autre que Yalbergo
delVOrso, encore debout à l’angle des rues Monte Brianqo et Tordi -
nona, et bien modeste aujourd’hui. Si nous nous trompions dans notre
identification, nous nous tromperions avec le municipe de Rome, écho
fidèle d’une vieille tradition.
Le conseil municipal de Rome, pour rendre hommage à la mémoire
des hommes illustres qui ont séjourné dans la ville éternelle, fait mettre,
depuis de longues années, des plaques commémoratives sur les maisons
qu’ils ont habitées. L’an dernier, il décida, sur la demande de quelques
Français, qu’une inscription en souvenir de Montaigne serait mise à la
porte de Valbergo delVOrso, au coin de la rue du même nom. Le texte
en fut arrêté de la façon suivante :
1. Tous les précédents éditeurs, y compris M. Champollion, ont, pouf plus de
clarté, imprimé î pour la mémoire de Jodelle.
a. Les trois premiers éditeurs ont changé données au feu en jettéeS au feu e tont
escamoté la suite delà phrase jusqu’à supprimer .
B. Voir plus haut, n* 47, art. aBS.
4. Nous l'empruntons au journal Ÿ Italie, n*du 14 août 1882.
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REVUE CRITIQUE
460
S . P. Q. R . — In questa antichissima locanda delVOrso — a//o-
giava nelVanno i 58 o il moralista francese — Michèle Montaigne —
Autore del libro dei Saggi — Che molto contribuî alprogresso délia
nuova filosofia — Il senatore di Roma — conferivagli la cittadinan\a
romana .
Pour des raisons que nous ignorons, peut-être parce que la locanda
delVOrso est appelée à disparaître dans un percement projeté, cette ins¬
cription n’a pas encore été mise en place ; il n'en reste pas moins acquis
que la tradition place le séjour de Montaigne dans rhôtellerie actuelle
de l’Ours. Jusqu’à preuve du contraire, nous penserons comme la tradi¬
tion.
D’où vient ce nom bizarre d’hôtel de VOurs? Evidemment, l’hôtel, la
rue et la place de l’Ours doivent leur nom à un fragment antique encas¬
tré dans la maison en face de l’hôtellerie de Montaigne, à l'angle du
vicolodë soldati. Ce fragment représente une tête de lion, dans le style
de celles qui ornent assez souvent les sarcophages. D'une tête de lion,
surtout d'une tête en mauvais état, à une tête d’ours il n’y a pas loin
pour les yeux du peuple ; le fragment a été à cette place de tout temps,
et de tout temps il a servi à baptiser la rue et rhôtellerie voisines. Les
exemples analogues ne manquent pas à Rome : on n'a qu’à songer aux
rues Piè di marmo, di Mar/orio, di Pasquino , et tant d’autres. Ual-
bergo delVOrso de Montaigne ne pouvait donc être comme Valbergo
delVOrso moderne qu’en face de la prétendue tête d’ours; aussi n’y
a-t-il aucune raison de chercher autre part l’Orso de l’écrivain français.
Le municipe de Rome pourra mettre à l’endroit traditionnel, sans hési¬
tation ni méprise, une plaque en l’honneur du voyageur assez illustre
pour avoir reçu le titre de citoyen romain.
G. Lacour-Gayet.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance publique annuelle du 23 novembre i 883 .
M. Heuzey, président, prononce un discours dans lequel il annonce les prix dé¬
cernés en i 883 et rend compte des travaux des membres des écoles françaises
d’Athènes et de Rome.
M. H. Wallon, secrétaire perpétuel, lit une Notice historique sur la vie et les tra¬
vaux de Mariette-Pacha , membre de VAcadémie.
M. Hauréau, membre de l’Académie, donne lecture de son mémoire intitulé : les
Propos de maître Robert de Sorbon .
JUGEMENT DBS CONCOURS
Prix ordinaire. — L'Académie avait proposé pour l'année i 883 le sujet suivant :
c Faire l'énumération complète et systématique des traductions hébraïques, qui ont
été faites au moyen fige, d’ouvrages de philosophie ou de science, grecs, arabes ou
même latins. » Aucun mémoire n’ayant été déposé sur cette question, l’Académie la
proroge à l'année 1886.
Antiquités de la Francr. — L'Académie décerne trois médailles : la i« à M. Beau-
temps-Beaupré, pour son ouvrage : les Coutumes d Anjou et du Maine (Chaumont,
1882, in-8°j; la 2• à M. Pélicier, pour son Essai sur le gouvernement de la Dame
de Beau jeu, 1483-1491 (Chartres, 1882, in-8°); la 3 * à MM. Auguste et Emile Mo-
linier, pour leur Chronique normande du xiv* siècle , publiée pour la Société de
l'histoire de France (Pans, 1882, in-8°). L'Académie accorde en outre six mentions
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d'histoire et de littérature 461
honorables : la i rt à M. d’Arbaumont, pour les trois ouvrages suivants : i° la Vé¬
rité sur les deux maisons de Saulx-Courtivron (Dijon, 1882, in-8°) ; 2 0 Cartulaire
du Prieuré de Saint-Etienne de Vignory (Langrès, 1882. in-8°); 3 ° Armorial de la
Chambre des Comptes de Dijon , d'après le manuscrit inédit du Père Gautier (Diion,
1881, grand in-8°); la 2* à M. Joret, pour son ouvrage : Des caractères et de r ex¬
tension du patois normand (Paris, 1882, in-8°); la 3 * h M. Loriquet, pour son ou¬
vrage sur les Tapisseries de la cathédrale de Reims (Paris, Reims, 1882, in-folio) ;
la 4* à M. le D r Barthélemy, pour son Inventaire chronologique et analytique des
chartes de la maison de Baux (1HS2, in-8°); la 3 ° à M. l’abbé Albanès, pour son
Histoire de Roquevaire et de ses seigneurs , au moyen âge (Marseille, 1881, in-8°) ;
la 6* a M. Dubourg, pour son Histoire du grand prieuré de Toulouse et de diverses
possessions de Saint-Jean de Jérusalem dans le sud-ouest de la France , Languedoc ,
pays de Foix f etc. (Toulouse, 1882, in-8°).
Prix de numismatique. — Le prix fondé par M. Allier de Hauteroche et destiné
au meilleur ouvrage de numismatique ancienne publié depuis le mois de jan¬
vier 1881, est partagé cette année entre M. Barclay Head, pour son History of the
coinage of Bœotia, et M. Percy Cardner, pour son étude sur les monnaies de Samos.
Prix Gobert, pour le travail le plus savant et le plus profond sur l’histoire de
France et les études qui s’y rattachent. — Le premier prix est décerné à M. Frédéric
Godefroy, pour-son Dictionnaire de Vancienne langue française et de tous ses dia¬
lectes du ix*au xv* siècle (Paris, 1881, 1882, in-4 0 ); le second prix à M. Giry. pour
son ouvrage sur les Etablissements de Rouen et l'histoire des institutions municipales
de Rouen, Falaise, Pont-Audemer , etc. (Paris, i 883 , in-8°\
Prix Bordin. — L’Académie avait prorogé à l’année 1 883 la question suivante :
a Etude sur les opérations de change de crédit et d’assurance pratiquées par les com¬
merçants et banquiers français ou résidant dans les limites de la France actuelle avant
lexv« siècle. » Aucun mémoire n’ayant été déposé sur cette question, l’Académie la
retire du concours. — L’Académie avait proposé pour l’année i 883 la question sui¬
vante ; a Présenter un tableau aussi complet que possible de la numismatique de
Samos ; en expliquer les types à l’aide des textes; en tirer toutes les données reli¬
gieuses et historiques que comporte cette étude* montrer quelle influence ont pu
exercer les types du numéraire samien sur ceux des colonies de cette île. » Un seul
mémoire a été déposé sur cette question. L’Académie ne décerne pas le prix et elle
retire le sujet du concours. — L’Académie avait en outre proposé pour la même année
le sujet suivant : a Etudier à l’aide des documents d’archives et de textes littéraires
le dialecte parlé à Paris et dans l’Ile-de-France jusqu’à l’avénement des Valois. Com¬
parer ce dialecte, d’après les résultats obtenus, à la langue française et littéraire, et
rechercher jusqu’à quel point le dialecte parisien était considéré au moyen âge comme
la langue littéraire de la France. » Aucun mémoire n’a été déposé sur cette question.
L’Académie la remet au concours pour l’année i 885 .
Prix Stanislas Julien, pour le meilleur ouvrage relatif à la Chine. — L'Académie
décerne le prix à M. Maurice Jametel, pour son ouvrage intitulé : l'Encre de Chine,
son histoire et sa fabrication, d'après les documents chinois ( Paris, 1882, in-2).
Prix de la Grange. — M. le marquis de la Grange a légué à l’Académie une rente
annuelle de mille francs destinée à fonder un prix en faveur de la publication du texte
d’un poème inédit des anciens poètes delà France; à défaut d’une œuvre inédite, le
prix pourra être donné au meilleur travail sur un poète déjà publié, mais apparte¬
nant aux anciens poètes. L’Académie décerne le prix à la Société des anciens textes
français, pour ses publications des années 1881 et 1882.
ANNONCE DES CONCOURS DONT LES TERMES EXPIRENT EN l 883 , 1884 ET l 885 .
Prix ordinaire de l’Académie. — L’Académie avait proposé pour l’année 1 883 le
sujet suivant : «c Faire l’énumération complète et systématique des traductions hé¬
braïques, qui ont été faites au moyen âge, d’ouvrages de philosophie ou de science,
grecs, arabes ou même latins. » Aucun mémoire n’ayant été déposé sur cette ques¬
tion, l'Académie la proroge à l’année 1 885 . Les mémoires devront être déposes au
secrétariat de l’Institut le 3 i décembre 1884. — L’Académie rappelle qu’elle a pro¬
rogé à l’année 1884 les sujets suivants : I. « Traiter un point quelconque touchant
l'histoire de la civilisation sous le Khalifat. » II. a Classer et identifier autant qu’il
est possible les noms géographiques de l’Occident de l’Europe qu’on trouve dans
les ouvrages rabbiniques depuis le x e siècle jusqu’à la fin du xv«. Dresser une carte
de l’Europe occidentale où tous ces noms soien t placés, avec signes de doute s’il y a lieu. »
Les mémoires devront être déposés au secrétariat de l’Institut le 3 i décembre. i 883 .
— L’Académie rappelle aussi qu’elle a proposé — : i° Pour le concours de 1884 :
1 . « Examen historique et critique de la bibliothèque de Photius. » IL « Etude
g rammaticale et historique de la langue des inscriptions latines, comparée avec celle
es écrivains romains, depuis le temps des guerres puniques jusqu’au temps des
Antonins. » Les mémoires devront être déposes au secrétariat de l’Institut, le 3 i dé¬
cembre i 883 . — 2 0 Pour le concours de rannée i 885 : IL « Etude sur l’instruction
des femmes au moyen âge. Constater l’état de cette instruction dans la société reli¬
gieuse et dans la société civile en ce qui regarde la connaissance des lettres profanes
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et des genre# divers de littérature vulgaire. Apprécier sommairement le çsraçtèrç et
le mérite relatif de# écrits composés par les femmes, particulièrement du xi® siècle
#u xv® siècle. » II. a Exposer la méthode d’après laquelle doit être étudié, préparé
pour l’impression et commenté, un ancien obituaire. Appliquer le# règles de la cri¬
tique à l’etude d’un obituaire rédigé en France avant lo xiu° siècle, Montrer le parti
qu’on peut tirer de l’obituaire pris comme exemple, pour la chronologie, pour l’his¬
toire aes arts et des lettres et pour la biographie des personnages dont le nom
appartient à l’histoire civile ou à l’histoire ecclésiastique. » i+es mémoire# devront
être déposés au secrétariat de l’Institut le 3 i décembre 1884. -s- L'Académie propose
en outre pour l’année 1886 la question suivante : « Faire d’après les textes et les
monuments figurés le tableau ae l’éducation et de l’instruction que recevaient les
jeunes Athéniens aux v® et iv* siècle av. J.-C, jusqu’à l’âge de dix-huit ans. Les
concurrents sont invités à ne pas insister sur les exercices gymnastiques. » Les
mémoire# devront être déposés su secrétariat de l’Institut le 3 1 décembre f& 85 .
Chacun de ces prix est de I# valeur de deux mille francs»
Antiquités de la France, t- Trois médailles de la valeur de cinq cents francs
chacune seront décernées aux meilleurs ouvrages manuscrits ou publiés dans le
cours de# années 1882 et i 883 sur les antiquités la France, qui auront été déposés
au secrétariat de l’Institut avant le iv janvier 1884. Les ouvrages de numismatique
ne sont pas admis à ce concours.
Pmx de numismatique. — I. Le prix de numismatique fondé par M. Allier de
Hauteroche sera décerné, en 1884, au meilleur ouvrage de numismatique qui aura
été publié depuis le mois de janvier 1882. Ce concours est ouvert à tous les ouvrages
de numismatique ancienne. Le prix est de la valeur de quatre cents francs. — II. Le
prix biennal de numismatique fondé par M"*® V® Duchalais sera décerné, en 1884, au
meilleur ouvrage de numismatique du moyen âge qui aura été publié depuis le mois
de janvier 1882. Le prix est de la valeur de huit cents francs. —Les ouvrages devront
être déposés au secrétariat de l’Institut, pour ces deux concours, le 3 * décembre
i 883 .
Prix fondés par le baron Gobert. — Pour l’année 1884, l’Académie s’occu¬
pera, à dater, du I er janvier, de l’examen dçs ouvrages qui auront paru depuis le
l ,r janvier i 883 , et qui pourront concourir aux prix annuels fondés par lç baron
Gobert. En léguant à l’Académie des inscriptions et belles-lettres la moitié du
capital provenant de tous ses biens, après l’acquittement des frais et des legs parti¬
culiers indiqués dans sorç testament, le fondateur a demqpdé ; a que les neuf dixiè¬
mes de l’intérêt de cette moitié fussent proposés en prix annuel pour \e travail le
plus savant et lç plus profond sur l’histoire de France et les étuaesqui s’y ratta¬
chent, et l’autre dixième pour celui qont le mérite en approchera le plus : déclarant
vouloir, en outre, que les ouvrages couronnés continuent à recevoir, chaque année,
leur prix jusqu’à ce qu’un ouvrage meilleur le leur enlève, et ajoutant qu’il ne
pourra être présenté à ce concours que des ouvrages nouveaux. » — Tous les volu¬
mes d’unouvrage en cours de publication qui n’ont point encore été présentés au prix
Gobert seront admis à concourir, #i le dernier volume remplit toutes les conditions
exigées par le programme du concours. — Sont admis à ce concours les ouvrage»
composes par des écrivains étrangers à la France, Sont exclus de ce concours le»
ouvrages des membres ordinaires ou libres et des associés étrangers de l’Académie
des inscriptions et bel|e#-ieures. — L’Académie rappelle aux concurrent# que, pour
répondre aux intentions du b#ron Qobert, qui a voulu récompenser les ouvrages
les plus savants et les plus profonds sur l’histoire de France et les études qui s’y
rattachent, ils doivent choisir des sujets qui n’aient pas encore été suffisamment
éclairés ou approfondis par la science. Telle serait une histoire de province où Ton
s’attacherait à prendre pour modèle la méthode et l’érudition de dom Vaissète : l’ile^
de-France, le Picardie, etc., attendent encore un travail savant et profond. L’érydi-
tion trouverait aussi une mine féconde à exploiter si elle concentrait ses recherche»
#ur un règne important : il n’es» pas besoin de proposer ici d’autre exemple quels
Vie de SQint Louis* par Le Nain de Tillemont. Ennn un bon dictionnaire histori¬
que et critique de l’ancienne langue française serait un ouvrage d’une haute utilité,
S’il rappelait le monument élevé par Du Cangc dans son Glossaire de la latinité éu
moyen-dge. — Tout en donnant ces indications. l’Académie réserve expressément
aux concurrents leur pleine et entière liberté* Elle a voulu seulement appeler leur
attention sur quelques-uns des sujets qui pourraient être mis en lumière par de
sérieuses recherches; elle veut faire de mieux en mieux comprendre que la haute
récompense instituée par le baron Gobert est réservée à ceux qui agrandissent 1 ®
domaine de la science en pénétrant dans des voies encore inexplorées. — Six exem¬
plaires de chacun des ouvrages présentés à ce concours devront être déposés ay
secrétariat de l’institut avant le i e * janvier 1884, et ne seront pas rendus.
Prix Bordin. — L’Académie avait prorogé à l’année i 883 le sujet suivant : « Etude
sur les opérations de change, de crédit et d’assurance pratiquées par les commer-
pnts et banquiers français ou résidant dans les limites de la France actuelle avant
le xv» siècle. » Aucun mémoire n’ayant été déposé sur cette question, l’Académie la
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463
retire du concours et la remplace par le sujet suivant ; s Etude critique sur les our
vrages en vers et en prose connus sous le titre de Chronique de Normandie. » Les
mémoires devront être déposés au secrétariat de l’Institut le 3 i décembre i 885 .
L’Académie avait proposé pour l’année i 883 la question suivante : « Présenter un
tableau aussi complet que possible de la numismatique de Samos; en expliquer les
types à l’aide des textes ; en tirer toutes les données religieuses et historiques que
comporte cette étude; montrer quelle influence ont pu exeircer les types du numé¬
raire samien sur ceux des colonies de cette île. » Un seul mémoire a été déposé sur
cette question* L’Académie la retire du concours et la remplace par le sujet suivant :
a Etudier la numismatique de l’ile de Crète. Dresser le catalogue des médailles. Ex¬
pliquer les titres principaux et les motifs accessoires. Insister sur les rapports de la
numismatique Cretoise avec les autres monuments trouvés dans le pays, ainsi qu’a¬
vec les types de l’art asiatique et de l’industrie primitive de la Grèce.» Les mémoires
devront être déposés au secrétariat de l’Institut le 3 i décembre i 885 . — L’Académie
avait aussi proposé pour l’année i 883 la question suivante : « Etudier à l’aide des
documents d’archives et de textes littéraires le dialecte parlé à Paris et dans l’Ile-
de-France jusqu’à l’avénement 4çs Valois. Comparer ce dialecte, d’après les résultats
obtenus, à la langue française littéraire et rechercher jusqu’à quel point le dialecte
parisien était considéré au moyen âge comme la langue littéraire de la France. »
Aucun mémoire n’ayant été déposé sur ce sujet, l’Académie le proroge à l’année
| 883 . Les mémoires devront être déposés au secrétariat de l’in&titut le 3 i décembre
1884. — L’Académie rappelle qu elle a prorogé à l’année 1884 1’ u Etude historique
et critique sur la vie et les œuvres de Christine de Pi&an. » Les mémoires devront
êire déposés SU secrétariat de l’institut le 3 ( décembre i 883 . — L’Académie rap¬
pelle, en outre, qu’elle a proposé : — i° Pour l’année i 883 : I. u Etudier le Râ-
mayaqa gu point de vue religieux, Quelles sont la philosophie religieuse et la mo¬
rale religieuse qui y sont professées et qui s’en déduisent t Ne tenir compte de la
mythologie qu’gutant qu’elle intéresse lg question ainsi posée. » IL a Etude sur la
langue berbère sous le double point de vue de la grammaire et du dictionnaire de
cette langue; insister particulièrement sur la formation des racines et sur le méca¬
nisme verbal; s’aider pour cette étude des inscriptions lybiquesrecueillies dans ces
dernières années; indiquer enfin la place du berbère parmi les autres familles de
langues. » Les mémoires devront être déposés au secrétariat de l’in&titutle 3 i dé¬
cembre i 883 . — a® Pour l’année t 885 ; I. Etude critique sur les œuvres que nous
possédons de l’art étrusque; origines de cet art; influence qu’il a eue sur l’art ro¬
main. » 11 , « Examiner et apprécier les principaux textes épigraphiques, soit latins,
soit grecs, qui éclairent l’histoire des institutions municipales dans iempire romain,
depuis la enute de la République jusqu’à la fin du règne de Septime Sévère. » Les
mémoires devront être déposés au secrétariat de l’Institut le 3 i décembre 1884. —
L’Académie propose en outre, pour l’année 1886, Je sujet suivant: « Etudier d’après
les documents arabes et persans les sectes dualistes, Zendiks, Mazdéens, ûalsanites,
etc., telles qu’elles se montrent dans l’Orient musulman. Rechercher par .quels liens
elles se rattachent soit au zoroastrisme, soit au gnoticisme et aux vieilles croyances
populaires de l lran. » Les mémoires devront être déposés au secrétariat de l’Institut
[e 3 i décembre s 885 . — Chacun de ces prix est de la valeur de trois mille francs.
Prix Louis Fould. — Le prix fondé par M. Louis Fould, pour YHistoire des arts
du dessin jusqu*au siècle de Périclès , sera décerné, s’il y a lieu, en 1884. L’auteur
de cette fondation, amateur distingué des arts de l’antiquité, a voulu engager les
savants à en éclairer l’histoire dans sa partie la plus reculée et la moins connue. Il
a mis à la disposition de l’Académie des inscriptions et belles-lettres une somme de
vingt mille francs, pour être donnée en prix à l’auteur ou aux auteurg de la meil¬
leure Histoire des arts du dessin : leur origine , leur progrès , leur transmission chef
les différents peuples de l'antiquité jusqu’au siècle de Périclès. Par les arts du dessin,
il faut entendre la sculpture, la peinture, la gravure, l’architecture, ainsi que les arts
industriels dans leurs rapports avec les premiers. Les concurrents, tout en s’appuyant
«ans cesse sur les textes, devront apporter le plus grand soin à l’examen des œuvres
d’art de toute nature que les peuples de l’ancien monde nous ont laissées, et s’effoiv
cer d*en préciser les caractères et les détails, soit à l’aide de dessins, de calques ou
de photographies, soit par une description fidèle qui témoigne d’une étude appro¬
fondie du style particulier à chaque nation et à chaque époque. — Les ouvrages
envoyés au concours seront jugés par une commission composée de cinq membres :
trois de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, un de celle des sciences, un de
celle des beaux-arts. Le jugement sera proclamé dans la séance publique annuelle
de l’Académie des inscriptions et belles-lettres de l’année 1884. A défaut d’ouvrages
ayant rempli toutes les conditions du programme, il pourra être accordé un accessit
de la valeur des intérêts de la somme ae vingt mille francs pendant les trois années.
Le concours serg ensuite prorogé, s’il y a lieu, par périodes triennales, -r- Tous les
savants français et étrangers, excepté les membres régnicoles de l’Institut, sont admis
au concours.
Paix la Fons-Mélicocq. — Un prix triennal de dixrhuit çents francs a été fondé
par M. de la Fons-Mélicocq, en faveur du meilleur ouvrage sur l'Histoire et les
antiquités de la Picardie et de VIle-de-France (Paris non compris). L’Académie
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464 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
décernera ce prix, s'il y a lieu, en 1884; elle choisira entre les ouvrages manuscrits
ou imprimés en 1881, 1882 et i 883 , qui lui auront été adressés avant le 3 t décem¬
bre i 883 .
Prix Brunet. — M. Brunet a fondé un prix triennal de trois mille francs pour
Un ouvrage de bibliographie savante , que l’Académie des inscriptions, qui en choi¬
sira elle-même le sujet, jugera le plus cligne de cette récompense. L'Académie rap¬
pelle qu’elle a proposé pour le concours de i 885 la question suivante : « Relever
sur le grand catalogue de bibliographie arabe intitulé Fihrist toutes les traductions
d’ouvrages grecs en arabe; critiquer ces données bibliographiques d’après les docu¬
ments imprimés et manuscrits. » Les ouvrages pourront être imprimés ou manuscrits
et devront être d’une date postérieure à la clôture du dernier concours. Les mé¬
moires devront être déposés au secrétariat de l’Institut avant le 3 i décembre «884.
Prix Stanislas-Julien. — M. Stanislas Julien a légué à l’Académie une rente de
quinze cents francs pour fonder un prix annuel en faveur du meilleur ouvrage relatif
a la Chine. Les ouvrages devront être déposés, en double exemplaire, au secrétariat
de l’Institut, le 3 i décembre i 883 .
Prix Delà lande-Guérin eau. — M mo Delalandc, veuve Guérineau, a légué à l’Aca¬
démie une somme de vingt mille francs (réduite à dix mille cinq francs) dont les
intérêts doivent être donnés en prix tous les deux ans, au nom de Delalande-Gué-
rineau, à la personne qui aura composé l’ouvrage jugé le meilleur par l’Académie.
L’Académie décernera ce prix, s’il y a lieu, en 1884, au meilleur ouvrage de critique
sur les documents imprimés ou manuscrits relatifs à l’histoire ecclésiastique ou à
l'histoire civile du moyen âge. Les ouvrages destinés au concours devront être dé¬
posés, en double exemplaire, s’ils sont imprimés, au secrétariat de l'Institut, le 3 i dé¬
cembre 188 3 .
Prix Jean Reynaud. — M“ # veuve Jean Reynaud, « voulant honorer la mémoire
« de son mari et perpétuer son zèle pour tout ce qui touche aux gloires de la
« France », a fait donation à l’Institut d’une rente de dix mille francs, destinée à
fonder un prix annuel qui sera successivement décerné par chacune des cinq Aca¬
démies. Conformément au vœu exprimé par la donatrice, « ce prix sera accordé au
a travail le plus méritant, relevant de chaque classe de l’Institut, qui se sera produit
« pendant une période de cinq ans. Il ira toujours à une œuvre originale, elevée et
« ayant un caractère d’invention et de nouveauté. Les membres de l’Institut ne seront
« pas écartés du concours. Le prix sera toujours décerné intégralement. Dans le cas
« ou aucun ouvrage ne paraîtrait le mériter entièrement, sa valeur serait délivrée à
a quelque grande infortune scientifique, littéraire ou artistique. Il portera le nom de
® son Jean Reynaud. » Ce prix sera décerné pour la seconde fois, par
1 Académie des inscriptions et belles-lettres, en i 885 .
Prix de la Grange. — M. le marquis de la Grange a légué à l’Académie une rente
annuelle de mille francs destinée à fonder un prix en faveur de la publication du
texte d’un poème inédit des anciens poètes de la France ; à défaut d’une œuvre inédite,
le prix pourra être donné au meilleur travail sur un poète déjà publié, mais appar¬
tenant aux anciens poètes. Ce prix sera décerné, s’il y a lieu, en 1884.
Conditions générales des concours. — Les ouvrages envoyés aux différents con¬
cours ouverts par l’Académie devront parvenir francs de port et brochés, Jau secré¬
tariat de l’Institut, avant le I e ' janvier de l’année où le prix doit être décerné. — Ceux
qui seront destinés aux concours pour lesquels les ouvrages imprimés ne sont point
admis devront être écrits en français ou en latin. Ils porteront une épigraphe ou
devise, répétée dans un billet cacheté qui contiendra le nom de l’auteur. Les con¬
currents sont prévenus que tous ceux qui se feraient connaître seront exclus du con¬
cours; leur attention la plus sérieuse est appelée sur cette disposition. — L’Acadé¬
mie ne rend aucun des ouvrages imprimés ou manuscrits qui ont été soumis à son
examen ; les auteurs des manuscrits ont la liberté d’en faire prendre des copies au
secrétariat de l’Institut.
DÉLIVRANCE DES BREVETS D’ARCHIVISTES PALÉOGRAPHES
En exécution de l’arrêté de M. le ministre de l’instruction publique rendu en i 883 ,
et statuant que les noms des élèves de l’Ecole des chartes, qui, à la fin de leurs étu¬
des, ont obtenu des brevets d’archiviste paléographe, devront être proclamés dans la
séance publique de l’Académie des inscriptions et belles-lettres qui suivra leur pro-
motion, 1 Académie déclare que les élèves de l’Ecole des chartes qui ont été nommés
archivistes paléographes par décret du 28 février i 883 , en vertu de la liste dressée
par le conseil de perfectionnement de cette Ecole, sont : MM. Delachenal (Jean-
Pierre-François); Langlois (Marie-Louis-Ernest); Lefèvre-Pontalis (Casimir-Germain);
Durand (JulcB-Marie-Georges); Gaillard (Joseph-Xavier-Henri); Lex (Marie-Louis-
Félix-Léonce); Cicile (Charles-Albert); Parent de Curzon (Emmanuel-Henri); Mar¬
tineau (Alfred-Albert); Argeliès (Jean-Baptiste-Joseph-Justin); Corda (Guillaume-
Augustm-Louis) ; De Saint-Agathe (Jean-Marie-Joseph); hors rang, MM. Bûche
Auguste)*^’ ^ Mercier de Morière (Laurent-Marie-Joseph); balone (Emile-
— _ Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX»
Le Buy , imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent t 2 S.
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Luther, Dichtungen, hrsg. von Karl Gœdeke, mit einem Lebensbilde
Luthers von J. Wagemann. (Erich Schmidt.) — Stricker, Ueber die
Association der Vorsteilungen. — Félix Dahn, Bausteine. Gesammelte
kleine Schriften. IV Reihe 2 Schicht. Philosophische Studien. — Die
Limburger Chronik. Œ. Martin.) — Antonio Rubio y Lluch, La expe-
dicion y dominacion de los Catalanes en Oriente juzgadas por los Grie-
gos. (Lambros.) — W. Müller, Gerhard van Swieten, ein biographischcr
Beitrag zur Geschichte der Aufklârung in Oesterreich. (Krones : on
attendait davantage.) — npaxxtxà tyjç èv Âôrjvatç àpx al0 ^°ïî;^Ç èxxtplaç dbro
lavouaplou 1882 pixpt ’lavouapfou 1 883 . (C. Robert.) — Ernest David et
Mathis Lussy, Histoire de la notation musicale depuis ses origines,
(Kabisch : causerie superficielle, travail de dilettante sur la notation ;
quiconque ne connaît pas exactement l’histoire de la notation musicale,
ne doit pas consulter ce livre; s'il a eu un prix, c’est que les travaux
des concurrents étaient plus mauvais encore, et dans le royaume des
aveugles le borgne est roi.) — Erman, Zur Geschichte der rômischen
Quittungen und Solutionsacte, mit einem Vorwort von T. Dernburg.
(Merkel.)
Athenaeum belge, n° 11, i 5 novembre 1 883 : W. Scherer, Histoire de
la littérature allemande (Aperçus ingénieux, parallèles inattendus et
instructifs, heureux rapprochements, style alerte, rapide, souvent imagé
et étincelant). — Les deux La Salle (Stecher). — Nève, Les époques
littéraires de l’Inde (Michel : renseignements intéressants, jugements
éclairés).— La ligue en France et en Suisse i 585 -t 594 . (M. Philip-
pson : d’après l’ouvrage de Segesser, qui renferme tant de documents; il
n’y a pas un seul évènement important de cette époque, soit en France,
soit en Suisse, que cet ouvrage n’éclaire d’un jour nouveau et ne nous
fasse complètement connaître.) — L’arbre des batailles, d’Honoré Bonet,
publié par Ernest Nys. (Van der Rest : fait connaître un grand et noble
esprit qui, dès le xiv® siècle, émettait des doctrines dont, à bien des égards,
les temps modernes en sont encore à désirer la réalisation.)
ŒUVRES DE A. DE LONGPÉRIER
Membre de l’Institut
réunies et mises en ordre par G. SCHLUMBERGER
Tome I. ARCHÉOLOGIE ORIENTALE, NUMISMATIQUE,
MONUMENTS ARABES. Un beau vol. in-8, illustré de
nombreux dessins dans le texte et de xi planches sur
cuivre. 20 tr.
ToMEsIIet III. ANTIQUITÉS GRECQUES, ROMAINES ET GAU-
LOISES. Deux beaux volumes in-8, illustrés de dessins et
de planches sur cuivre. Chaque vol. 20 fr.
Tome IV. MOYEN AGE ET RENAISSANCE. Première partie (i 83 7 -
1858). Un beau volume in-8, illustré de dessins et de plan¬
ches sur cuivre... 20 fr.
ŒUVRES CHOISIES DE A. J. LETRONNE
Membre de l'Institut
ASSEMBLÉES, MISES EN ORDRE ET AUGMENTÉES D*UN INDEX PAR E. FAGNAN
Première série : Egypte ancienne. 2 vol. in-8... 25 fr.
Deuxième série: Géographie et cosmographie. 2 vol. in-8... 25 fr.
Troisième série : 2 vol. in-8 (sous presse).
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ERNEST LEROUX, EDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28,
REVUE D’ETHNOGRAPHIE
PUBLIÉE
SOUS LA DIRECTION DE M. LE D r HAMY
La Revue cTEthnographie, paraît tous les deux mois par fascicules in-8
raisin, de 5 à 6 feuilles d’impression, richement illustrés.
Prix de l’abonnement annuel : Paris, 2b fr. — Départements, 27 fr. 5 o. —
Etranger, 3 o fr. — Un numéro, pris au bureau, 5 fr.
La Revue cTEthnographie, fondée en 18S2, a publié les articles suivants :
Première année Ci 882 .J Mémoires originaux ; L. de Cessac, Observations sur des fétiches de
pierre sculptés en forme d'animaux, découverts à Pile de S.-Nicolas (Californie). — L. de Cessac,
Renseignements ethnographiques sur les Comanches. — J. E. de la Croix, Etude sur les Sakaies
de Pérak, presqu'île de Malacca. — E. Duhousset, Les initiateurs de l’art oriental, étude d'ethno¬
graphie artistique. — E. Dulousset, Les arts décoratifs au Petit-Tibet et au Cachemire. —
E. Fégueux, Les ruines de la Quemada. — E. T Hamy. Note sur les figures et les inscriptions
gravées dans la roche à El Hadj Mimoun, près Figuig. — E. T. Hamy, La croix de Teotihua-
can, au Musée du Trocadéro. — A Landrin, Ecriture figurative et comptabilité en Bretagne. —
Fr. Lenormant, Les Truddhi et les Specchie de la terre d’Otrante. — Fr. Lenormant, Quelques
considérations sur l'ethnographie ancienne des deux bassins méditerranéens à propos d'une décou¬
verte faite à S. Cosimo. — Ern. Martin. Les funérailles d’une impératrice de Chine. — J. Mon-
tano, Quelques jours chez les indigènes de la province de Malacca. — J. Moura, Le Cambodge
préhistorique. — A Peney, Mémoires sur l'ethnographie du Soudan Egyptien : I, Le Sennar ; les
Turcs au Soudan ; II, Le Kourdofan. — A. de Quatrefages, Nouvelles études sur la distribution
géographique des Nègritos et sur leur identification avec les Pygmées asiatiques de Ctésias et de
Pline. — A. Retzius. Ethnographie finnoise. L'écorce du bouleau et ses divers usages. —
G. Révoil, Notes d'archéologie et d'ethnographie recueillies dans le Çomal. — A. T. de Roche-
brune, De l'emploi des mollusques chez les peuples anciens et modernes. I. Mollusques des
sépultures du Bas-Pérou. — D r Scheube, Le culte et la fête de l'ours chez les AInos. — P. Schu¬
macher, L'âge de pierre chez les Indiens Klamaths. — R. Verneau, Les inscriptions lapidaires de
l'archipel canarien. — Variétés. Revues et Analyses. Académies et Sociétés savantes. Exposi¬
tions, collections et musées. Correspondances. Nouvelles. Questions. Réponses. Nécrologie.
Bibliographie.
Deuxième année Ci883J. N a% I-1V. A. Carre, Les Sérènes de Joal et de Portudal, côte occiden¬
tale d’Afrique. — H. Tarry, Excursion archéologique dans la vallée de l’Oued Mya. — Alex,
Bertrand, Les Troglodites. — D. Charnay, Exploration des ruines d'Aké. Yucatan. — A. de
Quatrefages, Etude sur quelques monuments et constructious préhistoriques, à propos d'un monu¬
ment mégalithique de l’ilc de Tonga-Tabou. — C. E de Ujfalvy, Les Aryens au nord et au sud
de l'Hindou-Kouch. — T. Maler, Notes sur la basse Mixtèque. — H. Duveyrier, La confrérie
religieuse de Sidi Mohammed ben Ali es-Senousi. — E. T. Hamy, Note sur une inscription chro-
nographique de la fin de la période aztèque, appartenant au Musée du Trocadéro. — H. Duvey¬
rier, lsedraten et le schisme ibadite. — G. Duloup, Huit jours chez les M'Bengas. — Alex. Ber¬
trand, L'introduction des métaux en Occident. — Deniker, Les Ghiliaks d'après les derniers
renseignements. — A. T. de Rochebrune, De l’emploi des mollusques chez les peuples anciens et
modernes II. Mollusques des sépultures de l’équateur et de la Nouvelle-Grenade. — H. Ten Kate,
Quelques observations ethnographiques recueillies dans la presqu'île californienne et en Sooora
— Baron L. de Vaux, Les Canaques de la Nouvelle-Calédonie. — Variétés, Revues et Analyses
Académies et Sociétés savantes , Expositions , collections et musées. Correspondances . Nou¬
velles. Questions. Réponses. Nécrologie. Bibliographie.
Le n° V va paraître. Le n* VI paraîtra le 3 i décembre.
Le Puy t imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 23.
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JOURNAL D’UNE EXPÉDITION
CONTRE LES IROQUOIS, en 1687, rédigé
par le Chevalier de Baugy , aide de camp de M. le M ls de De-
nouville. Lettres et pièces relatives au fort Saint-Louis des
Illinois. Publié par Ernest Serrigny. In-12. b fr.
DE L’ORIGINE DES INDIENS DU
NOUVEAU MONDE et de leur civilisation, par
P. Dabry de Thiersant. Gr. in-8, illustré .- i5 fr.
L’EMPEREUR AKBAR. Un chapitre de l’histoire
de 1 Plnde au xvi* siècle, par le comte F. A. de Nobr. Traduit
de l’allemand, par G. Bonet Maüry, avec une introduction,
par Alfred Maüry. In-8 ........ 7
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 6 o 3 , 24 novembre i 883 : Düntzer, Life of Goethe,
translatée! by Th. W. Lyster. (E. Dowden : la traduction, remaniée,
augmentée, est, à vrai dire, un meilleur livre que l’ouvrage allemand.)
— Sir Arthur P. Phayre, A history of Burma, including Burma Pro-
per, Pegu, Taungu, Tenasserim and Arakan, from the earliest time to
the end of the first war with British India. (C. Bernard.) — Morfill,
Slavonie literature. (Fairfield : livre très bon et très intéressant.) —
Register of Merchant Taylors s School, by C. J. Robinson. Vol. II.
1699 to 1874. — Current theology. — Mr. Morris on art and com¬
merce. — « The agnostic annual » (Huxley). — A passage in t Troilus
and Cressida » (W. Stokes). — The Hermes and Orpheus mythes (Cox).
— The date of Sargon (Sayce). — Classical books. (Pindar, the Nemean
and Ithsmian Odes, by Fennell; The Theaetetus of Plato, with a revi-
sed text and english notes, by Lewis Campbell ; The Hieron of Xeno-
phon, edited by Holden; Codex Laurentianus von Sophokles und eine
neue Collation im Scholientexte, von Pappageorg. — G. Morelu, Ita-
lian masters in german galleries, translated from the german by Mrs
Louise B. Richter. — The Apollo and Marsyas. (Waller) — San
Alvise at Venice. (Drummond.)
The Athen&eum, n° 2926, 24 novembre i 883 : Luther literature :
Kôstlin, Life of Luther, translated; Kôstlin, Martin Luther, the Re¬
former, translated; Froude, Luther, a short biography; Mayhew, The
boyhood of Martin Luther; The Table Talk of M. Luther; H. Herrig,
Luther, ein kirchliches Festspiel zur Feier, etc. — Encyclopaedia
britannica, vol. XVI, Men-Mos. — Condbr, Heth and Moab, Explora¬
tions in Syria in 1881 and 1882. — Ten Brink, Early english litera¬
ture, translated by Kennedy. (Excellent livre, rempli d'informations;
peut être y en a-t-il trop ; il aurait fallu abréger en certains endroits,
mettre des appendices, etc., pour que l’œuvre fût de meilleure digestion.)
— The dictionary of national biography (Liste des noms de Blackwood
à Bonnycastle). — A journey to Spain in 1446-48. (Découverte faite
par M. Pascual de Gayangos.) — Edgar Poe’s « Tamerlane». (Ingram.)
— Caxton’s device (Warner).
Literarisches Centralblatt, n° 48, 24 novembre i 883 : Aegyptiaca, Pauli
de Lagardb studio et sumptibus édita. (Très important). — Wünsche, Die
Râthselweisheit bei den Hebràern mit Hinblick auf andere alte Vôlker
dargestellt. (Intéressant, destiné au grand public.) — Jelalu-d’-Din
Nunammed er-Rumi, the Mesnevi (usually tnown as the Mesneviyi
shérif, or holy Mesnevi), I. translated and versified by Redhouse. —
Enmann, Eine verlorene Geschichte der rômischen Kaiser und das Buch
de viris illustribus urbis Romae. (Recherches qui ont entamé un pro¬
blème très difficile et très compliqué, qui l’ont attaqué en son ensemble et
résolu dans les points essentiels; sagacité, saine critique, impartialité de
l’historien; parfois des subtilités). — Pfaff, Zur Erinnerung an Fried¬
rich Oetker. — Harrjsse, Jean et Sebastien Cabot, leur origine et leurs
voyages d’après des documents inédits. (Ce volume ouvre la collection
des « voyages et documents pour servir à l’histoire de la géographie
depuis le xm e jusqu’à la fin du xv® siècle »; commencement excellent
et plein de promesess; l’ouvrage a tous les mérites, critique sagace et
réfléchie, jugement impartial et circonspect, exactitude et précision). «-
Erman, Zur Geschichie der rômischen Quittungen und Solutionsacte,
mit einem Vorwort von Prof. Dr. Dernburg. — Rumpel, Lexicon Pin-
daricum. (Livre qui sera le bienvenu, très utile, remplira en même
temps un but scientifique et un but pratique). — Zimmer, Glossae hi-
bernicae, e codicibus Wirziburgensi, Carolisruhensibus, etc. (Whitley
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N» 60
— 10 décembre —
1888
Sommaire t 247. M. Albert, Les villas de Tibur sous Auguste et Le culte de
Castor et de Pollux en Italie. — 248. H. Zimmern, Firdusi; Gibb, Gudrun,
Beovulf et Roland. — 249. Ruelens, Les amis de Rubens, Nicolas Rockox. —
Chronique. — Académie des Inscriptions. — Société des Antiquaires de France.
247. — De vllllt Tlburtlnlo principe Augutto, thesim proponebat etc»
M. Albert. Paris* Thorin, 1 883 . 1 vol. in- 8 , 93 p. et une carte.
— Le culte de Castor et de Pollux en Italie» thèse pour le doctorat
(Bibl. des Ecoles françaises d’Athènes et de Rome, fasc. XXXI), par Maurice
Albert, ancien élève de l’Ecole normale supérieure, ancien membre de l’Ecole
française de Rome. Paris, Thorin, i 883 . Un vol. in-8, 172 p., avec 3 planches ! .
La thèse latine de M. Albert est à la fois une thèse archéologique et
littéraire; lauteur s'est beaucoup inspiré du souvenir d’Horace, de Ti-
bulle, de Properce et nous a donné, d’autre part, le résultat de ses in¬
vestigations sur l’ancien Ager Tiburtinus. Le sujet est limité; il ne
s’agit que des villas de l’époque d’Auguste. La thèse est accompagnée
d’une carte (où l’emploi de plusieurs teintes eût mieux indiqué les acci-
dents de terrain).
Les sources d’information de Fauteur ont été : i° les textes d’Horace
et des poètes ses contemporains; 2 0 les noms modernes sous lesquels se
cachent souvent les noms anciens (Quint igliolo, Pisoniano, Lolliano,
etc.); M. A. s’est, en général, servi avec prudence de cette série d'indica¬
tions qui n’ont de valeur que lorsque le nom est relativement ancien.
Pour en donner un exemple, dans le ms. 23 o 5 de la bibliothèque Bar-
berini (de l’année 945), parmi les terres appartenant à l’évêché de Tibur
est cité le praedium Pisonianum, et il existait encore, il y a quelques
années, une petite chapelle appelée Sancta Maria in Pisona. Toutefois,
n'est-ce pas aller un peu loin que de retrouver dans le campo Limpido
le souvenir de la villa de Lépide, dans la Strada di Carciano, autrefois
Strada Cassiana, le souvenir de celle de Cassius? L’auteur, qui connaît
l’Italie et les ouvrages d’archéologie des trois derniers siècles, sait assu¬
rément combien, depuis la Renaissance, l'amour-propre municipal a fait
naître d'identifications qui sont loin d’étre toutes justifiées. Si ces déno¬
minations se trouvent dans des mss. plus anciens, M. A. aurait dû les
les citer a . — 3° Les inscriptions trouvées au milieu des ruines : ainsi,
pour l'emplacement de la villa des Lollii et de celle des Plautii. Au point
1. Voirie compte-rendu de la soutenance de ces thèses, numéro du i cr octobre
i 883 , p» 255 .
a. Cf. Campetello , otim scilicet campo Metello vocato , p. 10.
Nouvelle série, XVI. 5 o
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REVUE CRITIQUE
466
de vue épigraphique, les indications ne sont pas toujours assez précises;
il est bien certain que l’inscription de Syphax du musée Pio-Clemen-
tino (p. 11, n. 2) est fausse; M. A. aurait dû nous dire si elle est comptée
parmi les inscriptions ligoriennes ou, mieux encore, ne pas la citer,
puisqu'elle a été composée d'après un texte de Tite-Live. Dans l'Inscrip¬
tion d’Orelli 3283 citée à la p. 35 , pourquoi les mots porticus et por-
ticum sont-ils imprimés en italiques? L'inscription des Lollii est-elle
encore lisible (p. 63 ), et en quoi la lecture de l’auteur diffère-t-elle de
celles qui avalent été précédemment adoptées? —4 0 Le caractère des
ruines en fait à peu près connaître l’époque. Ici encore on peut repro¬
cher à M. A. d’avoir un peu manqué de précision (p. 9); il aurait dû
distinguer les ruines en petit opus incertum de celles en opus latericium
ou en opus reticulatum; l'emploi sur la carte de couleurs ou de signes
différents pour les désigner eût été aussi utile.
Sans entrer dans l'analyse détaillée des chapitres, citons celui qui
concerne la villa de Cynthia, comme finement et spirituellement écrit,
et le chapitre sur la villa d'Horace, le plus important de la thèse, anté¬
rieur à l’article de M. G. Boi$sier (Revue des Deux-Mondes, juin i 883 )
et au travail même de M. Ç. Jullian {Mélanges d'archéologie et d'his -
toire, mars * 883 ). M. A. et M. Jullian reconnaissent qu’Horace n'a
jamais eu qu’une maison de campagne et l’emplacement en a été depuis
longtemps déjà désigné dans la vallée de la Licenza (Digentia), près des
petits villages de Rocca Giovine et de Cantalupo. Mais il s'agit d’inter¬
préter une phrase de la Vie d'Horace écrite probablement par Suétone
(Ed. Roth, p. 298, 22) : Vixit plurimum in secessu ruris sui 9 Sabini
aut Tiburtini\ domusque ejus ostenditur circa Tiburni luculum . S’il
n’a pas eu deux villas, comment expliquer les mots Sabini aut Tiburtini?
Dans son travail, M. Jullian voulant montrer que le territoire tiburtin,
à l’époque d'Auguste, faisait partie de la Sabine, s’appuie sur ce texte et
croit que Suétone, dans ce passage, désigne la villa de la Sabine. Sué¬
tone aurait employé les expressions Sabini aut Tiburtini pour montrer
que les deux termes étaient synonymes. Il est évident que le territoire
de Tibur faisait alors partie de la Sabine, et M. A. l'a signalé dans la
note de la page 47. Mais Suétone a ajouté circa Tiburni luculum . Or,
le bois sacré de Tiburnus (cf. Horace, I, vu, * 3 ) était à Tibur; la villa
dont parle Suétone étant située aux environs du bois de Tiburnus était
donc à Tibur. Le texte en désigne bien clairement deux. Suétone cepen¬
dant ne croyait pas à l’existence d’une villa d’Horace à Tibur; en em¬
ployant le mot ostenditur, il semble vouloir indiquer qu’à son époque
Une légende s’était déjà établie à Tibur et que les ciceroni du temps
montraient l’emplacement d'une prétendue villa. Cette explication du
texte controversé nous semble très acceptable, et nous voyons souvent
encore de nos jours des légendes locales relatives à des hommes célèbres
se former avec la même promptitude l .
1. Signalons un certain nombre de feutes d'impression I p. ia, amqm***t*M pour
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46?
d’HISTOIH» ET DE LITTERATURE
II
L’étude sur le culte de Castor et de Pollux en Italie est un sujet tout
à fait nouveau et inaugure, nous l'espérons, une série de monographie*
archéologiques et mythologiques sur les divinités romaines. L’ouvrage
de Preller est encore assurément fort utile à consulter, et aucune autre
mythologie n’est venue remplacer la sienne ; mais, sur bien des points,
il est fort incomplet; il n’a guère consulté que les textes et a fait peu
d’usage de la science des monuments figurés. M. A. considère, au con¬
traire, les <c vases, miroirs, monnaies, pierres gravées, statues, bas-reliefs,
lampes funéraires, peintures murales, tous ces monuments si nombreux
et si variés », comme autant de textes précieux qui font connaître dans
tous ses détails la légende des Dioscures et qui permettent d’étudier
leur culte dans ses manifestations et ses modifications diverses (p. ni).
C’est dire que l’étude sur les Dioscures a pour base, suivant les tradi¬
tions des écoles d'Athènes et de Rome, un catalogue scientifique.
Le chapitre i #r traite de la biographie de Castor et de Pollux d’après
les monuments figurés. Tous ces monuments sont d'origine hellénique;
aussi a-t-on pu reprocher à M. A. de n’avoir pas assez développé cette
partie de son travail; toutefois il a soin de nous avertir que, s’il résume
cette biographie héroïque, c’est uniquement pour servir de point de
départ à son étude du culte des Dioscures en Italie.
Les Dioscures n'ont jamais été considérés en Italie comme des héros;
ils sont arrivés tout divinisés. Par quelle voie? C'est l'objet du second
chapitre (Introduction du culte dans la Péninsule). De la Sicile et de la
Grande-Grèce, leur culte est arrivé jusqu’au cœur de l'halie. Le récit d*
leur apparition aux Locriens lors de la bataille du fleuve Sagra ressem¬
ble, jusque dans les moindres détails, à leur apparition à la bataille du
lac Régille, et M. A. serait assez porté à admettre que le temple de Paes-
tum, communément désigné sous le nom de Basilique , est un temple
de Castor et de Pollux, ce qui expliquerait Ja rangée de colonnes qui
divise l’édifice en deux parties dans le sens de la longueur. Il cite, &
Pappui, un temple d’Ancyre et le temple de Vénus et de Rome (p. |2,
n. 2) : le rapprochement n’est pas tout à fait juste, puisque ce dernier
se compose de deux parties adossées l’une à l’autre. De la Grande-Grèce,
le culte des Dioscurçs a passé \ Tusculum, ville dont l'origine hellé¬
nique, quoiqu’en dise M. A., n’est pas assez garantie par une étymologie
de Festus; cependant plusieurs traditions le font remonter à une époque
assez éloignée, et le lectisternium désigné par Festus sous le nom de
Struppearia (s. v. Stroppus) avait beaucoup d'analogie avec les repas
qu’on leur offrait tous les ans à Athènes et à Cyrène. Ainsi les Dioscures
sçpt Grecs; ce ne sont pas d'anciennes divinités romaines, transformées,
amœnissimum; p. 22. aedifi(c)iQrum st(r)uctura ; p. 24* Lollii P°vr IÀHm» P? 5 i #
I. 7. mptit pour neptm j p. keredam pour htdtrw, p, ^7, nwio quid magis
pour majus . Qu*m au $or*cte, »’il est « candidas neve », cç n’est pas à l’époque où
les riches Romains se rendaient à Tibur pour se reposer des fatigues de l'été.
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REVUE CRITIQUE
468
comme tant d’autres, au moment de l'introduction de la mythologie
hellénique. Leurs attributs, leurs costumes, leurs noms sont également
grecs
La bataille du lac Régille (ch. m) est l'époque où les Dioscures s'éta¬
blissent à Rome, à la suite du dictateur Aulus Postumius : quel a été le
motif de son vœu? M. A. a exposé, à ce sujet, une hypothèse très vrai¬
semblable (p. 24). La bataille s’était engagée sur le territoire de Tuscu-
lum. Etant donnée l’antique coutume des Romains d’invoquer les divi¬
nités ennemies, l’occasion ce jour-là se présentait trop favorable pour
que le dictateur la laissât échapper : de plus, les Dioscures avaient la
réputation d’être d’invincibles cavaliers. A partir de ce moment, ils ont
à Rome leur sanctuaire, leurs fêtes; ils protègent dans les combats l’ar¬
mée et plus particulièrement la cavalerie. Mars, qui avait été jusque-là
le dieu de tous les soldats sans exception, n’est plus désormais que le
dieu des fantassins, le Mars gradivus dont l’armure est lourde et U
marche pesante. En qualité de dieux guerriers, ils sont associés sur les
médailles à Roma, à Vénus qui est, à l’époque de la République, la pro¬
tectrice des soldats en danger (militaris, verticordia, etc.).
Le ch. iv, qui contient l’histoire du temple du Forum, est un des plus
intéressants de l’ouvrage. Il n’y a plus aujourd’hui de discussion pos¬
sible sur son emplacement; mais on n’avait peut-être pas Jusqu’ici assez
montré la puissance de plus en plus grande de ces dieux dont le sanc¬
tuaire était, suivant l’expression de Cicéron, au milieu de la grande place
publique, sous les yeux mêmes du peuple romain. « De là, dit M. A.
(p. 41), ces dieux grecs repartent comme dieux romains pour rayonner
dans tous les sens. > Cette assertion est acceptable pour les cités latines
des environs de Rome, mais comment ces dieux reviennent-ils comme
dieux romains dans l’Italie du sud d’où ils sont partis et surtout en
Grèce d’où ils tirent leur origine? Des inscriptions romaines en l’hon¬
neur des Dioscures dans ces pays ne suffisent pas à prouver qu’on y
adorait des divinités romaines à la place des anciennes divinités hellé¬
niques.
Examinant leurs attributs, M. A. les étudie d’abord comme dieux
protecteurs des marins : les Grecs auparavant leur avaient aussi attri¬
bué cette fonction ; protecteurs des marins, les Dioscures le sont aussi
des commerçants; ils protègent à la fois les matelots et les marchan¬
dises qu’exportent ou qu’importent les navires. Ils apparaissent comme
dieux des transactions commerciales sur les premiers deniers d’argent
frappés en 486, deux cent trente-et-un ans après la bataille du lac
Régille et ils avaient déjà ce caractère dans la Grande-Grèce, comme le
prouvent le grand nombre de monnaies frappées à leur image. L’opi¬
nion de M. Mommsen d’après laquelle on aurait fait venir, pour fabri-
1. Je ne sais pourquoi M. A. trouve ingénieuse la supposition bizarre de Klausen
qui fait dériver Castor de cas tus ou de candere (p. 19); la référence n’est, du reste,
pas indiquée.
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d’histoire BT DE LITTÉRATURE 469
quer ces nouveaux deniers, des ouvriers de la Grande-Grèce est donc
très vraisemblable. Ajoutons que leur temple était situé au centre même
des affaires, à l'endroit où s’était de très bonne heure établie la bourse
de Rome. De là l'importance à l’origine des serments de Edepol et de
Mecastor qui, réservés d’abord aux femmes, passèrent dans la bouche
des hommes et finirent par n'étre plus que de simples interjections.
Nous n’avons aucune remarque importante à faire sur le chapitre des
Dioscures, divinités équestres; mais l’étude du rôle cosmique qui leur
est attribué peut donner lieu à quelques critiques : l'auteur semble s’être
un peu trop inspiré de la fameuse théorie des cistes et miroirs mysti¬
ques du savant Gehrard, théorie bien abandonnée aujourd’hui. M. A.
critique à bon droit Inghirami (p. 97) d’avoir cherché des idées astro¬
nomiques jusque dans les détails du costume et la flexion d'une jambe;
mais n’encourt-il pas aussi le même reproche? Nous n’admettons donc
pas le caractère cosmique de la plupart des miroirs étrusques, mais il est
certain que, plus tard, les Dioscures ont ce caractère dans leur associa¬
tion avec Mithra, Apollon et Vénus, surtout dans les bas-relifs.
Aucune légende ne prête mieux que celle des Dioscures, dieux du
jour et de la nuit à des interprétations funéraires. A chaque pas,
dans les musées, on rencontre des sarcophages où sont représentés les
Tyndarides. Sans parler des scènes où ils prennent place à côté du
soleil et de la nuit auprès du char de Phaéton avec un caractère sym¬
bolique et funéraire, dans toute une série de monuments et en parti¬
culier sur un sarcophage d’Arles, ils assistent à des scènes de familles.
M. A. repousse la théorie d’après laquelle c'est en qualité de divinités
maritimes que Castor et Pollux trouvent place sur les tombeaux; il
n’admet pas non plus celle de M. Le Blant, à propos du sarcophage
d’Arles, où il s'agirait d’une apothéose privée. Il est plus simple de les
considérer comme des divinités ayant par elles-mêmes un caractère et
des attributions funéraires. « Ce n’est pas seulement l’idée de destruc¬
tion et d’anéantissement que les romains traduisaient sur les tombeaux :
quelquefois aussi ils cherchaient à exprimer leur foi dans une autre
existence (p. 11 3 ). » Cette idée de renaissance après la mort semble
apparaître sur plusieurs sarcophages et les chrétiens se la sont appro¬
priée. Ainsi s'est transformé peu à peu le caractère de ces deux divinités
qui ont cessé d’être les dieux des guerriers, des cavaliers et des marins
pour devenir des symboles moraux.
Le catalogue qui termine l'ouvrage est méthodique et complet; pour¬
quoi cependant, au chapitre m (monnaies), M. Albert n'a-t-il pas indiqué,
comme aux chapitres précédents, les références aux ouvrages où ont été
publiés les monuments qu’il catalogue (Eckhel, Cohen)? En résumé, ce
travail est très intéressant; la critique est judicieuse, sauf quelques exa¬
gérations de détail et, ce qui le rend d’une lecture agréable, il est écrit
dans un style simple, fin et soigné.
Emmanuel Fernique.
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REVUE CRITIQUE
470
148* — TM Epio of Kln*»» storics retold from Firdusi by Hklkn Ziiottiur,
with two etchinge by L. Alma Tadema, R. A. aacLa prafàtory poam by Kdmuod
W. Gosse, 1 vol. in-ia, xlvii-339 pages, London, Fisher Unwin, i883.
— Cadran, Deowulf and Roland» with other mediaeval taies by Joui
Gibb. 2 ed. 1 vol. în-ia, 3oi pages. London, Fisher Unwin, 1883.
Nous réunissons dans un même article le Firdusi de Miss Zimmera
et le Gudrun de M. Gibb, malgré la différence des sujets, à cause de
l’identité d'intention et de traitement. Le premier ne ressort point de
Torientaliste, ni le second du germaniste : ce sont des œuvres littéraires,
spécimens d’un genre autrefois très populaire en France et qui mérite¬
rait de revivre, le refacimento.
I
Comme les poètes du moyen âge redisaient la guerre de Troie on
l*histoire d’Alexandre d'après Darès et les versions latines du Pseudo-
Callisthène, MissZimmern a entrepris de redire l'Epopée persane d'après
la version française de M. Mohl. Bien que la France soit le seul pays qui
possède une traduction complète de Firdusi, il est probable que le vieux
poète, grâce à ce refacimento , sera bientôt mieux connu et plus popu¬
laire en Angleterre qu’il ne l’est de ce côté-ci de la Manche. Miss Z. a
condensé en un volume toute la poésie éparse le long des deux mille
premières pages de l'original : il faut du loisir et parfois de la patience
pour lire, quand on ne le fait pas dans un objet d’étude, les quatre gros
volumes consacrés aux Peshdadiens et aux Kéanidcs, et c'est faute d'un
abrégé analogue que la belle traduction de M. Mohl, même sous sa
forme populaire, a si peu réussi encore à faire entier dans la circulation
littéraire les richesses poétiques du vieil Iran.
Le poème de Firdusi comprend trois parties: une partie purement
mythique et légendaire qui constitue l'épopée persane proprement dite
et va des origines à Alexandre; une partie historique, celle qui est con¬
sacrée aux Sassanides; entre ces deux parties, un troisième élément
d’origine étrangère, la légende d'Alexandre. Miss Z., avec raison, s'est
bornée î la première partie : la légende d’Alexandre, qui offre un intérêt
très réel, mais d’ordre tout différent, fera probablement l'objet d’uû
récit spécial. Le volume n'est point composé d’extraits et morceaux
choisis, mais présente un récit continu qui donne, par suite, au lecteur
une idée exacte de l'ensemble du poème, tout en mettant en relief les
parties capitales qui sont développées plus au long : l’histoire de Féri-
doun, l’enfance de Zal, les amours de Zal et de Roudabeh, l’aventure de
Rustem et Sohrab, les amours de Byzun et Manijeh, la disparition de
Kai Khosrav, Isfendjar et la colère d’Achille, tous les épisodes classiques
de l’épopée.
Une des originalités de ce petit volume est dans le style. Littré, pour
traduire Homère, avait emprunté le français des chansons de geste :
Miss Z. a emprunté la langue du xvi* siècle : < Voulant reproduire la
naïveté archaïque de l’original, dit l'auteur, je me suis aventurée à écrire
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D’HISTOiktt BT t)B f.tTtÉRATURB
47 1
mes histoires dans le simple langage du temps de Shakespeare et de la
Bible anglaise, afin de les mettre en dehors de l'atmosphère du jour en
les mettant en dehors de la langue de tous les jours ». En fait, Miss Z. a
fait plus d'emprunts à la langue de la Bible qu’à celle de Shakespeare.
Telle page Semble plutôt tin feuillet détache des Bâtdtlles de l'Eternel
ou des Chroniques des rois dè Juda que d’utie épopée iranienhe *. Peut-
être, si Miss Z. était orientaliste de profession, ne se serait*elle pas posé
la question de style t elle aurait tout simplement raconté en transcris
vant les images persanes dans le langage du jour ! la seule différence des
Idées et des images suffit pour nous faire sentir l’originalité propre de
l’oeuvre, et toute différence de style qu’on y ajoute risque plutôt de là
voiler en mettant l’imagination du lecteur dans une direction étran*
gère. Le français de M. Mohl, si fidèle & l'original, en rend l’esprit sans
effort ni système, mieux que s'il avait raffiné sur le style. En tout cas,
Spenser et la langue de Fdiry Queen auraient été peut-être plus près de
Firdusi. Je dois m'empresser d’ajouter qu’il serait Superficiel de juger
l’œuvre de Miss Z. au point de vue soit du lecteur français, soit de l'o¬
rientaliste : d’une part, le style biblique est inconnu en France et ne dit
rien au lecteur français ; d'autre part, l’auteur n'a jamais eu la préten¬
tion de faire œuvre d’orientaliste : nous devons juger son livre comme
un refacimento anglais; c'est bien, comme le dit le titre, l’Epopée per¬
sane redite d’après Firdusi, mais redite par une voix anglaise et d’après
un idéal anglais. C’est, au fond, une œuvre originale qui appartient à
la littérature nationale et qui, à ce titre, mérite l’attention des amis de
la littérature anglaisé avant tout : quand l’ôil fera l’histoire de la pro¬
pagation et de la transformation en Europe dès fables orientales, le livre
de Miss Zimmern y aura sa place marquée.
Ce livre a eu en Angleterre un grand succès très légitime et amplement
justifié par le talent de l’auteur. L’impression est d’une rare élégance.
Deux illustrations d’Alma Tadeniâ, — tiot àt his best . En tête, un
poème de M. Gosse, Firdusi en exil, en vers faciles, çà et là bien
trouvés, sur l’infortune et la vengeance du vieux poète a aux lèvres de
qui le doux Fàrsi sonnait comme le feuillage qui murmure dans la
pluie :
Firdusi , on whose tongue the sweet Farsi
Sounded like whispering leafage tohtH it ràinÈi »
i. Now it came to pass as Kai Khosrau foretold. For Afrasiyab, when he learned
the déàth of Pirâtt, Wàë beilde himself Wlth grief. And he lifted up hlë Voice in
wailing, and he «pake, saying.,» (p* aBo, début de The passing 0/ Kat
Khosrau ).
Now it came about one night that Kai Khosrau fcll asleep for weariness. And
there appeared unto him a vision, and the Serosh, the angel of God, stood before
hitti. And he s pake wôrdi of tomfbrt to Kal Khosrau aad ha said that the Shah
had dôné ihah whlch waa rlght in the light of Qod, and he hade him prapare fer
his end, and he said... (p. 288).
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47*
REVUE CRITIQUE
II
Le livre de M. Gibb est un refacimento « d'anciennes épopées appar¬
tenant aux trois grandes nations de l'Europe, Allemagne, Angleterre et
France. » Il comprend Gudrun , Beowulf, Roland, plus le poème de
Walter et Hildegund (Gauthier d’Aquitaine).
Le récit est simple et court, parfois sec. Dans Roland , par exemple,
il ne rend qu'un des côtés du poème. Ce qui fait de Roland une œuvre
unique dans la littérature épique, c'est que cette épopée est en même
temps une ode : le récit de M. G. rend bien le tour épique du poème,
mais n’en garde pas le souffle lyrique. Des traits classiques et inoublia¬
bles ont disparu : on pouvait sans grand mal laisser de côté le procès de
Ganelon : on cherche en vain le cri de Roland :
Frappez, seigneur, de vos épées fourbies,
disputez bien votre mort, votre vie,
que douce France par vous ne soit honnie!
quand sur ce champ viendra Charles, mon sire,
de Sarrazins qu’il verra tel massacre,
contre un de nous qu’il en verra morts quinze,
il ne laissera de nous bénir.
Et ce Chant du départ d'il y a mille ans :
Devons ici tenir pour notre roi ;
pour son seigneur doit-on souffrir détresse,
et endurer et grand chaud et grand froid,
chacun ait soin de frapper de grands coups,
que male chanson de lui ne soit chantée!
payens ont tort et Chrétiens ont le droit.
Et les cris d’effroi du poète, à l’approche de l’ennemi qui vient invi¬
sible :
Païens chevauchent par les grandes vallées,
quatre cent mille hommes attendent la journée
Dieu! quelle douleur que Français ne le savent!
Et ses cris de douleur devant l’agonie des siens :
Français y perdent leurs guerriers les plus braves,
plus ne verront leurs pères ni leurs parents
ni Charlemagne qui là-bas les attend.
Et ses paysages homériques :
Hauts sont les monts, ténébreux sont les vais,
noire est la roche, effrayantes les passes....
Le morceau le mieux réussi du volume, est sans contredit le Beowulf'*
Le début du récit, le départ de Scyld mort sur le vaisseau mystérieux,
restauré et complété d'après les légendes parallèles sur son arrivée, est
i. Dans Gudrun , pourquoi renverser l’ordre des épisodes, Gudrun, Hilda, Hagen
au lieu de l’ordre original Hagen , Hilda % Gudrun, qui est aussi l’ordre historique
et logique des incidents ?
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d'histoire et de littérature
473
d'une poésie saisissante et toute wagnérienne. Çà et là M. G. idéalise
l'original, peut-être inconsciemment et par un heureux contre-sens.
Quand le roi Hrothgar pleure son ami Aeschere, enlevé par la mère de
Grendel, Beowulf, dans la version de M. G., dit au roi : « Ne pleure
pas, ô sage roi. Il est mieux de venger un ami que de le pleurer. La fin
de la vie vient pour nous tous. Mais, tandis que nous vivons, il faut
faire de braves actions et pratiquer la justice : cela est mieux pour
ceux qui viendront après . » — Quel admirable sujet de développement
sur la noblesse de la vieille moralité germanique ! On se demande invo¬
lontairement si par hasard Beowulf, avant d'aller combattre le monstre,
n'aurait pas relu Adam Bede et les romans de George Eliot : le doute
devient certitude quand on se reporte au texte, qui dit, en style bien
plus antique : « Se fasse qui peut une part de gloire avant la mort! Cela
sera si beau plus tard pour le guerrier qui a quitté la vie *.
Avec ses qualités et ses défauts, ce livre sera lu avec plaisir du public
littéraire auquel seul il s’adresse. Quand songerons-nous en France à
redire pour tous, dans la langue du jour, nos belles histoires d’autrefois
ou les belles chansons du lointain ? 11 ne s’agit point de faire de l’ar¬
chaïsme national, ni du pédantisme exotique, mais seulement de mettre
ou de remettre dans le grand courant de l’imagination moderne de bel¬
les et grandes choses, inconnues ou bien oubliées, de Roland à Firdusi,
du Saint-Graal à Valmiki. Il y aurait de quoi tenter l’ambition d'un
poète, j'entends un vrai poète ; les autres trouveraient la tâche trop au-
dessous d’eux.
James Darmestetrr.
*49. — Le* amie de Ruben*, par M. C. Ruelens. Anvers, imprimerie veuve
de Backer, 188 3 , brochure grand in-8 de 62 p. (Extrait du Bulletin Rubens ).
J'ai eu l’occasion de rendre hommage ici, l’an dernier, au grand
mérite de M. Charles Ruelens, « dont le zèle, l’activité, les connais¬
sances si vastes et si variées sont des plus remarquables» \ Ce zèle, cette
activité, ces connaissances se manifestent partout, soit dans les deux
considérables publications dont M. R. est devenu le directeur, VAtlas
des plans de villes des Pays-Bas au xvi* siècle et les Monuments de
VArt dans les manuscrits de la Belgique , soit dans des brochures aussi
importantes que la Science de la terre 3 , soit enfin dans le Bulletin
x. Wyrce se Be môte
Dômes œr dealel B'àt biS driht-guman
Unlifgendum à/ter sêlest (vers i 38 g ; ed. Harrison et Sharp).
2. N° du 11 décembre 1882, article sur Notices et documents . Le peintre Adrien
de VrieSy pp. 464-467.
3 . Z*a science de la terre. Une introduction et deux conférences par Ch. Ruelens,
conservateur des manuscrits à la Bibliothèque royale de Belgique, vice-présiden
de la Société de géographie de Bruxelles (Bruxelles, i 883 , grand in-8® de 96 pp.)
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REVUE CRITIQUE
474
Rubens , recueil auquel l’infatigable érudit fournit à pleines mains,
notices, notes et documents du plus vif intérêt. Je pourrais ajouter que
M. R. prépare en même temps d'autres travaux dignes de toute atten¬
tion, notamment un travail sur Erycius Puteanus et son séjour en
Italie, un travail sur Godefroid Wendelen et son séjour en Provence. Je
ne trouve en France qu’un seul de nos savants dont l'admirable activité
puisse être rapprochée de celle de M. R. ; tout le monde l’a déjà désigné
et je ne crains pas d’être contredit en surnommant le conservateur des
manuscrits à la Bibliothèque royale de Bruxelles, le Léopold Delisle
de la Belgique.
La série des Amis de Rubens sera longue et nous promet d’abondants
plaisirs. Le premier personnage qui figure dans la galerie de M. R. est
iin bourgmestre d’Anvers, Nicolas Rockox. Né en i 56 o, mort en 1640,
il fit ses études à Louvain, à Paris et à Douai, où il prit ses licences
académiques en 1584; il épousa, en 1589, à Anvers, Adrienne Percy,
dont le portrait est remarqué, à côté de celui de son mari, au musée de
cette ville, dans le triptyque VIncrédulité de saint Thomas de Rubens*;
en 1599, lors du voyage inaugural des archiducs à Anvers, il fut créé
chevalier; en 1 588 , « devenant échevin, il se consacra tout entier et sans
réserve à l’administration et à la prospérité de la métropole des Pays-
Bas. » M. R. résume ainsi (pp. 6, 7) l’histoire de cette magistrature
qui dura un demi-siècle : « De i 588 à 1 636 , il fit partie du Magistrat,
comme échevin ou comme premier bourgmestre; il revêtit neuf fois
cette dernière dignité, et l’on ne cite de son intelligente administration
que des actes de courage civique, de bienfaisance, de protection aux arts
et aux lettres. Durant sa première magistrature, la peste sévit à Anvers,
en d’autres temps ce fut la disette : chaque fois il prodigua son dévoue¬
ment; dans une de ces circonstances fatales, il dépensa de ses deniers*
en cinq mois, 10,800 florins pour acheter du blé. En des années plus
heureuses, il préside à des réceptions de grands personnages : du duc
Vincent de Mantoue, en 1608, de Marie de Médicis, en i 63 i, du duc
Une des conférences (28 mars 1879) a P our sujet 1 ® création d'une mer intérieure
dans le Sahara algéro-tunisien, d'après le projet du commandant Roudaire; le se¬
conde (18 décembre 1882), la création d’un institut météorologique au sommet du
mont Ventoux, dans le département de Vaucluse. Ces deux conférences, ainsi que
Y introduction, sont d’une très agréable et très instructive lecture. Des idées nou¬
velles, hardies, y sont exposées avec verve et chaleur.
1. M. R. décrit fort bien (pp. 3 et 4) les deux portraits ; c Ce n’est point le pan¬
neau central qui attire puissamment le regard. Ce qui vous arrête, ce qui vous
parle, ce sont les deux volets : deux personnages ; un homme au front intelligent
et pur, au regard profond et doux, au sourire bienveillant; une femme dont la
figure vous frappe, non point par la jeunesse et la beauté des traits, mais par un
air de dignité et de calme. Comme travail du pinceau, ces portraits peuvent sou¬
tenir la comparaison avec ce que Rubens a exécuté de plus parfait parmi ses nom¬
breuses reproductions d’effigies humaines ; comme œuvre de sentiment, ils tradui¬
sent avec éloquence le caractère des époux et la paix de leur union. On voit qu’ils
ont été retracés par une main amie, compris par l’affection et la reconnaissance. »
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d’histoire et DE LITTÉRATURE 475
d’Orléans, en i 632 , de l'archiduc Ferdinand, en i 635 , etc. ; il aimait à
organiser les cortèges, les spectacles, les arcs de triomphe; il y contri¬
buait de ses subsides et en confiait Texécution aux artistes les plus émi¬
nents. Les fêtes de 16 35 , tout le monde le sait, furent dirigées par Ru¬
bens. Par ces belles solennités, il attirait la foule, soutenait le renom de
la ville déchue, y faisait revivre un instant sa splendeur d’autrefois...
Numismate, antiquaire, botaniste, lettré, Rockox devait favoriser de
tout son pouvoir les travaux de l'intelligence... Il est fort peu de sa¬
vants auxquels il ne fit pas octroyer des gratifications *. C'est pour les
artistes surtout qu’il nous apparaît comme un vrai Mécène. Sa grande
fortune lui permettait de se donner la satisfaction de commander des
œuvres aux maîtres de l’Ecole flamande et particulièrement à Rubens. »
Dans les pages suivantes (8-1 3 ) sont rapidement indiquées les rela¬
tions de Rockox avec le grand peintre pour lequel il fut non-seulement
un protecteur dévoué, mais un véritable ami *, et avec Peiresc, qui avait
fait sa connaissance à Anvers vers la fin de juillet 1606. Puis sont re¬
produites (pp. 13-62), d’après les registres des minutes de la correspon¬
dance de ce dernier conservés à la bibliothèque de Carpentras, treize
lettres adressées (9 avril 1606, 16 avril 1626) au magistrat-archéologue
dont la mémoire sera toujours protégée par les grands noms de Peiresc
et de Rubens 3 . Il serait trop long d’énumérer tout ce que renferment
de curieux ces lettres où l’illustre correspondant de Rockox parle de
livres, de plantes, de tableaux, ainsi que de divers hommes célèbres des
Pays-Bas, tel que le duc d’Arschot (Charles de Croy), Laurent Deech^
broot, Gaspar Gevartius, Hubert Goltzius, Abraham Gorlæus, Aubert
le Mire, Rubens, Denis de Villers, Jérôme Van Winghe, etc. 4 . M. Rue-
lens a entouré les lettres de Peiresc de notes abondantes, excellentes.
1. M. R. cite (p. 7}, parmi les amitiés littéraires de Rockox, Philippe Rubens,
André Schott, Louis Nonnius, Gaspar Gevartius, Abraham Ortelius, Juste Lipse,
Aubert Miræus, Gode froid Wendelinus, etc.
2. M. R. n’a pas songé à citer le passage où Gassendi, énumérant les savants avec
lesquels son héros se lia à Anvers {De Vita Peireskii , i 65 i, p. i 3 i), nomme
Rockox avec cette mention honorable : a Cttm Nicolao Roccoxio rei antiquariæ
impense studioso. » De cet éloge je rapprocherai ce que disait Rubens de Rockox
dans une lettre en langue italienne à M. de Valavès, du i 3 juillet 1625 : a C’est un
galant homme et connaisseur en antiquités. Il est bon administrateur, et en tout et
pour tout homme de bien, de la réputation la plus irréprochable, ce qui est bien
connu de M. Peiresc, votre frère ; qui l’a fréquenté personnellement. » ( Pierre-Paul
Rubens . Documents et lettres publiés par Ch. Ruelens, Bruxelles, 1877, p. 04.)
3 . Ces lettres avaient été récemment analysées dans un mémoire de M. Van
Cuyck sur Rockox (Anvers, 1882'. M. R. a eu raison (p. 9) de croire que, malgré
cette soigneuse analyse, le texte original ne serait pas inutilement mis au jour. 11 a
eu d’autant plus raison de le croire, que le mémoire de son compatriote ayant été
écrit en langue flamande est accessible à bien peu de lecteurs.
4. Dans une lettre du 6 mai 1609, Joseph Scaliger, mort le 21 janvier de cette
année, est regardé comme un personnage incomparable par Peiresc, qui, après avoir,
dit : « Je plains bien la mort du pauvre M. Gorlé », ajoute (p. 33 ) : Je plains encore
bien davantage la perte de M. de l’Escalle, car il n’en est point de pareil. »
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REVUE CRITIQUE
476
Quelques-unes de ces notes sont de complètes notices, comme celles qui
concernent les Laurin (pp. 12-1 5 ), le duc d'Arschot et son cabinet de mé¬
dailles, de camées, d’antiquités (pp. 16-26) ’, la généalogie delà maison
d'Autriche par Théodore Piespord (1616, in-f°), livre que Peiresc prit
la peine de réfuter et qui fit grand bruit dans le monde diplomatique
(pp. 44-51). Signalons enfin (pp. 3 y- 3 g) la fort intéressante reproduc¬
tion du récit d’un voyage de M. de Valavez dans les Pays-Bas, récit tiré
d'une lettre inédite écrite par le voyageur à son frère, et où il est ques¬
tion du cabinet de M. Rockox et de sa fameuse médaille de Puella Fans •
tina 9 dont Peiresc, moins heureux, avait eu sous les yeux l’empreinte
seulement, et que, d'après cette empreinte, il appelait avec enthousiasme
(p. 33 ) une < des plus belles médailles qui se puissent veoyr ».
T. de L.
CHRONIQUE
FRANCE. — Le VI e fascicule (novembre et décembre 1882) du Bulletin de cor¬
respondance africaine, publié par l’Ecole supérieure des Lettres d’Alger, renferme
les articles suivants : de M. E. Masquer a y, Inscriptions inédites de Imetterchou,
Henchir Tebrouri, Henchir Bel Quitan, Qçar El Kelb et Bou Tebina, Riren, Ma-
doure, Saguia de Sidi Youcef, Kociba, Tifech, Khomissa, Henchir Cheragrag.Taourga,
Ouad Trouch, Morsot, Cedia, Ouad Abdi ; de M. Victor Waillb, un rapport à M. le
directeur de l’enseignement supérieur sur une excursion à Hammam-Ri g ha ; de
M. de La Blanchére sur Page des gravures rupestres, des inscriptions saturiennes
et de Pécriture lytique; de M. René Basset sur les manuscrits arates des deux
bibliothèques de Fas (catalogue qui prouve que Fas, comme Tunis et Qalrouân, n’a
gardé que peu de traces de son antique splendeur littéraire; M. Basset doit cette
courte liste de livres à l’obligeance du ministre de France à Tanger, M. Ordéga, qui a
fait écrire à Fas à l’agent de notre gouvernement; M. Basset a reçu le catalogue des
manuscrits des mosquées d’El Qarouïn et de Récif et le reproduit tel qu’il lui a été
envoyé, en l’accompagnant de courtes indications tirées pour la plupart du Diction¬
naire de K’adji Hhalfa; selon le jeune érudit, les deux cents volumes contenus dans
cette liste ne doivent pourtant pas représenter la totalité des bibliothèques des deux
mosquées; il faut attendre le jour où l’influence française se fera sentir directement
à Fas, soit par les armes, soit autrement; alors seulement on pourra procéder à l’in¬
ventaire complet des richesses bibliographiques du Maroc); enfin une traduction, par
M. E. Masqueray, du rapport à l’Académie royale des sciences de Berlin sur le
voyage exécuté d’après les instructions de cette société pendant l’hiver de i 88 a-i 883
en Algérie et en Tunisie par M. Johannes Schmidt. Une bibliographie clôt ce fasd-
1. Je recommande aux bibliophiles les pages qui, dans cette riche notice, sont
spécialement consacrées à la description (pp. ig- 25 ) du catalogue des médailles d’or
romaines dueabinet du duc de Croy par J. de Bie (Anvers, i 6 i 5 , in-4 0 . — Seconde
édition, Anvers, 1627L M. R. s’est étendu sur ce sujet parce que la splendide pu¬
blication a été imparfaitement connue des bibliographes des Pays-Bas, à com¬
mencer par Pacquot et à finir par le baron de Reiflenberg.
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d'histoire et de littérature
477
cule; elle est consacrée au XXII e volume du Recueil des notices et mémoires de la
Société archéologique du département de Constantine et au 5 * fascicule du « Bulletin
trimestriel des antiquités africaines ».
— M* René Fagb, un de nos plus laborieux savants de la province, vient de pu¬
blier un important recueil de Lettres inédites de Baluze à M. Melon du Verdier
(Tulle, Crauffon). Ce volume, qui renferme une introduction et des notes, sera pro¬
chainement analysé au complet dans notre Revue.
— Le secrétaire perpétuel de la Société des sciences, lettres et arts d’Agen,
M. Adolphe Magrn, vient de publier une étude intéressante sur François Philon et
son Virgile évangélisant (Agen, Lamy. In-8°, 24 p ); il y raconte ce qu’on sait de
la vie de l’avocat-poète d’Agen, analyse son Virgile évangélisant qui parut en i 638
et sa traduction en vers de VEnéide publiée en 1640 à Agen, non pas chez Garjon,
comme on lit dans le «c Manuel du libraire », mais chez Jean Gayau.
— M. A. Legrelle, docteur ès-lettres, a publié une troisième édition, corrigée et
augmentée, de son ouvrage Louis XIV et Strasbourg, essai sur la politique de
France en Alsace, d’après des documents officiels et inédits (Paris, Hachette. In-8°,
xv et 786 p. 7 fr. 5 o).
— Le tome VIII du Molière de la collection des a Grands écrivains de la France »
(Hachette. In-8°, 602 p.) renferme Le bourgeois-gentilhomme. Psyché , Les four¬
beries de Scapin et La comtesse cCEscarbagnas ; un de nos collaborateurs en rendra
compte prochainement.
—11 vient de paraître à la librairie Plon, Nourrit et C ia , un volume sur Théo¬
phraste Renaudot (in-8°, iv et 3 i 6 p.). L’auteur, M. G. Gilles de La Tourette, a
puisé de précieux documents dans ses papiers de famille et des manuscrits jusqu’ici
inconnus; il est, dit-il, deux façons d’écrire l’histoire d’un homme : prendre Renau¬
dot à sa naissance, l’étudier dans son développement, le conduire au tombeau; tout
cela, au point de vue du personnage, eût pu paraître fastidieux, malgré l’intérêt du
sujet. Nous avons préféré placer l’homme au milieu de son époque et faire une large
part à l’histoire de son temps et à celle de ses relations. C’est ainsi que nous avons
été amené à touiller les rapports si intimes et si curieux qui ont existé entre le
P. Joseph et Richelieu, tous les deux amis du journaliste. De même, pour ses inven¬
tions, il nous a semblé bon de rechercher si elles répondaient alors à un besoin
d’actualité, de remonter à leur origine et de les suivre dans leur évolution. Voici la
division des chapitres : I. Une ville protestante au commencement du xvu* siècle
(Loudun) ; II. La misère au xvu* siècle (Renaudot fonde le « Bureau d’adresse ») ;
III. La Galette; IV. Un essai de faculté libre au xvu siècle; première phase du
procès entre Renaudot et la faculté de médecine; V. Deuxième phase du procès;
VL Troisième phase du procès; VII. Renaudot et Ma\arin\ VIII. La Galette pen¬
dant la Fronde; IX. Fin de la guerre de Vantimoine.
—. M. Charles Henry a fait tirer à part du « Bullettino di bibliografia e di storia
delle scienze matematiche e fisiche » (tomo XV, novembre 1882) une étude très in¬
téressante sur Les connaissances mathématiques de Jacques Casanova de Seingalt.
Le fameux auteur des Mémoires n’a rien éclairci ni rien découvert en mathémati-
tiques; mais ses écrits scientifiques ne laissent pas d’être curieux; ils sont d’ailleurs
ou inédits, ou, lorsqu’ils sont publiés, à peu près introuvables. Grâce à ses patientes
recherches et aux renseignements que lui ont fournis MM. H. Brockhaus, le comte
de Waldstein et le docteur Forstmann, M. Henry a pu donner le titre des écrits
mathématiques du célèbre aventurier. Ils sont au nombre de trois, tous trois relatifs
au problème de la duplication du cube : x° Solution du problème déliaque;2° Co¬
rollaire à la duplication de Vhexaèdre; 3 ° Démonstration géométrique à la duplica-
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HfiVUE CRITIQUE
47*
tion du cube, corollaire fécond. M. Hsnry donne, dibS des notes copieuses tt lus*
tructlves — qui occupent les deux tiers de chaque page* **■ là liste des tttsmplairN
de ces opuscules qui existent encore dans les bibliothèques publiques et partlctt*
Hères» En outre, dit M. Hertry, il y a des réflexions mathématiques dans les deux
écrits suivants qui n ont jamais été publiés et qui oht été acquis par là malaoa
Brockhaüs t t* Essai sur les mœurs, sur les sciences et sur les arts (lie pages In-
folio) ; 2. Rêveries sur la mesure moyenne de noire année selon là réjbrmation gré*
goriinne( 36 pages in-folio). Enfin, U faut ajouter à la liste des écrits mathémati¬
ques de Casanova une Logarithmique de Son invention dont il parle dans soA
» Corollaire è la duplication de l’hexaèdre • et qui n’a pu être retrouvée dans \m
papiers do Casanova» è Dux, château du comte ds Waldstein, dont l'aventurier était
devenu le bibliothécaire. M. Henry analyse ces écrits de Casanova) il cite dts ra»
marques judicieuses et de sages réflexions qui se trouvent dans la Solution du J**»»
blême déliaque et en particulier la conclusion de ce mémoire, intitulée VEsprit du
géomètre ; on y rencontre des passages qui rappellent VEsprit géométrique de rts*
cal. Ajoutons que M* Henry démontre, d’après une lettre que lui a adressée M. Fs*
varo, que Casanova, quoi qu’il en ait dit, n’était nullement a docteur On droit tt
utroquo jure » do l'Université de Fadoue. M. Henry prépare Une Etude sur Jacques
Casanova de Seingaît que nous attendons avec impatience.
—*■ Deux volumes nouveaux ont paru dans IA collection illustrée (à t franc le vo*
lume) que publie la librairie Léopold Cerf : L'armée romaine > par M. Léon F oit*
t Alite» professeur à la Faculté des lettres de Lyon» et ta Révolution fi-ançalse (tj8g-
1804), par M. G. Dhoubrbs» professeur au lycée Henri IV. On sait qui cette collet»
tion compte» permises volumes précédents» le Siège de Bel fort, parM.L Dvbsîèu* ,
un Tableau de la littérature anglaise, par M. Léon Boucttàà) Les rates humaines i
da M. Abel Hovblacoüb; Lès Basques et te pays basque » deM. Julien Virson, etc.
— A la môma librairie a paru tout récemment Le général Chantf, tiu3*t883 %
par M. Arthur CHoquet. (In-8», 439 p. svec un beau portrait et quatre cartes. 3 fr,
fto») Cette biographie complète d’un de nos plus grands hommes dé guerre se diviM
ainsi ! Avant la guerre (pp. 3 - 35 ); — La gnerrê (pp. 39-202) cinq chapitres ainsi
intitulés t Orléans , Josnesi Vendôme, Le Mans , Lavai et Bordeaux)', — La Commune
(pp. tOb*tio)\^Chan\y à l 9 Assemblée nationale et au sénat {p p. 113 * 257 );— Chanqy^
gokverneur+général de l'Algérie (pp. 261*337); -* Chanqy, ambassadeur en Russie
(pp. 341-349)) — Chanff, commandant de Corps d’drmée (pp. 35 i- 363 ); ■** Mort
et funérailles de Chan^y (pp. 367-382); — Chanqy, son caractère et son génie
(pp. 385 - 439 ). Nous reviendrons prochainement sur ce livre que l'auteur a dédié k
Ses compatriotes des Ardennes (Chan ty est né à Nouaft, dans l'arrondissement do
Vouxiers) et qui est, à certains égards, une œuvre d'histoire autant qu’une œuvre d«
patriotisme.
— La librairie militaire de L. Baudoin et O* (humaine) vient de publier les Œu¬
vres militaires du maréchal Bugeaud, duc ttJsly, réunies et mises en ordre per
M. Wjsil, ancien capitaine de cavalerie (ln*8®, 3 gi p. avec 7 planches, 7 fr. 3 o)«
— Le commandant F. Borhet vient de publiera la même librairie (fn-8*, 418 p<
et 6 planches le troisième volume de son excellent ouvrage sur la Guerre franco*
allemande , résumé et commentaire de Vouvrage du grand état-major prussien,
~ On trouvera dans l’étude que M Henri Conbifet vient de faire paraître sous la
titre Le consulat de France à Hué sous la Restauration (Paris» Leroux. In*8 6 ;
1Î4 p.) de nombreux et intéressants documents inconnus jusqu'ici et tirés par la
savant sinologue des archives des départements des affaires étrangères» de la marina
et des colonies» U y est question de Philippe Venise st surtout de es àhaignatu qui
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DHISTOlflK Et DK LITTÉRATURE 479
l’était, tous U Révolution, rendu en Cochinchine et y avait rendu de signalé* ser¬
vices à GiaMong qui l’avait élevé ft la dignité de grand mandarin. Lorsque la Res¬
tauration, reprenant la tradition de Louis XVI interrompue pendant là Révolution et
le premier Empire, chercha à renouer dee relations avec les pays d’Extrême- Orient,
et appuya successivement trois expéditions commerciales en Cochinchine, Chaigneau
partit pour la France et vint donner au gouvernement d’utiles informations (novembre
idt9)|en 1810, il fut nommé consul à Hué; mais, à son retour, il apprit la mort de
Giaiongiêon protecteur et son ami. Lé successeur de Gia-long, Minh-mang refusa
d'accorder à la France les avantages que Chaigneau demandait pour elle ! notre consul
quitta Hué à la fin de Tannée 1824; il tomba gravement malade à Saigon, et ce ne
fut qu’au mois de mars 1815 qu’il put s'embarquer à Singlpore pour rentrer défi¬
nitivement an France. Son neveu fut, après lui, nommé vice*consul ; mais ses efforts
furent également stériles. La France n'a pris que sous Napoléon Iii en Cochinchine
la position qu’elle devait y prendre; espérons, dit M. Cordler, que le gouvernement
actuel ne faillira pas à la tâche qui lui incombe et que, puisant dans les leçons de
ThiStôlfe une force nouvelle. Il répondra à ceux qui cherchent à l'arrêter dans la
voie où il est engagé, qü'il n’est que l'héritier de droits longtemps acquis. On lira
avec le plus vif intérêt dans le volume, si actuel, de M. Cordier le* instructions
données en octobre !8«o à Chaigneau par le ministère des affaires étrangères
(pp. 39-44) et, à l’appendice, le texte du traité signé à Versailles le 28 novem¬
bre 1787 entre l’évêque d’Adrfth, pour le roi de la Cochinchine Nguyért-Anh, et le
ministre des affaires étrangères Montmorin.
— M. Marius Vachort, rédacteur & la FraMê, a reçu la lettre Suivante de M. l’abbé
Camille de la Croix. a Poitiers, sa novembre. Monsieur, en raison de l'intérêt
particulier que vous avez bien voulu accorder, à diverses reprises, aux fouilles de
Sanxay, je prends la liberté de vous signaler la situation actuelle de la question de
la conservation de ces ruines. Je suis contraint, par voles judiciaires de la part d’un
des propriétaires, à démolir de fond en comble le temple, le balnéaire et le théâtre
et de remettre les lieux en état de culture. Un procès est engagé, depuis le to sep¬
tembre, à ce propos, devant le tribunal civil de Poitiers. L’archéologie en justice, le
cas est rare et piquant. Vous en conviendrez. De toutes façons d'âîlleurs, et en tout
état de Causes, je ne pouvais décliner cette juridiction très spéciale. Si, en effet,
j’avais obtempéré auï sommations dé ce propriétaire et mis de la dynamite dans les
ruines de Sanxay, je m'exposais à me voir poursuivi en dommages intérêts par
l'Etat, qui possède, depuis le mois de janvier dernier, des promesses de vente iahS
délai, et qui s’est substitué ainsi à moi. J’affronte donc aujourd’hui, sans peur et sàtll
reproche, la barre d’un tribunal civil. Mais les juges admettront-ils, en faveur d’un
plaideur, les raisons qui ont valu à l'archéologue, devant tant d’autres tribunaux,
gain de cause absolue pour la conservation des ruines de Sanxay aujourd’hui si
menacées? Car vous savez, monsieur, que la commission des monuments historiques
a alloué, le 5 juin dernier, une Somme de 10,000 francs pour la conservation dé
Sanxay, et a invité le ministre de l'instruction publique et deS bcaUx-dfts À acCOtdef
Uh crédit supplémentaire. La commune de Sanxay a voté Un subside pouf cette
conservation; le conseil général de la Vienne a voté, de son côté, une somme dé
1,000 fr. dans ce même but. La Société des antiquaires de France, le Congrès ded
architectes de France, dans sa séance solennelle du 1$ juin dernier, ont émis le
Vftu de l’acquisition par l’Etat des ruines de Sanxay. À l’instigation de la Société
d’histoire du VéXlfl et de l’Ile-de-France, toutes les Sociétés archéologiques des dé¬
partements lignent, en ce moment, tiâe pétition au ministre de l'instruction publique
et des beaux-arts pour hâter cette acquisition. La situation actuelle est donc fort
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REVUE CRITIQUE
480
grave. La conservation de Sanxay dépend, comme vous voyez, d’un arrêt de tribunal.
Je viens faire appel à votre dévouement en faveur de Sanxay, dont vous vous êtes
déjà si longuement occupé. Vous avez eu la bonne fortune de défendre, avec succès,
la cause de la Porte-Saint-Georges de Nancy, celle du Mont-Saint-Michel. Vous avez
le devoir de défendre aujourd’hui la cause de Sanxay. »
— La soirée d’inauguration du nouveau local de la Société historique (cercle
Saint-Simon) a eu lieu le samedi 24 novembre, à huit heures et demie du soir;
M. Coquelin aîné et d’autres artistes de la Comédie-Française y ont donné leur
concours. Le mercredi 4 novembre, à sept heures du soir, a eu lieu le premier dîner
mensuel du cercle (prix, 7 francs).
— Le 28 octobre i 883 est mort le cardinal Henri-Marie-Gaston de Bonnechose,
archevêque de Rouen; il était né à Paris le 3 o mai 1800; ses mandements, instruc¬
tions et lettres pastorales ou discours ont paru dans le tome XVII de la collection des
orateurs sacrés, éditée par l’abbé Migne ; il avait publié la correspondance religieuse
de l’abbé Bautain, sous le titre de Philosophie du christianisme (2 volumes, i 835 ).
— Nous apprenons également la mort ( 3 o septembre de M. Paul Emile Giraud,
né à Romans le 27 novembre 1792, député de la Drôme, de i 83 i à 1846, et auteur
d’un Essai historique sur t*abbaye de Saint-Bernard et sur la ville de Romans (4 vo¬
lumes, 1856-1866); — de M. Martin Bernard (22 octobre), auteur de Dix ans de
prison au Mont-Saint-Michel et à la citadelle de Daullens (i 85 i-i 852 ).
ALLEMAGNE. — La librairie Hirzel, de Leipzig, vient de faire paraître ; une nou¬
velle édition du Delectus inscriptionum graecarum propter dialectum memorabilium
de M. Paul Cauer; une Tonpsychologie de M. Karl Stumpf (premier volume); la
troisième partie des Untersuchungen \u Cicerosphilosophischen Schriften % de M. Ru¬
dolf Hirzel (renfermant les Academica prioraet les Tusculanae disputationes , avec
un index des trois volumes); une deuxième édition de l’ouvrage de M. Adolf Tobler,
Vom fran^œsischen Versbau alter und tieuer Zeit ; un livre de M. Aug. Stadler
sur la théorie de la matière dans Kant, Kant*s Théorie der Materie ; une étude de
M. S. M. Deutsch sur Abélard, Peter Abælard , ein kritischer Theologe des çwœlflen
Jahrhunderts ; un volume d’essais et d’études sur l’histoire religieuse (Kleine Schrif-
ten religionsgeschichtlichen Jnhalts), de M. Ad. Hausrath; un livre posthume de
feu Reinhold Pauli, Aufsœt^e %ur englischen Geschichte (Durham ; la formation du
royaume uni; Henri V de Lancastre; les débuts de Henri VIII; Thomas Cromwell,'
le marteau des moines; les vues de la maison de Hanovre sur le trône d’Angleterre
en 1711 ; Sir Robert Peel; Bunsen); enfin, de M. Ernst Windisch, Zwœlf Hymnen
des Rigveda mit Sayana f s Commentar , Text, Wœrterbuch %u Sayana , Appendices .
— MM. W. Hirschfelder, H. Heller et G. Andresen abandonnent, à la fin de
cette année, la rédaction de la Philologische Wochenschrift , éditée à Berlin par la
maison Calvary.
— M. Otto Behaghel vient de publier à la librairie Reuther, de Carlsruhe, un
recueil de lettres de Hebel, à K. Th. Gmelin, à ses amis de Strasbourg et à Justin
Kemer; le volume renferme le portrait de Hebel.
— U Histoire du lied , de M. Schuré, a été, comme on sait, traduite en allemand,
sous le titre : Geschichte des deutschen Lie de s ; cette traduction vient d'avoir une
troisième édition ; elle a paru à Minden, chez Bruns, avec une introduction de
M. Stahr et une préface de M. Schwebel.
— Deux nouveaux fascicules de la collection des « Franzœsische Studien, de
MM. Kœrting et Koschwitz, viennent de paraître : Boileau-Despréaux im Urtheite
seines Zeitgenossen Desmarets de Saint-Sorlin , par M. W. Bornemann, et Voca-
lismus und Consonantismus des Cambridger Psalters t par M. W. Schumann.
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d'histoire et de littérature 481
— M. Erich Schmidt, professeur à l’Université de Vienne, l’auteur de Henri Léo¬
pold Wagner , de Lenq und Klinger et de tant d’autres monographies importantes
relatives à la littérature allemande du xvm® siècle, publiera prochainement à la li¬
brairie Weidmann, de Berlin, le premier volume d’un grand ouvrage sur Leasing :
Les s in g, Geschichte seines Lebens und seiner Schriften .
— Le feu comte W. F. de Redern, « Oberstkœmmerer » de l’empereur d’Alle¬
magne, a laissé une autobiographie qui doit bientôt paraître sous ce titre : Unter drei
Kœnigen.
— La commission historique de l’Académie des sciences de Munich avait ouvert
un concours sur la question suivante : Geschichte des Unterrichtwesens in Deut -
schland bis %ur Mitte des XIIL Jahrhunderts. Deux mémoires ont été couronnés; le
premier est de M. F. A. Specht, de Munich, qui recevra un prix de i 5 oo mark; le
second, de M. P. Gabriel Meier, d’Einsiedeln, qui obtient un prix de 1000 mark.
M. Specht recevra i 5 oo mark de plus s’il corrige les fautes de son mémoire et le
présente de nouveau à la commission historique avant le i* r juillet i 885 .
— L’histoire des guerres de 181 3 et 1814, que les Allemands nomment les guerres
de la liberté, a été écrite, comme on sait, par le major Henri Beitzke (Geschichte der
deutschen Freiheitskriege in den Jahren 18 / 3 und 1814). Cet ouvrage, arrivé à sa
troisième édition du vivant de l’auteur, vient d’être remanié considérablement par
M. Paul Goldschmidt qui l’a mis au courant de la science historique et l’a fait tout
récemment paraître à Brême, chez l’éditeur M. Heinsius. Cette quatrième édition de
l’ouvrage de Beitzke renferme deux volumes (vu et 5 12 p., xii et 404 p. avec des
cartes et des esquisses en grand nombre ; prix, 9 mark).
— Doivent prochainement paraître à Munich, chez Ackermann, Die Reiter und
die Centuriae equitum qur Zeit der rœmischen Repubiik , par Bernh. Gerathewohl
et Malteser Urkuttden und Regesten qur Geschichte der Tempelherren und Johan -
niter, par Hans Prutz; à Berlin, chez Dummler, Charakterbilder aus dem neun~
çehnten Jahrhundert, biographisch-kritische Essqys, par Leop. Katscher; à Leip¬
zig, chez Hirzel,£uc/i der Richter und Ruth, parE. Bertheau; à Bonn,chez Neusser,
Geschichte des Vaticanischen Concils, par J. Friedrich (a* volume); à Schwerin,
chez Schmale, Kœnig Friedrich I von Preussen, Beitræge qur Geschichte seines
Hofes sontie der Wissenschaften % Künste und Staatsverwaltung seiner Zeit , par
C. baron de Ledebur (2® volume); chez Wigand, à Leipzig, Iwan Turgenjew , eine
litterarische Studie, par Eug. Zabel; chez Weidmann à Berlin, Deutsche Reime,
Inschri/ten des fünfqehnten Jahrhunderts und der folgenden , recueillies par H.
Draheim.
— Depuis le 4 novembre paraît à Leipzig, et à Vienne une nouvelle revue, la
Deutsche Wochenschrift , Organ für die gemeinsamen nationalen Interessen Oester -
reichs und Deutschlands; cette revue a pour directeur M. Heinrich Friedjung; le
1 er fascicule renferme des articles de MM. Binz, Erich Schmidt, Karl Prœll, Richard
Lesser, Paul Schlenther, Joh. Prœlss, F. Lemmermayer et une poésie de Ad. Pich-
ler. La Revue donne des télégrammes et les nouvelles les plus récentes, une chroni¬
que politique et un grand nombre de mélanges. Elle veut servir de a pont politique
entre les deux monarchies et provoquer un actif échange entre l’Allemagne et l’Au¬
triche sur tous les domaines de la vie politique et intellectuelle ». Parmi les autres
collaborateurs de la Deutsche Wochenschrift , on cite les noms de MM. Hans Dbl-
brücx, Franz von Liszt, Albert Haenel, Ad. Horawitz, V. von Kraus, Ottokar
Lorenz, Karl von Th ALER,Josef Bayer, A Bettelheim, K. E. Franzos, Rob. Hamer-
ling, Hermann Lingg, Fritz Mauthnbr, J ulius Stettenheim, Karl Stieler, W. Wat-
tinbach, etc. Prix de l’abonnement, 4 mark 5 o par trimestre.
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REVUIi CRITIQUE
48a
—* Nous apprenons avec le plus vif regret la mort de M. Arnold Sgkasver, pro¬
fesseur d’histoire à l’Université de Bonn. Une attaque d'apoplexie l’a enlevé, le »o no¬
vembre, à ses amis et à la science, il était né à Seehausen, près de Brême, le 16 octo¬
bre 1819; il avait suivi les cours de TUniversité de Leipsig. et. après avoir professé
l’histoire dans divers établissements d'enseignement secondaire, il avait été appelé*
en 1 858 , à l’université de Greifswald, puis, en i 865 , à celle de Bonn. U avait com¬
posé les ouvrages suivants : De libro vitarum X oratorum (Dresde, 1844); De Kpho*
ris Lacedaemoniis (Leipzig, 1 863 ) ; De rerum post bellum persicum usque ad fricot*
naïf fœdus in Graecia gestarum temporibus (Leipzig, 186S); mais ses enivras les
plus remarquables sont son Demostkène et son temps , paru en trois volumes (Leipzig,
1 856 '»! 858 ), et son Histoire de la guerre de sept ans, an deux volumes (Berlin*
1867-1874), d’après les archives de Vienne, de Berlin, de Paris et de Londres; il
avait publié, en outre, une Esquisse* des sources pour l'histoire grecque et romaine,
Abriss der Quellenkunde der grieckisehen und rcsmischen Gesehichte (Leipzig, 1867}
2 e édit., 1873; 3 ° édit., 1881). Arnold Schaefer avait été notre collaborateur, et lee
lecteurs de la Revue critique ae souviennent encore de son article eur les Mémoires
de Demis .
GRANDE-BRETAGNE. — La maison Trûbner commencera, la semaine pro¬
chaine, la publication de trois collections destinées au grand public, et relatives
aux littératures des principales nations de l'Orient, sous le titre général de Eastem
Classics for Western Reader s. La première de cea collections sera consacrée à la
littérature hindoue et sera dirigée par M. P. PrrxasoH, du collège Ephlnatone, de
Bombay. Elle renfermera des volumes sur : fie Vida; fl* drame; 3 * la littérature
des fables; 4° proverbes; 5 ° lyrique ; 6» épopée . La deuxième de ces collections sera
consacrée à la littérature de l’Asie et de la Perse; la troisième, à celle de la Chine
et du Japon. Chaque volume se vendra séparément ; le prix ne dépassera pat cinq
shillings.
— M. H. G. Dakyws vient de terminer une traduction des Helléniques de Xéno-
phon.
— Les éditeurs W. Swan Sonnenschein annoncent la publication prochaine des
ouvrages suivants relatifs au foik-lore : Folklore of modem Qraece , per M. E. M.
Geldakt; Folk-Tales of Austria and Bohemia, de Vemaleeken, par M. E. JoHirsoiv,
Kisuaheli Folk-Tales , par M. Oglb; enfin, un recueil de Gipsy Folk-Tales , par
M. W. E. À. Axow, une nouvelle édition des Fairy Legend and Traditions of Ire -
land, de M. Cropton Crokbr, avec une introduction et un commentaire de M. Fitz¬
gerald, et un Book of English Fairy Taies , de M. Fryer.
— M. Robert Scott Fittis, de Perth, doit publier un ouvrage intitulé Ecclesfastical
Annals of Pertk io the period of tke Reformation .
RUSSIE. — L'université de Moscou compte 2,430 étudiants; eelle de Saint-Péters¬
bourg, j,o 5 aj celle de Kiev, 1,475; celle de Dorpat, 1,426; eelle de Varsovie, i,oo 3 .
Kaxan a le plus grand nombre de professeurs (109) et Varsovie la plus belle biblio¬
thèque ( 36 *.000 volumes).
-1- Les journaux russes annoncent la mort de M. Vieronov, conservateur de la bi*
bliothèque publique de Moscou. Il avait rendu de grands services à cette Importante
collection et laisse de nombreux travaux sur les manuscrite sla von s russes et la bi¬
bliographie.
— M. Dvarsky vient d’envoyer à la commission archéographique de Fétcr t bo ar g
un travail Inédit : Acta et litterae ad kistoriam missionum eatholicarum spectantla. H
paraîtra prochainement avec traduction en langue russe.
Nous apprenons la mort de M. N. MooRKAzavicff, auteur d'une Histoire de 9 â
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d'histqirb et de littérature 483
colonie génoise en Crimée et d’ouvrages divers sur l'ethnologie, les antiquités et la
numismatique dç la Russie méridionale; il avait publié également des Documente
historiques relatifs à la vie et à Vépoque de Potemkin et des Matériaux pour Vhts-
toire des guerres entre les Russes et les Turcs durant le dernier siècle .
SLAVES MÉRIDIONAUX. — La Revue slovène de Laybach Zvon (la Cloche) pu¬
blie dans ses derniers numéros des matériaux intéressants pour l'étude du folklore
slave : des contes de la Carniole supérieure recueillis par M. Tidina et une étude de
M. Wiesthalbr sur le Vlkodlak (loup garou) et le vampire dans la tradition
slave.
SUISSE. — Nous avons appris la mort de M. Amédée Rogbt, professeur
d’histoire de la Suisse à l’Université de Genève; il n'avait que 58 ans. On connaît
ses travaux sur l'histoire de Genève ; dans les Suisses à Genève (2 vols.),il a décrit
la lutte de la petite république contre la maison de Savoie, de 1474 à i 536 ;
son Histoire du peuple de Genève depuis sa réformation jusqu*à VEscalade comptait
déjà sept volumes.
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES*
Séant* du 3o novtmbrê tSS3.
L’Académie procède à l'élection de deux membres ordinaires, en remplacement de
MM. Laboulaye et Defrémery. Le scrutin donne les résultats suivants :
En remplacement de M. Laboulaye ;
M. Paul Meyer......... 19 voix.
M. Benoist.., 10
M. de Rosny,...... a -~
M. Maspero..,...,....,,.,... . \ —
M, Schlumbcrger..... 1 —
1 bulletin blanc.
En remplacement de M. Defrémery :
M. Maspero...
M. Schlumberger.
34
r r tour. a* tour.
17 voix, $1 voix.
17 - l -
34 I4
MM. Meyer et Maspero sont élus.
M. Auguste Nicaise fait une communication intitulée : le Tumulus d’Attav court
(Haute-Marne). L'exploration de ce tumulus, faite il y a vingt ans, en i 863 , a donné
plusieurs brassards ou armilles et bracelets de bronze» un anneau de jambe, formé
d'une tige de bronze en partie ciselée» deux torques et deux pointes de flèche de
même métal. M. Nicaise met la plupart de ces objets sous les yeux des membres de
Ë Académie, et fait ressortir l’intérêt que présente celte découverte au point de vue
de la connaissance des antiquités dites préhistoriques.
Ouvrages présentés : — par M. P.-Ch. Robert -
çaises; — par M. G. Perrot : i° Choisv ( a **~ '
Albert (Maurice), le Culte de Castor <
régnante Augusto (thèses de doctorat ès lettres); 3 ° Guiraud (Paul), De la condition
des alliés pendant la première confédération athénienne ; — par M. Gaston Paris i
i° Gasté (Armand), Noels et Vaudevires du manuscrit de Jehan Porée ; 2 0 Person
(Léonce), les Papiers de Pierre Rotroude Saudreville ; — par M. Dell si e : i° Docu¬
ments inédits pour servir à la biographie de Scheepflin , publiés par C. Schmidt ;
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484
REVUE CRITIQUE d'hISTOIRB ET DE LITTÉRATURE
2 0 Stuart (Marie), Poésies françaises , publiées par Gustave Pawlowski; 3 ° Bapst
(Germain), Imprimerie et Reliure ; 4 0 le Premier registre de Philippe-Auguste , re-
Ê roduction héliotypique exécutée par Martelli, sous la direction de M. Léopold
lELISLE*
Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 14 novembre i 8 S 3 .
M. Courajod communique de nouveaux détails sur le groupe de Pégase, de la col¬
lection d’Aubras, dont il a précédemment entretenu la Société. Lors d’un récent
voyage à Vienne, il a pu se convaincre de la parfaite ressemblance de cet ouvrage
avec ceux de Bertoldo, l’élève favori de Donatello. 11 regrette de ne pouvoir placer
sous les yeux de la Société une photographie de cette pièce curieuse.
M. Gaidoz, dans une lettre adressé à M. de Barthélemy, appelle l'attention des
membres de la Société sur la description qu’un journaliste anglais vient de donner
du parc de Yellow Stone. Pour percer une route à travers les rochers d’Abridienne,
on a allumé de grands feux sur ces masses et, quand elles ont été suffisamment
dilatées par la chaleur, on les a inondées d'eau froide. Les blocs se sont fondus et
brisés, et on a fait un chemin de voiture d’un quart de mille de long sur ce verre
volcanique. 11 est intéressant de comparer ce fait à l’histoire du passage des Alpes
par Annibal et de le joindre aux documents relatifs aux fers vitrifiés.
M. de Barthélemy communique, en outre, de la part de M. Michel, conservateur-
adjoint du musée d*Angers, la photographie d’une dague trouvée près de cette ville;
— de la part de M. Nicaise, une liste de sigles figulaires découverte dans le départe¬
ment de la Marne et faisant partie de la collection de l’auteur; — de la part de
M. Leclerc, des détails sur l’antiquité de la butte de Vaudemont; — enfin, de la part
de M. Coumbay, une note sur les sépultures de la Chypre.
M. Max Verly présente un ustensile en bronze, de forme ovoïde, trouvé à
Reims.
Séance du 21 novembre .
M. de Barthélemy dépose un mémoire de M. de Baye sur les sujets du règne
animal dans l’industrie gauloise.
M. Bertrand place sous les yeux de la Société une curieuse plaque de ceinturon
découverte à Watsch (Carniole) et faisant partie de la belle collection du prince de
Windisch-Gratz, on y voit le combat de deux cavaliers accostés de deux fantassins.
M. Bertrand croit reconnaître deux Gaulois du Danube.
M. Courajod signale l’existence au Musée des Antiquités silésiennes à Breslau,
d’une suite de médaillons de cire représentant les principaux personnages de la cour
des Valois: cette suite exécutée antérieurement à 1573, contient notamment les por¬
traits de Clément Marot et du chevalier Olivier.
M. de Barthélemy lit, au nom de M. de Boislisle, une note sur une enceinte forti¬
fiée existant dans la forêt de Montmorency.
M. Flouest annonce la découverte, dans l’arrondissement de Chatillon-sur-Seine,
d’un poignard offrant les plus grandes analogiès avec celui qui a été récemment
trouve à Angers.
M. Nicaise examine une série d’objets antiques découverts près de Reims.
Le P. de la Croix présente une statuette de Mercure trouvée à Sanxay. M. de Vil-
lefosse est disposé à croire que ce petit bronze se rattache à l’Ecole Polydéléenne.
M. Rayet y reconnaît la copie de l’Hermès de Polyclète.
E. Mûntz
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy, imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, 3 S.
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stokes : l’auteur du compte-rendu a comparé mot pour mot l’édition de
Zimmer et le manuscrit des gloses de Wurzbourg qui remplissent les
deux tiers de l'ouvrage; il loue Zimmer d’avoir donné une liste plus
complète que Zeuss et Ebel, ainsi que d'avoir copié complètement les glo¬
ses [sauf neuf]; mais il n'y a pas une page en moyenne où Zimmer n’ait
oublié, ajouté ou confondu les caractères, laissé de côté ou mis fausse¬
ment des longues, uni des mots qui doivent être séparés ou inverse¬
ment; il est impossible d’établir le principe d’après lequel Zimmer a
constitué son texte. Il y a un certain nombre de fautes qui viennent
d'une grande négligence en copiant et de singulières idées sur la lati¬
nité; enfin, Zimmer a transformé en mots irlandais des mots latins
mal écrits; il n’a pas les connaissances nécessaires de paléographie
latine; « nous espérons, mais nous ne nous y attendons nullement» que
l’auteur, s’il lit cet article, sera désormais un peu plus indulgent envers
ses collègues d’Allemagne et de France »). — Jahresbericnt liber die
Erscheinungen auf dem Gebiete der cermanistischen Literatur. IV.
(Utile). — Crüeger, Der Entdecker der Nibelungen. (Ce serait le chirur-
! ;ien de Lindau Obereit; mais, malgré le style prétentieux de l'auteur,
e mérite de la découverte restera à Bodmer, qui a employé Obereit
comme « manœuvre ».)
Deutsche Litteraturzeitung, n° 47, 24 novembre i 883 : Klostermann,
Problème im Aposteltexte neu erôrtert. — Lobstein, La notion de la
préexistence du nls de Dieu, fragment de christologie expérimentale. —
Dithey, Einleitung in die Geisteswissenschaften. — Gumplowicz, Der
Rassenkampf, sociologische Untersuchungen. (W. Lexis : servira d’an¬
tidote contre une conception trop sentimentale et à la « quaker » de la
vie des hommes et des peuples ; l’auteur ne manque pas d’esprit et de
sagacité; mainte observation remarquable; mais le point de vue est
étroit ; l’ouvrage provoquera de tous côtés des contradictions.) — Auf-
farth, Die platonische Ideenlehre. (Heitz : en reste aux résultats de
Cohen; revendique trop pour Platon une sorte d’infaillibilité; ne donne
pas encore le dernier mot.) — Ehr. Schultz, Ueber das teleologische
Fundamentalprincip der allgemeinen Paedagogik. — Zbltel, Theokritis
Humor. (E. Hiller : écrit sans prétention; chaud enthousiasme pour
Théocrite; peu de critiques à faire.) — A Gellii Noctium Atticarum
libri XX p. p. Martin Hertz. I. (H. J. Müller : œuvre qui a coûté
beaucoup de peine à son auteur; grand service rendu à la science; beau
présent fait aux * Fachgenossen » ; pendant près de 40 ans. Hertz a
recueilli, rassemblé, cherché, poli et repoli, avant de terminer son tra¬
vail.) — A. Meyerhôfer, Die Brücken im alten Rom, ein Beitrag zur
rômischen Topographie. (H. Jordan : ne connaît pas a la grammaire
élémentaire de la science », ne sait rien des découvertes si importantes
faites en 1878 et en 1879.) — F. W. L. Schwartz, Pràhistorisch-an-
thropologische Studien, Mythologisches und Culturhistorisches. (E. H.
Meyer : renferme 42 études et dissertations de diverse étendue; à con¬
sulter.) — Annales Bertiniani, rec. G. Waitz. (Meyer von Knonau.)
— O. Harnack, Das Kurfürstencollegium bis zur Mitte des vierzehnten
Jahrhunderts, nebst kritischem Abdrucke der âltesten ÂufFertigung der
Goldenen Bulle. (H. Bresslau : travail très recommandable et très utile,
mais l’auteur n’a pas donné une édition réellement critique de la Bulle
d’Or.) — G. Duruy, Le cardinal Carlo Carafa, iSig-iSoi, étude sur le
pontificat de Paul IV. (Brosch : livre soigneusement travaillé, écrit avec
agrément, qui répand une lumière nouvelle sur le pontificat si intéres¬
sant de Paul IV; on ne peut reprocher à l’auteur que de n’avoir pas
consulté les documents anglais, Turnbull, Rawdon Brown et Froude.)
—Kunst im Hause, IL Abbildungen von Gegenstànden ausder mittelal-
terlichen Sammlung zu Basel, herausg.und miteiner Einleitung versehen
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von Moritz Hbyne. — Capitularia regum Francorum, denuo edidit
Boretius. (R. Sohm : excellent, fait avec sûreté; € ein wissenschaftliches
Kunstwerk ».) — F. G. A. Schmidt, Handelsgesellschaften in den deut-
schen Stadtrechtsquellen des Mittelalters. (Stieda.)
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 46, 16 novembre 188 3 : Karl Budde,
Die biblische Urgeschichte. Gen. 1-12, 5 , untersucht (P. de Lagarde :
remarques de détail). — Wellhausen, Prolegomena zur Geschichte Is-
raels, zweite Ausgabe. Band I (Jlilicher : le livre a été considérablement
enrichi ; beaucoup d’améliorations qu’on saluera avec joie).
N° 47, 21 novembre i 883 : R. Becker, Der altheimische Minnesang
(W. Wilmanns : les principaux résultats du livre sont les suivants : le
Minnesang se développa dans le sud-ouest de l’Allemagne sous l’in¬
fluence et d’après le modèle de la lyrique romane, pendant qu'une poé¬
sie d'amour « autochtone » florissait en même temps et d’elle-même
dans les pays du sud-est; remarques en général dignes d’examen; mais
on ne peut approuver l’usage qu'en fait l'auteur; en somme, travail
manqué). — K. Jansen, Aleander am Reichstage zu Worms i 52 i
(V. Druffel : le travail relatif à la personne même d’Aleander est plus
satisfaisant que l’essai tenté par l'auteur pour dater ses documents).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28
Ch. DESMAZE
Conseiller à la cour de Paris.
LES MÉTIERS DE PARIS
D'après les ordonnances du Châtelet, avec les sceaux des artisans.
In-8, fig.„. 7 fr. 5 o
LE RELIQUAIRE DE M. Q. DE LA TOUR
Peintre du roi Louis XV, sa correspondance et son œuvre,
In-i8, elzévir. 2 fr. 5 o
— Le même, sur papier teinté chamois. 3 fr.
— Le même sur papier vergé fort. 3 fr. 5 o
L’ABBAYE DE SAINT-QUENTIN EN L’ISLE
De l’ordre de Saint-Benoît, fondée à Saint-Quentin en Vermandois;
étude historique. In-8. 1 fr. 5 o
LE MUSÉE DE LA TOUR A SAINT-QUENTIN
L’œuvre du peintre de la Tour, publiée pour la première fois. 3 o pho¬
tographies, par M. Hendricks, reproduisant les pastels du Musée
de Saint-Quentin, et texte explicatif. Un beau vol. in-folio 100 fr.
LA PICARDIE
Saint-Quentin en Vermandois, son histoire, sa population, ses rues,
ses maisons et leurs propriétaires au xvn® siècle, ses enseignes.
Nécrologie de son chapitre, ses maires. In-8. 3 fr.
Le Buy, imprimerie Marchessou JUs , boulevard Saint-Laurent, 23 .
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PÉRIODIQUES
The Academy, n° 604, i w décembre i 883 : Incfian TdyTls, From the
sanskrit of the Mahabharata, p. p. Edwin Arnold. — H. M. Durand.
The life of sir Henry Durand. — Thecity in the sea, «tories of the old
Venetians, by the author of t Belt -and opur. 1 — Edw. Thring, The
theory and practice of teaching. — An american encyclopaedia. The
encyclopaedia americana, a supplémentai dictionary of art, sciences aol
general literature. I. A.-Cen. (Cotton). — The « Electra » at Girton.
(F. R. Gray). — Correspondance. Wyatt andSurrey (J. W. Haies). —
Comparative mythology. (A. Lang). — « Natural law in the spiritual
world ». (Momerie). — The Politics of Aristotle, translated with an
analysis and critical notes, by J. E. C. Welldon. (H. Richards). — À
« résultant » Greek Testament. — W. H. Willshire, A descriptive
catalogue of early prints in the British Muséum. « German and flemish
schools ». (Middleton-Wake). — The society of british artists.
The Athenaeum, n° 2997, i er décembre i 883 : J. W. Howe, Margaret
Fuller, Marchesa Ossoli. Eminent women sériés. — Philipps-WolleYj
S avage Svânetia. — Morfill, Slavonie literature (petit volume qui ren¬
ferme une masse considérable d'informations; « admirable little
manual »).— Emm. Phipson, The animal-lore of Shakspeare’s time,
including quadrupeds, birds, reptiles, fish and insects. (Livre extraor¬
dinairement curieux et intéressant). — The date of Luther’s birth (J. E.
Hodgkin).—The battle of Hampstead Heath. (A. H. ; Elliot Stock;
Gomme). — The type writer. (Fisher). — The Beckford library. —
A. H. Church, Precious stones considered in their scientific and artistic
relations.
Literarisches Centralblatt n°49, i w décembre 188 3 : Riant, Invention
de la sépulture des patriarches Abraham, Isaac et Jacob à Hébron le
25 juin 1119. (Publication intéressante qui a le mérite incontestable
d’avoir produit une nouvelle source qui prouve la justesse des informa¬
tions données par les Arabes sur la grotte de H ébro n -, t: est vu mène
temps une étude littéraire soignée). — Jacobson, Untersuchungcn ue-
ber die synoptischen Evangelien. — Die Luther-Ausstellung des gross-
herzogl. Muséums zu Weimar, fp. p. Rülànn. — Oberhummer, Phô-
nizier in Akarnanien. (Du soin, au savoir, mais tout cela est trop
contestable, trop hypothétique). — Die Llibecker Briefe des Kieler
Stadtarchives 1422-1534, p. p. Wetzel. —Die àlteren Zunfturkun-
den cher StaAt Lüneburg p.p. El Bodeman*. — van der G<*ltz, Rnss-
badi aind Jena. — Dahn, RedhtsphilosepphischeStudien. — Robge,
Bibliotheca Grdtiana, Hugonis<Jrotii operum descnptio WbliegrnjAiica
in qua omnes editiones et versiones, argumenti ratione habita, etc. recen-
sentur. (Travail très méritoire et très utile). — Sarwby, Das Staatsrecht
des Kônigreichs Württemberg. — Kâlidâsa, Megkadûta, the cloud mes¬
senger, poem, translated by Clark. — Mtwiro, A gramnaar of the ho-
meric dialect. (Jugement indépendant, mais Fauteur ne connaît pas
assez la critique homérique.) — 4 Cinch, Quaestiones Gratianae criticae.
(Recherches qui sont d'une grande clarté ; contribution importante à la
critique du texte deCurtius.) —Xhuck, EtytiKAngiKhes WftcteBÉnich
der deutschen Sprache. VI et Vil Uefer.. (Ouvrage excellent, rempli de
qualités louables et qui devrait se trouver dans la bibliothèque de tous
les lettrés de l’Allemagne.) — Haushalibr» Die ^pad^cence c m i grhffl
Mittel-und Niederdeutsch vonHedemünden an der Werrabis Stassfuitam
derBode. — Der Nibelunge Nôt, nach Lachmann's Augabe übersetzt
il mk einer Emleitung ^venrehen von Hsnkb. (Ni moiltewr ni phre «mau¬
vais aue les travaux précédents.) — Meister Stephan’s Schachbuch, ein
mitteldeutsches Gediéht des XîV. Jahri iund erts.
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 61
— 17 décembre —
1883
Sommaire t 25 o. Tite Live, livres xxvi-xxx, p. p. Madvig et Ussing. — 25 i.
Petits textes historiques sur la cinquième croisade, p. p. Rœhricht, Itinéraires à
Jérusalem et descriptions de la Terre Sainte, p. p. Michelant et G. Raynaud.—
2 52 . Guide à l’exposition bibliographique de Budapest. — 253 . De Grammont,
Un académicien captif à Alger. — Variétés : Lettre de M. Maurice Croiset et
réponse de M. Nicole. — Chronique. — Académie des Inscriptions. — Société des
Antiquaires de France.
a 5 o. — T. Livri lllatorlarum Roman arum llbrl qui auperaunt, ex recen-
sione Jo. Nie. Madvjgii, iterum ediderunt Jo. Nie. Madvigius et Jo. L. Ussingius,
vol. II, pars II (livres xxvi-xxx), Copenhague, Gyldendal, 1882. xvi et 27a p. in-8.
Ce serait chose superflue de faire réloge du T.-Live de Madvig et de
vanter la science consommée d'un homme qui, de l’aveu de tous, est un
des premiers latinistes de ce temps. Je me bornerai à faire remarquer
que, parmi les différents volumes de la seconde édition du T.-Live de
Madvig, celui qui contient les livres XXVI-XXX présente une impor¬
tance toute particulière, à cause des nombreuses modifications qui ont
été apportées au texte de la première édition. Depuis 1874, date de cette
première édition, la critique du texte de cette partie de T.-Live avait été
complètement renouvelée par le beau travail de Luchs, T. Livi ab urbe
condita libri XXVI-XXX , recensuit A. Luchs, Berlin, Weidmann,
1879 1 ; l’ancien texte de Madvig était donc devenu, pour la seconde
moitié de la troisième décade, un texte arriéré; avec cette nouvelle édi¬
tion de 1882, ce texte se trouve remis au courant; les résultats obtenus
par Luchs sont mis à profit, et le texte de 1874 est modifié dans un très
grand nombre de passages, dont il serait trop long de donner ici la liste.
En même temps, ce texte est amélioré par une série de conjectures
nouvelles, dont quelques-unes sont des restitutions évidentes; l’auteur
rend compte de ces corrections dans son introduction critique ; en voici
l’indication complète, sauf omission de ma part :
26, 27, 12, remplacer quia par quippe ; 26, 41, 11 quibus afui;
26, 42, 7 paulo pluspassuum <jnille et ducentos>] 27, 1,9 in Fulviis
( infuluis P); 27, 23 , 3 vulturium <irip>volasse; 27, 40, 10, remplacer
Larinatis par Uriatis; 28, 3 , 14, remplacer erat et triariorum par
ccetratorum; 28, i 5 , 3 signa <a> cornibus concurrerunt ( concurre -
runt S, incucurrerunt P); 28, i 5 , 9, remplacer cederet par caderet;
28, 21, 2 servorum de catasta (de causa S) ac liberorum ; 28, 23 , 1
1. Voir ici même le compte-rendu de M. Harant, 1881. i, p. 18 et suiv.
Nouvelle série, XVI. 5 t
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REVtJE CRITIQUE
486
dimicantium <£odium >; 28, 27, 16, remplacer lapides par lapide ;
3o, 11, 10 lire : prope rentra ire^> turbati (propereturbati P);
3 o, 17, 12, supprimer ea devant patres ; 3 o, 18, 7 ut <^tu^>rmce per -
mixtus (; utrempermixtuS P) ; 3 o, 35 , 4, remplacer et ante aciem par et
stante ( labante, nutante?) acie (cette dernière correction ne figure point
dans le texte).
Une autre différence entre cette nouvelle édition et celle de 1874,
c’est que l'introduction critique ne contient plus l'indication des va-
riantei du texte de Madvig par rapport à celui de Weissenborn, mais
l'indication des différences de son texte avec celui de Luchs. Les notes
critiques de la première édition ont été remplacées par un travail abso¬
lument différent.
Les lecteurs de la Revue critique se rappellent peut-être en quoi con¬
sistaient les résultats nouveaux mis en lumière par Luchs. Avant son
édition, le Spirensis , ms. égal en valeur au Puteaneus , mais ne conte¬
nant que les livres XXVI-XXX et aujourd’hui perdu, n'était connu que
par les indications, assez incomplètes, de Rhenanus et de Gelenius ;
d'autre part, Th. Mommsen avait signalé l'existence de plusieurs mss.
des xiir*, xiv® et xv* siècles, dérivant, d'une façon plus ou moins indi¬
recte, d’un archétype qui était un proche parent du Spirensis • Ce sont
ces ims. que Luchs a dépouillés; avec une très grande sagacité, il a
réussi à reconstituer en grande partie, d'après eux, le texte du Spi¬
rensis, et le résultat de ce travail, c’est qu'en divers passages, oü le texte
du Puteaneus est altéré et avait donné lieu à toute sorte de conjectures,
il se trouve aujourd'hui que l'ancienne vulgate , dédaignée depuis
Alschefski, représente le texte même du Spirensis, c’est-à-dire un texte
d'une autorité égale à celui du Puteaneus .
Toutefois il reste une grave difficulté, et ici Madvig, dans l'établisse*
ment de son texte, ne s'accorde pas toujours avec Luchs. Il arrive fort
souvent qu’on a à choisir entre deux leçons également admissibles en
elles-mêmes, données l'une par le Puteaneus, l’autre par le Spirensis
ou les mss. de la même famille. Il semble que Luchs, en pareil cas,
a un penchant pour le texte du Spirensis ; il est intéressant de constater
que Madvig, au contraire, n'a point admis dans son édition toutes les
modifications introduites dans le texte de ces cinq livres par Luchs, et
qu'il a souvent préféré garder le texte du Puteaneus\ voici ce qu’il dit A
ce sujet dans sa préface (p. v) : « In hujusmodi locis fieri potest ut, in
prioribus maxime libris, ego nonnikil ad codicem Puteaneum sequen*
dum inclinaverim, Luchsio altérant stirpem sequen te \ 1
1. Voir par exêfhplé i 25 , 46, 7 in forum Mâdv., usqué in foYUih Luchs; * 5 ,4$, S
ventèse Madv., venisii enim Lüehs; *7, 4 3 , 1 misai ad UartnfMim Mtdv„ ad fté**
nibalem misai Luahs} 17, 49, 9 posas si ... mittatur, gmt tei delsri Madv., si ... mittê*
tur, posas omnea deleri Luchs; 27, 5 i, 9 omnia Madv., omniaque Luchs; 29, 27,9
vident Madv., videret Luchs; 3 o, 14, 6 non est , non Madv., non est Luchs, 3 o, 15 , 2
enim se Madv., enim sese Luchs, etc.
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d'histoire et de littérature 487
Je serais, en cela, du parti de Madvig contre Luchs, seulement je ne
peux m’empêcher de trouver que Madvig, pas plus que Luchs lui-
même, n'a suivi à cet égard une règle bien arrêtée et bien fixe. La valeur
des deux mss. étant, à ce qu’il paraît, à peu près égale, le texte des
livres XXVI-XXX peut être établi en prenant pour base soit le Spi-
rensis y soit le Puteaneus , mais il me semble qu’il faut choisir, et que,
selon le parti que Ton prendra, il faudra ne s’écarter du texte donné
soit par le Spirensis i soit par le Puteaneus que si ce texte est évidem¬
ment inadmissible. Or, c’est ce que ni Madvig ni Luchs 1 ne me sem¬
blent avoir fait. De plus, tant qu’on n’aura pas démontré que le Spi -
rertsis valait mieux que le Puteaneus , j’estimerai que c’est ce dernier
ms. qu'il faut prendre pour base du texte, en ne recourant au Spirensis
que lorsque la leçon du Puteaneus est évidemment fautive*. Ce parti me
paraît le plus sage, ne serait-ce que pour cette raison que le Puteaneus
existe et que le texte en est fort bien connu, au lieu que, malgré les re¬
cherches ingénieuses de Luchs, il peut souvent rester quelques doutes
sur le texte du Spirensis aujourd’hui perdu.
Il y a, par conséquent, toute une série de passages où je trouve
qu’il n'y avait absolument aucune raison d’abandonner le texte de P
(Puteaneus ) pour celui de S (Spirensis ou mss. de même famille), comme
l'ont fait et Luchs et Madvig après lui; voici quelques exemples :
26, 46, 5 ab ter go sentiret P, a ter go senserit S; 26, 49, 12 defutu*
rum P, defuturum iis S; 26, 5 o, 9 adulescens . invocaret (lisez : in-
vocare ) P, cum adulescens ...invocaret S; 27, 45, 4 audiretur P, au-
diaturS ; 27, 5 i, 8 prœtor edixit, celebrata P, prœtor pro contions
edixit, celebrataque S; 3 o, 4, 3 insidianti P, insidiantibus S; 3 o, 12*
3 hominum contulit vis P, vis hominum exfuga contulerat S; 3o»;i2,
14 captiva P, captiva tua S; 3 o, 14, 4 te existimo , Masinissa P, te,
Masinissa, existimo S; 3 o, 14, 6 tantum ... periculum P, tantum ...
periculi S ; 3 o, 1 5 , 7 neque ingratum P, nec ingratumS \ 3 o, 20, 9 ad
Trasumennum aut Cannas P, ad Trasumennum, ad Cannas S, etc. En
plusieurs de ces passages, la rédaction de S, plus développée que celle
de P, m’a tout l’air d’un remaniement postérieur.
Je crois donc que, malgré les éditions de Luchs et de Madvig, la ques¬
tion de l’établissement du texte des livres XXVI-XXX n’est point encore
résolue ; il est vrai qu’elle ne le sera peut-être jamais ; il faudrait pour
cela qu’on pût fournir des raisons décisives de préférer, dans les cas
douteux, soit le texte de P, soit le texte de S.
Malgré cette réserve que je crois devoir faire, ce nouveau volume de
la réédition du T.-Live de Madvig sera, tout comme ceux qui l’ont
précédé, étudié avec intérêt et avec profit par les philologues; c'est un
1. Je n’ai point ici à critiquer l’édition de Luchs; sans cela, il serait aisé de citer
des passages où Luchs a gardé la leçon du Puteaneus, quoique celle du Spirensis ,
prise en elle-même, fût tout aussi bonne.
2. Cf. Harant, L l .
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REVUE CRITIQUE
488
nouveau témoignage de la vigueur et de l'activité d'esprit que l’illustre
savant danois, malgré son grand âge et malgré Tinfirmité qui l'a pres¬
que entièrement privé de la vue, ne cesse de déployer.
O. R.
251 . — I. Xeatlmonla minora de Qnlnto bello aaero» e chronicis occiden-
talibus excerpsit et sumptibus Societatis illustrandis Orientis latini monumentis.
edidit Reinholdus Rœhricht, Ph. Doctor. Gencvae. Typis J. G. Fick, 1882. In-8,
lxxiv-38i pages.
[I. Itinéraires a Jérusalem et descriptions de la Xerre Sainte
rédigées en français aux xi e , xii° et xm e siècles» publiés par Henri Michelant et
Gaston Raynaud. Genève, imprimerie Jules-Guillaume Fick, 1882. In-8, xxxin-
283 pages.
La Société de l’Orient latin, dont il a été déjà souvent question dans
la Revue critique, a entrepris deux séries parallèles de publications;
l’une doit comprendre beaucoup de petits textes historiques que
pour différentes raisons l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres
n'a pas l’intention de faire entrer dans la collection des historiens des
croisades; l'autre série sera, au contraire, exclusivement consacrée à des
textes géographiques, itinéraires, descriptions, pouillés, etc., relatifs à
la Terre-Sainte et à l’Orient latin. C’est à la série historique qu’appar¬
tient le nouveau volume publié par M. Rôhricht; cette série compte
déjà trois volumes parus et plusieurs autres sont en préparation; au
poème de Guillaume de Machaut, sur la prise d’Alexandrie par le roi de
Chypre, Pierre III sont venus successivement s'ajouter les deux volu-
mes*de M. R., Quinti belli sacri scriptores minores et Testimonia
minora et le prochain exercice verra paraître une chronique de Morée
en castillan, publiée par M. A, Morel-Fatio.
La cinquième croisade, préparée par Innocent III, ne fut entreprise
que sous Honorius III, et aboutit à l’occupation éphémère de la ville de
Damiette par les croisés. Il y avait déjà longues années que le Saint-
Siège projetait une expéditiou contre l’Egypte, regardée non sans rai¬
son comme le principal boulevard de la puissance musulmane; c'était
l’Egypte que le pape Innocent III avait donnée comme objectif à l’ex¬
pédition de 1204, expédition que des intrigues, aujourd'hui encore mal
connues, firent si malencontreusement dévier. La nouvelle croisade, pré-
chée par ordre du souverain-pontife dès 1214, ne fut pas plus heureuse,
l'indiscipline des contingents occidentaux, les divisions, l'impéritie des
chefs, l’indifférence de l’Europe, tout se réunit pour faire avorter misé¬
rablement l’expédition brillamment commencée. Saint Louis, trente ans
plus tard, échouera à son tour, et le désastre de la Mansourah montrera
que l’Egypte est décidément inattaquable.
La cinquième croisade échoua donc comme toutes celles du xn* et du
xui® siècle ; aucun souverain de l'Europe n'y prit part, et c’est peut-être
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d’histoire et de littérature
489
pour cela que cette expédition a été jusqu'ici assez peu étudiée par les
historiens modernes. Presque tous les écrivains du temps en ont cepen¬
dant parlé, et, plus que la croisade de saint Louis, elle passionna l’Europe
qui en suivit les péripéties avec attention. Dans un premier volume
M. R. a publié un certain nombre de traités historiques, contemporains
ou de peu postérieurs, relatifs à l’expédition de Damiette; mais à ces
relations séparées parmi lesquelles on doit remarquer le très curieux récit
en provençal, découvert par M. Paul Meyer à la Bibliothèque de l'Ar¬
senal, il était utile de joindre les passages des auteurs occidentaux, dans
lesquels il est question de l'expédition, passages très nombreux et parfois
assez étendus. Tel est l'objet du nouveau volume de M. R., volume
qui renferme : une longue préface en latin, dans laquelle l’éditeur passe
en revue les fragments réunis par lui; les témoignages classés par
pays et pour chaque pays par ordre chronologique [Belgium, ou Flan¬
dre et Pays-Bas, Grande-Bretagne, France, Allemagne, Espagne, Hon¬
grie, Italie, Orient latin, pays Scandinaves); une table chronologique des
principaux faits avec renvois au volume ; un copieux index des noms
de lieux et de personnes.
La préface est assez étendue; elle compte soixante pages d’un caractère
très fin, avec nombre de notes et de renvois. M. R, a été trop modeste;
il s’est contenté d'y passer en revue les extraits réunis par lui ; les notes
qui accompagnent cette analyse un peu sèche, et vraiment peu utile,
prouvent qu'en travaillant le sujet quelques mois de plus, il eût pu
nous donner le complément naturel d’un pareil recueil, un résumé
chronologique de l’histoire de la cinquième croisade dans le genre des
Annalen de Richter ou des Jahrbücher. Un résumé de ce genre com¬
prendrait nécessairement l'exposé des faits tels que les rapportent les
sources contemporaines, la discussion critique des points contro¬
versés, l'analyse des variantes et des développements fournis par les his¬
toriens postérieurs. Les volumes de M. R., quand il y aura joint
l’Epistolarium, dont il annonce la préparation, contiendront tous les
^ matériaux d'une histoire critique de la cinquième croisade ; on doit
espérer que l’éditeur tiendra à honneur de les mettre lui-même en
œuvre ; il aurait tort de laisser ce soin à d'autres.
Le volume renferme les extraits de 246 auteurs (dont 27 dans
l'Appendice); ils ont été pris sur les meilleures éditions; toutes les lan¬
gues de l'Europe y figurent. On a traduit en latin les fragments em¬
pruntés à des écrits en langues germanique et Scandinave; on a jugé
pareil soin inutile pour l'italien, le français, le portugais et l’espagnol;
peut-être néanmoins aurait-on pu traduire les extraits portugais, cette
langue étant certainement peu familière aux érudits européens.
La plupart des auteurs employés appartiennent au moyen âge; toute¬
fois, dans certains cas, l’éditeur a cru devoir dépasser les limites extrêmes
de cette période historique et descendre assez bas dans les temps mo¬
dernes. Parfois même, à notre avis, il a péché par excès de scrupule, et
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REVUS CRITIQUE
490
certains des extraits qu’il publie resteront toujours inutiles aux historiens
de la cinquième croisade. Même remarque pour un certain nombre de
textes du moyen âge, qui ne présentent aucun intérêt, et qui ne peuvent
que difficilement passer pour des sources de l’histoire du xm* siècle.Telle
est la chronique d’Hochmeister, qui s’arrête à l’année 1467; tels sont, à
plus forte raison, l’histoire de la Hollande en vers de Caspar Wachten»
dorp, composée vers 1590, et le poème en l’honneur de la ville de Harlem,
de Samuel Ampzing publié en 1628. A ce compte, M. R. mettrait le poème
du Tasse au nombre des sources de l’histoire de la première croisade. Rele¬
vons encore dans le premier paragraphe consacré au Belgium , la men¬
tion de l’annaliste Jacques Meyer, qui n’a aucun droit à figurer en
pareille compagnie, pas plus que du Haillan ou Jean de Serres ne sont
à consulter pour l’histoire de la France du xm* siècle. Citons encore
parmi ces intrus Nicole le Huen (vers 1487), Pierre Desrey (i 5 oo),
Wimpheling, Hérold, Heineccius, Ruy de Pinft (1 5 19), Lipom&nus
(1554), etc.
C'est là, à vrai dire, la principale critique qu’on ait à faire au recueil
de M. R. ; mais elle nous paraît assez sérieuse. A notre avis, cette collec¬
tion d’extraits aurait dû former l’appendice d’un travail critique sur
l'histoire de la cinquième croisade; appendice où l’on n’aurait admis que
les morceaux importants, les fragments d’auteurs peu connus, dont les
éditions sont difficiles à rencontrer. Cette réserve faite, nous recon¬
naîtrons volontiers que le volume de M. Rôhricht représente une masse
énorme de travail et que l'éditeur y fait preuve des connaissances
bibliographiques les plus étendues et d’une érudition peu commune.
Le volume de MM. Michelant et Raynaud renferme les itinéraires
et descriptions de Terre-Sainte, rédigés en français aux xi®, xn« et
xm® siècles. La partie historique de la préface est l'œuvre de M. le comte
Riant, la partie philologique est due à M. Raynaud. La plupart des
textes publiés dans ce volume sont de faible étendue et de moindre im¬
portance que les textes latins de la même époque. En effet, le plan
adopté par la Société de l’Orient latin n’admet dans la série des itiné¬
raires français que les textes originaux, les traductions d'originaux la¬
tins étant rejetés dans la série latine. Mais rien de plus difficile que de
distinguer un texte français original d’un autre texte traduit; nous
croyons que les éditeurs y sont néanmoins arrivés, mais il a fallu pour
cela dépouiller minutieusement toutes les collections manuscrites
existantes et comparer une centaine de petits traités anonymes dispersés
aux quatre coins de l’Europe, presque toujours difficiles à dater et dont
les moins intéressants sont d’ordinaire ceux qui exigent l’examen le
plus attentif.
Le recueil de M. Raynaud est exécuté sur le même plan que
tous ceux de la Société ; on y trouve, établi philologiquement d'après
les manuscrits, le texte des différents traités avec les variantes, et un
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d'histoire kt de littérature 491
index des noms propres. Ce sont des secours fournis aux futurs
géographes et historiens de la Terre-Sainte; à ceux-ci reviendra le soin
d’interpréter et de commenter les textes ainsi réunis. La préface renferme
Thistoire de chaque opuscule, indique d'après quels manuscrits il est
publié, quelles éditions antérieures en ont paru.
Ce premier volume des Itinéraires français renferme 14 textes ou
fragments. Le premier en date est emprunté à la Chanson du voyage
de Charlemagne à Jérusalem , étudiée par M. G. Paris dans la i?o-
mania en 1880, et publiée par M. Koschwitz. Les éditeurs adoptent la
théorie de M. Paris et datent cette chanson du dernier quart du xi* siècle.
— Seul de tout le volume, le deuxième texte ( Patriarcats de Jérusa¬
lem et d’Antioche) est une traduction ; c'est une translation française,
incomplète, il est vrai, de la liste latine des évêchés de Terre-Sainte et
de Syrie, publiée dans le tome 1 des Itinera latina . M. le comte Riant
estime que cette traduction a dû être composée entre l’année 1168 et
l’année 1187.
L ’Estât de la cite\ de Jherusalem est antérieur à Ernoul, mais il
a été rattaché au remaniement de la chronique d'Ernoul connu sous le
titre de Estoires d’Oultremer et de la naissance de Salehadin ; ce petit
traité a été écrit avant 1187. — Un autre traité, appelé aussi Estât de
la cité de Jherusalem, est l'œuvre d’Ernoul lui-même, qui d’ailleurs
y a laissé subsister des formes de style existant dans un texte plus an¬
cien qu’il n’a fait qu'abréger maladroitement. La nouvelle édition est
donnée d’après 11 manuscrits, dont deux étaient restés inconnus à M. de
Mas-Latrie, dernier éditeur d’Ernoul. — Ce chroniqueur a encore
fourni le texte n° v, divers fragments relatifs à la Galilée, descriptions
de ce pays curieuses et faites de visu .
Le sixième texte ; Les Pèlerinaiges por aler en Jherusalem , est em¬
prunté à un manuscrit isolé de 1 ’Eracles (cinquième classe d’après le
classement de M. Riant); une copie séparée de ce petit traité se retrouve
à Vienne, et un ms. de Cheltenham en renferme un remaniement.
Malgré tous ses efforts, M. Riant n’a pu dater exactement cet opuscule,
œuvre d'un compilateur négligent, qui y a fondu des fragments em¬
pruntés à des traités d’époques très différentes. Mentionnons pour mé¬
moire le n° 7, extraits de Philippe Mousket, que les éditeurs ont eu la
sage précaution de revoir sur le manuscrit unique de Paris. M. Riant
reconnaît qu’il lui a été impossible de retrouver les sources employées
par cet auteur dans les passages relatifs à la géographie de Terre-Sainte.
Certains manuscrits de Matthieu Paris sont accompagnés de cartes
avec légendes. On croit généralement aujourd’hui que ces additions ne
sont pas l'œuvre du chroniqueur anglais. Quoi qu’il en soit, les éditeurs
du recueil des Itinéraires français ont eu l’idée de recueillir celles de
ces légendes qui se rapportent à la Terre-Sainte; les quatre manuscrits
connus renferment deux rédactions différentes de ce curieux commen¬
taire géographique.
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REVUE CRITIQUE
492
Le neuvième opuscule est emprunté à la classe des mss. de YEracles
que Ton appelle l'Eracles-Rothelin: c’est un texte géographique inté¬
ressant, écrit en France vers 1261 et ajouté à cette date à la traduction
de Guillaume de Tyr. Le texte publié par M. Raynaud a été établi sur
tous les manuscrits connus, au nombre de douze.
Chemins et pèlerinages de la Terre-Sainte (n° 10); opuscule diffi¬
cile à dater, et plein de contradictions au point de vue chronologique;
l’auteur anonyme y a évidemment fondu des fragments d’époques diffé¬
rentes. Publié d'après deux mss. — L’article 11 se compose d’extraits
des voyages de Polo, empruntés aux deux rédactions de Rusticien de
Pise et de Thibaut de Cepoy. — Le douzième texte (Pèlerinages et
pardouns de Acre) est une courte description des sanctuaires delà ville
d’Acre, écrite entre 1254 et 1291 ; publiée d’après un seul ms. — Le
treizième texte : La Devise des chemins de Babylonne , est un mémoire
militaire envoyé en Europe par l’ordre de Saint-Jean; il traite des res¬
sources militaires et de la topographie de l’Egypte. Ce mémoire, très
curieux, a été écrit entre le 26 avril 1289 et le 18 mai 1291. — Le dernier
texte, Les Casaus de Sur , écrit entre l'année 1266 et l’année 1281, ren¬
ferme une courte description des quelques villages laissés par le sultan
Mélik-el-Mansour à la veuve de Jean de Montfort, seigneur de Sur,
Marguerite de Chypre.
Une table copieuse des noms d’hommes et de lieux termine ce beau
volume, qui ouvre dignement la série des Itinéraires français , dont la
Société de l’Orient latin a entrepris la publication.
A. M.
252 . — Kœnyvklàllltiil Emlék. Kiadja az orszâgos magyar iparmüvészeti
Muzeum. A « Kœnyvkiâllitâsi Kalauz » 2-ik bœvitett kiadâsa. Budapest. Kilian
Frigyes bizomânya. mdccclxxxii. [Souvenir de l’Exposition bibliographique,
publiée par le Musée des produits de l’industrie nationale de la Hongrie. Seconde
édition, augmentée, du a Guide à l'Exposition bibliographique. » Budapest, en
commission chez Frédéric Kilian, 1882.] Gr. in-8 de vin et ±63 pp., plus 2 ff.
L’exposition bibliographique de Budapest a été organisée sur le mo¬
dèle de l’exposition que nous avons vue, en 1880, au cercle de la librairie
à Paris; mais hâtons-nous de dire que l’imitation a bien dépassé le
modèle. Les bibliophiles hongrois ont été mus par une pensée vérita¬
blement scientifique et ils ont fait une œuvre sérieuse ; aussi, tandis que
le catalogue publié par MM. les imprimeurs et libraires parisiens a
disparu au milieu des mille réclames sans valeur que nous jetons cha¬
que jour dans la corbeille aux vieux papiers 1 , celui de Budapest restera
1. L* seule partie intéressante de ce catalogue, la description, malheureusement
trop sommaire, de la collection historique de M. A. Claudin, se retrouve avec
quelques additions dans le catalogue de l’Union centrale des Arts décoratifs»
exposition rétrospective de 1882, 3« fascicule, pp. 53-97.
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d’histoirb et de littérature
493
comme un monument des plus précieux de l’histoire bibliographique
de la Hongrie. Ce n’est pas que les directeurs du Musée hongrois aient
négligé le côté industriel de l’exhibition dont ils ont pris l'initiative.
L’ouvrage qu'ils ont publié et dont la seconde édition, parue après la
clôture de l’exposition, porte le nomade « souvenir », est d’une exécu¬
tion remarquble. Il a été imprimé par parties dans quatre ateliers diffé¬
rents : le frontispice et les pp. 55 -162 sortent des presses de la Société
Franklin; les pp. i- 53 , des presses de l’Athenaeum; les pp. i 63-2 11 ont
été composées et tirées par M. Victor Hornyânszky; enfin la Société
typographique par actions de Budapest s’est chargée de la fin du volume.
Les imprimeurs ont tenu à se distinguer dans ce concours, où la palme
appartient sans conteste à la Société Franklin, tant par l’élégance et la
variété des types employés que par la netteté et l’égalité du tirage. Les
gravures, vignettes et reproductions héliographiques dont le texte est
orné ne laissent rien à désirer et ne le cèdent pas à celles que l’on voit
dans aucun autre pays.
Nous ne nous arrêterons pas plus longtemps au côté matériel de la
publication; ce qui nous intéresse ici, ce sont les documents historiques
et littéraires qu’elle contient.
Le catalogue est divisé, comme l’exposition elle-même, en cinq sec¬
tions dont nous allons successivement parler :
I. Manuscrits de la Hongrie . Manuscrits en langue latine, manus¬
crits en langue magyare, sources de l’histoire nationale et de l’histoire
de la civilisation (notices diverses par MM. Jean Csontosi, Charles
Pulszky et Georges Volf).
Nous trouvons dans cette section 180 articles, accompagnés chacun
d’une notice dans laquelle les particularités essentielles, par exemple
les noms des copistes, sont relevés avec soin. Le plus ancien ms. latin
est un missel hongrois antérieur à 1228, qui appartient au Musée
national. Le xv e siècle est représenté à lui seul dans cette série par
44 numéros. Le plus ancien ms. magyar est un fragment du xm« siè¬
cle; c’est le premier monument de la langue hongroise qui nous soit par¬
venu. Il appartient au Musée national. Immédiatement après vient un
ms. de Munich, qui, en 1466, appartenait à Georges Németi, fils d’Eméric
Hensel, de Trotus, en Moldavie. Les documents historiques compren¬
nent trois mss. de la Legenda S. Stephani, regis Hungariae, de Hart-
wig, évêque de Ratisbonne, mss. qui remontent à la fin du xi 6 siècle,
les vies de sainte Elisabeth, la Croniça de gestis Ungarorum, écrite
en 1 358 , le Cronicon Hungariae de Munich, diverses autres chroni¬
ques, registres, lettres, etc. Citons seulement la Bursa Ungarorum
uuiversitatis Cracoviensis (1493-1557), deux lettres adressées par le
Pogge à Jean Hunyadi en 1448 (Biblioth. de runiversité de Cracovie),
les constitutions de plusieurs ordres religieux de Hongrie, un vocabu¬
laire latin-allemand dressé dans la Zips, au xv* siècle, par Sigismond
Semftleben, etc., etc.
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REVUE CRITIQUE
494
II. Manuscrits de Mathias Corvin (notice par MM. François Pulszky
et Jean Csontosi).
L’exposition de Budapest ne comptait pas moins de 60 mss. origi¬
naux, auxquels étaient joints des dessins et photographies reproduisant
des fragments de six autres manuscrits. Si nous ajoutons quatre mss.
ayant appartenu à Mathias ou à la reine Béatrice, bien qu’ils n’aient pas
été exécutés pour eux, et deux incunables ayant fait partie de la biblio¬
thèque du roi de Hongrie (n 09 241 et 242), on verra que jamais tant
d’épaves de cette célèbre collection n’ont été réunies. D’après M. Cson¬
tosi, on connaît aujourd'hui 11 o mss. corviniens. Le bibliographe hon¬
grois atteint le chiffre de 112 en faisant entrer en ligne de compte les
deux incunables dont il a été question plus haut*.
1. Nous reproduisons cette liste, qui nous paraît de nature à intéresser les lecteurs
de la Revue critique :
Budapest : Bibliothèque du Musée national. 6 mss.
— Bibliothèque de l’Université.. 12 —
— Bibliothèque de l’Académie hongroise. 1 —
Gyœr ( Raab ) : Bibliothèquefdu grand séminaire. 1 —
Eftergom ( Gran ) ; Bibliothèque du primat de Hongrie. 1 incunable.
Po^sony ( Presbourg ) : Bibliothèque provinciale des Franciscains.. 1 —
Marosvkskrhely : Bibliothèque du comte Teleki.. I ms.
Zagreb (Agram) : Bibliothèque de l’Académie des Slaves du sud.. 1 —
Vienne : Bibliothèque impériale. a 5 —
— Bibliothèque de la Compagnie de Jésus. 1 —
Gœtweig : Bibliothèque des Bénédictins. r —
Prague : Bibliothèque de l’Université. 1 —
Salfbourg : Studien-Bibliothek. 6 —
Munich : Bibliothèque royale. 1 —
Erlangen : Bibliothèque de l’Université. 1 —
Jena : Bibliothèque de l’Université. 1 —
Thorn : Bibliothèque du Gymnase. r —
Di-esde : Bibliothèque royale. 2 —
Leipzig : Bibliothèque municipale. I <—
Saint-Pétersbourg : Bibliothèque impériale. 1 —
Wolfenbüttel : Bibliothèque de Brunswick-Lunebourg. 8 —
Vérone: Bibliothèque du Chapitre. 3 —
Venise : Bibliothèque Marcienne. 3 —
Modéne : Bibliothèque d’Este. i 5 —
Parme : Bibliothèque royale... 1 —
Milan : Collection du marquis Trivulzio. 2 —
— Collection de la marquise Trotti... 2 —
Rome : Bibliothèque du Vatican. 1 —
— Bibliothèque du Collège Romain. 2 —
Florence : Bibliothèque Laurencienne. 1 —
Bruxelles : Bibliothèque royale (fonds de Bourgogne). 1 —
Paris : Bibliothèque nationale. 3 —
Besançon : Bibliothèque municipale. 1 —
VEscurial : Bibliothèque royale. 1 —
— Bibliothèque que M. Csontosi ne croit pas devoir faire
connnaître.«. 2 —
Ensemble.!.:. 112 —
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d’histoire et de LITTÉRATURE 495
III. Autres Manuscrits des bibliothèques du pays (notices par
MM. François Pulszky et Jean Csontosi).
On remarque dans cette section un Codex aureus Evangeliorum , du
ix* siècle, provenant de la collection du comte Batthyâny à Gyula-
fehérvâr (Carlsbourg, ou Belgrad en Transylvanie), des Évangiles
grecs du x® et du xi e siècle, deux mss. de Boèce du x e siècle, un ms. de
Virgile du xi® siècle, des copies de la Bible et du Psautier, des missels,
livres d’heures, etc.
IV. Incunables (notices par Gustave Emich, A'rpâd Hellebrandt et
Louis Szâdeczky).
Cette section s’ouvre par deux très précieux volumes appartenant à la
bibliothèque du primat de Hongrie : le Rationale officiorum de Guil¬
laume Durand, imprimé par Ftist et Schôffer en 1459, et une Bible
allemande imprimée vers 1460. Citons une belle série des missels
d’Esztergom, 1480, 1484, i486, 1488, 1491, 1493,1495, 1498; les
bréviaires du même diocèse, 1480 et 1484; les missels de Zagreb (Agram),
1484, de Nagyvârad (Grosswardein, Oradea Mare), 1488, de Pécs
(Fünfkirchen), 1499, etc.
V. Bibliographie hongroise .
Le catalogue des livres imprimés et manuscrits prêtés par les ama¬
teurs hongrois est précédé de deux très importantes notices. La première,
due à M. Charles Szabo, le savant auteur de la Bibliographie magyare
[Régi magyar Kônyvtâr; Budapest, 1879, gr. in-8) est une histoire
de l’imprimerie en Hongrie de 1473 à 1711; la seconde, dont l’auteur
est M. Aladâr Ballagi, continue cette histoire de 1711 à 1848. Le tra¬
vail de M. Szabô, qui s’étend à 43 villes différentes, contient une foule
de renseignements utiles; il pourrait donner lieu néanmoins à diverses
observations. Parmi les villes de Hongrie qui ont possédé une impri¬
merie le quatorzième ou le quinzième rang revient à une ville de
Transylvanie, Szâsz-Sebes (Mühlbach), où le diacre Coresi fonda un
atelier typographique dont M. Szabô ne fait aucune mention. Au mois
de juin 1573, un pope roumain (probablement Coresi lui-même) vint à
Brassô (Brasov, Kronstadt) pour s’occuper de l’établissement d’une
imprimerie *. Dès l’année 1574 l’imprimerie fonctionnait et mettait au
jour un Oktoih Slovène a . Ce volume ne porte aucun nom de lieu, mais un
Psautier Slovène, daté de 1579, porte en toutes lettres la rubrique Szâsz-
Sebes . Des mêmes presses est sorti, la même année, le fameux Psau-
1. Un passage des comptes municipaux de la ville de Brassô cité par M. Trau-
schenfels dans le S'àqhsischer Hausfreund, 1874, et reproduit par M. Barit ( Cate -
chismulu calvinescu , 1879, 99), fait mention de ce voyage à la date du 11 juin 1573 :
a Ein Popa kommen von Alexander Voda, der Druckerei Wegen. » Ledit pope fut
hébergé quatre jours aux frais de la ville.
2. Undoljski, Hronologiceskij Uka^atelj slavjanorusskih knig cerkovnoj, 1871,
n° 75.
3 . Safarik ( Gesch • der südslaw . Lit., 111 , 279) et Undoljski (n° 80) ne citent que
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KETOE CRITIQUE
496
tkr roumain, dont on ne connaît aucun, exemplaire complet ». En 1579,
Coresi, qui cultivait à la fois les deux langues, mit au jour les Evangiles
en slovèae a et en roumain \ En 1 5 80 il fit paraître un Triod Slovène 4 ,
un Zbomik slovène % un Mine] Slovène 4 , des Evangiles roumains
puis vinrent, sans date connue, une Prawila et le Tîlcml Evangeliüor ,
en roumain 8 . Pour ces derniers volumes, il est possible qu’ils aient été
imprimés à Orestie (Szâszvéros, Brocs), dans un atelier auquel M. Sxabé
consacre quelques lignes.
Nous aurions encore quelques [additions ou rectifications è faire à
l'article de M. Szabô; contentons-nous de faire avancer Poononj
(Presbourg) du 29* rang au *8\ Le bibliographe hongrois ne cite de cette
ville aucune impression antérieure à 1607; or, dès 1594, Johann Wilo
ou Yalo 7 imprimait une pièce allemande dont ou peut voir le titre
dans l’ouvrage de M. Kertbeny ».
Nous n’insisterons pas sur les volumes exposés par ks amateurs hon¬
grois; il y a là cependant beaucoup de livres intéressants, surtout parmi
ceux qui appartiennent aux comtes Rodolphe et Alexandre Apponyi, i
M. Gustave Emich et à M. Georges Râth. Nous ne dirons rien non
plus de l’exposition des imprimeurs modernes, à laquelle M. A. BaUagi
n’a fort sagement consacré que quelques mots. Quant aux reliures, le
catalogue en indique de nombreux spécimens, mais ces spécimens n'ont
pour les amateurs étrangers qu’un intérêt assez restreint.
Ajoutons en terminant que la très curieuse exposition dont nous
venons de rendre compte a été organisée sous les auspices de M. Au¬
guste Tréfort, l'intelligent ministre qui avait donné à M. Kertbeny les
moyens de publier sa Bibliographie. Un ministre ami des livres et de
la bibliographie 1 Certes, le fait est rare. Dans un temps où l'Angleterre
et la France ne ae trouvent pas assez riches pour acheter les manu¬
scrits de Lord Ashburnham, où lltalie laisse dilapider ses bibliothèques,
où la Belgique hésite à s’assurer la célèbre collection d’incunables
néerlandais formée par M. Vergauwen, où l’Espagne va laisser disper¬
ser les manuscrits de la bibliothèque d’Ossuna, le nom de M. Tréfort
méritait d’étre cité avec reconnaissance.
Emile Picot.
des exemplaires incomplets. Un exemplaire complet a été récemment découvert au
mont Athos. Voy. Glasnik serpskog ucenok Drutfva, xuv, *55.
1. Ce volume, dont le lieu d'impression a donné lieu à de longues controverse*
vient d’étre reproduit par M. B.-P. Hasdeu pour l’Académie roumaine (Bucuresd,
1881, in-4).
s. Safarik, lit, *79; Undoljaki, n** 81 et &*.
3 . Cipariu, Principia, 101; Amalecte, 1-1&
4. Undoljski, n® 84.
5. Undoljski, n° *5; Glasnik , xuv, *55.
6. Safarik, III, 280; Undolsjki n° 85; Glasnik, xuv, *55.
7 . Cipariu, Principia, 44.
8 . Cipariu, Principia , 104, 108, 116.
9 » Ungarn bttreffendt dmtache ErstUngs-Druckn, »• 1087 .
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d’histoire et de littérature 497
253 . — Un académicien capttr à Alger» (1074*10711), par H. D. de
Grammont. Alger, Jourdan. In-8, 23 p.
Cet académicien captif à Alger est le numismate Vaillant (1632-1707) ;
mais, de même que tous qui ont été captifs en Barbarie, Vaillant ne
nous a pas laissé le récit de cet épisode de sa vie. 11 est curieux, en effet,
comme le remarque M. de Grammont dans son attachant opuscule,
que presque aucun des trois ou quatre cent mille captifs qui vécurent à
Alger au xvn° siècle ne nous aient pas décrit le milieu, si nouveau pour
eux, où ils étaient jetés; à peine si une dizaine d’entre eux ont pensé à
laisser le souvenir de ce qui leur était advenu; à peine si, sur ces dix
récits, trois ou quatre sont dignes d’être consultés. Regnard, dans sa
Provençale , n’a t-il pas transformé en un roman cet épisode de son exis¬
tence, sans se soucier de l’exacte description des lieux et de la vérité des
événements? Même au xvi® siècle, l’auteur de don Quichotte n’a fait,
dans ses nombreux écrits, que des allusions vagues à ses aventures « en
Alger », et le bénédictin Haëdo est le seul qui ait recueilli de précieux
renseignements sur Alger, ses mœurs et son histoire.
Le célèbre numismate, à qui est consacrée la plaquette de M. de G., ne
dérogea pas à la règle commune, et sans son ami, le médecin, voyageur
et antiquaire Jacob Spon, on ignorerait les détails de sa mésaventure. Ce
dernier raconte dans son Voyage d’Italie, de Dalmatie , de Grèce et
du Levant tout ce qui arriva à Vaillant, comment il fut pris dans une
barque livournaise avec vingt autres Français par le reis Mezzomorto
(qui devint plus tard dey d’Alger), comment il fut renvoyé quelque
temps après et chargé par le dey de demander au roy de France un
échange de prisonniers, comment à son retour, Vaillant, craignant de
tomber de nouveau entre les mains des corsaires, avala vingt médailles
d'or antiques qu’il avait sur lui l .
1. C’était un usage commun parmi les captifs, et M. de Grammont cite, à ce pro¬
pos, un curieux passage de la rarissime Odyssée de René des Roys, où il est parlé
de cette a chrysophagie. » Voici, au reste, ce que raconte Jacob Spon : « M. Vaillant
forma un dessein tout à fait extraordinaire, qui fut d'avaler les vingt médailles
d’or,... et dès que le corsaire fut presque à portée du canon, il ne manqua pas de
l’exécuter. Les autres passagers étaient de même dans la dernière consternation,
lorsqu’une bourrasque s’étant tout d'un coup levée, elle écarta le bâtiment de Salé...
Cependant, comme il avait avalé tant de médailles d’or qui lui pesaient fort à l’es¬
tomac, il demanda avis à deux médecins qu’il rencontra sur le chemin d’Avignon.
L’accident leur parut singulier, et ils ne demeurèrent pas d’accord du remède, l’un
proposant des purgatifs, et l’autre des vomitifs (ô Molière!), et, dans cette incertitude,
il ne fit rien, et poursuivit son chemin jusqu’à Lyon, où il en fit quelques-unes par
dessous, de même qu’auparavant à Saint-Vallier, après avoir mangé des épinards.
11 fut rendre visite à M. Dufour... Est-il possible, lui dit M. Dufour, qu’un homme
d'esprit et un habile médecin comme vous, ait osé charger son estomac de cinq ou
3ix onces, et d'une matière si solide i — Si vous aviez été en ma place, lui répli—
qua-t-il, vous auriez peut-être avalé, non-seulement les médailles, mais la barque
même, s'il avait été possible, pour adoucir les amertumes de la captivité. M. Du¬
four, qui avait acheté en même temps cinq médailles que son ami lui avait montrées,
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REVUE CRITIQUE
498
M. de Grammont a reproduit en entier les pages de Spon relatives à
la captivité de Vaillant. Mais son opuscule renferme, en outre, des do¬
cuments intéressants sur l’histoire des relations de la France avec la ré¬
gence d’Alger. Ici encore, comme dans ses précédents travaux, M. de G.
prouve que les premiers torts étaient souvent de notre côté; que les bâ¬
timents algériens, poussés par la tempête sur les côtes de France, étaient
le plus souvent pillés et brûlés; que les équipages étaient enchaînés aux
bancs de la chiourme. Qu'arrivait-il ? A la nouvelle de ces événements,
les corsaires d'Alger se déclaraient en guerre, fondaient sur les bâti¬
ments français, infligeaient à notre commerce des pertes énormes. Un
fait de ce genre venait de se passer lorsque fut pris le numismate Vail¬
lant. En février 1674, huit Turcs, échappés des galères d’Espagne,
étaient venus se réfugier à Port-Vendres, où on les avait emprisonnés;
sur les réclamations du dey, le vicaire apostolique Jean Le Vacher, qui
exerçait à Alger les fonctions de consul de France, écrivit à la cour, et
Seignelay, dans une lettre à Arnoul, intendant des galères de Toulon
(voir cette lettre inédite, p. 8), ordonna que les Algériens fussent rapa¬
triés et indemnisés de leurs pertes; les captifs furent en effet conduits à
Marseille, mais, à leur arrivée, ils furent distribués sur les bancs de la
chiourme et leur rapatriement n’eut lieu que deux ans plus tard! En¬
core, ne renvoya-t-on que les infirmes et les vieillards, comme le prouve
une lettre du P. Le Vacher, écrite aux échevins de Marseille et repro¬
duite en entier par M. de Grammont (pp. 18-21). Cette lettre, conclut
l’auteur, nous apprend quels agissements on croyait pouvoir employer
envers les Algériens et comment on s’emparait sans aucun droit de
leurs nationaux fugitifs ou naufragés pour les condamner à l’esclavage
et au supplice des galères ; et cela, au moment où les infidèles respec¬
taient la marine française, à l’exclusion de toute autre. Nous pouvons y
voir quelle longanimité montrent ceux que nous traitions si volontiers
de forbans et qui répondent par la délivrance de tous leurs prisonniers
aux procédés plus que douteux dont ils venaient d’être l'objet. Le fait
est loin d’étre isolé; mais les conséquences de cette dernière infraction
devaient être plus graves que jamais. On s’entêta à ne pas rendre les
Turcs injustement détenus, estimant qu’ « il était indigne de la gran¬
deur du roi de traiter avec de la canaille ». Les Algériens perdirent pa¬
tience, et, le 18 octobre 1681, la rupture fut déclarée en plein Divan;
six semaines après, ils avaient fait 29 prises françaises estimées à
25 o,coo écus et 3 oo esclaves! En 1682, ils acordaient aux Anglais et
fit aussi marché d’un Othon d’or, et de quelques autres qu’il avait encore dans la
corps, négoce dont il ne s’était peut-être jamais parlé. 11 s'y accorda pour la rareté du
fait, et, ayant pris congé de lui, il se résolut de partir le lendemain par le coche;
mais, par bonheur, il acheva de les rendre avant que de s’embarquer, et les remit à
l’acheteur. » M. de Grammont observe qu’on retrouve tous ces détails dans l’éloge
de Vaillant prononcé par deBoze, en novembre 1706, devant l’Académie des Inscrip¬
tions et Belles-Lettres.
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d’hTSTOIRB BT DE LITTÉRATURE 499
aux Hollandais une paix qu’il6 leur avaient toujours refusée, et nous
suscitaient ainsi une concurrence redoutable pour le négoce du Levant.
Enfin, malgré les exhortations du consul et les lamentations du com¬
merce tout entier, la guerre fut résolue et le drame se dénoua par le
double bombardement d'Alger, l'écrasement inutile de quelques ma¬
sures, l'horrible supplice du P. Le Vacher et de 22 résidents français.
Mezzomorto apprit ce que la ruineuse expédition de Duquesne avait
coûté à la France et dit ironiquement : « Pour la moitié de cette
somme, j’aurais moi-méme brûlé la ville tout entière 1 »
C.
VARIÉTÉS
E<ettre de H* Maurice CroUet et réponse de M* Nicole*
A propos de l’article de M. J. Nicole sur son Essai sur la vie et les
ceuvres de Lucien (n° 41, 8 octobre i 883 ), M. Maurice Croiset nous
adresse la réclamation suivante :
«.J'ai cru distinguer chez Lucien plusieurs manières successives
assez différentes; je les ai caractérisées de mon mieux, et j ai groupé
chronologiquement ses écrits, selon qu'ils me paraissaient se rapporter
à telle ou telle manière. Quelques-uns de ces écrits, en très petit
nombre, n'offrant pas de caractères distinctifs bien accusés, j'ai dû les
laisser en dehors de mon classement. J’ai eu soin alors d’indiquer net¬
tement que si je les rapprochais néanmoins d'un groupe plutôt que d'un
autre, c’était simplement en tenant compte de vraisemblances plus ou
moins légères que je ne considérais pas comme des preuves. Le Juge¬
ment des voyelles est précisément un écrit de ce genre. Je l’ai cité à la
fin de la première période (p. 47) en ces termes : — « Mentionnons ici,
« comme un simple jeu d’esprit, le Jugement des voyelles , cet amusant
« plaidoyer du Sigma indignement spolié par le Tau. Il n'est guèrepos-
« sible sans doute de dater un tel ouvrage; quelques vraisemblances
« toutefois sont à relever : plus tôt, Lucien voyageait; or ce genre de
« badinage, qui porte sur la prononciation attique, ne pouvait guère
« être bien goûté qu’à Athènes; plus tard, son esprit était tourné vers
« d'autres pensées, et il mettait en général une intention plus sérieuse
« dans ses inventions légères et plaisantes. » Je ne pouvais guère suppo¬
ser, en vérité, après avoir écrit ces lignes, qu’un critique sérieux, vou¬
lant donner une idée de ma méthode chronologique, viendrait juste¬
ment choisir comme exemple cet ouvrage sur la date duquel je refusais
expressément de me prononcer. Or, qu’a fait M. Nicole? Décidé à prou¬
ver que ma chronologie est purement fantaisiste, il me cite en suppri¬
mant la phrase essentielle de ce passage, celle où je dis en propres
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5 oo
REVUE CRITIQUE
termes qu’il n’est guère possible de dater un tel ouvrage, puis il se
donne le plaisir de laisser croire à ses lecteurs que j’ai pris les c quelques
vraisemblances » dont je parle pour des preuves , et que je m’en suis
autorisé pour assigner au Jugement des voyelles une date certaine... »
« M. Nicole répond ainsi à cette réclamation :
« M. C. m’accuse de laisser croire aux lecteurs de la Revue qu'il a
voulu assigner au Jugement des voyelles une date certaine, tandis
qu’il s’était contenté dans son classement chronologique de rapprocher
cet écrit du premier groupe des ouvrages de Lucien. Voici les termes
mêmes dont je me suis servi :
« Dans le chapitre II, M. C. classe les écrits de Lucien et les carac¬
térise sommairement. Quand on ne sait à peu près rien de la biographie
d’un écrivain, quoi de plus difficile que d’établir la chronologie de ses
œuvres? Ici encore M. C. remplace les données qui lui manquent par
des suppositions qui lui viennent trop à commandement. Page 47, il dit
que le Jugement des voyelles « cet amusant plaidoyer du Sigma indi-
« gnement dépouillé par le Tau » a dû être composé à la fin de la pre¬
mière période de sa vie littéraire, à un moment où la rhétorique le pos¬
sédait encore, mais où il avait terminé ses tournées de conférences pour
s’établir définitivement à Athènes. Quelles sont les preuves de M. Croi-
set? » etc. On voit que je n'ai absolument pas parlé de date certaine.
J’ai pris purement et simplement la détermination chronologique de
M. C. pour ce qu’il a voulu la donner, et c’est telle quelle que je l’ai
critiquée en prouvant que les raisons alléguées pour ranger le Jugement
des voyelles avec les écrits du premier groupe ne reposaient sur rien de
sérieux. Je réponds du même coup au reproche d’avoir supprimé une
phrase essentielle , celle où M. C. déclare qu’il n’est guère possible de
dater un tel ouvrage. Je n’avais pas à la citer, étant sur ce point parfai¬
tement d'accord avec M. Croiset.
« Si je l’avais citée, j’aurais dû la montrer en contradiction ou à peu
près avec une autre phrase : la dernière du chapitre. Comme c’était la
conclusion de M. C. et qu’elle faisait immédiatement suite au texte
transcrit dans sa lettre, je suis étonné qu’il l’ait oubliée cette fois, au
moment même où il croyait avoir à me reprocher une citation incomplète.
« Pour nous donc, dit M. C., cette fantaisie (le Jugement des voyelles)
termine une première série d'écrits; nous allons en voir une seconde. »
C’est bien catégorique après les sages réserves du début.
« M. C. m’accuse encore d'avoir dit : « Preuves » en parlant de ce
qu'il appelle « des vraisemblances. » Nommer preuves des vraisem¬
blances dont on peut tirer une conclusion de cette netteté, c’était là un
écart d’autant plus excusable qu’en fait, si les raisons de M. C. ne sont
pas des preuves, ce que je lui accorde, elles ne sont pas davantage des
vraisemblances, comme j’espère l’avoir établi.
« Je ferai de plus remarquer à M. C. que, pour donner une idée de sa
méthode chronologique, je ne m’en suis pas tenu à l’exemple, d’ailleurs
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d'histoire et de littérature
5 oi
légitimement choisi, du Jugement des voyelles. J’ai signalé et apprécié
l’opinion de M. C. sur deux autres points : la date de l’Hermo-
time et l’âge de Lucien à l’époque où il composa ce dialogue; j'ai
relevé aussi l’importance capitale de ces deux points dans la chrono¬
logie de M. Croiset. Mais, dans cette partie de son II e chapitre, M. Croi-
set ne fait que reprendre des idées émises par d’autres et assez anciennes
déjà : je devais donc la première place à sa thèse sur le Jugement des
voyelles, thèse nouvelle, si je ne me trompe, et qui lui appartient en
propre.»
CHRONIQUE
FRANCE. — Le texte persan du Sefer nameh ou Relation du voyage de Nassiri Khos-
rau en Perse et en Syrie, en Palestine et en Arabie (xi® siècle', vient d’être réimprimé
àDehli par les soins du Khâdjeh Mohammed Elthafi Hussein Hali, professeur au Col¬
lège arabe de cette ville (i v. in-8°, i 36 pages lithographiées). On se rappelle que le
même texte, avec traduction française et notes, a été publié dans le courant de 1881
par M. Schefer, membre de l’Institut, administrateur de l’Ecole des langues orien¬
tales, dans la collection des Publications de cette Ecole (t. l #r de la deuxième série).
L’éditeur oriental a pris pour base de son travail le manuscrit provenant de la Biblio¬
thèque de Mirza Aziz, frère d’Akbar chah, et appartenant aujourd’hui au nabab Zya
Ouddin Khan, dont une copie figurait déjà parmi les trois manuscrits sur lesquels
le texte de M. Schefer a été établi. Mais ce qui distingue la nouvelle édition de la
plupart de celles qui se publient journellement en Orient, c’est que le Khâdjeh
Mohammed Elthafi Hussein Hali a su profiter largement des recherches de son pré¬
décesseur; il a admis toutes les restitutions de noms propres, si défigurés ordinai¬
rement dans les manuscrits orientaux, et reproduit un grand nombre des notes de
M. Schefer, ainsi que la substance de la notice bibliographique consacrée à la per¬
sonnalité si curieuse, et si peu connue jusqu’à ces derniers temps, de Nassiri Khos-
rau. L’édition de Dehli a donc un véritable caractère scientifique, etmérite à ce titre
d'être signalée aux lecteurs de la Revue critique .
— Notre collaborateur M. Maurice Vernes vient de faire paraître la traduction du
dernier ouvrage du professeur A. Kuenen de Leyde : Religion nationale et religion
universelle , Islam, Israélitisme, Judaïsme et Christianisme, Buddhisme, cinq lec¬
tures faites à Oxford et à Londres au printemps 1882 sous le patronage des admi¬
nistrateurs de la fondation Hibbert (1 volume in-8°, Leroux, 1884). L’éminent hébraî-
sant hollandais, qui présidait il y a quelques semaines le Congrès des orientalistes,
y aborde un des plus difficiles problèmes de la philosophie et de l’histoire religieu¬
ses. Quels sont les caractères qui distinguent une religion nationale d’une religion
universelle? Les religions vulgairement appelées universalistes méritent-elles vérita¬
blement ce nom et, si oui, comment ont-elles été amenées à rompre avec le parti¬
cularisme national? Prenant pour centre et point de repère le développement reli¬
gieux du peuple hébreu qui, partant de l’israélitisme, passe par le judaïsme et arrive
au christianisme, M. Kuenen l’a encadré entre l’islamisme et le buddhisme, dont il
précise les rapports avec l’état religieux antérieur. Cette œuvre devait être mise à la
disposition du public français, qu’elle ne manquera pas d’intéresser vivement : hau-
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502
REVUE CRITIQUE
teurdes vues, solidité et précision des renseignements, mise en œuvre soignée, ce sont
des qualités qu'on trouve rarement réunies à un tel degré dans un même ouvrage.
Nous reviendrons ultérieurement sur ce livre, que nous avons tenu à annoncer sans
retard,
— Les travaux relatifs à l’histoire du Limousin vont se succéder en grand nom¬
bre. En même temps que paraît le tome l* r des Documents historiques bas-latins,
provençaux et français concernant principalement la Manche et le Limousin par
MM. Alfred Leroux, Emile Molinier et Antoine Thomas, nous apprenons que le
recueil appelé à tort premier registre consulaire des Archives communales de Limo¬
ges a été transcrit par M. Beaure d’Augères et doit être prochainement publié; que
le cartulaire d’Aureil , précieux pour l’histoire ecclésiastique du xi* et du xn» siècles,
sera bientôt mis sous presse par M. de Senneville; que M. R. de Lasteyrie tra¬
vaille à reconstituer le Cartulaire de Saint-Etienne de Limoges , à l’aide des copies
conservées dans la collection Moreau de la Bibliothèque nationale; enfin, que
M. l’abbé Lecler rassemble actuellement les principaux documents qui concernent
l’abbaye de Solignac et prépare pour le public les Mémoires historiques de Bullat,
vicaire de Saint-Martial à la fin du xvm® siècle.
— M. R. Chantelauze a publié, à la librairie Firmin-Didot, une nouvelle Histoire
de Louis XVII. Il a découvert aux archives nationales des documents inédits sur le
jeune prince, documents qui, jusqu’à ce jour, avaient échappé aux recherches des
historiens, même à celles de M. de Beauchesne. Un chapitre de cet ouvrage,
Louis XVII au Temple sous la surveillance du gardien Laurent, 8 novembre rjg 4 -
2g mars I 7 g 5 , a déjà paru dans le fascicule du I er juillet de la « Revue des ques¬
tions historiques ».
— Sous le titre Les pays sud-slaves de VAutriche-Hongrie, Croatie , Slavonie ,
Bosnie, Herzégovine, Dalmatie (Paris, Plon et Nourrit. In-12 0 , 3 oi p. 4 fr.). M. le
vicomte de Cayx de Saint-Aymour vient de publier le récit d’une excursion qu’il a
faite au printemps de 1879 en Bosnie et en Herzégovine, à la suite des troupes autri¬
chiennes. On lira avec intérêt ce recueil de notes; elles rappelleront peut-être,
comme dit l’auteur, qu’il y a quelque part en Europe vingt millions de Slaves méri¬
dionaux dont l’avenir intéresse notre avenir et qui méritent d’entrer dans les préoc¬
cupations d’une chambre française, au moins autant que la révocation d’un juge de
paix ou la nomination d’un percepteur. M. de Saint-Aymour montre les dangers
qui résultent pour l’Autriche-Hongrie de l’acquisition de ses nouvelles provinces sla¬
ves. Le péril le plus grave est, selon lui, la question agraire (voir le chapitre Irf);
cette question est la grande difficulté intérieure, la cause de l’antagonisme séculaire
qui rend précaires tous les progrès et impossibles toutes les améliorations. Malheu¬
reusement, comme le remarque l’auteur, l’arrivée des Autrichiens n’a pas calmé les
passions, et n’a fait qu’exaspérer la haine qui sépare en Bosnie et en Herzégovine
les chrétiens et les musulmans. Il arrive même ce fait curieux, c’est que les fonc¬
tionnaires du nouveau gouvernement écoutent plus volontiers les doléances des aghâS
et des begs que des ralas chrétiens; ceux-ci sont grossièrement familiers, leur sans-
gêne est insupportable et la morgue autrichienne ne s’accommode guère de leur*
façons démocratiques ; a chez le dernier des bourgeois musulmans, au contraire, le
fonctionnaire ou l’officier austro-hongrois trouve cette dignité naturelle que le secta¬
teur de l’Islam doit aux habitudes de sa religion et aux traditions orientales ». L’au¬
teur a visité Agram et la Croatie; il a visité à Djakova le célèbre évêque de Slavo¬
nie et de Bosnie, Strossmayer « vieillard tout jeune, grand, maigre, à la physiono¬
mie ascétique, au nom allemand, mais au cœur slave, qui a un demi-million de
revenu, cent chevaux et je ne sais combien de bêtes à cornes dans ses écuries et set
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5o3
d’histoire et de littérature
étables, au devant duquel tous les gens qu’il rencontre se précipitent pouf lui baiser
la main, et qui, avec cela, est l'incarnation vivante d'une nationalité de sept à huit
millions d’hommes » (pp. 53 - 55 ). Il a vu Dervend, dans le nord de la Bosnie,
Techanj et le banatde Ussora, la vallée de la Bosna et Travnik, Serajewo. Puis il
est entré en Herzégovine, après avoir franchi la Narenta qui sert de limite aux deux
provinces; il nous décrit Mostar et son pont d’une seule arche, élevé à quatre-vingts
pieds de hauteur ; enfin, il arrive en Dalmatie. M, de Saint-Aymour a beaucoup pro¬
fité de ses devanciers, de Lejean, de Desprez, de M. de Sainte-Marie, de M. Yriarte;
il les cite fréquemment; quoique le pays des Bosniaques 6oltune des régions d’Eu¬
rope que les voyageurs visitent le plus rarement, il ne croit pas l’avoir découverte.
Ses observations témoignent d’une grande attention et d’une vive sagacité; mais le
style est parfois négligé, et il est regrettable qu’une partie des gravures aient été
empruntées à l’ouvrage de Evans paru, en 1875. La conclusion mérite de ne pas pas¬
ser inaperçue ; on peut la résumer dans cette simple phrase : « ce n’est pas le pans¬
lavisme qui est à craindre, c’est le pangermanisme, et l’Autriche n’est qu’un pionnier
de l’Allemagne en Orient » (p. 288). Pourquoi l’auteur n’a-t-il pas adopté dans la
transcription des noms slaves Un système uniforme?
— La librairie de l’Art, J. Rouaffl, se propose de publier, sous le nom de BibUo -
thèque d’art modérne , une série d’études à la fois critiques et anecdotiques sur nos
grands peintres contemporains. La première de ces études vient de paraître; elle
est consacrée à Corot et due, pôut la partie critique, à M. Jean Rousseau, et, pouf
la partie anecdotique, à M. Alfred Robaut; le volume, élégamment imprimé (prix t
a fr. 5 o) est orné de nombreuses et belles illustrations : trente-quatre gravures sur
bois et dessins reproduisent les œuvres les plu3 remarquables du maître.
— M. À. de Montaigloiy a fait, le 4 décembre, à la Société historique (cercle
Saint-Simon), une conférence sur le Sicilien de Molière,
BELGIQUE. — M. Armand FresoH vient de publier, avec une préface historique,
les Souvenirs personnels (1824-1841) et la Correspondance diplomatique de Joseph
Le beau (Bruxelles, Lebègue, in-8*); ces souvenirs et cette correspondance sont d’une
grande importance pour l’histoire de la Belgique contemporaine, surtout durant la
période de x 83 o à 1840.
— Le premier fascicule d’un recueil, dû à M. Paul Frediricq, professeur à l’Uni¬
versité de Liège et intitulé Travaux du cours pratique d’histoire nationale (Gand,
Vuylsteke. ln-8°, liv et 144 p.) renferme quatre dissertations sur l’histoire des
Pays-Bas au xvi° siècle; les deux premières de ces dissertations ont pour auteurs
deux anciens élèves dü savant professeur, MM. CrutzeM et Lonchay; les deux autres
sont de M. Fredericq lui-même* L’historien a mis en tête de l’ouvrage une suite
de réflexions judicieuses et importantes sur l’enseignement supérieur de l’histoire
en Belgique, et sur les cours pratiques institués à Liège par M, Godefroy Kurth et
poursuivis par M, Fredericq. t Laissons venir à nous les étudiants, conclut chaleu¬
reusement l’auteur, attirons-les dans notre cabinet de travail, dirigeons leurs lec¬
tures, apprenofts-laur la méthode scientifique par des exercices personnels sur toutes
ces matières historiques qui, pour eux, ne sont jusqu’à présent que théorie stérile.
Prouvons le fait, il faudra bien que le gouvernement marcha avec nous. * M. Fre¬
dericq demande, pour assurer l’avônir des cours pratiques, l’institution d’assistants
et d’agrégés Spéciaux qui joueraient en Belgique le rôle des privat-docents de l’Alle¬
magne.
— M. le comte Goblet d’Alviélla a publié (Bruxelles, Muquardt. In-8°, xix et
i 3 i p.) un volume dont nous rendrons compte prochainement, sur VEvolution reli¬
gieuse contemporaine che\ les Anglais , les Américains et les Hindous .
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5 04 REVUE CRITIQUE D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS ET BELLES-LETTRES
Séance du 7 décembre i 883 .
L’Académie constate qu’il y a trois places vacantes dans la liste de ses correspon¬
dants : celles de MM. Cherbonneau et Guerrier de Dumast t correspondants français,
et de M. Dozy, correspondant étranger.
L’Académie se forme en comité secret.
La séance étant redevenue publique, M. Bréal fait une communication sur l’éty¬
mologie de quelques mots latins.
Souvent, fait remarquer M. Bréal, les étymologistes se sont fourvoyés, en cher¬
chant l’origine d’un mot, pour s’être attachés au sens le plus ordinaire du mot, et
non au sens primitif : or, il est rare que le sens premier d’un terme soit le plus
usité à l’époque classique. C’est ainsi que, prévenus de l’idée que tranquillus signifie
« en repos », plusieurs linguistes ont cherché à l’expliauer par le substantif quies.
Originairement, tranquillus signifiait, non « tranquille », mais a transparent ».
M. Bréal pense qu’on a dit transliquillus , de trans et liquet, puis, par contraction,
tranquillus. Quand ce mot signifie « au repos », il s'emploie surtout en parlant des
eaux qui, en effet, quand elles sont tranquilles, sont, en même temps, transpa¬
rentes.
Le mot maturus se rencontre en latin avec deux sens tout différents et même op¬
posés : tantôt il signifie a prompt », tantôt « lent ». Le premier sens est le plus or¬
dinaire, mais l'autre se rencontre aussi et a même passé en français : nous disons
« délibérer mûrement », c’est-à-dire « à loisir ». Le sens primitif, selon M. Bréal,
est (f matinal ». Il y a, en vieux latin, un adverbe matu, qui signifie « au matin, de
bonne heure », d’ou sont venus l’adjectif matutinus et le nom de la déesse Matuta.
C’est de cet adverbe que vient maturus , qui a voulu dire d’abord « matinal », puis
« hâtif », puis « rapide ». L’adjectif a donné le verbe maturare , qui signifie * hâter
les fruits, les faire mûrir » ; le verbe, à son tour, a agi sur l’adjectif, qui a pris un
nouveau sens, celui de « mûr », et de celui-ci est venue enfin la dernière significa¬
tion : a qui ne vient pas trop tôt, lent ».
Le mot spatium signifie primitivement la carrière à parcourir, dans une course
de chars. Les Latins ont emprunté le mot, comme la chose elle-même, aux Grecs :
spatium représente OTaBtov. Ce n’est pas le seul mot qui, en passant du grec en
latin avant l’époque de la latinité classique, ait subi un changement de forme assez
considérable.
Ouvrages présentés : — par M. Gaston Paris : Rajna (Pio), le Origini delYepopea
francese; — par M. de Rozière : Tamizey de Larroque, les Correspondants de Pei-
resc f VU : Gabriel de VAubespine, évêque d’Orléans; id., Jules Pacius de Ber iga,
compte-rendu du mémoire de m. Ch. Revillout ; — par M. Delisle : Prost (Auguste;,
les Chroniques vénitiennes , second mémoire; — par l’auteur : Heuzey (Léon), les
Figurines antiques de terre cuite du musée du Louvre , 4* livraison.
Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 28 novembre.
M. Bertrand présente une jambe de cheval antique, d’un fort bon style, trouvée en
Suisse:
M. l’abbé Thedenat, le dessin d’un manche de patère en bronze trouvé à Grand
(Vosges) et portant le nom de l’ouvrier L. Ausias Diodorus, nom qui appartient à
une famille de bronziers et de briquetiers établis dans le sud de l’Italie.
M. Saglio lit un mémoire de M. Lafaye sur les antiquités de la Corse.
M. Nicaise montre à la Société deux pointes de flèches en bronze à douille et à
ailerons découvertes dans un tumulus de la Haute-Marne, ainsi que des ornements
funéraires provenant du cimetière gaulois de Caupetz (Marne).
Le P. de la Croix présente différents objets en bronze découverts dans les ruines
de Sanxay, notamment une statuette représentant un homme jeune, imberbe, coiffé
du bonnet phrygien et portant une bipenne au bras gauche, statuette dans laquelle
M. Rayet croit reconnaître un Paris.
M. Max Werly communique différents noms de fabricants de bronze qu’il a réu¬
nis pour une étude sur les bagues et fibules à inscriptions de l’époque gallo-ro¬
maine.
E. Müntz.
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent , 3 3 .
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Deutocbe Lfttsratarwftmig, nf° 4S, i m décembre 188 3 -. Zgckler, Hmd-
fcruch der theologischen Wissenschaften m cncyclopàdischcr Darstei-
lung. IV Halbband. — Abbé Rohrbachers, Universalgeschichte der
KathoHschen Kirche. XII R. Ld xkutscher Bearbettung von H. Kôm-
stedt. XXRI B. von Alois Khôflbr. — P. Carus, Ursacbe, Grand und
Zweck. — T. Macci Plauti Comœdiae, rec. et enarr. Ussing. IV, 2.
Pseudolus et Pœnulus. (Langea : reste en arrière des travaux alle¬
mands.) — Schnippel, Ueber einen merkwürdigen Runenkalender (Sog.
Rimstock oder Primstab) des grossherzqd. Muséums zu Oldenburg.
(E. Martin : écrit méritoire.) — Frankl, zur Biographie Franz Griil-
parzers. (W. Scherer : quelques détails intéressants.) — George Sand,
Correspondance, 1812-1876, t. III u. TV. — Das Tagebmm Kaiser
Karls Vllaus der Zeit des ôsterreisdrîsdien Erbfolgekriegs, hrsg. v. Hei-
gel. (Krones : publication très importante; «ce Journal écrit en fran¬
çais et intitulé « Mémoire sur la conduite que j'ai tenue depuis la mort
de l'empereur Charles VI et tout ce qui s'est passé à cet égard » est une
source nïstoriqoe de p r e mie r rang ; il va du 20 o c t ob r e 1740 à fa fin de
l'année 1743.)— Rhabm, Die betrüglkhen GoUniacber axa Hofe dm
Hc raog s Julius von Bawrésdiweig. (Zunnsermann - alAacbaat^ — Ma r-
brt, Rômiscbe Chronologie. I. Gràmdlegende U nte r rod iongegL. (Sol-
tau : nouvelles hypothèse 'qu’il faut cond amner , mais fait nnewx
comprendre et fera résoudre des problèmes difficiles ; cette oeuvre est
d'un bout à Vautre originale et instructive.) — Depelchin et Crgomen-
berghs. Trois ans dans Y Afrique australe- Au pays d’UmzïLa. Chez les
Batongas. La vallée des Rarolsés. Débuts de La mission du Zambène.
Litres. (W.Ermon,)
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, al
ŒUVRES DE A. DE LOMîPËRIER
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Deuxième série : Géographie et cosmographie. 2 vol. in-8... 25 fr.
Troisième série : 2 vol. in-# (sous presse).
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ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, 28, RUE BONAPARTE, 28.
REVUE D’ETHNOGRAPHIE
PUBLIÉE
SOUS LA DIRECTION DE M. LE D«- HAMY
La Revue cI’Ethnographie, paraît tous les deux mois par fascicules in-8
raisin, de 5 à 6 feuilles d’impression, richement illustrés.
Prix de l’abonnement annuel : Paris, 2 5 fr. — Départements, 27 fr. 5 o. —
Etranger, 3 o fr. — Un numéro, pris au bureau, 5 fr.
La Revue d'ETHNOGRAPHiE, fondée en 18S2, a publié les articles suivants :
Première année 882.J Mémoires originaux : L. de Cessac, Observations sur des fétiches de
pierre sculptés en forme d’animaux, découverts à Pile de S.-Nicolas (Californie). — L. de Cessac,
Renseignements ethnographiques sur les Comanches. — J. E. de la Croix, Etude sur les Sakaies
de Pérak, presqu’île de Malacca. — E. Duhousset, Les initiateurs de l’art oriental, étude d’ethno¬
graphie artistique. — E. Dulousset, Les arts décoratifs au Petit-Tibet et au Cachemire. —
E. Fégueux, Les ruines de la Quemajla. — E. T Hamy. Note sur les figures et les inscriptions
gravées dans la roche à El Hadj Mimoun, près Figuig. — E. T. Hamy, La croix de Teotihua-
can, au Musée du Trocadéro. — A Landrin, Ecriture figurative et comptabilité en Bretagne. —
Fr. Lenormant, Les Truddhi et les Specchie de la terre d’Otrante. — Fr. Lenormant, Quelques
considérations sur l’ethnographie ancienne des deux bassins méditerranéens à propos d’une décou¬
verte faite à S. Cosimo. — Ern. Martin. Les funérailles d’une impératrice de Chine. — J. Mon-
tano, Quelques jours chez les indigènes de la province de Malacca. — J. Moura, Le Cambodge
préhistorique. — A Peney, Mémoires sur l’ethnographie du Soudan Egyptien ; I, Le Sennar ; les
Turcs au Soudan ; II, Le Kourdofan. — A. de Quatrefages, Nouvelles études sur la distribution
géographique des Nègritos et sur leur identification avec les Pygmées asiatiques de Ctésiàs et de
Pline. — A. Retzius. Ethnographie finnoise. L’écorce du bouleau et ses divers usages. —
G. Révoil, Notes d’archéologie et d’ethnographie recueillies dans le Çomal. — A. T. de Roche-
brune, De l’emploi des mollusques chez les peuples anciens et modernes. 1. Mollusques des
sépultures du Bas-Pérou. — D r Scheube, Le culte et la fête de l’ours chez les Aïnos. — P. Schu¬
macher, L’âge de pierre chez les Indiens Klamaths. — R. Verneau, Les inscriptions lapidaires de
l’archipel canarien. — Variétés. Revues et Analyses. Académies et Sociétés savantes. Exposi¬
tions, collections et musées. Correspondances. Nouvelles. Questions. Réponses . Nécrologie .
Bibliographie.
Deuxième année (188 3 ). N a% I-IV. A. Carre, Les Sérènes de Joal et de Portudal, côte occiden¬
tale d’Afrique. -- H. Tarry, Excursion archéologique dans la vallée de l’Oued Mya. — Alex,
Bertrand, Les Troglodites. — D. Charnay, Exploration des ruines d’Aké. Yucatan. — A. de
Quatrefages, Etude sur quelques monuments et constructious préhistoriques, à propos d’un monu¬
ment mégalithique de Me de Tonga-Tabou. — C. E. de Ujfalvy, Les Aryens au nord et au sud
de l’Hindou-Kouch. — T. Maler, Notes sur la basse Mixtèque. — H. Duveyrier, La confrérie
religieuse de Sidi Mohammed ben Ali es-Senousi. — E. T. Hamy, Note sur une inscription chro-
nographique de la fin de la période aztèque, appartenant au Musée du Trocadéro. — H. Duvey¬
rier, Isedraten et le schisme ibadite. — G. Duloup, Huit jours chez les M’Bengas. — Alex. Ber¬
trand, L’introduction des métaux en Occident. — Deniker, Les Ghiliaks d’après les derniers
renseignements. — A. T. de Rochebrune, De l’emploi des mollusques chez les peuples anciens et
modernes II. Mollusques des sépultures de l’équateur et de la Nouvelle-Grenade. — H. Ten Kate,
Quelques observations ethnographiques recueillies dans la presqu’île californienne et en Sonora.
— Baron L. de Vaux, Les Canaques de la Nouvelle-Calédonie. — Variétés , Revues et Analyses.
Aca démies et Sociétés savantes , Expositions , collections et musées . Correspondances . Nou¬
velles. Questions. Réponses. Nécrologie. Bibliographie.
Le n« V va paraître. Le n* VI paraîtra le 3 i décembre.
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils, boulevard Saint-Laurent, l>3.
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N* 52
Dix-septième année 24 Décembre 1883
REVUE CRITIQUE ((
D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
RRCURIL HEBDOMADAIRE PUBLIÉ SOUS LA DIRECTION
DK MM. S. GUYARD, L. HAVET, G. MONOD, G. PARIS
Secrétaire de la rédaction : M. A. Chuqubt
Prix d'abonnement :
Un an, Paris, 20 fr. — Départements, 22 fr. — Etranger, 2S fr.
^ PARIS
K K N ES T LEROUX, ÉDITEUR
i. I B K A I R K DK LA SOCIÉTÉ ASIATIQUE
G ► l ÉCOLI DES LANGUES ORIENTALES VIVANTES, ETC
28, RUE BONAPARTE, 28
A A > esset les communications concernant la rédaction à M . A. Chuqubt
( Au bureau de la Revue : rue Bonaparte, 28).
ERNEST LEROUX, ÉDITEUR, RUE BONAPARTE, 28.
PUBLICATIONS DE L’ÉCOLE DU LOUVRE
Volume I.
LA GAULE AVANT LES GAULOIS
D’après les Monuments
et les textes, par M, Alexandre BERTRAND, de l’Institut.
Un volume in-8, richement illustré. 6 fr.
{Souspresse) Volumes, II, III, IV. COURS DE DROIT ÉGYPTIEN
par M. Eug. REVILLOUT.
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PÉRIODIQUES
Thè Academy, n° 6 o 5 , 8 décembre 1 883 : Luther in the Archives of
the Vatican. Monumenta Reformationis Lutheranae ex tabularis S. Se-
des secretis i 52 i-i 525 , collegit Petrus Balan. (K. Pearson : de toute la
littérature qu’a fait naître le jubilé de Luther, cette collection de docu¬
ments du Vatican est peut-être la seule publication qui ajoute à notre
connaissance de la Réforme et qui ait une valeur durable pour Thisto-
rien; le i er fascicule renferme une série de lettres et de documents de-
1 )uis le premier avertissement de Léon X à l’électeur de Saxe, du 8 juil-
et 1520 aux lettres de Clément VII qui préparent le Reichstag de
Nuremberg; beaucoup de ces documents sont inédits.)— E. F. im Thurn,
Amung the Indians of Guiana, being sketches chiefly anthropologie
from the interior of British Guiana. — The Book-Lover's Enchiridion,
thoughts on thé solace and companionship of books, garnered from
writers of every âge, by Alex. Ireland. (E. Dowden.J — G. C. Davies,
Norfolk broads and rivers, or the waterways, lagoons and decoys of
East Anglia. (M. G. Watkins.) —The barbarous bird-gods, a savage
parabasis (A. Lang). — The « Birds, at Cambridge. (Percy Gardner.) —
Correspondence : Wyat and Surrey (W. Minto). — The true story of the
Somerset Patent. 1644. (Round.) — Robin Hood. (H. Bradley.) — Com¬
parative mythology (R. Brown). — The origin of the Aryans : Pensa,
Origines ariacae, hnguistisch-ethnologische Untersuchungen zur âltesten
Geschichte der arischen Vôlker und Sprachen ; O. Schrader, Sprachver-
gleichung und Urgeschichte, linguistisch-historische Beitràge zur Erfor-
schung des indogermanischen Alterthums. (Sayce : deux livres également
remarquables, d’un égal intérêt pour le philologue, l’ethnologue et l’his¬
torien de la civilisation ; sur des domaines divers, les deux auteurs ont
suivi une méthode semblable et sont arrivés parfois aux mêmes résultats ;
mais ils traitent leur sujet différemment; « Penka is daring and com¬
préhensive, Schrader cautious and critical »). — W. H. Willshire, A
descriptive catalogue of early prints in the British Muséum. German
and flemish schools. vol. IL (Middleton-Wake.)— Egyptian jottings.
(Am. B. Edwards.)
The Âthenaeum, n° 2928, 8 décembre 1 883 : Edm. W. Gosse, Seven-
teenth century studies, a contribution to the history of english poetry.
(Tous les essais que renferme ce volume sont remarquables et semés àc
pensées fines, d’observations ingénieuses, de détails curieux et piquants.)
— Arminius Vambéry, his life and adventures written by himself. —
The royal lineage of our noble and gentle families, compiled by Josef
Foster. — Correspondance de M. de Rémusat pendant les premières
années de la Restauration, publiée par son fils. 2 vols. (Se lit avec le
plus grand intérêt du commencement à la fin ; donne la note domi¬
nante du sentiment français sous la Restauration ; jugement dur mais
justifié sur Chateaubriand « guindé dans une colère politique factice, et
tout bouffi d’une vanité qui se montre partout ».)— Dr. George Alexan¬
dre Richey (Mahaffy). — The veracity of léguât (A. Newton). — The
battle of Hampstead Heath (Haies). — The Beckford library. — A
missing Luther manuscript. (K. Pearson) — Mr. Charles Leland
among the Red Indians. (Max Müller.) — « The missing link » (E. S.
Léonard).
Gœttingische gelehrte Anzeigen, n° 48, 28 novembre 188 3 : Ed. Bodemann,
Die aelteren Zunfturkunden der Stadt Lüneburg. I. (Frensdorff.)
N°* 49 et 5 o, 5 et 12 décembre 1 883 : Graetzer, Edmund Halley
und Caspar Neumann, ein Beitrag zur Geschichte der Bevôlkerungs-
Statistik. (Rehnisch.) — Grünhagen, Geschichte des ersten schlesischen
Krieges. II. (Heigel : beaucoup de documents inédits, des points nou¬
veaux et bien traités.)
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REVUE CRITIQUE
D’HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
N* 62
— 24 décembre —
1883
Sommaire t 2S4. Fontaine, L’armée romaine. — 255 . Lettres inédites de Baluze
à M. Melon du Verdier, p. p. Fage. — 256 . Correspondance inédite de Condorcet
et de Turgot, p. p. Ch. Henry. — Variétés : Ch. Joret, Le jasmin d'Ëspagne.
— A. Delboulle, Quelques notes sur l’édition de La Fontaine. — Chronique.
— Académie des Inscriptions. — Société des Antiquaires de France.
254. — L. Fontaine. L'armée romaine. Paris. Cerf, i 883 . In-12, 142 pp. 1 fr.
Ce petit volume appartient à une nouvelle collection illustrée que
fait paraître la librairie Cerf; comme tel, il porte le caractère de la
collection, qui est moins de viser à l’érudition et à des recherches nou¬
velles, que d’apporter au grand public ou au public de nos établissements
d’instruction les résultats déjà acquis de la science, en les présentant
d'une façon claire, et à peu près entièrement dénuée d'appareil scienti¬
fique. Nous avons tenu à le dire tout d'abord, pour qu'on ne fût pas
porté à demander à ce livre ce qu'il n'avait pas l'intention de donner.
C’est un ouvrage élémentaire sur l'armée romaine, fait en général avec
clarté et exactitude; — une véritable histoire de l'armée romaine, est
encore à faire.
VArmée romaine contient douze chapitres : I, Institutions militaires
de la République; milices temporaires;— II, Armées permanentes;
— III, Education nationale; exercices; — IV, Troupes auxiliaires; —
V, La légion, organisation et tactique de l’infanterie; — VI, Cavalerie,
armes spéciales, services accessoires; — VII, Marches et campements;
— VIII, Sièges, combats sur mer; — IX, Commandement; — X, Dis¬
cipline;—XI, Récompenses;—XII, Actions d’éclat. On a de cette
manière une série de petits tableaux où les faits du même genre se trou¬
vent rapprochés, sans qu'il soit toujours tenu un compte suffisant des
différences de temps et de lieu entre les événements et entre les insti¬
tutions.
P. 12, il est question du système militaire institué par Servius Tul¬
lius. C'est par erreur que M. Fontaine a dit qu’au-dessous de la der¬
nière classe venaient les prolétaires , et au-dessous de ceux-ci les capite
censi. Sans doute, à une époque postérieure, on distingua les prolétaires
des capite censi; Aulu-Gelle dit à ce sujet: Proletariorum ... ordohonestior
aliquanto et re et nomine quam capite censorum (Noct. Att. } XVI, 12).
Mais, dans la constitution de Servius, il n’y a pas la moindre distinc¬
tion entre les uns et les autres. Tous les citoyens dont le cens était infé-
Nnuvelle série, XVI. 52
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5o6
REVUS CRITIQUE
rieur à celui de la cinquième classe, s'appelaient indistinctement pro -
letariij capite censi, et formaient une même et unique centurie.
Une omission assez singulière est celle des Diplômes militaires .
Deux lignes seulement sont consacrées à ïhonesta missio (p. 24), et il
n'est parlé nulle part de ces plaques de bronze accouplées, provenant
des camps romains du Danube et du Rhin, auxquelles on a dû de si
curieux renseignements. La place de ces Diplômes était toute marquée
dans le chapitre des récompenses.
Une partie assez faible de l’ouvrage est celle qui a trait au service sur
mer; l'auteur aurait pu tirer bon profit du livre de Ferrero, ïordina -
mento delle armate romane, 1878. Entre autres détails, on aurait pu
rappeler que, pour punir les légionnaires, on les faisait passer dans le
service delà marine. — De même ce qui est dit des officiers, en parti¬
culier des centurions, ne paraît pas toujours suffisant, surtout après le
mémoire de Mommsen : Nomina et gradus centurionum (. Ephem.
epigr IV). — Pour le chapitre des récompenses, on aurait pu tirer
parti du mémoire de Henzen, Ann. delVinst. di corr. arch.j 1860; on
y aurait vu que les récompenses militaires se divisaient en deux classes
principales, d’une part les bracelets, les phalères, les colliers pour les
simples soldats et les centurions, d’autre part les couronnes, les hastœ
purae, les vexilla pour les officiers supérieurs; on y aurait vu encore
qu’il ne faut plus parler des couronnes civiques , car cette épithète de
civica semble provenir uniquement d’inscriptions fausses ou de copies
d'inscriptions peu exactes.
Après deux appendices par trop sommaires sur les centuries de Ser-
vius et sur la garnison de Rome à l'époque impériale, vient une courte
bibliographie. M. Fontaine, qui ne cite à peu près jamais ses sources
dans le courant de son ouvrage, consacre à la fin quelques lignes aux
scriptores de re militari anciens et modernes. Les noms d'Elien, Ar-
rien, Hygin, Frontin, Modeste n’y auraient pas été déplacés. On y
aurait voulu encore quelques détails sur les bas-reliefs de la colonne
Trajane, en tant que source de renseignements pour toutes les questions
d’archéologie militaire. Quelques mots sur le musée de Mayence, ou
tout au moins sur celui de Saint-Germain, à qui on a emprunté pres¬
que toutes les illustrations, auraient été aussi les bienvenus.
G. Lacour-Gayet.
*55. — t.ett*-e« Inédite* de Bnlnze à H. Melon do Verdier, publiées
avec une introduction et des notes, par René Fao€. Tulle, imprimerie Crauffon,
i 883 . Grand in-8 de 154 p.
M. R. Fage a fait précéder les Lettres inédites de Baluze d'une étude
fort bien faite et fort attachante, à laquelle je vais emprunter d’abord
quelques renseignements et quelques citations. J’examinerai ensuite la
correspondance même de l’illustre érudit.
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d'histoire et de LITTÉRATURE
5° 7
Un habitant de Tulle, un Tulliste, comme l’appelle M. F. (p. 6),
M. François Bonnelye, qui a laissé une histoire malheureusement ina¬
chevée de sa ville natale, avait formé une considérable collection de
documents limousins. 11 avait notamment su sauver de la destruction
un lot important de lettres, écrites par l’auteur des Vies despapes d'Avi¬
gnon à un de ses neveux, M. Melon du Verdier, conseiller au présidial
de Tulle *. Ces précieux autographes sont conservés par le gendre de
M. Bonnelye, M. Lacoste, qui avait été son élève et son collaborateur,
qui a bien voulu autoriser M. F. à les publier. Ce dernier s’empresse de
nous en avertir (p. 6) : les lettres de Baluze à son neveu sont relatives
pour la plupart à des affaires privées; mais, ajoute-t-il, elles n’en sont
pas moins intéressantes; « elles jettent un jour nouveau sur la vie in¬
time de leur auteur, nous apprennent quels étaient ses sentiments pour
les membres de sa famille, quelles relations il avait conservées avec sa
ville natale. Nous y voyons percer à chaque page la tournure aimable
de son esprit, sa nature bienveillante et serviable; nous saisissons au vol
les petits soucis qui venaient l’assaillir au milieu de ses travaux d’érudi¬
tion. Elles fourniront pour son portrait plus d’une ligne qui, jusqu’à ce
jour, avait échappé à ses biographes. » M. F., revenant sur ce sujet à la
fin de Y Introduction (p. 42), constate que son héros n’a rien à perdre à
être envisagé sous ce nouvel aspect; que l’on découvre en lui «c un cœur
simple et bon, attentif aux plus menus soins de la vie de famille, hospi¬
talier et généreux, un esprit facile et doux, ami des gais propos, enclin
à la plaisanterie et au badinage ». L’éditeur des Lettres à M. Melon du
Verdier conclut en déclarant que l’historien de Tulle fut « dans ses re¬
lations privées aussi bienveillant et agréable qu'il fut grand par le savoir
et les lumières ». Je suis complètement de l’avis de M. F. : la correspon¬
dance de Baluze est celle d’un homme excellent, aimable, et que l’on est
tout heureux d’entendre causer familièrement.
Cette correspondance s’étend du 10 octobre 1682 jusqu'à la fin de
l'année 1700. On n’a pas retrouvé les lettres écrites de 1700 à juillet
1718, époque de la mort de Baluze. On n’a conservé aucune des lettres
de 1687 et de 1697; une seule des lettres de 1691 a survécu ; quelques
années ne sont représentées que par deux ou trois lettres; enhn les séries
les plus importantes, celles de 1693 et 1696, qui comprennent dix-huit
lettres chacune, présentent elles mêmes de regrettables lacunes. M. F.
nous donne cent quatorze lettres à Melon du Verdier, trois à M me du
Verdier, quelques autres à divers personnages, tels que M. de Vau-
1. M. Melon du Verdier avait épousé la fille du frère de Baluze. Voici comment
Ponde de M ,,# Perrine se réjouit, dans sa première lettre (p. 4b), de posséder un ne¬
veu tel que celui-là : « Si tous les neveux d’alliance estoient aussy honnestes gêna
que vous, Monsieur, je voudrois en avoir une centaine. Cella ne contribueroit pas
peu à me faire passer la vie doucement. » Voir, à la suite de VIntroduction, le tableau
généalogique de la famille Baluze.
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5o8
REVUE CRITIQUE
bourg, le président de la Briffe, le marquis de Croissy, l'intendant Be-
gon, l’intendant de Bouville *.
Citons un cordial et charmant billet écrit à M“® du Verdier pour la
féliciter de la naissance de son fils (p. 22) :
« Mademoiselle, je ne sçaurois que vous louer de ce que vous venez
de faire. Car véritablement vous méritez des lolianges d'avoir fait un
beau garçon. Vous avez reculé pour mieux sauter a . Il faut désormais
bien prendre soin de vous et de ce petit enfant, et prier Dieu qu’il vous
fasse la grâce de le voir croistre et profiter de corps et d’esprit. Ce me
sera une très grande joye se je le pouvois voir dans un aage un peu
avancé. Je vous souhaite une bonne année, et suis de tout mon cœur,
mademoiselle, vostre très humble et très obéissant serviteur.
« A Paris, le 27 décembre 1692.
« E. Baluze. »
L’affection du grand-oncle se manifeste d’une façon touchante dans
divers passages de la correspondance. Tantôt Baluze cite avec une naïve
fierté (p. 85 ) le vers composé en l’honneur du nouveau-né par le pro¬
fesseur Hersant :
Et Balu^iolos gaillarda e gente ne potes ;
tantôt il s’extasie plaisamment sur l’appétit démesuré de l’enfant (p. 85 ) :
€ Pour mon fillol, qu’on dit estre si beau, j’appréhende que, suivant la
relation que vous me faites de son grand appétit, il luy faudra peut estre
3 oo,ooo vaches pour l’alaicter, comme à Pantagruel. Ce qui seroit d’une
très grande despense » 3 .
En dehors des épanchements de l’oncle et du grand-oncle, on trou¬
vera, dans les lettres de Baluze, diverses particularités dignes d’atten¬
tion. En voici quelques-unes :
41 C’est à Messieurs de Cosnac à se haster s’ils veulent me donner des
mémoires pour les évesques de Tulle qui sont de leur nom 4 . Car je pré-
1. M. F. a reproduit quelques extraits des lettres de Du Verdier à sa femme
(pp. 13-14) et aussi (pp. 16-17) deux lettres écrites à Du Verdier par M ,u Angélique
de Levrye, « qui habitait dans la maison de Baluze, s’était dévouée au vieux savant,
l’entourait de ses soins, le charmait par sa gaîté, était à la fois le lutin aimable et la
bonne fée de son foyer. » Mentionnons encore (pp. 17-18) une lettre à Du Verdier
d’un abbé Boyer, qui était l’ami de Baluze et qui se montre à nous comme un joyeux
convive.
2. L’enfant n’était arrivé qu’après dix années de mariage. La mère mourut quel¬
ques mois après ses couches, et Baluze eut autant de chagrin de la mort de sa nièce
•t filleule qu’il avait eu de joie de la naissance de son petit-neveu et filleul.
3 . On lit un peu plus loin (p. 89) : « Il n’est pas extraordinaire que mon fillol crie
toutes les nuits. Ce sont les tranchées qui sont cause de cette belle musique. w Ba¬
luze conseille d'appliquer t sur le nombril un emplastre de thériaque. » Le faible
grand-oncle a écrit (p. 1 36 ) une phrase d’un réalisme effrayant.
4. Lettre du 10 janvier 1688. Bertrand de Cosnac siégea de 1371 à 1376 et Pierre
de Cosnac, de 1 3^0 à 1402 (G.illia Christian^, t. Iï, f° 670). MM. de Cosnac ne du¬
rent passe hâter de fournir les mémoires attendus par Baluze, car 1 * Histoire de
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d'histoire et de littérature
5ü9
tends faire imprimer mon histoire cette année et quand elle sera im¬
primée, je ne la feray pas réimprimer pour leur faire plaisir » (p. 55).
— « Scaramouche mourut icy soudainement lundy dernier à dix heures
du soir, dans la rue Tiquetonne, paroisse Saint-Eustache. Il fut enterré
dans l'église Saint-Eustache, derrière la chaire du prédicateur, mercredy.
Son enterrement fut magnifique » (p. 109) *. — « M. de la Bruyère de
l’Académie française est mort icy soudainement. M. l’abbé Fleury aura
cette place, à ce qu'on dit > (p. 1 13 ) s . — « M. Lambert, si fameux
pour la musique, fut enterré avant-hyer au soir dans l’Eglise des Petits
Pères nos voisins, auprès de M r Lully,son gendre » (p. 117) 9 . — «M.de
Croissy mourut samedy dernier à dix heures du soir. M. de Torcy, son
fils, qui estoit receu en survivance, a esté très bien traité du Roy, qui
luy a donné la charge de trésorier de l’ordre, un brevet de retenue de
3 oo,ooo livres sur cette charge, et un brevet de retenue de 5oo,ooo li¬
vres sur celle de secrétaire d’Estat. Il a 3 1 ans. Et à cause de ce qu’il
est trop jeune, il n'entrera pas de sitost dans le conseil. Mais M.de Pom¬
ponne rapportera les affaires, et portera ensuite les ordres du Roy à
M. de Torcy pour faire les expéditions, et sera présent aux audiences
que M. de Torcy donnera aux Ambassadeurs. Son mariage avec Made¬
moiselle de Pomponne, qui a beaucoup de beauté et de mérite, est con¬
clu et signé, et je crois qu’ils espouseront au commencement de la se¬
maine qui suivra après la prochaine 5 . Je crois qu’on fera jeudy prochain
le service de M. de Croissy, dont on a enterré le corps à Saint-Eustache
auprès de celuy.de M. Colbert. Dieu leur fasse paix et miséricorde »
(pp. 118-119) 6 . — « Vous aurez sans doute appris, Monsieur, la mort
Tulle (pp. 207 et suiv.) contient peu de renseignements sur ces prélats, comme le
fait remarquer M. Fage. Les auteurs du Gallia nous rappellent que Baluze s’est aussi
occupé de l’évôque Bertrand de Cosnac dans les notes des Vies des papes d’Avi¬
gnon.
1. Qu’il y a loin, en librairie, de la coupe aux lèvres! Cette Histoire de Tulle ,
que son auteur espérait faire paraître en 1688, ne fut publiée que près de trente
ans plus tard, en *717.
2. Lettre du 11 décembre 1694. Cf. Jal, Dictionnaire critique , article Fiorilli
(Tiberio), p. 577.
3 . Lettre du 19 mai 1696. La Bruyère était mort à Versailles d’une apoplexie, dans
la nuit du 10 au 11 mai. 11 eut, en effet, Fleury pour successeur (16 juillet 1696).
On regrette que Baluze mentionne aussi sèchement la mort d’un écrivain tel que
l’auteur des Caractères. Il n’avait pas eu plus d’égards pour La Fontaine, dont il
avait, trompé par un faux bruit, annoncé la mort dans une lettre du 28 février 1693,
plus de deux ans trop tôt (p. 94).
4. Lettre du 3 o juin 1696. Cette indication si précise permet de rectifier la petite
erreur du Dictionnaire historique de la France , d’après lequel Michel Lambert serait
mort en juillet. Mais j’oubliais que déjà Jal avait donné la bonne date, 27 juin
(P- 7 33 )-
5 . Le 11 août suivant, Baluze reparlait ainsi de ce mariage (p. 120) : « M. de Torcy
espousera jeudy prochain M ,u Félicité de Pomponne, qu’on dit estre bien faite. On
luy prépare son appartement à l’hostel de Croissy. Son carrosse avec se* armes e°:
déjà fait. Dieu veuille par sa sainte grâce bénir ce mariage. >
6. Lettre du 4 août 1696. — Dans une lettre du 11 du môme mois, Baluze dit
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REVUE CRITIQUE
5lO
de feu M. l'abbé de la Trappe arrivée le 27 octobre, aagé de 76 ans,
37 ans de conversion et de pénitence. On lui fit hyer un service dans
l’église de l’Oratoire » (p. 1 5 3 ) *.
Il y aurait encore à citer bien des choses sur l’évêque de Tulle, Hum¬
bert Ancelin, qui, le jour où il quitta ses diocésains, leur appliqua ce
verset du psaume : In exitu Israël de Ægypto , domus Jacob de po -
pulo barbaro (pp. 23-24) % sur les chanoines de Tulle dont Baluze fut
assez mécontent pour écrire cette phrase menaçante (p. 75) : « S’ils per¬
sévèrent à me refuser la justice que je dois attendre d'eux, je crois que
je me resoudray à demander un arrest du conseil contr'eux, en vertu
duquel je fairay saisir tous leurs revenus a », sur l’arrestation et la con¬
damnation (p. 94) du conseiller au Parlement, Vedeau de Gramont *,
sur Jacques Aymar et sa baguette peu divinatoire (pp. 95, 98, 99), sur
l’étymologie du mot languedocien Vhabitarelle (p. 96), sur le cardi¬
nal de Bouillon donnant à Baluze (pp. 144, 148) le prieuré de Talmy,
près de Lyon, « un très beau bénéfice », comme l’appelle le reconnais¬
sant protégé de ce prince de l’Eglise, etc. »
Il y aurait, de plus, à relever, sans parler de diverses indications bi¬
bliographiques, force détails pittoresques sui les habitudes du bon
vieux temps, en général, sur les habitudes de Baluze, en particulier, no¬
tamment des détails gastronomiques. Il y aurait, enfin, à citer plus d’un
met piquant dans le genre de celui-ci, par exemple (p. 89) : * On a
bien de la peine à contenter les femmes ». Mais j’en ai assez dit pour
donner au lecteur une juste idée du recueil de M. Fage et il ne me reste
qu'à m’associer au vœu qu'exprime (pp. 5-6) l’excellent éditeur * au
encore au sujet du frère de Colbert ; « On fit son service à Saint-Eustache jeudy
dernier, très magnifique, et où il y avoit une très belle et très nombreuse compagnie.
Je n'en ay jamais veu de plus belle. »
1. Lettre du 6 novembre 1700. L’abbé de Rancé, étant né en janvier 1626, n'avait
pas 76 ans au moment de sa mort, mais seulement 74.
2. Je me souviens d’avoir vu, dans le volume 254 de la collection dite des ar¬
moires de Baluze, une vive tirade de ce dernier contre le prélat qui paraît avoir
manqué surtout de la première des qualités épiscopales, la bonté.
3 . Baluze avait été pourvu 4 ’une « chanoinie » à Tulle quelque temps auparavant.
Voir (p. 58 ) une lettre du 19 février 1689.
4. On ne trouve rien sur ce criminel dans les Archives de la Bastille de M. F. Ri¬
vai sson. En revanche, je signalerai, dans le tome XII de ce recueil, divers documents
relatifs à la malheureuse affaire du cartulaire de Brioude, cause de la disgrâce et de
l’exil de Baluze.
5 . Les notes ne sont pas moins soignées que l’Introduction; une seule de ces no¬
tes m’a paru inexacte. Baluze, le 28 février 1693, écrit à son neveu (p. 94) : « Le
bruit a couru ces jours passés que l’abbé Boileau prédicateur estoit mort. Mais cella
ne s’est pas trouvé vrai ». M. F. a cru reconnaître dans ce prédicateur o l’abbé Jac¬
ques Boileau, docteur en Sorbonne, frère de Nicolas Boileau-Despréaux ». Il s’agit là
d’un homonyme, Charles Boileau, prédicateur du roi et membre de l’Académie
française, mort à Paris, le 4 mai 1704. J'ai déjà eu l’occasion de faire remarquer
qu’il est très facile de confondre les uns avec les autres, à moins d’y regarder de près,
les trois abbés Boileau contemporains, Charles, Jacques et Jean-Jacques, ce dernier
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d’histoire et de littérature
5 i i
sujet de la publication des lettres écrites par Baluze sur des points d'éru¬
dition, publication qui « serait accueillie avec la plus grande faveur par
le monde savant ». Je me suis dit bien souvent, en parcourant, à la Bi¬
bliothèque nationale, les minutes ou les originaux de la correspondance
de Baluze que Ton y conserve en tant de volumes : Ah! la belle thèse de
doctorat que serait une étude complète sur les travaux imprimés et iné¬
dits de Baluze, avec accompagnement d’un choix des plus curieuses et
des plus importantes de toutes les lettres qu'il écrivit ou qu’il reçut !
T. de L,
■à 56 . — Correspondance Inédite de Condorcet et de Turgot (IYYO*
1 T 79 )* publiée avec des notes et une introduction d’après les autographes de la
collection Minoret et les manuscrits de l’Institut, par M. Charles Henry. Un vol.
in-8 de xxx-324 p. Paris, Charavay frères, 1882. Prix : 7 fr. 5 o.
Les 253 lettres qui composent ce recueil ne sont pas toutes inédites*
comme semblerait l'indiquer le titre du volume; beaucoup d’entre elles
avaient été publiées déjà, d’une manière plus ou moins complète, par
MM. Arago et O’Connor, d’après les copies de l’Institut. M. Ludovic
Lalanne en a communiqué plusieurs à M. Henry; enfin M. Minoret a
mis à la disposition du savant éditeur tous les originaux qu’il possède*
De cette façon, M. H. a pu rééditer avec une fidélité plus grande les let¬
tres déjà connues, au nombre d’environ 70; et il en a donné environ
180 nouvelles. Cette publication est intéressante; elle le serait bien da¬
vantage si les lettres de Turgot, avec lesquelles les lettres de Condorcet
ne peuvent pas entrer en parallèle, étaient plus nombreuses; il y en a
5 o à peine, contre 200 du marquis. L’édition est très soignée ; une
bonne introduction fait suffisamment connaître les deux personnages;
une très belle photogravure et un fac-similé embellissent encore le vo¬
lume. M. Henry n'a mis de notes au bas des pages que celles qui sont
absolument indispensables; on en souhaiterait un plus grand nombre
(par exemple, p. 147, à propos de la Correspondance et des Œufs rou¬
ges, il eût été bon de dire à quels pamphlets ces termes font allusion).
J'ai remarqué aussi dans un vers de Voltaire (p. 5 ) une faute qui fait un
vers faux :
Du bon curé de Afélaine
(lisez Mélanie ). Les renseignements que cette correspondance, moitié
scientifique et moitié politique, fournit sur la société du xvin e siècle sont
peu nombreux; M. Henry annonce des Lettres inédites de M Ue dê Les-
pinasse, avec étude et documents nouveaux qui certainement présen¬
teront un intérêt plus vif.
A. Gazier.
étant le Boileau de l’Archevêché dont il a été récemment question ici à propos des
Correspondants de la marquise de Balleroy (N° du 5 novembre, p. 369, note 3 ).
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5x2
REVUE CRITIQUE
VARIÉTÉS
JLe Jasmin d'Espagne.
Dans un article que M. Tamizey de Larroque a consacré, dans le
n° de la Revue critique du 29 octobre, à la dernière édition des œuvres
de La Fontaine, se trouve une note qui, en ma qualité de demi-botaniste,
a attiré vivement mon attention. A propos de ce vers de la fable Le
jardinier et son seigneur :
Peu de jasmin d’Espagne et force serpolet,
les savants éditeurs ayant rappelé « qu’il n’y avait pas bien longtemps
qu’on connaissait le jasmin d'Espagne en France lorsque La Fontaine
publia ses fables, » M. Tamizey de Larroque leur reproche de n’avoir
pas « ajouté que l’introduction du jasmin dans nos jardins est due à
l'illustre Peiresc » ; je ne crois pas que les commentateurs de La Fontaine
aient eu tort de ne pas faire cette remarque par la raison fort simple
que Peiresc, comme on va le voir, n'a certainement pas introduit en
France le jasmin dont il est ici fait mention. Comme il s’agit d’une
question de botanique littéraire, une de celles qui présentent les plus
grandes difficultés, on me permettra d’entrer dans quelques explications,
et je suis persuadé que M. Tamizey de Larroque, qui préfère « à tout
la vérité >, me saura gré et d'avoir relevé une erreur échappée par
hasard à son érudition toujours si sûre et d’essayer d'éclaircir un passage
de Gassendi qui a bien besoin de commentaire.
Il n'est pas exact de dire que « l’introduction du jasmin en France
est due à Peiresc » ; bien avant le grand érudit, cette plante était culti¬
vée dans nos jardins; Ronsard, mort cinq années seulement après la
naissance de Peiresc, en parle déjà :
11 sort de votre bouche un doux flair qui le thym,
Le josmin et l'œillet, la framboise et la fraise
Surpasse de douceur L
Quel est ce jasmin dont parle ici le chef de la Pléiade? J'essaierai de
le dire plus loin ; en attendant, précisons, autant que possible, les faits.
Sur les trente et quelques espèces que compte, d’après Loiseleur-Des-
longchamps *, le genre Jasminum , — De Candolle dans le Prodromus
en admet 96 — toutes, il s’en faut, ne sont pas cultivées en France ; une
croît spontanément dans le Midi, en particulier en Provence, c'est le
Jasminum fruticans L. dont les feuilles sont ternées et les fleurs jaunes,
mais peu odorantes; il est évident qu’il ne peut être question ici de cette
espèce; de laquelle donc s’agit*il ? Voyons d’abord ce que dit Gassendi.
1. R. 167, ap. Littré, s. v. jasmin, A. Paré, mort en 1590, connaît également le
jasmin : Lesquels seront oints d'huile de jasmin ou d'euphorbe, XVIII, 63 . Ibid.
a. Dictionnaire des sciences naturelles de Levrault, 18*2. s. v. jasmin.
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d’hîSTOIRE ET DEf LITTÉRATURE
5 I 3
Parlant des jardins de Beaugensier et des plantes rares qu’on y voyait,
en particulier de celles que Peiresc avait eu le mérite d’acclimater le
premier en Europe (quarum habendarum et per Europam excolenda -
rum prima laus Peireskio debetur ), Gassendi ajoute : « ejusmodi po -
test Gelseminum Indicum arborescens y semper virens, flore luteo,
ac suavissime odorato. » Et deux pages plus loin. « Multo minus
refero Gelseminum Americanum maius, flore phœniceo, Persicum
violaceo, Arabicum pleno . » Ainsi, d’après Gassendi, Peiresc aurait
introduit en France la culture non du jasmin, mais de quatre jasmins,
l'un à fleurs jaunes, l'autre à fleurs rouges ou purpurines, le troisième à
fleurs violettes et le quatrième à fleurs pleines. Le Gelseminum Persicum
à fleurs violettes n’est point un jasmin, c est le lilas de Perse (Seringa
Persica DC.); le Gelseminum Americanum k fleurs purpurines paraît
être le gayac et n’est point non plus un jasmin ; quant au Gelseminum
Arabicum, c’est le Mogori ou Nycthanthe du Dictionnaire de Levrault,
le Jasminum sambac de De Candolle, « ob florem suavolentem in Indiâ ,
Arabiâ , imo Europâ sœpe cultum ) » ajoute ce dernier. Mais qu’est-ce
que le Gelseminum indicum? Ici commence la difficulté.
Tout d’abord il faut dire que le Gelseminum indicum n’est pas la
plante désignée parfois sous le nom de jasmin d’Espagne ; celui-ci est le
Jasminum grandiflorum L., espèce voisine du Jasminum officinale L.;
l’un et l’autre ont les feuilles ailées et les fleurs blanches, tandis que le
Gelseminum indicum a, d’après Gassendi, les fleurs jaunes. Le diction¬
naire des sciences naturelles de Levrault 1 indique un jasmin des Indes et
un jasmin indien ; ce dernier appelé aussi jasmin en arbre, est la Plumeria
rubra , arbrisseau d’Amérique qui ne peut être la plante acclimatée par
Peiresc a ; le jasmin des Indes est la Barrelieriaprionitis L., plante qui
paraît également autre que le Gelseminum indicum de Gessendi 3 ; quel
est donc ce Gelseminum? Cornuti a donné le nom de Gelseminum à
une espèce de Bignonia, la radicans , réunie aujourd’hui au genre
Tecoma , et appelée vulgairement € Jasmin de Virginie », mais cette
plante, ayant les fleurs d’un rouge éclatant, ne peut par suite être celle
dont il est ici question. Une autre Bignone, appelée « Jasmin jaune de
Virginie, » pourrait, ce semble, convenir, c est la Bignonia sempervivens
désignée aussi sous le nom de Gelsemium nitidum; les feuilles en sont
« toujours vertes, » les fleurs jaunes « répandent au loin une odeur très
agréable; » on pourrait donc croire que c’est elle que Peiresc a le pre¬
mier acclimatée; mais elle est originaire de la Caroline et delà Virginie,
tandis que le Gelseminum indicum fut, dit Gassendi, apporté de Chine
1. Je suis obligé de citer cet ouvrage bien vieilli, parce que c'est le seul que j’aie
à ma disposition ici à Aix, mais il est encore plus complet que celui d’Orbigny que
je suis allé consulter à Marseille.
2. La Plumeria rubra est appelé Jasminum indicum par Merian. De Candolle,
op. cit., VIII, 390.
3 . La B. prionitis est une acanthacée désignée parfois, d’après De Candolle, sous
le nom de Lycium indicum.
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REVUE CRITIQUE
514
à Peiresc (id primum ex Sina advectum et Belgenserij excultum );
de plus la Bignonia sempervivens a les tiges sarmenteuses, pendant que
le Gelseminum indicum en question est donné comme arborescent •.
Parmi les différentes espèces de jasmin proprement dit Vodoratissimum
sembleraitpouvoir lui être identifié ; les fleurs en sont jaunes et trèsodoran-
tes, mais il est originaire de Madère et n'a donc pu être apporté de Chine
dans les jardins de Beaugensier. De Candolle indique bien une espèce
introduite de Chine en Angleterre, le Jasminum subulatum, Lindl.,
mais rien ne fait croire qu’elle ait jamais été cultivée en Provence ou
même en France. Il faut en dire autant du Jasminum floridum, qui
croît spontanément, d’après De Candolle, dans la Chine septentrionale;
mais qui d'ailleurs ressemble trop au Jasminumfruticans de Provence
pour être le Gelseminum dont parle Gassendi.
On voit qu'il est à peu près impossible de dire au juste quelle plante fut
apportée de Chine à Peiresc sous le nom de Gelseminum indicum *, mais
quel est le jasmin dont parle Ronsard? Il semble bien que ce soit le
Jasminum officinale , cultivé depuis fort longtemps dans le nord de la
France à cause des parfums qu’exhalent ses fleurs. C’est probablement
aussi de ce jasmin qu’il est question dans le passage d’Ambroise Paré cité
dans une note précédente s . Quant au jasmin d'Espagne du vers de La
Fontaine, il peut bien sans doute être réellement le Jasminum grandiflo •
mm, mais rien ne le certifie ; le serpolet ( Thymus serpyllum) auquel il
est joint, est une plante spontanée et très commune, qui n’a jamais été
cultivée dans un jardin, ni au nord, ni au midi de la France 1 2 3 4 . Son nom
a été évidemment mis ici au hasard. En est-il de même de celui du jasmin
d'Espagne? Cela n'est pas impossible; mais on peut aussi supposer que
La Fontaine voulant opposer le nom d’une plante rare et d’agrément à
une commune et usuelle, a pris celui du Jasminum grandiflorum d’im¬
portation encore récente alors, s'il est vrai, comme le dit Loiseleur-
Deslonchamps, qu'en 1822 elle ne fût connue en France que depuis
près de deux cents ans. En tout cas, le jasmin dont parle, peut-être un
1. Ce qui rend à peu près impossible l’identification que j’essaie, c’est le caractère
incomplet de la description de Gassendi, peut-être celle que Ferrari a faite, paraît-
il, du Gelseminum donnerait-elle quelque lumière à ce sujet; mais je n’ai pas à ma
disposition sa a Florum cultura » et ne puis dès lors décider cette question.
2. 11 est à noter que, dans son récent ouvrage sur Vorigine des plantes cultivées
(Paris, in-8, iS 83 ), Alph. De Candolle ne parle pas de l’introduction en Europe des
diverses espèces de jasmins exotiques qui y sont cultivées.
3 . L'huile de jasmin se retire surtout aujourd’hui du jasmin d’Espagne {Jasmi¬
num grandiflorum L.), si donc celui-ci avait été cultivé en France du temps d’A.
Paré, on pourrait croire que c’est de l’huile de cette espèce qu’il parle; mais l’intro¬
duction du J. grandiflorum lui étant probablement postérieure, il est plus vraisem¬
blable que l’huile dont il fait mention est celle du J. officinale.
4. Si le serpolet [Thymus serpyllum) ne se trouve jamais dans les jardins, on y
cultive quelquefois, au moins dans le nord de la France, mais en très petite
quantité, le thym ordinaire ( Tymus vulgaris).
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d’hISTOIRK ET DR LITTÉRATURE
5 15
peu au hasard, La Fontaine l , n'est point le Gelseminum indicum accli¬
maté par Peiresc, et celui-ci n’a introduit en France ni le jasmin d'Es¬
pagne (Jasminum grandiflorum), ni le Jasmin officinal, espèce beaucoup
plus commune et très vraisemblablement déjà connue au xvi° siècle.
Charles Joret.
Quelque* note» sur l’édltlou «le «I. De La Fontaine* par H. Regnier,
Hachette. i 883 .
On a fait ici même ( Revue critique du 29 octobre 1 883 ) l’éloge de
cette belle édition que nous admirons comme tout le monde : c'est
dire qu'en signalant quelques omissions, nous n’avons pas le dessein
d'en diminuer le mérite.
La Cigale et la Fourmi. — Sur la fourmi économe, laborieuse,
outre Salomon, voir Horace, Epit. I, et Virgile, Géorg ., 1: 186. Comme
sources, il fallait citer « la Fourmi et le Ceraseron », ballade bien con¬
nue d’Eustache Deschamps (t. I, 3 i r, A. T.) et surtout Baïf (Mimes,
I, 43, filanchemain) :
Tout Testé chante la cigale,
Et l’hyver elle eut la faim vale :
Demande à manger au fourmi :
Que fais-tu tout Testé? — Je chante.
11 est hyver : dance, fainéanté.
Il n'aurait pas été inutile non plus de renvoyer aux poésies de Jean
Doublet, p. 34, édit. Jouaust :
Pardonnés-moi, je nous égalé, hélas,
A la chanteresse cigale
Qui Tyver dur ne prévoit pas, etc.
Comme naturaliste, La Fontaine est bien faible dans cette fable : une
courte note là dessus eût été indispensable/
Le Renard et le Corbeau. — On ne mentionne pas la ballade d’Eus-
tache Deschamps (II, 61, A. T.) qui porte le même titre et traite le
même sujet.
La Besace. — Il eût fallu donner en note ces vers de Baïf :
Un bissac au cou nous portons,
Poche davant, poche derrière.
(Mimes, I, 71, Blanchemain.j
Besacier, porteur de besace. Ce mot paraît être de l’invention de
La Fontaine, est-il dit dans la note 8. — Le mot était en usage bien
avant La Fontaine ; je me contenterai de citer cet exemple : « Ceux qui
peuvent bien gagner leur vie : Comme font ces besaciers et autres
porceaux. » (Guill. Farel, Sommaire , p. 238 , édit. Fick.)
Le rat de ville et le rat des champs. — Avant Andrieux, D’Angot
de l’Eperonniere avait traduit la fable d’Horace (Prélude poétique ,
1. l e jasmin d'Espagne n’est guère cultivé qu’en pot dans le nord de la France,
comment aurait il pu croître avec « l’oseille et la laitue » dans le jardin du seigneur
de la fable?
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REVUE CRITIQUE
édit. i 6 o 3 ); après Andrieux, André Chénier s'est exercé sur le même
sujet.
L’homme entre deux âges et ses deux maîtresses. — Nous avons
encore sur ce sujet de jolis vers de Baïf :
Un vieillard fut qui grisonnoit,
Amoureux de deux concubines,
Toutes deux mauvaises et fines,
Ausquelles il s’abandonnoit, etc,
(Mimes , II, 201.)
Les Frelons et les mouches à miel . — « N’a-t-il point assez léché
l’ours? » — Ce vers est commenté par un passage de Rabelais bien
connu. La légende de l’ourse qui lèche ses petits, pour les façonner,
remonte très loin ; on pouvait renvoyer aux auteurs de Bestiaires, à Bru-
netto Latino, Trésors, p. 253 , à Jean de Condé, Li Lais de l’Ourse,
à Oppian, De Venatione, p. 26, édit. Didot, et surtout à Manuel Phi-
lès, dont Rabelais connaissait évidemment ce passage :
"AcifjixGv àpxoç dtxoTÎXTOuaa xpéaç
aoçûç StapOpoT, xat tutcoî, xai faiSpûvei.
{De Prop'ietate Anim., 27, édit. Didot.)
Le chêne et le roseau . — « Et fait si bien qu’il déracine, etc. > Cf.
Bossuet : « Autant que ce grand arbre s’était poussé en haut, autant
semblait-il avoir jeté en bas de fortes et profondes racines. » ( Serm . sur
l’ambition, p. 277, édit. Rebelliaud). Cela vaut mieux que toutes les
citations de Voltaire.
L'astrologue qui se laisse tomber dans un puits. — On raconte la
même anecdote sur Anaximandre, et son disciple Anaximène : « Ce
gentil astronome Anaximène, lequel regardant une fois trop ententi-
vement les etoilles, et levant le nez en l’air comme une truye aggravée,
tomba à l’impourveu dedens une fosse, là où il fut moqué d'une vieille
qui le reprit de vouloir cognoistre ce qui estoit aus cieus, ne pouvant
pas seulement voir les choses qui estoient devant luy à ses pieds. >
(Tahureau, Dial., 128, Conscience).
Le coq et le renard. — Habert a fait sur ce sujet une fable qui est
citée partout, mais elle a échappé aux annotateurs.
La goutte et l’araignée. — Sujet effleuré dans les contes d'Eutrapel :
« Vous savez, dit Polygame, l’eschange que Jupiter fit des domiciles et
habitations entre mes demoiselles l’Hyraigne et la Goutte, etc. (p. 170,
édit. Guichard).
Le chat et le vieux rat. — Note 6. OûXaxoç employé par Babrius ne
signifie pas sac, mais quelque vieille peau de bête écorchée, ce qui est
d’une invention plus ingénieuse.
Le Jardinier et son Seigneur. — « Ce sont là jeux de prince. » Les
éditeurs expliquent ce proverbe par un passage tiré de VApologie pour
Hérodote. Il nous semble qu’il n'était pas hors de propos d’y ajouter ce
souvenir : « Le jour de la visite que fit la reine Christine à l’Académie
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d’histoire et de littérature
5 *7
(i i mars i 658 , l’assassinat de Monaldeschi était tout récent), c'est Meze-
ray qui, faisant l’office de secrétaire, lut, à l’article Jeu du Dictionnaire,
cette locution proverbiale qui fit rire, dit-on, la princesse : « Jeux de
prince, qui ne plaisent qu’à ceux qui les font. » (Sainte-Beuve, Caus.
du Lundi, VIII, 182).
U âne et le petit chien . — « Holà, Martin-bâton. • Cette expression,
est-il dit en note, est empruntée à Rabelais. Cela n’éclaircit rien du
tout. On a essayé dans la Romania , t. IX, 127, de débrouiller l’origine
de cette locution, et peut-être a-t-on rencontré juste.
Le geai paré des plumes du paon . — Voir dans le recueil de P.
Meyer, p. 355 , « du dit de la Corneille ».
Le cheval s'étant voulu venger du cerf. — Baïf (Mimes, II, 201)
est encore oublié :
Maintenant je diray la fable
Du sot cheval et misérable, etc.
A. Delboulle.
CHRONIQUE
FRANCE. — Notre collaborateur, M. Barbier de Meynard, vient d’ajouter une.
livraison nouvelle à son Supplément aux dictionnaires turcs, Cest la troisième du
premier volume; elle s’étend jusqu’à la moitié de la lettre tchim , qui est la sep¬
tième de l’alphabet turc. On y trouvera, comme dans les livraisons précédentes, une
foule de locutions ignorées ou mal expliquées jusqu’à ce jour : termes techniques
d’administration, de marine, d’art militaire, nomenclature technique et médicale,
etc. L’auteur s’est appliqué aussi à réunir le plus grand nombre possible de pro¬
verbes et d’adages, dont la langue vulgaire est richement pourvue et qui font de
certains articles du dictionnaire autant de petits tableaux de mœurs. Tel est, par
exemple, l’article consacré au pilav ou pilau, le mets favori des Turcs, article où se
trouvent, à côté d’une nomenclature complète et entièrement inédite, de curieux ren¬
seignements sur certaine cérémonie en usage chez les Janissaires. Il ne reste plus
pour terminer le premier volume, qu’à publier la quatrième livraison à laquelle sera
jointe une introduction sur la langue et la lexicographie ottomanes.
— M. Ch. Robert a fait tirer à part des Mémoires de l’Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres, t. XXX, première partie, un travail ( Sur la prétendue restaura¬
tion du pouvoir de Maurice Tibère dans la Province et sur les monnaies qui en
seraient la preuve , 46 pages in-4 0 , avec cartes et une planche), dans lequel il dis¬
cute une question historique depuis longtemps débattue, la question de savoir si,
vers la fin du vi* siècle, l’empire de Byzance avait cherché à ressaisir le sud-est des
Etats mérovingiens, l’ancienne Province romaine, en fournissant des secours à un
prétendu fils de Clotaire I er , nommé Gondovald. Les hypothèses émises à ce sujet
depuis le siècle dernier ne s’appuient sur aucun document. Bonamy, ayant rencontré
certaines monnaies d’or frappées à Marseille et à Arles à l’efligie de l’empereur
Maurice, avait conclu que ces monnaies avaient été fabriquées sur l’ordre de Gon¬
dovald, agent de la cour de Byzance, pour faire reconnaître l’autorité de l’empe¬
reur. La thèse de Bonamy, admise par la plupart des numismatistes, a été notamment
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5l8 REVUE CRITIQUE
soutenue par M. Max. Deloche dans un mémoire lu devant l'Académie des Inscrip-
tions et Belles-Lettres. M. Ch. Robert démontre, par des arguments qui nous pa¬
raissent irréfutables, que l’empire d'Orient, à cette époque, est resté entièrement
étranger aux affaires intérieures de la Gaule et que les médailles mérovingiennes à
l'effigie de l’empereur Maurice, pas plus que celles à l'effigie d'Anastase, de Justin,
de Justinien, de Justin II, de Phocas et d'Héraclius, ne prouvent une restauration de
l'autorité impériale en Gaule. 11 paraît désormais hors de doute que les monnaies en
question se rattachent au système général d'imitation des types byzantins par les
rois mérovingiens.
— Dans un mémoire récemment communiqué à l’académie de Montpellier,
M. Charles Revillout avait tracé une esquisse de la vie du jurisconsulte Jules Paciu ^
de Beriga , avant son établissement à Montpellier. 11 avait pu contrôler ce qu’on sait
des aventures et des pérégrinations universitaires de Pacius, grâce à un exemplaire
d'un recueil de costumes, donné par Pacius à son fils, et. que celui-ci utilisa comme
album en priant les amis de son père et les siens d'y écrire leur nom avec une
sentence et la date de leur autographe. Ce recueil de costumes ainsi annoté de i5g4
à 1602, est malheureusement mutilé, mais, tel qu'il est, il fournit de curieux ren¬
seignements pour l'histoire des mœurs académiques à la fin du xvi* siècle. M. Ta-
mizey de Larroque vient, à propos du mémoire de M. Révillout, de réunir quelques
indications et citations qui complètent la biographie de Pacius ( Jules Pacius de
Beriga , compte-rendu du mémoire de M. Ch. Revillout, avec addition de documents
inédits. Paris, Palmé. In-8°, i 5 p. Extrait de la a Revue des questions historiques»,
octobre i 883 , et tiré à soixante exemplaires). Il donne une lettre de Peiresc, un
des meilleurs élèves et des meilleurs amis de Pacius, lettre qui nous apprend que
la conversion du jurisconsulte au catholicisme était déjà chose préparée et décidée
en 1609. Il donne aussi de courts extraits de quelques lettres de Jules Pacius et eu
reproduit trois in extenso , deux qui contiennent de curieux détails sur son séjour à
Montpellier en 1612, la troisième, où, presque mourant, Pacius écrit de Valence à
Peiresc pour se plaindre des malheurs de sa vieillesse.
— M. A. Chuquet va publier à la librairie-Delagrave une édition de la Campagne
de France de Goethe (on sait que le poète allemand accompagna en 1792, à la suite
de l'armée du duc de Brunswick, le régiment de cuirassiers prussiens que comman¬
dait le duc de Saxe-Weimar, et qu'il assista à la canonnade de Valmy). M. Chuquet a
fait précéder cette édition d'une introduction qui retrace brièvement, d'après les
sources françaises et allemandes, l'histoire de la campagne; il s’attache à montrer
que le récit de Gœthe est exact et fidèle; il prouve que le poète a surtout consulté,
outre ses propres notes, les Mémoires de Massenbach et ceux de Dumouriez. L'oeu¬
vre de Gœthe a la forme d'un Tagebuch écrit au jour le jour ; M. Chuquet a mis un
sommaire en tête de chacun de ces petits récits. L'annotation est à la fois historique
et philologique; chaque nom de lieu ou de personnage, chaque événement un peu
important est commenté d'après les documents de l'époque; un grand nombre de
mots et d'expressions sont expliqués et éclaircis par des exemples tirés des autres
œuvres de Gœthe. Une carte, dressée par l'éditeur, permet de suivre la marche de
l’armée prussienne; on n'y a inscrit que les villages et le6 villes cités dans le récit
de Gœthe. Cette édition est spécialement destinée aux candidats à nos écoles mili¬
taires et aux élèves de ces écoles; elle pourra être très utile. Ajoutons que M. Chu¬
quet ne publie que la partie du récit relative à la Campagne de France ; on ne trou¬
vera dans son édition que les pages concernant les mois d'août et de septembre
(Longwy, Verdun, l’Argonne) et la première quinzaine d’octobre (retraite des Prus¬
siens, Luxembourg et Trêves).
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d’histoire et de littérature
5*9
— La brochure que M. Henri Co&dikr, directeur de la Revue de VExtrême Orient ,
vient de publier sur le conflit entre la France et la Chine (Paris, Cerf. In-8°, 48 p.) f
est une excellente a étude d'histoire coloniale et de droit international ». L'auteur
l’a ainsi divisée ; I. La France et VAnnam. II. La Chine et VAnnam. III. VAngleterre
et VAnnam . IV. La Chine et les puissances européennes . Nous n'avons pas à nous
occuper ici de la partie de la brochure où M. Cordier démontre que la revendication
des droits de la France est en même temps utile à son commerce et indispensable à
la conservation de la Basse Cochinchine, et que, d'ailleurs, la Chine n’a nullement
l’intention de pousser les choses à l’extrême. Nous insistons surtout sur les rensei¬
gnements, importants pour l’histoire, que renferme cet opuscule à la fois si intéres¬
sant et si instructif. M. Cordier retrace les phases principales de la politique fran¬
çaise au Tong'King; il montre que l'idée d’un grand établissement colonial sur la
côte de l’Indo-Chine, mise en avant sous Louis XVI, ajournée mais non abandonnée
par Napoléon I 4r , ressaisie sous Louis XVIII, a reçu un commencement d'exécution
sous Napoléon III, et que l'intervention amenée par l'exploration de Dupuis au fleuve
Rouge et l’expédition de Francis Garnier était la conséquence fatale d’une politique
remontant à plus de cent ans : tous les gouvernements qui se 6ont succédé depuis le
règne de Louis XV, dit M: Cordier, ont participé à cetie politique, et c'est peut-être
le seul exemple d'une tradition constamment suivie que nous prouvons dans l'his¬
toire de nos relations extérieures (p. i 3 ). L’auteur fait, en outre, l’histoire sommaire
des rapports de la Chine et de l'Annara; les deux pays se sont ou bien combattus
ou bien rapprochés par des ambassades réciproques; tantôt l’Annam a refoulé les
Chinois; tantôt il a été réduit en province chinoise; finalement, il a accepté de son
voisin une sorte d'investiture qui donnait à la Chine une supériorité honorifique,
mais non la suzeraineté. Le chapitre sur VAngleterre et VAnnam n’est pas moins
attachant que ceux qui le précèdent. On se demande pourquoi les Anglais n’ont pas
tenté de faire sur la côte orientale de l’Indo-Chine ce qu’ils ont fait sur la côte occi¬
dentale; mais, comme le remarque M. Cordier, il est rare que les Anglais aient pos¬
sédé les premiers leurs colonies actuelles; aux traités de 1763, de 1783, de i8i5, il
n’y avait ni en Cochinchine ni au Tong-King aucune nation européenne qui pût
exciter leur convoitise. L’évêque d’Adran avait, il est vrai, signé avec Louis XVI à
Versailles un traité (1787) qui assurait à l’empereur Gia-Iong les secours de la
France; mais, heureusement, ce traité ne fut pas exécuté. D’ailleurs, les efforts que
firent les Anglais pour établir directement des relations avec l’Annam ont échoué;
M. Cordier en raconte l’histoire (1778, 1804, 1821-1822, de Chapman à Crawfurd).
On voit, par ce court exposé, tout ce que la brochure de M. Cordier renferme, non-
seulement d 'actuel, mais de neuf, d’inédit et de vraiment intéressant.
— Les n°* 9 et 10 (novembre et décembre) du Bulletin mensuel de la Faculté des
lettres de Poitiers renferment : un art. deM. F. A. Aulard, Brébeuf et La Rochefou¬
cauld (les vers cités par La Rochefoucauld dans la préface des Maximes et attribués
par lui à Brébeuf sont, en effet, dans Brébeuf, mais La Rochefoucauld les a si forte¬
ment retouchés qu’ils deviennent en partie son œuvre) ; des Notes sur VUniversité
de Poitiers , par M. Dartige ; une étude de M. J. Parmentier sur l'enseignement
de M. Fustel de Coulanges à la Faculté des lettres de Strasbourg ; M. Parmentier
expose, dans ce dernier article, ce qu’était à Strasbourg, avant 1870, l’enseigne¬
ment de l’éminent historien, et les résultats qu’il a donnés.
— Nous avons annoncé dans notre précédent numéro le premier volume ( Camille
Corot , par MM. Jean Rousseau et Alfred Robaut) d’une collection intitulée Biblio¬
thèque d'art moderne que publie la librairie de Y Art. La même librairie (Rouam*
avenue de l’Opéra, 33 ) édite en même temps une autre collection, la Bibliothèque
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520 REVUE CRITIQUE
des musées, qui doit mettre à U portée des artistes, des érudits et des amateurs, dans
une édition à la fois luxueuse et bon marché, une sorte de catalogue critique et rai¬
sonné, orné de belles planches, des différents musées d’Europe. Le premier volume
de cette collection vient de paraître ; il est consacré au Musée de Cologne (un vol.
in-4 # écu avec 20 gravures dans le texte, 3 francs). L’auteur, M. Emile Michel, étu¬
die dans ce volume l’école de Cologne, ses origines toutes religieuses, et surtout ce
maître Wilhelm dont l’originalité, toute restreinte qui elle soit encore, dépasse de
si loin celle de ses devanciers (p. 21) et ce maître Stephan (Loethner ou Lochner),
l’auteur de la Madone au berceau de roses qu’on voit au musée de Cologne et du
triptyque de la cathédrale, le Dombild (Vannonciation de la Vierge, Vadoration des
mages , saint Géréon et ses compagnons, sainte Ursule ). C’est surtout le saint Géréon
qu’admire M. Em. Michel; « l’œuvre sincère, transparente en quelque sorte nous
découvre son auteur, ce peintre de foi si naïve qui, presque au même moment
qu’Angclico da Ficsole et Memling, et avec une candeur égale, pouvait, comme eux,
exprimer dans leur plénitude des sentiments dont l’art ne devait plus, après lui,
la retrouver pureté intime et l’idéale douceur» (p. 37). Mais, après maître Stephan,
l’école de Cologne cesse d’avoir sa vie propre; elle emprunte à l’école de Bruges;
ses peintres, comme au début, redeviennent anonymes, et l'on est réduit à les dési¬
gner par les titres de leurs meilleures productions: le maître de la Passion deLyvei'S-
berg , le maître de VAutel de la Croix , celui de la Mort de la Vierge, etc. M. Michel
signale encore d’autres productions de l'école flamande, entre autres le portrait de
Jabach , attribué à Van Dyck, le vulgaire Prométhée de Jordaens, un beau Teniers,
etc. En résumé, conclut le critique (p. 63 ), la réunion des tableaux de l’école alle¬
mande primitive constitue le principal intérêt du musée de Cologne, et nulle part
ailleurs, on ne pourrait aussi bien étudier cette école. La valeur esthétique d’un
maître tel que maître Stephan est tout à fait de premier ordre et le Dombild est un
pur chef-d’œuvre. Cette étude se termine par un catalogue alphabétique des tableaux
de peintres anciens exposés au musée de Cologne. Elle sera prochainement suivie
d’autres études sur le Musée de Munich, le Musée de Cassel , etc.
— M. Eug. Mûntz, conservateur de l’Ecole nationale des Beaux-Arts, vient de
faire paraître Les historiens et les critiques de Raphaël, i483-i883 , essai biblio¬
graphique pour servir d’appendice à l’ouvrage de Passavant avec un choix de docu¬
ments inédits ou peu connus» (librairie de Y Art, 1 vol. in-b° raisin, illustré de qua¬
tre portraits de Raphaël, tiré à 200 exemplaires, 6 fr.). Ce volume a paru dans la
deuxième série de la Bibliothèque internationale de l'Art, La première série vient de
s’enrichir de trois nouveaux volumes : La gravure en Italie avant Marc-Antoine, par
M. le vicomte Henri Delaborde (un vol. de 3 oo pages, orné de x 10 gravures, 25 ir.);
Claude Lorrain , sa vie et ses oeuvres , par M me Mark Pattison (un] vol. de 3 oo pages,
orné de 40 gravures, 3 o fr.); Les Délia Robbia, leur vie et leur œuvre , par
MM. J. Cavalucci, professeur à l’Académie des Beaux-Arts de Florence, et E. Moli-
nier, attaché à la conservation du musée du Louvre ( 3 oo pages, plus de 100 gravu¬
res, 3 o fr.). Deux autres volumes sont sous presse : Le livre des peintres , de Carel
Van Manderz, traduction, commentaires et notes par M. Henry Hymans, conserva¬
teur des estampes à la Bibliothèque, et les musées d'Allemagne, par M. Emile
Michel.
— On annonce la mort de M. l’abbé Renoux, doyen de la Faculté de théologie
d’Aix, docteur ès-lettres, etc. Outre ses thèses pour le doctorat, dont l’une, la fran¬
çaise, Etude sur les sermons du P . Lejeune , contient des aperçus ingénieux, l’abbé
Renoux avait publié, il y a deux ans, un travail plein d’intérêt sur Les prédicateurs
célèbres de VAllemagne.
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d’histoire et de littérature
521
— M. François Lenormant, membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Let¬
tres, professeur d’archéologie près de la Bibliothèque nationale, vient de mourir à
l’âge de 46 ans. 11 était né à Paris, le 17 janvier 1837. 11 se fit connaître, fort jeune
encore, en publiant un Essai sur la classification des monnaies des Lagides (i 856 ) et
sur VOrigine chrétienne des inscriptions sinaitiques(i$ 5 q). 11 fit partie de la rédac¬
tion de Y Ami de la religion et de la Gaqette de France. Il se trouvait en Orient lors-
qu’eurent lieu les massacres des chrétiens (1860) et il écrivit aux journaux des let¬
tres intéressantes sur ce sujet. Ses publications sont : Deux dynasties françaises
che$ les Slaves méridionaux auxx iv° et xv* siècles (1861); Le gouvernement des îles
Ioniennes (1861); Histoire des massacres de Syrie (1 861); Recherches archéologi¬
ques à Eleusis (18G2); La Révolution de Grèce, ses causes, etc. (1862); Essai sur
Vorganisation politique et économique de la monnaie dans Vantiquité (1 863 ); La
Grèce et les îles Ioniennes (i 8 G 5 ) ; Turcs et Monténégrins (1866) ; Manuel d'histoire
ancienne de l'Orient (1868, 2 vols. in-8°), couronné en 1869 par l’Académie fran¬
çaise; Lettres assy-riologiques et épigraphiques (1871-72,4 vols.); Les premières
civilisations (1874, 2 vols) ; Les sciences occultes en Asie (1874-75, 2 parties in-8°),
etc. Il avait tout récemment publié une Traduction de la Genèse d’après l’hébreu
avec distinction des éléments constitutifs du texte, suivie d’un essai de restitution
des livres primitifs dont s’est servile rédacteur (comp. Revue critique, n° 42, i 5 oc¬
tobre i 883 ) et le récit d’un voyage dans la grande Grèce. Il avait édité, d’après le
manuscrit de son père, des Mémoires sur la peinture de Polygnote dans la Lesché de
Delphes (1864) et recueilli ses Essais sur l'instruction publique (1873).
— M. Pierre-Marin-Victor-Richard de Laprade, mort le 14 décembre, était né à
Montbrison le i 3 janvier 1812. Il avait fait ses études à Lyon et s’était inscrit au
barreau ; il débuta, en i 83 g, par un poème intitulé: Les parfums de Madeleine, puis
donna la Colère de Jésus (1840) et la légende spirituelle de Psyché (1841); après
avoir publié, en 1844, ses Odes et poèmes , il reçut une mission en Italie où il fit,
dans les bibliothèques, des recherches historiques. Il occupa, de 1847 à 1861, la
chair de littérature française de la Faculté des lettres de Lyon ; une satire politique
en vers, Les Muses d’Etat, insérée dans le Correspondant du 25 novembre, le fit ré¬
voquer. Cependant il avait publié ses Poèmes évangéliques (i 852 ) et ses Symphonies
(i 855 ) ; il fut élu à l’Académie française, en remplacement d’Alfred de Musset, le
11 février i 858 . Il a encore publié les Idylles héroïques (i 858 ); Questions d'art et
de morale (1861); Le sentiment de la nature avant le christianisme (1866); Le senti¬
ment de 'la nature che\ les modernes ( 1868) ; Pernette, poème (1868), etc , etc.
— M. Bon-Louis Henri Martin, mort le 14 décembre, était né à Saint-Quentin,
dans l’Aisne, le 20 février 1810. Il suivit, comme externe, les cours du collège de
sa ville natale et se destina au notariat. Mais bientôt l’histoire l'attira; il écrivit d’a¬
bord des romans historiques dont l’époque de la Fronde était le sujet : Wolfthurm
(i 83 o); La vieille Fronde (1832); Minuitet demi (1832); réimprimé en 1 855 sous le
titre Tancrède de Rohan ; Le libelliste (i 833 ). Puis, avec M. Paul Lacroix (le bi¬
bliophile Jacob), il conçut une Histoire de France par les principaux historiens qui
serait une série d’extraits des chroniques et des principaux mémoires historiques.
(Paris, Marne, 1 833 .) Mais bientôt Henri Martin tenta unè œuvre plus personnelle;
de i 833 à i 836 , il donna, en quinze volumes, la première édition de son Histoire
de France ; le nom de l’auteur ne figura sur le titre qu’à partir du dixième volume.
Il publia ensuite, avec M. Paul Lacroix, Y Histoire de la ville de Soissons (1837;
2 vols.), où lui appartiennent le premier volume et le dernier chapitre du second. Il
reprit quelque temps après son Histoire de France et la refondit complètement; ce
travail dura de 1837 à 1854; c’est la troisième édition de l’ouvrage, car la première
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522
REVUE CRITIQUE
avait eu un second tirage que l'auteur n’avait pas revu. L'Académie des Inscriptions
et Belles-Lettres décerna, en 1844, le premier prix Gobert aux volumes X et XI qui
traitent des guerres de religion. L’Académie française donna, en i85i, aux volu¬
mes XIV, XV et XIV, consacrés au Siècle de Louis XIV, le second prix Gobert, et,
en i 856 , après la mort d’Augustin Thierry, le premier prix. De i 855 à 1860, parut
une quatrième édition, remaniée et complétée; elle obtint, en i86q, de lTnstitut, le
prix biennal de 20,000 francs. M. H. Martin, dont nous ne devons pas retracer ici
le rôle politique, avait été élu membre de l'Académie des sciences morales et poli¬
tiques le 29 juillet 1871 et de l’Académie française le 2 juin 1879 (en remplacement
de M. Thrers). M. Carnot, ministre de l'instruction publique, l’avait chargé, en
1848, du cours d’histoire moderne, à la Sorbonne; il prit pour sujet la politique ex¬
térieure de la Révolution; mais il n’enseigna qu’un semestre. Citons encore, outre
VHistoire de France, les ouvrages suivants : De la France , de son génie et de ses
destinées (1847); Jeanne d'Arc (i 856 ); Daniel Manin (1859); Vunité italienne et la
France (1861); Jean Reynaud ( 1 863 ) ; Pologne et Moscovie ( 1 863 ); Vercingétorix ,
drame héroïque (i 865 ); La Russie et VEurope (1866); Dieu dans l’kistoire (1867),
traduction de l’allemand, de C. J. Bunsen, avec Dietz; Etudes d*archéologie celtique
(1871); Les Napoléons et les frontières de France { 1874), etc. Il avait commencé, en
1867, la publication d'une Histoire de France populaire illustrée, dont deux volu¬
mes parurent avant la guerre et qui forme six volumes.
ALLEMAGNE. — Sous le titre a Revue trimestrielle pour la culture et la littéra¬
ture de la Renaissance », Vierteljahrsschrift fur Cultur und Litteratvr der Renais¬
sance, M. Louis Geigek, professeur à l’Université de Berlin et directeur du Gcethe -
Jahrbuch , publiera chez Seemann, à Leipzig, un recueil scientifique qui servira de
centre aux études sur la Renaissance. L’éditeur entend sous le nom de Renaissance
— lisons nous dans son programme — « le grand mouvement intellectuel qui saisit
les peuples de l'Europe au xiv° siècle et les enchaîna jusqu’au xvi® siècle; on devra
surtout étudier, parmi ces peuples, les Italiens et les Allemands ; mais les autres
nations de l’Ouest et de l’Est ne seront pas exclues. Parmi les productions de cette
époque et de ces peuples, on s’attachera en première ligne aux œuvres littéraires;
puis viendront les efforts tentés sur le domaine des arts; par exception, on pourra
traiter aussi de l’histoire politique du temps. Le grand public trouvera son compte
à cette publication; car les fascicules renfermeront, aussi souvent qu’il sera néces¬
saire, des gravures tirées à part; en outre, le premier article de chaque fascicule aura,
autant que possible, un caractère général. Le recueil sera, comme le Gcethe-Jdhr-
buch, ainsi divisé : I. Abhandlungen und Forschungen; II. Neue Mittheilungen; III.
Miscellen ; IV. Recensionen und Referate. »
— M. Hermann Hallwich, l’auteur d'un grand travail en deux volumes sur fa
mort de Wallenstein (Wallensteins Ende) travaille à une biographie complète du
célèbre comte Henri Mathias de Thurn.
— La librairie Henninger, de Heilbronn, vient de publier une petite brochure de
M. Félix Franke : Die praktische Spracherlcrnung. En 3 g pages, l’auteur traite des
principes de l’étude pratique des langues, fondés sur la psychologie et la physiologie
du langage. II rejette l’ancienne a méthode de traduction » qui prend pour base la
langue maternelle, et il demande que l’écolier fasse à la langue étrangère, ce « mé¬
canisme psychologique associé à un sentiment du mouvement des organes» le même
accueil que l'enfant à sa langue maternelle. Nous croyons retrouver dans celte pla¬
quette une pensée profonde que Guillaume de Humboldt exprimait déjà il y a
cinquante ans. a On ne peut, dit M. Franke, à proprement parler, enseigner une
langue; on ne peut que l’éveiller dans Pâme de celui qui écoute ». M. Franke déve-
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d’histoire et de littérature
523
loppela méthode qu’il fonde sur ce principe, et fait, comme Perthes, une large part
à l’assimilation inconsciente. Son exposition est le plus souvent claire et convain¬
cante. Pourtant, il nous reste un doute. Serait-il vraiment pratique de n’enseigner
aux commençants que l’orthographe phonétique, naît au lieu de knight , par exem¬
ple? Espérons que M. Franke prouvera bientôt la vérité de ses théories par une ap¬
plication lit concreto .
— L’éditeur Schmeitzner, de Chemnitz, qui s’est fait récemment connaître par la
publication dés œuvres de M. Fr. Nietzsche, l’ardent disciple de Schopenhauer et de
Wagner, a réédité trois articles (publiés d’abord dans les Bayreuther Blœtter , i 883 .
Livraisons IV-VI) de M. O. Schlbmm, Ueber gymnasiale Er^iehung, C’est une suite
d’attaques contre ceux que l’auteur nomme les « philistins », c’est-à-dire tous ceux
qui professent ou favorisent à quelque degré que ce soit l’enseignement actuel, su¬
périeur ou secondaire. L'auteur reproche à ces c philistins » de n’avoir pas toutes
préparées et toutes faites.les formes que devront revêtir les hommes de génie à ve¬
nir. il écrit à la façon de Nietzsche; mais il n’a ni son esprit ni sa verve; c’est un
de ces pessimistes qui ne voient qu’avec dépit et colère tout ce qui les entoure; il
ferait bien de se rappeler le mot de Byron : Complaint of présent days Js not a cer¬
tain path to future praise .
— M. O. Jæger, directeur du Friedrich-Wilhelmsgymnasium de Cologne, a fait
paraître sous ce titre Aus der Praxis, einpœdagogischesTestament (Wiesbaden), un
petit livre intéressant et instructif. On vient de publier un Manuel du démagogue ;
l’opuscule de M. Jæger pourrait s’intituler : le manuel du pédagogue. L’auteur donne
à un jeune ami, qu’il introduit d’abord commet Probe-Candidat », puis comme pro¬
fesseur titulaire, enfin comme professeur de gymnase, les conseils que lui dicte une
expérience de quarante ans. Le livre comprend trois cents paragraphes. M. Jæger
fait û de ce qu’on a nommé « l’hyperbole didactique », de tous les grands mots sur
la méthode ou les méthodes de l’éducation. « Je te donnerai, moi aussi, dit-il à son
jeune ami, deux instructions brèves et courtes : i° lorsque tu seras devant tes trente
élèves, rappelle-toi ce que tu pensais au temps où tu étais élève toi-même; 2° ce que
tu demandes à tes élèves, de la sixième à la rhétorique, fais-le aussi toi-même ».
Nous recommandons vivement la lecture de ce petit livre, auquel l’auteur a su don¬
ner la forme la plus attachante et la moins pédantesque.
— M. Hermann HûfFer, professeur à l’Université de Bonn, a fait tirer à part l’é¬
tude qu’il avait publiée dans 1 * «c Historisches Taschenbuch » sur la République
parthénopéenne de l’an 1799, die Neapolitanische Republik des Jahres 1799/ nous
y reviendrons.
GRANDE-BRETAGNE. — L’Université de Cambridge a conféré le titre de maître
ès-arts à M. J. H. Hesselb, l’éditeur bien connu de la Lex salica et l’auteur de la
a Vie de Gutemberg » ( Life of Gutemberg). M. Hessels prépare une édition d’un
traité de Wyclif de artibus animae pour la « Wiclif Society » et la publication
d’un important lexique du latin du moyen âge* basé sur celui de Ducange, et qui
paraîtra à la librairie J. Murray.
— La Clarendon Press publie le premier volume d’une édition des Annales de
Tacite par le Rev. H. Furnsaux.
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524 REVUE CRITIQUE D'HISTOIRE ET DE LITTÉRATURE
académie des inscriptions et belles-lettres
Séance du 14 décembre 188 3 .
M. Heuzey, président, annonce la mort de M. François Lenormant, membre or¬
dinaire de l'Académie, décédé à Paris le 10 décembre, et exprime en quelques mots
les regrets que cette perte laisse à la compagnie.
M. le Ministre de l'instruction publique écrit à l'Académie pour l’inviter à pré¬
senter des candidats aux chaires d’arabe vulgaire et d’arménien actuellement vacantes
à l’école spéciale des langues orientales vivantes.
L’Académie procède à l’élection de deux commissions chargées de présenter des
candidats aux places de correspondant dont la vacance a été constatée à la dernière
séance. Ces commissions sont ainsi composées :
Pour présenter des candidats à une place de correspondant étranger, MM. Maury,
Gaston Paris, Barbier de Meynard, Alexandre Bertrand;
Pour présenter des candidats à deux places de correspondant français, MM. Egger,
Delisle, Jourdain, Dumont.
M. Bréal continue ses observations sur l’étymologie de divers mots latins.
On écrit ordinairement poenitet par oe t et l’on croit que ce mot vient de poena ,
pris au sens de remords. Mais, en ancien latin, ainsi que l’a remarqué déjà Aulu-
Gelle, me poenitet ne signifie pas a je me repens » ; cette expression signifie simple¬
ment : « je regrette, je ne suis pas content ». Dans plusieurs inscriptions, par exemple
dans celle de l’empereur Claude, à Lyon, ainsi que dans les meilleurs manuscrits,
ce verbe est écrit par un ae : paenitet . M. Bréal rattache paenitet à l’adverbe paene,
qui signifie primitivement : a intérieurement, à fond, tout à fait, de fond en com¬
ble » et a pris plus tard seulement le sens de a presque » Penitus , penes, penetro ,
sont des mots de la même famille; tous se rapportent à des idées de « fond », d’« in¬
térieur ». Me paenitet signifie : « cela me pénètre, cela me touche intérieurement,
cela me contrarie ».
Il y avait à Rome, au Capitole, devant le temple de Minerve, trois statues qui
représentaient des personnages agenouillés; c’étaient probablement des caryatides.
Elles avaient été rapportées de Syrie par le consul Acilius, vainqueur d’Antiochus.
Le peuple de Rome leur donna le nom de Nixi Di, c’est-à-dire, a les dieux age¬
nouillés », du verbe nitor, qui signifiait primitivement « être agenouillé ou accroupi».
Plus tard, le verbe ayant perdu ce sens et pris celui de a s’efforcer », on s’imagina,
pour expliquer le nom de ces dieux, que c’étaient ceux qui présidaient aux efforts
des femmes en couches : velut présidentes parientium nixibus . Ce qui prouve que
la signification primitive de nitor est bien u s’agenouiller », c’est que ce mot est
parent du latin genu, « genou », et du grec « à genoux » : cette parenté est
visible dans une forme ancienne, qui nous a été conservée par Festus : gnictor .
Ouvrages présentés : — par M. Barbier de Meynard : i° Kuenen, Religion natio¬
nale , Religion universelle , traduit du hollandais par Maurice Vernes; 2 0 Guyard
(Stanislas), the Eastern Caliphate ; — par M. de Rozière : i° Willems, Traité de
droit public romain. 5 e édition ; 2° Recueil des instructions données aux ambassa¬
deurs et ministres de France depuis les traités de Westphalie jusqu'à la Révolution
française , publié sous les auspices de la commission des archives diplomatiques au
ministère des affaires étrangères, t. I* r : Autriche , avec une intreduction et des notes
par Albert Sorel. Julien Havet.
SOCIÉTÉ NATIONALE DES ANTIQUAIRES DE FRANCE
Séance du 5 décembre i883.
La Société procède au renouvellement du bureau pour l’année de 1884. Sont nom¬
més : président, M. Guillaume: premier vice-président, M. Courajod; deuxième
vice-président, M. Saglio : secrétaire, M. Gaidoz ; secrétaire-adjoint, M. Corroyer;
trésorier, M. Aubert; bibliothécaire-archiviste, M, Nicard. Sont nommés associés
correspondants : M. Quarrè Reybourbon, à Lille; M. des Roberts, à Nancy; M. de
Laigue, consul de France à Livourne.
M. Ulysse Robert lit une note sur des évêques de Toulon, de Carcassonne, d’Ur-
f el et de Turin, appartenant au ix® siècle et jusqu’ici inconnus. Ces noms lui ont
té fournis par le Bullaire de l’abbaye de Saint-Gilles.
( M. Alfred Ramé présente trois fibules gallo-romaines faisant partie de sa collec¬
tion. L’une d’elle représente le buste d v une orante exécuté ou repoussé avec une
rangée de perles formant bordure. La barbarie du travail accuse l’époque mérovin¬
gienne. Ce bijou a été recueilli vers i 83 o à Roiglise, canton de Roye (Somme).
Eugène Muntz.
— Erratum (séance du 14 novembre) lire roche obsidienne et forts vitrifiés .
Le Propriétaire-Gérant : ERNEST LEROUX.
Le Puy , imprimerie de Marchessou /Us, boulevard Saint-Laurent , 2 3 ,
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BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE DE L’ART
SOUS LA DIRECTION DE
M. EUGÈNE MÜNTZ
CLAUDE LORRAIN
SA VIE ET SES OEUVRES
D'APRÈS DES DOCUMENTS NOUVEAUX
PAR
M ME MARK P A T T I S O N
Auteur de The Renaissance in France.
Un magnifique volume in-4 0 de 3 oo pages, illustré de nombreuses gravures
dans le texte et de trois Héliogravures tirées à part.
Prix : broché , 30 fr. — Riche reliure à biseaux , 35 fr. — 2 5 exemplaires
sur papier Hollande , 60 fr.
CHAPITRE PREMIER. — Le paysage au xvu* siècle. — Claude et Ruisdael. — Les
biographes de Claude. — Premières études, — Visite à Naples. — Voyage en
Lorraine. — Travaux à Nancy. — Rencontre avec Charles Errard à Marseille.
— Retour en Italie. — Relations avec Joachim de Sandrart.
CHAPITRE II. — Premiers travaux à Rome. — Claude Mellin. — M. de Béthune.
— Le cardinal Rospigliosi. — Le cardinal Bentivoglio. — Urbain VIII. — La Fête
villageoise . — Le cardinal de Médicis. — M. Passart. — Tableaux du musée de
Grenoble. — Les Barberini. — Le cardinal Poli. — VEmbarquement de sainte
Ursule. — Le cardinal Giorio. — Le Débarquement de Cléopâtre. — Le duc de
Bouillon. — Le prince Pamphili Doria. — Le Moulin. — Le Temple d f Apollon
dans Vile de Délos. — La Reine de Saba. — Tableaux du duc de Liancourt. —
Le prince Verdummille.
CHAPITRE III. — Inaction de Claude entre les années 1648 et 1 65 1. — Henri-
Louis de Loménie. — Le Pas de Su^e et le Siège de la Rochelle. — M. de La-
borna. — L’ Enlèvement d'Europe. —Alexandre VII. — L’année de la peste. —Claude
et le Poussin. — Tableaux pour l’évêque de Montpellier. — Tableaux du duc de
Devonshire. — Les Cascateiles de Ttvoli. — Tableaux de Lord Ellesmere. —»
Repos de la Sainte Famille. — Sinon devant Priam. — Marine du Signor Albe-
rici. — Tableaux du duc de Westminster. — Commandes de M. Lebrun. — La
Naissance de VEmpire romain et la Décadence de VEmpire romain. — Comman¬
des pour Anvers. — Il Signor Bonelli. — Claude et le Poussin à la Crescenzia.
CHAPITRE IV. — Maladie de Claude. — Son testament. — Agnès Gellée. — Domi¬
nique Barrière. — Tableaux exécutés pour M. Dalmahaye, d’Anvers ; pour Mon¬
seigneur de Bourlemont. — Tableaux de M. de Liancourt et du cardinal Poli gra¬
vés par Barrière. — Tableaux du comte de Waldstein, du cardinal Rospigliosi. —
Clément IX. —Jean Dominique. ~ La duchesse de Mazarin et le connétable Colonna.
— Le Temple de Vénus. — Nouvelle maladie de Claude. — Codicilles ajoutés à
son testament. — Défauts de ses derniers tableaux. — Le Persée du cardinal Mas-
simo. — Tableaux de l’Electeur de Bavière.
CHAPITRE V. — Répliques de tableaux antérieurs. — Mort du cardinal Barberini.
— Mécènes nouveaux. — Don Gaspar Altieri. — Le cardinal Spada. — Tableau du
Colisée avec le Temple de Castor et Pollux peint pour le chevalier Saraceno. —
Le Parnasse du connétable Colonna. — Sainte-Marie Madeleine et le Christ en
jardinier. — Mort de Claude. — Sa succession. — Le Livre de Vérité. — Dessins
d’après nature.
CHAPITRE VI. — Le Livre de Vérité. — Le marquis de Laborde à Chatsworth. —
L’empereur de Russie et le duc de Devonshire. — Le Livre de Vérité chez Ear-
lom.— Les filigranes et les inscriptions. — Dessins de Claude dans les musées
publics et les collections particulières. — Recueil du Musée Britannique. — Repro¬
ductions de Lewis, de Braun. — Procédés employés par le maître. — Dessins d’a¬
nimaux. — Dessins faits dans la campagne de Rome. — Académies. — Charles
Claude.
CHAPITRE VII. — Les eaux-fortes de Claude. — Leurs caractères et"'leur chrono¬
logie. — Influence de Joachim de Sandrart et de Callot. — Les eaux-fortes de i 63 o
à 1637. — Les Feux <f artifice. — Influence de Dominique Barrière. — Les eaux-
fortes de i 65 i à 165 3 .
Conclusion.
Appendice. — Documents inédits. Catalogue raisonné des tableaux, dessins et gra¬
vures de Claude.
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BIBLIOTHÈQUE INTERNATIONALE DE L’ART
SOUS LA 'DIRECTION DE
M. EUGÈNE MÜNTZ
LES DELLA ROBBIA
LEUR VIE ET LEUR CEUVRE
PAR
J. CAVALLUCCI il ÉMILE MOLINIER
Professeur à l'Académie des Beaux-Arts de Florence. 11 Attaché à la ConserratlOB du Musée du Louvre.
Un magnifique volume in- 40 , illustré de nombreuses gravures dans le texte
et de trois eaux- fortes.
Prix broché , 30 fr, — Riche reliure à biseaux, 35 /r.
25 exemplaires sur papier de Hollande, 60 /r.
CHAPITRE PREMIER
Luca délia Robbia — Ses débuts. — Erreurs de Vasari : les prétendus travaux de Luca 4 Rimini.
— Caractère de Luca : son admiration pour Donatello. — Premières œuvres de Luca : les bas-re¬
liefs de la tribune de l'orgue de Santa Maria del Fiore ; modèle d'une tête colossale ; bas reliefs du
Campanile de Giotto. — Caractère de ces sculptures. — Mysticisme et réalisme — Luca en con¬
currence avec Donatello : bas-reliefs pour les chapelles de Santa Maria del Fiore. — Tabernacle
de Santa Maria Nuova. — La porte de bronze de la sacristie du Dôme ; Luca collabore avec Mi-
cbelozzo et Maso di Bartolomco. — Le tombeau de Benozzo Federighi, évêque de Fiesole.
CHAPITRE II
Luca délia Robbia est-il l'inventeur des terres émaillées, comme l'a prétendu Vasari ? — Invrai
semblanée de cette assertion. — Les majoliques envoyées par les Mafatesta de Rimini à Laurent
le Magnifique. — Les * terres de Valence et les terres de Maiüoreque • du roi René d'Anjou. —
La Margarita preciosa de Pietro del Bono. — La terre cuite et l'architecture. — Le bas-relief
de Lorenzo de Bicci — Premières œuvres en terre cuite émaillée attribuées authentiquement à
Luca : la Résurrection ; l'Ascension ; la chapelle des Pazzi. — Bas-reliefs de la Via dell'
Agnolo et de San Pierino au Mercato Vecchio. — Maso di Bartolomeo, dit le Masaccio ; ses
travaux à Urbin ; le tympan de l'église San Domenico modelé par Luca. — Travaux à l'église de
San Miniato; chapelle du cardinal de Portugal. — Décoration d'Or San Michèle. — Majoliques
attribuées à Luca. — Médaillons exécutés pour les Pazzi — Dernières années de Luca. — Er¬
reur de Vasari au sujet de sa famille. — Ottavino et Agostino di Duccio.
CHAPITRE III
Andrea delta Robbia ; caractère de ses œuvres. — Sculptures en marbre attribuées par Vasari i
Andrea : Autel de Santa Maria delle Grazie hors d'Arezzo. — Autres œuvres d'Andrea conser¬
vées 4 Arezzoou dans les environs; les bas-reliefs du couvent de la Verna. — Décoration delà
loggia de San Paol», à Florence ; les dates inscrites sur l'édifice ne peuvent prouver que Luca a
collaboré à ce travail. — Médaillons de la façade de 1‘Hôpital des Innocents. — Travaux à Santa
Maria del Fiore. — Tympan du portail de la cathédrale cle Prato; bas-reliefs de Santa Maria delle
Carceri. — Bas-reliefs pour la cathédrale de Pistoie. — Bas-reliefs de Santa Maria in Pian de
Mugnone. — Décoration d'Or San Michèle. — Tabernacle de Santa Maria Nuova. — Retable du
couvent de l’Osservanza, à Sienne. — Buste d'enfant au Bargello. — Mort d'Andrea.
CHAPITRE IV
Les fils d’Andrea délia Robbia continuent l’œuvre de leur père; deux d'entre eux prennent la robe
de dominicain : Fra Luca et Fra Ambrogio. — Œuvre attribuée à Fra Ambrogio. — Travaux de
Luca le jeune, à Rome : Pavages des Loges du Vatican. — Luca travail le-t-fl seul 4 Rome? —
Les délia Robbia fabricants de poteries. — Voyage de Luca en France. — Giovanni délia Rob¬
bia ; les premiers travaux : la Fontaine de la Sacristie de Santa Maria Novella. — Cette œuvre
est digne d’Andrea et tout à fait dans sa manière. — Changements qui s'opèrent bientôt dans le
style de Giovanni. — Abus de la polychromie. — Travaux à Sant’ Ambrogio. à Florence. —
Bas-relief à San Silvestro, à Pise. — Giovanni signe quelquefois ses œuvres et les date presque
toujours. —■ Grand retable au Musée du Bargello. — Tabernacle delle Fonticine. — Caractère de
ces bas-reliefs ; décadence évidente. — Giovanni a dû employer de nombreux ouvriers. — Figures
de Santa Maria a Ripa. — La frise de l’hôpital du Ceppo, À Pistoie, doit-elle être attribuée à
Giovanni ? Benedetto Buglioni et Santi ; travaux de ces deux artistes — Santi a pu aider Gio¬
vanni ; tes trois fils de ce dernier.— Caractère des sculptures du Ceppo. — Bas-relief exécuté
par Filippo Paladini. — L'art des délia Robbia arrivé 4 son complet développement. — Imitation
d’œuvres d’autres sculpteurs ; imitation d’Andrea Verrochio : la Vierge de Santa Croce; les fonts
baptismaux de Cerreto Guidi. — Imitation de Rossellino. — Œuvres de terre cuite émaillée qui
ne peuvent être attribuées aux délia Robbia.
CHAPITRE V
Girolamo délia Robia en France. — Construction du château du bois de Boulogne. — Architecture
polychrome. — Girolamo « maître maçon » et Luca « maître émailleur et sculpteur » du roi de
France. Leur disgrâce ; Philibert Delorme. — Le Primatice rappelle Girolamo. — Travaux de
sculpture en marbre : Sépulture du cœur de François II, à Onéans, puis aux Célestins; sépul¬
ture des Valois. — Statue de Catherine de Médicis. — Mort de Girofa. — Sa famille établie en
France.
Catalogue descriptif de l’œuvre des délia Robbia, en Italie et dans les principaux musées de lEuropc
Le Puy , imprimerie de Marchessou fils , boulevard Saint-Laurent, 23 .
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